Cours de soutien

Cours de soutien.

De Guillaume Moraine

1 Cours de soutien ; gmoraine@gmail.com

Personnages :

Millie Lisbeth Clayton Averell Apolline Alfredo Elise Dédé Irénée Verne Bécassine Bibi Dominique

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Cliché 1 : doux rêveurs I Millie, Lisbeth, Clayton, Averell, Apolline, Alfredo, Elise, Dédé, Irénée

Millie : Une petite histoire comme rien du présent, comme rien qui s'accroche à nos manches.

Comme rien qui choque nos semelles.

Une petite histoire comme une parenthèse dans une plus grande.

La notre.

Lisbeth : On s'arrête et on louche. Et comme au travers d’une fenêtre de train, le monde avance quand même, et vite. Et comme nous à la fenêtre du train, c'est à autre chose qu'on pense.

Clayton : On ne pense pas aux vaches spectrales qui disparaissent dans du flou, comme elles sont apparues, dans du flou.

Averell : Et parfois c'est cette vache spectrale qui nous l'offre, cette histoire. Dans sa fraction de seconde d'existence à notre regard.

Clayton : Un clin d'œil en noir et blanc. Un mouvement de rumination d'où nous parvient une parole.

Apolline : C'est le premier sentiment, la première syllabe. C'est le "il était une fois". C'est le saut dans le passé d'avant notre passé. Et la vache alors était une magicienne.

Alfredo : Transformée de très belle femme à rigolote grosse vache parce qu'elle avait mal agi.

Et que cela n'avait pas plu.

Elise : Condamnée à voir les chars à bœufs changés en carrioles, changées en trains.

Condamnée à leur faire des clins d'yeux et des mouvements de rumination. N'est-ce pas là une lourde punition ?

Dédé : On se dit que la faute devait être grave, vue la punition. Transformée en grosse vache…

Irénée : Qu'elle soit justement punie, très bien. Ça clarifie l'histoire. Quelle peut être la faute d'une magicienne ?

Dédé : Sa magie n'est-elle pas une garantie de bien faire, et de faire le bien ? C’est gentil une magicienne !

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Cliché 2 : Irénée.

Irénée, Clayton, Dédé, Elise.

Irénée est en avant scène, Elise non loin d’elle. Dédé et Clayton discutent entre eux.

Irénée : Je suis sur un petit nuage ! Regardez-moi ! Je flotte dans le ciel, debout sur un nuage moelleux ! Un nuage gorgé de pluie, plein d’eau de rose ! Et pourquoi ? Parce que Clayton m’a regardée ! Moi ! Il m’a jeté un regard, un petit regard comme il en a le secret ! Et je l’aime ! Oooh ! Que je l’aime !

Clayton : Hey ! Irénée !

Elle se retourne, il lui jette un regard.

Irénée : Oooh ! Je fonds ! Je vole ! Je flotte ! Quel pied, ma chérie, quel pied !

Elise : ça te met dans un drôle d’état, quand même…

Irénée : Tu peux pas comprendre, grosse jalouse ! C’est Clayton !

Elise : C’est surtout un foutu prétentieux… attends de le voir vieillir, tu vas voir…

Irénée : Clayton ne peut pas vieillir ! Il est dans ma tête et dans mon cœur, comme ça, parfait ! Même avec du bide et les cheveux gras, il sera toujours parfait !

Elise : Tu es un peu stupide, là, tu sais…

Clayton : Hey, Irénée !

Regard, Irénée manque s’évanouir.

Irénée : Oooooh… Pitié, Elise, va le voir, dis-lui que je pense à lui… dis-lui que je veux l’épouser, que je veux porter ses enfants, que je veux le voir rentrer à la maison fatigué de son travail, et le bercer, et lui faire des petits plats, et pleurer avec lui, et rire avec lui, et fuir au Mexique avec lui !!

Elise : Oui, bon… T’as envie de sortir avec lui, c’est ça ?

Irénée : Tu peux lui dire ça… oui… ce sera plus simple…

Elise s’approche de Clayton et Dédé. Dédé s’avance et l’arrête.

Dédé : Tu veux quoi ?

Elise : Je veux parler à Clayton, de la part d’Irénée. Elle veut visiter le Mexique.

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Dédé : Pour parler à Clayton, faut passer par moi. Je suis son meilleur ami, je filtre.

Elise : Et moi je transmets les messages. Tu peux lui dire qu’elle l’aime bien ?

Dédé : Attends-moi là.

Dédé rejoint Clayton.

Dédé : Clayton, Y a Elise qui m’a dit qu’Irénée lui avait demandé de me dire de te dire qu’elle t’aimait bien.

Clayton : Oh. Et toi, tu en penses quoi ? Elle vaut le coup ?

Ils la regardent, tous les deux. Irénée s’en aperçoit et fait la belle.

Dédé : Peut-être. Je dirais… pendant une semaine…

Clayton : faut vérifier les motivations...

Dédé rejoint Elise.

Dédé : Y a Clayton qui m’a dit de te dire de dire à Irénée que lui aussi il l’aime bien, mais pas plus que ça.

Elise : ça ne va pas lui plaire…

Dédé : Il le sait. Il veut vérifier qu’elle est motivée. Il est très demandé, tu sais. Il sort tout juste d’une relation avec Lisbeth, et Bécassine est déjà bien accrochée.

Elise : Je vais lui dire.

Elise rejoint Irénée.

Irénée : Alors ? Alors ? Alors ?

Elise : Eh bien, y a Clayton qui a demandé à Dédé de me dire de te dire que pourquoi pas, mais pas trop maintenant, vu que sa rupture a été douloureuse, avec Lisbeth, tu sais… Et il est un peu avec Bécassine ; alors il veut la ménager.

Irénée : Cette Bécassine, quelle plaie… elle va me casser mon coup… va lui dire que… je sais pas… que Bécassine a un gros furoncle sur les fesses !

Elise : Je te croyais copine avec Bécassine.

Irénée : C’est de Clayton qu’on est en train de parler. Y a plus d’amie.

Elise : J’y vais alors. Un furoncle, c’est ça ?

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Irénée : Un gros, même !

Elise pour elle-même : Elle n’a plus aucun amour propre… Dédé !

Dédé s’approche.

Dédé : Alors ? Qu’est-ce que je dis à Clayton ?

Elise : Dis-lui de la part d’Irénée qu’elle lui souhaite bonne chance avec Bécassine, parce qu’elle a une vilaine maladie de peau, et qu’il paraît que c’est contagieux.

Dédé : Eh bé…

Elise : Eh oui…

Dédé rejoint Clayton.

Clayton : Alors ?

Dédé : Elle est motivée.

Clayton : C’est parti, alors, une semaine. Mais sans la langue.

Dédé rejoint Elise.

Dédé : En fait Clayton me dit de te dire de dire à Irénée qu’en fait il la trouve mignonne ; Et qu’il accepte de sortir avec elle pendant une semaine. Mais sans la langue.

Elise soupire et rejoint Irénée.

Irénée : Le verdict ?

Elise : Une semaine. Sans la langue.

Irénée saute de joie.

Irénée : Yeepeee !! Une semaine ! Une semaine rien qu’à moi ! Comment je vais les épater les copines ! Je sors avec Clayton ! Enfoncée Bécassine ! Aux vestiaires Lisbeth ! Irénée est dans la place !

Elise : Tu es pathétique, ma pauvre.

Irénée : Et déjà ça commence : Elise est jalouse.

Elise : Moi ? Tu rigoles ?

Irénée : Dis ce que tu veux, je te connais.

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Irénée rejoint Clayton, ils se prennent par la taille et les épaules, et ils sortent en se pavanant.

Elise et Dédé se regardent de loin.

Elise elle crie : C’est complètement faux, ce qu’ils vivent !

Dédé : Et alors ? Ils ont l’air contents.

Elise : Content ! C’est suffisant, pour toi ? Tu voudrais ça ?

Dédé : J’en sais rien. Je voudrais, ch’ais pas… avoir l’air comme eux, peut-être…

Elise : Même si c’est du flan ?

Dédé : ouais même. C’est mieux que rien.

Elise soudain espérant : Toi et moi… ?

Dédé : J’irais pas jusque là.

Il sort. Elise reste seule, presque à pleurer. Elle se retient. Puis regarde autour d’elle, s’essuie les yeux et sort en courant.

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Cliché 3 : Transactions tranquilles. tranquilles.

Dominique, Verne, Bibi

Dominique marche de long en large, très angoissée. Elle est en manque. Verne est posé un peu plus loin. Plus calme en apparence.

Verne : Dominique… elle ne l’entend pas. Dominique… elle ne réagit toujours pas.

