DÊcembre 2017 - n° 79 - www.lebonbon.fr
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EDITO
Le Bonbon Nuit → 12/2017
Cher Bonbon Nuit, J’ai pris deux minutes sur mon temps car je voulais te dire que ton édition du mois de décembre était vraiment incroyable ! J’ai découvert votre magazine sur le comptoir du Rex pendant un set de Dj Ridoo dimanche à 7h du mat’ alors que je payais un drink à ma target, c’était assez énorme. Déjà tu as interviewé Sara Forestier. Je l’adore ! Je trouve que sa vision de l’amour est tout à fait compatible avec mes idées et la façon dont je vois l’art et la France en général, vraiment j’ai adoré tes questions et son style. La chanteuse de rap - ou R'n'B comme disent les jeunes - que tu as découverte est top tendance, j’ai eu l’occasion de la voir dans 120 battements par minute et vraiment je trouve cette fille top ! Affaire à suivre LOL. Et que dire des moultes surprises de ce numéro : le dossier sur la fête au cinéma, la fois où tu as loué un discobus, l’expo sur les billards, EXCELLENTE, les critiques ciné au vitriol et, cerise sur le gâteau, tes conseils pour savoir quoi faire de son manteau en soirée, Brigitte a adoré ! Je t’embrasse très fort, on se voit au Bus Palladium vendredi ! Youpi tralala et coquelicots. Emmanuel
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BB N 2
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OURS
Confiseur Rédac’ chef Design Caractères Graphistes Couverture SR Rédaction
Digital Vidéo Chefs de projets Partenariats Régie Pub Le Bonbon Siret Imprimé en France
Jacques de la Chaise Raphaël Clément Breuil République Studio Dinamo Coralie Bariot Mathilde Erard Forestier par Prioreau Louis Haeffner Alexa Béard Carmen Bramly Raphaël Breuil Alexandra Dumont Agathe Giraudeau Pierig Leray Flavien Prioreau Antoine Viger William Baudouin Dulien Serriere Florian Yebga Fanny Lebizay Lionel Ponsin Benjamin Alazard 15, rue du Delta 75009 Paris 01 48 78 15 64 510 580 301 00040
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Le Bonbon Nuit → 12/2017
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À la une
Sara Forestier, elle m’esquive, je l’M
13 Musique
Aloïse Sauvage, cri primal
19 Cinéma
C’est quoi, la fête, au cinéma ?
25 Expo
Costard Attitude au Billard
31 Lifestyle
Que faire de son gros manteau en soirée
35 Cinéma
Gros chagrin de Céline Devaux
37 Cinéma
Les sorties du mois
39 Gonzo
Retour au Discobus, cette fois, on l’a loué
44 Photo
1heure38 par Alexa Beard
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HOTSPOTS
ÇA PLANE POUR MOI Le temps a filé depuis le Pulp et la première fois où l'on a vu Jennifer Cardini mixer. Figure de proue de la scène queer, elle a parcouru un sacré bout de chemin et mène désormais sa barque comme elle l'entend via son label Correspondant. Alors pour sa résidence éponyme au Rex Club, quoi de mieux que d'inviter le génial John Talabot ? Rien, on est d'accord. Correspondant : John Talabot, Perel Live, Jennifer Cardini @ Rex Club Samedi 16 décembre
JOYEUX NOËL DANS LE GAZ Une soirée la veille du réveillon ? Et pourquoi pas si ça vaut le coup ! Ce sont les Spiral Tribe au grand complet qui débarquent du côté de la Villette pour 12h de teuf non-stop ! Tout y passera : acid, techno, hardtek, tribe... comme ils le font si bien depuis plus de 30 ans aux quatre coins de l'Europe. La soirée parfaite pour arriver en forme au réveillon familial ! Xmas Party: SP23 Full Crew @ Glazart Samedi 23 décembre
Décembre 2017
EMBARQUEMENT IMMÉDIAT, DERNIER APPEL L'ancien Electric s'est métamorphosé et se prénomme désormais Terminal 7. Pour l'une de ses premières soirées, on aura le plaisir d'y voir le trio Apollonia, accompagné de Sonja Moonear... C'est ce qu'on appelle un retour sur les chapeaux de roues ! Insomnia : Apollonia, Sonja Moonear, Marwan Sabb @ Terminal 7 Vendredi 29 décembre
COMME CHAQUE ANNÉE, BONNE ANNÉE À toi qui chercheras à t'extirper de ton nouvel an pourri au fin fond de la banlieue, à toi qui ne pourras pas danser avec tes trois amis dans ton 12 m2... Ta solution se trouve du côté du bd Poissonnière ! Les trois diables de Mandar se feront un malin plaisir de t'éviter tous les problèmes suscités, et ce pour toute la nuit voire plus si affinités. Chaud ? Bonne année ! One More: Mandar All Night Long @ Rex Club Dimanche 31 décembre
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À LA UNE
Interview
Sara Forestier, elle m’esquive mais je l’M
Texte
RAPH BREUIL FLAVIEN PRIOREAU
Photos
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Le Bonbon Nuit → 12/2017
Découverte et
dévo ilée a ug
rand public
par Kechiche, Sara ne cesse depuis d’être l’indispensable mèche dans pas mal de bombes cinématographiques. Après avoir tourné avec la crème des réal', c’est avec Forestier derrière la caméra que Sara se trouvera être la plus exigeante pour son rôle dans M, son film à elle, que la comédienne porte à bout de (petits) bras depuis 15 ans. C’est quelques heures après être sorti, ébloui, de la projection de son film que je rencontre une Sara quelque peu tendue, la faute à un taxi qui n’est jamais arrivé. Vu le court laps de temps dont je disposais, j’ai donc dû m’entretenir avec une Sara Forestier énervée, pressée, mais déterminée à ce que son film mérite une reconnaissance égale à la qualité de son film : grande ! 9
À LA UNE
Sara s’asseoit, excédée par quelqu’un qui selon elle nuit au succès du lancement de son film : « Après tu dis ce que tu veux Corinne hein, moi j’ai pas de langue de bois… » (J'essaie de détendre l’atmosphère) Hum, super ! Bonsoir ! J’ai adoré le film, surtout que j’étais parti pour ne pas aimer, Ruquier a adoré. (Rires) Ah cool. Super, merci, tant mieux. C’est quinze ans de travail donc ça fait plaisir. Désolée là on n’a pas arrêté de courir et le taxi n’est vraiment pas arrivé, ce n’est pas mon genre. On a passé la journée à coller nous-mêmes les affiches dans Paris, tu peux aller voir sur Instagram. Qu’est-ce que tu as ressenti ou pensé quand tu as vu ton film pour la première fois, avec des gens, terminé, avec l’impossibilité d’y retoucher ? En toute sincérité même si je n’en doute pas. Je te dis franchement moi, toujours. Je l’ai vraiment reçu ce film. Avant qu’il y ait du public, j’avais du mal à le découvrir vraiment. C’est arrivé au bout de la deuxième fois seulement. Je l’ai vu avec des gens et je me suis rendu compte que je le kiffais. C’est un film qui se vit, pas qui se regarde. Ce que je cherchais à faire, je trouve que j’ai réussi à le faire. Je voulais une intimité immense, et je pense que tu te sens presque avec eux quand tu vis l’histoire. Enfin j’ai ressenti ça quand je l’ai revu cette fois-là. Et j’en suis très fière. Tu me dis que ça fait quinze ans que tu portes ce projet. Ça veut donc dire si je ne m’abuse que tu étais ado quand tu as eu l’idée ? Raconte-nous un peu le processus.
