Le Bonbon Nuit 74

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Juin 2017 - n° 74 - www.lebonbon.fr


FESTIVAL DES CULTURES ÉLECTRONIQUES WAREHOUSE VISUAL ARTS CLUB FILMS TALKS

VENDREDI

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SAMEDI

JUILLET 2017

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Nina Kraviz | Dixon | Kaytranada | Marcel Dettmann Apollonia | The Martinez Brothers | The Black Madonna Carl Craig Presents Versus Synthetizer Ensemble Jackmaster | Moodymann | Dvs1 | Levon Vincent Midland | Romare FULL LIVE BAND | Tommy Genesis Avalon Emerson | Konstantin | Jlin LIVE | Kekra LIVE Marie Davidson LIVE | Ancient Methods Voiski LIVE | AZF | Peggy Gou | Fils de Venus Raheem Experience (MAD REY, NEUE GRAFIK, LB AKA LABAT) Hugo Lx | Varg LIVE | Blocaus W/ Exal | Blndr LIVE Codex Empire LIVE | Kablam | Tgaf Bamao Yende | Oko Dj | + Resident Advisor Stage

I N FO S , P R É V E N T ES & CAM P I N G S U R T H E P E AC O C KS O C I E T Y. F R

ART WO R K: AT E LI E R IR R AD IÉ

PARC FLORAL DE PARIS | 20H > 7H


EDITO � Ce mois-ci, c’est mon anniversaire. J’ai 32 ans… Outre le fait que ça me fasse bader à fond, c’est la saison de la crainte permanente, de l’horreur ultime. Celle qui me fait du mal à mon petit estomac fragile : la peur de l’anniversaire surprise. Ce moment horrible digne d’un mauvais rêve où tu vois débouler d’un coup tous les gens que tu détestes. On commence par les amis, ces êtes hypocrites que tu as rencontrés à l’époque où tu ne savais pas qu’ils allaient tous devenir d’énormes losers, et surtout qu’ils allaient organiser une ignominie pareille. Des grippe-sou ayant vendu leur âme au grand capital. Genre le mec est devenu “journaliste” dans un magazine branché parisien à gros tirage… Tssss. Se glissent ensuite quelques membres de la famille que tu n’as pas vus depuis 12 ans. Ce vieux cousin horrible débusqué par tes amis sur Facebook qui passe sa soirée à payer des shots à tout le monde. Tout ça pour essayer de se faire des potes et qui au final parvient à rentrer avec l’une de vos sœurs qui s’est évanouie après avoir fait honneur au gâteau, tout juste décongelé. Et que dire de cette bande de culs serrés qui ne s’amusent pas ? Rien naturellement, car ce sont vos collègues. Ce sont ceux avec qui vous ne pourrez pas vous embrouiller ce soir. Sous peine de cumuler votre existence misérable avec la perte de votre emploi. Oh non, ne me dites pas que derrière, ces vieux aux cheveux grisonnants là-bas qui dansent sur Gilbert Montagné, non, ce ne sont tout de même pas… Oh mon Dieu les cons ! Ils ont invité mes parents ! Toute cette belle bande, ce pot pourri d’amis bien pourris te gâtent avec une superbe chanson. Une version karaoké YouTube de Happy Birthday de Stevie Wonder qui rythme à merveille l’arrivée du gâteau susnommé, qui s’avance comme une mariée moche qu’on ne veut pas épouser. A ce moment tout le monde te regarde, tu seras sur Snapchat et là t’es en direct sur Facebook : les gens sont ravis de l’émotion que tu dégages quand tu pleures. En réalité, ce que tu dégages, ce sont des larmes de seum. Puis vient le moment tant attendu du cadeau. Enfin plus exactement, d’une feuille imprimée de ce que tu peux t’acheter avec la cotise que cette bande de radins ont fait sur Litchee derrière la cravate. Tu ouvres l’enveloppe. Roulement de tambours… Super ! une box “chill out” au centre Nature et Découverte de Drancy ! Youpi. Maintenant tu peux boire. Raphaël Breuil 1


TEAM �

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION RÉDACTEUR EN CHEF DIRECTEUR ARTISTIQUE COUVERTURE SECRÉTAIRE DE RÉDACTION GRAPHISTES RÉDACTEURS

RESPONSABLE DIGITAL COMMUNITY MANAGER CHEFS DE PROJETS PARTENARIATS RÉGIE PUB LE BONBON IMPRIMÉ EN FRANCE

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Jacques de la Chaise Raphaël Clément Breuil Charles Feutrier Mac DeMarco par Flavien Prioreau Louis Haeffner Coralie Bariot, Cécile Jaillard, Cyrielle Balerdi, Agathe Giraudeau, Rachel Thomas, Tiana Rafali-Clausse, Olivia Sorrel-Dejerine Antoine Viger Clément Villas Dulien Serriere, Florian Yebga Margaux Décatoire, Hugo Derien Lionel Ponsin, Morgane Germain 12, rue Lamartine 75009 Paris Siret 510 580 301 00032 01 48 78 15 64


* Née d’une recette unique en 1995, Desperados est la première bière aromatisée Tequila vendue en France. Née unique.

L’A B U S D ’A L C O O L E S T D A N G E R E U X P O U R L A S A N T É . À C O N S O M M E R A V E C M O D É R A T I O N .


HOTSPOTS � ① CÉLÉBRER LE PARI RÉUSSI Ils viennent de réussir le pari fou de mettre sur pied un festival collaboratif en allant au bout de leur crowdfunding. Nul doute que nos compères de Chineurs de House auront à cœur de célébrer cela pour leur première "rapta" à La Machine. Et qui mieux que Damiano Von Eckert, S3A ou le légendaire DJ Rahaan pour cette ode à la house qui s'annonce ? Chineurs de House, le 23 juin à La Machine ② LÂCHER LES CHEVAUX Repris récemment par les équipes d’Uzik (Calvi on the Rocks), le nouveau club Garage ne cesse de faire trembler le quai d’Austerlitz. Ce vendredi 23, c’est le crew 100% féminin RA+RE Records qui vient fêter ses trois ans. Au programme : profusion de pépites musicales, paillettes, confettis et des femmes aux commandes. Ça fait du bien ! RA+RE Records 3 Years, le 23 juin à Garage ③ S’ENVOYER DU SABLE "Mandar" signifie "envoyer" en espagnol. Et que fait le trio lorsqu'il est sur scène ? Il envoie des galettes en veux-tu en voilà ! Lazare Hoche, S.A.M. et Malin Génie investissent la Plage pour répandre leur vibe house/micro sur les grains de sable de la Porte de la Vilette. Lunettes de soleil fortement conseillées. Initial meets Unusual Suspects #01, le samedi 24 juin à la Plage du Glazart ④ DANSER À LA POINTE DE L’EUROPE Chaque année, à la même époque, on se le dit : la Bretagne est bel et bien une terre de teuf. Et Astropolis y est bien pour quelque chose. Depuis 1995, le festival fait vibrer la pointe bretonne à grands coups de musique électronique. Cette 23e édition ne déroge pas à la règle et nous donne déjà le tournis. Yec’hed mat ! Astropolis #23, du 30 juin au 2 juillet à Brest 4


H Entreprise RCS Nanterre 414842062

* Desperados Red est née d’une recette aromatisée Tequila Guarana Cachaça qui lui confère son goût intense. Née intense.

