Le Bonbon Nuit 56

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Septembre 2015 - n째 56 - lebonbon.fr


B 590 800 173 RCS TOULOUSE

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* FACEBOOK.COM/CUBANISTO

LʼABUS DʼALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. A CONSOMMER AVEC MODÉRATION.


ÉDITO Le bonheur, c'est la paralysie de l'intelligence, ça rend calcaire, tout le monde court après mais moi j'te le dis, faut le fuir comme un plan à Barbès. Regarde un peu les gens heureux, ceux qui ont la sagesse, le bon sens, ceux qui ont le bien-être, l'amour ou la fraîche, on dirait des pré-retraités de droite dans un camping de luxe en Provence. Du coup, j'te le dis vraiment, s'il approche, prends tes jambes à ton cou si tu ne veux pas finir en demi-molle dans la boîte crânienne. Et opte plutôt pour la joie des emmerdes. Aaaah, les emmerdes, voilà le vrai carburant de l'Histoire, sans elles pas de héros, pas de littérature, pas d'art, pas de philosophie. Ça stimule autant que du gros sel sur une plaie ouverte ou une plâtrée de harissa sur la pastille. À ton niveau, il faut faire avec ce que t'as mais je pense que c'est déjà pas mal, tu peux bien scorer. Et puis oublie pas que dès que t'en as une, une autre apparaît, le truc fonctionne par grappes, ça permet assez aisément de les enchaîner. Maintenant, vois le bon côté des choses, ça va te faire travailler la créativité. Ouais, il faudra être inventif pour récupérer ta meuf quand elle t'aura foutu dehors, astucieux pour esquiver tes créanciers, inspiré pour raconter des fables au taf. Pour sûr, les emmerdes, c'est l'excitant intellectuel le plus facile à se procurer et ça coûte que dalle. Et puis moi, j'te le dis, aimer ses emmerdes, c'est le seul moyen de baiser la réalité. Amor fati. MPK

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OURS

RÉDACTEUR EN CHEF Michaël Pécot-Kleiner DIRECTEUR ARTISTIQUE Tom Gordonovitch DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Jacques de la Chaise COUVERTURE Superpitcher par Constantin Mashinskiy SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Louis Haeffner RÉGIE PUBLICITAIRE regiepub@lebonbon.fr 06 33 54 65 95 CONTACTEZ-NOUS nuit@lebonbon.fr SIRET 510 580 301 00032 SIÈGE SOCIAL 12, rue Lamartine Paris 9


SOMMAIRE

p. 7 À LA UNE Superpitcher p. 13 MUSIQUE Il est Vilaine p. 21 LITTÉRATURE Les mots de minuit p. 23 CINÉMA Les sorties du mois p. 27 ART Tianzhuo Chen p. 35 ÉROTISME Jessica Rispal p. 45 REPORT Baleapop


Bonbon Party IS BACK ! TOUS LES VENDREDIS AU BUS PALLADIUM

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POUR ÊTRE SUR LA LISTE RDV SUR LEBONBON.FR 6, RUE PIERRE FONTAINE PARIS 9e


HOTSPOTS

- L'ÉTRANGE FESTIVAL 21e édition et toujours autant de mordant pour proposer des sélections cinématographiques qui sortent des sentiers abattus. Au programme donc, du weird, du gore, du fantastique, de la SF foutraque, du poétique, bref, tout ce que tu ne trouveras pas dans les circuits conventionnels subventionnés. Du 3 au 13 septembre. Forum des Images. - ON ADORE LES SUSHIS Tigersushi, label de qualité irréprochable depuis l'an 2000, organisera une petite sauterie dans le cadre des soirées Jeudi Ok à la Java, notre club beau-dégueu préféré. On me susurre à l'oreille droite que Crackboy et Han (side project de Principles of Geometry) seront derrières les platines. Feeling Excited. 17 septembre. Minuit à l'aube. La Java. - ON ADORE LES MACKIS AUSSI Pendant 2 jours, La Mamie's et Cracki Records fusionnent sexuellement pour donner le Macki Festival, un chouette événement dans la nature avec plein de gentils animaux des bois comme Moodoïd, Romain Play, GZA (!), Jeremy Underground ou encore Syracuse. De quoi bien se péter comme des fouines, hein. 25/26 septembre. Parc de Carrières/Seine - ANDY WARHOL Génie cosmique pour les uns, escroc de base pour les autres, Andy Warhol reste l'un des plus beaux fouteurs de bordel dans le petit monde incestueux de l'art contemporain. Dans cette expo où seront présentées 200 de ses œuvres, tu pourras savoir si Wahrol, c'est vraiment de la soupe (Campbell) ou pas. 2 octobre. MAM. 5


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À LA UNE T

MPK & PAUL OWEN BRIAUD P LINDA BUJOLI & MARCO DOS

SUPERPITCHER — LA FOLIE DOUCE

Aksel Schaufler a.k.a Superpitcher est le genre de type à avoir marqué durablement les deux dernières décennies de l'histoire de la musique électronique. Pierre angulaire du mythique label allemand Kompakt, créateur d'œuvres élégantes pour mélomanes sous influences (ses maxis Heroin, Yester-

day ou encore ses albums Here Come Love et Kilimanjaro), moitié avec Rebolledo du très coté duo Pachanga Boys, nous avons profité de son installation à Paris pour lui poser quelques questions. Une interview qui tourne autour de ses modes d'inspiration. Et complètement hors-promo. 7


“REBOLLEDO ET MOI SOMMES DES GENS TARÉS TOUT CE QU'IL Y A DE PLUS NORMAL.”

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Aksel, aussi loin que ta mémoire peut remonter, quel est ton premier déclic musical, celui qui a inspiré et continue d'inspirer ta manière de faire de la musique ? Je suis convaincu que les battements du cœur de ma mère m’ont inspiré pour faire de la musique. Je crois vraiment que notre fascination pour tels ou tels rythmes musicaux vient de la proximité qu’on a eue avec le battement d’un cœur dès nos tous premiers instants de conscience. Sinon, chez moi, une petite ville du sud de l’Allemagne, on écoutait seulement du classique. J’étais bien sûr très touché par ce genre mais c’est seulement vers vingt ans que j’ai découvert King Tubby et son style de dub légendaire - qui continue de m’inspirer aujourd’hui. On qualifie souvent ta musique de romantique, de poétique. Elle l'est. Quelle est ta définition personnelle du « poétique » ? En quoi cela peut-il nous renseigner sur ta façon d'appréhender la réalité ? Je n’essaie jamais de trouver une description pour le style qui m’a choisi. C’est ce style qui est venu à moi à l’époque, sans que je le force, et il a continué à se développer sur deux décennies. Tous les morceaux que j’ai faits me sont apparus, comme ça, et il me semble qu’il ne me restait plus qu’à les laisser s’exprimer à travers moi en les rendant compréhensibles pour autrui. Ma définition de la poésie ? Il m’est trop difficile de trouver des mots pour décrire ce que je pense de la poésie. J’essaie de ratisser large et de ne pas mettre les choses dans des cases, de ne pas donner de définitions arrêtées. Pour moi, la poésie recouvre tant de choses, tant d’émotions, mais si je devais dire un mot sur la poésie que j’apprécie, et sur son essence, je crois qu’elle consisterait à avoir été composée naturellement avec sentiment, et que c’est de cette manière qu'elle a le pouvoir d'affecter les âmes. Cette définition est évi-

