DÊcembre 2015 - n° 59 - lebonbon.fr
TOUS LES CHEMINS MÈNENT AU BONBON
le Bonbon.fr
EDITO « Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s'annonce comme une immense accumulation de spectacles. » Guy Debord, La Société du Spectacle. 1967 BOOM. Ça a fait boom. On a un peu rien compris, c'était confus, y'a eu un gros silence, il a fallu reprendre nos esprits, un peu comme quand tu te prends une patate de routier sur le pif. STADE 1 : et puis les images se sont démultipliées. Les voix, les commentaires, les analyses de spécialistes. I-Télé en continu. Jusqu'à la saturation. Bordel, faut bien que la machine se remette en route. STADE 2 : les mots d'ordre fusent, l'instinct grégaire te souffle dans les bronches. Bleu, blanc, rouge. Résistons, trous de cul que nous sommes, consommons en terrasse ! Achetons des caddies de bière au Leclerc du coin ! Vive Jean Moulin ! STADE 3 : mon préféré, celui de la récupération. Le cirque débarque. Chérie ! Viens voir les comédiens qui arrivent ! Afida Turner, p'tite pute/gros nibards exige que l'on résiste. La presse fait des hommages vibrants aux victimes, les vidéos prises à l'arrache des massacres se dealent à prix d'or, les T-shirts LOL "Jawad", ça se vend plutôt pas mal aussi. Bientôt, le merchandising du sentiment : des bouquins, des posters, des stylos, des parcs d'attractions, des films... Et puis merde, on s'en branle de Bamako. Le cynisme a repris le dessus. Il n'a même jamais disparu. Real politic, mec, limitons les libertés. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout est business, tout est spectacle. Ce même cynisme qui finalement ne nous différencie pas tellement de ceux d'en face. STADE 4 : et moi qui ouvre ma bouche, là, à faire le malin, à citer du Debord, suis-je mieux que les autres ? Non. Ma seule cure, c'est d'être cynique par rapport au cynisme. En attendant le prochain boom. Joyeux Noël et vive la fête. MPK
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OURS
DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Jacques de la Chaise RÉDACTEUR EN CHEF Michaël Pécot-Kleiner DIRECTEUR ARTISTIQUE Tom Gordonovitch COUVERTURE Marcel Dettmann par Flavien Prioreau SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Louis Haeffner RÉGIE PUBLICITAIRE regiepub@lebonbon.fr 06 33 54 65 95 CONTACTEZ-NOUS nuit@lebonbon.fr SIRET 510 580 301 00032 SIÈGE SOCIAL 12, rue Lamartine Paris 9
SOMMAIRE
p. 7 À LA UNE Marcel Dettmann p. 13 COMIX Glory Owl p. 19 LITTÉRATURE Les mots de minuit p. 23 CINÉMA Les sorties du mois p. 27 ART Fashion Garage p. 35 MUSIQUE Andrew Claristidge p. 39 POLITIQUE F.L.U.O.
TOUS LES VENDREDIS AU BUS PALLADIUM 4
POUR ÊTRE SUR LA LISTE RDV SUR LEBONBON.FR 6, RUE PIERRE FONTAINE PARIS 9E
HOTSPOTS
- POUR NE PAS AVOIR LE BOURDON The Drone, webzine musical des plus respectés et des plus pointus, fera son arbre de Noël à la REcyclerie. D'après ce que j'ai capté, on pourra déambuler entre les stands d'un bon paquet de labels sympathiques (Infine, Turc Mécanique, Tigersushi, Warp...), tout en écoutant les Dj's du cru. Forte probabilité de vin chaud. Jeudi 10 décembre à La REcyclerie - BON ANNIVERSAIRE SONOTOWN L'équipe de Sonotown fêtera ses 7 ans d'existence sur la planète Terre en organisant deux petites sauteries, le 4 au Virgo et le 18 à la Machine (clubs dont ils ont la D.A). Quitte à en faire une, on choisira la deuxième, avec les lives de Aux88, Vrilski, Aurora Hallal et Minimum Syndicate. Vendredi 18 décembre à la Machine
Dusty kid
Aux88
- OPTION RÉVEILLON Bon, si l'ambiance de ton repas de Noël en famille est VRAIMENT merdique et que t'as envie de te défouler un coup, tu peux toujours aller transpirer sur le dancefloor du Rex. Derrière les platines, on attend le lutin démoniaque Dusty Kid. Ho, ho, ho. Vendredi 25 décembre au Rex
- SPLENDEURS ET MISÈRES DE LA PROSTITUTIONIl te reste un peu plus d'un mois pour reluquer cette expo qui retrace le thème de la pute à travers l'art. De Manet à Degas, Toulouse-Lautrec, Munch ou Picasso, la pute a toujours exercé un pouvoir de fascination sur des artistes qui étaient aussi souvent leur clients. 11€ l'entrée. En décembre au Musée d'Orsay 5
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À LA UNE T
MAXIMILIEN DOUCHE P SVEN MARQUARDT
MARCEL DETTMANN — LA FÊTE NOIRE Votre première compile Ostgut Ton il était là, votre première fois au Berghain il était là, votre première curry-wurst... Non, il n'était pas là et heureusement peut-être, il était quatorze heures et vous aviez la gueule de Michel Simon. Marcel Dettmann donc, deux mètres d'acier et de techno rigoriste, le résident du
Berghain, l'emblème malgré lui avec Ben Klock de la techno estampillée easy-jetsetteuse. C'était hier. Aujourd'hui la techno noire est sortie du club et exhorte les foules sur d'immenses scènes façon Weather. Il y reviendra, d'ailleurs, pour la prochaine édition hivernale. Interview. 7
“JE METS UN POINT D'HONNEUR À ÉCOUTER DE VRAIS DISQUES SUR UNE PLATINE AU LIEU DE CHERCHER PARMI UN MILLIER DE FICHIERS MP3.” 8
Le label du Berghain Ostgut Ton fête ses 10 ans cette année, depuis les temps ont changé, les guerres, la crise sont passés par là, quel est ton sentiment sur la techno en 2015 ? Je ne crois pas que la techno ait grand-chose à voir avec la crise et la guerre, au contraire son esprit est à l'opposé de cela. Dans le passé, les gens ont toujours fait la fête, même en des temps troublés. Vous vous souvenez des années 20 en Allemagne ? L'économie était dévastée après la guerre, le peuple devait faire face à de sérieux problèmes mais cette période est toujours considérée comme le fondement de notre culture contemporaine, on ne se privait pas de faire la fête... Alors pourquoi ne pas continuer ? Quelle a été ton éducation musicale et comment la techno a changé ta vie ? Par où commencer ? Ma mère écoutait beaucoup la radio, j'ai baigné dans la pop 70's et 80's, avec Duran Duran ou Michael Jackson pour n'en citer que quelques-uns. Quand le mur est tombé, j'avais 12 ans, nous avions alors une platine à la maison et j'ai commencé à acheter des 45 tours. Mon truc préféré à l'époque, c'était Depeche Mode, je crois que j'achetais absolument tout ce qu'ils sortaient ! Un peu plus tard, j'étais dans ma période pré-techno comme je dis souvent avec DAF, Front 242, Nitzer Ebb, beaucoup de groupes EBM, indus. Naturellement, je suis passé à la techno, l'évolution était logique. La techno n'a pas vraiment changé ma vie mais en a toujours fait partie. Travailler chez le disquaire Hard Wax à Berlin a-t-il été bénéfique ? C'est clair oui, ça a toujours été un rêve d'y travailler, et ce dès 1993, quand un ami m'a introduit auprès d'eux. Entre 1996 et 1999, j'avais mon propre magasin de disques et j'en vendais pas mal à mes potes Answer Code Request ou Marcel Fengler. Après ça, j'ai bossé dans la dis-
tribution de vinyles, et puis pour Hard Wax. Cette expérience a été chouette dans le sens où j'ai pu développer mon propre label, écouter plein de nouveautés et rencontrer plein d'artistes. A côté de ça, j'ai beaucoup appris, notamment cette liberté toute berlinoise, Hard Wax fut une véritable école pour moi. Que penses-tu du Berlin d'aujourd'hui, es-tu toujours excité par cette ville très spéciale ? L'excitation est toujours là : j'habite là-bas avec ma famille, mes amis, le club dont je suis résident depuis 15 ans maintenant est top, il y a un paquet de concerts indés, de galeries et des tonnes de trucs à explorer, j'aime toujours ma ville, elle reste éternellement "the place to be" pour moi. Le côté "décontracté" de la vie berlinoise est-il une réalité tangible pour toi ou n'est-ce qu'un point de vue touristique ? Berlin est multiple, avec des loyers peu chers, des clubs sans horaires, des galeries et des spots cools en général. La liberté créative y est fondamentale et un certain détachement, un apaisement dans la vie quotidienne continue d'exister par rapport à Paris, Londres ou New York, mais c'est en train de changer. Une chose est claire, si tu habites Berlin et si tu n'es pas un touriste, tu dois bosser, payer des taxes et résoudre tous les problèmes du quotidien comme partout ! Quels groupes allemands ont été importants pour toi ? Étais-tu à fond dans le krautrock ou la Berlin School ? J'adore des groupes différents comme Kraftwerk, City, Karat, DAF, Rio Reiser ou Philip Boa, mais je n'ai jamais fait de différence entre les genres, les frontières musicales n'ont aucun impact sur moi, je me fiche des étiquettes en fait !