L’A B U S D ’A L C O O L E S T D A N G E R E U X P O U R L A S A N T É . À C O N S O M M E R A V E C M O D É R A T I O N .


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À LA UNE � T RAPHAEL BREUIL P FLAVIEN PRIOREAU

LES CONFESSIONS JETLAG DE MAC DEMARCO

C’est avant un concert à la Maroquinerie qui restera dans les mémoires que j’ai pu passer une demi-heure avec un Mac DeMarco un peu jetlag. Nous en avons profité pour lui

poser quelques questions cons sur sa vie, sa jeunesse, ses premiers émois, ses nouvelles non-habitudes de rock star et parler un peu de Coldplay et Tatu. 7


« Pas mal de jeunes filles aiment bien m’embrasser après les concerts ! »

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C’est quoi ton générique de dessin animé préféré ? Samouraï pizza cat. Quel est le film que tu as vu 10 000 fois ? J’ai vu pas mal de fois Le Prestige de Christopher Nolan. Je ne sais pas pourquoi j’adore regarder ce film je l’ai en DVD. Et Taxi Driver j’ai dû le voir 500 fois ! Sur qui tu fantasmais quand tu étais ado ? Avoir une meuf tout simplement. Je ne fantasmais pas particulièrement sur quelqu’un. J’avais juste envie d’être libre et de me barrer de l’école, grandir et faire des concerts. La chanson que tu as honte d’aimer mais que tu aimes quand même. D’habitude quand on me demande ça je réponds Coldplay. Mais n’ayez jamais honte d’écouter quoi que ce soit ! Jamais ! Quand j’étais jeune j’avais super honte d’aimer le groupe Tatu. Les deux filles russes. Je ne sais pas trop si j’aimais bien la musique. Mais le clip était… Il y avait de la pluie, des bisous sous la pluie. J’avais genre 14 ans je me disais « Oh My God ! » Tu as une technique spéciale pour t’endormir ? Mater un film ! Je ne peux pas m’endormir comme ça dans le noir, c’est impossible. Hier soir j’ai regardé l’Attaque des clones. J’en ai fait des cauchemars.

Le premier CD que tu as acheté. Avec mon argent ça devait être le Blue Album de Weezer. C’était un CD chez un disquaire local. J’avais 20 balles, alors j’ai acheté un disque, je devais avoir 12 ans. Et c’était un super choix ! La chanson que tu détestes jouer en live. En ce moment c’est My Kind Of Woman. Parce que ma voix est baisée et y'a quelques notes qui ne passent pas. La chose la plus étrange que tu aies demandée en backstage ? On essaie de rester assez simple. On essaie de tout payer. Mais à une époque on demandait quatre menus Filet O’ Fish de chez Mc Donald's… Mais on ne les a jamais eus… Le rêve le plus chelou que tu aies jamais fait ? Oh boy… J’ai eu l’habitude de faire ce rêve horrible. Où je suis à l’école, tout va bien, mais je me rends compte que je n’ai suivi aucun cours pendant l’année. C’est affreux. La dernière fois que tu as pécho une groupie. On va dire que pas mal de jeunes filles aiment bien m’embrasser après les concerts. Mais ça s’arrête là. On ne va jamais vraiment jusqu’au bout, mais parfois, elles veulent une galoche. Je ne sais pas pourquoi, mais c’est cool !

T’as aimé ? Les cauchemars ? Non c’était affreux. Le film aussi est affreux mais bon j’aime bien quand même.

Le truc le plus horrible que tu aies mangé à Paris. Les kebabs… Quelques fois tu en as des pas mal à Paris mais d’autres sont vraiment horribles. Je suis pas difficile, j’aime le pain, j’aime le fromage, mais là…

La chose la plus bizarre que tu aies vue dernièrement sur Internet ? Y'a ce truc tu sais… Comment ça s’appelle ? Du hoverboard ! Du porno sur du hoverboard ! c’était super marrant.

Si tu étais un bonbon, ce serait quoi ? Je ne sais pas si ça existe chez vous, c’est une sucette américaine avec une moitié caramel et l’autre à la pomme. C’est le meilleur bonbon que tu puisses trouver. 9


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MUSIQUE � T RAPHAËL BREUIL P TERRY RICHARDSON, ROMAIN B JAMES, SO ME

ON A TCHATÉ AVEC BUSY P, C’EST PAS LE PEDRO DE L’ANNÉE ! Fondateur de Ed Banger et de surcroît un des plus grands producteurs et Dj's français, nous avons réussi à choper Monsieur Pedro Winter sur les réseaux sociaux alors que la

bête entame une nouvelle série de sets un peu partout en France et à Navarre, et même over the world.

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Tu fais quoi là ? Je reviens de Cannes où j'ai été voir Justice passer des disques sur la plage. Toujours agréable. Nous venons d'annoncer une nouvelle date pour Justice à We Love Green le 10 juin à Paris. On bosse sur l'annonce et on prépare la suite de la tournée avec notamment une belle date à Bercy le 14 octobre. On prépare les sorties des prochains singles de Justice, Cassius, 10LEC6 pour Ed Banger. On est bien occupés. C’est quoi ton actu ? Pas mal de dates Dj cet été à Paris, à Cannes, Calvi donc, Ibiza, Los Angeles et Tokyo. Je bosse aussi sur mon prochain single en studio. Tu trouves pas qu'il s'est passé un truc en 2007 ? Tu penses que t'y es pour quelque chose ? Ahahaha je laisse mes amis journalistes répondre à cette question ! La nostalgie c'est agréable, mais j'aime penser à la suite de nos aventures. Oui c'est vrai, il s'est passé des trucs cool en 2007, comme il s'en était passé des magiques en 1997… Nous sommes en 2017, les années en 7 sont généralement assez bonnes, c'est vrai. A nous de bosser pour que ça dure. L'énergie de 1997 a propulsé un tas de producteurs français, en 2007 on a confirmé cet élan, en 2017 c'est une évidence, il y a un renouveau, la nouvelle génération prend le relais, à eux d'écrire le nouveau chapitre de la musique électronique française. On ne peut pas tout le temps les raccrocher à l'héritage French Touch. Avec tous les gens que tu as découverts, en toute honnêteté, est-ce que tu es humble, tu penses que tu étais juste là au bon moment, ou est-ce que tu penses que sans toi la French Touch n'aurait pas 12