demment subjective. Certains ressentent le fait d’écouter du métal dans la sueur d’un pogo comme un succès poétique. D'autres diront que ma musique devrait être utilisée dans des chambres de torture. Comprendre la réalité ? Il n’y a aucune façon de la comprendre. En ce qui me concerne, je n'ai pas avancé d’un iota sur ce terrain-là. Corresponds-tu réellement à cette image de dandy que l'on te prête ? Ta vie est-elle élégamment bordélique ? Ha ha ! Voilà une question à laquelle ma copine aurait adoré répondre ! Je ne peux pas nier que j’aime les vêtements de belle facture, ni que j’admire certains créateurs. Je suppose qu’à une époque il m’était très important de me créer un certain style. Avec le recul, j’admets que c’était aussi un moyen de me cacher derrière quelque chose, puisque j’étais désespérément timide quand il fallait faire des lives. Ceci dit, je me suis apaisé. Bien que j’aime toujours porter un beau chapeau, la musique est aujourd’hui la seule chose dont je me soucie... Venons-en à ton duo avec Mauricio Rebolledo, duo qui symbolise l'alliance du feu et de la glace. Que t'apporte la « folie » de Mauricio dans ton approche de la musique ? Et toi, qu'est-ce que tu lui as donné qu'il n'avait pas avant de te rencontrer ? C’est difficile de séparer les styles et de mettre le doigt sur ce qui a déclenché l’étincelle entre nous, ou ce que Rebolledo ajoute à ma musique ou vice-versa. On s’est rencontrés, on a rigolé, on a fait de la musique et on l’a jouée. C’était vraiment aussi simple que ça. Nous sommes tous les deux des gens tarés tout ce qu’il y a de plus normal, bien que d’autres puissent avoir une perception de nous toute différente. Tu es actuellement en studio. Question indiscrète, mais êtes-vous en train de bosser sur une nouvel album des 9


Pachanga Boys ? Si oui, il est prévu pour quand et prendra quelle direction ? Puisque Mauricio et moi voyageons beaucoup, il n’y a pas de projet immédiat concernant la sortie d’un album des Pachanga Boys. Cela étant, on ne sait jamais – comme je l’ai dit avant, l’inspiration ne s’anticipe pas. La création pourrait venir et nous trouver en une nuit. Non seulement on ne peut jamais vraiment savoir quoi, quand ni comment, mais il est rigoureusement impossible de savoir à l'avance quelle direction un tel album pourrait prendre. Le processus de production, à mon sens, est comme une rivière. Une fois dedans, elle coule et suit son cours jusqu’à ce que vous voyiez complètement l’horizon et sachiez que le voyage est achevé. A-t-on une chance de bientôt ré-écouter des productions sous ton nom ? Absolument. C’est ce sur quoi je travaille en priorité actuellement. En ce qui concerne la date de sortie, je ne suis pas du genre à trahir un beau secret. Tes productions sont réellement excellentes. A mon sens, il y a deux hymnes qui marqueront à jamais les amoureux de la musique électronique : More Heroin et Time (avec Rebolledo). Pour l'un et pour l'autre, peux-tu nous décrire ce que tu avais dans la tête lorsque tu as produit ces titres ? Des images ? Des anecdotes ? Merci pour les compliments. Pour ce qui est de Time, nous étions en studio et avons trouvé un morceau que j’avais ébauché quelques années plus tôt, un vieux dossier dans mon ordi, qui s’appelait « Lost Track ». On l’a écouté, puis on a travaillé dessus, et c’est devenu « Lost Track Of Time ». Il est certain que nous n’avions aucune intention de produire ce morceau, ni aucune idée qu’il deviendrait un tel hit. Quand j’ai produit Heroin j’étais inspiré par la culture pop art américaine des 60’s. Le morceau n’a 10

pas forcément rapport avec, mais je suppose que cela a eu sur moi une influence subconsciente. Tu as fait le choix de venir t'installer à Paris. Pourquoi ? Mon installation à Paris à été causée par un ardent désir de quitter Cologne. Paris était depuis toujours l’une de mes villes préférées et j’avais déjà nombre d’amis ici, c’est un exil qui faisait sens. Il était temps pour moi d’entreprendre une certaine renaissance, et je suis très heureux d’avoir pris cette décision. En quoi cette ville peut-elle t'inspirer dans ton écriture ? Je ne veux pas t’ennuyer avec cette analogie de la rivière, mais la voici de nouveau : pour moi, nous nous mouvons dans notre environnement, et nous charrions des choses, visuellement, énergétiquement ; des choses que nous apprécions mais aussi d’autres qui nous ennuient, et ces choses se fondent en nous, comme dans une rivière qui emmène avec elle des morceaux de rives, d’arbres, de plantes et de poissons. Au final, il est impossible de dire comment Paris peut m’inspirer. Elle m’inspire, avec toute sa beauté, ses gens, sa folie, et la cadence à laquelle elle avance. Toi qui paraît-il aimes bien le vin français, as-tu un petit remède magique contre la gueule de bois ? J’aime boire des vins naturels et par chance, je n’ai jamais eu de gueule de bois. J’ai découvert au Mexique qu’un clamato con cerveza est le meilleur remède contre une méchante gueule de bois (palourde, jus de tomate, bière et épices) – ou alors se faire arrêter par la police militaire au milieu de la sierra. Ça, ça marche vraiment bien aussi.

— www.kompakt.fm/artists/superpitcher


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MUSIQUE T

MPK VICTOR MATUSSIERE P

IL EST VILAINE — LUST HIGHWAY Ça suinte, c'est râpeux, ça hypnotise, ça part en couille, on dirait de la musique pour cow-boy en cuir sous trip, ça se situe entre du rockab', de l'acid, de la minimale et de la cold wave... En quelques mots, voilà donc les premières impressions que procure l'écoute

du nouvel EP Lumière Noire #1 du duo Il est Vilaine sur Kill the DJ. On s'est incrusté une bonne heure dans leur studio histoire d'en savoir un peu plus sur ces deux cervelles de coquine. Morceaux choisis.

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Bon, on va pas tourner autour du pot, votre EP est franchement bon. Par contre, je n'ai rien compris aux paroles du titre Peyotl. Vous pouvez éclairer ma lanterne ? Florian : (sourire) Y'a pas de vrai fil conducteur dans ce morceau à part une bonne tranche de rigolade. En fait, je dis un peu n'importe quoi dessus, du genre « tape-toi des nains », « juste ce qu'il faut de petits ah, de petits oh », « tu sais que t'es peut-être pas né là ». Disons que les paroles ont été choisies pour leur musicalité. Vous étiez foncedés quand vous avez choisi votre nom de scène ? F : Oui, un peu. C'est suite à une soirée où on s'est tapé un trip en se traitant l'un et l'autre de vilaines. On était complètement arrachés. On a l'un et l'autre des origines bretonnes, mais ça n'a vraiment rien à voir avec ça. Simon : On trouvait le jeu de mot marrant. En plus, ça nous permet d'aller dans des styles de musique différents. Ça nous arrive souvent en studio de nous dire : « Non... On va pas faire ça... » Et puis si finalement, parce qu'on est des vilaines. Cet EP est donc la première sortie de la collection Lumière noire sur le label Kill the DJ, collection par ailleurs dirigée par Chloé. Ça vous fait quoi de l'avoir comme « marraine » ? S : Moi, c'est une vieille pote de fac, du coup, ça fait très longtemps qu'on se connaît. On avait déjà bossé ensemble en 2004 sur un EP nommé Battle. Elle avait kiffé notre premier maxi, et on était en pourparlers avec KTDJ (Kill the DJ, ndlr) quand elle a eu l'idée de monter Lumière Noire, sa série d'EP. Musicalement, elle représente quoi pour vous ? F : Pour moi, elle fait partie des premiers artistes que j'ai aimés dans la musique électro-

