Le Bonbon Nuit 19

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Nuit

Mars 2012 - n째 19


jeudi 29 mars 21h — bus palladium le bonbon fête ses 3 ans

PROHIBITION PARTY tenue d’époque éxigée


édito Bonne Nuit Forcément, c’est toujours quand on l’attend le moins qu’elle arrive. Elle se pointe, comme ça, se glisse dans votre pieu et ne vous lâche plus de la nuit. Vous avez beau faire la crêpe, tordre vos coussins dans tous les sens, cette petite traînée vous possède et chuchote vicieusement son nom à votre oreille : l’insomnie. Se dégager de son étreinte demande tactique et savoir-faire. Inutile cependant de se taper un flip sur le forum Doctissimo, puisque Le Bonbon Nuit, dans son infinie générosité, vous lâche quelques idées pour combattre les troubles du sommeil. Solution 1, le subterfuge chimique : boire un lait chaud ou une tisane au tilleul. Si ça ne marche pas, gober une dizaine d’Euphytoses. Si ça ne marche toujours pas, attaquer les plaquettes de Stilnox. En ultime recours seulement, s’envoyer des dérivés d’opium… Solution 2, l’assommoir culturel : commencer ou recommencer l’Ulysse de Joyce. Regarder un film indépendant scandinave. Les nuits de France Cu, c’est pas mal non plus. À un degré moindre, il y a le saute-mouton d’Arte. Enfin, mention spéciale pour Au bout de la nuit, une étrange émission sur Direct 8 où de jeunes comédiens lisent des bouquins pendant des heures. Solution 3, la fuite noctambule : mettre le nez dehors. À 4 heures du mat’, il y a bien des rades ou des clubs encore ouverts près de chez vous. Avec en option, pour les célibataires, la possibilité de ne pas rentrer seul. N.B. : Vous pouvez aussi ne pas dormir et rêver éveillés. Vous serez alors complètement aptes à comprendre le discours de Sebastien Tellier, notre bonne étoile du mois… Michaël Pécot-Kleiner Rédacteur en chef adjoint

Rédactrice en chef — Violaine Schütz michael@lebonbon.fr

violaine@lebonbon.fr

| Rédacteur en chef adjoint — Michaël Pécot-Kleiner

| Directeur artistique — Tom Gordonovitch

tom@lebonbon.fr

| Président — Jacques de la Chaise

Photo couverture — Sébastien Tellier par Nicola Delorme | Secrétaire de rédaction — Anne-Charlotte Anris Régie publicitaire — regiepub@lebonbon.fr Lionel 06 33 54 65 95 ou Géraldine 06 86 63 34 00 | Contacteznous — nuit@lebonbon.fr | Siret — 510 580 301 00016 | Siège social — 31 bis, rue Victor-Massé, 75009 Paris 1—

Nuit



sommaire Le Bonbon Nuit

p. 05

le bon timing

la bonne étoile

Sébastien Tellier

p. 07

la bonne freak

SoKo

p. 11

Julien Pacaud

p. 15

Get A Room

p. 17

Etienne Jaumet

p. 21

paris la nuit

les bons producteurs

le bon sorcier

p. 25

bonbon party

Tristesse Contemporaine

p. 27

Kap Bambino

p. 31

Todd Borka

p. 35

Clément Meyer

p. 37

Gunther Love

p.41

le bon club

Studio 54

p.44

la bonne playlist

Greg Kozo

p.46

le bon mood

le bon duo

paris la nuit

le bon orga

le bon entertainer

p.48

le bon agenda

3—

Nuit


LA NU S DE IT

AT H

TE

BA

TOUS LES MERCREDIS

R OFFICIEL

TOUS LES JEUDIS

LES ATHLÈTES DE LA NUIT

THE 114 SHOW

AIR SEX CONTEST > 7 MARS BLIND TEST PONG > 14 MARS KARA YAOURT > 28 MARS

PARLEZ-VOUS ANGLAIS RELEASE PARTY > 1ER MARS DATE WITH ELVIS + BUTTSHAKERS > 8 MARS CHÂTEAU BRUTAL & TOYBLOÏDS > 15 MARS STICKY BOYS RELEASE PARTY > 22 MARS LOUIS AGUILAR & THE CROCODILE TEARS > 29 MARS

TOUS LES SAMEDIS

SPECIAL EVENTS

NOUVELLE SCÈNE DEPUTIES + PLASTIC RIOT > 3 MARS WHAT ABOUT PENGUINS + VADEL > 10 MARS MOTION OF HIPS + DJ SET JUVENILES - SARAH W_PAPSUN

PLUGGED

DIMANCHE 4 MARS

LA BOUM

SAMEDI 31 MARS

PARTY

DE GUNTHER LOVE

- TOTAL WARR > 17 MARS

LIQUID GAME + ROMY ROMY + DJ SET ADAM KESHER > 24 MARS

1 1 4 R U E O B E R K A M P F - PA R I S 1 1 - F A C E B O O K . C O M / C E N T Q U AT O R Z E - T W I T T E R . C O M / 1 1 4 P U M A S O C I A L


le Bon Timing Les événements à ne pas manquer Expo Tim Burton Après avoir voyagé de pays en pays (Australie, Canada), l’exposition Tim Burton prend place du 7 mars au 5 août 2012 à la Cinémathèque de Paris. On pourra y retrouver dessins, sculptures, courtsmétrages, costumes et accessoires des films réalisés par Burton… par centaines. Le tout sur 600 m2. Une vraie folie. À partir du 7 mars à la Cinémathèque

La Confusion de Marie Nimier et Karelle Prugnaud La jeune et talentueuse Karelle Prugnaud met en scène La Confusion, un texte de Marie Nimier (Prix Médicis 2004). Il y sera question de perte des repères, de folie, de questionnements et de dédoublements... Une pièce troublante qui remet en question les codes de notre vie quotidienne. À ne rater sous aucun prétexte ! À partir du 7 mars au théâtre du Rond-Point

Bye Bye Blondie Adaptation de son roman par son auteur, Virginie Despentes, ce drame raconte l’histoire de Gloria et Frances qui se sont rencontrées et aimées dans les années 80 et se retrouvent 20 ans après. Amour, drogues, sexe, émotion et rock’n’roll, tout ce qu’on aime chez l’auteur de Baise-moi devrait être au rendezvous, avec un casting en or : Béart, Dalle, Soko. Dans les salles le 21 mars

Emmanuelle de Héricourt Yaviz, le 4e album d’EDH, marque une étape importante dans le parcours de la chanteuse. Les onze morceaux du disque sont autant de tubes potentiels DR / DR / DR / DR

arrachés à des synthétiseurs à fleur de peau et à de solides lignes de basse. EDH produit une musique exigeante, à la fois savante et accessible, synthétique et humaine, machinique et sensuelle. Release party le 23 mars au Point Éphémère 5—

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la bonne étoile ® Violaine Schütz & Michaël Pécot-Kleiner Ω Stéphan Legois

Sébastien Tellier Blue Gourou

Quatre ans après la sortie du génial Sexuality,

Les tests de personnalité, ils consisteront en quoi ?

Sébastien Tellier revient avec My God is Blue, un

En des questions assez connes. Par exemple, si tu étais un plat, tu serais quoi ? Un rôti de biche ? Un civet de lapin ? Je n’ai pas fait de psycho, je ne veux pas demander des choses sérieuses, mais en fonction des réponses, je ferai mon choix. Bon, c’est sûr, si quelqu’un me dit que son kif c’est les nazis, je ne le prendrai pas. Tout cela formera la première étape. Ensuite, je donnerai à mes fidèles un nom, et puis, les plus prosélytes d’entre eux auront droit à des récompenses. Plus ils me ramèneront de fidèles, plus ils monteront dans la hiérarchie, et finalement les grands gagnants auront la chance de vivre avec moi. Ils m’accompagneront dans le bus, dans les hôtels, lors des concerts, pas dans la salle de bains mais presque…

album mystico-communautaire qui dépasse largement les cadres de la production musicale. Au Bonbon Nuit, quelque peu déçus par les affres du monde moderne, on a décidé de se convertir à l’Alliance bleue. Notre nouveau Dieu vous en dit tout. Quelle drogue as-tu pris pour avoir cette révélation bleue ? (Il est en train de se rouler un joint, ndlr)

C’est une drogue que l’on peut fabriquer à la maison avec des produits de la vie courante. Je ne peux pas encore vous en parler, c’est un secret réservé aux fidèles. Comment fait-on pour être un fidèle ?

Ce ne sera pas très dur. Il faut aller s’inscrire sur le site de l’Alliance bleue quand il existera, parce qu’il n’existe pas encore. Il y aura des petits tests de personnalité… et des tests de danse. On aura besoin d’une carte bleue ?

Non, ce ne sera pas payant, mais il y aura des appels aux dons. J’espère avoir des mécènes généreux. J’attends beaucoup de mécènes, et les gens qui m’enverront de l’argent seront certainement les mieux traités (sourire). 7—

Tu nous avais parlé de concours de danse aussi…

Oui les gens pourront se filmer en train de danser et nous enverront leurs vidéos. Si nous jugeons leur danse pertinente, ils seront aptes à aller plus loin avec le mouvement. Il faut comprendre que l’Alliance bleue s’offre au fur et à mesure, c’est un grand jeu de piste. Il faut faire des efforts, en échange, il y a plein de cadeaux comme des t-shirts, des bonbons ou des Pépito.

Nuit


Sébastien Tellier En parlant de Pépito, celui que tu as autour du cou, il vient d’où ?

C’est Jean-Charles de Castelbajac qui l’a dessiné spécialement pour moi, il est fait sur-mesure ! Il faut aller vers ses fantasmes. L’habit devrait faire le moine. C’est bien de comprendre quelqu’un sans avoir à lui parler, sans lui demander où il habite et tout ça. Parlons de ton illumination. Comment a-t-elle aidé à composer cet album ?

Après Sexuality, il a fallu que je me remette à faire de la musique, puisque dans le fond, c’est mon métier. Bon, j’ai pris mon temps, ça a pris quatre ans quand même… Bref, j’avais envie de faire un album sur la terre et je ne savais pas comment l’appeler : Fruits et Légumes, Agriculture… J’avais plein de sujets qui étaient plaisants, mais seulement quand j’ai essayé de composer avec ça, rien ne venait… Il y a pourtant de bonnes chansons avec les fruits et les légumes, comme celle des Beach Boys (Vegetables)…

Oui, ou celle de Bourvil sur la salade de fruits… Revenons à la terre.