la même couleur ni la même histoire ? J'ai les pieds sur terre. J'étais au bon endroit au bon moment. J'aime accompagner et être au service de mes artistes. J'ai aussi la chance de monter sur scène et de mixer aux quatre coins du monde depuis 20 ans, donc mon égo-équilibre est au beau fixe. Tu es très impliqué dans Calvi on the Rocks, raconte-nous ton histoire avec le festival. Mon implication est amicale, j'ai été invité dès les toutes premières éditions du festival. Le côté "boutique" et familial de ce festival le rend unique en son genre. La situation géographique donne le ton et cette couleur magique à Calvi on the Rocks. Ton meilleur souvenir là-bas ? Un mauvais moment qui s'est transformé en moment magique. Je devais jouer dans une boite en dehors de la ville, c'était la première fois que le festival investissait les boites locales aux alentours… Je devais avoir joué trois disques à peine quand le patron est arrivé dans la cabine en me demandant de jouer des hits : ) Je l'ai regardé, j'ai souri, et j'ai invité les 200 personnes qui étaient venues à partir avec moi. Nous sommes retournés au pied de la citadelle, c'est là que j'ai rencontré le mythique Patrick. Il nous a ouvert le portes de son bar de nuit Le son des guitares. J'y ai joué toute la nuit, le bar était plein à craquer. Une soirée improvisée, magique. Depuis, à chaque édition, je passe voir Patrick et sa femme, personnages emblématiques de la ville. Ton meilleur souvenir musical tout court. Le Dj marseillais DJ OIL qui joue Detroit Experiment Think Twice, morceau de Carl Craig d'une puissance incroyable. C'était sûrement la première édition car il jouait tout en haut de la citadelle, ça n'est jamais arrivé


« Le Macronchella au Louvre

était un calvaire ! » 13


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depuis, splendide. Tu as eu 40 ans il y a peu. On va faire une interview 40 ans. Maintenant que tu as 40 ans, as-tu une vie de famille accomplie ? 40 ans ou 30 ans, chacun gère sa vie tu sais. Moi je suis ravi du rythme de la mienne, oui. Maintenant que tu as 40 ans, quel est ton rapport à la fête ? La fête fait partie de mon ADN, de mon programme. Mais j'aime faire la fête dans le sens produire, créer, pas que danser ou faire le zouave. Je sors pour "travailler" quand je mixe ou pour voir mes artistes. Et à la drogue ? Ça n'a jamais été mon truc, je suis passé à côté ou à travers… Un monospace ? Hahaha non non pas encore. J'ai ma Mini pour les week-ends en famille, mais j'ai un beau scooter pour mes balades en amoureux. Tu vas voir, tout est question d'équilibre dans cette interview. Maintenant que tu as 40 ans, est-ce que tu as trouvé Dieu ? Ta question m'a donné envie de ré-écouter Faithless God Is A Dj. Maintenant que tu as 40 ans, est-ce que tu vas tout envoyer bouler et faire des tubes pop pour NRJ avec David Guetta ? Hahaha tu es en forme avec tes questions ! Si je peux faire des tubes et être joué à la radio je signe, je n'ai pas de souci avec le croisement des mondes. Je viens de sortir mon single Genie et l'accueil à la radio est génial. C'est la première fois que ça m'arrive. Je n'ai pas l'impression d'avoir fait un truc formaté ou en décalage avec ce que je joue d'habitude. Concernant David Guetta, j'aime défendre les mecs sur lesquels on

tape facilement. En effet sa musique n'est pas spécialement mon truc, mais j'ai une bonne mémoire, et David a joué un rôle important dans ma vie et pour la musique électronique. En 1995 il faisait venir tous les plus grands Dj's du monde entier à Paris. Grâce à lui j'ai vu Frankie Knuckles, Louie Vega ou David Morales quand j'avais 20 ans. On a la chance d'avoir accès à tout aujourd'hui, donc si on n'aime pas sa musique eh bien on va ailleurs. Il y a des radios online géniales, des Dj's généreux, bref, si on ne veut pas subir l'hymne de l'Euro de foot de David, ce n'est pas compliqué. Quel est ton film d'horreur préféré ? E.T de Spielberg. Bon j'avais 6 ans, imagine, un monstre en forme de caca qui déboule sur terre, j'ai flippé ! Si tu devais refaire la BO d'un film culte, ce serait lequel ? Clerks de Kevin Smith est mon film préféré. J'ai même acheté un bout de la bobine du film. Seul problème si je devais refaire la BO, il ne se passe pas grand-chose, le film est un huit-clos dans une supérette de banlieue aux US. Mais sinon oui, l'exercice de BO est un fantasme de tout musicien ou producteur, ça me chaufferait bien. Tu y crois toi en Macron ? Il faut y croire, et il faut qu'on s'y mette tous. La campagne a été un cauchemar. Le résultat est un espoir pour tout le pays. Macron doit (va) reconnecter les gens entre eux. Le délire de division du pays n'est pas possible. Bon par contre, faut vraiment qu'on l'aide niveau programmation musicale ! Le Macronchella au Louvre était un calvaire, c'est qui ce Dj fou avec son micro là ??? Sérieux Emmanuel ! — Ed Rec 100 Ed Banger / Because 15


PHOTO � P BRICE KRUMMENACKER

MON

POTE EXTRA EXTRA EXTRA EXTRA EXTRA TERRESTRE

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Critique de la société et du ridicule des instagrameuses food, Brice Krummenacker, photographe officiel de Robert Maurice Debois, extra-terrestre, est venu nous rendre visite et nous raconter l'histoire de ce personnage haut en couleur. Alors tu viens d’où jeune alien ? Je ne suis pas l’extra-terrestre, je suis Brice, le photographe de l’extra-terrestre. Tu l’as rencontré où ? Je l’ai rencontré par hasard au détour d’un bistrot. Ce fut l’amour direct, et puis après j’ai commencé à le prendre en photos. Il vient de quelle planète ? Il vient de la planète Gaïa, dans l’amas globulaire M13, qui est très loin d’ici. Gaïa c’est la Terre en fait, c’est tiré d’Isaac Asimov. Il s’appelle Robert Maurice Debois, il a 112 ans. Il a un nom français. Il a demandé Demis Roussos mais il a eu Robert. C’est quoi sa mission sur Terre ? Il veut devenir le mec le plus populaire. Plus populaire que Alf ou E.T. Et cela via les réseaux sociaux. Bon déjà c’est le plus classe. C’est quoi le but de l’opération ? Je suis photographe à la base, et je cherchais un sujet à faire par rapport aux réseaux sociaux. J’en avais marre de voir des selfies, des tasses de café, des plats. Je ne comprenais pas pourquoi certaines personnes étaient devenues aussi populaires à coups d’insta et de tweets… Donc j’ai décidé de me servir de Robert pour m’occuper de ses réseaux sociaux. Je lui ai fait un FB, un insta et même un Tinder ! Il chope un peu sur Tinder ? Non pas trop, parce que lui son fantasme c’est les hommes ou femmes qui arrivent à se lécher les coudes, et y'en a pas des masses.

