Le Labyrinthe de Sisyphe

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Le Labyrinthe de Sisyphe L’histoire sans fin pour un patient Alzheimer.



MODE D’EMPLOI

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Cet ouvrage est divisé en 4 parties. La première regroupe la présentation du projet, des éléments de sa genèse, un lexique, et des documents sur l’installation de présentation du livret de photos qui fut réalisé sur le lieu même de la résidence. Au coeur, en deuxième partie, le résultat du projet, les histoires imaginées par plusieurs jeunes (et deux de ma production pour autre exemple) à partir des photographies proposées dans le livret. La partie suivante est constitué des mots du directeur et du psychologue de l’institution à l’origine de ce projet de résidence dans leurs locaux. Enfin la quatrième partie est mon propre livret, l’équivalent de celui remis (vierge et à annoter) aux participants pour préparer l’atelier d’écriture, rempli de mots et de notion imaginées, possibles et personnelles : une partie de mon intention. Ce livret est enrichi de liens afin de vous proposer des médias supplémentaires autour ou en relation avec le projet. Dans la quatrième partie chaque polaroid est un lien interactif renvoyant vers la série dont elle est issue soit la replaçant avec d’autres complémentaires. Dans la version imprimée de cet ouvrage, ne pouvant être intéractif directement comme cette version en ligne (via certaines images ou des logos dédiés), tous les liens sont remplacés par des QRCodes. L’autre différence réside dans la quatrième partie où les textes sont en gris clair afin de différer leur lecture et permettre d’apprécier subjectivement les visuels proposés.

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1 Projet, genèse, lexique, documents, installation.


M26 / Proposition de Projet - Avril 2014 Le projet de ma résidence pourrait se résumer en l’idée d’un cadavre exquis visuel. Suivant l’intérêt qu’il suscitera, il pourra s’appuyer sur une forme d’atelier d’écriture. L’exposition doit consister en un nombre suffisant et réduit d’images, chacune tirée en 20×20 (avec plusieurs légendes numérotées) et leur reproduction sous forme de cartes (à jouer) pour suggérer au visiteur de participer (ailleurs / autrement / avec qui il veut) au jeu auquel nous nous serons livrés au cours de la résidence. Un livret imprimé en ligne regroupant plusieurs histoires pourrait être l’objet complémentaire. La construction de ce projet va passer par la proposition d’une image la première semaine, puis de 2 à 4 les suivantes. En échange de vivre une semaine avec ces images, les résidents devront partager avec moi les mots (clefs) et/ou phrases que leurs auront suggéré les photographies. L’objectif est aussi de favoriser l’expectative, donc l’envie de ce rdv hebdomadaire. C’est également une proposition ludique et interactive. Un moyen de (se) raconter ou de s’affronter (concourir). Il va de soi que chacun pourra utiliser la langue qui lui convient le mieux. En fonction des retours, le nombre final des images devra être compris entre 12 et 30. Un travail seul ou en groupe, avec ou sans éducateur sera lancé, pour écrire une (son) histoire avec pour base d’illustration la série de photos. Là le travail préparatoire de mots-clés sera un bon pied à l’étrier et naturellement l’ordre des images se fera différemment en fonction de chacun. Les éducateurs sont conviés à écrire aussi leur histoire. En parallèle, je rédigerai une ou deux histoires. Une image, un diptyque, un triptyque, des interactions, une histoire…Un jeu où l’ordre des images change et modifie le sens, une métaphore de la vie, des chemins possibles et des choix, de nos facettes, l’opposé de la conception de la Destinée. Une version en ligne interactive du jeu pourrait être imaginée conçue par un programmeur en fonction des partenariats possibles à venir. La finalité n’est pas d’exposer. Le projet tient dans l’expérimentation, et n’est pas naturellement voué au succès.


Photographie et logo © Stéphane Giner

Le foyer Transition est une maison d’enfants à caractère social (MECS) ouvert depuis 23 ans. C’est un lieu de vie pour des jeunes placés ou confiés par l’Aide Sociale à l’Enfance (Conseil général de la Haute-Garonne).
 Actuellement 25 jeunes, filles et garçons, de 13 à 21 ans y sont hébergés. Son équipe pluridisciplinaire est composée d’éducateurs, psychologues, surveillants de nuit, maîtresses de maison, conseillers en économie sociale et familiale, chef de service et directeur ainsi que le personnel technique. Le foyer transition fait partie de l’association ERASME (Elan Régional pour l’Action Solidaire et des Métiers de l’Education) constituée du foyer et du centre régional de formation aux métiers du social (CRFMS). C’est un foyer ouvert sur l’extérieur et la culture, qui depuis ses débuts, a la volonté de proposer aux jeunes accueillis au sein de l’institution, d’accéder à la culture comme moyen d’ouverture sur le monde, comme outil d’exploration, comme source d’échange. Certains jeunes sont attirés par l’art, le sport, la culture. L’art, quel que soit sa forme, permet à chacun d’exprimer quelque chose de soi, de sa sensibilité, de sa singularité. Il suscite l’attention, les réactions, la valorisation, l’ouverture à l’autre. La nécessité d’inventer quelque chose de nouveau s’est imposée. Inviter un artiste, favoriser sa création dans un atelier indépendant à l’intérieur du lieu de vie, créer une résidence. Curieux de voir et d’expérimenter ce que ce partage des lieux et de temps allait faire naitre au travers de la rencontre. L’objectif du projet de résidence artistique est de permettre l’accès à l’art et à la culture à un public adolescent. Ce dispositif à été nommé Module26.