Sara Forestier
J’avais seize ans ouais. Pile-poil au moment ou je commençais L’Esquive. Huit ans d’écriture et quatre ans pour le faire. Au fur et à mesure, ce qui s’est précisé, c’est mon questionnement sur l’intimité, mes interrogations sur l’amour. Qu’est-ce que ça veut dire d’être intime avec quelqu’un ? Mon questionnement a évolué avec mon film. Et inversement. N’y a-t-il pas comme point commun avec le film de Kechiche que tu préparais à l’époque ce sujet du langage et de la communication ? Il y a une épuration du langage dans mon film, contrairement à L’Esquive. Quand tu n’as pas beaucoup de mots, tu choisis les meilleurs. Et lorsque j’écrivais le scénario, je procédais de la même manière, tout ce qui n’était pas frontal, qui n’était pas juste avec leur état amoureux, qui était faux ou qui constituait des éléments extérieurs peu sincères dans la manière de les aborder ; tout ce qui était en dehors de leur intimité, je l'ai viré. Parfois j’écrivais des trucs qui me plaisaient, mais qui ne sortaient pas de leurs tripes. Donc je les ai virés. J’ai tout distillé comme ça pour récupérer un peu les choses, un peu comme une huile essentielle. Y'a peu de mots. C’est l’essence de la poésie, garder l’essentiel et virer le superflu. La limitation des mots est subie par les personnages mais choisie par moi. Tu joues une bègue dans le film, comment est-ce que tu t’es préparée à cette transformation ? La clé c’est la sincérité. Je suis restée avec eux pendant un an. Je n’ai pas essayé de les imiter, j’ai essayé d’être empathique. Je retranscris ce que je ressens. C’est pas cérébral. Bien sûr j’utilise mon cerveau
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À LA UNE
Sara Forestier
pour essayer de les comprendre. Mais c’est avec mes sens que j’ai tenté de les percevoir. Est-ce que c’est la honte ? La peur du regard de l’autre, ou alors une tristesse ? Qu’est-ce qui crée ce blocage chez eux ? C’est ce que j’ai essayé de faire durant cette année. On pourrait aussi y voir la métaphore d’une génération qui a du mal à communiquer ? J’ai essayé de rendre ça assez intemporel. Mais maintenant que tu m’en parles. Y'a la scène du Macdo où la petite sœur apprend à écrire à Mo, je peux comprendre que tu puisses voir le film comme ça mais ce n’était pas l’idée principale. Après oui il y a aussi cette scène avec les jeunes filles qui communiquent par papiers en classe, je l’ai mise à un moment où les élèves étudient Romain Gary, qui était pour son époque un révolutionnaire du langage. Donc ce n’est pas anodin non plus. J’ai peut-être involontairement voulu le rendre intemporel pour cette raison, pour me concentrer sur le sujet principal. Ce que je voulais par-dessus tout, c’était comprendre le rapport humain. L’intimité. Et comme on a tous des putains de gilets par-balles, on ne montre pas notre vulnérabilité. Jamais. On ne la montre que lorsqu’on a confiance. Quand on est dans l’épuration, essayons de reprendre chaque mot et trouvons leur un sens. Quand tu utilises les mots à tire-larigot, tu perds leur sens d’origine, et tu perds l’émotion qui va avec. Pour moi ce sont les sujets du film.
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Y'a des musiques originales de Christophe et il a composé une partie de la BO. Comment s’est passée cette collaboration ? J’y vois parfois des airs de cinéma d’auteur mexicain. C’était une consigne ? Je lui ai demandé de faire l’intérieur des personnages. Et aussi de faire un peu western parfois. D’où peut-être le côté sud-américain que tu vois, ça ne m’étonne pas. Mais non ce n’était pas une consigne. Christophe a vraiment son univers à lui. J’adore, vraiment, je manque de mots pour le coup pour le décrire. Je le dirigeais comme j’ai dirigé mes acteurs, en leur parlant d’émotion. Je le connais depuis dix ans, c’est un ami. Je venais chez lui dans son studio, on faisait des longues prises. Comme je fais toujours avec tout le monde. Tu vas te remettre à la réalisation ? Ou c’était un one shot ? Oui, j’ai un film en projet. Je ne dirai rien de plus. (J’insiste) Non, vraiment, et même si je pouvais j’ai pas du tout envie.
Ton insulte préférée Fils de pute ! (Elle rit aux éclats) Le film que tu as vu 10 000 fois Cabaret de Bob Fosse. J’adore ton sourire d’approbation genre « ah elle est pas si con ». Non mais je plaisante. (Rires) Le premier album que tu as acheté avec ton argent Je n’ai jamais acheté de musique. Les gens m’en font écouter mais moi j’ai pas du tout ce réflexe. Oh t’es déçu ? (Rires) Non mais tes commentaires faciaux sont hyper drôles.
— Sara a son interview sur Nova, elle doit partir, j’ai pourtant encore mille choses à lui dire. Elle a raison Sara, y'a pas besoin de mots pour tomber amoureux.
“Quand tu utilises les mots à tire-larigot, tu perds leur sens d’origine, et tu perds l’émotion qui va avec. Pour moi ce sont les sujets du film.” 13
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MUSIQUE
Interview
Aloïse Sauvage, cri primal Texte
ALEXANDRA DUMONT Dr. ROGER
Photos
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MUSIQUE
Aloïse Sauvage
ctive. a r e p y h e n u t s ’e C’est une hyperactive. Les idées fusent C et s’entrechoquent. Parfois, Aloïse trébuche, perd le fil de sa pensée et ne termine pas sa phrase. Normal, elle a une longueur d’avance sur les mots, sur tout ce qui l’entoure d’ailleurs, tant elle vit à fond et multiplie les talents comme un vrai caméléon. Interprète dans des spectacles de cirque contemporain et de danse, celle qui voulait intégrer l’ENS est aussi actrice et bientôt auteure et metteur en scène d’un spectacle qu’elle rêve de monter avec une amie, à seulement 25 ans. En attendant, on assiste à son éclosion musicale avec deux titres coup de poing. Elle sortira son premier EP, entre rap et chanson, au printemps et fait déjà partie de la Sélection du Prix Chorus 2018 sur la foi d’un seul concert. Avec ça, elle ne donne même pas l’impression d’être essoufflée ! 16
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La musique a-t-elle toujours fait partie de ta vie ? Oui, j’ai commencé très jeune la musique classique. De 8 à 17 ans, j’étais au Conservatoire en activité extrascolaire. J’ai appris la flûte traversière, la batterie et le saxophone. J’ai fait partie d’un ensemble baroque et d’un groupe de jazz à ma petite échelle d’adolescente.