Donc la terre, ça ne prenait pas. J’étais très embêté car en fait, je me dispersais entre la terre, l’agriculture, la vigne… J’étais dans une impasse, je me sentais mal, je faisais trois albums en même temps. Et puis j’ai eu cette transe, et quand je repensais à mes rêves bleus, là, ça marchait, il y avait de chouettes choses qui sortaient de mes mains, ça me parlait. Après, j’ai eu l’idée de l’Alliance bleue en écrivant les textes, je me suis dit que ce serait bien de créer un mouvement, une communauté, que le public ne soit plus le public mais des fidèles, et plus des clients. Je ne veux plus jamais être un vendeur. J’ai envie d’un partage, pas d’un acte commercial, créer un autre rapport. Je n’ai plus envie d’être un type rigide derrière une 8—

vitrine mais de plonger dans l’océan des fans. Être compositeur, au bout d’un moment c’est étriqué. Là, les concerts seront plus des rendez-vous de l’Alliance que des lives standards. Tu aimerais avoir un harem ?

Non, l’Alliance bleue n’a pas d’objectifs particulièrement sexuels, je ne vais pas essayer de ramener des minettes, il n’y a aucun rapport de force, de manipulation, d’autorité ou de domination. Ça dépendra des fidèles. S’il y a beaucoup de scientifiques qui viennent dans l’Alliance, alors l’ambiance sera aux tubes à essais, enfin je ne sais pas… S’il y a des terrassiers, des menuisiers, on pourra essayer de construire un domaine. Tu as toi-même été terrassier…

J’ai fait ce boulot, effectivement, pour la construction d’un stade, donc j’espère qu’il y en aura beaucoup. Mais j’espère qu’il y aura aussi des boulangers, des cuisiniers, des gens qui font des vêtements, d’autres qui savent construire des toboggans, des fontaines, des machines à eau… Si quelqu’un nous donne un terrain, il faudra bâtir quelque chose dessus. J’ai mon projet d’aller acheter des manèges en Russie, ce n’est pas très cher, mais le problème c’est de les ramener car c’est très volumineux. Il faudra qu’on me prête des camions, qu’on me paye des billets d’avion, tout va vraiment dépendre des dons. J’attends de voir quelle forme ça va prendre, je suis impatient. Ça va un peu ressembler au village des Schtroumpfs ton truc…

(Rires) Dans le genre petit village mignon, ma communauté ressemblera surtout au dessin animé des années 80 Le Village dans les nuage. La chanson du générique est très belle, et puis c’est un peu comme ça que j’imaginais l’Alliance, un endroit dans les nuages, un peu secret où on ne sait pas vraiment où on se trouve.

Nuit


Sébastien Tellier Tes albums évoquaient la politique et le sexe, celuici est plus apaisant, comment vois-tu son effet ?

Il est censé éveiller. Le maître-mot de l’album, c’est l’éveil, on décolle vers quelque chose de mieux. J’ai vraiment voulu coller au plus proche de mes trips bleus. Il y avait des accumulations de vérité qui venaient comme des raz-de-marée, et puis il y avait des grands trous, des montagnes. C’est ce que j’ai essayé de reproduire avec ce disque.

Il n’y aura pas de deadline dans l’Alliance. Si ça prend quarante ans de fabriquer une cathédrale, on le fera. Il faut respecter le rythme biologique des gens. Un monde trop gros pour nous tous est inutilisable. Il faut le réadapter. Ce qui serait intéressant aussi, c’est de créer une société qui se réunirait autour du spirituel et pas de l’argent. Et ça fait très peur. Ce n’est pas une secte, c’est une proposition. On peut aussi prendre l’album tout seul. Quel est ton point de vue sur l’Apocalypse prévue fin

L’Amour et la Violence, sur Sexuality, était une chan-

2012 ?

son évoquant la psychanalyse, est-ce que l’Alliance

Ça ne va pas se produire, c’est juste un changement de cycle. Cette histoire de dragons qui vont débarquer, ça m’amuse plus qu’autre chose.

bleue peut nous faire économiser une analyse ?

C’était en effet une chanson adressée à mon psy, dont j’ai changé depuis. Je lui disais : « Dis-moi ce que tu penses de ma vie, de mon adolescence. » L’Alliance bleue, il ne faut rien en attendre à part de l’amusement. Après parfois, quand on s’amuse, on va mieux. Je vais donner des conseils de vie, il y aura le livre bleu, mais ce n’est pas une philosophie ni une religion, plutôt une communauté. Des gens qui vont se rassembler dans un parc d’attractions pour adultes avec de la poésie, de l’aventure, des trucs profonds, des petits trains. C’est l’amusement et le plaisir qui sont recherchés.

On est en pleine période électorale, si un jour l’Alliance bleue prenait beaucoup d’ampleur et que tu devenais président, quel serait ton premier amendement ?

La peine de mort pour les trahisons amoureuses. Et ensuite, gratuité des pâtisseries. Sinon que les habitants des pays du tiers-monde qui veulent des TV et des chauffages viennent habiter ici et que nous, les Européens, comme on veut de l’espace et de l’aventure, on aille en Afrique.

Est-ce que c’est parce que ce monde ne te convenait

Dernière question, essentielle, un des morceaux du

plus que tu as décidé de réfléchir à autre chose ? (Il

disque s’appelle Pépito bleu, pourquoi pas Granola ?

se re-roule un joint, ndlr)

(Rires) Ça aurait pu, j’avais aussi pensé aux Oreo, que j’aime beaucoup. Les Anglo-Saxons auraient peut-être mieux compris.

Tout à fait. J’ai été très très malheureux jusqu’à mes 30 ans environ qui coïncident avec la sortie de Sexuality, qui a plutôt bien marché. Je me suis alors senti comme épaulé, récompensé par la vie, mais pas longtemps. Ça m’a donné des envies d’ailleurs mais qui n’était pas un ailleurs fait d’autodestruction, un truc sale et négatif. J’avais envie de positif. On est tous déçus dans le monde étant donné qu’il y a beaucoup de violence. Moi, j’aime bien le service, alors qu’aujourd’hui, on n’est pas trop dans l’accueil. J’aime pas la compétition, que ça aille trop vite, plein de choses comme ça. 9—

Sébastien Tellier — My God is Blue Record makers Sortie le 16 avril 2012 ≥ www.recordmakers.com

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la bonne freak ® Manon Troppo Ω Ilaria Orsini

soko L’intraterrestre

Dans les locaux de sa maison de disques, SoKo,

Disque aux dents tordues

26  ans, tignasse noir corbeau jusqu’aux hanches,

« Je ne raconte pas que des peines de cœur ou des problèmes. Le premier morceau, par exemple, I Just Want To Make It New With You, parle des cycles de vie et des schémas dans lesquels on retombe tous, sans tirer de leçons du passé, alors que j’aimerais que tout soit nouveau et différent à chaque fois. Après, oui, je parle aussi de l’amour et ça peut paraître triste. Mais First Love Never Dies, je l’ai écrite il y a cinq ans. Mon album, c’est ça, un mélange de tout ce que j’ai été, vécu, pensé, il y a cinq ans comme il y a six mois. »

embrasse chaleureusement tout le monde. Quand elle me claque la bise, elle glisse qu’elle me trouve très belle. On a connu pire comme entrée en matière…

Pourtant, la promo, c’est loin d’être son dada, et même si elle doit jouer le jeu pour la sortie de son album I Thought I Was An Alien, elle souffre. « Déjà, je suis anxieuse au dernier degré pour l’album, je mange plus, je dors plus… Alors, la promo en plus… C’est le concept qui m’angoisse, j’aime les rapports francs. Me confier, ok, mais j’aimerais en apprendre aussi sur l’autre. En interview, je suis enregistrée, regardée, et finalement, je raconte ma vie à quelqu’un dont je ne saurai rien à l’issue de la rencontre. C’est un rapport faussé. Cette sensation d’être chez le psy me met très mal à l’aise. » Il semblerait, en effet, qu’elle n’ait besoin de personne pour faire sa propre analyse. Son album est truffé de confessions, de souvenirs, de bouts de vie, d’avis sur le monde et l’amour, toujours teintés d’une grande honnêteté. Des lettres à ceux qu’elle aime et ceux qu’elle a aimés. Mais pas seulement, et elle tient à le dire. 11 —

D’aucuns trouveraient que cinq ans pour écrire un album, c’est un peu longuet. Mais quand on veut le faire vraiment, ça semble être le minimum pour SoKo. « J’ai pris du temps pour le faire parce que je suis perfectionniste. Mais j’aime pas le mot parfait, j’aime les choses imparfaites, j’aime ce qui est brut avec des petits défauts, c’est ça la perfection pour moi. Je trouve les gens aux dents tordues beaucoup plus beaux que ceux aux dents alignées. Voilà, je voulais faire un album aux dents tordues. » Raconter une histoire

Sans compter que, en plus de l’album, la chanteuse s’occupe aussi de ses clips, qu’elle réalise, et Nuit


SoKo

“Le soir, je préfère être sur Skype avec mon mec qui me lit des poèmes de Byron.” qui participent de cet univers qui lui est propre. « En fait, je filme tout le temps, des poignées de porte, des moulures, du gazon… Et j’aime bien raconter une histoire avec des images qui n’avaient pas forcément été filmées pour. Tout regrouper et créer une ambiance. Mais pour First Love Never Dies, je savais exactement ce que je voulais. Une histoire d’amour entre deux enfants. Et je savais précisément quel genre de p’tit mec il me fallait: un natif américain aux cheveux longs. Un jour, je vais au Farmers Market de L.A. et il est là, je vais le voir direct et lui demande comment il s’appelle : « My name is Trip Moon Star ». Ok ! C’était lui. Ensuite, j’ai demandé à Matthew (Gray Gubler) si on pouvait aller filmer dans le ranch de sa mère, au Nevada, et voilà. J’ai adoré les diriger. » Oui, parce que SoKo filme avec Matthew Gray Gubler. Ou se fait filmer par lui. Dure, la vie… « Matthew m’a dit que mon album était son album préféré depuis In Utero et Ok Computer, donc, c’est 12 —

mon plus grand cheerleader ! Et puis, avec lui, ça fuse et surtout, il fait les choses. Quand je lui ai proposé de réaliser le clip, il a été tout de suite réactif, on s’envoyait tout le temps plein de mails, et une semaine après, on le faisait. J’aime les gens qui parlent pas pour rien dire et qui créent. Après, que ce soit Matthew Gray Gubler, ça, je m’en fiche, c’est mon pote, rien à voir avec sa célébrité. » Actrice