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nique, elle symbolise vraiment l'esprit KTDJ. S : Sa musique est ultra-personnelle. Féminine, subtile, et en même temps qui envoie du dur. En plus, c'est l'une des rares artistes électroniques à pouvoir aussi intellectualiser sa musique, je pense à ce qu'elle fait pour l'IRCAM, par exemple. La volonté de faire suinter la techno comme du rock bien sale, elle vous vient d'où ? F : Ça nous tenait vachement à cœur de mettre des grattes, des basses plutôt que de tout faire avec des machines. On a vraiment fait ça pour amener un côté plus organique. S : On a voulu amener un côté « cul » et psychédélique. On aime la déviance, les trucs weird. Ce côté organique vient justement foutre le bordel. Vous en pensez quoi des prod' du label Her Majesty's Ship ? Je trouve qu'ils sont aussi un peu dans la même direction musicale que vous. F : David (David Shaw, le label manager d'Her Majesty's Ship, ndlr) est un super pote. Et c'est vrai qu'on a clairement les mêmes goûts, que l'on a en commun cette base rock et new wave. Après, pour te parler de new wave, on a l'impression que c'est une musique démocratique, mais en fait elle ne fait que des revivals inscrits sur des périodes données. C'est une musique finalement assez difficile d'accès bien que des mecs comme ceux du collectif La fête triste la diffusent très bien. Nous, c'est vraiment notre volonté de donner une couleur cold/newwave/rock pour aller sur un côté plus freaky de l'électro. Vous vous sentez proche d'un mec comme Ivan Smagghe ? F : Oui, au niveau du style musical, ça a été une de mes premières grosses claques. Avant, j'écoutais beaucoup de grosse techno un peu


“ON A VOULU AMENER UN CÔTÉ « CUL » ET PSYCHÉDÉLIQUE. ON AIME LA DÉVIANCE, LES TRUCS WEIRD.”

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Lumière Noire #1 KTDJ facebook.com/ilestvilaine 16


dégueue. Bon, en fait, je suis arrivé assez tard dans la musique électronique, et j'ai appris à mixer avec des gens qui mettaient leurs skeuds à 135 bpm. C'était marrant, mais ce n'était pas le truc qui me parlait le plus. Et le premier set de Smagghe que j'ai entendu, je l'ai vu jouer de la house, du disco, de la techno crade mais réfléchie, et du coup, ouais, ça m'a mis une bonne tarte. Il m'a vraiment donné une direction artistique que je ne connaissais pas avant lui. Et un label comme Comeme, ça vous parle aussi ? F : Oui, gros gros fan aussi depuis le début, avec les premiers Maloso et Rebolledo. S : Eux, du coup, ils ont vraiment amené quelque chose de nouveau et de festif dans la musique électronique. Ce côté un peu « foufou », cet humour, ça manquait clairement. F : Oui, et quand tu vois Matias Aguayo sur scène... Le mec est un spectacle à lui tout seul, il désacralise complètement le côté un peu snob du mec derrière les platines. Cette légèreté, cet apparent manque de sérieux, on aime beaucoup. La nuit parisienne, tout ça, vous en pensez quoi ? F : J'ai l'impression qu'elle est plus diversifiée. S : Oui, y'a une proposition à Paris qui est hallucinante, t'as l'impression qu'il y a chaque week-end l'équivalent d'un festival. Maintenant, en termes de public, ça manque d'ouverture d'esprit. Il manque des soirée avec de la musique vraiment différente. F : Oui, y'a moins de prise de risque ici. S : Ça prend du temps, j'ai l'impression que la population parisienne est moins curieuse. F : Après, je reviens vraiment sur le fait qu'un collectif comme La fête triste fasse des plateaux hyper cohérents. En termes de prod', un label comme Antinote a aussi des propositions musicales vraiment différentes : y'a autant de techno crade que de de pop....

J'ai l'impression que les imprévus, les ratages ont pas mal d'importance dans votre processus créatif. S : Complètement. Des fois, en studio, on n'arrive pas à faire un truc et tout d'un coup y'a un foirage, quelque chose se casse la gueule, et là, on fait « Waaahh ». c'est vrai que ça nous arrive assez souvent. Là, on est en train de finir un remix, j'étais à la guitare et Flo était sur une pédale, il tripote un bouton, je lâche la guitare et tout d'un coup, il y un bruit blanc qui arrive. Flo a joué avec et on a laissé tourner. Ça a fait le break du morceau, on n'aurait jamais pu imaginer faire ça : ça part en larsen avec un bruit d'alarme qui n'est pas calé avec le tempo... Même si on avait pensé le truc, on n'aurait pas réussi à le faire. L'accident, c'est vraiment une grande partie de notre univers. Votre meilleure date à Paris ? F : La House of Moda, ça a été une sacrée expérience. C'était bien bien barré. S : C'était drôle, festif, du grand n'importe quoi. Y'a quelqu'un qui a renversé une bouteille de poppers devant les platines, du coup, entre le premier rang et nous, on est devenus tous tout rouges. F: On a fait aussi un Rex avec Chloé pour la release party du Maxi. Perso, c'était la première fois que je jouais là-bas. On pensait pas avoir trop de monde... C'était tout l'inverse, la dernière demi-heure, ça a été bien dense car Gorbatchev a fait un set plus techno que d'habitude. Grosse folie. Pour finir, parlons d'avenir : l'EP prépare logiquement un album ? S : Oui, on a déjà quelques idées, et on veut garder le même grain que l'EP. F : On va essayer d'aller plus loin. Moins club, moins de concession, encore plus personnel.

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LITTÉRATURE T

TARA LENNART

ENCRE NOIRE POUR NUIT BLANCHE

Blanche comme une page, la nuit s’inscrit aux abonnés absents. Pas de marchand de sable à l’horizon ni de pilules magiques pour baver dans les bras de Morphée. Ne cherchez plus,

lisez. Et dans votre lit, c’est encore mieux ! Vous aurez une bonne raison de ne pas dormir… Avec notre sélection, repartez illico en vacances. Dans votre tête, déjà. 19


Surf Skate & Snow Christophe Perez Exactement le genre de beau livre qui donne envie de passer sa vie sur une planche. Il n’y a pas de saison pour la glisse, il n’y a pas de saison pour la liberté. Loin de se contenter d’aligner les belles photos, ce livre retrace l’histoire de ces sports, leurs origines, leur développement, et, surtout : leur influence sur la société et le reste de la culture. Non seulement c’est beau, mais en plus ça démontre que les planches sont loin de n’être qu’une occupation d’adolescents boutonneux. La glisse, c’est la vie. C’est tout. Editions Courtes et Longues Blup Gilles Marchand Que se passe-t-il si un poisson rouge assiste à une scène de meurtre dans un bar ? Très important, le « dans un bar ». Parce que ce court polar se lit sur six sous bocks que vous n’aurez pas forcément envie de salir avec votre bière. L’histoire est amusante, les dessins originaux, et le concept, génial. Par contre, inexplicablement, ça donne envie d’enchaîner les mousses. Zinc Editions Dude Manifesto Thierry Théolier Vous en avez marre de votre boss/femme/mec/ emploi du temps/job/belle-mère et j’en passe ? Vous rêvez de respirer un peu et de lâcher la pression ? Lisez ce manifeste à contre-courant du speed existentiel et vous ressentirez une irrépressible envie d’envoyer balader pas mal de sources de pollution intérieures et de voir la vie sous un autre angle. Celui du Dudisme. Par les temps hachurés qui courent, c’est une saine et sage façon d’envisager l’avenir, et c’est Thierry Théolier, notre Dude parisien, qui vous l’explique Denise Labouche Editions

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Délivrance James Dickey Avant le film un brin démodé, il y a ce livre, absolument glaçant, qui vous donnera une bonne raison de haïr le canoë. Quatre citadins trentenaires partent faire une randonnée en canoë sur un week-end, et au lieu d’un sain dépaysement en pleine nature, rencontrent l’horreur et la bestialité humaine. Si les descriptions de paysages sont magnifiques et inspirantes, la violence du récit contraste avec cette poésie bucolique. Editions Gallmeister La Pire. Personne. Au Monde Douglas Coupland On vous qualifie de sale type ? Vous vous trouvez désagréable ? Vous trouvez que vous n’avez pas de chance ? Passez quelques heures en compagnie de Raymond Gunt, le loser le plus arrogant et malchanceux de la terre et vous relativiserez. En envoyant ce type filmer une émission de real-tv à l’autre bout du monde, Coupland signe un monument de cynisme et d’humour sadique. Le pire, c’est qu’on s’attache à cet immonde abruti. Au Diable Vauvert Têtes Blondes Perrine Le Querrec Si vous aimez les enfants, ce livre va vous donner une baffe. Si vous n’aimez pas les enfants, aussi. En moins de dix nouvelles ciselées, ouvragées comme une tenture sadique et cruelle, dix nouvelles souvent grinçantes et abominablement réalistes, les enfants en prennent pour leur grade comme rarement depuis la Comtesse de Ségur. Mais en mieux. En mieux, parce que les enfants deviennent les révélateurs de la monstruosité des adultes, de la cruauté humaine et de la vie, en fait. En pire. Editions Lunatique


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CINÉMA T

PIERIG LERAY

LES SORTIES CINÉ 1 mois, 4 films, 4 avis. Le problème ? On ne les a pas vus. Critiques abusives et totalement infondées des meilleurs/pires films du mois.