Mais sinon il a un succès fou. C’est pas forcément évident à gérer avec ma copine étant donné que c’est moi qui gère son Tinder. « Non mais c’est pas moi qui drague, c’est Robert. » Donc finalement tu fais ça pour critiquer les réseaux sociaux mais en fait tu rentres complètement dans ce truc-là. Complètement, il fait des selfies, il prend en photo ses plats… C’est un peu une pov' meuf ton extraterrestre ? Un peu ouais. Bah je me sers justement de ce que je veux contredire. A l’époque, j’ai fermé mon instagram parce que je postais des belles photos, mais j’avais 10 likes. Donc j’ai décidé de faire ce truc débile et là ça marche ! J’ai même eu une expo au 104, il a fait deux passages TV… Tu gagnes un peu de tunes ? Non non, aucune. Moi ça me permet de me faire connaître. Mais bon au final, c’est Robert qui est connu. Il s’est même fait repérer pour faire un clip électro/hip-hop. L’histoire d’un mec qui sort de prison pour trafic de shit. Ça fait combien de temps qu’il est sur Terre ? Une vingtaine d’années. Et il se casse jamais ? Non. Mais là je suis en train de penser à monter un crowdfunding pour le renvoyer sur sa planète. T’es un peu un espèce de Raël, quoi. Ouais un peu. @robertmauricedebois sur Twitter Facebook et Insta www.bricekrum.com 19


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RENCONTRE � T RAPHAËL BREUIL P DIDIER ROBERT

INTERVIEW TINDER BESSA

Jeudi soir, 19h, j'avais rendez-vous avec Bessa dans un bar d'afterwork kitsch. Qu'elle était belle ! Je me suis senti tout petit pour notre premier rendez-vous.

On a parlé de sa musique, de son nouvel album et d’Emmanuel Macron. Je sais pas pourquoi, mais je sens que je vais conclure…

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C'est joli Bessa, c'est ton vrai nom ? Presque, un morceau. Le premier morceau. ASV (Age, sexe et ville, pour ceux qui n'ont pas connu les années Caramail) C'est ma deuxième vie j'ai l'impression, dans laquelle j'ai 33 ans, femme, Paris. Qu'est-ce que tu bois ? Thé fleur de l'empereur. Lait noisette. Tu fais quoi dans la vie ? Je bricole, je joue, chante, coupe, assemble, défait, refait, m'amuse, observe, participe, je fais de la musique, je dessine, je prends des photos, je jardinerai bientôt. Alors ça marche ton petit business ? Ça commence à pas mal tourner on dirait ! « Ma petite entreprise ne connait pas la crise », c'est génial. Le Vortex me guide. Comment tu fonctionnes ? Tu composes tout et t'écris tout ? Je compose et j'écris, parfois j'ai co-composé et parfois co-écrit. Je ne mets pas un point d'orgue à être l'unique, si les choses sont belles faites pas un autre, pourquoi pas, et puis ça offre des vacances à mes émotions. Mais la plupart du temps, oui, je compose et écris parce que ça vient par surprise. Parle-nous de ton album. Mon album est empreint de périodes et émotions différentes. Les morceaux sont donc assez variés. Mais c'est cette imperfection qui est précisément parfaite. Je le regarde avec beaucoup de tendresse. Je n'y ai mis aucun concept d'ensemble, il est le fruit d'une évolution humaine. Ça veut dire quoi le titre ? De l'Homme à l'animal traite des méandres de la raison, des rapports humains sexomasochites et de la violence engendrée, 24

desquels l'humain 1.0 a du mal à sortir. Si il devait ne rester qu'un titre ? Karmique Afrique, le retour à la source, la terre mère. Tu penses que nous sommes tous des animaux ? Oui, nous le sommes à mon sens. Des animaux à qui on a enlevé du sel et rajouté du poivre. La notion de l'égo est centrale. Les animaux n'en ont probablement pas mais nous ne savons rien d'eux. T'étais quel style de fille au collège/ lycée ? Racaille. Je trainais avec des durs et séchais les cours pour fumer du shit. T'écoutais quel style de musique ? Du jazz, de la soul (Bill Evans, Erikah Badu) et les 2 Be 3. Ça inquiète ta famille que tu fasses de la musique ? Maintenant non. Ils me soutiennent très fort. Ça a été dur au début, c'est la notion d'insécurité matérielle qui leur faisait peur, mais je m'en suis toujours sortie parce que j'aime ce que je fais. T'en penses quoi toi de Macron ? Il ressemble à Boris Vian, le déserteur. Bon, on s'entend bien ! On va mater un film chez toi ? Je préfère le cinéma. Le dimanche midi avec Miyazaki ou le jeudi soir avec Dolan. Quand est-ce qu'on peut se revoir ? Je fête cette sortie d'album le 8 juin au Carmen (Pigalle). Passe boire un verre de bulles avec tes amis !


«  Ma petite entreprise ne connais pas la crise. »

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Bonnie Banane - Muscles J'ai rencontré Bonnie Banane lors d'un repas chez un ami qui fait des dessins incroyables, des masques de nuit. Maintenant il est à Bruxelles. C'est avec lui que j'ai co-écrit Par hasard et L'exode. Ce soir-là, j'étais complètement perdue et je vivais le dîner en dehors de mon corps, contemplant la scène de loin. Emotion d'un soir gelé, gelée dans ma tête.

Bon Iver - Holocene Cet album m'a vraiment ouvert sur un autre monde, j'ai pris conscience de l'impact des arrangements et de la couleur du son. C'est un moment important, un grand virage dans ma conception de la musique. Le mélange des roulements et des cuivres utilisés comme des sons de la nature, des bruissements magiques. Des souvenirs de bien-être ressentis.

Radiohead - Kid A Quand je vivais encore dans le Sud, je courais beaucoup sur la plage de La Ciotat, l'hiver. C'était il y a 10 ans. Pendant deux mois j'ai couru 1h30 tous les soirs. C'était devenu une drogue. L'endorphine qui monte dans le cerveau est si puissante qu'elle me donnait des sensations de bonheur inégalées. Mes jambes étaient devenues mes meilleures amies. Elles me portaient dans les collines. Mon chien courait a mes côtés .

Whitney Houston - You Were Loved A 12 ans, mon père m'a acheté ce disque… Je découvrais que je pouvais chanter fort. J'allais m'enfermer dans ma chambre pendant des heures en me regardant dans la glace. Et là c'était un kiff d'utiliser mes cordes vocales avec autant de ferveur. J'imaginais que plus tard je serais à mon tour sur scène pour chanter ce que j'écrirais devant des gens. J'ai passé un temps fou dans ma chambre avec Whitney.