Camille Boitel, des cousins éloignés qui m’ont montré la voie du cirque, l’endroit de tous les possibles. Et puis il y a mes sœurs Raphaëlle Boitel, qui m’a prise sous son aile et Christine & The Queens, mon amie dans la vie. On fait partie de la même équipe de jeunes femmes boxeuses. Elle n’a pas fini de vous surprendre !
Abraham Diallo alias Tismé (UNNO) compose tes chansons. Pourquoi avoir choisi un producteur issu de la scène hip-hop ? Ce n’est pas une question que je me suis posée. Plus jeune, j’ai pas mal écouté Diam's, Kery James, Sniper. On retrouve forcément cette énergie hip-hop parce que je rappe et je slame mais ce qui m’importe, c’est le groove. Je ne veux rien m’interdire. Tismé n’est pas qu’un beatmaker de rap. J’aimais son travail sur les musiques de spectacles de danse. Je n’avais ni la patience ni l’envie de composer moi-même. Par manque de confiance ou de talent, je ne sais pas.
Tu chantes plus que tu ne rappes sur le refrain de Ailleurs Higher. Une chanteuse qui s’ignore sommeille en toi ? Clairement ! Je dis même que je chantonne parce que justement je n’assume pas. Mon grand-père était dans une chorale et chantait divinement bien. Moi, je n’ai jamais pris de cours de chant. Je ne sais pas chanter mais je me suis prise au jeu, sans me demander si j’en avais le droit. Je ne suis pas encore Beyoncé mais c’est une tendance que je remarque de plus en plus chez les rappeurs (comme Lomepal, ndlr) qui se mettent tout à coup à chanter. Je dis toujours qu’il faut aller au bout de ses envies alors je devrais me jeter à l’eau !
Quelle intention mets-tu derrière tes mots ? J’aime le ping-pong des mots entre eux. Je ne mens pas quand j’écris, alors il faut bien les choisir, qu’on touche à la métaphore ou à quelque chose de plus explicite. Au collège, j’écrivais des poèmes et des slams que je déclamais. Prose ou rimes, j’aime écrire mes textes d’une traite, comme une nécessité absolue, un cri ! Quel serait l’arbre généalogique de tes influences ? Jacques Brel et Stromae sont mes parrains imaginaires. James Thierré et
Quel est le point commun des jeunes de ta génération ? Je fais partie de la génération avant
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MUSIQUE
smartphone à quatre ans. Ça a son importance. Notre génération en veut et se construit comme elle l’entend, loin des codes familiaux et sociétaux. On est audacieux, talentueux, soudés et on a des rêves ! Et même si on galère pour les réaliser, on ne se laisse pas faire. Bref, on est persévérants et fiers de nos convictions. Tu fais partie de cette génération qui s’épuise. Par peur du temps mort ou de la chute ? C’est propre à moi, je fais des tas de choses depuis toute petite. J’aimerais en faire moins mais j’ai peur de passer à côté d’une expérience. J’ai l’impression d’avoir réussi à activer quelque chose dans chaque domaine artistique que je suis en train de construire. J’ai envie de mieux me connaître, connaître mon corps, ma voix, me mettre en danger aussi. C’est périlleux et en même temps assez jouissif d’être toujours une débutante. Jusqu’où as-tu repoussé tes limites ? Jusqu’au burn-out ! Je ne m’arrête pas au risque de tomber dans une profonde mélancolie, mais j’ai appris à mes dépens qu’il faut savoir lever le pied pour se préserver physiquement. Je suis comme tout le monde, je ne comprends pas ce qu’on fait sur cette terre et tout ça ne sert pas à grandchose, si ce n’est à nous rendre vivants. Aujourd’hui j’ai plus de recul par rapport à la présumée chute. Si ça ne marche pas, j’irai cultiver des plantes. Qu’est-ce que ton corps dit de toi ? Je suis un petit singe-grenouille. Ma
Aloïse Sauvage
technique vient du breakdance. J’aime tourner sur la tête, sentir mes mains et mes pieds qui touchent le sol, mes genoux qui frottent, les bleus sur mon corps. J’aime me confronter au sol pour qu’il me fasse rebondir, dans la chute, le saut, ou le roulé-boulé. On me dit souvent que ma danse est animale, sauvage. C’est mon patronyme et j’en joue ! Tu seras sauvage parmi Les Fauves de Vincent Mariette. Comment as-tu appréhendé ce tournage après le succès de 120 battements par minute ? Je vis le succès du film avec beaucoup de fierté et suffisamment de distance puisque je n’ai qu’un second rôle. Xavier Dolan ne m’a pas encore appelée (sourire). Vincent a fait un beau pari en me prenant parce qu’il ne me connaissait pas. Je joue la cousine de Lily-Rose Depp dans ce thriller psychologique. C’est une très belle personne, devenue une amie. Tu as donné ton tout premier concert le mois dernier. Qu’as-tu réalisé ? Que j’aime beaucoup trop la scène ! J’aimerais m’entourer d’un ou deux musiciens, notamment d’une section rythmique parce que j’adore la batterie et les percus. Et accorder plus de place à la partie chorégraphie. Ton rapport à la nuit ? J’aime écrire, la nuit, quand je fais une insomnie. Je ne sais pas si c’est la Lune, mais je déborde d’inspiration ! Sinon je dors, je ne suis pas sorteuse. Si ça danse, oui, mais si ça boit, je pars à 23h.
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Premier EP le 2 mars 2018 En représentation dans « Carte Blanche » les 16, 17, 20 et 21 février au Théâtre National de Chaillot
“Prose ou rimes, j’aime écrire mes textes d’une traite, comme une nécessité absolue, un cri !”