Ça, c’est sûr, le star system, c’est pas le moteur de la jeune fille. Pourtant, elle est auteur-compositeur-interprète, réalise ses clips, et, comme si ça ne suffisait pas, elle est comédienne et sort à peine du tournage du film Augustine, avec Vincent Lindon. D’où les rajouts de cheveux. Remarquée dans À l’origine, de Xavier Giannoli, son interprétation avait été suivie en 2010 d’une nomination au César du meilleur espoir féminin. Mais ça non plus, ça ne compte pas vraiment. Elle admet que « c’est gentil et flatteur mais c’est comme si ça arrivait à ma meilleure amie ». Ce qui lui plaît, c’est de jouer, et elle en parle avec passion. « J’ai passé deux mois de dingue. C’est l’histoire d’une jeune fille malade qui va être diagnostiquée hystérique fin 1800. Chaque scène était plus dure que la précédente, j’ai l’œil collé pendant la moitié du film, le bras paralysé, je me vautre dans les ronces, je coupe le cou d’une poule, je me fais violer par un amant imaginaire… Et pourtant, c’était complètement génial et je me dis que c’est le film de ma vie, le rôle de ma vie, la chose la plus incroyable que j’ai jamais faite. » Agoraphobe

Nous, on se demande où elle trouve le temps de faire toutes ces choses et d’avoir une vie sociale normale. Le secret, c’est que SoKo n’a justement pas une vie sociale normale, elle aime rester chez elle, écrire, lire et « bouder dans son coin », mais la fête, les sorties et la nuit, très peu pour elle. Elle avoue elle-même se sentir octogénaire. « Ce soir, par exemple, il y a le pot de fin de tournage. Il n’y Nuit


SoKo aura que des gens que j’aime, pourtant je sais qu’à 23h, je serai au lit. Je sors jamais, je suis hyper asociale, les gens m’angoissent, je ne peux pas parler à plus de deux personnes en même temps. Et puis, j’ai vécu seule de 16 à 20 ans, et la fête, j’ai donné à cette époque-là, après je devais passer à autre chose. » Il faut savoir que son hygiène de vie ne s’accorde pas facilement avec la nuit et ses excès. En plus d’être végétalienne, SoKo ne fume pas, ne boit pas et ne se drogue pas. Convaincue qu’elle a en elle ce qu’il lui faut si elle veut être en transe ou se sentir extrêmement libre, elle trouverait absurde d’avoir recours à quoi que ce soit. Elle aime écouter son corps, dormir quand elle est fatiguée, manger - ce qui n’est pas mort - quand elle a faim et ne pas tricher avec son métabolisme. « Même le café, j’en bois pas, parce que ça ment à ton corps. » Normal, donc, de s’interroger sur l’attrait que peut avoir Paris la nuit pour une casanière pareille. « Ah mais moi, Paris, je m’en fiche. J’en suis partie il y a longtemps, j’ai habité à Los Angeles, je vais à Londres voir mon amoureux dès que je peux, donc Paris, j’y suis pas attachée. C’est pas parce que je suis née en France que je dois chanter La Marseillaise toute ma vie, je me sens aussi bien Française qu’Américaine ou Japonaise, je me sens de partout et de nulle part. Il y a trop d’endroits à découvrir pour rester attachée à une seule ville toute sa vie. Et avec ma musique, j’ai la chance de voyager, donc j’en profite. Quand je reviens à Paris, j’y suis bien puisque je suis bien partout, mais la ville en elle-même… c’est les potes que je suis contente de retrouver, c’est tout. Le soir, je préfère être sur Skype avec mon mec qui me lit des poèmes de Byron plutôt que d’être dans des bars à parler de rien avec des inconnus pour socialiser. »

loin à l’actualité. Sa nature anxieuse n’en supporte pas la violence et, pour se protéger de crises d’angoisse et de cauchemars obsédants, elle évite les informations. « J’ai arrêté de regarder les news à partir du 11 Septembre, j’étais traumatisée, je dormais plus, à chaque bruit d’avion, je pensais que c’était la fin du monde. Comme je suis hyper parano et complètement obsédée, même pétrifiée par la mort, je me protège. » Ça n’empêche qu’elle est concernée par son environnement et qu’elle trouve évident de faire attention à ce et ceux qui l’entourent : elle ne cache pas sa fibre écolo. « J’ai jamais voté de ma vie et je suis trop apolitique pour me prononcer mais, de mon côté, je recycle, je m’habille dans des friperies, j’achète des ampoules basse consommation, c’est bien le minimum ! Je comprends que certains s’en fichent, on est tous différents, et mille fois tant mieux, mais personnellement, je trouve important de faire des petits gestes pour prendre soin de l’endroit où on existe. » En cernant un peu mieux sa façon de vivre, loin des gens, mais près de la vie, je ne peux m’empêcher de me demander à quoi elle carbure et quelle est sa came. Tout le monde a un péché mignon. « La musique, la vie. Je sais ça fait bateau, mais c’est vrai. »

SoKo — I Thought I Was An Alien Because Plus de JT

Le 5 mars au café de la Danse, dans le cadre de

D’ailleurs, il n’y a pas que la foule ou les relations publiques que SoKo fuit comme la peste, elle se tient à l’écart de tout ce qui touche de près ou de

l’exposition A History of Bob Dylan

13 —

≥ www.facebook.com/soko

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Paris la Nuit  Julien Pacaud  julienpacaud.com



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les bons producteurs ® Irina Aupetit-Ionesco Ω Nicola Delorme

GET A ROOM! edit piafs

Pas une semaine ne se passe sans que le nom Get A Room ! n’apparaisse. Ce duo de Français a su remettre au goût du jour des perles oubliées grâce à des edits* audacieux et malins en faisant toujours preuve d’éclectisme. Rencontre avec ces défricheurs hors pair. Qui êtes-vous Get A Room ! ? Comment a commencé votre histoire ?

Jeff Lasson et Aurélien « Rove Dog » Haas. Nous faisions de la musique chacun de notre côté depuis dix ans. Aurélien : Nous nous sommes rencontrés à un mariage en 1998. Nous avons commencé à écouter de la musique avec mon pote Golden Bug (qui aujourd’hui est signé sur le label Goma) dans le canapé de Jeff. Nous avons commencé à faire des edits car c’était plus simple et qu’il n’y avait pas à brancher des machines et des synthés. Jeff trouvait des disques et moi je l’aidais à les éditer. Nous n’avions donc pas à nous prendre la tête sur la production au début. Après nous avons enchaîné sur des remixes et maintenant nous préparons un album.

de l’arpeggio, du New York, du Chicago, du Detroit, de l’électro… Nous sommes très éclectiques, nous voulons rester ouverts. Nous commençons à avoir une image un peu disco, du coup nous nous mettons à jouer des choses plus dark et de l’électro dans les clubs car, justement, nous ne voulons pas d’étiquette. Si nous avions eu une étiquette techno, nous nous serions mis à jouer de la disco !

Jeff :

Pourriez-vous décrire le son Get A Room ! ?

De la disco, de la new wave, de la musique black, 17 —

Quelles sont vos influences ?

Ça va de la chanson française à la techno en passant par la soul, la funk, la disco, la house, la tech house. Mais, nous avons surtout baigné dans la soul funk. Nous avons un ciment black music entre nous. Qui est pour vous le maître de l’edit ?

Il n’y en a pas vraiment car ils sont tous très irréguliers, c’est d’ailleurs ce qu’il y a d’intéressant dans l’edit. En revanche, il y a des pionniers comme Greg Wilson, DJ Harvey et Ron Hardy ; ils ont ouvert la brèche. Nous ne pouvons que nous considérer comme des suiveurs. Mais lorsque tu écoutes des trucs de Black Cock (le label de DJ Harvey, ndlr) aujourd’hui, ça ne te bouleverse pas, ça n’est plus ce que c’était, mais ça reste eux Nuit


Get A Room

“L’Edit, c’est juste un truc qui fait partiE d’une niche, comme le dubstep.” qui ont ouvert le truc. Il y a des milliards de morceaux dans la house que tu écoutes aujourd’hui en te disant que c’est pas terrible mais en fait; lorsque c’est sorti à l’époque, c’était juste la révolution.

où nous voulions. Il y a aussi le remix que nous avons fait pour DFA qui nous a donné du fil à retordre. Quel est celui qui résume le mieux votre travail ?

Il y en a plusieurs… Civil Defense qui est un edit de Danny Alias que nous avons sorti sur Kill The DJ et It Takes A Muscle car c’est celui qui nous a fait démarrer. Mais il y aussi The Dreamer car c’était un truc débile que nous avions trouvé sur la bande originale du film Le Marginal avec Belmondo. La musique était de Morricone, nous avons remixé le titre du groupe Blizzard qui se trouvait sur la B.O. Le morceau original est vraiment gay cuir des années 80 et nous l’avons complètement sorti de son milieu original. C’est le premier morceau que nous avons trouvé dans une brocante que nous avons sorti de son contexte et pour lequel nous avons eu plein de retours enthousiastes, dont un de Ivan Smagghe. Ça nous a donné envie de continuer. James Murphy a déclaré que le titre It Takes A Muscle ne quittait jamais son DJ bag et il semblerait que les producteurs de M.I.A. aient jeté une oreille dessus avant d’enregistrer le titre du même nom.

Qui fait quoi dans votre duo ?

Informations vérifiées ou fausses rumeurs ?

On se partage les tâches. Aurélien gère un peu plus la structure. Mais sur la partie décisionnaire, nous sommes à 50/50. Aurélien : Je suis un peu le manutentionnaire.

À propos de James Murphy, on sait qu’il le jouait lors de ses aftershows. Concernant M.I.A., on ne sait pas bien, elle ou Diplo (ndlr : le producteur du morceau It Takes A Muscle de M.I.A. ) ont pu l’entendre lors d’une soirée à Shoreditch, et en même temps le morceau original est assez rare… Quoi qu’il en soit, la coïncidence est un peu grosse car son titre est sorti quatre mois après le nôtre. Nous n’avons pas la prétention de penser que ça vient de nous… mais bon, si ça se trouve c’est une coïncidence… ou pas !

Jeff :

Quel titre de Get A Room ! vous a demandé le plus de travail ?

Ceux qui ne sont pas sortis car ils ne sonnaient pas bien et que nos edits étaient moins bien que les morceaux originaux. Mais sinon, nous avons beaucoup travaillé sur It Takes A Muscle, nous en avons quatre versions différentes en réserve avec quatre beats différents. Nous avons changé la rythmique plusieurs fois pour que ça sonne break. Pour les autres, nous sommes directement allés là 18 —

Comment se sont passées vos rencontres avec Trevor Jackson et Ivan Smagghe, avec qui vous travaillez aujourd’hui ? Nuit


Get A Room Aurélien : J’ai rencontré Trevor en 2004 car je l’avais booké pour la première soirée d’un label dont je m’occupais à l’époque. J’avais sorti un maxi de Play Paul que Trevor avait remixé sous le nom de Playgroup. Jeff : Nous avons rencontré Ivan Smagghe sur un trottoir devant chez Régine. Nous sortions d’une soirée I’m A Cliché avec nos potes dont le bloggeur Mimikaki qui nous a poussé à donner un disque à Smagghe. Six mois après, nous avons reçu un mail de lui nous disant qu’il avait retrouvé notre disque dans une pile, qu’il avait écouté l’edit de The Dreamer et qu’il avait aimé. Ça nous a motivés et nous avons continué à lui envoyer des trucs et puis il nous a demandé de faire Civil Defense qui est sorti sur Kill The DJ.