Dominique ! Oh tu t’arrêtes un peu ?

Dominique s’arrête de marcher et le regarde.

Dominique : Quoi ? Quoi ?

Verne : Je te dis : arrêtes de tourner comme ça ! T’as l’air de rien ! Je sais que t’es pas bien, mais franchement là t’es ridicule ! Tu devrais au moins garder un peu de sang froid.

Dominique : T’as raison, Verne. Je suis pas bien ! Et c’est pour ça que je tourne ! Parce que sinon, j’ai le mal de bide qui va me remplir toute entière ! Tant que je bouge je le remue, et il me laisse un peu tranquille ! Elle se tord un peu tiens, rien que de te parler, là, j’ai l’estomac qui se tord dans tout les sens !

Elle prend une inspiration, et reprend sa marche.

Verne : C’est dommage, que t’en sois rendue là, quand même…

Dominique : Je ne te le fais pas dire.

Verne a sorti un paquet de chewing-gums, et en prend un. Il en tend un à Dominique, qui tourne.

Verne : Tu veux un chewing-gum ?

Dominique : Ouais je veux bien.

Elle passe devant lui, prend le chewing-gum, et continue sa marche en mâchant.

Verne : Tu veux une blague ?

Dominique : Non.

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Verne : C'est l'histoire de deux cacas qui partent à la guerre.

Dominique : J’avais dit non, Verne…

Verne : Et ils sont super motivés, les cacas… ils vont libérer leur pays ! Alors ils avancent sur le chemin, avec leur fusil, et tout.

Dominique : Verne, par pitié…

Verne : Et en chemin, ils traversent un village de cacas, et il y a une diarrhée qui est là, elle les voit, et elle les trouve super beau dans leurs uniformes kakis. Alors la diarrhée, elle s’approche, et elle leur demande : « salut les gars, je peux venir avec vous ? Moi aussi je veux faire la guerre ! » Alors les cacas répondent : « désolés, petite, c’est seulement pour les durs. » T’as compris ? « Seulement pour les durs ! » Dominique : T’es vraiment le roi des blagues pourries ; elle a une pointe de douleur. Aïe ! La vache ça fait mal. Elle s’assoit par terre.

Verne : Tu pensais que ça serait aussi douloureux, la première fois que tu en as pris ?

Dominique : J’ai mal. La vache, j’ai mal…

Soudain Bibi entre, un peu ailleurs.

Bibi : Salut. Vous allez bien ?

Verne : Ben, moi ça va…

Dominique : T’en as mis du temps, Bibi ! Tu te rends pas compte !

Bibi : Je l’ai pas fait exprès, mon père voulait me parler…

Verne : Il voulait te parler de quoi ?

Bibi : Il croit que je vends de la drogue, il a trouvé des cachets dans mon sac… il m’a un peu pris la tête, et il a gardé les cachets…

Dominique soudain très angoissée : Quoi ? Tu veux dire que t’a rien, là ? T’es venue sans rien ?

Bibi : Mon père croit que je vends de la drogue… C’est tout lui, ça… Qu’est-ce qu’il faut pas entendre…

Verne : Mais tu vends de la drogue, Bibi, non ? Ou alors y a quelque chose que j’ai pas compris ?

Bibi : Si, si…

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Dominique de plus en plus angoissée : Bibi ! Réponds ! T’es venue sans rien ?

Bibi la regarde, l’air de penser à autre chose.

Bibi : J’ai des caramels mous, si tu veux… tu aimes ça, toi ? Dominique la regarde, sans comprendre. Et toi, Verne, tu en veux un ?

Verne : Ouais, oh bah ouais je veux bien ! Il recrache son chewing-gum et le remet dans son emballage. Il prend le caramel mou et le mange.

Bibi : Croque pas, Verne, ça va coller tes dents, laisse-le fondre. C’est comme ça que c’est le meilleur.

Dominique : Je rêve… La vache j’ai mal… Bibi ! Dis-moi que t’as quelque chose pour moi !

Vous pouvez pas rester là à me regarder, sans rien faire ! Verne ! J’ai super mal au bide, et toi tu manges des caramels !

Verne se défend : Mais j’y peux rien, si t’as mal, moi… J’ai même pas de doliprane sur moi !

Bibi : Mon père m’a pris les cachets, il m’a dit qu’il allait passer à la pharmacie, pour savoir ce que c’est…

Dominique : Quelle plaie !

Bibi : Mais j’en ais récupéré quelques uns dans le sachet… expliquant à Verne il l’avait posé à côté du téléphone de l’entrée, pour y penser demain. Alors j’ai juste mis la main dedans et j’en ai récupéré…

Verne peu concerné, concentré sur son caramel mou : Ah d’accord.

Dominique : Tu en as, alors ? Donne ! Allez donne !

Bibi : Tu as les sous ?

Dominique : mais oui, tiens ! Elle lui tend des billets.

Bibi sort des cachets de sa poche, et les donne à Dominique. Celle-ci en avale un, et fourre les autres dans sa poche.

Dominique elle a toujours mal, mais est rassurée : Ah ! Ouf… Je vais boire un coup de flotte, ça va passer enfin… elle sort.

Bibi à Verne : Alors, ce caramel ?

Verne : Fameux ! Je te paye en blague, si tu veux !

Bibi : Une blague contre un caramel ?

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Verne : Ouais. Alors c’est un commissaire de police qui se rend sur les lieux d'un cambriolage, c'est un supermarché qui a été dévalisé. Un policier fait son rapport au commissaire :"Chef c'est bizarre, on a volé que 150 carottes et 2000 cartouches de cigarettes".

Le chef réfléchit un instant et dit : "hum... Ok ! À toutes les unités, on recherche un lapin qui tousse..."

Bibi après un temps : Je n’ai pas compris.

Verne : Oh, bah laisse tomber. Il se lève et sort rejoindre Dominique.

Le téléphone sonne. Bibi décroche.

Bibi la tête ailleurs, elle va mentir en pensant à d’autres choses, un caramel entre les doigts : allo ? Papa ? Oui… Non je suis au lycée … Ben si… Quoi, la pharmacie… Oh… Et alors ?

Ah… Bon… Non je les avais trouvés dans la rue, je savais pas ce que c’était… hein ? Non j’en ais pas pris… Non mes copains non plus… ben non ils savaient pas, alors… J’ai trouvé ça dans la rue, et j’en ais pas parlé… hein ? Oui oui je te promets… quand ? Ce soir, avec la police ? Ben si tu veux, je leur montrerais où… Je vais aller en cour, là. Oui... à ce soir, papa.

Bisous.

Elle raccroche. Puis enfourne le caramel mou, et met les billets dans sa poche.

Noir.

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Cliché 4 : doux rêveurs II Verne, Verne, Bécassine, Bécassine, Bibi, Dominique.

Verne : Une vache a l'air sympathique. Rien d'un monstre inconnu et effrayant ; comme un bouquetin ou un ragondin, eux sont actifs. Des trucs vivants qui bougent. On ne sait pas ce qu'ils vont faire.

Bécassine : C'est effrayant.

Verne : La vache ne fait rien, ne bouge pas…

Bécassine : et quand elle court c’est bizarre, ça semble contre nature.

Verne : Rien d'effrayant alors.

Bécassine : rien d'imprévisible.

Bibi : Donc il y a une conclusion : c'est une magicienne gentille, mais condamnée à une peine lourde.

Dominique : Comment s'extraire d'une telle incohérence ?

Bibi : Réfléchissez donc un peu. Je reviens.

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Cliché 5 : Millie et Bécassine.

Millie, Lisbeth, Bécassine Millie est une star, elle marche de long en large, un papier à la main. Lisbeth est effacée derrière elle.

Millie : Tu comprends quelque chose à tout ça, toi, Lisbeth ?

Lisbeth tout bas : Non, pas trop…

Millie agacée : Je n’ai rien entendu ! Parle plus fort, à la fin !

Lisbeth tout bas : Désolée…

Millie : Quoi ? Plus fort !

Lisbeth : Désolée !

Millie : Et avant c’était quoi que tu disais ?

Lisbeth : je sais plus…

Millie : ça ne devait pas être très intéressant, de toute façon…

Lisbeth tout bas : Il y a des chances.

Millie : Quoi ?

Lisbeth : Il y a des chances, je dis.

Millie : Bah tiens. Tu n’es vraiment pas très drôle, Lisbeth, tu te fais marcher sur les pieds sans arrêt. Je te dis ça parce que je suis ton amie. Mais il faut vraiment que tu réagisses, tu donnes l’impression de pas exister.

Lisbeth Tout bas : J’existe pas vraiment, en fait…

Millie : Quoi ?