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LA PLAYLIST DE BESSA Lianne La Havas - No Room For Doubt J'ai beaucoup aimé cette guitare, une guitare aussi douce et forte à la fois, ça donne des idées. Les accords qui piquent le fond du cœur. Et sa voix posée dessus comme un petit oiseau qui chante à l'oreille. J'aimais écouter ce son pour la sieste après le petit déjeuner, parfois. Nina Simone - Baltimore Quand j'étais petite j'ai découvert ce morceau et ça m'a totalement donné envie de faire de la musique. Mon père mettait Nina Simone pour les dîners. Quand on avait du monde à la maison et que les bougies brillaient sur la table. Nina accompagnait les conversations, avec mon père qui a une culture de la géographie hallucinante, on parlait de nos voyages et des petits villages de montagne, des lacs perchés sur les rochers. Boards of Canada - Roygbiv Il y a cinq ans je découvrais le surf et c'était pas agréable. Un ami m'emmenait sur la côte basque pour m'initier à la pratique, mais on se levait trop tôt pour avoir les meilleures vagues au lever du soleil. C'était peut-être trop tôt pour moi, j'étais pas prête à tant de concessions. On écoutait beaucoup Boards of Canada à cette époque. Maintenant j'aime beaucoup le surf. J'ai redécouvert ça sans me lever tôt. Mount Kimbie feat King Krule - You Took Your Time Quand j'étais à Londres, je me levais le matin pour aller dessiner les maisons. les murets. Les gens. Cet été-là, j'ai su que je pouvais dessiner. Il suffisait que je pose simplement un crayon sur une feuille de mon carnet pour que les formes prennent vie. On allait à la National Gallery pour s'imprégner des

peintures anciennes et mettre des couleurs au pastel gras. Réinterpréter les tableaux de maîtres avec des yeux et des doigts d'aujourd'hui. Camille - La jeune fille aux cheveux blancs Avant que j'arrive à Paris, j'ai beaucoup aimé cet album de Camille. C'est une œuvre si compacte. Je voyageais beaucoup en train et le train, c'est inspirant. Les paysages ne s'arrêtent pas, rien n'est figé. Les traits s'étirent en fil vert. Dans cet album, le fil méditatif est là, comme si des moines restaient près de toi. Le cerveau ne peut partir trop loin mais l'âme, elle, part volontiers. Hugues Aufray - Santiano Quand on partait en vacances avec mes parents sur les routes, tous les ans dans des pays différents, et seulement quelques cassettes dont celle d'Hugues Aufray. Moi j'ai appris à mettre du vernis sur les ongles en roulant. Je suis devenue une professionnelle à 10 ans. Ma copine qui partait avec nous avait des grands cheveux et je la coiffais à longueur de temps. Tresses en épis de maïs, tresses africaines renversées faisaient partie de mes coiffures de prédilection. Brandy & Monica - The Boy Is Mine Au collège on écoutait ça… Je trainais sous le pont à 200 m du collège et on posait un radio cassette avec la musique de Brandy. Les chorégraphies venaient très spontanément. Sous le pont il faisaient noir. On espérait qu'à la gym on pourrait utiliser cette musique pour faire notre enchainement mais les musiques chantées étaient interdites ! Je sais pas pourquoi. Peut-être que les paroles déconcentrent les juges… 27


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SÉRIE � T RAPHAÊL BREUIL P SHOWTIME

POURQUOI LE NOUVEAU TWIN PEAKS EST (ENCORE) UNE RÉVOLUTION TÉLÉVISUELLE Il est conseillé d’avoir vu les deux premières saisons avant de lire ces quelques lignes. Sachez néanmoins que lire cet article ne

vous aidera pas forcément à en comprendre davantage.

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1989, un cours d’eau et quelques notes de musique suffisent à nous faire plonger dans une enquête incroyable qui bouleversera à jamais non seulement le paysage télévisuel mondial, mais aussi les consciences. Jamais des scènes aussi bizarres et violentes ne se seront mélangées à heure de grande écoute. On suit l’histoire de l’enquête sur l’assassinat de Laura Palmer, jeune lycéenne dans un trou paumé de l’Etat de Washington, qui va conduire un agent du FBI nommé Dale Cooper à pénétrer dans les méandres de son inconscient, symbolisé par la forêt de Twin Peaks. Celle-ci renferme des nains, des géants, des monstres, des amis étranges, et nos doubles maléfiques. Ce sont ces démons qui prennent possession de nos corps pour commettre des actes horribles. Eh oui, je spoile, on apprend au bout du 13e épisode de la série que Laura Palmer, la Marilyn Monroe de la petite bourgade boisée, a été assassinée par son propre père, après des années de viols et de maltraitance nocturne. Mais rassurez-vous, il n’y était pour rien, ce dernier était possédé par Bob, un des esprits de la forêt. C’est la seule explication qu’a pu trouver David Lynch pour expliquer l’inceste et le meurtre dans une ville où tout le monde vivait la dolce vita, du moins en apparence… Twin Peaks nous comptait l’histoire d’habitants d’une petite ville tranquille dont l’existence allait être bouleversée par

le meurtre de Laura. La saison 2 était plus décevante. A partir du moment où le network américain a obligé Lynch à dévoiler plus rapidement l’identité de l’assassin, la série s’embourbe dans une chasse à l’homme grand-guignolesque avec un ancien agent du FBI devenu fou, dont le seul intérêt réside dans les histoires secondaires avec des personnages plus tarés les uns que les autres. En ne mentionnant que celui interprété par David Duchovny, un super-agent du FBI transformiste, nommé Denis/Denise. La série se termine par un retour de Lynch aux manettes qui réalise un superbe dernier épisode onirique et barré, l’un des meilleurs de la série, où l’on assiste au voyage de l’agent Dale Cooper dans ce qu’on appelle la "Black Lodge", ledit monde parallèle accessible via la forêt de Twin Peaks. Ici, Dale se fait dépasser par son double maléfique qui en sort à sa place et prend possession de son corps et de sa vie. Le cliffhanger le plus long de l’histoire. Obligeant l’âme du vrai Dale, et nos esprits de fans, à errer pendant 25 ans dans la Black Lodge. Voici le point de départ de cette 3e saison tant attendue. Et Dieu sait que nous en avions peur… Peur que cette 3e saison soit un hommage géant rempli de fan-services, de vieux acteurs rincés devenus mauvais à force de ne jouer que dans des pubs ou des séries de seconde zone. Mais après quelques (longues) minutes 31


d’introduction, un nain déboule dans ton salon, te met une gifle et de demande d'où diable tu as osé douter de David Lynch. Le réalisateur de Blue Velvet se sert de la licence comme prétexte pour réaliser une suite de séquences incroyablement maîtrisées, mais risquée pour un petit écran en recherche permanente de la dernière idée bankable. Lynch est l’anti-JJ Abrams, et l’épisode 3 est là pour le prouver. Ce début de saison nous entraîne dans une série qui est l’exact inverse de l’originale. Les unités de lieu et de temps qui caractérisaient les saisons originelles sont ici complètement explosées. On suit plusieurs histoires dans plusieurs espaces-temps. Et même si on semble un peu surpris, on se rend vite compte que c’est génial. Que ceux qui s’attendaient à un meurtre classique, avec une enquête dans un Twin Peaks avec téléphone portable et 3G aillent se coucher. Il y a même une scène rigolote (une des seules qui se passent à Twin Peaks) où Lucy, la réceptionniste mythique du bureau du sherif, tombe dans les pommes après avoir vu face à elle quelqu’un à qui elle parlait via son téléphone. Elle a cru voir un fantôme. Le message est clair : le monde a évolué, toutes les autres scènes sont violentes, modernes et liées aux problèmes de notre époque, mais à Twin Peaks le temps s’est arrêté. Les personnages ne semblent avoir pris que des rides, leurs personnalités sont restées inchangées. Lynch semble nous distiller cette nostalgie au goutte-à-goutte. Une récompense de fin peut-être ? Mais arrêtons de ressasser le passé, si tu voulais voir du Twin Peaks, tu te prends un abonnement Netflix et tu te fades les 30 épisodes vieillissants. Nous on veut du moderne, et c’est tant mieux, car c’est définitivement ce qu’il y a de plus intéressant dans cette nouvelle série, oui 32