été la chute. Un Anglais qui était dans l’edit au début des années 2000 et qui viendrait maintenant en France serait très amusé. L’edit, c’est juste un truc qui fait partie d’une niche comme le dubstep… Les premiers maxis de disco ou de house de l’époque avaient toujours un edit sur la face B ; ce qu’ils appelaient le club mix était un edit. Ce n’est qu’avec l’apparition de la technologie que les remixes sont devenus des productions à part entière. En 2012, l’edit disco est mort, tout a été fait, d’ailleurs tout un tas de labels sortent des edits de house du début des années 90. L’edit aujourd’hui a une sonorité plus froide comme ce que fait Ivan Smagghe avec des sons de new wave, de cold wave… Quels sont vos projets futurs ?

Comment vous êtes-vous retrouvés à faire des compilations pour Colette ?

Nous sortions des maxis en vinyle, c’était assez compliqué, ça nous coûtait beaucoup d’argent, et nous avions bien vu que le vinyle commençait à être de plus en plus difficile. Nous avons rencontré à ce moment-là Clément qui s’occupe de toute la partie musique de chez Colette, qui lui, faisait déjà des compilations d’edit avec Ivan Smagghe. Nous avions vendu deux maxis qui étaient sortis chez Colette et, à la suite de ça, Clément nous a proposé de faire des compilations. On a d’abord une exclusivité de vente chez Colette et après, nous les vendons sur notre site et dans d’autres magasins. Nous gardons une exclu avec Colette car elle nous distribue très bien et qu’elle nous permet de toucher une cible très éclectique déjà bien filtrée. La cerise sur le gâteau est que Trevor Jackson fait les pochettes !

Nous sortons une compilation pour Colette, Dig Out Your Spade Volume II, qui sort début mars avec une pochette de Trevor Jackson et sur lequel on retrouvera un edit de Smagghe et un edit de It’s A Fine Line (Ivan Smagghe et Tim Paris).

Get A Room ! — Dig Out Your Spade Colette ≥ www.smalltimecuts.com

Faire de l’edit en 2012, est-ce toujours novateur ?

Plus vraiment… Mais en même temps, au moment où nous te répondons, nous voyons un poster pour une soirée Edit… En Angleterre, en 2003, c’était le truc nouveau, puis en 2007, ça a

* Edit : Relecture d’un morceau restant proche de

19 —

l’original (contrairement au remix). On vous conseille d’écouter ceux de Pilooski et de Todd Terje.

Nuit


20 —

Nuit


le bon sorcier ® Michaël Pécot-Kleiner Ω Bertrand Delous

éTIENNE JAUMET Analogique résistance

À l’heure du tout numérique et des DJ laptop, Étienne

pour autant perdre la base krautrock/synthé.

Jaumet détonne par sa pratique exclusive des synthés analogiques. Salué par les plus grands pour ses

Votre trip sur Carpenter à l’air d’avoir fait des

recherches sonores (Carl Craig a produit son premier

émules, puisque Kavinsky et Scratch Massive sont

album en 2009), ce sorcier distille une électro men-

allés chercher des influences chez ce réalisateur…

tale, exigeante et hédoniste. Le temps d’un entre-

(Sourire) On dirait, oui… Pourtant, le truc avec Carpenter, c’était juste à la base un délire entre potes pendant une jam session !

tien, nous sommes rentrés dans son univers. Tu formes avec Neman, d’Hernam Düne, le duo Zombie Zombie. Votre prochain album est pour avril, c’est

Passons maintenant à ta carrière solo. Celle-ci a

bien cela ?

réellement débuté en 2009 avec la sortie très remar-

Oui, il devait sortir en avril mais on l’a repoussé en septembre car Neman avait un emploi du temps trop chargé. On va d’abord le présenter en live en attendant sa sortie CD.

quée de ton premier album produit par Carl Craig,

Vous serez toujours dans la veine B.O. de films d’horreur ? (ndlr : leur dernier album reprenait des B.O. de films de Carpenter.)

Sur ce coup, on s’éloigne de la musique des films d’horreur, on va faire autre chose car on a été jusqu’au bout de ce style, la boucle est bouclée. Ce nouvel album n’a pas encore de nom mais je peux te dire qu’il y a aura une reprise d’un titre de Sun Râ, et que les morceaux seront assez différents les uns des autres. On utilisera pas mal de percus brésiliennes, ce qui donnera un petit côté exotica sans 21 —

Night Music. Ça t’a fait quoi d’être sous la lumière des projecteurs ?

Tout cela est venu progressivement, par le bouche à oreille, et ça me va très bien. Mon cheminement personnel a pris un certain temps. En 20 ans, j’ai joué dans pas mal de groupes comme Flop ou Married Monk, j’ai aussi connu des galères, j’ai finalement eu un parcours assez aventureux. Être reconnu pour son boulot personnel, c’est toujours bon à prendre. Tu joues encore du clavier avec une seule main ?

Pas avec une seule main, mais avec un seul doigt (rires). L’autre main me sert à bidouiller les sons. Je ne me considère pas comme un grand Nuit


Etienne Jaumet

“Je respecte beaucoup l’école psychédélique française.” instrumentiste, j’essaie de développer mes qualités autrement. Je joue beaucoup sur la réactivité et l’intuition, je gère les accidents comme tous ceux qui font des vrais lives. Un ordinateur, quand il plante, il plante. Avec les synthés analogiques, on est obligé de composer avec les bugs, on ne peut pas s’arrêter. En fait, c’est très euphorisant et créatif. Tu es également saxophoniste. Le lien n’a pas l’air très évident, mais on peut en trouver un entre le saxo et ta passion pour les vieux synthés ?

Mais complètement ! J’ai commencé à jouer du saxo quand j’étais môme dans une fanfare. Le saxo, c’est un instrument ingrat, difficile, car c’est avant tout une histoire de son. Tout est basé làdessus, tant que tu n’as pas le son, tu n’y arrives pas. Et avant d’avoir le son, il y a quelque chose qui doit se passer avec ton corps. C’est sans doute à cause de cette histoire de sonorité que je me suis intéressé par la suite aux synthés analogiques. Dans le fond, ces deux instruments sont similaires au niveau du souffle et de l’implication corporelle.

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Les analogiques ont bercé les oreilles des générations nées entre 70 et 80. Il y a un côté madeleine de Proust pour toi ?

Oui, gosse, j’étais surtout sensible aux jingles qui passaient à la télé, à la radio, à la musique des dessins animés comme Chapi Chapo. C’était les débuts de la musique électronique et il y avait des choses extrêmement délirantes aux heures de grande écoute dans les médias populaires. J’ai un souvenir marquant de Radioactivity de Kraftwerk, par exemple. Quelle claque ! En t’écoutant bien, on dirait que tu as un certain dédain pour le numérique.

Pas du tout ! C’est grâce au numérique que l’analogique est tombé en désuétude dans les années 90 et que j’ai pu m’acheter mon premier ARP pour une bouchée de pain dans un cash converters… Plus sérieusement…

Avec Internet et le format MP3, c’est sûr qu’aujourd’hui, tout va très vite. Attention, j’aime bien quand ça va vite aussi, je ne suis pas un adepte de la lenteur. Mais les jeunes qui débutent dans la musique n’ont plus le temps de réfléchir aux choses, de les comprendre, de les assimiler. Moi, à leur âge, quand un disque me plaisait, je pouvais l’écouter des dizaines de fois, je décortiquais toutes les pistes, je connaissais par cœur la pochette, j’analysais les textes… Il y avait un rapport très fort à l’objet musical. Cette approche presque obsessionnelle m’a permis de digérer des groupes que j’aimais quand j’étais ado : Joy Division, Front 242, Trisomie 21, Liaisons dangereuses, Ruth, Mathématiques Modernes… Tu viens de citer des formations de cold wave, d’EBM, de french synth wave… Ces différents courants forment une partie de tes influences musicales, exact ?

C’est un des socles de ma musique, en effet. L’autre grand moteur de mon inspiration vient du krautrock allemand et de l’école psychédélique française des années 70. Nuit


Etienne Jaumet Nous reviendrons un peu plus tard sur cette école qui te tient particulièrement à cœur. J’aimerais maintenant que tu nous expliques ce que tu as ressenti quand tu as composé Entropy. C’est, à mon sens, l’une de tes plus belles réussites.

Ah oui ?! C’est vrai qu’il a été mixé par pas mal de DJ prestigieux (ndlr : Cardini, par exemple, sur le Rexorama 2). En fait, ce morceau, je l’ai composé super vite, comme la plupart de mes morceaux d’ailleurs. L’enjeu sur Entropy était la manière dont les sons se mélangeaient, et finalement, il n’y avait pas besoin de beaucoup de notes pour que celui-ci soit habité. Je joue tout sur un la, je crois. L’entropie peut avoir plusieurs définitions, que ce soit en chimie, en physique, ou en philo. Celle que je retiens est celle d’ « un milieu chaotique qui possède ses propres règles et qui est cohérent ». Ça correspond complètement à mes sensations sur ce titre, car il s’est développé indépendamment de moi, comme s’il avait une existence propre. Que ce soit dans ton album Night Music ou ton dernier EP, Satori, tu as une nette tendance à minimaliser les rythmes. D’où te vient ce choix esthétique ?

Foncièrement, le rythme ne m’intéresse pas. Je préfère qu’il soit répétitif, je ne suis pas de ceux qui aiment les breaks… Ce que j’aime dans le rythme, c’est la pulsation bien plus que le kick. On oublie la pulsation car elle est répétitive, et du coup, j’occupe les corps avec. Ce dépouillement me permet de libérer de la place pour le travail des sons, qui est directement lié à l’aspect plus mental de ma musique.

son collectif Urban Sax et sa formation Gilbert Altman Lard’s Free, ont contribué à tout un mouvement krautrock psyché unique en Europe. Il n’y avait en effet rien de similaire en Allemagne, en Angleterre, en Belgique ou en Italie… Ce n’est pas d’un premier abord facile à écouter, mais ils ont poussé leurs recherches d’une manière très excitante et radicale, se situant toujours à l’avantgarde. Forcément, ils ne se retrouvaient pas dans l’univers discographique de l’époque, alors ils ont décidé de s’autoproduire, ce sont d’ailleurs les premiers à avoir monter des labels indépendants en France (ndlr : le label Disjuncta, entre autres.) On commence aujourd’hui peu à peu à les redécouvrir, notamment par le biais du label espagnol Wah Wah qui réédite certaines de leurs productions. Tu as récemment bossé avec eux, ça doit être une sorte de consécration, non ?