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Tu continues encore de fouiller les bacs des disquaires ? Toujours ! J'essaie d'aller chez Hard Wax au moins une fois par semaine, les mecs m'orientent parfaitement selon mes envies, ils me connaissent si bien ! Je mets un point d'honneur à écouter de vrais disques sur une platine au lieu de chercher parmi un millier de fichiers mp3 sur un ordi. Ces derniers temps les artistes en sont réduits à leurs hits, grosso modo, et après quelques écoutes, ils sont vite rangés dans un dossier. Une copie physique d'un disque est tellement plus précieuse... On imagine aisément des influences plus ou moins dark dans ta musique, qu'en est-il de tes livres et films de chevet ? Je suis un grand admirateur de réalisateurs comme Stanley Kubrick, les Frères Coen, Rainer Werner Fassbinder, Wim Wenders ou Martin Scorsese. Pour la littérature, j'aime Henry Miller, Phillip Roth, Paul Auster, etc. Paris semble être un lieu de fête à nouveau inédit, ressens-tu une relation particulière avec la scène locale ? Paris spécialement, et la France en général, est une de mes destinations favorites pour jouer et découvrir une musique que j'aime, que ce soit avec DJ Deep, Francois X, Clekclekboom, Antigone, Marcelus, Zadig ou Birth Of Frequency. Le Weather Festival est de retour cet hiver en décembre, tu devrais y jouer cette fois avec Oscar Mulero et Voices from the Lake, comment as-tu vécu cette grande messe ? J'ai trouvé l'organisation impeccable, professionnelle et joyeuse. J'ai réellement aimé jouer là-bas, tu sais j'ai toujours adoré jouer en club parce que j'y ai fait mes classes, mais aujourd'hui jouer sur de grandes scènes face à une telle foule, c'est un vrai luxe. On peut dire 10
qu'entre Dekmantel, Melt! ou Sziget, Weather Festival est l'un des meilleurs. Tu as lancé ton propre label MDR (Marcel Dettmann Records), en quoi était-ce important d’être dans une optique "do it yourself " ? L'impulsion évidente pour moi, vouloir sortir la musique qu'on aime écouter tout simplement, sans suivre bêtement une mode ou autres clichés. Je ne fais pas de promotion, et je ne signe que des personnes avec qui j'ai de réelles affinités. Je vais poursuivre dans cette voie. Comment imagines-tu le Marcel Dettmann producteur en 2025 ? J'ai toujours eu la chance de faire ce que je voulais, on ne m'a jamais forcé à infléchir mes décisions, j'ai pu travailler sur des projets intéressants avec des gens énormes comme Sven Marquardt ou Frederike von Rauch, et comme je te le disais je n'ai jamais été partisan de frontières, alors je n'ai aucune envie de savoir comment je finirai... Peut-être que j'ouvrirai un restaurant avec des amis, une galerie, mais c'est hors de question aujourd'hui, j'aime trop ce que je fais. Quelques adresses favorites à Paris ? En général, il me suffit de marcher dans la ville un moment pour trouver de nouveaux spots. J'aimerais tant que Paris conserve sa convivialité, sa culture, toute sa beauté après ces horribles événements survenus il y a peu. Je suis de tout cœur avec tous ceux qui ont été touchés par cette épreuve, et mes pensées les plus chaleureuses vont aujourd'hui à Paris. Marcel Dettmann sera au Weather Winter Festival (Jour 2) qui se déroulera les 18 et 19 décembre au Paris Event Center de la Villette. www.weatherparis.fr facebook.com/marceldettmannofficial
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COMIX T
ARNAUD ROLLET P GLORY OWL
GLORY OWL FAIT SON TROU
Si vous avez bon goût, vous avez déjà dû vous fendre la poire sur la toile en tombant sur l’un des nombreux strips pondus par Glory Owl. Partisan d’un humour mordant et décomplexé, le collectif a récemment publié aux éditions Même Pas Mal le deuxième tome de son recueil d’histoires courtes totalement jouissives. Parce qu’il aime rire et les gens
qui sortent du cadre, votre bonbec favori est allé à la rencontre de Bathroom Quest qui, avec Jean-Jacques Charogne, Gad, Mandrill Johnson et Mëgaboy, fait partie de cette fine équipe de dessinateurs dont le doux nom rappelle ce fameux interstice magique à vocation sexuelle.
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D’où viennent vos sobriquets en majorité improbables ? Pour Gad et moi, de jeux de mots sur nos noms et prénoms. Pour Jean-Jacques et Mandrill, ce sont deux pseudonymes improvisés pour Glory Owl dont l’origine est forcément un peu floue. Pour Mëgaboy, il s’agit d’un pseudo qu’il se traîne depuis des années, lié à des projets antérieurs. Ce sobriquet est hélas devenu un fardeau qu'il porte au quotidien et il songe désormais à se faire appeler "pizzatoto". Est-ce que le collectif fonctionne de manière démocratique ou de façon totalitaire ? C’est un beau modèle de démocratie, qui ne satisfait pas toujours tout le monde mais fonctionne à la majorité. Sur nous cinq, si trois valident un strip, il passe. Et s’il pose problème ou ne fait pas rire le public, alors le groupe l’assume et le défend. Grâce au net, l’humour noir, trash et absurde est devenu plus accessible et trouve des représentants un peu partout dans le monde. Je pense à vous, mais aussi à des Cyanide & Happiness, Joan Cornellá Vázquez, etc. Vous vous sentez proches de ces types ? Pas forcément de ces types-là, mais d’un humour noir que l’on trouve aux Etats-Unis, oui. Il y a Johnny Ryan par exemple, dont toute l’œuvre est créée pour provoquer et choquer le lecteur, ou dans un autre genre, il y a Red Meat. Mais pour Glory Owl, même si ça ne se voit pas, notre première source d’inspiration était The Perry Bible Fellowship ; avec l’idée de proposer des strips absurdes ayant à chaque fois un traitement graphique un peu différent. Au final, on a fait notre truc. Question Drucker : est-ce que vous avez l’impression de faire partie d’une grande famille de l’humour trash ?