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INTRODUCTION

a série d’images présentée fait partie du projet (Puzzle) réalisé au cours de la résidence La série présentée du projet réalisé auà cours effectuée débutd’images 2014 à Toulouse au fait foyerpartie Transition, une (Puzzle) maison d’enfants caractère de la résidence effectuée début 2014 à Toulouse au foyer Transition, social, faisant partie de l’association ERASME. Le projet proposé consistaitune en un maison à caractère social, partie de l’association ERASME. cadavre exquisd’enfants visuel à expérimenter avec faisant les jeunes, à partir des mes photographies. projet proposé consistait un cadavre exquis visuel à d’écriture. expérimenter Un jeuLe combinatoire où ces dernièresen serviraient de base à un atelier avec les jeunes, partir desdes mes photographies. Un jeu combinatoire ces des « Une image, un diptyque, un à triptyque, interactions, une histoire... Un jeu où où l’ordre dernières serviraient de base à un atelier d’écriture. images change et modifie le sens, une métaphore de la vie, des chemins possibles et des choix, « Une image, unde triptyque, des interactions, une histoire... Un jeu de nos facettes, l’opposé deun la diptyque, conception la Destinée ». où l’ordre des images change et modifie le sens, une métaphore de la vie, des chemins possibles et des choix, de noscefacettes, l’opposé de laaconception Destinée ». sur le thème du souvenir. Pour présenter projet, une installation été conçue,de unelasensibilisation PourCe présenter ce projet, unede installation conçue, une sensibilisation le thèmeet dud’introduire souvenir. le dispositif a permis présentera été la sélection d’une soixantainesur d’images Ce dispositif a permis de présenter la sélection d’une soixantaine d’images et d’introduire sujet ainsi : « Vous découvrez une boîte à chaussures contenant des Polaroids. Piqué le par la sujetcuriosité ainsi : «etVous découvrez une boîte à chaussures contenant des Polaroids. Piqué par la trouvant un indice, vous retrouvez l’auteur des photographies. Il s’avère que cette curiosité et trouvant un indice,Pris vous l’auteur photographies. cette personne est amnésique. deretrouvez sympathie, vous des décidez de la revoir,Ilets’avère mêmeque de lui rendre personne est amnésique. Pris de sympathie, vous décidez de la revoir, et même de lui rendre visite régulièrement. Vous choisissez de lui raconter chaque fois une histoire à partir de ses visitephotographies, régulièrement.une Vous choisissez raconterses chaque fois une histoire à partir visite. de sesPour belle histoire, de lui lui réinventer souvenirs, différents à chaque photographies, une belle histoire, lui réinventer ses souvenirs, différents à chaque visite. Pour cela, chacun doit inventer une histoire à conter. » cela, chacun doit inventer une histoire à conter. » Le projet évoque un des aspects de lademaladie d’Alzheimer. Il cherche à mettre en valeur la la Le projet évoque un des aspects la maladie d’Alzheimer. Il cherche à mettre en valeur multiplicité des interprétations qui peuvent être faite pour une même image, il démontre la multiplicité des interprétations qui peuvent être faite pour une même image, il démontre la fragilité de l’idée statique de «de bon senssens » ou»d’évidence, et il ouvre à l’échange. C’estC’est aussiaussi un un fragilité de l’idée statique « bon ou d’évidence, et il ouvre à l’échange. outiloutil de médiation, une forme de photo-langage. C’est, pourquoi pas, imaginer comment les de médiation, une forme de photo-langage. C’est, pourquoi pas, imaginer comment les premières écritures ont pu (logogrammes). C’estC’est enfin, en suivant la théorie de Bernard premières écritures ontnaître pu naître (logogrammes). enfin, en suivant la théorie de Bernard Victorri (directeur de recherches au CNRS et spécialiste de linguistique) expliquant que que l’Homme Victorri (directeur de recherches au CNRS et spécialiste de linguistique) expliquant l’Homme a développé le langage pour raconter des histoires (partager l’expérience et évoluer), changer a développé le langage pour raconter des histoires (partager l’expérience et évoluer), changer d’échelle en mettant en parallèle une une histoire (mythe) à l’Histoire. d’échelle en mettant en parallèle histoire (mythe) à l’Histoire. Le principal critère de sélection des images était leur faculté à évoquer les moments forts d’une vie, susciter descritère impressions ou desdes réactions. La série être testée auprès d’autres publics Le principal de sélection images était leur va faculté à évoquer les moments forts d’une et unvie, dessusciter objectifs estimpressions la réalisationoud’une pièce de théâtre à partir des différents récits récoltés. des des réactions. La série va être testée auprès d’autres publics Le livret est agrémenté de bonus numériques via les QR codes (autre labyrinthe visuel). Cette et un des objectifs est la réalisation d’une pièce de théâtre à partir des différents récits récoltés. interaction accès à des informations supplémentaires des (autre imageslabyrinthe complémentaires. Le livretdonnera est agrémenté de bonus numériques via les QR ou codes visuel). Cette En effet chaque photographie sera présentée dans sa forme native (brut boîtier) dans la série interaction donnera accès à des informations supplémentaires ou des imagesetcomplémentaires. dontEn elle est chaque issue. Une autre façonsera d’approfondir la lecture des images, et prendre effet photographie présentée dans sa forme native (brut boîtier) conscience et dans la série d’undont autreelle filtre, la subjectivité photographe (via la leslecture traitements et la prise de vue). Les est issue. Une autredufaçon d’approfondir des images, et prendre conscience informations supplémentaires sont diverses et variées (vidéo, audio, articles). Il s’agit de de mes d’un autre filtre, la subjectivité du photographe (via les traitements et la prise de vue). Les souvenirs construisant mon raisonnement pour ce projet, ou un moyen le sujet. informations supplémentaires sont diverses et variées (vidéo, audio,d’approfondir articles). Il s’agit de de mes Danssouvenirs le livret chaque image est reproduite et agrémentée d’une légende explicative, delemon construisant mon raisonnement pour ce projet, ou un moyen d’approfondir sujet. interprétation, et de mots-clés (réservoir pour produire mon histoire). Dans le livret chaque image est reproduite et agrémentée d’une légende explicative, de mon Ma proposition consiste en un ensemble d’images destinées émouvoir, choquer, déranger, interprétation, et de mots-clés (réservoir pour produire mon àhistoire). bousculer, réjouir, et générer tout un ensemble de réactions pour produire l’inattendu autant que le mémorable (pour ceux qui partagent l’expérience). Enfin une autre mise en abyme peutdéranger, être Ma proposition consiste en un ensemble d’images destinées à émouvoir, choquer, constatée : pour construire ce projet, je me suis également laissé guider au cours de recherches bousculer, réjouir, et générer tout un ensemble de réactions pour produire l’inattendu autant que par une forme de sérendipité, rebondissements d’un mot, Enfin à uneune définition puis une notion peut ou à être le mémorable (pour ceux qui partagent l’expérience). autre mise en abyme un champ inattendu adéquat. constatée : pour mais construire ce projet, je me suis également laissé guider au cours de recherches par une forme de sérendipité, rebondissements d’un mot, à une définition puis une notion ou à un champ inattendu mais adéquat.