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CINÉMA
Dossier
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C’est quoi, la fête,
au cinéma ? Texte
CARMEN BRAMLY
Au cinéma, on a toujours fait la fête, et ce de mille façons. Il existe des fêtes tragiques, des fêtes poétiques, des fêtes à plusieurs et même des fêtes solitaires. Ainsi, nous vous proposons un petit guide – subjectif – des fêtes les plus marquantes du cinéma, histoire de vous y retrouver un peu plus dans ce chaos. 21
CINÉMA
Cet été, nous vous parlions déjà des meilleures fêtes de la littérature, il était donc normal, dans une société dominée par les images, de nous pencher cette fois-ci sur les grandes fêtes du cinéma, en tous cas les plus mémorables à nos yeux. Si le choix a été dur, nous sommes plus ou moins tombés d’accord, après moults heurts et noms d’oiseaux échangés. Voici donc, répartis en cinq catégories, notre sélection. Un conseil, si vous ne les avez pas tous déjà vus, éteignez Netflix et foncez acheter les DVD (nan, on déconne, vous avez le droit de les mater en streaming). Chill Party Pour commencer, un peu de douceur, ou du moins de calme. Dans une ambiance très girly, nous pourrions déjà citer la pyjama party organisée par les Pink Ladies dans Grease. Sandy, l’oie blanche, est invitée à s’encanailler en pilou pilou avec ses nouvelles copines. Si les actrices ont manifestement la trentaine passée, elles n’en incarnent pas moins des lycéennes, typiquement américaines. Tout y est : une première clope, du vin, des petites tenues, des mesquineries entre filles et bien sûr, ça parle de mecs en gloussant, le tout dans une ambiance "phéromones en folie". Plus qu’une bataille de polochons, et le compte est bon. Pour tous les gamins des 80's, cette scène incarne un idéal, celui d’une middle class blanche banlieusarde, dévergondée mais pas trop, encore naïve et pleine d’insouciance. Bien sûr, le chill peut s’exprimer différemment, comme dans Ken Park, où trois adolescents explorent les plaisirs de l’amour à trois, une scène sublimée par les plans serrés du réalisateur, qui lui aussi, visiblement, semble avoir très envie d’y prendre part. Une lumière jaune, et ces corps qui ne
Dossier
forment plus qu’un, comme pour s’annuler dans la chorégraphie de cette communion libidinale. Echappatoire physique ou tentative de réenchantement pour une jeunesse perdue et désillusionnée, impossible de trancher. Quoi qu’il en soit, cette scène, étonnamment pure, clôt le film, qui l’est un peu moins. Enfin, plan à trois toujours, mais sur une note plus morbide, comment ne pas évoquer My Own Private Idaho, où Keanu Reeves et River Phoenix, au cours de leurs errances prostitutionnelles, se retrouvent dans une chambre d’hôtel face à Udo Kier, qui, une lampe entre les mains, sautille et chantonne en allemand (nous rappelant par là même les heures les plus sombres de notre histoire) sur de la new wave alternative. La prochaine fois que vous vous surprenez à dire « ma vie m’échappe », repensez à cette scène et s’il vous plaît, reconsidérez vos propos. Enfin, dans une version plus épurée et minimaliste, Pasolini a fait danser une mère prostituée et son fils délinquant, dans le sublime Mama Roma. Une scène où se cristallise l’amour maternel à travers une simple danse, guidée par la voix incomparable du petit Josélito, sur le morceau Violino Tzigano. Home Sweet Home A présent, passons aux fêtes à la maison. Totem du teen movie américain, gobelets rouges en plastique à l’appui, elles sont avant tout un lieu de débauche, de drague et d’ennui, où se nouent romances et drames. Si les parents en sont souvent absents, comme dans Projet X, il arrive parfois qu’une maman soit de la partie. C’est le cas chez Xavier Dolan, dans Les Amours Imaginaires. Un ralenti, une perruque bleue, et la chanson de The Knives, Pass This On. Sous les yeux des
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deux protagonistes, l’objet commun de leur fascination danse avec sa mère, comme un pied de nez à leur désir conjoint. Sinon, on peut également s’ennuyer à ces fêtes, surtout lorsqu’un muet s’attache à nous dispenser des leçons de vie. Une situation à laquelle fait face Alex, héro du film de Léos Carax, Boy Meets Girl. Eh oui, dans le cinéma français, même la fête s’en trouve dévitalisée. Heureusement, de l’autre côté de la Manche, les rosbifs nous ont prouvé qu’ils savaient vivre, confirmant leur réputation. Que ce soit la fête improvisée de This is England, dans un jacuzzi, ou bien celle, interminable, de Good Morning England (on ne dira rien de l’aspect chauvin de ces deux titres), nos amis outre-Manche semblent plus folichons que les tristes buses en noir et
blanc de nos films d’auteur. Dans un autre registre, on pourrait également aborder cette scène, dans Macadam Cowboy, où les deux protagonistes, un joli cowboy qui fait le tapin et un SDF infirme, escroc sur les bords, se retrouvent en immersion dans l’underground new-yorkais. Mais la meilleure fête jamais donnée au cinéma reste encore celle mise en scène dans The Party par Blake Edwards, avec dans le rôle principal, l’inénarrable Peter Sellers. Acteur indien, maladroit à tous points de vue, il se retrouve invité par mégarde à la fête annuelle donnée par un très chic studio hollywoodien. Une escalade dans la farce et le délire, à même de dérider les plus dépressifs, même votre vieille tante frigide et sur-médicamentée. →
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CINÉMA
Night Clubbing Des clubs, au cinéma, on en trouve en vois-tu en voilà, du Parrain à Victoria ce film allemand entièrement tourné en un seul plan séquence -, ils y occupent une place de choix. On en trouve même dans Les Trois Frères des Inconnus, où Didier Bourdon et Bernard Campan expérimentent les pouvoirs stupéfiants de drogues aux noms plutôt amusants. Toutefois, si vous aimez la culture club, nous vous recommandons le très douteux Party Monster, génial nanar s’intéressant aux frasques des Clubs Kids, ces gamins new-yorkais post-Warhol, portés par Michael Alig et James Saint James. Macaulay Culkin y tient sans doute son meilleur rôle, celui d’un party boy halluciné aux airs de gourou infantile qui finit par assassiner son dealer. Bienvenue à
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l’ère du fluo tragique, où faire la fête est un mode de vie, celui des parias de la fame artistico-culturelle. Plus actuel, on trouve Spring Breakers, film clivant du surdoué Harmony Korine. S’amusant à détruire l’image d’une flopée de petites princesses Disney, il nous livre un récit initiatique déconstruit sous forme de clip géant, où derrière chaque tentative de provocation s’exprime une véritable frustration. A part vomir à quelques reprises et danser en maillot de bain, les filles ne vivent leur rêve qu’à moitié. L’orgie promise n’aura pas lieu. Harmony voudrait-il nous dire qu’à force de la désirer, aujourd’hui, la fête est finie ? Gang Bang Pour ceux qui auraient encore l’esprit d’équipe, en ces temps d’individualisme
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exacerbé, nous vous avons fait une petite sélection spéciale orgie. Dans un style très franco-français, nous avons le très classique OSS 117, Rio ne répond plus. Alangui sur la plage, au milieu d’une bande de jeunes hippies, Dujardin découvre au coin du feu les plaisirs du LSD et de l’amour partagé. Sur une note moins comique, il y a Shortbus, film où s’entrecroisent les récits de plusieurs personnages fréquentant un club underground new-yorkais, où l’amour se vite sans complexe et en groupe. Pour la petite anecdote, à l'exception d'une scène, selon le réalisateur, les scènes sexuelles du film ne sont pas simulées, y compris les scènes d'orgie. Façon team building à l’heure de la pute nation et du revenge porn, Bang Gang d’Eva Husson, film sulfureux sorti en 2015, suit une bande de jeunes dans leur escalade érotique et névrotique. Face aux scandales et à l’effondrement de leur système de valeurs, le film met le doigt sur les nouvelles équations auto-destructrices des adolescents d’aujourd’hui, quand il s’agit de faire la fête. Mais bon, chacun trompe l’ennui à sa façon, qui sommes-nous pour juger ? Enfin, last but not least, Eyes Wide Shut. Là, pour le coup, la jouissance avance masquée et l’orgie est aussi chaude qu’une dinde aux marrons Picard. Un décorum onirico-sectaire, qui vous fera l’effet de préliminaires avec Edouard aux mains d’argent.