j’ose le dire, c’est une nouvelle série, ce n’est pas Twin Peaks. David Lynch montre à tous les Quentin Dupieux, Richard Kelly et à toute cette génération de réalisateurs qui font des films chelous que c’est bien lui le papa et qu’il faudra encore une paire de décennies avant de pouvoir le détrôner. En exemple la nouvelle construction des épisodes. Sans trop dévoiler, on assiste ici à une suite de mini-séquences de courtsmétrages feuilletonnants entrecoupée de scènes comiques se déroulant à Twin Peaks, et conclue par un groupe qui joue en live au Bang Bang Bar, le mythique club ou jouait Julie Cruise il y a 25 ans, à chaque fois qu’un meurtre avait lieu à Twin Peaks. Lynch est resté drôle, créatif, dans le vent et il le montre. En revanche, il fait ici ses adieux aux images sonores et animées, il l’a annoncé il y a peu, il arrête le cinéma. Voici donc sa lettre d’adieu, profitons-en, elle dure 18 heures. Le réalisateur palmé d’or de Sailor et Lula nous a, dans les quatre épisodes que nous avons pu voir à l’heure où nous écrivons ces lignes, fait une mini-rétrospective de ses 40 années de cinéma. On aperçoit des esthétismes et des effets spéciaux semblables à Eraserhead, une histoire de dédoublements de personnalités et d’autoroutes sombres à la Lost Highway, des décors à la Inland Empire. Mulholland Drive n’est pas en reste avec cette histoire incroyable de cube en verre filmé et observé 24/24h par un étudiant. Bien sûr, nul ne sait ce qui s’y passe, et la plupart du temps, l’homme s’ennuie et boit du café devant un cube vide. Cube vide qui de temps en temps voit une ombre passer, une ombre malveillante, une ombre violente. Ce carré ne serait-il pas une télé ? Et cette silhouette n’est-elle pas celle de David Lynch qui vous viole le cerveau ? Coïncidence ? Je ne crois pas. Bon visionnage. — Sur Showtime Diffusé tout l’été


“The gum you like is coming back in style.”

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CINÉMA DE MINUIT � T CARMEN BRAMLY

A BOUT DE SOUFFLE… VU PAR UNE FÉMINISTE ENRAGÉE A l'occasion de la présentation à Cannes, du biopic sur Godard réalisé par Michel Hazanavicius, Le Redoutable, nous avons décidé de revenir sur l'un des chefs-d'œuvre du maître, A bout de souffle. Une relecture

impertinente d'un mastodonte du 7e art, selon un axe purement féministe. A bout de souffle correspond-il aux normes imposées aujourd'hui par les féministes ? Nous l'allons démontrer tout à l'heure. 35


Deux heures du matin. Au sortir d’un cauchemar ubuesque, engendré par un abus de shit frelaté dont la fumée âcre ne s’était toujours pas dissipée sous les poutres de ma studette, je n’ai rien trouvé de mieux à faire que de regarder un film de la Nouvelle Vague. Un peu au hasard, j’ai opté pour A bout de souffle, chefd’œuvre de Godard, maître Yoda de la jeune garde du cinéma français de ces années-là. Seulement, les neurones fortement attaqués par la substance fumigène consommée quelques heures plus tôt, mon double féministe démoniaque a pris le dessus sur l’être rationnel que je suis d’ordinaire, me contraignant à une lecture toute autre du film en question. Miss Hyde aux commandes, ce qui m’aurait semblé, dans mon état normal, charmant badinage et errance poétique s’est changé en harcèlement sexuel, mansplaining et manterrupting. Récit. Il faut croire que les années 60 n’étaient pas hyper woman-friendly et feminist-wise. Aussi attaché aux femmes fût-il, et n’en déplaise aux personnages féminins flamboyants sortis de ses reins, Godard pourrait facilement passer pour misogyne. Jean-Paul Belmondo et Jean Seberg partagent la tête d’affiche du film, sorti le 16 mars 1960. Un couple mal assorti, ayant du mal à faire la part des choses entre l’amour et le sexe, dont on suit les tribulations urbaines entre les ChampsElysées et le quatorzième arrondissement de Paris. Si elle rêve d’un couple à la Roméo et Juliette, lui ne peut réprimer le désir de la posséder, quitte à l’aliéner. Lui, Michel Poiccard, est un voyou, un pauvre hère de fugitif, et elle, Patricia, une jeune Américaine qui rêve d’étudier à la Sorbonne et vend le New York Herald Tribune sur les ChampsElysées pour gagner un peu d’argent. Le drame commence quand Michel vole une voiture à Marseille pour rejoindre Paris, et tue un gendarme en route, qui voulait 36

le contrôler. Une fois à Paris, il retrouve Patricia, qu’il tente d’emmener avec lui en Italie, afin d'échapper aux forces de l'ordre. Quand il n’est pas occupé à la suivre ou à la convaincre de le suivre, il passe des heures au téléphone dans le but de récupérer une somme d’argent que lui doit un membre de la pègre, sorte de running gag pas très marrant. Très vite, Michel est obligé de se mettre en cavale, après la diffusion de sa photo dans la presse, l’identifiant comme « l’assassin de la N7 ». Avec Patricia, ils se cachent dans un appartement, rue Campagne-Première, en attendant de s’enfuir vers l’Italie… Mansplaining, manterrupting et harcèlement sexuel Eh oui les filles, dans les 60's, on vous appelait « mon petit », et la seule considération que vous pouviez espérer était limitée à votre apparence. Sans cesse, Patricia se voit tout expliquer, et, en charmante ingénue à l'accent chantant, pose des questions, comme pour souligner l'aspect mutin et un peu enfantin de sa personne. Elle n'a pas ouvert la bouche que Belmondo l'interrompt déjà. La Lauren Bastide qui sommeille en chacune de nous ne peut que se révolter ! Et que dire de cette scène où Belmondo ne cesse de répéter à Jean Seberg qu'il veut coucher avec elle, cherchant à la convaincre par tous les moyens ? Quel gros dégueulasse ! Pourtant, c'est elle qui se voit traiter de « déguelasse ». Précisons, d'ailleurs, que Belmondo, dans cette même scène, s'est introduit par effraction dans la chambre d'hôtel de la jeune femme, en subtilisant sa clé à la réception. Une intrusion masculine qui se présente d'ores et déjà comme une agression. Ces gens n'avaientils jamais entendu scander le fameux « my body, my choice » ou « non, c'est non » ? Peut-être pas, après tout… Anachronisme mon amour, ce film est tout bonnement révoltant ! Pas étonnant qu'il ait été réalisé


“Eh oui les filles, dans les 60's, on vous appelait « mon petit », et la seule considération que vous pouviez espérer était limitée à votre apparence.”