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Philippe LEJEAILLE Philippe LEJEAILLE


Carte mentale détaillant le raisonnement pour la construction du projet, en orange les objets de l’installation.

# RESIDENCE amnésique • bien-être • blabla • concept • cadavre exquis visuel • carnets de mots • cycle • détails • enquête • fracas • Henry Gustav Molaison • imaginer • immersion • infos • inspiration • installation • interactions • jeu • kaléidoscope • le labyrinthe de Sisyphe • livret • logogramme • ludique • merci • mots-clés • onirique • partage • passe-temps • photographie • photolangage • point commun • polaroid • projet en cours • proposition • puzzle • recherche • reflexion • réservoir de mots • rôle • souvenir • symbole • tags • une histoire • échange.



Séquence de souvenirs altérés


Maladie d’Alzheimer La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative (perte progressive de neurones) incurable du tissu cérébral qui entraîne la perte progressive et irréversible des fonctions mentales et notamment de la mémoire. C’est la forme la plus fréquente de démence chez l’être humain. Elle fut initialement décrite par le médecin allemand Alois Alzheimer en 1906. Le premier symptôme est souvent des pertes de souvenirs (amnésie), se manifestant initialement par des distractions mineures, qui s’accentuent avec la progression de la maladie. Les souvenirs plus anciens sont cependant relativement préservés. L’atteinte neurologique s’étend par la suite aux cortex associatifs frontaux et temporo-pariétaux, se traduisant par des troubles cognitifs plus sévères (confusions, irritabilité, agressivité, troubles de l’humeur et des émotions, des fonctions exécutives et du langage) et la perte de la mémoire à long terme. La destruction des neurones se poursuit jusqu’à la perte des fonctions autonomes et la mort. Parce que la maladie d’Alzheimer ne peut être guérie et qu’elle est dégénérative, le patient s’appuie sur les autres pour l’aider. Le rôle de l’aidant principal est primordial. La maladie d’Alzheimer n’affecte pas de façon égale toutes les formes de mémoire. En effet, étant contrôlées par des structures cérébrales différentes, elles ne sont pas détériorées à la même vitesse par la maladie. L’atteinte de la mémoire épisodique (création et gestion des souvenirs de la vie de la personne) est le trouble le plus précoce et le plus marqué dans la maladie d’Alzheimer, notamment avec des difficultés lors des étapes d’encodage, de stockage, de récupération des informations La mémoire sémantique (les faits appris, comme “Rome est la capitale de l’Italie”) et la mémoire implicite (mémoire des gestes, comme faire du vélo) sont moins affectées au stade léger. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_d%27Alzheimer