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On se sent forcément proches d’autres auteurs, notamment ceux édités par notre maison d’édition Même Pas Mal, mais il n’y a pas de famille. Et puis on évite le terme "trash". Notre but n’est jamais de faire un gag trash : lorsque l’on élabore un strip, on pense en termes d’humour, qu’il soit noir ou absurde. C’est ensuite le lecteur qui, en fonction de ses propres références, va le trouver trash ou non. On peut le voir dans les commentaires : pour certains, un type qui vomit c’est trash, alors que pour d’autres, si personne ne décapite une vache en enculant une poule, c’est de l’humour consensuel. Justement, j’ai l’impression que les "comiques" français du moment font surtout dans l’humour consensuel. Il semble même lointain le temps où Timsit comparait les trisomiques à des crevettes. Croyez-vous que la BD permet d’aller bien plus loin qu’eux ? Il y a des humoristes français qui font dans le trash ou le politiquement incorrect - je pense à Gaspard Proust par exemple - mais, à part quelques personnes comme Sacha Béhar, ils ne nous intéressent pas beaucoup. Je pense que notre différence de ton vient d’influences différentes. La BD bénéficie depuis des années d’auteurs qui sont allés très loin dans l’humour absurde, noir ou trash. Forcément, on hérite de cet esprit. Si tu nous compares à un comique français, on va paraître bien plus libres, mais si tu regardes ce qui se faisait et se fait dans la BD, on est finalement assez gentils. Je pense à Robert Crumb, Vuillemin, Reiser, Tanino Liberatore, etc. Réussir à faire rires en trois-quatre cases, c’est un sacré défi, non ? Le gag en strip est un exercice de style. Il faut accepter de retirer de la case tout ce qui ne participe pas au gag : les décors, des personnages secondaires, les objets, des
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discussions parasites. C’est difficile au départ de bien doser, mais finalement c’est tellement construit qu’on peut l’apprendre. Ensuite, il faut comprendre qu’un strip, c’est un rythme. De toute manière, l’humour est largement fondé sur le rythme : tu loupes le tempo et ta blague tombe à l’eau. Enfin, comme le strip est extrêmement codifié, on essaye de casser sa structure en mettant un gag dans chaque case, ou alors en case 2 pour aller plus loin en case 3, ou encore amorcer quelque chose dans les deux premières cases pour complètement faire autre chose dans la dernière. Parfois le strip vient tout seul, mais bien souvent on cherche le rythme ensemble, pour trouver l’élément qui fera rire le lecteur, en ajoutant une bulle, en séparant un dialogue sur plusieurs cases, etc. Quelles sont vos méthodes pour penser et transposer la vanne ? Il y a un élément qui nous paraît primordial et qui manque généralement aux strips qu’on lit sur le net : il faut que ta vanne soit trop longue pour le strip. Il faut avoir un matériau suffisamment riche pour le raboter, le réduire, le contraindre à tenir en trois cases, quitte à en faire deux strips. On voit beaucoup de strips sur trois cases qui tiendraient sur deux ou une seule : c’est la pire méthode. Si tu dilues ton gag, tu dilues sa force et donc le rire. Vous retrouvez-vous confrontés à des menaces après la publication de certains strips ? Grâce à la magie des réseaux sociaux ou l’anonymat d’Internet, nous avons effectivement le droit à des insultes régulières, rarement des menaces. Ça énerve sur le moment, mais on n’y fait plus trop attention. On préfère se concentrer sur les personnes qui apportent une véritable critique ou pour lesquelles un strip a vraiment posé problème, afin d’au moins expliciter notre point de vue. Mais l’élément auquel nous faisons le plus attention, c’est d’éviter la récupération car, en mettant en
scène des racistes ou des misogynes, on attire un public qui se reconnaît dans ces valeurs-là et s’approprie le dessin. Si on ne peut pas éviter la mauvaise interprétation de nos strips, on met un point d’honneur à désamorcer ce genre de discours, ce qui nous attire effectivement des insultes. Le caca, Hitler, le handicap, le racisme, les pauvres, les enfants, la mort : vous ne cessez pas d’étonner par le choix de vos dessins. Est-ce que certains sujets sont jugés tabous par vous ? On n’a pas de tabous et si on "s’interdit" certaines choses, c’est plutôt de l’ordre graphique, comme ne pas représenter de sexe en gros plan. Je pense que la BD - et l’art en général - est faite pour pouvoir aborder n’importe quel sujet. Par contre, quand on va sur un terrain sensible comme le racisme ou la pédophilie, il faut qu’on soit intelligents, sous peine de faire de la provocation pour provoquer, ce qui n’a aucun intérêt. Nos personnages racistes ou pédophiles sont tous bêtes et méchants, des êtres médiocres. Pour la mort, la maladie ou le handicap, nous essayons d’aborder ces sujets sans complaisance ni condescendance. Bien sûr on essaye et parfois on loupe notre effet, mais on ne fera jamais quelque chose d’aussi gratuit qu’Electric Retard, parce que ce n’est pas l’objectif de Glory Owl. Enfin, avez-vous déjà personnellement testé pour de vrai un glory hole ? Non, mais on a de chouettes histoires dessus.
— Glory Owl - Tome 1 et 2 (Editions Même pas Mal) gloryowlcomix.blogspot.fr 17
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LITTÉRATURE T
TARA LENNART
LES MOTS DE MINUIT
Blanche comme une page, la nuit s’inscrit aux abonnés absents. Pas de marchand de sable à l’horizon ni de pilules magiques pour baver dans les bras de Morphée. Ne cherchez plus,
lisez. Et dans votre lit, c’est encore mieux ! Vous aurez une bonne raison de ne pas dormir. Et de guetter ce gros obèse de Père Noël !