Lisbeth : Non rien.

Millie : Je veux pas te vexer, mais je sais vraiment pas pourquoi on est amies, parfois. J’ai l’impression de te traîner derrière moi comme un boulet. Moi je sais les choses, tu vois, je les sens. Et l’avenir n’appartient pas aux boulets ! Si tu réfléchis trop, tu ralentis ! Tu t’arrêtes pour penser, pour regarder tes pieds… et paf les autres sont déjà loin devant toi ! Faut pas trop réfléchir, faut foncer. Et s’il y a de la casse, eh ben tant pis. C’est chacun pour sa peau.

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Lisbeth tout bas: ça a l’air bien, comme programme…

Millie reprend sa marche : Bon alors, le train A part de Toulouse à 15h00. Il roule à 65 km/h. le train B part de Paris à 16h00. Il roule à 30 km/h. Paris et Toulouse sont à 600 km l’une de l’autre. A quelle heure ils se croisent, les teufs-teufs ?

Je vois pas dans quel sens le prendre, ce truc.

Entre Bécassine, elle est furieuse. Elle ne voit pas Lisbeth.

Bécassine : Millie ! J’ai besoin de toi ! Tu es cruelle et tu es tordue !

Millie : ça va pas, non ?

Bécassine : Et j’ai besoin de toi parce que tu es cruelle et tordue !

Millie : Ah bah là d’accord ! Ya pas plus tordue que moi. Tu es tombée sur la bonne personne. Dis-moi tout, ma chérie.

Bécassine : c’est Irénée, cette punaise ! Cette limace bave sur Clayton depuis des semaines, et moi bonne poire je les présente ! Après ils se jettent des regards, et paf ! Au fossé Bécassine !

Clayton m’a jetée à cause de cette…

Elle sort une flasque, la débouche et boit.

Milie : Ecoute Bécassine. D’abord tu devrais peut-être arrêter ça… c’est vrai que ça fait style, au début… mais là c’est devenu une sale habitude, sans rire… c’est pas beau une fille qui boit…

Bécassine : Quand j’aurais besoin de ton avis, je te sonnerais. Je bois pas pour le style, mais parce que j’aime ça.

Millie : Tu bois depuis que ton père est parti. Tu me la feras pas, à moi.

Bécassine : Il est pas parti.

Millie : ironique Mais bien sûr, c’est ça… Alors, Irénée sort avec Clayton... Eh bien, elle remonte dans mon estime ! Et toi tu te le fais prendre ? Alors tu redescends… ligne droite dans la catégorie « pigeon » !

Bécassine : Je sais.

Elle boit.

Bécassine : Il faut que je rattrape le coup. Sinon tout le monde va me regarder en rigolant au lycée. Je supporterais pas. En plus cette … gnnn… elle a fait courir le bruit que j’avais une maladie de peau contagieuse ! Ça lui suffisait pas de me le prendre ! Il fallait qu’elle m’enfonce encore plus ? Et c’était mon amie, bon sang ! On fait pas ça à une amie !

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Millie : En fait, on le fait surtout à une amie ! Sinon ça n’a aucun intérêt…

Bécassine légèrement ivre : et pourquoi à la fin ! Tu sais toi ? Elle la regarde, méprisante tu sais toujours tout, de toute façon…

Millie exaltée: parce que c’est vivant, Bécassine ! C’est exaltant de se faire du mal ! De se provoquer les uns les autres ! De changer d’ami comme de robe, en fonction des saisons ! On sait pas où on va, de toute façon ! Alors autant s’amuser un peu ! C’est quoi les vraies valeurs ? Gentillesse ? Générosité ? Amour ? Solidarité ? Justice ?

Bécassine : Hein ?

Millie : Ils te parlent, ces mots ?

Bécassine très ivre, maintenant: J’ai l’impression qu’ils sortent d’un bouquin… je vois les définitions, mais c’est tout… ils sont pas concrets…

Millie : pour moi c’est pareil… nous ils nous parlent pas. Ou pas encore… On manque de repères, à notre âge… et les repères qu’on nous propose, c’est des mots vieux pour des vieux… Justice… gentillesse… ça marche pas ! Alors on se les invente, ces repères, ces codes qu’on comprend, nous. On le sent, ce qui nous rend heureux, on sait ce qu’on aime, ce qui nous exalte !… et alors là c’est les vieux qui ne comprennent plus !

Elle regarde Bécassine, qui s’est endormie par terre. La flasque à la main.

Millie : Tu veux vivre comme une grande, mais t’as pas les épaules, ma chérie. Et Irénée, cette petite voleuse de copain, je vais m’en occuper. Pour toi ma bécasse.

Elle sort. Lisbeth était toujours là, en fond scène. Elle s’approche de Bécassine, lui prend la flasque des mains, délicatement pour ne pas la réveiller. Elle y boit une gorgée. L’alcool fort la fait tousser.

Bécassine se réveille, encore ivre.

Bécassine : Rends-moi ça, Lisbeth ! Alors t’étais là, le zombi ? Et tu piques ma bouteille ?

C’est pas pour les petites filles, ça !

Lisbeth : On a le même âge.

Bécassine : Tu te trompes, Lili ! Je suis beaucoup plus âgée que toi ! Depuis que Papa est mort, beaucoup plus âgée que vous tous !

Lisbeth : Ton père est mort ? J’en savais rien… Je suis désolée, Bécassine.

Bécassine se rend compte qu’elle a dévoilé son secret. Elle est perdue, puis menace Lisbeth.

Bécassine : Ecoute bien, Lisbeth. Personne ne le sait, au lycée. Je veux pas que les autres me regardent comme si j’étais une extra-terrestre, t’as compris ? Alors tu gardes ça pour toi, ou moi, je te le ferais regretter toute ta vie !

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Lisbeth : Je ne dirais rien. Tu as ma parole.

Bécassine : Elle ne vaut rien, ta parole ! Elle a pas plus de poids que toi, ma pauvre ! T’existe à peine ! Le seul truc, c’est que tu es sorti avec Clayton. Ça personne ne comprendra jamais comment ça a pu arriver ! Mais heureusement il t’a larguée ! Chaque chose à sa place ! Et c’est moi qui te l’ai pris. Je l’ai remis dans le droit chemin, ce brave garçon ! Tu l’aurais transformé en vampire, à tous les coups !

Lisbeth elle relève un peu la tête : En fait, c’est pas tout à fait comme ça que ça s’est passé…

Bécassine : De quoi ?

Lisbeth : C’est moi qui l’ai plaqué. J’ai rompu. Et il a pleuré comme un bébé, ton héros. Et il s’est jeté sur la première Bécasse venue pour se consoler.

Bécassine est stupéfaite.

Lisbeth : et au petit jeu des rumeurs, je suis forte aussi, je connais bien les règles. Et je sais que si je racontais ma version de l’histoire au lycée, tout le monde te prendrait pour le second choix de ce petit Clayton. Second choix après moi ! Tu y survivrais ?

Bécassine : Tu ne vas pas faire ça.

Lisbeth : J’hésite…

Bécassine : Qu’est-ce que tu veux, en échange ?

Lisbeth : Tu me racontes tout, tu te livres, tu me dis comment ton père est mort, et ce que tu ressens, tu me dis tout. Tu te livres à moi.

Bécassine d’abord surprise par la demande, elle comprend la cruauté de celle-ci: Tu es écœurante.

Lisbeth la mouchant : J’ai beaucoup appris en te regardant faire ! Alors tu me racontes, ou tu vas vivre l’enfer jusqu’à la fac.

Bécassine hésite, elle ne veut pas se livrer, faire tomber ses barrières. Lisbeth s’assoit et attend. Bécassine est vraiment tiraillée. Elle regarde autour d’elle, inquiète. Lisbeth attend.

Enfin Bécassine abandonne.

Elle redébouche sa flasque et boit une gorgée.

Bécassine : T’es vraiment une… enfin… lâchant tout c’est moi qui l’ai tué ! T’es contente ?

Lisbeth s’installe plus confortablement.

Bécassine : On était en voiture ! Et moi j’ai fait n’importe quoi ! On s’est crié dessus ! Il voulait pas que j’aille à une fête ! Pour une fête ! On se disputait pour une fête ! Je criais et il 16 Cours de soutien ; gmoraine@gmail.com

criait ! Et à un moment j’ai tiré sur le volant pour lui clouer le bec ! On a foncé dans un arbre !

Et voilà, boum ! Et moi je suis là, et lui non ! Et je bois ! Oui je suis un assassin alcoolique !

Et je joue le jeu du lycée ! T’es contente ?