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Henry Molaison HM, pseudonyme d’Henry Gustav Molaison, (26 février 1926 - 2 décembre 2008) est un patient devenu amnésique à la suite d’une opération chirurgicale effectuée en 1953 par William Scoville, un neurochirurgien du Connecticut. Depuis 1957, il a été largement étudié par les neuropsychologues de l’Institut neurologique de Montréal, notamment Brenda Milner et Suzanne Corkin au cours de la seconde moitié du XXe siècle et a, de ce fait, largement contribué à la compréhension des mécanismes de la mémoire. Souffrant d’épilepsie résistante aux médicaments, HM a subi une opération chirurgicale expérimentale consistant à lui retirer bilatéralement une large portion des deux hippocampes et des tissus environnants des lobes temporaux, où Scoville pensait que les foyers épileptogènes étaient localisés. Depuis son réveil HM souffre d’une amnésie antérograde quasi totale alors même que sa mémoire immédiate, dite « mémoire à court terme » est intacte : il est incapable de retenir une information au-delà de quelques secondes à moins de faire un effort constant de répétition. HM est donc incapable de mémoriser de nouvelles informations de manière explicite même si des expériences ultérieures ont montré qu’il conservait une partie de sa mémoire implicite notamment motrice. De nouvelles études montrent également qu’il se souvient parfois de certaines informations très ponctuelles comme le fait qu’il a « des problèmes de mémoire » ou qu’« une personne célèbre appelée Kennedy a été assassinée. » Il souffrait aussi d’une amnésie rétrograde de plusieurs années de sa vie. Même si ces souvenirs sont extrêmement rares, ils indiquent que l’amnésie antérograde n’est pas un phénomène tout-ou-rien. On attribue sa capacité à retenir certaines informations comme le plan de sa nouvelle maison, son visage dans un miroir ou encore le fait que ses parents soient morts, par leur caractère très répétitif ou à charge émotionnelle forte. L’émotion et la répétition permettraient en effet d’utiliser d’autres structures du cerveau pour mieux mémoriser ces informations, comme le système limbique. Jusque dans les dernières années de sa vie, HM participait encore ponctuellement à des expériences de psychologie. Plus de cinquante ans après l’opération, ses troubles amnésiques avaient très peu évolué. Malgré ses troubles de mémoire, HM était une personne très courtoise, et ne souffrait pas de problème d’identité ni d’une baisse de Q.I. Cependant, il était très difficile pour lui de savoir s’il avait faim, sommeil ou mal à un endroit précis. Il résidait dans une institution de soin à Hartford, dans le Connecticut. Après son décès son cerveau a été prélevé afin de subir une étude histologique inédite qui repose sur plusieurs milliers de sections qui seront numérisées et mise en ligne dans le cadre d’un projet mené par l’Université de Californie à San Diego : The Brain Observatory. Décédé en décembre 2008, H. M. a légué son cerveau à la science. L’équipe de Jacopo Annese, de l’observatoire du cerveau à San Diego, en Californie, l’a alors coupé en 2 401 tranches d’une épaisseur de 70 micromètres chacune. Après avoir photographié chaque tranche, les neuroanatomistes ont reconstitué le cerveau en trois dimensions. Et là, surprise : ce n’est pas l’hippocampe qui a été le plus lésé - seule une petite partie a été retirée - mais le cortex entorhinal, qui a presque disparu. Celui-ci joue le rôle de porte d’entrée dans l’hippocampe. C’est donc son ablation qui expliquerait les symptômes mnésiques de H. M. La reconstitution confirme toutefois l’ablation presque totale de son amygdale, zone spécialisée dans le traitement des émotions. Ce qui concorde avec la personnalité très placide du patient. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/HM_(patient)



Identité Identité personnelle : ce qui fait le caractère d’un sujet dans son devenir temporel. Philosophie L’identité de la personne pose le problème du multiple et du devenir dans le temps : en effet, comment puis-je dire que je suis le même, alors que tous mes traits physiques et toutes mes idées ne cessent de changer et d’évoluer de ma naissance à ma mort. Platon posait déjà cette question dans Le banquet (207d-208b). Pour plusieurs philosophes, c’est l’unité de la conscience de soi (qui suppose mémoire et anticipation), c’est-à-dire la synthèse qu’elle opère à travers tous les changements qui peuvent m’advenir, qui permettent d’expliquer qu’on demeure la même et unique personne en dépit du changement (ainsi, Kant : « l’unité originairement synthétique de l’aperception »). L’identité est une notion philosophique qui soulève la question métaphysique des rapports entre le Même et l’Autre, ainsi que celle du devenir. Psychologie Erik Erikson conçoit l’identité comme une sorte de sentiment d’harmonie : l’identité de l’individu est le « sentiment subjectif et tonique d’une unité personnelle et d’une continuité temporelle » (1972). Dans la tradition freudienne, l’identité est une construction caractérisée par des discontinuités et des conflits entre différentes instances (le Moi, le Ça, le Surmoi, etc). Ces deux conceptions parlent de l’identité comme d’une construction diachronique (du grec δια-, « à travers », et χρόνος, « temps » ). « Subjective », l’identité personnelle « englobe des notions comme la conscience de soi et la représentation de soi.” Codol estime qu’il ne s’agit en fait que d’une « appréhension cognitive de soi ». Elle englobe trois caractères qui vont ensemble : « constance, unité, reconnaissance du même. » Il ne s’agit cependant pas d’une constance mécanique et d’une analogie réifiée, ni de l’adhésion stricte à un contenu invariant et figé mais d’une « constance dialectique » et dynamique impliquant le changement dans la continuité, dans une dynamique d’aménagement permanent des divergences et des oppositions. La perception intime d’identité personnelle s’appelle ipséité.

ipséité /ip.se.i.te/ féminin : (Philosophie) Identité propre ; ce qui fait qu’une personne est unique et absolument distincte d’une autre. Caractère du sujet pensant qui a le pouvoir de se représenter luimême comme demeurant malgré les changements qui affectent son corps et son esprit. Conscience réflective de soi à soi-même. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Identit%C3%A9_(sciences_sociales)