Outdoors La fête n’est pas uniquement l’apanage des lieux clos. Il arrive parfois qu’elle s’exporte sur les toits, comme c’est le cas dans Marry Poppins, où la célèbre nanny s’encanaille avec des ramoneurs, le tout rythmé par une chorégraphie digne du meilleur clip des 2 Be 3. En comparaison, vos rooftops parties sont bien insipides. Emir Kusturica, avec Chat Blanc Chat Noir, lui, préfère faire la fête en voiture. Le caïd local, moustachu craspok répondant au doux nom de Pitbull, tripote des billets, des putes et s’en met plein le nez, excité par une musique qui reprend en boucle Pitbull Terrier de Goran Bregovic, qui a sans doute inspiré Die Antwood, quand ils ont composé leur morceau du même nom. Mais à mon sens, la plus belle scène de fête en plein air se trouve dans le film Olso 31 août, véritable chef-d’œuvre réalisé par Joachim Trier. Un ex-junky à peine sorti de rehab quitte une soirée à vélo, cramponné à une fille. Silence. Dans sa main, un extincteur, qui laisse de vaporeuses trainées blanches ondoyer à côté d’eux. Ils traversent la ville, s’arrêtent devant une piscine en plein air. Elle saute, il la regarde. La lumière bleue cristalline du petit matin sublime la scène. Ici, la fête joue les prolongations aquatiques, se dit dans ce qu’elle a de plus éthéré et insaisissable. On touche à l’essence même de ce qu’est la fête, un instant indéfini, hors du temps et hors de soi, où l’on peut enfin laisser flotter les rubans, ressentir là, ici, maintenant.
“Pour ceux qui auraient encore l’esprit d’équipe, […] nous vous avons fait une petite sélection spéciale orgie.” 25
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EXPO
A voir
COSTARD ATTITUDE Photos
BENOÎT RAJAU & MAURICE RENOMA
Le billard, sport de salon, de dandies et de gangsters, véhicule une mythologie du vêtement qui fait la part belle au décorum, à l’attitude et au costume. Le but est d’être le meilleur et d’imposer son style avec élégance. Le spectacle du jeu est saisissant : le silence est de mise autour du billard, où le corps vêtu d’un costard se tend vers une réflexion décuplée, et où la pensée prend corps. L’analogie inattendue “corps-billard” se révèle dans l’image, ainsi que dans la mise en scène de mannequins habillés en costard Renoma, provoquant l’imaginaire et la sensitivité du spectateur. 27
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Benoît Rajau Photographe depuis vingt ans, Benoît Rajau a réalisé ce travail sur le billard à ses débuts, entre 1991 et 1996, à Paris. « À l’époque, je cherchais à travailler sur le jeu au sens large, j’hésitais un moment à m’atteler aux courses de chevaux, mais j’avais le sentiment de n’avoir jamais vu de travail photographique sur le billard. La découverte de l’Académie de billard Clichy-Montmartre a achevé de me convaincre. J’avais là un décor, des acteurs, une ambiance, un accueil. Il ne me restait plus qu’à devenir moi-même un personnage du lieu, pour mieux le saisir… » Les tirages argentiques en noir et blanc de Benoît Rajau montrent le billard sous un autre angle en révélant l’aura quasimystique des joueurs : ils nous plongent dans une atmosphère hors du temps.
Maurice Renoma Un jeu de miroirs autour des photographies géométriques et sensuelles permet une vue privilégiée sur une image morcelée et multipliée que chacun est libre d’interpréter comme il l’entend. Tel une Alice au pays des Merveilles passée de l’autre côté du miroir, le spectateur entre dans la photographie, qui n’est plus en deux dimensions, mais peut-être en cinq, celles de la réalité se cumulant avec les deux dimensions de l’image, elle-même réfléchie sous plusieurs angles. La profondeur de champ n’est plus une illusion d’optique : elle aspire l’œil qu’elle accroche. Exposition Billard-Costard chez Renoma 129 bis rue de la Pompe – 16e Jusqu’au 23 janvier 2018
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MONDE DE LA NUIT
Lifestyle
Que faire de son gros manteau en soirée ?
Texte
STEVE DE BEVERLY HILLS
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l Sa Voici venu le temps de l’hiver. Certains y trouvent des points positifs, mais tout fêtard qui se respecte sait que c’est une période vraiment glauque. Celle des gros manteaux dont on ne sait que faire dans l’ambiance chaude et sale des boites de nuit. Heureusement, nous, les scientifiques à l’étage, avons réfléchi au problème et avons recensé toutes les solutions possibles pour pallier cette galère. 33
MONDE DE LA NUIT
Lifestyle
La solution qui pue : le garder C’est la facilité, c’est pas cher et après une certaine dose d’alcool on n'en a plus rien à fichtre. Mais cette solution a quand même beaucoup de désavantages. Notamment celui du nombre incalculable de crétinus qui vont renverser leur vodka redbull sur votre manteau en poils de nubuck. Il y a aussi très clairement le problème de la transpiration. On ne sait pas ce que vous avez pris ce soir mais ces substances vous donnent une odeur de fennec qui n’est pas vraiment compatible avec vos désirs de reproduction, bien présents ce soir. La solution qui coûte cher : le mettre au vestiaire En voilà une solution qu’elle est pratique. Le temps de faire la queue une fois, de se rendre compte qu’on n'a pas 2€ et qu’ils ne prennent pas la carte pour faire du black et que personne ne veut vous dépanner, de trouver un ami assez cool pour vous filer 2 balles, de refaire la queue, de se rendre compte qu’il n’y a plus de place aux vestiaires, d’attendre que les premiers gens boring s’en aillent une heure après et de s’embrouiller avec la meuf parce que vous l’avez un peu draguée, certes vous n’aurez plus de manteau, mais la soirée se termine et vous êtes encore sobre. La solution qui fait trop iech : le garder près de toi Alors pour faire mec coincé ou relou, cette solution est top. Tu peux le garder posé sur ton bras pendant toute la soirée, ce qui va te donner vraiment un air de fion qu’on a tous envie de bousculer. Ou alors tu peux le poser par terre dans le mélange de bière, de cigarettes et de capotes sacrifiées. C’est un choix.