Elle s’effondre, la tête dans les mains. Lisbeth la regarde. Elle n’est pas triste pour elle.

Lisbeth : Marché conclu. Je ne dirais rien à personne.

Lisbeth sort.

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Cliché 6 : Sciences humaines.

Averell, Apolline, Millie.

Un coin de scène. Apolline est en train de lire. Son sac à ses pieds. Elle écoute de la musique, écouteurs et MP3.

Averell entre. Il la voit, mais ne sait pas trop où se mettre. Il voudrait lui parler. Il hésite.

Averell s’approche d’elle. Elle le voit mais fait semblant de rien. Il fini par s’asseoir à ses côtés. Elle soupire.

Averell : Salut Apolline.

Apolline : …

Averell : ça va ?

Apolline fini par refermer son livre. Et enlève ses écouteurs. On entend de la musique classique. Elle éteint son MP3, la musique s’arrête. Elle le regarde, attendant.

Averell : Je te dérange, peut-être. Je suis désolé.

Apolline : Qu’est-ce que tu veux, Averell ? T’as encore un problème avec les maths ?

Averell : non, non. Le coup de main que tu m’as donné, l’autre jour, il m’a bien aidé… Merci, au fait…

Apolline : De rien. Elle va pour remettre ses écouteurs.

Averell : C’est pour ça que je viens te voir. T’as été super sympa avec moi. Plus sympa que les autres, en tout cas. Et ça c’est cool.

Apolline reposant ses écouteurs : écoute, je l’ai fait comme ça. T’avais besoin d’aide, j’étais là, je t’ai aidé. C’est tout, faut pas chercher plus loin. Et pour les autres, ne t’embêtes pas trop avec eux. Ils en valent pas tellement la peine.

Averell : Ouais, c’est cool. Merci.

Elle reprend son livre. Il reste à côté d’elle. Elle essaye de continuer sa lecture. Mais Averell lui fait bien sentir qu’il a encore besoin de parler. Elle fini par reposer son livre.

Apolline dépitée : Bon. Averell : Bon… Apolline : Alors qu’est-ce que je peux faire pour toi, aujourd’hui ?

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Averell : Rien, oh rien du tout ! Enfin je veux dire… si, en fait… j’aurais besoin d’un conseil…

Apolline : Un conseil ?

Averell : Ouais… voilà, tu sais… j’ai pas beaucoup de succès avec les filles…

Apolline : Avec les garçons non plus.

Averell : Oui, mais ça c’est pas grave… je m’intéresse pas aux garçons…

Apolline : ce que je veux dire, c’est que t’as pas beaucoup d’amis. En plus de pas avoir de copine.

Averell : Oh ! Ça !… ah bah oui. Mais je suis plutôt solitaire, tu sais.

Apolline : Ils veulent pas de toi, surtout.

Averell : Je viens pour un conseil, pas pour me faire casser, en fait…

Apolline : Désolée. Un réflexe. Alors, il y a une fille ?

Averell : Comment tu as deviné ?

Apolline après un temps : C’est toi qui me l’as dit. Tu m’as dit que c’était par rapport aux filles. Alors pour moi, c’est qu’il y a une fille.

Averell : La vache, t’es forte. J’ai raison de venir te voir !

Apolline soupirant : ça dépend du point de vue.

Averell : Pourquoi ?

Apolline moqueuse : Faut être super forte, pour comprendre.

Averell : Oh… il réfléchit.

Apolline énervée : Putain ! Averell ! Accouche, qu’est-ce que tu veux ?

Averell surpris : Je voulais te demander comment on fait !

Apolline soudain inquiète : Comment on fait… quoi ?

Averell : Comment on fait avec les filles…

Apolline toujours inquiète : Et je répète la question : comment on fait quoi ?

Averell : Pour leur parler. Pour les intéresser, quoi…

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Apolline soulagée : Ah, ça… Tu me rassures.

Averell : Bah ouais. Quoi d’autre, sinon ?

Apolline : T’as pas une petite idée ?

Averell : Non… Apolline : Tu la voles vraiment pas ta réputation. Alors c’est qui ta princesse ?

Averell : Millie…

Apolline : Tiens ? Tu es attirée par une vraie méchante ? Tu aimes avoir mal ?

Averell : Avoir mal, je connais que ça. C’est peut-être la raison pour qu’elle m’attire.

Apolline étonnée : Ben dis-donc…

Averell : Quoi ?

Apolline : C’est la première fois que je t’entends dire un truc intelligent.

Averell ne sait pas comment prendre ça : Oh. Merci.

Apolline : Bon, pour causer à une fille. Faut pas jouer les Clayton, tu vois… ça sert à rien.

Surtout si tu veux une relation sérieuse. Tu veux ça ?

Averell : euh, ouais…

Apolline : Faut que tu sois sincère, et simple.

Averell : Simple, je sais faire.

Apolline : ça sert à rien de raconter des bobards, elle finira par s’en rendre compte. Et si quand t’es sincère, ça l’intéresse pas quand même, c’est que ça valait pas le coup. Alors, faire semblant, et raconter des bobards, c’est un gros piège.

Averell : un gros piège, ok.

Apolline : Quand t’as peur, t’as peur. Quand t’es timide, t’es timide. Quand tu aimes, tu aimes. Tout ça faut l’assumer, et voir ce qu’il se passe. Tu me suis ?

Averell : Ouais, je crois… Et ça marche pour toi ?

Apolline : Non. Averell : Bah… Alors… Y a un truc que j’ai pas compris, peut-être, encore ?

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Apolline : Non, t’as tout compris. Juste, les autres, ils fonctionnent au bobard. Moi non. C’est tout.

Averell : Oh… Apolline : et puis, tu as vu les gars de la classe ?

Averell : Mais si, quand même ! Y a… euh… Ah ouais…

Apolline : Donc voilà.

Averell : alors, pour millie, je dis quoi ?

Apolline : t’es honnête, c’est tout.

Averell : comment ?

Apolline : Dis-le moi, à moi.

Averell : Pardon ?

Apolline : pour voir ce que tu as compris.

Averell : Oh… Alors je m’approche d’elle, enfin de toi… et je dis… euh…

Apolline : Allez, un peu de courage !

Averell : J’ai envie d’être avec toi.

Apolline : Je veux être sûre de toi, et heureuse.

Averell : Moi je veux être avec toi.

Apolline : Tu peux me garantir que je serais en sécurité ?

Averell : Je peux essayer.

Apolline : est-ce qu’on aura des bébés ?

Averell : Eeeeuuuuhhhh D’accord ?

Apolline : Est-ce que tu sais mentir ?

Averell : C’est quoi ?

Apolline : C’est dire les choses que l’autre veut entendre, pour obtenir ce que tu veux.

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Averell : Ah oui, je suis super fort à ce jeu !

Apolline : Alors pourquoi je voudrais de toi, moi ?

Averell : Parce que je veux être avec toi. J’ai bon ?

Apolline sortant du jeu : T’es paré. Millie va fondre. Elle ne supporterait pas de sortir avec plus malin qu’elle. T’as toutes tes chances.

Averell : cool. Merci.

Apolline : Je t’en prie.

Elle sort.

Averell voit passer Millie. Il la rattrape, lui parle à l’oreille, elle rigole, il lui parle de nouveau, alors elle le gifle.

Noir.

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Cliché 7 : doux rêveurs III Dominique, Bécassine, Averell, Alfredo, Clayton, Verne, Elise, Irénée, Dédé, Millie, Bibi, Apolline

Dominique : Elle a agi, voilà. Pourquoi pas. Elle a agi dans le bien.

Bécassine : mais les conséquences ont été plus terribles.

Averell : suffisamment terribles pour une telle punition.

Alfredo : Plus terrible que le mal originel dont elle a souhaité débarrasser le monde.

Clayton : alors c'est un accident c'est pas exprès.

Verne : elle est désolée elle pleure on la dispute quand même.

Elise : sourcils froncés, le doigt s'agite et pouf une vache.

Irénée : « c'est injuuuuste ! » meuglera-t elle toute sa vie !

Millie : non non non ça ne colle pas. Elle ne meugle pas et la peine est juste.

Dédé : C'est autre chose.

Millie : Peut-être oui.

Bibi : c'est cela ! Exactement ! Et elle ne meugle pas !

Bécassine : Ou elle meugle quand elle a faim !

Apolline : froid !

Bécassine : soif !

Apolline : quand elle a mal Bécassine : Ici elle meugle comme une vache !

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Cliché 8 : Lisbeth seule.

Lisbeth, des voitures.

Lisbeth est au bord d’une route. On voit les phares qui l’éclairent par intermittence. Les voitures passent souvent. On les entend.