Oui, j’ai participé à la compilation Veterans of the French Underground meet La Jeune-Garde, dans la collection Zut-O-Piste sur le label Muséa. J’ai été très content de croiser le fer avec ces gens-là, nous avons la même approche de la musique, basée sur le plaisir. Pour clore cet entretien, quel est ton programme à venir ?

Pour l’instant, pas d’EP ou d’album en solo. Par contre, je vais tourner avec un ensemble qui s’appelle Le Cabaret contemporain et nous nous approprierons des œuvres de John Cage. On fera plusieurs festivals et quelques salles avec ce projet.

L’aspect mental de ta musique, justement. Tu faisais mention tout à l’heure de l’école psychédélique

Étienne Jaumet

française. Je crois savoir qu’elle a une grande impor-

— Veterans of the French Underground meet La

tance pour toi. Tu peux nous la présenter ?

Jeune-Garde Muséa

C’est un courant de musique expérimentale qui a émergé dans les années 70. Pour te citer quelques noms, Richard Pinhas (ndlr : disciple de Deleuze), avec son groupe Heldon, et Gilbert Altman avec

— Satori Versatile

23 —

— Night Music Versatile ≥ myspace.com/etiennejaumet

Nuit



Bonbon Party | Tous les vendredis au Bus Palladium â„Ś Antoine Garnier / Face 2 Bus


26 —

Nuit


le bon mood ® Michaël Pécot-Kleiner Ω Eric Beckman

tristesse contemporaine Esthétique du Spleen

Tristesse Contemporaine entretenait les espé-

Oui d’ailleurs, pourquoi tu portes un masque d’âne

rances depuis leur single 51 ways to leave your lover

pendant tes concerts, Mike ?

en 2009. À l’écoute de leur premier album, elles ne

M. : Au début, j’avais demandé à Narumi qu’elle me file un masque de cheval, mais il était beaucoup trop lourd et je n’arrivais plus à bouger la tête (rires). On a trouvé ce masque d’âne qui était plus à ma taille. Il est tout triste avec ses grands yeux vides mais je l’aime bien. Et puis, un âne, c’est un peu nous, il nous symbolise bien, Narumi, Leo et moi. N. : Ce masque, c’est la porte d’entrée dans notre univers. Il faut dire aussi que Mike a toujours aimé se déguiser avant de monter sur scène.

seront pas déçues puisque la ligne électro rock / dark wave entraperçue il y a trois ans a été respectée, voire enrichie. Nous les avons rencontrés dans un bar où la patronne avait décidé de mettre Whitney Houston en toile de fond. Tristesse contemporaine, vous avez dit ? Mais où est passé Leo, le troisième membre de votre groupe ? Narumi : Il n’a pas pu venir aujourd’hui car il est en tournée en Allemagne avec Slove. Mike : C’est pas grave, on répondra à tes questions à sa place.

Pour revenir à ma deuxième question et sur le fait que vous n’êtes pas des nouveaux venus, vous pouvez rapidement vous présenter à nos lecteurs ?

Quand on lit ce qui se passe autour de vous, on a l’impression que vous êtes énigmatiques, que l’on ne vous connaît pas très bien. Pourtant, vous avez un background important dans la musique, vous n’êtes pas des nouveaux venus… M. : Oui, tout ce mystère n’est pas voulu, c’est la presse qui nous décrit comme ça, c’est complètement indépendant de nous. N. : C’est peut-être à cause de Mike et de son masque d’âne !

27 —

M. : J’ai été le chanteur du groupe Earthling (ndlr : écouter l’excellent album Radar) dans le milieu des années 90, et après j’ai rejoint Dirty Beatnik où j’ai vécu des expériences très rock’n’roll. Ensuite, j’ai rencontré Narumi lorsque j’ai bossé avec Telepopmusik. N. : Oui, on s’est connus au sein de Telepopmusik, à Tel Aviv, où on avait deux semaines de résidence ensemble. Moi, j’ai fait le conservatoire de musique classique au Japon quand j’étais petite, et ado, j’avais un groupe de reprises. On copiait Nuit


Tristesse Contemporaine The Cure et un groupe underground japonais qui s’appelle Staline. Staline ! ? N. : Il n’y a pas beaucoup de gens qui connaissent ce groupe, même au Japon. Par exemple, il y a une chanson qui s’appelle Tempura (ndlr : ce sont des beignets japonais) où les mecs gueulent tempura pendant tout le morceau. Enfin… tu vois le genre….

ça avec un artiste new-yorkais qui fait des illustrations bizarres. N. : On a montré nos idées à Clovis, et il a dit « C’est sympa, on dirait ce que fait ma mère… » M. : Oui, on était dubitatifs sur les peintures de sa mère, on y croyait pas trop. N. : Finalement on a vu ses peintures et on a trouvé ça carrément génial. On les utilisera encore pour le prochain maxi. Votre premier single est sorti en 2009 chez Fonda-

Et Leo, il a des nouvelles de Jay Jay Johanson ? (ndlr :

tion Records, le label de Danton Eeprom, et votre

Leo était son guitariste)

album sort chez Dirty. Comment ça se fait ?

Ils s’appellent souvent et se voient de temps en temps. Lorsque Jay Jay passe à Paris, il lui demande de jouer avec lui. N. : Leo est aussi l’un des fondateurs de Slove et d’Aswefall…

M. :

M. :

Parlons du nom de votre groupe, il sort d’où ? N. : On a cherché pas mal de noms et on voulait que ce soit en français, c’était important pour nous. Un jour, Leo est tombé sur Tristesse contemporaine, un bouquin d’un philosophe belge qui s’appelle Hippolyte Fierens Gevaert. Ça nous a tout de suite plu. Vous lisez beaucoup, je me trompe ?

Pour moi, l’évidence depuis que je suis jeune, c’est la littérature de la Beat Generation. N. : J’adore Murakami, Araki, Fitzgerald, on apprécie aussi énormément Salinger… M. : Oh yes ! Salinger ! N. : Les livres de Bukowski, la littérature française du XIXe… Chaque auteur renvoie à d’autres auteurs, et c’est vrai que la lecture tient une place importante dans nos vies. M. :

Penchons-nous maintenant sur votre album, en commençant par le visu sur la pochette. Qui l’a fait ? M. : C’est la maman de Clovis (ndlr : l’un des boss

du label Dirty). Nous au départ, on voulait faire 28 —

Danton a eu un coup de cœur sur 51 ways to leave your lover, et il en a fait un super remix. Du coup, c’était évident que l’on travaille ensemble. Après, pour le format album, c’est une histoire différente. On s’est tous les trois concertés pour aller chez Dirty, on les a contactés, ils ont accepté. Tant mieux, car on apprécie énormément ce qu’ils font.

Pilooski a produit votre disque, vous l’avez rencontré comment ? M. : Ah

ça, faut demander à Narumi. J’ai un magasin de sapes vintage juste à côté de son bureau, et je passais souvent à son studio. Il était au courant qu’on faisait de la musique, il nous a demandé d’écouter et ça a collé.

N. :

On a toujours besoin d’étiquettes pour identifier un groupe. Vous pouvez me citer quelques-unes de vos références ? M. : Je n’aime pas trop penser que l’on puisse faire de la musique qui ressemble à d’autres trucs, mais pour moi il y a un lien évident avec un groupe comme The Wake. Une fois, Leo m’a joué On our honeymoon et je me suis dit « Aaaah merde, mais c’est trop bien ». J’espérais juste que ce groupe ne soit pas un groupe actuel. Quand j’ai su que The Wake, c’était fin 70, début 80, j’ai eu un grand ouf de soulagement (rires). The Nuit


Tristesse Contemporaine Young Marbles Giants sont aussi une source d’inspiration, j’aime ces groupes qui ont une énergie trash et sombre. Chaque fois que je suis en studio, c’est ce que je veux écouter, une bonne ligne de basse et des belles mélodies… N. : On essaye de retrouver des sensations avec le Velvet aussi. M. : Voilà, c’est le bon mot, des sensations ! Plutôt que des références, ce sont des sensations, des sensations avec le Velvet, avec Suicide… Votre album comporte pas mal de tubes en puis-

Il n’y a pas une histoire d’amour derrière Paris ou quelque chose comme ça ?

(rires) Moi oui… En fait j’ai passé ici trois mois il y a longtemps avec une fille française. Paris et l’amour des filles françaises sont très liés (sourire). N. : Moi, j’ai vraiment voulu connaître ce pays car j’étais obsédée par la langue française. Quand j’étais étudiante, j’adorais les films de la Nouvelle Vague, j’aimais Cocteau, les compositeurs comme Debussy, je suis venue ici en 94 pour apprendre le français et finalement je suis restée. M. :

sance, comme I didn’t know, Daytime Nighttime ou Hell is the other. À propos de ce dernier, vous pensez

Quand vous sortez à Paris, vous allez où ?

aussi comme Sartre que « l’enfer, c’est les autres » ?

oui… euh… oui et non (rires). Oui parce que j’adore cette phrase et j’en ai une interprétation un peu personnelle : si tu passes ton temps à regarder ce que les autres font, et à vouloir ce qu’ils ont, tu deviens fou. N. : C’est un peu paradoxal car on est obligés de vivre en pensant aux autres, sinon tu es un gros connard d’égoïste. Après, humainement, si tu t’attaches trop à cela, c’est impossible !

M. : Oh moi, j’essaye de me calmer, j’ai fait beaucoup de conneries en Angleterre… N. : On est pas gâtés avec les clubs à Paris je trouve. Je crois qu’il n’y a pas assez d’espaces ici, il n’y a quasiment aucun club à Paris qui ait une bonne hauteur de plafond pour se sentir à l’aise. En plus, les Français aiment bien se rentrer dedans, s’insulter, se pousser, les gens sont un peu désagréables… On préfère aller aux soirées organisées par nos potes.