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Labyrinthe Un labyrinthe (λαβύρινθος en grec ancien, labyrinthus en latin) est un tracé sinueux, muni ou non d’embranchements, d’impasses et de fausses pistes, destiné à perdre ou à ralentir celui qui cherche à s’y déplacer. Ce motif, apparu dès la préhistoire, se retrouve dans de très nombreuses civilisations sous des formes diverses. Son étymologie reste incertaine. Il désigne dans la mythologie grecque une série complexe de galeries construites par Dédale pour enfermer le Minotaure. De nos jours, le terme de labyrinthe désigne une organisation complexe, tortueuse, concrète (architecture, urbanisme, jardins, paysages...) ou abstraite (structures, façons de penser...), où la personne peut se perdre. Le cheminement du labyrinthe est difficile à suivre et à saisir dans sa globalité. Le labyrinthe en « rhizome » ou « labyrinthe hermétique », un réseau entrelacé et infini de voies dans lequel tout point est connecté à divers autres points mais où rien n’empêche l’instauration, entre deux nœuds, de nouvelles liaisons, même entre ceux qui n’étaient pas reliés avant. Chaque route peut être la bonne, pourvu qu’on veuille aller du côté où on va. Le rhizome est donc le lieu des conjectures, des paris et des hasards, des hypothèses globales qui doivent être continuellement reposées, car une structure en rhizome change sans cesse de forme. En psychologie, étude de la mémoire : Pour expérimenter ses études psychologiques sur la mémoire, Burrhus Frédéric Skinner créa, dans les années 1930 et 1940, des boîtes dans lesquelles il élaborait des labyrinthes. À l’intérieur, il y plaçait des rats : ces derniers devaient parcourir ces labyrinthes le plus rapidement possible, signe d’apprentissage du trajet et de sa mémorisation. Quelques années plus tard (1945), deux scientifiques Edward Tolman et Roman Honzik, compliquèrent ce labyrinthe, afin de démontrer l’apprentissage lent du rat. Les études faites sur les labyrinthes avec stimuli esthétiques sensoriels sont difficilement quantifiables et rajoutent de nombreuses dimensions au labyrinthe intrinsèque. L’être qui s’est mis en situation labyrinthique et qui l’a fait de façon délibérée consent à jouer un jeu dans lequel il va être conditionné par différents facteurs : l’existence d’une anxiété liée à l’ignorance du trajet solution, l’existence d’un plaisir lié à des sommes de micro-découvertes successives effectuées, le plaisir de la solitude, le plaisir de la découverte. Le mythe de Dédale et du labyrinthe est aussi un des quatre mythes fondateurs des jeux de tarot : celui des différentes étapes du voyage initiatique vers la connaissance de soi.


Les labyrinthes peuvent avoir différentes fonctions, concrètes ou abstraites, ésotériques et/ou spirituelles. Le labyrinthe servait de calendrier annuel (le parcours du labyrinthe se divise en 31 arcs de cercle, ce qui représenterait les 31 jours par mois) ou encore de mesure des marées (un pictogramme de mouvements apparents combinés de la lune et du soleil, qui permettait de calculer la force et l’heure des marées): les Vikings auraient utilisé un labyrinthe formé de deux serpents lovés sur eux-mêmes pour déterminer le calcul des marées (heure et force). Il pouvait aussi représenter différents parcours tels que celui de la Pénitence (le labyrinthe est alors parcouru à genoux tout en récitant prières et psaumes, en signe de pénitence et pour obtenir la rémission des péchés), celui du Pèlerinage, ou encore celui de l’initiation (ce parcours permet la transformation du moi, au centre même du labyrinthe et qui trouvera sa confirmation à la fin du voyage. La sortie du labyrinthe marque la victoire du spirituel sur le matériel, de l’éternel sur le périssable, de l’intelligence sur l’instinct, du savoir sur la violence aveugle) ou celui du pénitencier (la balade circulaire des condamnés décrite par Paul Verlaine dans son manuscrit Cellulairement). De nos jours, la sculpture du labyrinthe n’est pas dénuée de symbolisme. Depuis plusieurs années, Marta Pan élabore des labyrinthes qui enferment l’espace vital de l’individu et le protègent contre le monde extérieur L’impasse y représente l’erreur Certains auteurs, comme Jorge Luis Borges, valorisent le labyrinthe en le peignant comme le symbole de la perplexité des hommes face aux mystères de la vie. De nombreuses œuvres sont imprégnées du dédale, qui peut représenter un mouvement de l’extérieur vers l’intérieur, de la forme à la contemplation, de l’espace à l’absence d’espace, du temps à l’absence de temps, de la multiplicité à l’unité. Le labyrinthe devient l’image d’un chaos initial ordonné et agencé par l’intelligence humaine. Echo et chaos Certaines œuvres de littérature jeunesse traitent du labyrinthe et de sa symbolique. L’exemple le plus célèbre est Alice au pays des merveilles, de Lewis Carroll (1865) Dans le Petit Poucet de Charles Perrault (1697) le personnage principal, que ses parents ont décidé de perdre dans l’immensité de la forêt, sème derrière lui des petits cailloux blancs, puis des miettes de pain, pour retrouver le chemin de sa maison. On reconnait là une transposition du mythe grec, les cailloux ayant la même fonction que le fil fourni par Ariane, celle de se repérer dans un monde inconnu et complexe et ainsi de faire triompher la ruse et l’intelligence. Contrairement à un malentendu courant, le labyrinthe n’est pas un dédale, il est unicursal. On ne s’y perd pas, au contraire on s’y trouve. Le labyrinthe représente le chemin suivi par Thésée guidé par le fil d’Ariane.

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© DJ. FLICKR - CC BY SA 2.0


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Cette illustration image parfaitement l’idée de méandres et l’aspect labyrinthique du cerveau. Cela n’est pas sans suggérer le tube digestif, notre « deuxième cerveau », celui qui semble influer aussi sur nos décisions ou émotions.

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Maurits Cornelis Escher (1898 - 1972), est un artiste néerlandais connu pour ses gravures sur bois, lithographies et mezzotintos souvent inspirées des mathématiques. Elles représentent des constructions impossibles, des explorations de l’infini, des pavages et des combinaisons de motifs qui se transforment graduellement en des formes totalement différentes. Son œuvre expérimente diverses méthodes de pavage en deux ou trois dimensions ou représente des espaces paradoxaux qui défient nos modes habituels de représentation. L’œuvre de M. C. Escher a séduit de nombreux mathématiciens.