Youth de P. Sorrentino

Le tout nouveau testament de Jaco van Dormael Toute l’absurdité burlesque du cinéma belge dans un conte pythonesque grossier et drôle phrase d’accroche à faire bander les Cahiers. C’est le re-re-revival de notre alcoolo préféré de Poelvoorde qui prend le costume d’un Dieu en charentaise bien décidé à faire chier le monde, un père absent qui insulte son fils « venu sur terre se faire clouer sur un cintre ». Sans oublier Deneuve qui couche avec un gorille et une Yolande Moreau toujours au sommet. Pour le plaisir de 20 minutes, un film qui a la frite ! 22

Du bon vieux trip libidineux à faire saliver le plus SM des octas, une belle branlette à mou de voir Michael Caine et Harvey Keitel assumer leur vieillesse aussi facilement qu’une pastille bleue dans le gosier /CLASH/ Honteux de parler ainsi d’un film d’une telle finesse, Sorrentino dépasse La Grande Bellezza pour nous offrir, de manière plus douce que l’Amour de Haneke, le décrépitude sur un plateau. Plus classe quand même… sortie le 9 septembre


Un début prometteur de Emilie Luchini Si je vous dis : fille de Fabrice Luchini mettant en scène un bouquin de Nicolas Rey avec Manu Payet qui tente le look Tahar Rahim (mais en mode rebeu réunionnais barbu) pour gagner en crédibilité ? Ça ne vous suffit pas ? Ok je rajoute une blonde apathique passée sous le bureau (Veerle Baetens) et une vieille histoire à 3 épurée jusqu’à l’assèchement buccal ? Bah voilà, c’est la bouse du mois. sortie le 30 septembre

Fou d’amour de Philippe Ramos Melvil Poupaud, cette voix ténébreuse et terriblement sexuelle, ce regard à faire frémir ma culotte de peau, et cette justesse, ah cette justesse, je m’extasie sur ce prêtre baiseur (le pitch en gros du film), car Melvil Poupaud est l’incandescence du sexe propre, il est le bienfaiteur des acteurs, le fantasme avoué des dames, mon premier rôle dans mon (futur) premier film. Alléluia, Melvil m’a dépucelé. sortie le 16 septembre

Mais aussi : No Escape de J.E.Dowdle, sortie le 2 septembre, le blondinet dépressif d’Owen Wilson devrait mieux retourner à ses cachetons plutôt que de tenter de sauver sa misérable famille américaine (0/5), Premonitions de A. Poyart sortie le 9 septembre, dès que je vois la gueule de Hopkins, je vois un psychopathe qui joue toujours le même rôle, bingo, ici un tueur en série (2/5), Boomerang de F.Favrat sortie le 23 septembre, non, je ne me ferai pas Mélanie Laurent à chacune de ses apparitions, je prends un Lexomil, je souffle et j’avance (0/5), Maryland de A. Winocour sortie le 30 septembre, pourquoi Matthias Schoenaerts joue toujours la brute qui en fout plein la gueule à tout le monde ? Il a un cœur ce mec bordel, il s’est tapé une cul-de-jatte ! (4/5) 23


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Sur une idée de MPK. Conception/réalisation : GANG. Remerciements : Dèmonia pour les tenues (boutique.demonia.com) La petite Taverne (Pigalle) pour le spot.


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ART T

PAUL OWEN BRIAUD XIAOYI DAI & ANDRÉ MORIN P

TIANZHUO CHEN — DIVIN CHAOS Si les personnages de Masculin, Féminin de Godard étaient les enfants de Marx et de Coca-Cola, le Chinois Tianzhuo Chen est, lui, le rejeton un peu perché de Bouddha et du Red Bull. Pur produit de cette perte de repères culturels qu’on doit bien pouvoir qualifier de post-moderne, il nous a mis une bonne pétée, cet été, au Palais de Tokyo où

il proposait un voyage fantasque aux tréfonds de son imaginaire d’une glaciale exubérance. Une immersion (dés)agréablement envoûtante d’un psychédélisme oppressant, toujours déroutante, toujours énigmatique… comme le delirium désespéré de la dernière génération avant l’apocalypse ; celui de l’Humanité convulsant à l’approche du néant. 27


“LA FÉLICITÉ ET LES TÉNÈBRES SONT DEUX FACETTES D’UNE SEULE ET MÊME CHOSE. CETTE CHOSE, C’EST LE VIDE.”

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Tu sembles être un garçon tout ce qu’il y a de plus calme, doux et gentil. Cependant ton exposition au Palais de Tokyo est inquiétante, extravagante, et presque psychotrope. Qui es-tu vraiment ? Que se passe-t-il dans ta tête ? Je suis calme et timide devant les gens qui ne me connaissent pas vraiment, mais je t’assure qui si tu me connaissais mieux, tu saurais que je suis un vrai dégénéré. Pour cette exposition à Paris, le visiteur pouvait se trouver frappé par l’absence de commentaires autour des œuvres données à voir. Elles sont extrêmement énigmatiques, et on peine à interpréter le message qu’elles nous adressent. Alors on se réfère au texte à l’entrée qui dit en substance que tu crois fermement à l’immortalité de l’âme, et que des fétiches anciens ou nouveaux se manifestent ici. De tous temps, les yeux, les bouches, les pénis, les serpents ont été des motifs récurrents dans les croyances humaines. Ils prennent une symbolique nouvelle quand tu les utilises ? Ils constituent tout un symbolisme nouveau, propre à la religion que j’ai initiée. Il va de soi que j’ai pu emprunter des signes à l’imagerie de certaines autres confessions, pour les réinterpréter ensuite à ma façon. C’est ce que font toutes les religions d’ailleurs : elles absorbent les autres, de la manière dont le bouddhisme a emprunté à l’hindouisme, par exemple. Mon utilisation de l’œil comme symbole est dans la continuité de la longue histoire, toutes religions confondues, de toutes les formes de représentation de l’œil qui voit ; et en même temps, je l’associe, moi, à la condition hallucinée qui accompagne la consommation de drogues. Penses-tu, au fond, que la religion soit le mal du siècle ? J’en suis intimement persuadé. Dans le bouddhisme, on trouve cette idée selon laquelle nous

vivons la fin des temps et toutes les croyances s’effondrent. J’étais impressionné et perplexe devant cette œuvre en baudruche branchée sur une aération, représentant une femme à laquelle un oiseau de bande dessinée arrache les intestins. Pourrais-tu me dire deux mots à son sujet ? Cette sculpture ressemble à une scène funèbre qui se déroulerait dans le ciel tibétain : un vautour gigantesque mange une figure macabre, se nourrit des entrailles d’un cadavre... Un minuteur est relié à la sculpture, et celle-ci gonfle puis se dégonfle toutes les dix minutes. Cela ressemble à un cercle infini de la mort à la vie, à une réincarnation. Qui sont les Asian Twins (ALIEN$), ces incroyables personnages que l’on rencontre dans ton installation PARADI$E BITCH ? Et toi, comment as-tu fait leur connaissance ? Dans ma vidéo, je montre des personnages de fiction. Ils ne sont en rien tels que je les filme. Ce sont des acteurs professionnels, que j’ai simplement transformés en nains jumeaux tatoués qui font du gangsta rap. Ah, j’étais persuadé qu’ils existaient vraiment ! Je ne me suis pas douté une seconde que ça pouvait être fabriqué de toutes pièces… Quel est le thème de la chanson qu’ils interprètent ? Ce ne sont pas non plus réellement les jumeaux que l’on entend dans la vidéo. Ce ne sont pas eux qui chantent, ils ne font que du play-back. Le morceau est produit par un ami, Kid God, qui rappe en cantonais. C’est un morceau qui traite de certaines problématiques sociales en Chine aujourd’hui. Quel est ton statut dans ton pays ? Comment accueille-t-on ton travail ? Les jeunes générations sont plus réceptives 29