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par un homme… ce n'est pas Varda qui aurait filmé de telles abominations (et la cinéphile que je suis ne peut, finalement, qu'en être gré). Bref… si on ajoute à cela toute les fois où un homme, dans le film, écarte les cuisses, pris en flagrant délit de manspreading, il semble évident que le film n'est pas super Lena Dunham oriented (et encore une fois, en bonne cinéphile, je m'en réjouis). La femme réduite à son être sexuel et sa beauté plastique Sinon, la femme est irrémédiablement réduite à son être sexuel et sa beauté plastique. Il faut dire que belle, Patricia l'est. Mais n'est-elle pas également cultivée, raffinée et sensible ? Ce n'est sans doute pas l'avis de l'écrivain qu'elle interviewe, interprété par Jean-Pierre Melville. Quand elle lui demande, à plusieurs reprises (car elle a du mal à se faire entendre), si les femmes auront une place dans la société moderne, elle se voit vulgairement rétorquer : « oui, si elles portent une robe rayée et des lunettes fumées », ce qui correspond à son accoutrement. Ainsi, Patricia ne reçoit de lui aucune réponse "sérieuse", tandis qu'il assène aux hommes des aphorismes de premier choix. Remarquez, c'est déjà pas mal qu'elle puisse faire une interview ; à l'époque, les femmes étaient secrétaires, et pas grand-chose d'autre, jusqu'au mariage où généralement, elles cessaient de travailler. Si Patricia se prend une main aux fesses, elle doit considérer la chose comme un encouragement. J'ai mal à mon Beauvoir… Patricia, une féministe paradoxale ? Et pourtant, Patricia demeure une femme libre et indépendante, qui tente presque, selon une analyse plus métacinématographique, d'échapper aux mains de son créateur, Godard. Eh oui, (spoiler alert), quand, à la fin, elle dénonce Belmondo à la police, elle semble se réapproprier la fiction,

pour l'emmener s'échouer sur les précipices du réel. Patricia se dégage du scénario tout tracé du film noir, et rejette cet amour en demie-molle, pour reprendre le contrôle sur sa vie. Un geste irrévérencieux, presque sublime. Deus ex Machina s'il en est, avec ses grands yeux de biche prise dans les phares d'une voiture, à la fin du film, elle préempte la trame de l'histoire, qui devient son histoire. Non, elle ne suivra pas Belmondo en Italie, et oui, elle ira étudier à la Sorbonne, et oui, elle aura l'avenir qu'elle a envie d'avoir, et non celui, plus romanesque, d'une fugitive à demi acquise à elle-même. Par effet de sa volonté, Belmondo chancelle rue CampagnePremière, une danse comme un chant du cygne, qu'elle observe de loin, savourant sa liberté à venir, et son bonheur. Elle qui déclarait « I don't know if I am unhappy because I am not free, or if I am not free because I am unhappy » a enfin son happy ending, absurde et poétique, qui n'appartient qu'à elle. La mort de l'homme a libéré la femme. Godard a avoué en 1968 : « Quand j'ai tourné À bout de souffle, je pensais que je faisais quelque chose de très précis. Je réalisais un thriller, un film de gangsters. Quand je l'ai vu pour la première fois, j'ai compris que j'avais fait tout autre chose. Je croyais que je filmais Le Fils de Scarface ou Le Retour de Scarface et j'ai compris que j'avais plutôt tourné Alice au pays des merveilles, plus ou moins ». Ce qu'il avoue, c'est que son personnage féminin a été plus fort que lui. Si Patricia avait fui avec Belmondo, elle n'aurait été qu'une sous-Lauren Bacall, version poulbot travesti. Une héroïne de films noirs, faite par les hommes et pour les hommes, une fonction sans profondeur. Ce que Patricia a fait, c'est passer d'objet à sujet, et pour ça, c'est un personnage féminin profondément révolutionnaire !

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HUMOUR � T CLÉMENT VILLAS P JULIEN WEBER

FARY

IS THE NEW BLACK 40


C’est dans un resto de tartare sur les Grands Boulevards que j’ai rencontré Fary, nouvelle star montante du one-man-show à l’américaine. Le seul mec qui monte sur les planches aussi stylé qu’un chanteur de RnB ou qu’un mannequin Pierre Balmain. Il paraît que t’es rarement joignable avant 14 heures, qu’est-ce que tu fais la nuit ? C’est une légende ! Même si c’est vrai que ma nuit de sommeil se situe entre 4 heures du matin et 13 heures. C’est mon rythme qui veut ça. On finit de jouer tard. Après avoir joué, on bosse un peu, on débriefe. Je rentre chez moi, il est 2 heures du matin ; le temps de manger il est 4 heures. J’ai besoin de mes 9 heures de sommeil pour reposer la machine (rires). Avant je sortais beaucoup. J’aime bien la bonne musique, les lieux atypiques et les belles femmes : le monde de la nuit, c’est l’endroit qui les réunit. Maintenant, je travaille beaucoup, surtout. Tu es super jeune pour avoir autant de succès, ça te rend fier ou ça te fait flipper ? Au même âge que moi, Kev Adams est déjà millionnaire et c’est l’un des acteurs les plus bankables (rentables, ndlr) du cinéma français. Donc je suis pas si jeune que ça. Tu entends souvent dire « c’est fou ce qu’il est jeune », mais c’est à cet âge-là qu’on peut réaliser de grandes choses. Regarde dans le foot, Madonna, Michael Jackson ou Adele : quand son album a cartonné, elle avait 21 ans. A 22 ans, Eddie Murphy, c’est une star internationale du stand-up. Comparé à tout ça, je suis pas si jeune que ça. Tu as écrit ton premier spectacle avec ta prof' d’histoire-géo, ça te fera un point commun avec Emmanuel Macron. Raconte-nous un peu cette amitié… C’est vrai. Mais surtout ce que je retiens et que j’espère, c’est que tous les profs soient comme ça. Ils devraient avoir cette capacité à

identifier les atouts de chacun et les pousser à aller au fond des choses. J’étais ce genre d’élève qui « a des capacités mais peut mieux faire ». Cette prof a su identifier mes atouts. Elle arrivait à montrer à ses élèves que peu importe leur niveau scolaire, ils avaient tous quelque chose à apporter à la société. C’est ça qu’il faut retenir. Que penses-tu du paysage humoristique français ? Moi, j’ai perdu mes idoles peu à peu et je trouve qu’en France, on n'a pas d’humoristes très connus aujourd’hui à qui se référer, contrairement aux Etats-Unis par exemple. Souvent en France, les succès humoristiques, c’est rarement ce qui se fait de plus malin, de plus fin ou de plus intéressant. Je pense que ça vient du fait qu’on est un pays d’intellectuels et de penseurs donc on attend de l’humour plus gras, plus simple et moins réfléchi. A l’inverse, les Américains qui ne sont pas vus comme un peuple d’intellectuels et qui sont hyper puritains à la télé, quand tu vois leur stand-up c’est tout l’inverse : ça parle de sexe, ça dit des gros mots. Ils se lâchent complètement. Ils parlent de choses que nous on ne dira jamais sur scène. C’est assez étonnant. Y'a une grande différence culturelle : ici, le public n’a pas cette exigeance-là. En France, le mec qui veut faire du rire malin, il va tout de suite se tourner vers la politique : ça va devenir rapidement un truc très élitiste, très parisien, ça n'intéressera pas le grand public. Y'a pas d’entre deux : entre le rire malin et le rire qui plait à tous. Dieudonné il avait ça à la base, c’était un peu le Bob Marley de l’humour français. Mais maintenant, c’est du grand gâchis, il s’est bêtement laissé enfermer dans un truc. — Fary is the new black En spectacle à Bobino jusqu’au 1er juillet 41


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WEB � T RAPHAEL BREUIL

CONVERSATION AVEC LES GLAMOUZE

Lancée il y a quelques semaines sur les internets, la chaîne YouTube Glamouze est une compilation de vidéos de petites meufs du web passées au rouleau compresseur. Morning routine, What’s in my bag, des tutos, si vous connaissez le monde imblairable des Youtubeuses, vous

allez adorer les deux filles de Glamouze. C’est dans un café un peu ringard qu’on a rencontré Camille et Allison, les deux auteures et comédiennes de la chaîne qui monte et compte désormais 14 000 abonnés et qui, j’en suis sûr, deviendra bientôt culte.