Parcourir le labyrinthe est l’occasion d’une introspection. Les méandres symbolisent le cours de la destinée humaine, ses pièges et ses tourments. En dehors de la légende du Minotaure, le labyrinthe, en tant que symbole d’un cheminement initiatique long et difficile, est connu de nombreuses civilisations anciennes, au point que l’on peut parler d’archétype universel : les hommes préhistoriques, les Mésopotamiens, les Scandinaves, les Hopis, les Navajos, les Indiens, les aborigènes d’Australie, les Touaregs, les juifs de Palestine, les Mayas... ont dessiné des labyrinthes. En Inde, le mandala est une figure labyrinthique. Par antonomase ou métonymie, on appelle dédale, du nom du constructeur légendaire du labyrinthe crétois, tout lieu où l’on risque de s’égarer en raison de la complication des tours et détours et, abstraitement, tout ensemble de choses embrouillées et confuses ; de sorte que les deux mots labyrinthe et dédale sont pratiquement synonymes. D’après la légende, seules trois personnes ont réussi à sortir du Labyrinthe : Dédale, Icare et Thésée. Le mythe du labyrinthe est une double représentation de l’Homme et de sa condition : il représente l’Homme obscur à lui-même, qui se perd en essayant de se connaître. Il symbolise l’âme humaine dans toute sa complexité, au plus intime d’elle-même renfermant le mal (ainsi peut s’interpréter l’image de la créature monstrueuse qu’est le minotaure enfermé au cœur du labyrinthe). Le labyrinthe représente aussi l’Homme face à l’univers : perdu, ne sachant d’où il vient, où il est, où il va, et cherchant à sortir de cet état, c’est-à-dire à trouver des réponses aux questions qu’il se pose. Le labyrinthe est ainsi une métaphore sur le sens de la vie : l’envol de Dédale et Icare peut symboliser l’élévation de l’esprit vers la connaissance ou celle de l’âme vers la spiritualité, qui permet de sortir de l’enfermement et de l’absurdité de la condition humaine. La légende grecque reprend quelques aspects du mystère égyptien : la mort, la possibilité d’égarement, le fil conducteur et la notion de non-retour. La plus ancienne représentation d’un labyrinthe a été trouvée dans une tombe sibérienne datant du paléolithique : il s’agit d’un dédale de sept circonvolutions, entouré de quatre doubles spirales, le tout gravé sur un morceau d’ivoire de mammouth. Ainsi, d’après Jacques Attali, le labyrinthe apparaît non seulement comme un symbole, mais aussi comme le support d’un mythe, voire un mode de communication : un langage avant l’écriture. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Labyrinthe


MIROIR Principe L’adjectif relatif au miroir est spéculaire car il permet de voir (comme le speculum le fait également). On peut se voir en utilisant le reflet à la surface de l’eau (comme Narcisse) ou dans une vitre ; dans ce cas la réflexion est partielle tandis qu’avec un miroir parfait la réflexion est totale. Le champ de vision humain est limité. En réfléchissant les rayons venant d’une autre direction, un miroir permet d’étendre ce champ de vision dans d’autres directions (mais il masque une partie du champ de vision direct) ; c’est le principe des rétroviseurs d’automobile. Un miroir bien placé permet de voir derrière un objet. Les miroirs ont pour but de donner une représentation fidèle (ou légèrement déformée mais agrandie) des objets mais on peut aussi donner une vision volontairement déformée. On notera qu’on se sert du test du miroir en zoologie et en philosophie de l’esprit pour apprécier le degré de conscience de soi dont font preuve les différentes espèces animales. Les miroirs sont utilisés en prestidigitation, dans des jeux et attractions. Les miroirs sans tain, d’aspect normal par l’avant mais transparents selon leur face arrière, sont utilisés « pour voir sans être vu ». Un miroir est un objet possédant une surface suffisamment polie pour qu’une image s’y forme par réflexion et qui est conçu à cet effet. Les miroirs d’abord utilisés étaient très probablement des plans d’eau sombre et calme, ou de l’eau recueillie dans un récipient (tel Moïse qui fit un bassin d’airain avec les miroirs de femmes). Les premiers miroirs fabriqués étaient des morceaux de pierre polie comme l’obsidienne, un verre volcanique naturel : les exemples les plus anciens d’obsidienne trouvés en Anatolie sont datés d’environ 6000 av. JC. Des miroirs plus réfléchissants en surface métallique polie furent ensuite conçus : miroirs en cuivre poli datés en Mésopotamie à partir de 4000 av. JC et dans l’Égypte ancienne aux environs de 3000 ans avant JC ; miroirs en bronze poli fabriqués en Chine à partir de 2000 ans avant J.-C. Les miroirs en alliage métallique s’oxydant rapidement, on y attachait une éponge pour les nettoyer et une pierre ponce pour les repolir. Dans les cultures rurales, le miroir a été longtemps un objet sans utilité vitale et par conséquent, relevant du luxe propre aux classes aisées. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, le paysan n’en possédait pas.