que leurs aînés. J’ai eu des retours encourageants et je suis heureux de faire de l’art à l’époque qui est la notre. Je suis sensible à l’anxiété des nouvelles générations, et elles me fascinent. Les vieux Chinois, quant à eux, ils ont été scandalisés, la plupart du temps. Les acides ont eu une grosse influence sur ton travail ? Il ne s’agit pas que de LSD ou de weed. Mon travail est solidement lié à mon goût personnel pour certaines zones des cultures et souscultures populaires. J’essaie de réunir tous mes centres d’intérêt pour en extraire de nouveaux corps physiques, et les intégrer au domaine de l’art. Ces références-là sont plutôt personnelles. Sinon, je suis un peu fêtard, et en 2013 j’avais une expo solo qui ressemblait plus à une soirée techno qu’à un vernissage, c’est vrai. C’est un de mes meilleurs souvenirs, quand 500 personnes ont débarqué et se sont mises à fumer de l’herbe, à prendre des champignons et du LSD. Cette soirée était fabuleuse. Quel rapport entretiens-tu avec la marijuana ? J’ai trouvé que, dans l’expo, le moment où l’on passe à côté de cet alignement de bangs ahurissants, multicolores et protéiformes, était le seul répit qui nous était offert. Un peu comme ce qu’on ressent quand on ferme la porte de sa chambre après avoir essuyé agression sur agression dans le monde extérieur, et qu’on se réfugie dans les vapeurs d’un bon joint. On est soudain dans une bulle paisible alors que tout autour n’est que désordre et chahut. Je me vois obligé de te donner la même réponse que pour ta question précédente. Est-il juste de dire que ton approche du sexe est crue, voire violente, et que l’amour ne se trouve que sous sa forme écrite, « love ». Y-a-t-il de la place pour la tendresse dans ce que tu veux refléter 30

du monde, en tant qu’artiste ? Parfois, je parle de choses tendres, mais peutêtre que les gens ne s’en rendent pas compte. Dans le bouddhisme tibétain, on trouve de nombreuses figures, de nombreux dieux qui semblent grotesques et violents mais qui en fait véhiculent quelque chose de tendre et d’aimant ; une apparence colérique ou grotesque cache quelque chose de bon, d’essentiel pour les gymnosophistes qui chassaient ainsi le démon de leur esprit. J’ai pris cette idée. Vois-tu la Chine comme un endroit violent ? Le monde est un endroit violent, et particulièrement la Chine. Tu brasses de nombreuses influences culturelles. Tes œuvres sont-elles porteuses d’une critique de la culture mondialisée qui règne aujourd’hui, ou te contentes-tu de t’amuser devant ce melting pot populaire dont le monde s’abreuve, et as-tu tout simplement décidé de suivre le mouvement ? La félicité et les ténèbres sont deux facettes d’une seule et même chose. Cette chose, c’est le vide. Et pourtant, la félicité et les ténèbres se contiennent mutuellement. L’un englobe l’autre, et pourtant l’autre aussi. C’est une idée typiquement bouddhiste, et je la trouve tellement juste… Mon travail est grotesque, mais pour moi le grotesque est aussi superbe. En quoi consiste ta religion ? J’essaie de créer une expérience contemporaine, nouvelle, de religion. Tout ce qui est arrivé dans le monde matériel peut s’accorder au monde spirituel. A l’entrée de mon exposition au Palais de Tokyo, se dressait un drapeau dont le slogan proclamait « Ordo Ab Chao », ce qui veut dire, en latin, « L’ordre issu du chaos », ou « Du chaos naîtra l’ordre », plutôt. Ces mots résument le point de vue que j’adopte sur toute chose dans l’exercice de ma religion.


tianzhuochen.com Exposition jusqu’au 13 septembre au Palais de Tokyo 13, avenue du PrÊsident Wilson - 16e 31


PLAYLIST T

ARNAUD ROLLET

PANTHA DU PRINCE

De passage à Paris en juin pour recevoir un prix d’honneur lors de l’édition 2015 des Qwartz Music Awards, le festival international des musiques nouvelles, innovantes et électroniques, Pantha du Prince est un artiste qui aime l’expérimentation et ne s’en cache 32

pas, que ce soit dans ses Dj sets, en live ou sur microsillons. On lui a donc demandé de concocter une playlist un peu chelou que les bidouilleurs de sons et autres amateurs de musique peu banale ne pourront qu’apprécier.


La résonance d’un objet à portée de main Généralement, pour commencer un live, on essaie d'obtenir une résonance de la pièce à partir d’un un objet présent. Cela peut être un radiateur, une lampe, un verre d'eau, une bouteille de bière ou une table… tout ce qui fonctionne pour obtenir une résonance physique. Ensuite, on essaie de créer un drone avant le début des premières pulsations en relation de résonance avec l'objet et la salle. Pierre Schaeffer & Pierre Henry Symphonie Pour Un Homme Seul Pierre Henry est le père de la musique concrète. Cela fait un moment maintenant qu’il s’est lancé dans la combinaison de toutes sortes de techniques, y compris le traitement des sons acoustiques dans des circuits électroniques qu’il a été le premier à faire, mais je continue à ressentir une forme d’anarchie et un esprit roots dans son œuvre. J’aime de nombreuses choses chez lui – notamment Le Voyage et Astrologie - mais son Symphonie Pour Un Homme Seul réalisé avec Pierre Schaeffer est probablement celui qui m’a le plus influencé. Fennesz - Paint It Black Le Paint It Black de Christian Fennesz est le premier morceau auquel je pense quand il s’agit d’aborder ce qu’est la musique électronique expérimentale. Comme il part d’un sample d’une chanson pop, on peut suivre l’expérimentation de façon évidente. Oval – Mersey / Do While Pour faire aimer et découvrir la musique électronique expérimentale aux gens, je conseille ces deux merveilles d’Oval. L’écoute est aussi sympa pour les auditeurs aguerris à l’art sonore que pour ceux qui n’y sont pas formés. Dans le même genre, la musique ambient de Brian Eno fait aussi partie de ces musiques expérimentales très agréable à écouter…

Yasunao Tone - Part I Je l’adore mais cette musique n’est probablement pas faite pour tout le monde ! C’est très porté sur le streaming de la non continuité et la libération des systèmes de contrôle de la reconstruction numérique, quelque chose auquel le capitalisme moderne est très dépendant. Yasunao Tone est constamment en train de déstabiliser ces systèmes et c’est ce qu’on entend. Du coup, cela peut mettre mal à l’aise certaines personnes… Pour rester dans le domaine de la drone music, j’aurais pu parler du Drift Study 31 1 69 de La Monte Young qui est aussi une œuvre que la majorité des gens veulent arrêter une fois lancée. Gavin Bryars - Three Viennese Dancers La Monte Young - The Second Dream Of The High Tension Line Stepdown Transformer From The Four Dreams Of China Johann Sebastian Bach - Messe en si mineur Erik Satie - Gymnopedie No. 1 À chaque fois que j’écoute l’une de ces quatre œuvres, j’arrive toujours à découvrir quelque chose de nouveau dedans. Terre Thaemlitz - Genrecide ('I Wish Tricky'd Die Any Way I Hope') Pour définir ce qu’est « la nuit », je ne vois pas mieux que ce morceau sorti sur le label Mille Plateaux. Il roule dans les sonorités sombres et distille de la luminosité en même temps. Il m’a fortement influencé durant de nombreuses années. Glühen 4 - You Don't Know Me Je n’ai pas de manière précise de composer. Chacune de mes créations a sa propre histoire, sa propre idée ou un son propre qui a inspiré sa conception. Si je devais choisir un morceau pour me présenter, ce serait donc celui-là, que j’ai fait en tant que Glühen 4.