À présent, Paris. Vous avez tous les trois des natio-

Vous avez un remède contre la gueule de bois ?

nalités différentes. Mike est anglais, Narumi japo-

M:

M. : Ben

naise et Leo, suédois. Pourquoi êtes-vous ici ? Il y a bien des villes plus faciles pour les artistes comme Londres, Berlin ou New York. M. : Moi, je trouve que Paris est super romantique,

super belle, mais cette ville n’est pas aussi tragique que je le pensais. Je croyais vraiment qu’il y avait des poètes qui se noyaient dans la Seine, des mecs qui sautaient du pont Neuf par amour, en fait non. N. : On a eu un énorme décalage avec ce qu’on fantasmait… M. : En fait, c’est assez propre et les gens sont carrés. N. : C’est un peu conservateur au niveau des sapes. M. : Mais c’est une ville très agréable où tu trouves facilement les gens qui ont les mêmes goûts que toi. 29 —

Le breakfast anglais ! Il faut plein de graisse, c’est scientifique. Quand tu bois, tu te déshydrates. Il faut des graisses quoi ! Du bacon, des haricots blancs à la sauce tomate, des œufs au plat avec de l’huile d’olive et du beurre, des saucisses…

Et toi Narumi ? N. : Ne

pas boire du tout !

Tristesse Contemporaine Dirty/Pschent Disponible le 12 mars ≥ facebook.com/tristessecontemporaine ≥ myspace.com/tristessecontemporaine ≥ tristessecontemporaine.tumblr.com

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30 —

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le bon duo ® Marie Prieux Ω DR

kap bambino garde le cap

Riche, underground, démesuré, Devotion arrive en trombe cet hiver. Fruit du travail de Caroline Martial et Orion Bouvier, l’album sonne comme la promesse de belles surprises, tant en live qu’à domicile. Précurseurs d’un style encore trop mal défini

références qui, finalement, existent dans nos prods. Dans l’hexagone, nous passons d’abord par la case bruit. Cela serait bizarre de se revendiquer électro-punk… Rien qu’électro-clash, c’était déjà un mot à la con.

(car finalement inclassable), les deux acolytes nous ont accordé une entrevue, dans les locaux de chez

En live, vous êtes plein d’énergie, impressionnants.

Because.

L’occupation de l’espace y joue-t-elle un rôle prépondérant ?

Il y a plus de dix ans, vous avez créé un nouveau genre musical. Aujourd’hui, les journalistes vous rangent dans la case électro-punk. Vous y reconnaissez-vous ?

Caroline : Si nous étions quinze, cela serait pareil. Nous sommes hyperactifs ! Petite ou grande salle, le résultat est identique. Je me rappelle d’ailleurs d’un fameux concert que j’ai passé sur un ampli de basses. (rires)

Orion : Justement, nous ne savons pas vraiment ce que cela signifie. Et, qui a inventé ce terme ? D’où vient-il ? Caroline : En France, ce n’est pas la première étiquette que l’on nous colle. Mais nous ne nous reconnaissons dans aucune famille musicale. En fait, nous traversons les époques ! Comme identifiés aux tendances du moment. L’année prochaine, nous serons peut-être « reggae-jazz-impro » ! (rires)

Qu’on prenne des drogues ferait très plaisir à tout le monde ! Mais c’est impossible. Rien qu’un un café me tient six heures, et impossible d’aller me pieuter. Orion : Nous aurions déjà arrêté de produire. On ne prépare vraiment rien, avant de jouer.

Les médias anglo-saxons vous cernent-ils mieux ?

Improviser ne vous met pas la pression ?

Caroline :

weirdos,

Ils sont plus précis. Ils parlent de noize, post-punk, post-rock, des 31 —

Vous préparez-vous pour avoir cette niaque ? Ou les substances font-elles leur travail ? Caroline :

Caroline : Peut-être

pour les trois malins qui vont dire « Hum… franchement, ce n’est pas très Nuit


Kap Bambino

“Les journalistes ont enfin compris que nos disques étaient antérieurs à ceux de Crystal Castles.”

de kids que de trentenaires, de rockeurs que de clubbeurs, ou de goths. C’est fou, on peut mettre autant de bordel dans un club anglais que dans une salle à Bordeaux, ou un bouiboui au fin fond de l’Italie. Les personnes qui vous bookent n’ont-elles pas peur que vous mettiez le même bordel dans les backstages ? Caroline : Pas du tout ! Tout le monde nous trouve adorables. Orion : Être punk, ça ne veut pas forcément dire que tu pètes tout en arrivant, c’est juste un état d’esprit. Caroline : En fait, ils sont même déçus ! On nous a déjà dit « Tiens vous n’avez pas destroy les loges ! » Orion : Mais quand on les ravage, on part en courant. (rires) Produisez-vous réellement vos morceaux avec trois bouts de ficelle ? Orion : Nous faisons ça chez nous, avec un matériel

rudimentaire. Il y a dix ans, nous étions déjà nos propres chefs d’orchestre, et faisions de la musique comme des geeks. Nous n’avons aucune envie de passer par la case studio, avec un mec à l’entrée qui a une boucle d’oreille en clé de sol. Caroline :

Quelles sont les nouveautés présentes dans Devotion, par rapport à vos précédentes sorties ?

structuré » (elle mime). Mais nous sommes Kap Bambino ! Des gens simples. C’est notre manière de fonctionner. Selon les régions, ou les pays, le public présent à vos concerts est-il le même ? Caroline : En Afghanistan, ils sont au taquet ! (rires) Nous avons de la chance, car que nous jouions dans une petite ville française, à Londres, New York, L.A. ou Tokyo, ceux qui viennent nous écouter ont la même dynamique. Il y a autant 32 —

Caroline : Pour les prochains lives, nous prendrons des danseurs, des animaux… (rires) Orion : Cet album reste brut, droit au but. Caroline : Le travail du son est différent, bien que reste notre patte. Sur cinq albums et deux maxis, j’espère qu’il y a eu une certaine évolution. Nous avons expérimenté énormément de choses, notamment ralentir le tempo. Mais nous n’avons pas fait de plans, rien écrit. On s’est juste lancés.

Nuit


Kap Bambino N’est-ce pas pour vous faire mousser que vous dites

Êtes-vous parfois dans la recherche du « faire dif-

ne jamais rien préparer ? Produire nécessite tout de

férent », pour n’entrer dans aucun carcan musical ?

même une certaine organisation.

Caroline : Non, la question ne se posera jamais. Sauf pour produire un autre style. Et, même si le public est en quelque sorte plus prédisposé à nous écouter aujourd’hui, peu de personnes peuvent se taper nos albums dans leur salon.

Non, c’est vrai ! Nous sélectionnons nos bases très rapidement. Et on a du matos de merde. Notre boss en a plus pour écouter des CD. (rires) Le travail est présent dans le peaufinage, même s’il est concis et limité. Cela nous pousse à créer différemment.

Orion :

À repousser les limites ? Orion : Exactement, agir autrement tuerait notre idée de départ. Caroline : Nous ne programmons rien, pas même de répèts. La spontanéité n’est pas dans la profondeur des titres, mais dans leur couleur. Les touches mélancoliques, les émotions sont intimement liées à cette précarité. Ce sont des tranches de vie, joyeuses ou plus violentes. C’est cash. N’êtes-vous pas saoulés d’être comparés à-tout-va à Crystal Castles ?

Faire autre chose, de quel genre ? Orion : Pourquoi pas une formation plus classique ? Cela serait un tout nouveau processus, n’ayant rien à voir avec Kap Bambino. Avec seulement des musiciens. Et ils ne seraient pas sur scène pour faire tapisserie. Ce qui sous-entend de l’organisation ! Caroline : Oui, il faudrait s’assagir ! (rires) Nous sommes tous deux traumatisés de l’école, des heures de rendez-vous, des plannings… (elle grimace). Orion : La réputation de fiottes qu’on va avoir ! (rires)

Caroline : Ça a changé ! Maintenant, nous sommes

les premiers. On dirait que les journalistes sont allés sur Wikipédia, ou Discogs, et qu’ils ont enfin compris que nos disques étaient antérieurs aux leurs. Parce que, t’imagines, ce groupe est arrivé en 2010 ! Et je ne me sens pas proche d’eux musicalement. Orion : Si tu veux une anecdote, nous avons fait une date ensemble, et ils ne voulaient pas passer après nous, pensant qu’on allait démolir le son… Tu vois le délire ! (rires)

Vous écoutez quoi en ce moment ? Caroline : J’aime beaucoup Total Control, Toy, Soft Moon, La Secte du futur … Où conseillerez-vous à nos lecteurs de sortir dans Paris ? Caroline :

Au Mc Do’ de Barbès !

Sortez-vous beaucoup, en dehors de vos concerts ? Orion : En ce moment, je vis dans un chalet, au milieu des bois, au fin fond du Périgord. Mes sorties sont donc limitées. Caroline : J’habite à Bordeaux, et vais voir des petits concerts tous les trois jours. Je ne peux pas rester sur mon canapé à mater des films.

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Kap Bambino — Devotion ≥ En concert le 13 mars à La Gaîté lyrique

Nuit


Paris la Nuit  Todd Borka toddborka.ultra-book.com



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le bon orga ® Crame Ω DR

Clément Meyer La malédiction techno

Clément Meyer a fondé il y a cinq ans le blog/collectif Get the Curse, expression que l’on pourrait traduire par « chope la malédiction ». De magie noire et de célébrations vaudoues, il a peut-être été question lorsque les dancefloors parisiens l’ont happé à l’âge d’or des clubs des Grands Boulevards dans les années 2000. Aujourd’hui DJ international, producteur et label manager, il revient sur ses années de

et beaucoup fouiller - merci Soulseek. J’ai pris beaucoup de plaisir à écouter des artistes comme Chloé, Ivan Smagghe, Jennifer Cardini, Tiga, Miss Kittin & The Hacker… Certaines soirées en particulier ont été des révélations : Atraxion en février ou mars 2003, avec Ellen Allien, Too Many DJs, Luciano, ou une We Love Playhouse à l’Aquaboulevard.

jeunesse et sur l’aventure de son crew à l’occasion des cinq ans de celui-ci.

Est-ce que tu avais un comportement de fan avec les DJ ?

Avant de créer Get the Curse, quel genre de noctambule et de mélomane étais-tu ?

La musique électronique a été ma dernière grande découverte après d’autres passions musicales comme le rap et le rock. C’est allé de pair avec le fait de sortir à Paris. Au début, tu sors, tu crois que c’est pour te bourrer la gueule et draguer, et en fait tu découvres des endroits comme le Rex ou le Pulp, en 2002-2003, qui t’ouvrent les yeux. Tu te rends compte que tu peux sortir pour adorer la musique. D’autres ont découvert la musique électronique de façon différente ; mon cheminement est très lié aux clubs. Parce que Paris en avait de bons. Quand j’aime une musique, j’explore. J’ai toujours aimé le faire. Et c’est un puits sans fond. J’ai commencé à vraiment beaucoup sortir 37 —

Certains DJ m’ont beaucoup apporté. J’aimais bien ceux qui avaient une attitude, qui se voyaient autant dans leur prestance que dans leur sélection musicale. Un DJ, c’est quelqu’un, quand tu ne connais pas bien la musique, qui te donne des directions. Tu as besoin de prescripteurs. Après, tu découvres par toi-même, tu fais tes propres choix, tu affines tes goûts. Quand tu dis que tu sortais beaucoup, tu parles de quel rythme ?