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Et quelquefois j’ai comme une grande idée Ken Kesey Quelquefois, on tombe sur un grand chefd’œuvre qui pulvérise la littérature. Figure phare de la contre-culture américaine des années 60 et 70, Ken Kesey publie en 1964, avant d’aller gober des hallus avec les Merry Pranksters, cette histoire de bûcherons brutaux embringués dans une affaire syndicale. A la fois fresque sociale, drame familial et littérature des grands espaces, cette Grande Idée mélange Faulkner, Steinbeck, et Capote. Si ce monument n’est pas au pied du sapin, écrivez une réclamation au Père Noël. — Editions Monsieur Toussaint Louverture Mourir est le verbe approprié Michel Douard En 2048, les vieux peuvent aller finir leur vie entre riches, à l’abris des conflits armés et sociaux du monde extérieur, dramatiquement pauvre. Les riches négocient leur entrée dans un hospice de luxe, avec chirurgie esthétique, alcool et drogue à gogo en léguant une grosse partie de leur fortune au gérant, au détriment de leur entourage. Un jour de janvier, le petit système parfaitement huilé tremble… Et nous on rigole en voyant des vieux plonger en plein thriller rocambolesque, à la fois décalé et futuriste. — Editions Pocket Comment protéger votre maison en cas d’attaque nucléaire Manuel de défense Civile Bonne question, par les temps qui courent, non ? Publié au Royaume-Uni en 1963, donc en pleine menace nucléaire mondiale à cause des Russes et des Américains, ce petit manuel très pragmatique et méthodique n’a rien perdu de sa lucidité. Si on se surprend à sourire tout au long de la lecture, on ne peut s’empêcher de se dire que peut-être, c’était pas si bête, hein, comment on ferait là ? Et en cas de zombies hein ? On devrait commencer par vérifier la jauge d’essence avant de rigoler… — Editions Allia 20
Bleu de Fosse Thierry Desaules Un homme d’âge moyen, Thomas, un jeune escort, Bassem. Au delà de la relation charnelle et monétisée se dessine un huis clos étouffant, sourdement menacé, comme si le temps était compté pour les amants. Thierry Desaules signe un roman percutant, profond et sensuel, rythmé par une bande-son électrique. On se perd avec lui dans ces moments intimes qui se consument, qui traversent les crépuscules avec romantisme au rythme des discrètes confessions de Bassem. Si le bleu est la couleur de la nuit amoureuse, le noir n’est jamais loin… — Editions du 38 Puerto Apache Juan Martini Le Rat, petit voyou maillon dans une chaîne de gros caïds, se fait tabasser. Il n’a aucune idée des raisons ni des personnes qui ont commandité l’expédition. Il s’enfuit et va mener une enquête méticuleuse dans ce bidonville autogéré en plein Buenos Aires. La tension monte au fil des découvertes du Rat, la violence éclate à tous les coins de rues. Ce thriller urbain ne laisse aucun temps mort à son lecteur, capturé avec le personnage, entre le bruit des balles, l’odeur des cigarettes et la musique cumbia qui résonne dans ces virées troubles. — Editions Asphalte Superman n’existe pas Collectif Quatre écrivains, Marc Villard, Anna Rozen, Philipe Jaenada, Emmanuelle Urien signent quatre longues nouvelles, quatre facettes de la personnalité masculine, plus proche du loser boulet empêtré dans ses problèmes sentimentaux, d’image de soi, d’avenir que du superhéros… Les quatre tons se font écho, tissent un portrait fragile, parfois émouvant, toujours juste, de ces hommes, en équilibre dans leur humanité, malmenés par la vie. — Editions In8
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CINÉMA T
PIERIG LERAY
LES SORTIES CINÉ Star Wars, le réveil de la force de J.J Abrams
Un + Une de Claude Lelouch Claude Lelouch porte un regard de babosse cracheur de feu en sarouel sur le fameux voyage initiatique en Inde, celui qui a révolutionné la vie de ton pote du lycée, de droite et en slim mocassins, désormais mono-dreadé et un bâton de pluie en main. D’une banalité crasse, un vide sidéral où Jean Dujardin enfonce toujours plus profond sa carrière éphémère. Sans oublier la mocheté visuelle bigleuse de Lelouch et son propos de vieux rêvasseur libidineux qui n’a toujours rien compris à cette nouvelle génération qui chie sur la pauvreté. sortie le 9 décembre 22
Ma confiance est totale et aveugle. J.J. Abrams était le choix idéal, Oscar Isaac une évidence, et le retour des vieux loups de mer (Fisher, Ford, Hamill) un clin d’œil idéal à la future trilogie Disney. Une nouvelle partouze jedi, la Force est échangée aussi férocement qu’un coup de sabre glisse dans un trou noir, en découle un nouveau côté obscur, et un couple multiracial qui le combat. Aussi bon qu’une bifle interstellaire de Obi-HPG. sortie le 16 décembre
Joy de D.O. Russel Sans déconner les gars ? Faire chialer la ménagère avec un biopic de l’inventrice de la serpillère magique ? Vous n’avez pas l’impression d’aller un peu trop loin dans le foutage de gueule ? Et en plus, nous vendre ça comme un film universel, féministe et qui combat les préjugés ? Sérieux les gars ? La serpillière magique ? Je craque, et je tire la chasse, qu’estce que j’en ai à foutre de cette blondasse qui finit à présenter le télé-achat ? Une certaine idée de la réussite américaine me direz-vous. Sortie le 30 décembre
The Big Short, le casse du siècle de A. Mc Kay La bonne vieille soupe populaire de l’ignare, double dose d’un dégueuli américain de Noël pour arroser les ringards abreuvés au foie gras nerveux et à la bûche baveuse, avec en premier rôle les méga-enflures du boxoffice (Bale+Pitt+Gosling), en réal’ un sousSoderberg (Ocean’s…), le tout dans un conte Robin Hood du dollar nous donnant bonne conscience (pillons les banques !), nous les enfoirés satanistes et capitalistes, la nouvelle Apple Watch à la gueule du copain RMIste. sortie le 23 décembre
Mais aussi : Back Home de J. Trier sortie le 9 décembre, drame et réunion de famille, noirceur glaciale "Festenienne", sublime (5/5), Le goût des merveilles de E. Besnard sortie le 16 décembre, Virginie Efiqui ? Efiquoi ? Ah, Efira... le cul de cette Belge destinée à l’anonymat (0/5), Le Nouveau de R. Rosenberg sortie le 23 décembre, peut-on indiquer à Max Boulbil que ça y est, on a compris, qu’il arrête d’essayer, la mascarade est finie. Il n’est pas drôle (1/5), Pension complète de F.E. Siri sortie le 30 décembre, je ne le martellerai jamais assez, Dubosc est le premier beauf de France, et mis en scène par la voix binaire d’un iPhone, ça sonne comme ce fameux réveil qui ne veut jamais s’arrêter (0/5). 23
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leonardbutler.fr
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ART T
MPK FASHION GARAGE P
FASHION GARAGE — LA NEF DES FOUS Selon le mythe, Fashion Garage est né une nuit de décembre 2009 dans un garage de banlieue parisienne. Créé par le cerveau particulièrement déviant du performeur Olivier Nourisson, ses rituels extatiques parodiant les défilés de mode sont devenus au fil des années un rendez-vous immanquable de l'über underground. S'exportant dans
les bas-fonds d'Hambourg, de Milan ou de Calais, multipliant les slogans foutraques et les poses dégénérées, il fallait bien qu'un livre relate tout en image cette joyeuse anarchie. C'est enfin chose faite (il sera disponible le 9 janvier à la librairie le Monte-en-l'air). Pour fêter ça, on a bu des mousses avec le principal intéressé. 27
“MA PROBLÉMATIQUE EST DE RECRÉER DES POCHES DE RÉSISTANCE ET DE LÂCHER PRISE. C'EST UN PEU COMME PRENDRE DES TRIPS EN FAIT.” 28
Olivier Nourisson, Fashion Garage, c'est quoi ce putain de bordel ? Fashion Garage, c'est prendre le cadre du monde de la mode afin de le détourner et faire apparaître une sorte de transe, ou de délire collectif. J'utilise le dispositif autoritaire des défilés, sauf que là, personne n'est à la baguette et tout le monde fait ce qu'il veut, surtout dans les backstages. Comment ça se déroule ? J'arrive dans une ville, et trois jours avant, je puise dans un tas de fringues que j'ai récupérées. J'appelle le mec de la presse locale, le mec fait une annonce dans le canard, et les gens se pointent. C'est des gens que je ne connais pas quoi. Et ils comprennent vite le truc. La seule règle fixe : pas de miroirs dans les backstages, comme ça, les "mannequins" ne peuvent pas se voir. Il m'arrive d'avoir des exhibitionnistes, des personnes hyper complexées qui se libèrent... C'est assez bordélique le public. La dernière fois, il y avait une mémère qui sortait d'un magasin, elle a posé ses cabas, elle s'est désapée, elle s'est foutue les trucs, elle a fait 3-4 passages... Ou alors d'autres qui viennent revendiquer des trucs. Ils ont pas la place dans la "Cité", et pour eux, c'est comme une agora, et à un moment y'a des fulgurances, ils peuvent s'exprimer. En fait, les Fashion Garage, c'est ça, on crée dans une ville un espace où les gens vont pouvoir s'exprimer. La mode, c'est un prétexte. Ça se passe où ces soirées ? Un peu partout. A Hambourg, c'était dans un foyer de jeunes travailleurs, à Milan, dans une ancienne imprimerie, Calais, un H&M désaffecté, Saint-Denis dans un atelier d'artiste, Grenoble dans un théâtre... Olivier Nourisson, quelles seront les grandes tendances 2016-2017 ? J'pense que les gens sont tellement flippés qu'il va falloir que l'inconscient parle. Ça laisse pré-