Symbolisme Le miroir-plan renvoie une image fidèle (mais inversée) de la personne qui se regarde dedans ; il est donc chargé d’une forte connotation symbolique. Il permet de se voir tel que l’on est, mais toujours sous un seul et même angle (face à face et inversé), notamment avec ses défauts. Il est souvent associé à la vérité, comme le Miroir Magique de Blanche-Neige. Le miroir est également l’inverseur de la vérité. Dans Don Quichotte, le Chevalier des Miroirs est l’ennemi mortel de l’Hidalgo dont il renie l’inspiration. Il s’agit, avec le labyrinthe, de l’un des thèmes récurrents des récits et des poèmes de l’argentin Jorge Luis Borges, en particulier parce que le miroir met en scène l’obsession borgésienne de la symétrie secrète existant en toutes choses. Dans la première nouvelle du recueil Fictions, titrée « Tlön, Uqbar, Orbis Tertius », le narrateur place une boutade célèbre dans la bouche de l’un des amis de Borges (lequel donc est également un des personnages du récit, tout comme « l’ami » du reste) : « Bioy Casares se rappela alors qu’un des hérésiarques d’Uqbar avait déclaré que les miroirs et la copulation étaient abominables, parce qu’ils multipliaient le nombre des hommes. » (traduction P. Verdevoye). C’est aussi un symbole fort de la mythologie japonaise, et du shintoïsme ; c’est également un des attributs de la déesse japonaise du soleil Amaterasu. Le psychanalyste Jacques Lacan définit le « stade du miroir », qui est le moment où l’enfant prend conscience que c’est lui-même qu’il voit dans un miroir. Cette connaissance de soi (et non cette reconnaissance, puisqu’avant de se voir dans un miroir, un enfant n’a pas d’appréhension de son corps comme formant une unité totale fonctionnelle) intervient entre 18 et 24 mois, en général. Elle participe de la mise en place du corps comme unifié (en opposition au corps morcelé préexistant au stade du miroir, et problématique dans les affections schizophréniques), et de la structuration du moi. Le stade du miroir est aussi corollaire de l’apparition de la négation chez l’être humain. Dans la littérature et les croyances populaires, le miroir est aussi le symbole d’une porte, d’une limite vers un autre monde, particulièrement mis en valeur dans Alice au pays des merveilles. Le miroir est présent dans de nombreuses religions en tant qu’instrument magique ou sacré. Par exemple dans le bouddhisme tibétain, il est symbole de l’une des plus hautes connaissances : que la réalité de toute manifestation n’est que vacuité. Au Moyen Âge, la vision du miroir a changé. Il est à la fois instrument diabolique et miroir divin. Objet de nombreuses superstitions, le miroir en peinture n’a pas uniquement une fonction de mise en abyme, il n’est qu’objet symbolique. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Miroir#Symbolisme


Tout est vanitĂŠ - Charles Allan Gilbert.


Mise en abyme Effet de miroir, spécularité. La mise en abyme, également orthographiée mise en abysme ou plus rarement mise en abîme, est un procédé consistant à représenter une œuvre dans une œuvre similaire, par exemple en incrustant dans une image cette image elle-même. On retrouve dans ce principe l’autosimilarité et le principe des fractales (répétition à l’infini en géométrie pure) ou de la récursivité en mathématiques. Procédé artistique En disposant plusieurs miroirs les uns en face des autres (galerie des glaces) ou en plaçant une caméra braquée sur son moniteur vidéo, on réalise des dispositifs mettant en évidence cet effet. En littérature, la mise en abyme est un procédé consistant à placer à l’intérieur de l’œuvre principale (récit ou pièce de théâtre) une œuvre qui reprend de façon plus ou moins fidèle des actions ou des thèmes de l’œuvre principale. Milan Kundera est un auteur qui a l’habitude d’utiliser la mise en abyme pour apporter une réflexion sur son œuvre que les protagonistes eux-mêmes ne pourraient avoir, puisqu’ils sont prisonniers, trop occupés par ce qui leur arrive. Dans L’Être et le Néant, Jean-Paul Sartre nous entretient un temps sur la capacité que possède l’être humain d’être conscient de son existence, puis sur la possibilité d’être conscient que l’on est conscient. Il nous prévient ensuite qu’il est préférable de s’arrêter à ce niveau de conscience pour toute étude philosophique, puisque tout niveau supérieur (la conscience d’être conscient d’être conscient), nous éloigne en quelque sorte de l’étude de la conscience elle-même. Quelques exemples : L’affiche du film Memento. L’Histoire sans fin, de Michael Ende. Les Fleurs bleues de Raymond Queneau. Drawing hands, les mains qui se dessinent elle-mêmes, de Maurits Cornelis Escher. L’Emploi du temps, de Michel Butor, où le même narrateur superpose des périodes de temps différentes, puis la même période de temps vue à des moments différents. http://fr.wikipedia.org/wiki/Mise_en_abyme

# Image abyssale, infini, abîme, larsen, écho, éternité Portal - Matthew Spiegelman.

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Perpétuité Emprisonnement à perpétuité. La prison à perpétuité ou prison à vie est une sanction pénale pour les crimes les plus graves, qui consiste théoriquement en l’incarcération d’un criminel jusqu’à sa mort. Définition : Caractère de ce qui est perpétuel, durée sans interruption, sans discontinuation. Pour toujours, pour une durée indéfinie, pour toute la durée de la vie. Synonyme : Permanence, éternellement, «sans cesse», continuité (dans l’espace et le temps). Vis sans fin Une vis sans fin est un cylindre comportant une cannelure hélicoïdale. Associée à un pignon, elle constitue un engrenage. On appelle aussi parfois ce système roue et vis sans fin. Spirale En latin spira ou en grec ancien σπείρα / speira, ce mot désigne un enroulement. En mathématiques, une spirale est une courbe qui commence en un point central puis s’en éloigne de plus en plus, en même temps qu’elle tourne autour. En architecture, les adjectifs spiral et spiralé désignent toutes les formes évoquant la spirale mathématique (escalier en spirale...) Dans des dimensions encore plus petites, l’ADN est lui même spiralé. Boucle Anneau, cercle, rond, ligne courbe qui retourne à son point de départ. En musique, motif (sample) utilisé dans l’électro. En mathématique, le boucle est l’initialisation d’un raisonnement par récurrence. En informatique, séquence d’instruction cyclique d’un programme. En aviation, est synonyme de looping. Un circuit peut être une boucle. Extraits de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/

Ostinato du Boléro de Ravel : deux mesures répétées cent soixante-neuf fois.