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La solution qui fait que tu te fais péta tes affaires : le poser sur/à côté d’une boloss qui te le garde « Ah Christelle, tu es venue malgré ton lumbago ? » Cool, tu vas pouvoir garder nos affaires ! Posez-les en tas sur le banc et imposez à Christelle la responsabilité de la garde. Si vous prévenez bien en amont, vous pourrez l’engueuler comme du poisson pourri s'il manque votre carte Imagin’air à votre retour. C’est chouette, et ça détend alors que vous savez bien que c’est de votre faute, vous avez juste posé le manteau comme une merde et la carte est tombée sous le banc. La solution VIP : le mettre dans la cabine du Dj Quand on commence à bien écumer Paris, on connaît forcément deux ou trois Dj's, des mecs qui enchainent des MP3 sur un logiciel qui fait tout pour eux. La solution de leur confier vos affaires à un double avantage : de 1 on peut danser en toute tranquillité et bien se bourrer la gueule. Et 2, c’est vraiment trop la classe, enfin que vous croyez, en réalité tout le dancefloor va vous détester et se moquer de vous. Mais vous vous en foutez car vous êtes bourré et vous n’avez pas de manteau.
La solution du mort : venir direct en t-shirt On a tous cet ami très prévoyant qui vient direct en t-shirt et qui frôle la pneumonie. Mais en vrai avec la dose d’alcool qu’il a ingurgitée, il ne risque rien, il ne se fait rien voler et il est content parce qu’à la base il est quand même un peu con, il a tout compris.
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CINÉMA
Incontournable
Gros chagrin Céline Devaux
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Texte
L'amour par Céline Devaux, c'est le froid d'un lendemain de cuite, la solitude honteuse dans des draps sales, la tête qui frappe, les souvenirs vaporeux, et le vide sidéral dans un ventre qui pleure. Car elle n'est plus là. Car le silence est étouffant, la lumière du jour immonde, la nuit trop courte. L'amour d'un couple s'éteint dans une maison en Bretagne, et résonne alors dans les pas sonores de Flavien Berger le début du deuil noir et cruel d'une rupture froide. Tant de vérité en un instant si court, une douleur éteinte, un moment de grâce. Primée par le César du meilleur courtmétrage d'animation en 2016 avec Le repas dominical, histoire d'une réunion de famille tournant autour de l'homosexualité de Jean le narrateur principal, Céline Devaux revient cette fois-ci avec un court de 15 minutes mêlant là aussi images d'animation et de brefs échanges entre Swann Arlaud et Victoire du Bois, isolés et seuls face à l'inéluctable destin d'une rupture actée. Gros chagrin, c'est l'acte final, le désœuvrement de l'un face à un amour facétieux baigné de redondance, la détresse de l'autre et son incapacité totale à se faire entendre. La conclusion est tranchante, presque anodine, le rire est désormais oublié, pire, jalousé, et comme toujours, l'espoir se meurt dans une inconscience enfantine (« et quand je
PIERIG LERAY
sais que je vais passer dans ton quartier, je m'habille toujours un peu mieux »). L'on devine un amour passionnel devenu fardeau et détestation, l'amour divague et rien ne semble pouvoir le sauver. Il est déjà trop tard. Les odeurs ne sentent plus, les couleurs ne dansent plus, les histoires ne se racontent plus. La vie est devenue invivable. « Maintenant la ville est grise, la ville est morte. » Et ce n’est pas l’accès alcoolique d’un anniversaire, le sexe maladroit qui en découle ou les conseils moralisateurs de la bien-pensance amicale qui pourront offrir une quelconque rédemption à cette petite mort qui balafre à jamais. Gros chagrin a récemment reçu le prix du meilleur court-métrage à la Mostra de Venise, et ce n'est pas un hasard. Il marque la décomposition générationnelle du couple amoureux, celui qui tente tant bien que mal de survivre dans un monde qui fait tout pour le séparer, mais qui inexorablement finit par pleurer la nostalgie d'un amour fugace qui n'a finalement jamais vraiment existé. Brutal, mais tellement vrai. En à peine un quart d'heure, Céline Devaux en dit bien plus que la plupart des prétentieux lecteurs contemporains de notre monde (Dolan ?). Gros Chagrin est à découvrir gratuitement sur Arte. Indispensable.
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CINÉMA
Par Pierig Leray
Déc. Santa & Cie de A. Chabat Sortie le 6 décembre , Dans son nouveau long métrage suffler d’in ent Chabat tente désespérém ant barb l Noë de dans un vieux conte our hum son t por rap et bien sous tout ti. sen bien et e just t le plus souven met de Mais malheureusement, si l’on ques tori rhé nes van s lque que côté les bat Cha dont il a toujours eu le secret, là Noë de s’épuise dans ce vieux conte bien er tent r la sauce génération Z pou large maladroitement de taper le plus ie mam la à ux tule pus possible, de l’ado en che mio le par t san pas qui pique en ressort Stan Smith pour enfants. Il en ent dém fon pro et u ven con un film ux. uye enn
Star Wars, les derniers jedi De Rian Johnson Sortie le 13 décembre La cash machine continue à tou rner, et le Star Wars annuel est de reto ur, avec la suite de l’épisode 7. Kyl o Ren en balafré mal-aimé, la jeune puc elle en Jeanne d’Arc toute trouvée enc adrée par le retour en fanfare de Luke Sky walker déjà aperçu en fin de dernier film , les révélations s’enchainent sur des roulements de tambours cosmiq ues et cette joyeuse bande d’adolescen ts sur le retour envoie valser quelque s beaux moments de malaise, mais surt out plusieurs de grâce qui ne cessent de nous rappeler les plus intense s scènes des premiers épisodes. De quo i de nouveau se plaindre d’un man que cruel d’imagination, la sécurité a été préférée pour ne pas froisser.