sager une mode sans aucune référence. Il n'y aura pas de mode littérale, genre avec des burqas, des cagoules et tout ça. Je pense qu'il va falloir trouver un truc qui se situe dans les profondeurs, ré-explorer des archaïsmes, revenir à un certain état brut. Y'a-t-il de la coke pour les VIP lors de vos défilés ? Non, parce qu'on est plutôt des pauvres. Mais en général, y'a pas mal d'alcool. On se met plutôt des cocktails assez forts dans la gueule. Les gens sont assez chauffés. Olivier Nourisson, quelle est la collection dont tu es le plus fier au niveau des matières ? A Calais, c'était intéressant. Les gens me disaient : « Pourquoi vous faites ça à Calais, alors que vous avez bossé à Milan, à Paris, à Hambourg... ? » Y'avait un complexe à la base, par rapport aux grandes villes. Ils sont donc venus en masse, de tout poids, de toute taille, de tout âge, et les gens se sont lâchés. En fait, ils avaient récupéré plein de trucs sur la plage, y'avait des sacs, des filets, etc, c'était un peu la thématique "pêche" quoi. Du coup, les matières, elles étaient vraiment pas mal. Fashion Garage peut-il sauver le monde ? Carrément, ouais. Et je te le dis sans déconner. Un jour, j'ai rencontré un mec qui était ethnologue, et qui bosse sur les rituels chamaniques en Amazonie, et le mec m'a dit : « En fait, ce que tu fais, c'est des rituels chamaniques pour les occidentaux. » Les médias, le monde dans lequel on vit, ont tendance à rationaliser notre imaginaire, on n'a même plus d'espace pour rêver, on rêve à ta place. C'est un fait, notre espace d'imaginaire se réduit, se restreint. Du coup, ma problématique est de recréer des poches de résistance et de lâcher prise. C'est un peu comme prendre des trips en fait. Il y a un passage de non-maîtrise pour accéder à une maî29
trise de soi plus profonde. Y'a un livre qui sort depuis plus de 30 ans, et qui s'appelle le DSM5. C'est un livre qui classe toutes les maladies psychiatriques, et à chaque maladie, on applique des traitements médicamenteux. C'est à dire qu'on va traiter de la même manière tous les schizos, tous les paranos, etc, on va les traiter en masse. C'est très économique, parce que la chimie, ça permet de les maintenir. Par contre, on est plus dans le traitement individuel, on gomme leur singularité. Ce genre de dispositif s'étend un peu métaphoriquement à toutes les choses du quotidien. C'est là où le Fashion Garage est salvateur, parce que tous les gens qui y passent retrouvent une singularité, et redeviennent maîtres de ce qu'on leur a ôté. C'est un peu comme si notre société leur enlevait la parole tout en disant vous pouvez vous exprimer librement. On est dans un simulacre de liberté. J'ai lu dans une de tes interviews que tu puisais ton inspiration dans un groupuscule qui s'appelle "En-dehors". Tu peux nous en parler ? C'est un groupe de jeunes anarchistes du début du XXe. Ce groupe, c'est le premier exemple de squatteurs contemporains, ils prônaient les appartements gratuits, le vol, l'anti-travail et l'amour libre. Ils étaient une centaine et ils sont tous partis en prison suite à l'affaire Bono (voir la bande a Bono, célèbre groupe d'anarchistes terroristes, ndlr) parce qu'ils les avaient planqués. Moi, je les cite comme influence parce que je ne me revendique pas comme un artiste de l' "en-dedans". Pour moi, ces artistes de l' "en-dedans" sont soumis à une logique économique, ils n'ouvrent jamais leur gueule. Qu'est-ce que tu penses réellement de la mode ? J'en ai rien à foutre, ils me font vraiment rire. Ce sont des clowns, et dans le vrai sens du terme. Ils sont tout le temps ultra excités, je n'arrive pas à savoir ce qui les pousse. En fait, 30
ce sont des Wagnériens, ils sont dans un art total, ils prennent les choses comme ça, ils dansent avec. Leur discours n'est pas si vide que ça mais ils s'en foutent, ils disent un truc, 6 mois après ils disent le contraire et personne ne leur en tient rigueur. Ça a vachement à voir avec les médias, car ce sont des virtuoses de la prise de matière immédiate, et il faut que ce soit tout de suite fulgurant. Après, quand ils commencent à parler, ils sont vraiment à hurler de rire. Mais je pense que si on les traitait de clowns, ils ne se vexeraient même pas. Au contraire, je suis sûr qu'ils seraient capables de créer quelque chose à partir de ça.Ce sont des bêtes à assimiler des codes. Qu'est-ce qui est subversif dans l'art aujourd'hui ? Fashion Garage. Je cherche un moyen de disparaître par les interventions que je propose. C'est à dire que les gens s'emparent de mes idées et en font ce qu'ils veulent. C'est quasiment une expérience sociale, une expérience du vivant, en laissant un grand degré de liberté au système. C'est comme voir à la fin d'une teuf où tout est destroy. Tu te dis, putain, c'est beau toutes ces tables renversées, ces mecs qui dorment contre le frigo, cet état des choses chaotique... Olivier Nourisson, es-tu un artiste grillé ? Ouais. Après, y'a tout un pan de la critique qui me soutient. Mais bon, je suis rejeté des circuits de l'art officiel subventionné, ne parlons même pas des galeries privées. Je suis autre part. Et justement, je ne veux pas jouer le jeu de l' "underground". Je ne suis pas récupérable. Mon travail est aussi un travail critique sur l'aliénation en art, je ne serai jamais racheté par personne.
Fashion Garage. The Dark side of Fashion (ArtAnanlysisEdition) Disponible le 9 janvier Ă la librairie le Monte-en-l'air. 2, rue de la Mare, 20e http://fashion.garage.free.fr 31
PLAYLIST P
DR
JONNY TEARDROP
On ne connaît pas grand-chose de Jonny Teardrop. On sait cependant que lorsqu'il avait 16 ans, il se faisait passer pour une fille sur les chatrooms de Caramail - utilisant des pseudos comme "prettybambydu92_16", "bbrenda_hills15" - pour hacker des pédophiles. On sait aussi qu'il est depuis 2010 derrière le projet noise qui commence à transpercer les murs, C R A V E, un mélange de 32
feedbacks apocalyptique qui s'engouffrent dans des rhythmiques hip-hop. Laissant place à des voix fantômes holographiques sorties tout droit d'une radio CB pirate, il raconte des histoires urbaines, de motels, et évoque une paranoïa face à cette vie privée que l'on déguise, et qui disparaît aujourd'hui. Retrouvez-le sur Rinse FM le 8 janvier 2016, dans l'émission Blue Panther de Myako.
WOLF EYES DESERT OF GLUE Quand je met un disque de Wolf Eyes, je perds complètement la notion du temps et de l'espace mais ce titre me projette directement dans un monde post-apocalyptique, dans une ville fantôme du Colorado. CLIPPING BLOCK Polaroids sonores. Daveed Diggs a le don pour nous mettre un Oculus sur la tête dès les premières secondes. CRAVE SIGNAL CRAVE est le projet sur lequel je suis le plus actif aujourd'hui. Signal est sur l'EP SIGNAL, disponible en digital sur mon bandcamp. Ce titre évoque ce moment excitant que j'avais avant de prendre le contrôle de l'ordinateur de mes cibles (des pédophiles) quand j'avais 16 ans.. THE I.L.Y'S ARTICULATE (IM GOING SO FAR INTO YOU) Death Grips sont derrière ce projet. Un de mes albums préférés de 2015 ! L'album est TRÈS BON ! J'ai choisi celle-là car c'est le genre de chanson qui te rentre dans les os. Je me suis levé avec dans le crâne "I don't know what the people do, I'm going so far into you" chaque matin pendant un mois. JONNY TEARDROP GLUEY WORLD Je l'ai enregistrée à l'arrache dans ma voiture quand je vivais à moitié dedans à un moment cette année... Gluey World est tirée de mon nouvel album No Problemo qui va sortir en vinyle sur le label de Romain Azzaro, Rouge Mécanique, en 2016 ! L'édition vinyle comportera quelques titres en plus, un mastering etc.