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ÉROTISME T

FLORIN SAINT-MERRI P JESSICA RISPAL

JESSICA RISPAL — L'ŒIL PIRATE

On m'avait bien rencardé sur le fait que Jessica Rispal n'était pas le genre de gonzesse à avoir un balai entre les fesses. Un rapide regard sur son univers photographique a de suite confirmé cette sympathique réputation. Curieux quant à son talent un brin sadique pour mettre la chair des autres en scène, je

lui ai donné rendez-vous dans un bar amicalement gay près du Rex. On s'est ainsi rencontrés, elle enceinte jusqu'au cou, moi, ramassant mes dents de la veille, afin d'établir un premier contact qui s'est révélé des plus stimulants.

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Jessica, comment fais-tu pour capter le charme des gens qui ne sont pas forcément photogéniques ? Je prends leur cul et pas leur tête. T'en es venue comment à la photo érotico-cul ? C'est ridicule, mais ça vient des photos de lingerie d'Aubade. Quand j'avais 16 ans, ça m'a marquée... Ce n'est pas du tout artistique, mais je m'en fous, je ne vais pas me la raconter. Donc voilà, j'ai vu des pubs Aubade, j'ai trouvé ça chouette. Il y avait aussi une photo d'Araki qui m'a marquée, une photo avec une nana avec le crâne rasé. Il se trouve qu'à cette époque, j'avais justement une copine qui avait la boule à zed, cette meuf m'a beaucoup impressionnée et c'est avec elle que j'ai fait mes premières tofs. Et cette copine, tu l'as mise à poil ? Ouais. (rires) Carrément. J'étais partie sur du SF un peu naze, avec du papier alu partout, elle était semi-nue, le truc pas du tout assumé. Et après on a viré le papier, je lui ai mis de la lingerie sexy, c'était 100 fois mieux. Y'a pas un côté un peu sadique à désaper les autres ? Complètement, ça exploite mon côté dominatrice. Mettre les gens à poil, c'était ma seule solution pour vaincre ma timidité maladive. Je me suis réfugiée là-dedans en me disant : « soit je reste une petite chose que l'on ne remarque pas, soit je prends un contre-pied un peu fort pour pouvoir exister. » J'ai donc créé une identité dominante, avec très peu de mecs dans mon univers. Ça arrive qu'il y ait des séances qui dérapent ? Y'en a eu avec des personnes que je connaissais très bien. Un jour, j'étais chez mes parents, on a fait une séance dans le cabanon de ma mère, c'est un endroit assez isolé, du coup, per36

sonne ne pouvait vraiment entendre ce qu'on y faisait... Une fois, j'ai réuni 6 nanas, et à base de vodka et de vin blanc, on a fait du play-piercing en live, ça a fini en spanking et semi-bondage. Toujours dans ce même cabanon, avec un couple, on a fini en quasi plan à 3 aussi... T'as une énorme libido ? Ouais... (rires) En même temps, ce n'est même pas une question de libido mais plutôt un question de plaisir visuel, ça va au-delà du cul. Je ne m'imagine pas en train de me taper tous les gens que je trouve beaux dans la rue... Par contre, j'adore regarder, y'a un vrai plaisir du regard. En fait, mes modèles, quand je les shoote, je n'ai même pas envie de me les faire (bon, j'ai dû m'en taper 2 ou 3 quand même...) Pourquoi tu shootes plus souvent des filles ? Je trouvais les mecs assez moches. Pour moi, c'était presque rédhibitoire jusqu'à récemment. Je shoote les nanas presque comme des objets, des jolies choses, du coup l'assimilation au féminisme m'a toujours dérangée. Finalement, mon point de vue sur les hommes tend à changer ces derniers temps : c'est en allant voir une expo sur l'Homme nu à Orsay que j'ai eu une révélation en me disant qu'il ne se passe vraiment rien sur l'homme. Soit ce sont des icônes gays super musclées, soit ce sont des éphèbes assexués. Je pense que le photographie masculine est à ré-inventer. Le problème, c'est que je suis encore en recherche à ce niveau-là. T'en penses quoi du féminisme ? Je ne suis pas très militante en fait, et ça ne m'intéresse pas trop de l'être. Y'a pas de revendication dans mon travail. Bon, en ce moment, je t'avoue que je côtoie et que je photographie des personnes qui sont extrêmement militantes comme Misungui (cf. Bonbon Nuit 52). Du coup, je m'initie à leurs idées.


“LE PORNO HÉTÉRO ? J'EN MATTE TOUT LE TEMPS, J'EN AI RIEN À FOUTRE !”

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www.jessicarispal.com 38


Justement, comment définirais-tu cette nouvelle mouvance politico-éroticopornographique dont font partie des filles comme Misungui, Gorgone, etc ? C'est un post-féminisme très très engagé. Pour moi, c'est très étrange parce que je les côtoie mais j'ai du mal à avoir le quart du vocabulaire qu'elles ont sur le droit des femmes, sur la théorie du genre, etc. A la fois je suis dedans, à la fois j'en suis loin. Pour moi, des fois, c'est un peu trop radical, mais en tout cas ça fait avancer les choses. Ça correspond à une véritable prise de conscience. Le beau en photo, pour toi, c'est quoi ? J'aime les photos en argentique en noir et blanc. En ce moment, j'ai envie d'aller vers des choses moins évidentes avec les Annales noires. Je veux des choses plus surréalistes, moins lisses, plus brutales. J'ai abordé récemment le thème de la burqa avec une copine, j'ai mis aussi une bite dans un aquarium avec des poissons, ou j'ai mis une bougie dans un cul. Tes inspirations ? Witkin, Araki en photo. Musicalement, on reste dans le dark, par exemple, j'écoute en boucle November Növelet. Quel est ton rapport à la nuit ? Je suis un oiseau de nuit, ça me fait vraiment mal de bosser la journée. La nuit, je me transforme. Je sors de soirée en échangeant mes strings avec mes copains en sortant du Klub, j'me fais de temps en temps des soirées SMfetish même si c'est un chouïa trop beauf pour moi. Je bois souvent énormément et je me lance dans des concours improbables de fessée avec des trans... A ton avis, d'où vient ce « mystère du diable au corps » de ceux qui sortent beaucoup ? J'ai perdu ma mère en 2008, du coup, quand tu prends ça dans la tronche assez tôt, tu prends conscience que tu as envie de vivre la vie sous

toutes ses formes, le plus possible, tout découvrir, tout faire... Tu veux vivre tout à fond pour ne pas avoir de regrets. Tu peux me parler de Bateau, le magazine que tu as monté ? Ce magazine, ça m'a pris comme une envie de pisser et ça ne me semblait pas insurmontable à faire techniquement. Je me suis dit que je commençais à connaître pas mal de monde, j'ai choisi 15 personnes - des photographes, des illustrateurs, des écrivains, en envoyant un petit message Facebook pour leur proposer de bosser avec moi. Il y a un thème par magazine mais on reste dans le cul. Par exemple, le premier c'était sur la culotte parce que ça faisait marrer tout le monde. Là, on boucle le 5e. J'aime beaucoup le principe de piraterie, on est un équipage embarqué sur ce rafiot et on en a rien à foutre. D'où le nom du mag'. C'est quoi le mauvais goût dans le porn ? Je déteste clairement la photo-flash à la Terry Richardson. C'est con parce que c'est la mode (sourire). Je te prends la minette pleine de rouge à lèvre au flash, ça ne me parle carrément pas. Je suis un peu old school, j'aime bien le noir et blanc, le beau grain... Et le porno conventionnel, le porno hétéro, t'en penses quoi ? Le porno hétéro ? J'en matte tout le temps, j'en ai rien à foutre ! Y'a une personne qui fait actuellement du porn romantique avec Misungui, j'aime beaucoup la démarche, mais ça ne va pas m'exciter. La revendication est cool, mais si tu veux que je mouille et que je jouisse, on n'y est pas. Pourtant, j'ai réalisé un porn récemment, et tout le monde m'attendait avec de la super bonasse qui se fait enfiler par 2 mecs, et en fait, j'ai fait tourner un mec et un trans. Ton remède anti-gueule de bois ? Prendre beaucoup de drogues. 39