Lisbeth : Les hommes, bilieux, de la foi jusqu’aux yeux. Se perdent dans un marais : la foule nauséeuse verte de gaz urbain.

Il n’est pas temps, dit-on, le vent au visage. Au bord du précipice.

Sculptée par l’air l’expression varie de droite à gauche, de l’intérieur à l’extérieur.

On regarde devant pas en bas. Le bas on le verra bien assez tôt.

Il est temps dit-on la goutte de sueur goût d’incertitude.

Un pas. On ferme les yeux de soulagement, quand il faudrait les garder grands ouverts de fascination.

On saute… ou on tombe. On saute… puis on tombe ! C’est un pas on saute pour tomber ! Ou on tombe pour avoir raté son saut…

C’est, je crois, une question de surprise.

On s’enfonce dans l’air ainsi qu’en un trop fluide sable mouvant.

Le vent s’engouffre dans le vêtement et tourne sur lui-même !

Manège de la tornade à fleur de son dos !

Les yeux pleurent mais les larmes ne coulent pas.

Elles s’envolent.

Elles nous rejoindront plus tard.

Le vent s’engouffre dans notre cri on respire trop beaucoup trop pour une fois.

Ne faudrait-il pas faire la planche pour expirer ?

Le ciel s’éloigne, la terre s’approche.

Bouge-t-on si l’on ne veut pas bouger ?

On croise les bras on fronce le sourcil on reste immobile, buté. C’est donc le monde qui tourne, pas nous.

Si l’on marche sur terre c’est parce que la terre nous éloigne du lieu que l’on veut atteindre. Si l’on court c’est parce qu’on est pressé.

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S’il n’y a pas de choix dans la chute c’est parce que le ciel s’éloigne trop vite et qu’il n’y a pas de prise pour le retenir !

Autant donc ouvrir les bras pour accueillir la terre !

VIENS QUE JE T’EMBRASSE !

Lisbeth se jette en avant dans les phares des voitures. On entend les pneus qui crissent et les hurlements des klaxons.

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Cliché 9 : prétentions Alfredo, Clayton, Dédé.

Alfredo est assis sur la scène. Il somnole et essaie de garder les yeux ouverts. Il se lève, s’étire. Il se rassoit. Le sommeil est trop pressant, il a un mal fou à rester éveillé.

Alfredo : J’ai envie de dormir. C’est pas vrai... Je vais encore passer une journée pourrie. Va falloir écouter, noter, se souvenir. Et puis tout recracher à l’interro. Et à tous les coups je vais m’endormir quand ce sera important. Et je vais foirer l’interro. Vivement que maman retrouve un boulot. J’ai pas envie de passer ma vie au lycée…

Clayton entre, accompagné de Dédé.

Clayton, à Dédé : Attends-moi là, faut que je cause à Alfredo.

Dédé : Ouais, bon… Dis, y a pas moyen que tu me dises ça poliment ? Je suis pas ton chien.

Clayton : Qu’est-ce que tu me fais, là ?

Dédé : Je me dis que si on est copain, tu pourrais me parler normalement, pas comme si j’étais un employé, tu vois ?

Clayton : Si t’aimes pas être avec moi, personne t’oblige.

Clayton se dirige vers Alfredo.

Dédé hésite, commence à partir. Puis se ravise et attend, il finira par s’asseoir par terre pour patienter.

Mais de là où il est il entend tout quand même.

Clayton : Hey, Alfredo, ça roule ? La vache t’as une tête de mort-vivant ! Faut arrêter internet la nuit, mon pote !

Alfredo : ça fait des mois que j’ai pas surfé. Pas le temps.

Clayton : Ouais c’est ça. L’autre jour je t’ai vu connecté : tu discutais avec Verne, et il m’a fait lire tes messages. On a bien rigolé.

Alfredo : C’était pas moi. Inquiet Qu’est-ce que je racontais ?

Clayton : Ben, c’est pour ça que je viens te voir. Je voulais te dire que je te respecte, même si tu as des préférences différentes, tu vois… je suis super ouvert, comme garçon.

Alfredo : Oh… Attends, de quoi tu parles, là ?

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Clayton amusé : J’ai lu ta conversation avec Verne, tu vois, et ben tu l’as quand même dragué sur le net… Si tu fais ça en public, c’est que tu veux que ça se sache. Alors je viens te dire : pour moi, y a pas de souci, tu sors avec qui tu veux.

Alfredo surpris : J’ai dragué Verne ? Moi ? N’importe quoi…

Clayton : C’était sous ton pseudo, et tu lui parlais comme si tu voulais t’installer avec lui et fonder une famille… ça te dit rien ? Tu te rappelles pas ?

Alfredo : Je me rappellerai pas ? Je sais que je suis à l’ouest depuis que je bosse le soir. Mais franchement, oublier que j’ai dragué un mec de la classe… Ce serait un peu gros… Vous devez vous planter…

Clayton : Non. Ton pseudo. Ton profil, tout y était, même ta photo. C’est bizarre.

Alfredo : Il était quelle heure ?

Clayton : 9h00, à peu près.

Alfredo : Ah bah voilà. C’était pas moi. Je travaille à cette heure là.

Clayton : Bah alors ce serait qui ?

Alfredo : Sûrement mon père. Depuis qu’il a été viré, il s’ennuie. Il aime bien faire des blagues… Il a du croire que je trouverais ça marrant…

Clayton : C’est ton père qui a dragué Verne en ton nom, sur le net ? La vache… Et moi qui trouvais ma famille bizarre.

Alfredo : Qu’est-ce que tu veux, maintenant que je ramène de l’argent, y a plus d’enfant à la maison. Il a du vouloir faire l’ado, pour équilibrer la famille.

Clayton : Oh. C’est glauque. Bon, et moi qui venais te dire que c’était cool que tu préfères les garçons. Je me sens un peu bête, là…

Alfredo : pas de souci. Je suis un garçon super ouvert, moi aussi.

Clayton : cool.

Alfredo : mais, dis-donc, Clayton… pourquoi tu viens me dire ça, toi ?

Clayton : Quoi ?

Alfredo : Ben ouais. T’es le seul à être venu m’en parler. Tout à coup tu trouves ça important, alors que t’es pas vraiment le genre de gars à te préoccuper des autres. Sans vouloir te vexer, bien sûr.

Clayton : Mais qu’est-ce que tu veux dire ?

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Alfredo : Tu viens me parler, comme ça. Et Dédé tu le tiens à l’écart, comme si ça devait être secret, ce qu’on va se dire. En plus votre relation à tous les deux, Dédé et toi, ça a jamais été très clair…

Clayton : Attends, là, arrêtes ton délire !

Alfredo : Franchement tu fais ce que tu veux… mais ça te fait un drôle de personnage, quand même, d’un côté tu sors avec plein de filles, et tu t’en vantes tout le temps… et d’un autre côté, dès que tu crois que je préfère les mecs, tu viens discuter avec moi, en secret…

Clayton : Là tu te montes un gros film, Alfredo ! Sors ça de ta tête !

Alfredo Baillant : C’est marrant.

Clayton angoissé : J’adore les filles, je sors qu’avec des filles. C’est tout ! y a rien à cacher, y a rien à inventer ! Je viens d’accepter de voir Irénée, un peu ! je plaque tout juste Bécassine !

Je vois des filles !

Alfredo : Ah ouais, y a ça aussi…

Clayton très angoissé : Quoi encore ?

Alfredo : Tant que je t’ai sous la main, je continue, hein ?

Clayton se met en colère : Mais vas-y lâche-toi, je t’en prie !

Alfredo : Bah voilà, tu restes jamais longtemps avec quelqu’un… on pourrait dire que tu collectionnes…

Clayton : Mais carrément, que je collectionne ! Plus j’en ais, plus je suis content !

Alfredo : Mais on pourrait dire aussi que tu trouves jamais la bonne…

Clayton : Quel romantique !

Alfredo : Peut-être que la bonne, c’est pas une fille. T’y as pensé, Clayton ?

Dédé de loin : Sans rire ? T’es sérieux, Alfredo ? Tu crois que ce serait possible, ça ?

Clayton : Quoi ? Quoi ? T’as entendu ça ?

Dédé : Ce serait énorme ! Quand les autres vont savoir ça !

Clayton : Ils vont rien savoir du tout, tu vas la fermer, Dédé ! C’est tout ce que tu vas faire, tu vas la fermer ! C’est des conneries !

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Dédé : Mais ça explique plein de trucs, Clayton ! C’est super important pour toi, tu le vois pas ?

Clayton : Je vois juste que tu vas en manger une, si tu tiens pas ta langue !