Quatre fois par semaine - mercredi, jeudi, vendredi, samedi, avec une bande de potes. C’est le genre de choses que tu vis entre amis, je n’étais pas dans le plaisir solitaire du mec face aux platines.

Nuit


Clément Meyer

“Au début, quand tu sors, tu crois que c’est pour te bourrer la gueule et draguer. Puis tu découvres des clubs comme le Rex ou le Pulp qui t’ouvrent les yeux.” 38 —

Ton amour des clubs a dépassé le stade du clubbing entre potes…

En 2004-2005, je faisais des chroniques de disques et des interviews pour un site qui s’appelait NightSystem. C’est ce qui m’a poussé à rentrer dans le milieu ; j’ai rencontré des gens comme Tim Paris, Siskid, Tekel, Arnaud Rebotini. C’était sans calcul. Chaque chose qui arrive te motive et te donne l’envie de franchir l’étape suivante. J’ai commencé à mixer tout début 2006, à l’Île enchantée, au Café chéri(e)… Puis la première fois sur un gros soundsystem lors d’une soirée Dimuschi. Comment s’effectue la transition entre celui qui “kiffe le son”, comme on dit, sur un dancefloor, et celui qui est aux platines et fait danser ?

C’est une progression naturelle car j’ai toujours aimé chercher au-delà de ce qu’on me proposait. J’ai adoré danser. D’ailleurs je ne danse plus beaucoup et je regrette cette espèce d’innocence, le fait de tout ressentir comme une révolution intérieure. Maintenant, je suis un peu plus blasé par la musique mais j’ai un énorme plaisir à mixer. La première fois, c’était l’angoisse - tu as toujours peur au début de faire fuir les gens. Tu mixes dans des situations plus sécurisantes désormais – au Rex, au Social Club, dans des clubs étrangers qui font partie de ce même circuit. As-tu parfois l’impression d’être en danger en tant que DJ ?

Il y a des différences entre les clubs, les villes, les gens, les heures, les situations, qui font que tu te remets toujours en cause. La première fois que tu joues à Fabric ou au Panorama Bar, ça t’impressionne, tu as à cœur de faire un truc bien. Il faut réussir à faire un pas vers le public tout en faisant ce que tu aimes. Mais je jouerai toujours ce qui me fait plaisir. Je ne prends aucun plaisir à jouer un style imposé ou pour lequel je ne serais pas légitime.

Nuit


Clément Meyer En 2007 apparaît le blog Get the Curse…

Avec Lelo, Micky, Oli, Ed, on s’est connus avant la création du blog. On était tous passionnés et on sentait qu’on avait de quoi faire un blog. La dominante à l’époque, c’était Fluokids - une photo d’une meuf à poil et un texte façon journal intime. On est partis dans un délire plus premier degré, centré sur la musique sans être trop technique. Le blog était aussi un prétexte pour mixer, une carte de visite. En 2007, on a tourné dans les clubs parisiens, on s’est fait connaître, on a eu notre première résidence à La Flèche d’or, puis au Social Club, un nouvel établissement qui avait de belles ambitions et nous laissait carte blanche. En étant aux commandes de vos propres soirées, as-tu eu l’impression d’apporter à d’autres ce que tu

s’inscrit là-dedans, on sort un disque parce qu’on en a profondément envie. Ta propre production fait partie du catalogue entre autres. Qu’est-ce que ça t’a fait quand les DJ que tu admirais ont commencé à apprécier tes morceaux ?

C’était hyper gratifiant, bien sûr, ça donne de l’énergie. Quelle est la cohérence musicale du label, au-delà du fait de sortir la musique de tes amis ?

Nous sortons de la musique que nous estimons excellente et qu’on assume comme de la musique de club. Certains labels fondés par des DJ se croient obligés de sortir du folk ou de monter des projets avec des orchestres classiques pour avoir l’air plus intelligents.

avais eu plus jeune ?

Sans vouloir paraître plus important que ce qu’on est, on a apporté notre petite pierre. L’époque était très électro, il y avait peu de place pour la techno. Notre soirée était un peu la caution underground du Social Club. Des gens venaient en s’attendant à un autre genre musical mais découvraient des choses plus pointues tout en se rendant compte qu’elles étaient aussi festives et faciles d’accès. C’est ça, l’important pour moi. Ce n’est pas de faire un concours de bites pour celui qui aura le morceau le plus dark ou le plus compliqué. J’aime que ce soit au service de quelque chose de cool, de fun.

Tu parles de qui, là ? Kill the DJ ? Versatile ? Tigersushi ?

En l’occurrence, j’aime beaucoup ces labels qui d’ailleurs ne se définissent peut-être pas comme des labels de musique de club. Je ne dis pas ça pour pointer tel ou tel ; c’est un système entretenu aussi par les médias, qui amène à des démarches marketing non authentiques. Un peu comme les rappeurs français qui doivent se réclamer de Brassens pour être reconnus.

Get the Curse est également un label depuis 2009. Quel genre de structure hybride êtes-vous ?

Actus

Disons que c’est un label avec des DJ et d’autres personnes impliquées à différents niveaux – la direction artistique, le graphisme, la promotion… On attache pas mal d’importance à la notion de crew. C’est important de s’entendre humainement avec la personne dont tu sors un disque. La musique est une chose que tu partages avec des amis, qui te permet de faire des rencontres ; on

≥ Soirée Get the Curse au Rex le 16 mars

39 —

Avec Mark E., Randive, Darabi et Clément Meyer ≥ Nouveau maxi de Frank Haag sur Get the Curse ≥ Sortie de remixes de Tristesse contemporaine, Franz & Shape par Clément Meyer. ≥ Nouveau maxi de Clément Meyer sur Items & Things

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40 —

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Le bon entertainer ® Violaine Schütz Ω Seb Gosset

Gunther Love Un air de fraîcheur

Champion du monde d’air guitar 2009 et 2010, Gunther Love est depuis devenu le trublion incontour-

heure tous les jours et voir la routine rythmer ma vie. Je crois que j’ai réussi à éviter ça.

nable de nos nuits. Entre son groupe les Airnadette (qui font semblant de jouer des instruments) en

D’où vient ton pseudo ?

tournée en ce moment et son rôle de DA au 114, il

À l’époque où j’ai trouvé Gunther Love, je jouais dans une pièce de théâtre intitulée Germania, mort à Berlin, dans laquelle je jouais le rôle de Gunther, chef de guerre sanguinaire d’un opéra de Wagner et le love c’était pour amener une touche de douceur à ça. Voilà pour la version officielle. Officieusement, c’est parce qu’avec ma moustache mes potes trouvaient, au début, que je ressemblais à Gunther, célèbre acteur de cul allemand des années 80… Beaucoup moins glam.

donne aux nuits un supplément de fun et de déconne. Quand les gens te demandent ce que tu fais dans la vie, tu dis quoi ?

Je dis que je suis un dealer de love, champion du monde de kif, un Chaplin avec une guitare électrique à la place d’une canne. Peux-tu me résumer ton parcours ?

J’ai quitté mon sport-études pour entrer dans une école d’art dramatique. Après cinq années au service du théâtre et de la danse contemporaine, j’ai croisé la route des Airnadette. Et je ne comprends toujours pas ce qui m’arrive depuis trois ans. Quel genre d’ado étais-tu ?

Hyperactif, emmené par le rêve de devenir acteur et le besoin fou de faire marrer mes potes. Jusqu’à tard, j’ai voulu être pompier. J’aimais l’idée de jamais savoir ce qui allait arriver dans ma journée. Ma plus grande peur, gamin, c’était de m’imaginer plus tard réglant mon réveil à la même 41 —

Quel souvenir gardes-tu des concours d’air guitar ?

Une folie hors normes dans les couloirs de la compétition. Et une demande en mariage. Je pense que j’ai gagné parce que j’étais habillé en doré. Si j’avais fini deuxième, on serait tous passés pour des cons. J’ai gagné parce que j’ai décidé de gagner. Le talent fait ce qu’il veut, le génie fait ce qu’il peut, moi je fais ce que je veux (rires). Tu joues d’un instrument ?

Je suis la plus grosse burne en musique. Je joues du tennis, c’est un instrument la raquette ? Pour Nuit


Gunther Love

“je suis un dealer de love, champion du monde de kif, un Chaplin avec une guitare électrique à la place d’une canne.”

les Airnadette, j’en suis même la dernière recrue. Airnadette existait déjà, mais il leur manquait un moustachu d’1m80 plutôt beau gosse, les yeux vert, talentueux, pour percer, c’est là que j’interviens. Quel est le concept du groupe ?

Du rock dans ta soeur. C’est une tranche de kif. L’idée, c’est que tu nous détestes car tu ne comprends pas ce qu’on fait mais, quand tu es venu nous voir, tu peux plus t’en passer et on devient tes meilleurs amis. Quel est ton meilleur souvenir avec eux ?

La tournée aux États-Unis en 2010. On a traversé le pays d’est en ouest (de New York à Los Angeles) dans le tour bus de Metallica. Et aussi la première partie de M à Bercy trois soirs devant 17 000 personnes… ouf ! Comment es-tu arrivé au 114 ?

En scooter. J’ai pris avenue de l’Opéra, remonté rue Réaumur jusqu’à République puis, je suis monté jusqu’à Parmentier, j’ai tourné à gauche puis je suis arrivé au 114 de la rue Oberkampf. Qu’y fais-tu ?

J’en suis le directeur artistique et programmateur. Comment choisis-tu les groupes qui y jouent ?

Avec mes oreilles. Quelle musique écoutes-tu ?

Je suis très rock’n’roll, pas forcément la musique rock mais l’attitude, l’ambiance, la démarche artistique d’un groupe. Je suis très branché rock alternatif made in UK. Quels sont tes héros ?

Charlie Chaplin, j’ai grandi en regardant Chaplin. Il est classe en toutes circonstances.

42 —

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Gunther Love Où sors-tu à Paris ?

En quoi pour toi, le air guitar dit quelque chose de

Au 114, ma nouvelle maison, mais aussi au Bus Palladium (c’est la famille). Finalement aujourd’hui, je suis tellement dehors que j’ai l’impression de sortir quand je rentre chez moi… Je me dis « wouha, saprisiti, c’est cool ici ! ».

notre société ?

Pour toi, c’est quoi une fête réussie ?

C’est du mime en fait. Tout le monde parle d’air mais c’est du mime. Et que ce soit en politique ou au cinéma (il n’y a qu’à voir The Artist), vous voyez bien que le monde entier aime quand les Français ferment leur gueule ! Le air guitar par définition ne dit rien, il fait. Arrêtons de parler : faisons !