REPORT T&p

CHRISTOPHE VIX-GRAS

BALEAPOP L’ANTIFESTIVAL Le parigot est il soluble dans la fête basque ? Notre reporter a affronté une vague de clubbers au piment d’Espelette à la recherche du festival parfait à Saint-Jean-de-Luz, le pays de MAM* et de Maurice Ravel. Vu comme un « hobby » par les organisateurs, Jeanne Boulart et Pierre Lafitte, président du collectif Moï Moï, à l'initiative du festival et programmateur, Baleapop se révèle comme le « festival parfait » alliant design original, durable, mode, tremplin d’artistes locaux, rayonnement du pays, cadres intimistes, choix d’artistes originaux et tarifs accessibles. Ce n’est pas une « TAZ » selon Hackim Bey, mais on n’est pas très loin de la parenthèse festive au goût iodé. Près de 120 bénévoles, encadrés par les responsables de l’association organisatrice Moï Moï, et quelques salariés, ont beaucoup donné pour que l’événement soit une réussite, malgré un budget riquiqui (120 K€) et une pluie parfois torrentielle (merci, le pays Basque est comme la Bretagne). Tout est pensé quasi dans les moindres détails : le graphisme, la scénographie (à base de matériaux recyclés 40

et recyclables) et les œuvres d’artistes présentées dans le site principal, le parc Ducontenia, font l’objet de consultations. Un atelier de deux semaines occupe celles et ceux que les travaux manuels ne rebutent pas pour monter les équipements indispensables. Malgré de maigres moyens comparés aux autres festivals équivalents en démarches et programmation, Baleapop taquine des manifestations bien plus argentées et subventionnées. A ce sujet, le festival n’est pas très aidé. C’est un miracle basque, de la musique à la nourriture locale grâce à une chaîne humaine solide. Baleapop rassure hautement sur le potentiel créatif basque, loin des litanies chantées à tue-tête sous des bérets et cliché du basque nanti en polo rose. Baleapop peut se targuer d’être « fashion », les bénévoles offrent un défilé avec t-shirt exclusif (impossible de l’avoir…) de Monsieur Lacenaire et autres bricoles Edwin. Les baraques du festival et les scènes sont bichonnées. On sent tout de suite que c’est un festival féminin/masculin, ce qui n’est pas évident dans ce contexte viril, portant le pull sur les épaules ou surfant haut sur les vagues. La gastronomie étant stratégique, réalisée par les bénévoles cuisiniers,


des petits snacks typiques étaient au menu avec de la picole locale, le txakoli, vin pétillant dont on cherche les bulles. « Sympa le festival, mais on ne peut pas pécho » souligne R., jeune Parisienne. Pour son bonheur, quelques Bretons bien inspirés offrirent leur camping-car comme terrain de jeu. Plongée le soir dans la pénombre du parc, entre deux scènes et un mini club, la « ramasse » parisienne était bien là, renforcée de représentants basques également connus des nuits parisiennes, portant en fin de festival beau le sac poubelle. L’ambiance tenait du marathon joyeux les pieds parfois dans la boue. La tenue type : bottes et non espadrilles, k-way et non marcel échancré jusqu’aux fesses. Avec des horaires diurnes pour calmer les voisins (fin à 2h), des soirées partenaires dans les rades luziens pour amadouer les commerçants (et pas de « fièvre du samedi soir » dans le parc, snif ), une fête de plage dans une piscine vide se terminant à 18h pour calmer les opposants, les organisateurs ont tout fait comme

il faut. Seules les pelouses doivent faire la gueule, mais le sourire extatique de jeunes damoiseaux en fin de festival la fera repousser. Conclusion : oui le parigot est soluble dans le pays basque, il prend l’eau et porte des sacs poubelle car il pense venir sur la Riviera. Au fait : « milesker » les gars ! Hi eta datorren urtean ! (Salut et à l’année prochaine !) * Michèle Alliot-Marie a été maire de la ville dans le sillage de son père, gaulliste historique basque. ** Gant en cuir utile pour la belote basque. TOP 5 Baleapop : Fumaca Preta, Lena Willikens, Odei, Paranoïd London, Sharky. Merci Eva Peel, Rozenn, Yoann Dimet, « Jesus », Cédric Diomède. Sans oublier Flavien Berger et sa danseuse du ventre, Acid Fortwins qui chante en basque. Mention spéciale à Odei qui fait groover le vibraphone.

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C'EST DU VÉCU T

CYRIELLE DEBRUN P ALEXANDRE KOROBOV

PUTAIN DE CAROLINE

Pourquoi, à la moitié de la moindre mousse, on appelle cette fripouille de Mike ou de Brad, pour qu'il arrive dans huit heures avec son pochon de merde ?

Pourquoi, à chaque fois, chaque week-end, chaque mercredi, chaque jeudi, ou chaque mercredi et chaque jeudi et chaque weekend, on va soustraire 70 balles de plus à notre compte en banque dévasté ? 43


Pourquoi, à chaque fois, lèche-t-on ce doigt ignoble, pour ensuite ramasser de sa pulpe jusqu'à la dernière miette de cette coke ignoble, sur cette faïence ignoble, alors que tu rinces toujours tes fruits avant de les manger ?

Mais t'en as rien à foutre.

Pourquoi continuons-nous à nous faire honteusement griller par tous ces connards bien intentionnés, et en plus ça nous fait rire ?

C'est un mauvais tapin, une pute à la petite semaine, que tu prends dans les chiottes, tu l'utilises pour jouir dans un feulement glaireux.

Ces gens qui demandent « ce qu'on faisait » quand on sort d'une pièce fermée à clef me fascinent à chaque fois. Pourquoi continuons-nous à avoir envie de mourir, dépecé, écœuré et vide, du lundi au mercredi, pour ensuite recommencer ? Pourquoi ce sourire triste quand tu essuies le sang séché qui perle à ton naseau ? On est malheureux, au fond. On est amoureux. Un amour véritable. Un amour inconditionnel et chimique. Elle te rend fou. C'est une pute. Elle est toujours la même et toujours différente. Pute à crack ou poule de luxe, c'est une pute que tu baiseras jamais, mais tu banderas à jamais pour elle. C'est la seule que tu aimeras toujours. Tu lui pardonnes tout. T'arrives en avance à tous ses rencards. Ses rencards pourris, dans des impasses et des halls d'immeubles. Elle est toujours à la bourre, elle est mal fagotée, elle pue, elle colle. 44

Tu lui demandes même pas d'être bonne. Elle a juste à se pointer.

Mais tu la respectes. Tu paies rubis sur l'ongle, tu l'invites à toutes les soirées, tu la présentes à tout le monde, t'en es fier. T'essuies ton organe d'un revers de la main et tu sors de la pièce, revigoré, prêt à affronter le monde, empli de confiance et d'amour partagé. Elle en veut encore, elle t'excite, te caresse, te susurres des trucs sales, te supplie d'y retourner. Elle te fait du bien. C'est ton alliée, ta maîtresse que tout le monde désire. Ils la sentent, et c'est toi le patron, elle te rend solide. Tu la prêtes, parfois, t'es pas mauvais bougre. Mais tu veux toujours être là, tu la partages, mais tu veux les voir prendre leur pied avec elle. Tu veux les voir ressentir ce que tu ressens, profiter d'elle comme tu le fais, et devenir aussi turgescents que toi quand tu la tapes. C'est un instant suspendu, sublime, un instant où tout le monde s'aime.