WALTER GROSS FADE TO FACTS En écoutant cela j'ai l'impression d'entendre un disque de Jeans Wilder et un système modulaire passés dans un blender. Un bon milkshake de Walter Gross. EARTHEATER PUT A HEAD IN A HEAD Une cyber-sirène new-yorkaise qui a une guitare à la couleur du Kool Acid, qu'est-ce que tu veux de plus ? Elle utilise aussi quelques machines et les lyrics sont très bien pensées. J'ai découvert Alexandra Drewchin sur scène et c'était l'un des meileurs concerts que j'ai vu cette année. PICTUREPLANE RIOT PORN J'ai joué avec Travis à l'Urban Spree à Berlin au début du mois et son concert était mortel. Il a SON truc à lui, il est hyper sincère dans ce qu'il fait et en personne. Je respecte beaucoup ça. Riot Porn est sur son nouvel album Technomancer qui vient de sortir et je conseille aussi d'aller fouiller dans ses premiers albums. ONEOHTRIX POINT NEVER TERMINATOR LAKE Je suis de près OPN depuis 2009. Je retrouve souvent cette atmosphère très proche des jeux Atari ST. Et les collages de pub télé, c'est tellement mortel. Et je suis aussi fan de Terminator et c'est pour ça que j'ai choisi ce titre en particulier. ROSE ROSE BRAVE IT OUT Hardcore japonais. Je trouve que les Japonais sont les meilleurs dans le genre. Je pense que si ces types pouvaient faire des perfusions de leur propre sang à leurs instruments pour que ça sonne encore plus sincère, ils le feraient.
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MUSIQUE T
HILLEL SCHLEGEL P KEFFER
ANDREW CLARISTIDGE — DARK SIDE OF THE DANCE
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David Ducaruge alias Andrew Claristidge est un homme très occupé. Membre du duo Acid Washed et co-fondateur de Los Massieras, son nouveau projet avec Hugo Capablanca et Satch Hoyt, il a encore rajouté une corde à son arc en sortant en cette fin d'année son premier album solo, Danser ou Mourir. Un titre tristement d'actualité pour celui qui partage son temps entre Berlin et la France. « J’essaie de faire plein de choses parce que sinon, je m'ennuie », qu'il nous dit. En tout cas, on ne s'est pas ennuyés à écouter son dernier opus : des basses qui sentent l'after à la cave, une ambiance dark wave à couper au couteau et des synthés, des synthés, toujours des synthés. « Alles klar, Herr Claristidge. » Tu disais l'autre jour que tu te voyais principalement comme un Dj et un producteur, et non pas comme un musicien. Qu'est-ce à dire ? Tu as une formation musicale initiale pourtant, non ? C'est-à-dire que comme tout gamin de bonne famille, j'ai fait du solfège, pris quelques leçons de piano… Mais enfant, j'ai rapidement trouvé le bicross beaucoup plus intéressant que la musique - on m'a enseigné le solfège de manière pénible et rébarbative, je dois dire. Du coup, je me suis plutôt mis au sport, mais j'ai progressivement changé d'envie en grandissant, car je me suis rendu compte que pour lever les petites minettes de mon quartier, c'était plus facile en essayant d'être une rockstar qu'en étant sportif ! (Rires) En tout cas, à l'époque on était dans les prémices de la house en France, donc je me suis mis à acheter des vinyles, à mixer un petit peu, et voilà comment je suis rentré dans ce milieu-là. Il se trouve que je suis fils de militaire, donc tous les deux ans, on changeait de ville avec ma famille. Du coup, j'ai beaucoup voyagé à travers la France et un peu à l'étranger : c'était alors le début des raves, et je me suis retrouvé complètement dans cette matrice de musique électronique sans vraiment l'avoir prémédité. 36
Tu vis à Berlin depuis 2004. Tu préfères Berlin ou Paris pour la nuit ? Moi, je persiste à penser que je fais une musique très française, mais pour sortir, je dirais que je préfère Berlin. A Paris, j'ai tendance à m'ennuyer rapidement. Les lieux se ressemblent un petit peu tous, que ça soit le Social, la Concrete… Je trouve ça assez formaté et copié sur la scène berlinoise. Paris n'a pas encore trouvé de modèle dans lequel elle s'épanouit réellement. Dans les années 90, des endroits comme le Bataclan ou la Cigale ou le Gibus avaient beaucoup plus d'intérêt que les clubs actuels, précisément parce qu'ils avaient une identité très parisienne. Aujourd'hui, Paris est plus dans l'imitation, c'est dommage. Les clubs parisiens actuels, t'as l'impression que c'est un festival, c'est la course au nom… Moi, ça m'intéresse pas. Je préfère voir un mec qui joue un seul set pendant 10 heures que quinze noms qui se succèdent. Danser ou Mourir, c'est hélas très bien trouvé comme titre (l'interview a été réalisée cinq jours après les attentats de Paris, ndlr). Tu avais une idée précise derrière la tête pour ce disque ? Je ne l'ai pas fait exprès ! En fait, je suis tombé il y a deux ans sur une lecture à propos de la Dancing Plague. C’est une épidémie qui a eu lieu à Strasbourg en 1518, où la population s'est spontanément mise à danser en masse sans pouvoir s'arrêter, dans la rue, jusqu'à ce que mort s'ensuive. Cette épidémie toucha un nombre énorme de personnes, et encore aujourd'hui, il n'y a pas de consensus scientifique réel sur ce qui aurait pu la causer. A l'époque, les autorités avaient même embauché des musiciens pour jouer pour ces gens dansant jusqu'à épuisement, et forcément, je me suis mis à fantasmer sur le truc : et si l'on pouvait se transporter dans le temps et amener des Dj’s pour les faire danser ? C'était une réflexion un peu débilos d'after, quoi ! (Rires) Du coup, j'ai commencé à brainstormer sur le concept et à partir dans des
associations d'idées. Il y a ce groupe aussi, qui est l'un de mes favoris et qui s'appelle Liaisons Dangereuses, qui a écrit un morceau intitulé Être Assis ou Danser ; à partir de là, j'ai commencé à plonger dans une sorte de nébuleuse créative. Car on peut danser sur n'importe quoi, en fait. Sur de l'ambient, du tango, de la musique qui n'est pas forcément dansante… Donc je me suis dit que sur cet album-là, j'allais me consacrer à un son un peu dancefloor, mais pas que. Je vais mettre un peu toutes mes influences dedans, ambient et autres, et trouver un ciment entre toutes ces briques. Ce ciment, c'est le studio, les sons que j'ai utilisés. J'ai cherché différentes rythmiques, différentes atmosphères, et tout ça s'est retrouvé lié par mon utilisation des synthés. J'ai donc réalisé un album qui regroupe toutes mes influences, des eighties aux années 2000, et comme
aujourd'hui, ce ne sont plus tellement les mélodies qui priment mais les techniques de production, j'ai essayé de prendre cet aspect à contrepied et ne pas faire un album de producteur justement, ne pas faire un truc qui sonne "ultra-gros, ultra-produit". Aujourd'hui, quand on écoute des tracks de techno, tout sonne très lourd, comme chez Maceo Plex par exemple. Je ne fais pas dans le lo-fi pour autant, mais je suis plutôt dans une optique comme Fad Gadget : trouver des textures sonores, des trucs un peu différents. Je ne suis pas là pour faire de la compétition dans le son ! Je m'en fous d'avoir une Ferrari ou un gros canon orienté sur le dancefloor - j'essaie simplement de faire de la belle musique et de me faire plaisir avec. Andrew Claristidge Danser ou Mourir WYN&M / Mille Feuilles 37
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POLITIQUE T
MPK
LA LISTE F.L.U.O — VIENT JOUER LES TROUBLEFÊTES Vous êtes sûrement un bon wagon à n'en avoir rien à carrer des élections régionales (qui se dérouleront d'ailleurs du 7 au 15) et il est vrai qu'entre les verbiages politicards et les luttes d'égo, la chose publique passe à la trappe pour la plupart d'entre nous. Pourtant, dans le brouhaha de ce barnum institutionnalisé, la liste F.L.U.O (Fédération Libertaire Unitaire Ouverte) fait figure d'outsider en regrou-
pant sous sa bannière iconoclaste le Parti Pirate, des orgas de free party, Cannabis Sans Frontières ou encore des militants écolos et LGBT... Suite à la lecture de leur programme qui rejoint en bien des points notre ligne édito, on s'est dit que ce serait pertinent de rencontrer Thomas Watanabe-Vermorel, porte-parole du mouvement.