C’est quand tu arrives à faire marrer les gens naturellement, que les gens puissent péter dans leurs smokings tranquille, et surtout qu’on arrive pas à savoir qui fait quoi dans la vie car finalement, on en a rien à foutre. Quelle est la chose la plus folle que tu aies jamais faite ?

Je passe mes journées à me fendre la poire, seul ou accompagné. Ma vie est une farce. Des anecdotes de soirées qui ont mal tourné ?

Il y a pas longtemps au 114, quelqu’un a manqué de respect sous mes yeux à l’un de mes convives. Je lui ai demandé de sortir, en lui expliquant qu’ici on était à la cool et qu’il pouvait laisser sa langue de vipère dehors… Ils étaient quinze et une fille du groupe m’a traité de sarkozyste. J’ai cru mourir. Tes projets ? Tes rêves ?

Ma famille est mon principal projet. Je nage au milieu de mes rêves depuis que j’ai croisé la route d’Airnadette et j’ai aussi trouvé la femme de ma vie (Daphné Bürki, ndlr).

Le 114 by Puma Social ≥ 114, rue Oberkampf 11e — Gunther en cinq dates 2009 : sacré champion du monde d’air guitar en

À quoi peut-on s’attendre pour les prochaines dates

Finlande

des Airnadette à partir du 30 mars ?

2010 : pour la deuxième fois champion du monde

Notre nouveau spectacle, la Comédie Musiculte Airnadette, rencontre un franc succès. On part en tournée mondiale de la France, on revient à Paris le 1er juin au Bataclan avant de repartir en tournée jusqu’à fin 2013… On a fait de nouvelles rencontres qui réservent de sacrés surprises dans les mois à venir.

d’air guitar

43 —

Été 2010 : intervention dans des émissions de Canal+ Septembre 2010 : on le voit dans Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil 2011 : D.A. au 114

Nuit


le bon club ® Marine Goutal Ω DR

Studio 54

Everyone will be famous for 54 minutes

Haut lieu de la culture underground new-yorkaise mais avant tout repère glamour, le Studio 54, fondé en 1977, a bâti sa légende, comme le Palace, en réunissant sur une même piste de danse les stars de toute une époque et les masses. Retour sur l’histoire de la « plus grande boîte de nuit de tous les temps ».

Dans la mémoire collective, le Studio 54, c’est avant tout une déferlante de glamour, de luxe, d’excès et de paillettes. Par la présence magnétique des quelques reines et habituées ( Jerry Hall, Grace Jones, Debbie Harry), le club a cultivé une image de marque, et a offert en retour le décor idéal des fêtes de la communauté arty et du « grand monde » new-yorkais. Au Studio, les pop stars agissent dans la vie comme sur la scène, à l’instar de Bianca Jagger, qui fit un soir une entrée magistrale, montant un cheval blanc. Esprit frappeur ou simple coïncidence, la fantaisie, l’excentricité et le dandysme, qui innervent les comportements, revivifient la mémoire initiale du lieu, celle d’un ancien théâtre à l’italienne, le Gallo Opera House. À l’image de cette entrée mégalo, les excès ne connurent pas de limites : du sexe désinhibé sur le balcon - lieu réservé aux rencontres sexuelles - à la prise de drogues variées. C’est d’ailleurs dans le premier carré VIP du monde, situé dans les caves du Studio, que clients fortunés et icônes plastiques consomment drogues 70’s (LSD) et 80’s (acide, cocaïne). Si les paradis artificiels y sont pour beaucoup dans l’atmosphère hédoniste du lieu, ils coûteront au Studio sa perte. Rubell et Schrager, patrons du club qui distribuaient abondamment 44 —

de la coke, avaient mis au point une manière bien originale de pourvoir au plaisir de leur clientèle. Telles des pinatas chimiques pour adultes, il arrivait que certains soirs, une pluie de ballons contenant un peu de cocaïne tombât du plafond du club et explosât, afin de délivrer quelques grammes de neige aux plus chanceux. Mais lors de la perquisition la nuit du 31 décembre 1979, pour une fraude fiscale chiffrée à 2,5 millions $, la brigade des stup en a pour son saoul, lorsqu’elle découvre des kilos de cocaïne cachés dans les murs et constate que la drogue circule librement, ce qui conduit le club à fermer définitivement ses portes en 1980. Sur les photos d’époque, des masses anonymes de jeunes gens s’empressent devant la porte du club, surmontée d’une marquise en époxy noire, griffée du graphique sigle « 54 ». Prenant la pose et « dressed to kill », car on rentre au studio non pour son fric mais pour son style, la marée humaine attend le précieux sésame du portier. Les élus aux looks discoïdes peuvent alors rejoindre la piste bondée, - on compte certains soirs quelque 5 000 fidèles-, ce qui fait du lieu un bon pionnier du clubbing de masse. On danse, on boit, on bavarde, le tout dans une allégresse qui est celle de l’avant-sida et de l’utopie d’une société organique. Upper society WASP, prolos immigrés italiens et kids afro-américains dansent ensemble au son du disco en live ou mixé par les DJ résidents. Lieu de contradictions, associant glamour et mixité, revendication identitaire et spectacle, fric et créativité, le Studio 54, en visionnaire, a posé les bases de ce qui fera la substance des golden 1980. Nuit


45 —

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la bonne playlist Ω Klara Petra Szabo

greg kozo

Kindness - Cyan

Voix triste, claviers bien chauds, reverbs longues. Le genre de truc que tu veux écouter en prenant l’avion et en regardant les nuages. Dans ce genre-là. DSL - Supalove

Difficile d’être objectif tellement j’aime le travail des frères DSL. Clip drôle, original et morceau excitant. J’espère bosser avec eux un jour. Forss - Jouneyman

Sûrement le morceau que j’ai le plus écouté ces dix dernières années. Onirique, sombre et habité. Kendrick Lamar - Look Out For Detox

Flow renversant et instru simple mais efficace. En boucle. Je rêve de bosser aussi avec lui. Moitié de Make The Girl Dance et producteur/DJ de talent,

Para One - Mother (Mr Oizo remix)

Greg aime autant la musique

Quentin Dupieux nous prend rarement en traître. C’est souvent dans le mille. J’adore.

mélancolique qu’on écoute chez soi que la techno efficace des clubs. Playlist éclairée et

Paradis - La balade de Jim

éclectique.

Reprise de Souchon très deep, que je mettrais sur l’autoroute la nuit en conduisant. Classe et sobre.

— myspace.com/gregkozo facebook.com/gregkozo

Make The Girl Dance - Tchiki Tchiki Tchiki (Nasser remix)

Notre cinquième single remixé par les Marseillais de Nasser de façon très très talentueuse. Du rockabilly cutté un peu. Redinho - Stay Together

Je suis fan du vocoder et des voix trafiquées depuis toujours. Quand c’est mélancolique et chic, j’aime encore plus. Greg Kozo - Voyeur

Le premier track tiré de mon prochain EP sur Enchanté records, notre label. J’ai tourné le clip avec une amie actrice de X, Lou Charmelle. Un peu arty et très onaniste. Reflex - Wavering

Petite perle électro-pop de nos amis montpelliérains. Accrocheur, immédiat et sucré, un avant-goût de printemps dans nos oreilles.

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cli

tre

montmar chy

tables de poker | billards | multicolore Ouvert tous les jours de 13h à l'aube | 84, rue de Clichy Paris 9e 01 48 78 32 85 | clichy-montmartre.com | pokercm.fr Pièce d'identité obligatoire | Interdit aux mineurs


le bon agenda La sélection de ParisLaNuit.fr Vendredi 02/03 23h30 Le Showcase 15 €

Vendredi 16/03 23h Le Social Club 14,60 €

≥ Circus Company Night : Dixon, Franck Roger, Sety

≥ The Subs, Mumbai Science, Ego Troopers

& Oleg Poliakov

23h30

00h

Le Showcase 13,70 €

≥ Mike Shannon , Mihai Popoviciu & Bog

Le Glazart 14 €

≥ We Are Family avec Max Cooper, Rafaël Murillo, Samedi 17/03 23h Le Social Club TBA

Fantomette

≥ Something a la Mode Lundi 05/03 19h30 Le Café de la Danse 16,70 € Jeudi 22/03 23h Le Social Club TBA

≥ Soko 20h

≥ Club Cheval Residency

Le Point Ephémère 15 €

≥ Lianne La Havas Vendredi 23/03 23h Le Social Club TBA Mardi 06/03

20h

≥ Decade avec Aeroplane et Don Rimini

Le Point Éphémère 17 €

≥ Speech Debelle Samedi 24/03 23h La Belleviloise 12 € Mecredi 07/03 20h30 Le Bataclan 27 €

≥ La Block Party

≥ The Fall 23h

23h55

Le Nouveau Casino 18,70 €

≥ Phantasy Night : Erol Alkan, D. Avery, Canblaster

Le Social Club Gratuit

≥ Corps Vs Machine avec Sexy Sushi 23h59

Dimanche 25/03 18h La Cigale 24,50 €

Le Rex Club 9,70 €

≥ Club Trax présente Carl Craig «69» live

≥ Connan Mockasin

Vendredi 09/03 23h Le Social Club15 €

Mardi 27/03 19h30 La Bellevilloise 20 €

≥ The Cameroscope Residency avec Les Petits

≥ Action Bronson

Pilous, DIM et Maelstrom 23h30

Mercredi 28/03 20h Le Point Ephémère 15 €

Le Cabaret Sauvage 24 €

≥ Dan Ghenacia, Dyed Soundorom, Shonky et Cassy. 23h30

≥ The Civil Wars

Bus Palladium Gratuit Vendredi 30/03 23h Le Social Club TBA

≥ Bonbon Party

≥ Marble 1St Birthday avec Basement Jaxx, Myd et Samedi 10/03 23h Le Social Club 15 €

Marble Players (Para One, Surkin, Bobmo)

≥ Jackrabbitslim avec Moodymann, Remain et Samedi 31/03 23h Le Social Club TBA

Mademoiselle Caro

≥ Breakbot et Todd Terje Lundi 12/03 20h Le Point Ephémère 15 €

23h

≥ School Of Seven Bells

≥ Warp Party : Chris Clark (Live) & John Stanier 23h

Mercredi 14/03

20h

Le Divan du Monde 12 €

≥ 50 Years Of Soul avec Soulist, Texaco, Drixxxé et

La Gaité lyrique 25 €

Pierre Wax

≥ Mayer Hawthorne et Benny Sings 23h

La Machine 18 €

Le Social Club Gratuit Envoyez votre prog à : emmanuel@parislanuit.fr

≥ Sebastian Release Party

48 —

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