Où l'on partage un secret. Une partouze rapide. Le cul pour le cul, pas de falbalas. On baise avec le nez, avec la bouche et les doigts, et on le ressent dans le sang, tout le monde se parle sans rien dire. Et puis elle est pas jalouse. Elle s'offre et te laisse disposer. Tu en baiseras peut-être une autre, ce soir. Mais toujours avec elle, elle vous présente l'un à l'autre, vous réunit, vous, deux inconnus, dans une pièce fermée à clef où l'on dit merci avec la langue. Elle participe, elle rend tout excitant, elle te fait palpiter comme personne, sûrement pas comme cette buse qui te donnera son cul et cassera ensuite et c'est tant mieux. Casse-toi, on n'a pas besoin de toi. Elle te suffit. Puis elle s'en va. T'as gardé sa culotte, que tu lèches comme un fou, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien d'elle. Elle est partie. Putain. Tu lui en veux pas, t'es juste triste parce qu'elle te manque. Elle te manque terriblement, ça te brûle le cœur. Tu comprends qu'elle soit partie. C'est elle qui a raison. Toujours. Alors tu la rappelles, tu lui envoies des textos, une fois, trois fois, vingt fois, tu t'en fous d'avoir l'air con, tu harcèles, tu harcèles jusqu'à t'effondrer, épuisé de tant d'amour et de désespoir de la revoir un jour. Parfois, elle revient.

Parfois, elle arrive vite, tu n'y crois pas, c'est inespéré, t'en demandais pas tant. Parfois, elle arrive grasse, veloutée, pure et odorante, comme la plus voluptueuse des femmes. T'as envie de l'emmener en week-end, de vider ton compte pour t'enfermer avec elle, de la garder pour toi, de continuer de vivre ton idylle jusqu'à en crever. Elle te blesse, elle t'écorche, elle te brûle, te griffe les muqueuses jusqu'au sang, elle te baise fort. Tu perds la tête. Et le lendemain. Quand on se réveille, et qu'elle est partie en te laissant des souvenirs de votre nuit, dans ta tête, dans tes tripes, sur les meubles. T'es vide. T'es dégoûté, t'as le cœur au bord des lèvres, t'en vomirais, c'est trop intense, trop éphémère, trop grand, trop désastreux. Autant de fougue et de jeunesse et d'espoir, qui s'envolent à chaque fois, te laissant un peu plus vieux, un peu plus triste et un peu plus écœuré que la fois d'avant. Mais on s'en remet, toujours, parce que personne n'a dit que la vie et l'amour devaient être calmes, ou doux, on en fait ce qu'on veut, c'est les seuls trucs qui t'appartiennent vraiment. La souffrance et la violence sont aussi belles que le bonheur. Alors on a décidé d'aimer d'un amour total, ravagé. Et on n'en mourra pas. Y'a que les faibles qui meurent d'amour. 45


DIVAGATION T

SYDNEY VALETTE

ALIÇ GLAÇ É MYXHAEL JACKÇONE Chaque mois, au lieu d'aller voir le psy, Sydney Valette nous confie un de ses rêves. Ce coup-ci, ça parle d'une jolie histoire d'amour et de Mickael Jackson Le 89 Août 2396, Jsui à l’écol, je sor de cour, jvé vwar Aliç Glaç, elh travaille dans une pizteria ru dé jeuneurs, elle é super bel, complètman lov de son désespéra san fon, chveu nwar, rob nwar, rgard blu violançe de ptite fiye mal mené par la vi. Nou som deu adlesçant en zamourage, c bo. Jla prend tou lé jour kan la pizteria é fermé, jla prend sur plan d trawaye, là où ils roule la pât, où il l’aplanis pour fer ldisk ron kça fé la pyzta apré. Mé là c é nou ki bézon kom 2 beuthes en ruth: le Tertre mou nou zapartien… Mé Aliç, si bel kel fuç, el a dé problemz dan savi, lé pa rheuz tout’ sole, fé kça kel peupo aimé tro ben lé zotr, mwa-mêm ykompri. 1 jour, elle vien mcherch à ma job kom ço , san prév, mé c cool, chuy kon temps lavoir, cé l’amourh kwa. Mé la l’ère tjrs tryst et tou et moi jsen ben kct’ histwar va mal sfinyr, kom tjrs. « Lé zystwar d’amourh fniçent mal en général » kdy 46

la chaçon. Alor vlà, au fil dé jourz, ell dvin dplu en plu distanth, fé ko boo du temp, l’a disparut compèteman. Et vlà kcété la f1. Alor soulé par la situafion, jme rtire dan bordo pack jcé kya un cancer de Mykael Jakçon au Stad Chab-Dellmaç, dcou j’ochèth lplaç et j’y vé… Chuy pa mal en avanç, lstade sey pépar pur l’sho de MJ. Sof kilé Mor lcon, du coup c un sosy pour faire vivr lmyth. Lpreusonnel dle stad spreupar, quand toutacou IL débark, MJ avec sé lunettes nwar et une foularde sur sa bouche, couleur Arafat, vek chapo étou, il a l’air rément gézante c bizar, vek autour de lui impressionna dispositif kwasi militair: un famm/home bugle dans un tokie- waky en donna dé zordr à nou: dfermé toutes les tissu, dvérifié sur les hô-teur dle stad si pad sniper. Doivent ben eth 100, c kom si on étaient nié par eux, par leur nombrh. Laiç mwa dire kan fon la gayriya les zamérikin, cdwa pa êth trankil, paçk rein kpour 1 kançer dpop musik, cé gro dispozitif, cé po avec la do dla cuyer.ça fé vachement flipay…


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AGENDA

JEUDI 3 SEPTEMBRE 00h Batofar 7€ Fée Croquer w/ Blaise, X1000, Thomas Delacroix

VENDREDI 4 SEPTEMBRE 23h Bus Palladium Le Bonbon au Bus Palladium 23h30 La Machine 12 / 18€ D.KO Night w/ Fred P, Micky P, Christopher Rau, Francis Inferno Orchestra

SAMEDI 5 SEPTEMBRE 18h43-45 rue Bérégovoy Clichy Gratuit Soirée Vernissage Visible is Epheremal w/Capucine Mattiussi, Professor Strange

JEUDI 10 SEPTEMBRE 18h Petit Bain Gratuit La Collation #11 w/ Easterpop, Radial, Vox

VENDREDI 11 SEPTEMBRE 23h Bus Palladium Le Bonbon au Bus Palladium

JEUDI 17 SEPTEMBRE 18h Nuba Gratuit Soul Clap All Night Long

48

SAMEDI 19 SEPTEMBRE 17h Café Custine Gratuit Dim Sum - Révolution Électronique w/ P122, Kärnal & Mateco, OKLM Records DIMANCHE 20 SEPTEMBRE 16h Le Chalet des Îles Gratuit Kiwi, Summer Camp de la Barcaza 18h Ground Control Gratuit HMS Tea Dance w/ David Shaw Paprika Kinski (Live), S.R. Krebs (Live)

VENDREDI 25 SEPTEMBRE 23h Bus Palladium Le Bonbon au Bus Palladium 23h30 La Machine 12€ Opening Macki Festival w/ Genius of Time (Live), Bambounou

25, 26, 27 SEPTEMBRE 20h Parc de Carrières sur Seine 54€ Macki Music Festival w/ Floating Points Camion Bazar, Bon Voyage, Syracuse…

MERCREDI 30 SEPTEMBRE 00h Rex Club 8€ KLUBBPM w/ Romain Play, San Proper, Steve Marie


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