Alfredo Baillant et se levant : Bon, je vais vous laisser, les mecs. Les querelles de couple, ça me fatigue.

Clayton : Ne crois pas ça, Alfredo ! Ne crois pas ça, Ok ? C’est des conneries !

Alfredo en sortant : Mais tu vis ce que tu veux. Clayton ! C’est ta vie !

Clayton : Mais c’est pas vrai, c’est pas vrai… faut pas que ça circule, ça !

Dédé : Bah pourquoi tu veux pas que ça circule !

Clayton : Parce que c’est une rumeur ! Et que pour le coup je vais morfler, avec cette histoire !

Dédé : Et si c’est pas une rumeur ! Clayton ! C’est une sacrée révélation !

Clayton désespéré : Fais pas ça, Dédé, pitié fais pas ça !

Dédé : Mais je te veux pas de mal, moi !

Clayton : Fais pas ça.

Dédé : Bon. Clayton : Merci.

Dédé : ça fait bizarre, de te voir fragile, comme ça. Je suis pas habitué.

Il le regarde. Clayton ne lève pas les yeux.

Dédé soupire.

Dédé : Allez, on y va. Viens.

Clayton : J’arrive.

Il le suit, tête basse.

Ils sortent.

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Cliché 10 : doux rêveurs IV Bibi, Lisbeth, Clayton, Dédé, Verne, Alfredo,

Bibi : elle ne sait pas sa punition ! Elle n’a pas de mémoire !

Lisbeth : elle ne sait pas sa condition de fausse vache vrai magicienne. Juste elle est rigolote grosse vache. C’est là sa peine !

Clayton : Oui pourquoi pas. Et sa punition c'est après cela : l'humiliation !

Dédé : « mon dieu j'ai été grosse vache rigolote tout ce temps ! Mais quelle honte » Verne : Et les autres magiciennes de rigoler très fort « oui c'est la honte ! » Alfredo : Non non non. Ca ne colle pas ! Elle était gentille magicienne ! Quelle honte doit-on ressentir à être vache ? Même grosse et rigolote ? Il est honorable d'offrir clins d'yeux et ruminations aux trains flous !

Clayton : Voyons, voyons…

Lisbeth : C'est autre chose.

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Cliché 11 : en classe.

Tous

Ils sont en classe. Averell, Apolline, Alfredo, Verne, Bibi, Dominique. Ils attendent et s’ennuient, ils passent le temps à chuchoter, jouer avec le crayon, se lancer des boulettes de papier. Alfredo dort. Dominique et Verne jette les boulettes à Averell. Apolline joue avec son crayon. Bibi envoie des sms. Lisbeth danse dans la classe, fantôme libéré.

Averell qui en a marre de recevoir des boulettes de papier : mais arrêtez ! Ça va là ! Ça devient lourd !

Dominique : Hey, le dalton ! Tu réponds pas à la provoc ? Tu veux pas te battre en duel ? Il est où Joe ? Boulette.

Verne : Hey cowboy ! Je t’attends dans la grand’ rue ! À midi ! On verra qui tire le plus vite !

Boulette.

Averell : lâchez-moi ! Je l’ai pas choisi mon prénom ! C’est à mes parents qu’il faut les balancer vos boulettes de papier !

Verne se lève, il joue les cowboys.

Verne : De quoi, pied-tendre ? Tu répliques ? J’crois qu’une bonne leçon te f’rait du bien !

Lève-toi et viens affronter ton destin, foie-jaune ! Les vautours vont se régler avec ton cadavre ! Et ouaip ! Tu peux m’appeler Lucky-Luke ! Debout, chacal !

Dominique : vas-y, montre-lui ! Mets lui la tête à l’envers au simplet !

Averell se lève aussitôt, mais il se retient de se battre.

Verne : Tu te débines, le dalton ?

Averell se rassoit. Il a honte.

Averell Hurlant : Mais foutez-moi la paix avec mon prénom ! C’est déjà assez la honte sans qu’vous en r’mettiez une couche !

Son cri réveille Alfredo. Celui-ci se redresse, de mauvaise humeur.

Alfredo : Averell !

Averell : Quoi !

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Alfredo : la ferme, Averell !

Averell : Non, mais tu vas pas t’y mettre toi aussi !

Alfredo : Me mettre à quoi ? J’dormais !

Averell désespéré : C’est bon, lâchez-moi.

Il se plonge dans ses cahiers, boudeur.

Alfredo : N’importe quoi. Il se rendort sur son bureau.

Dominique à Verne : Comment tu l’as mouché, le simplet ! Top !

Ils topent, Verne se rassoit, ravi. Dominique prend une pilule dans sa poche. Elle ne tient pas en place.

Dominique : Bon il fait quoi, le prof ! C’est fou ça ! Ils sont vraiment payés à rien faire… ça fait 20 minutes qu’on poireaute, là !

Elle se lève et saute sur place.

Dominique : sans rire, dans 5 minutes je me casse !

Apolline : C’est bon, Dominique. Arrêtes un peu, tu veux ? Tu me fatigues à t’agiter comme ça. Et puis il manque pas que le prof. La moitié de la classe est absente, aussi. Alors tu attends et tu tais. On va bien finir par savoir ce qui se passe.

Dominique continue de sauter sur place en regardant Apolline, elle fini par se rasseoir, mais se tortille sur sa chaise : N’empêche, marre d’attendre.

Apolline : Averell, tu as tes notes du dernier cour ?

Averell : Oui, je les ais, tiens. Il lui tend un cahier. Tu avais rien écrit ?

Apolline elle prend le cahier : Si si. Merci.

Averell ne comprend pas. Les autres s’en fichent.

Averell : Ben pourquoi t’en as besoin, si t’avais écrit ?

Apolline : Tu me les prêtes, ou pas ?

Averell : Bah oui. Mais j’me demande, c’est tout.

Apolline : Eh bien arrête de trop réfléchir, ça te fait pas du bien.

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Averell : C’est ma fête aujourd’hui. Super. Je vais pisser.

Il se lève. Au moment de sortir, il croise le reste de la classe. Irénée et Clayton bras dessus bras dessous, suivis de Dédé et Elise qui s’ignorent, Bécassine et Millie qui chuchotent.

Lisbeth est là aussi.

Averell : Bah où vous étiez, tous ?

Ils passent devant lui sans lui répondre.

Ils s’assoient, chacun son bureau. Et sortent leurs affaires. Seule Lisbeth est spectatrice de tout ça.

Apolline : Qu’est-ce qui se passe ?

Personne ne répond. Ils sont comme ailleurs, comme s’ils étaient seuls dans la classe.

Apolline : Oh ! Vous répondez ou quoi ? C’est quoi ce délire ? Vous arrivez tous en retard en même temps ! En plus vous tirez de ces têtes d’enterrements !

Ils sursautent.

Elise : Franchement, Apolline, tes blagues à deux balles, tu te les gardes !

Apolline : mais quelle blague !? De quoi tu parles ?

Millie : On était chez le proviseur. Comme on la vue en dernier, ou qu’on la connaissait un peu. Ils voulaient des informations.

Apolline : hein ?

Dédé : Ben avec l’inspecteur, quoi. Ils voulaient savoir des détails, comment elle allait. Et ce qu’elle a dit hier. Ce genre de truc.

Apolline prend un temps pour enregistrer qu’elle n’enregistre rien. Elle regarde les autres, qui étaient en classe à l’heure avec elle.

Apolline : Attendez, c’est moi qui ai un problème ? Vous pigez quelque chose à ce qu’ils racontent ? Y a que moi qui capte rien ?

Averell : Non, moi non plus je comprends pas.

Apolline : Bon, Averell pige pas non plus. Quelqu’un d’autre ? Quelqu’un qui comprend d’habitude ?

Averell pour lui-même : Je déteste le lycée. Il sort.

Dominique : Non, je comprends pas non plus.

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Verne : un inspecteur chez le proviseur ? Y a une enquête ?

Bécassine : Oui. Dominique : Sur quoi ?

Bécassine : Lisbeth est morte.

Dominique et Verne pouffent légèrement, comme si c’était une blague. Puis ils constatent que Bécassine est sérieuse. Alors leurs sourires s’effacent soudain.

Verne : Tu rigoles ? T’es bourrée ?

Bécassine : elle s’est jetée sous une voiture hier soir. Alors ils nous ont posé des questions ce matin. Et je suis à jeun, merci de t’en inquiéter.

Tout le monde se tait. Ils ne réalisent pas vraiment ce qui se passe. Lisbeth se lève, personne ne la regarde, elle change de bureau, et s’installe de nouveau.