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Le crime de l’Orient-Express de K. Branagh Sortie le 13 décembre et Venir défigurer un tel huis clos travail du e foutre à l’eau l’essence mêm ance à form per d’Agatha Christie est une de use pite ie aph la hauteur de la filmogr gblin ing cast Le e. son metteur en scèn Depp bling est sous-exploité et Johnny malgré , pide insi e anc form per en tire une orter un ces vaines tentatives pour app matique peu de magie et de tension dra ni sel dans cette soupe tiède sans e pein à , che poivre. C’est plat en bou sition xpo sure la pas digérable, et ce n’est vera sau qui e ond photographique imm pauvre cette succession d’âneries bien en âme.
A ghost story de D. Lowery Sortie le 20 décembre Belle surprise de cette fin d’an née, A ghost story approche la vie apr ès la mort par son versant poétique et naïf de l’enfance oubliée, il dessine les contours du deuil à travers un vieux dra p troué qui ne peut que contempler, et sans jamais interagir, le vide immens e qu’il a laissé, tenter d’enfin compren dre, une fois sa chaire enterrée, le véritabl e sens propre de son existence passée. On frise parfois la prétention mal dosée, mais l’on retombe systématiquement dans une douceur et une simplicité à la fois de la caméra et du ton employé qui emporte haut les cœurs la bataille funeste du deuil.
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Immersion
Retour au Discobus, cette fois, on l’a loué PAR
AGATHE GIRAUDEAU
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s tous déguisés de la même manière, d’influenceuses en slip prostituées pour un tube de fond de teint et d’innombrables blaireaux qui bossent dans le digital, on suffoque vite une fois la nuit tombée. Un fumet délectable de pipi chaud au mazout qui nous est tous familier et dont je me suis lâchement extraite, l’autre fois, lors d’une échappée grandiose à bord d’un party bus. C’était le temps d’une nuit unique, étoilée, le temps où le skaï a crissé sous nos corps frêles alors que la bière bon marché abondait. C’était le temps d’une nuit unique, étoilée, le temps où la valeur des bus Macron à véritablement pris sens. J’en suis encore toute chose. 42
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érection de mauvais goût au milieu du quartier, cette vision du troisième type nous laisse tous pantois d’adrénaline.
Sortie du choixpeau de l’enfer, l’idée de louer un bus discothèque traversa l’esprit de plusieurs de mes potes, juste pour rire, il y a peu. Au-delà de la discutable qualité de leur humour, je m’interrogeais alors sur les ravages d’une vie de teuf compulsive et ratatinée lorsqu’elle affecte un groupe de millenials endimanchés, toujours drapés de noir, nourris à la techno de hangar et aux galettes de riz bio en polystyrène. La clef du bonheur se trouvait peut-être quelque part dans un discobus, un buscothèque, ce transport en commun fait pour accueillir de braves bas-du-front clinquants, dont l’existence compassée dévoile son sel au rythme des Lacs du Connemara. Nous allions le découvrir, attachez vos ceintures. Décollage du vaisseau prévu à 2h30, gare de l’Est. Moyennant la coquette somme de 800€, un autocar retapé par Xzibit, banquettes violettes, sol en lino titane et néons roses, nous est affrété pour un périple de deux heures seulement. A peine le temps d’atteindre le taux d’alcoolémie recommandé pour apprécier ce genre d’escapade, se dresse soudainement devant moi l’engin de villégiature. J’hallucine. Sublime
Un videur, gomina-parka plastique, fait le piquet devant le bus quand surgit un type au cheveux chauves, micro vissé à la main. On se croirait dans un épisode de Next, c’est le choc des cultures. Nos deux tribus s’observent, se dissèquent. On ne sait pas trop ce qu’on fout là et eux non plus, d’ailleurs. Le pas chevelu nous invite enfin à monter. « On aura tout vu ce soir » l’entends-je bredouiller dans sa fausse barbe au vigile qui rétorque : « Un groupe qui commande pour cette heure-ci à la dernière minute, c’était sûr qu’il y avait un problème ». Nous voilà partis pour deux heure d’enfermement dans la joie et la bonne humeur. Je suis ravie, impatiente et curieuse. J’aurais peut-être dû m’abstenir. Dans le party bus, pas le doit de fumer, pas le droit de faire pipi pendant que ça roule, pas le droit de boire dans des bouteilles de verre, pas le droit de se mettre debout sur les sièges, pas le droit d’utiliser les barres de maintient pour faire de la pole dance et pas le droit de mettre sa musique si on n’a pas de clef USB. Un chouette programme en perspective, donc. L’alcool à bord est à nos frais, c’est d’un sourire crispé que la serveuse d’astreinte réceptionne une multitude de sac plastiques troués remplis de canettes de 50 cl de toutes sortes de bières bas de gamme. Ce soir c’est pas Champagne, ce soir c’est vomi, qu’on s’est tous dit en arrivant. Dans un party bus, il y a un Dj de bus. Une branche de la profession dont on sous-estime la dextérité technique.
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Discobus
un dilemme s’impose à nous : il faut vraiment changer de musique. Notre Dj de bus, d’un professionnalisme borné, refuse cependant catégoriquement qu’on touche à ses réglages Virtual Dj. Aussi, Descpacito succède à Rihanna qui succède à Petit Biscuit sans que l’on puisse juguler cette hémorragie auditive. Le vortex de la médiocrité est entrain de nous absorber, nous n’en reviendrons jamais. Peut-être par choix ou simplement par hasard, cette personne s’est retrouvée un jour à passer du Daddy Yankee à des connards d’ados friqués pour leur Bar Mitzvah, le tout enfermé dans 3 m2 ambulants, plusieurs fois par semaine. Le Dj de bus, c’est l’alter égo du Dj de camping dans sa version gentrifiée, plus propret, on dira même urbaniste. Le chauffeur de salle se lance sans plus attendre dans une magistrale entrée en matière. Discours à la con, présentation de l’équipe, des règles de sécurité, blabla baragouiné en espagnol pour faire plaisir à la nana qui fête son anniversaire ce soir-là et tours de voix à tire-larigot : Steven ferme enfin sa gueule. Il avait une tête à s’appeler Steven, celui-là. David Guetta enchaine alors tambour battant, le monstre mécanique démarre et toute l’assemblée est au comble de l’excitation. La soirée peut enfin commencer. Voilà vingt bonnes minutes que je suis hilare, recroquevillée devant nos hôtes. Cette situation m’exalte. C’est un savant mélange d’absurde, de kitsch fascinant et de condescendance bourgeoise qui m’anime. Les corps se délassent succintement et les plus téméraires commencent à danser. Rapidement,
Ce qui m’amusait grandement la première demi-heure commence à me contrarier. Mon taux d’alcoolémie twerk avec le pare-chocs avant et l’incapacité totale d’alimenter mon addiction à la nicotine me gratte dans le dos. C’est le premier arrêt minute qui viendra me délivrer. Instantanément, le discobus se vide alors que les portes arrières s’ouvrent à peine. Steven reprend du mic’ et nous fait une brève description touristique des lieux. N’avait certainement pas comprit qu’il était difficile de faire s’extasier une bande de modeux bourrés devant une ribambelle d’Autolib’ cassées, entassées devant un feu rouge, place de la Concorde. M’enfin bon. Des discussions plus calmes s’établissaient entre nous : « ça va toi ? tu t’amuses ? », « je trouve ça marrant pour son anniversaire à elle mais si vous me faites ça un jour, je vous défonce tous », stipulent ainsi nos esprits fatigués. Sans grande transition, tout le monde remonte à bord. Ça commence alors à se balancer sur les barres de maintien, ça se fait rappeler à l’ordre, ça rigole et ça exaspère le staff. On se marre quand même bien dans cette roulotte de beauf.