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Les Inrocks vous ont qualifiés de « parti de putes, de drogués et de teufeurs ». Vous le prenez comment ? Comme accroche, c'est plutôt sympathique, ça a un côté provocateur qui nous plaît bien. Bon, on oublie quand même par cette présentation certaines composantes du mouvement comme le Parti Pirate, les LGBT, Cannabis Sans Frontières... Et puis on oublie aussi toute une population qui est plus conventionnelle et qui soutient les combats de F.L.U.O. En quoi êtes-vous libertaires ? Il y a des sens variés au mot "libertaire", certaines définitions de ce mot ont même une rigueur universitaire. Pour nous, ce qui est fondamental, c'est la liberté de chacun. Et notamment la possibilité de s'organiser avec son réseau propre, son groupe de vie, selon des règles qui semblent bonnes, dans la mesure où l'on ne nuit pas. On ne veut pas être dans un libertarianisme ou un chaos. On ne veut pas nuire tout en refusant l'aliénation. Mais quand tu me parles de liberté, tu sous-entends les libertés sexuelles, de déplacements, de penser, de diffuser des idées, de se réunir, de créer, de se droguer... ? Oui, et ça va bien au-delà, mais tu as raison de mettre le doigt sur le fait que les libertés ne sont pas des choses abstraites. C'est pas la "liberté" qui guide le peuple, celle-là, elle est bien jolie, mais il nous faut du concret. Par exemple, est-ce que je peux envoyer un mail sans être espionné ? Est-ce que j'ai le droit d'errer pour bâtir mon opinion politique ? De me tromper ? Etc, etc. Quand on parle de liberté, on veut vraiment parler aussi de mode de vie, de pouvoir avoir le mode de vie que l'on souhaite tant que l'on ne fait pas chier l'autre. Ce qui nous pousse également à réfléchir sur 40
des notions de santé publique, lorsque l'on aborde le thème des minorités sexuelles, de la prostitution ou de la drogue. Interdire par pur moralisme la prostitution ou la prise de stupéfiant, c'est la pire réponse collective à ces questions. La prohibition fait rentrer tout ceci dans la clandestinité, et une fois que les choses sont illégales, elles sont gérées par une mafia qui n'a aucun intérêt à se soucier de la santé publique. Dans ces cas de figure, nous prônons des réglementations qui sont auto-gérées par les principaux intéressés. En quelques phrases, vos mesures phares ? Faire cesser l'acharnement administratif sur les free party et laisser à leur disposition des zones industrielles. Protéger la culture des squats artistiques ou de logement. Soutenir le financement des associations LGBT, multiplier les initiatives en faveur de la santé des travailleurs du sexe. Dans le volet démocratique, nous voulons a minima que la région se dote d'une plateforme de consultation permanente qui soit ouverte à tous afin qu'il y ait une transparence absolue, nous nous engageons aussi dans une lutte contre la corruption. Écologiquement, on veut faire de l'Île-de-France une région pilote en matière d'énergies renouvelables et d'indépendance énergétique. Nous militons aussi pour la légalisation du cannabis et de la possibilité de le cultiver dans le cadre de "Cannabis Social Club". Au niveau informatique, que l'on enlève Windows des écoles pour faire cesser le monopole de Microsoft sur les esprits. Et puis, pour les transports, on propose de pouvoir voyager dans toute l'Île-deFrance avec un ticket de métro à prix dézoné pendant les périodes de vacances scolaires. Votre point de vue, par rapport aux attentats du 13 novembre ? On a été extrêmement choqués comme tout
“EN FRANCE, IL Y A À PEU PRÈS UNE LOI SÉCURITAIRE PAR AN DEPUIS 20 ANS ET ON VOIT BIEN QUE ÇA NE MARCHE PAS, QUE ÇA NE VA PAS MIEUX.”
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le monde. Ils n'ont pas eu lieu n'importe où, ils ont eu lieu dans des endroits où les gens étaient rassemblés pour prendre du plaisir ensemble. En plus de la question de la misère sociale, des trafics d'armes, de la géo-politique extrêmement complexe au Moyen-Orient, le fait que l'hédonisme à l'européenne soit visé nous a particulièrement marqués. Comment réagissez-vous par rapport aux futures mesures liberticides qui vont découler de l'état d'urgence ? Ces mesures vont vraiment être la deuxième mâchoire du piège à loup. D'une part, il y a ces monstres qui haïssent le plaisir de vivre, et d'autre part, il y a cette série de lois liberticides qui nous enferment dans un nationalisme malsain avec des vertus patriotiques qui risquent encore plus d'écraser nos libertés et nos modes de vie. Il faut se dire que les terroristes n'ont pas tué la liberté, ils ont tué des gens, et si nos dirigeants restreignent nos libertés, alors à ce moment-là, le terrorisme a gagné. Toute la problématique de F.L.U.O, c'est comment vivre ensemble tout en ayant des modes de vie différents. Et ce n'est pas une question de tolérance. La tolérance, c'est « j'aime pas bien mais je fais avec parce que je suis obligé ». Au contraire, il faut s'ENTHOUSIASMER parce que son voisin n'a pas du tout le même mode de vie que soi, c'est ça qui crée l'émulation. En France, il y a à peu près une loi sécuritaire par an depuis 20 ans et on voit bien que ça ne marche pas, que ça ne va pas mieux. C'est un prétexte. Dans le fond, ce n'est pas pour contrecarrer le terrorisme, mais surtout pour contrôler la population. Et puis, à force d'avoir dégagé toute une partie de la population du champ républicain, on a créé les conditions d'une colère qui s'est canalisée par l'intégrisme religieux. Et beaucoup de pays occidentaux ont créé leur croissance au détriment des pays d'Afrique et du Moyen-Orient, ce qui rend la vie facile à ceux qui se nourrissent de la haine.
Vivons-nous dans une réelle démocratie ? La démocratie, ce n'est pas blanc ou noir. Il y a tout un niveau de gris... là, je dirais qu'on est sur un gris anthracite. La démocratie doit être vivante, soit on gagne en démocratie, soit on perd en démocratie. Et ça fait presque 30 ans qu'on perd un peu plus de droits, un peu plus de liberté, etc. Je crois que les dernières lois qui ont été un gain pour la liberté datent du tout début du mandat de Mitterrand. Quand la démocratie est malade, il faut plus de démocratie, et non pas moins. D'autant plus qu'on a beaucoup de moyens pour créer des alternatives à cette fameuse "démocratie représentative". La politique devrait être le fait des citoyens, non pas de professionnels de la politique. Ce qu'on ne dit pas aussi, c'est qu'à chaque élection, on invite les gens à voter, jamais à se présenter. A une élection municipale, il devrait y avoir des campagnes publicitaires qui expliquent et qui encouragent les citoyens à participer à la vie politique. Trop souvent, les citoyens sont privés de ce droit. C'est trop facile pour les "castes dirigeantes". Danser, picoler, etc... Est-ce que cela ne va pas au-delà du simple hédonisme ? N'y a-t-il pas quelque chose de politique, ou de micro-politique là-dedans ? Ce n'est pas seulement prendre du plaisir, c'est aussi en donner. Et entre ceux qui organisent, ceux qui t'invitent, les échanges à tous les niveaux, les styles musicaux différents qui se côtoient, il y a des rencontres, et là, c'est VIVANT. C'est peut-être l'un des seuls moments où dans notre société l'on fait de la POLITIQUE VIVANTE. http://fluo.online
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MUSIQUE T
FLORIN SAINT MERRI ANTOINE PASSERAT & NICOLA DELORME P
GOLDEN BUG — UN OISEAU RARE
Antoine Harispuru aka Golden Bug fait partie de ces producteurs discrets et talentueux qu'« il faut surveiller de près », comme dit l'adage journalistique. Avec une actualité en
cette fin d'année plutôt chargée, il était grand temps pour nous de lui tirer quelques vers du nez.