Irénée : Elle serait rentrée chez elle, après les cours, et puis ressortie dans la soirée. Ils en savent pas plus.

Verne : La vache.

Soudain Bibi relève la tête de son portable.

Bibi : Quelqu’un a du caramel mou ?

Tout le monde se retourne vers elle. Elle balance ça sans raison apparente. Ils cherchent à faire le lien avec l’annonce.

Bibi : Personne ? C’est dommage. J’adore le caramel mou. Je crois qu’on devrait tous aimer ça… sans rire… c’est un petit moment de bonheur quand j’en mange. Imaginez ça : d’abord vous avez l’impression que c’est mastoc, que c’est volumineux, et soudain ça commence à couler sur votre langue, le caramel fond tranquillement, un nectar… un nectar chaud et doux et sucré. C’est une victoire sur la trouille, de manger du caramel mou. Parce que c’est gros entre les dents, et croquer dedans, c’est l’erreur à ne pas commettre. Alors qu’il faut juste attendre un peu et le laisser couler tout seul… moi je dis, la trouille faut pas se battre contre elle, faut la laisser couler entre nos dents. Et ça fond tout seul. Et c’est sucré.

Alfredo se réveille soudain, il se lève de son bureau et s’étire. Il les regarde, qui regardent Bibi.

Alfredo : Mais quelle ambiance, ce matin !

Tout le monde se tourne vers lui.

Clayton : Tu dormais, Alfredo ? T’as pas entendu ce qui s’est passé ?

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Alfredo : Non, rien du tout. Ch’uis un peu déconnecté. Avec mon père au chômage, je dois travailler le soir. Alors je suis un peu fatigué comme tu vois. Et qu’est-ce que j’ai raté ?

Clayton : Lisbeth s’est suicidée.

Alfredo : Oh. Bon. On a pas cours alors ? Parce que sinon je rentre dormir. Je bosse jusqu’à 22h00 ce soir.

Il commence à prendre ses affaires.

Bibi : Tu dormais. Tu n’aurais pas du caramel mou, toi ?

Alfredo : Ah non, ça j’ai pas, Bibi. Mais si tu veux ce soir j’te livre une pizza.

Bibi : Ouais… pourquoi pas… une Regina, sans oignons… avec un coca. Pour 21h00 ça ira ?

C’est mon père qui fait le repas, et franchement les cordons bleus je peux plus en manger.

Alfredo : no soucy. Je t’apporterais ça. Et bonne journée tout le monde.

Il s’apprête à sortir.

Elise : Whoh, ça devient vraiment bizarre, là ! Alfredo ! Tu t’en vas comme ça ? Tu as entendu ce qu’on disait ? Lisbeth est morte ! Et toi tu vas te coucher ? T’es à l’ouest ou quoi ?

Alfredo : oh, Elise, tu me prends la tête ou quoi ? Oui j’ai entendu ! Lisbeth s’est suicidée.

Que veux-tu que j’y fasse, moi je suis fatigué, et je la connaissais pas. Je vais pas faire semblant d’être triste si ça me touche pas. Je suis pas un hypocrite. Et toi ?

Elise elle cherche du soutien autour d’elle : Mais moi non plus ! je… enfin… c’est quand même particulier, non ? On devrait vivre un truc différent, aujourd’hui, non ?

Apolline : Tu le vis comme tu veux, Elise. C’est un peu loin de nous, quand même tout ça.

Dominique : Moi je la connaissais pas non plus. On est dans la même classe depuis le collège, mais on s’est jamais parlé. Alors quoi ? C’est obligé d’être triste ?

Elise : Je sais pas ! C’est tellement loin de nous, ça ! Notre vie c’est pas ça ! C’est pas aussi… réel, normalement ! Moi je dois juste grandir et apprendre des trucs. Accepter de faire la vaisselle, de ranger ma chambre, lire du Flaubert en râlant parce qu’est trop compliqué !

Irénée : Mais tu fais ce que tu veux, mon chaton…

Elise : Pas d’accord ! J’ai besoin de vous pour savoir comment m’y prendre, on a tous besoin les uns des autres pour apprendre à vivre. Alors si chacun fait comme ça lui chante, moi je suis perdue.

Irénée : Tu as besoin de nous ? C’est trop mignon.

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Elise : Je ne suis pas aussi vide que toi, Irénée. Toi, au-delà de ta dernière robe, ou de ton nouveau mec, y a pas grand-chose qui te pose question…

Irénée : T’es copine avec moi, pourtant, tu dois y trouver ton compte.

Elise : La force de l’habitude, sûrement. Toi ou une autre... Et c’est pareil pour vous tous.

Vous êtes pas amis parce que vous vous aimez bien, mais parce que vous êtes voisins de classe. Y a que des compromis dans vos amitiés.

Verne : tu utilises des mots vachement compliqués, pour ton âge.

Elise : lâche-moi, Verne.

Millie : Je suis assez d’accord avec Elise. On a pas de mode d’emploi pour savoir réagir à ça.

Lisbeth est morte, bon sang ! Comment on doit faire, maintenant ? Aujourd’hui je pensais pas avoir à gérer ça. Je cherchais juste comment pourrir la vie d’Irénée pour venger Bécassine.

Irénée : Hein ?

Millie : Oublie, c’est plus à l’ordre du jour.

Bécassine : J’avoue, ça me trotte plus dans la tête non plus, cette histoire. C’est fou comme c’est superficiel, ce qu’on vit.

Irénée : Mais de quoi vous parlez, les filles ?

Clayton : On a qu’à voter.

Millie : Voter pour quoi ? C’est quoi cette idée tordue ?

Clayton : Voter pour savoir si il faut qu’on soit triste ou pas.

Millie : C’est complètement idiot, ton plan.

Clayton : ça ou autre chose. Au moins on saura quoi faire, et on pourra passer à autre chose.

Millie : C’est toujours complètement idiot.

Dédé : y a qu’à voter pour savoir si on vote.

Irenee après un temps : Je comprends rien à ce que vous dites. Sérieux.

Becassine : On en attendait pas moins de toi, ma chérie.

Irenee : Mais qu’est-ce que tu as contre moi, à la fin, Bécassine ?

Becassine : Tu ne vois pas ?

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Irenee : Mais non !

Becassine : T’as été un poisson rouge dans une autre vie, c’est ça ?

Clayton : Laisse-la tranquille ! C’est pas de sa faute si tu as des problèmes de peau !

Irenee : Oh, d’accord, ça y est j’y suis… mais c’était une blague, Bécasse.

Dominique : Ah ? Elle a pas de furoncle, alors ?

Bibi : Qui a un furoncle ?

Dominique : Bécassine.

Verne : Mais non, justement. C’est Irénée, je crois !

Bibi : Ah c’est pour ça !

Dominique : C’est pour ça quoi ?

Bibi : Non rien.

Dominique : allez, dis !

Bibi se penche vers Dominique pour lui dire un secret.

Dédé : Alors on vote ?

Apolline : Il manque Averell.

Alfredo : Je ne vais pas me coucher, alors ?

Personne ne répond. Il retourne s’asseoir en soupirant.

Il y a un grand silence.

Dominique : On attend quoi, là en fait ?

Apolline : Averell.

Dominique : Oh. Un temps Pourquoi ?

Apolline : Pour voter.

Dominique : Ah, oui. Un temps Et on va voter pour quoi ? Ch’uis désolée, mais c’était un peu fouillis votre conversation. Et j’ai pas tout suivi.

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Verne : C’est clair, j’aimerais bien qu’on me dise, à moi aussi. Nan parce que je veux pas voter pour n’importe quoi. Se moquant C’est important le droit de vote, faut pas en user à la légère !

Dominique : T’imagines, on vote pour plus d’heures de cours, t’as pas compris et tu dis « oui » ? On aurait l’air fin !

Verne : Yes, ou pour prendre des cours de suédois !

Dominique : ou pour aller visiter le musée des timbres à Trifouillis-les-Oies !

Apolline : On va voter pour savoir comment gérer la mort de Lisbeth.

Verne : C’est quoi ces bêtises, on gère ça comme on a envie !

Apolline : ça fait partie du vote. D’ailleurs il faudrait dire les modalités, non ?

Bécassine : Oui. Ou on vote pour « chacun pour soi », ou on vote pour « partager ça ensemble ». Ça te va, Elise ?

Elise : ça me semble pas mal.

Verne Dubitatif : ouais… Et enfin, dernière question : pourquoi on attend cet empaffé d’Averell pour ça ?

Apolline : Parce que c’est tous ensemble, ou c’est personne.

Verne : Et si je préfère que ce soit personne, moi ?

Apolline : ça fait partie du vote.