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Comment je dois vous présenter ? Camille : Comme deux comédiennes qui se lancent sur YouTube. Je vois qu’il y en a une qui est pleine de vie, qui se la pète dans son lifestyle et une autre complètement dépressive. Vous êtes vraiment comme ça dans la vie ? Allison : Presque. C : Oui, j'aime détruire des objets technologiques et je pleure sous la douche, j'ai menti pour le jambon et le gel douche qui étaient des placements produits. A : Je me la pète pour masquer ma dépression et mon angoisse à cause de ce monde qui part en vrille et du manque d'eau potable. On commençait à s’habituer à vos lifestyles pourris. Mais après vous avez complètement changé de ton avec la vidéo des fées (un de leurs sketchs montre des tutos de fées…). Quézako ? C : On avait tourné des vidéos avant de trouver notre ligne éditoriale alors on les poste quand même, parce qu’on s’en fout. A : Et la ligne éditoriale on s’en bat les couilles à la base. C : Du coup on poste ce qu'on veut connard, on peut voir ta carte de presse ? A : Et puis ceux qui n'aiment pas le lifestyle et la parodie aimeront peut-être les fées, comme ça on ratisse large. Y'a une vraie stratégie commerciale derrière. On tend vers le merchandising de masse. Et alors les prochaines vidéos c'est quoi ? Ça dénonce grave ? C : On va parler fluide corporel et rando-rollers. A : Tant pis si ça dérange Ça met l'eau à la bouche. A : Il faut qu'on en profite avant d'aller sur TF1.

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On peut savoir d'où vous venez ? C : Non. (J’insiste) Ok… Pouilly-sur-Mer. A : Forges-les-Bains dans le 91. C : Pouilleux depuis trois générations lol. Voulez-vous répondre ? C : A la question d'où qu'on vient ? Ouais. Votre parcours quoi. C : On vient d'Île-de-France. On est des insulaires MDR. Ah oui, licence de Physique puis doctorat en Théâtre option pôle emploi. A : Licence économique. Membre de la mafia Channel9. Et beaucoup de théâtre amateur semi-pro. Et avec Camille on s'est rencontrées au Conservatoire du 19e. Et elle a changé ma vie. C : Du 19e arrondissement hein, pas siècle lol. (aucun rire) A : Énorme. C'est quoi votre film d'horreur préféré ? C : The Ship of Agony. A : The Ring. C : C'est le premier que j'ai vu… Et aussi le film de l'accouchement de la femme de Luc. A : Le Cercle. Rings. Camille quand elle pète. Vous avez une minute pour faire la promo de votre dernière vidéo. C : On voit une chatte dans la vidéo ! A : WARNING ! Spoiler ! Un conseil pour les lecteurs du Bonbon ? A : Sauvez la planète, mettez des mooncup. C : Je cherche un truc bien à dire mais j'ai pas de conseil à donner. A : Faut qu'on trouve un truc ensemble en fait C : Mon conseil c'est « abonnez-vous à Glamouze ». A : Bonne lecture. Aimez-vous les uns les autres ! Et profitez de chaque instant comme si c'était le dernier… Avant de mourir ! — Tapez "Glamouze" sur www.youtube.com


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© Romy Alizée


AGENDA � VENDREDI 9 JUIN 00h Rex Club 12€ Astroclub : W.LV.S (The Driver & Electric Rescue) Madben, Sonic Crew 19h La Plage du Glazart 15€ Terrence Parker / Boo Williams / Merachka / DR SALT / Morgi / MOMS 00h Bus Palladium Bonbon party, invitations sur lebonbon.fr 22h La Clairière 10€ La Mamie’s SAMEDI 10 JUIN 00h Rex Club 12€ Bass Culture 20th Birthday Part 3 : Derrick May, D'Julz 18h La Machine du Moulin Rouge 12€ [BP]: The Analogue Cops Abajour Adrian Herrmann Primitive 12h Bois de Vincennes 40€ Festival We Love Green 2017 VENDREDI 16 JUIN 00h Nuits Fauves 15€ Possession : James Ruskin, DJ Pete, Henning Baer, Vril Live, Parfait 00h Bus Palladium Bonbon party, invitations sur lebonbon.fr 22h Garage 5€ Rayon Rouge #03: Woo York Live, Melodic Diggers 23h Nuits Fauves 20€ DJ Sneak SAMEDI 17 JUIN 00h La Machine du Moulin Rouge 12€ Shake #3 : Sadar Bahar, Mr Mendel, Around The World 00h Petit Bain 10€ Beat à l'air presents Arapu, Varoslav b2b Poggio & Ramutcho Crew 19h La Plage du Glazart 12€ Session Victim, Leo Pol & Nick V 48

DIMANCHE 18 JUIN 15h Chalet du lac 8€ Cocobeach Opening Party – Story VENDREDI 23 JUIN 00h Bus Palladium Bonbon party, invitations sur lebonbon.fr 22h La Clairière 25€ H A ï K U with ÂME Dj (all night) 22h Garage 5€ RA+RE Records 3 Years with Alexandra & Residents 00h La Machine du Moulin Rouge 15€ Chineurs de House x A.K.A : Rahaan, S3A Live, Damiano Von Erckert b2b Dj Slyngshot SAMEDI 24 JUIN 20h La Plage du Glazart 15€ Initial Meets Unusual Suspects (Ibiza) with Mandar, Rick Maia & More 22h La Clairère 10€ Louisahhh, Dusty Kid (Live) & Arnaud Rebotini (Live) 00h Rex Club 12€ Deja-Wu : Julian Perez, Cesar Merveille, Alexkid JEUDI 29 JUIN 23h Batofar 6€ Bliss - Б Présente : Losoul, Mush, Loxique, Greg Lion VENDREDI 30 JUIN 00h La Machine du Moulin Rouge 17€ Opening Macki 2017: Objekt / Rrose (Live) / Paula Temple & More 00h Bus Palladium Bonbon party, invitations sur lebonbon.fr 00h Base Aérienne 217 40€ Area217 Festival5 19h La Plage du Glazart 12€ Déferlante II with Fort Romeau / Trikk / Fango / LOR / JMII


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