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Faute de bouteilles en verre autorisées à l’intérieur, les gourdes de mélanges mal dosés circulent bon train sous le manteau. Du moins, jusqu’à ce que notre chauffeur de salle adoré se rende compte de la manœuvre et confisque toutes nos flasques clandestines d’ados attardés. C’était comme avoir 15 ans et se torcher la gueule au panaché sous un abribus, c’était tout aussi nul mais avec 15 ans de plus. Quelque peu clostro, les pauses clopes me paraissent peu à peu plus clairsemées, les néons roses me donnent la gerbe et la bière l’envie de pisser toutes les 5 minutes. Pour ne rien arranger, la playlist de Dj Cousin Machin vient de m’imposer une trentième écoute forcée de Taylor Swift. Le buscothèque est un enfer dont il me faut m’évader. Autour de moi, c’est l’hécatombe. Alors qu’une partie est désormais prostrée sur le bas côté, l’autre continue vaillamment de s’agiter histoire de rentabiliser les 800 boules de tour de manège. On en a perdu en route qui ont préféré fuir lors d’un arrêt pipi. J’ai le sentiment d’être bloquée dans une faille temporelle, ce sont les deux heures les plus longues de
ma brève existence. La teuf pour la teuf, en PLS dans les soutes. Je suis dans un épisode du Bus Magique qui m’explique comment fonctionne la constipation. Originellement, si tout se passait bien, on nous offrait un tour de plus gratuit. Fort heureusement, ce ne fut pas le cas. Certainement lassée d’observer une bande de perches maigrichonnes s’autobadigeonner de houblon tout en se mitraillant de photos, notre chevauchée nocturne à trouvé son terme en temps et en heure, à Hôtel de Ville. Le staff ne s’est pas fait prier pour tous nous évacuer. La fête est finie, le party bus rentre au dépôt. Je pense que cette expérience fut une première pour tout le monde, que ce soit pour le chauffeur de salle ou pour ceux qui s’enfermaient dans les microtoilettes afin de se repoudrer le nez sur fond de reggaeton. C’était n’importe quoi. Ça en a beaucoup fait marré certains, c’était la teuf du siècle pour d’autres, je dois l’avouer. J’ai personnellement trouvé ça d’un exceptionnel merdique. Certains sont morts en route et d’autres ont perdu une partie d’euxmêmes quelque part dans ce véhicule. A la recherche de l’improbable lointain, le discobus est dorénavant une expérience de moins à vivre. J’ai désormais parfaitement conscience de ma condition de connasse déguisée comme les autres, influenceuse en slip prostituée pour un tube de fond de teint qui bosse dans le digital. J’en suis finalement très heureuse, merci.
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AGENDA
JEUDI 07 DÉCEMBRE 00h Rex Club 6€ Lddlm: Paranoid London (Live), Clara 3000, Ivan Smagghe VENDREDI 08 DÉCEMBRE 00h30 Bus Palladium Bonbon Party, invitats sur lebonbon.fr 20h00 Panic Room 0€ Konstantel : Winter Edition w/ Dorothée, PTT, Loumi SAMEDI 09 DÉCEMBRE 20h00 Le Hasard Ludique 12€ Mawimbi Label Night x Nyokobop 22h00 La Bellevilloise 13€ Mona with Dj Grégory, Nick V, Malouane & Johanna, Dj André, Manu 12 Inch JEUDI 14 DÉCEMBRE 20h L'International 0€ J'peux pas, J'ai Jungle w/ Ruffhouse VENDREDI 15 DÉCEMBRE 00h30 Bus Palladium Bonbon Party, invits sur lebonbon.fr 23h00 Djoon 15€ Into The Deep Invite Hunee 00h00 Dynamo de Banlieues Bleue 15€ CrazyJack Meets Lamache, Bassam SAMEDI 16 DÉCEMBRE 22h00 Concrete 15€ Raheem Experience( Mad Rey b2b Neue Grafik b2b Lb aka Labat)/ Smallpeople 00h00 Rex Club 13€ Correspondant : John Talabot, Perel Live, Jennifer Cardini JEUDI 21 DÉCEMBRE 19h00 New Morning 3€ Late Psalms - Release Party w/ B.K Mik, Jeff Tuts, Vanderkraft...
VENDREDI 22 DÉCEMBRE 00h30 Bus Palladium Bonbon Party, invitats sur lebonbon.fr 23h30 Badaboum 15€ Club Avec Session Victim et Trujillo 23h30 Faust 13€ La Mamie's All Night Long SAMEDI 23 DÉCEMBRE 23h30 L'Officine 5€ DK Club w/ DJ Klad, Mebodo 00h00 Glazart 18€ Xmas Party: SP23 Full Crew JEUDI 27 DÉCEMBRE 23h59 Rex Club 6,7€ Forever DNB: Elisa Do Brasil All Night Long with MC GQ VENDREDI 29 DÉCEMBRE 00h30 Bus Palladium Bonbon Party, invitations à retirer sur lebonbon.fr 22h00 Djoon 10€ Byron The Aquarius & Borrowed Identity 22h00 Concrete 15€ Hardfloor Live, Zadig b2b Simo Cell… 23h00 Terminal 7 Insomnia w/Apollonia, Sonja Moonear… SAMEDI 30 DÉCEMBRE 23h00 Folies Pigalle 10€ Skylax x Folies x La Chinerie w/G'boï & Jean Mi, Hardrock Striker, Signal ST 23h30 Badaboum 15€ H A ï K U w/Konstantin Sibold & Trikk DIMANCHE 31 DÉCEMBRE 23h00 Rex Club 22€ One More: Mandar All Night Long
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UNE EAU DE SOURCE PURE UNE VODKA DISTILLÉE EN CONTINU UNE CRÉATION ORIGINALE
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