Verne après un temps : ça tourne un peu en rond, ta logique…

Averell entre alors. Tout le monde le regarde. Il est gêné, vérifie que sa braguette est fermée.

Averell : Ben quoi. Qu’est-ce qu’il y a ? J’ai raté un truc ?

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Cliché 12 : Délibérations.

Tous.

Chacun est dans sa tête, à réfléchir. Le vote n’a pas encore eu lieu. Ils se sont donnés quelques minutes pour savoir ce qu’ils souhaitent vraiment.

Lisbeth se balade au milieu d’eux, en faisant des étirements, des pas de danse, elle est avec eux et patiente comme elle peut.

Lisbeth : C’est marrant comme je me sens légère tout à coup. Et pourtant c’est super dur ce qui m’arrive… C’est vrai quoi, j’étais super triste… au moins suffisamment pour vouloir mourir, et là, je me sens… bien. Elle s’arrête et regarde les spectateurs ça se dit pas, ça, hein ? On est pas bien, mort, normalement.

Eh bien moi, si. J’dis pas qu’il faut le souhaiter, mais ça fait quand même un paquet de soucis en moins.

Là ils réfléchissent, avant de voter, pour savoir s’ils doivent être tristes obligés ou pas.

Lisbeth s’approche de Bécassine.

Lisbeth : ça doit te faire bizarre, à toi, tu m’as haïe, hier, plus fort que tu n’as jamais haï personne. Et hop je disparais presqu’à l’instant où tu le souhaites! Deux fois en une vie, ça doit te faire cogiter !

Bécassine : Laisse-moi tranquille, c’est pas ma faute. Ni toi ni mon père. Je suis trop jeune pour être responsable.

Lisbeth : Et le petit moment où ça t’a fait plaisir, tu en fais quoi ?

Bécassine : je veux pas en parler.

Lisbeth s’approche de Clayton.

Clayton : Je pige pas pourquoi t’as fait ça, sans rire, c’est trop bête ! Tout ça parce que t’as jamais su rester simple dans ta tête ! Si tu étais restée avec moi, je t’aurais changé les idées !

Lisbeth : C’est ça, et je me serais mise aux mini-jupes et au maquillage vulgaire ?

Clayton : Mais tu serais en vie.

Lisbeth : ça on en sait rien.

Près de verne.

Verne : Faut que je pense à m’acheter le nouvel album d’Eminem… ou non je vais le faire télécharger par Dominique…

Lisbeth : ça a pas l’air de te perturber tant que ça, cette histoire…

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Verne : Non, pas trop… Tu m’en veux ?

Lisbeth : Pas du tout, je t’aimais pas non plus.

Près de Bibi.

Lisbeth : Les meilleurs caramels sont au beurre salé, Bibi.

Bibi : Je sais. Au sel de Guérande, c’est les meilleurs.

Lisbeth : Mais pourquoi t’es aussi triste, toi ?

Bibi : Je le sais même pas. C’est un peu vide dans mon cœur. Ça me fait du bien ton histoire, je me sens vivante.

Lisbeth : Fais gaffe, quand même…

Bibi : Tu me sers d’exemple à pas suivre, désolée…

Lisbeth : Si je peux t’être utile…

Près d’Averell.

Averell ne pense rien.

Lisbeth après un temps : Reste comme tu es, va… c’est attendrissant.

Averell : Merci… et il ouvre son cahier de cours.

Près de Dédé.

Dédé : Ch’uis désolé Lisbeth, je sais pas quoi penser… peut-être qu’il faudrait qu’on partage pour de vrai, histoire de se donner des mots. C’est quoi un deuil ? On va regretter quoi ? De s’être dit bonjour de temps en temps ? D’avoir travaillé ensemble sur un exposé ? C’est un peu triste, c’est sûr, mais c’est surtout.. effrayant…

Près de Dominique.

Dominique : La vache j’ai plus de pilules, faut pas que ça dure trop cette histoire, ou je vais me sentir mal…

Près d’Inérée.

Inérée : Un jour, mon prince viendra, un jour on s’aimera… mmm…mmm…

Près d’Apolline.

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Apolline : ça marchera pas, Lisbeth, cette histoire marchera pas, je suis désolée. Y en a pas un ici qui va oser voter « pour ». Ils ont trop la trouille de se dévoiler.

Lisbeth : Peut-être… ça n’a pas trop d’importance pour moi, tu sais… maintenant…

Dédé il se lève : Bon on y va ?

Tout le monde se redresse, comme d’un demi-sommeil.

Dédé : alors bon, on va voter. Par rapport au suicide de Lisbeth, pour savoir si on doit être triste ensemble… enfin, comment dire, partager quelque chose ici et aujourd’hui. Faire un deuil ensemble, inventer un truc à nous, quoi… Ou alors si il faut accepter qu’on sache pas quoi faire et que c’est comme ça, et que c’est chacun pour sa pomme… Tout le monde est au clair avec le plan ?

Tous : Ouais…ouais… à peu près…

Dédé : Alors on va voter…

Une sonnerie de portable retentit dans la classe, tout le monde cherche d’où elle vient.

Alfredo sort son téléphone de son sac, se lève et répond.

Alfredo : Oui allo ?... Ah salut…

Bibi : Alfredo, t’abuses, raccroche !

Alfredo : Ferme-là, Bibi, c’est ma mère !

Tout le monde lève la tête et écoute. La réalité vient d’entrer dans la classe.

Alfredo : Oui, maman… oui, oui… ça va…non je suis encore au lycée… pourquoi ? Non y a pas cours je sais, ben on a pas de prof alors… hein ? Non, dans la classe… si si… tous…

Hein ? Mais si ça va, j’te dis, arrête !

Quoi ? Si mon pull noir, je l’ai, dans mon armoire, sous les joggings. Pourquoi ? Ah ! Oui, l’enterrement… nan, ils en ont pas parlé… Mercredi ? bah d’accord… si si…

Hein ? T’as appelé mon patron de la pizzeria ? Mais pourquoi ? T’as demandé ma soirée ?

Mais maman ! Je t’ai déjà dit que je voulais pas que tu fasses ça ! Merde !

Que tu fasses quoi ? Mais ça, que tu appelles à ma place, par exemple ! Je passe pour quoi moi, après ! Pour le fils à sa maman ! C’est mon boulot, à la fin !

Mais non je m’énerve pas…

Là non, je reste au lycée un peu, on discute, avec les copains…

Que je rentre ? Mais on discute, maman ! Mais si c’est important !

C’est pas parce qu’on est ado qu’on raconte que des trucs inutiles, à la fin !

Hein ? bon… d’accord, d’accord… okay c’est bon j’ai compris…

Il raccroche. Il les regarde.

C’était ma mère.

Verne : oh ? Sans rire ?

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Alfredo : Elle veut que je rentre à la maison, elle s’inquiète et tout… alors bah… à plus tard, quoi… il récupère son sac à son bureau.

Clayton : Ouais, bon, bah je vais y aller aussi, alors… hein. Mes parents vont finir par se demander, aussi à la longue…

Irénée : Je te suis.

Averell : On y va, ça y est ?

Dédé : Ben, j’ai l’impression…

Bécassine : OK, on se voit demain, alors…

Elise : Et pour Lisbeth, alors ?

Tous se lèvent finalement, et récupèrent leurs sacs.

Dominique : à demain, les mecs…

Millie : à demain.

Ils se font la bise et sortent. Elise reste sur place.

Ne reste que Lisbeth. Elle prend son sac aussi. Et passe devant Elise.

Lisbeth : à demain !

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Cliché Cliché 13 : doux rêveurs V Apolline, Irénée, Irénée, Dédé, Averell, Verne, Dominique, Dominique, Lisbeth, Millie, Elise, Bécassine

Apolline : Peut-être… oui… la vie continue, plus rien ne sera comme avant.

Irénée : comme le temps d'être une belle femme. Et on est pas témoin de l'âge. Juste des trains dont le flou s'intensifie.

Dédé : Peut-être oui. Que c'est juste une histoire de temps.

Averell : En ce qui concerne la faute…

Verne : pourquoi pas l'accident ?

Dominique : l'erreur ? La négligence ? Pourquoi pas…

Verne : et puis la lourde rédemption ! D’accord…

Lisbeth : Mais une chose, une autre chose qu'on ne sait pas… c'est ensuite la magicienne sera-t-elle encore une très belle femme ?

Millie : Mais la vache alors baisse la tête pour renifler le mufle de son veau. Alors on sourit.

Elise : on décolle son nez de la vitre.

Bécassine : on se dit ouais bof rien à foutre… ce n'est pas si grave.

Noir.

Rideau

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