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Raconte-moi l'histoire de ton "nom de scène" ? Avant de me lancer dans Golden Bug, j’ai travaillé sur une courte période pour une société catalane qui était spécialisée en objets de design. Ils m’avaient commandé une série de jouets sur le thème des insectes et l’un d’eux était une grosse larve que j’avais appelée Golden Bug. En parallèle, je sortais mon premier EP sur le label munichois Gomma et je n’avais pas de nom d’artiste, j’ai donc pris le nom d’un de mes jouets. Ton excellent EP Wild Boys sort sur le label d'Ivan Smagghe. Pourquoi, et "comment" ce label ? J’envoyais régulièrement mes morceaux à Ivan et comme il cherchait de nouvelles sorties pour son label, il m’a proposé de sortir un EP. Je ne le connais pas personnellement mais je le suivais depuis longtemps en écoutant son émission Test sur Radio Nova. J’aime beaucoup de choses qu’il a produites, surtout avec son projet It’s A Fine Line. Si je te dis que Wild Boys oscille entre une synth wave/dark disco froide, élégante, sophistiquée et un brin sexuelle (Wild Boys) et de la "musique pour club de strip-tease lynchéen" (Ik Voel Je, L'Horloge), tu le prends comment ? Je le prends bien même si je ne suis pas un adepte des clubs de strip-tease. J’aime beaucoup les sons hybrides qui mélangent la techno, le funk, le psyché avec d’autres genres et qui créent des ambiances bizarroïdes.Je suis assez gai dans la vie mais bizarrement, ça ne ressort pas quand je fais de la musique. Pour ce côté synth, ce n'est d'ailleurs pas pour rien que tu as choisi la voix de Yan Wagner, un artiste qu'on respecte beaucoup. A l’époque j’étais à fond sur le titre de Fad Gadget Coitus Interuptus qui est un classique de 46
new wave et je voulais faire un morceau dans cet esprit.J’avais fait la musique avec mon pote italien Fabrizio Mammarella et je cherchais un bon chanteur. Je connaissais le LP de Yan 48 Hours et j’aimais beaucoup sa voix. Je lui ai donc envoyé le morceau et il m’a répondu que ça le branchait. Venons-en à V.I.C.T.O.R, ton projet live qui mêle art visuel, sculpture et musique. 1) De quoi est-il l'acronyme ? 2) Quel est le "sens" de ce projet ? J’ai un couple d’amis à Barcelone qui a un studio d’art visuel nommé Desilence Studio. Le problème c’est que faire un live de musique électronique est un exercice compliqué et souvent soporifique, donc notre idée était de faire un show où la musique et l'image communiquent de la façon la plus harmonieuse possible. V.I.C.T.O.R mélange donc ma musique avec les visuels/mappings de Desilence Studio qui sont projetés sur une structure réalisée par l’architecte allemand Christian Leibenger faite de cartons triangulaires et inspirée du Rubik’s Snake. On l’a présenté en octobre dernier au Musée d’Art Contemporain de Barcelone, ensuite en Italie au festival Electropark et bientôt à Mexico. Concernant le nom "V.I.C.T.O.R", ce n’est pas un acronyme mais le nom d’un robot que j’avais quand j’étais petit. Ma mère avait un magasin de jouets dans les années 90, spécialisé en robots en tout genre. C’était l’époque de Goldorak, Albator, Sankukai, etc... Un jour elle est revenue d’un salon du jouet avec un gros robot télécommandé qui s’appellait Victor. Je trouve que le nom est cool et je l’ai donc "récupéré". Ce live prépare ton second LP. Quelle direction musicale va-t-il prendre ? Dans le live, je joue des titres qui seront sur mon nouvel album mais aussi des titres et des remix plus anciens. L’album V.I.C.T.O.R sera composé de 10-12 titres oscillant entre de la techno lente et poisseuse, de la funk robotique et des ambiances plus psychédéliques.
Pour finir, peux-tu aussi nous parler du label que tu as monté, La Belle records ? Après avoir quitté Gomma j’avais envie de monter mon propre label pour sortir mes morceaux mais aussi les disques d’artistes que j’aime. J'ai donc ouvert La Belle records avec trois bons potes, Romain Coulon, Stan Ramsay de La Tebwa Entertainment et Gennaro aka Herr Styler. On essaye d’ouvrir petit à petit le spectre pour ne pas s’enfermer dans un style. On attache beaucoup d’importance aux pochettes réalisées par Eugène Soloviev et aux
remixeurs. On a par exemple sorti un disque de Marc Pinol remixé par Alejandro Paz, In Flagranti remixé par Moscoman ou In Fields remixé par Get A Room!… 2015 a été une année plus calme en sorties, nous ne trouvions pas ce que nous cherchions mais 2016 s’annonce plus prolifique car nous allons commencer à sortir des formats longs. — Wild Boys EP (Les Disques de la Mort) Sortie vinyle le 11 décembre 47
AGENDA
VENDREDI 4 DÉCEMBRE 22h Wanderlust Gratuit / 10€ House Music (All Night Long) w/ Joe Smooth, Joachim Labrande, Flabaire 23h Bus Palladium La Bonbon party au Bus Palladium SAMEDI 5 DÉCEMBRE 23h Tunnel 10 / 20€ Newtrack invite Laurent Garnier 23h30 Showcase 12€ w/ Julio Bashmore, Neue Grafik (Live) Mezigue & Sandro (D.KO Records) DIMANCHE 6 DÉCEMBRE 7h Concrete 20€ Minibar 10 years Birthday w/ Rhadoo, Fumiya Tanaka, Lowris… VENDREDI 11 DÉCEMBRE 23h Bus Palladium La Bonbon party au Bus Palladium SAMEDI 12 DÉCEMBRE 23h Djoon 5 / 10€ w/ My Grooves Feat Mr. Mendel
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JEUDI 17 DÉCEMBRE 23h Badaboum 10€ La Parenthèse w/ Maxye & Damien 00h La Java 5€ Jeudi Minuit w/ Guido Minisky & Friends VENDREDI 18 DÉCEMBRE Paris Event Center 30 / 55€ Weather Winter w/ Jeff Mills (All Night Long) 23h Bus Palladium La Bonbon party au Bus Palladium SAMEDI 19 DÉCEMBRE Paris Event Center 30 / 55€ Weather Winter w/ Kenny Dope, Lil’ Louis, Mad Rey, Marcel Dettman… VENDREDI 25 DÉCEMBRE 23h Bus Palladium La Bonbon party au Bus Palladium SAMEDI 26 DÉCEMBRE 00h Rex Club 13,70€ Smallville Paris Xmas Party w/ Move D, Eugenio, Motto, Jacques Bon
B 590 800 173 RCS TOULOUSE
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* FACEBOOK.COM/CUBANISTO
LʼABUS DʼALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. A CONSOMMER AVEC MODÉRATION.
ALASDAIR GRAHAM, DAVID PETTIGREW ET GRAHAM LORIMER ÉLABORENT LE BLENDED SCOTCH WHISKY DANS LA PLUS PURE TRADITION DU CLAN CAMPBELL.
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