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Souvenir (mémoire) Un souvenir est quelque chose dont on se remémore, un élément de mémoire. « La vieille armoire en chêne se souvient-elle du temps où elle avait des feuilles ? » Paul Valéry Les rêves sont en partie fait de souvenirs. Dans le film de science-fiction The Island (2005), des clones créés adultes et maintenus en isolation hors du monde se découvrent des compétences et souvenirs appartenant à leurs modèles originaux. Ces compétences et souvenirs se transmettraient génétiquement, ce qui correspond à ce que Carl Gustav Jung envisageait pour son inconscient collectif. Un souvenir se construit en trois étapes : • L’encodage L’image d’un objet dans son contexte est transmise de l’œil vers le cortex visuel primaire, où elle est traitée et codée. les informations sont ensuite transférées via la voie visuelle centrale de la mémoire. Les éléments de l’image y sont traitées séparément : le cortex périrhinal prend en charge la mémorisation de l’objet, le cortex parahippocampique celle du contexte. L’hippocampe fait ensuite le lien entre les deux types d’éléments pour former un seul souvenir. • La consolidation Dans les jours et les mois qui suivent sa formation, le souvenir est consolidé grâce au renforcement des connexions entre l’hippocampe et les cortex périrhinal et parahipocampique. L’hippocampe continue à être le liant entre le souvenir de l’objet et celui du contexte. Mais, avec le temps, le souvenir peut perdre de sa vivacité originelle et se transformer en une histoire plus stable. Dans ce cas les connexions entre l’hippocampe et les cortex s’effacent progressivement. • La remémoration La vue, par exemple, de l’objet dans un autre contexte va raviver le souvenir. L’image de l’objet est d’abord transmise de l’œil au cortex visuel primaire. Puis elle est transférée via la voie visuelle ventrale au cortex périrhinal- chargé de la mémorisation des objets. Ce dernier se connecte alors à l’hippocampe, qui réactive le souvenir de la plage au niveau du cortex parahippocampique- chargé de la mémorisation du contexte. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Souvenir_(mémoire)

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Mémoire La mémoire étant un processus permanent de renouvellement des traces subjectives des événements avec disparition, temporaire ou durable, de certains éléments, ou avec transformations de détails plus ou moins importants, la perte d’une partie de ces traces est régulière et n’est en rien pathologique. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Amn%C3%A9sie_lacunaire «La mémoire fonde l’identité, établit la personnalité. Elle permet de voyager dans le temps, de récupérer les informations antérieures, de nous ancrer dans le présent, de nous projeter dans l’avenir.» Bernard Croisile, neurologue.

Fil d’Ariane Un fil d’Ariane est, en plongée sous-marine, le filin que le plongeur tire derrière lui afin de pouvoir retrouver la sortie au retour, surtout si la visibilité est médiocre ou nulle. (fil conducteur). Fil « au fil du temps », « fil de l’eau », « fil de la destinée » (3 Parques) Le fil est le lien entre les différents niveaux psychologiques (inconscient, conscient, subconscient). Le fil, c’est l’agent qui relie tous les états de l’existence entre eux et à leur principe. Les fils des marionnettes relient celles-ci à la volonté centrale de celui qui les anime.
Le déroulement du fil de trame est symbolisé par les Parques (Nona, Decima et Morta), par le filage du temps ou de la destinée. Extraits de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/

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Nostalgie La nostalgie est un sentiment de regret des temps passés ou de lieux disparus ou devenus lointains, auxquels on associe a posteriori des sensations agréables. Ce manque est souvent provoqué par la perte ou le rappel d’un de ces éléments passés, les deux éléments les plus fréquents étant l’éloignement spatial et le vieillissement qui représente un éloignement temporel. On a pu diagnostiquer dans la nostalgie sous toutes ses formes le regret de l’enfance. La nostalgie ou « mal du pays » vient du grec νόστος (nóstos) : le retour, et aλγος (álgos) : tristesse, douleur, souffrance et désigne souvent une mélancolie accompagnée d’un envoûtement par rapport à des souvenirs liés aux lieux de la vie passée de la personne qui l’éprouve, et notamment aux lieux de son enfance, évoqués à travers une jouissance qui est douloureuse. D’un point de vue médical, la nostalgie est aujourd’hui de plus en plus prise en compte comme symptôme possible de la dépression. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Nostalgie_(sentiment) Psychologie Rassurant, toujours à portée d’imaginaire, « le souvenir est le seul paradis dont nous ne pouvons être chassé », écrit le romantique allemand Jean-Paul Richter. S’y retrouver, c’est suspendre un instant le temps – et l’agitation, l’urgence, l’inquiétude face au « futur » à préparer. Une quête régressive où le plaisir du souvenir est la joie des retrouvailles, avec soi. Si le passé nous fait rêver, c’est sous l’effet de l’émotion et sous les traits d’une illusion. Selon la psychothérapeute Nicole Prieur, la difficulté à s’affranchir du passé suppose de quitter une position infantile d’attente de consolation, c’est accepter la réalité de la perte et du manque. Loin du jardin d’Éden fantasmé, le passé est un champ de contraintes dont plus personne ne peut ignorer l’étendue. Refoulé ou sans cesse remémoré, hérité ou vécu, le passé, nous le savons, laisse des traces. Mais pourquoi, après tout, ne pas nous en accommoder ? « Pendant des siècles, le passé a été considéré comme un héritage, bon ou moins bon, mais que chacun se devait d’entretenir », rappelle Nicole Prieur. Désormais, « avec l’individualisation de nos sociétés, les principes d’affirmation de soi, d’épanouissement personnel qui se sont imposés, il n’est plus supportable d’habiter une histoire qui ne nous appartient pas vraiment ». Et si Nietzsche, déjà, nous disait « Souviens-toi d’oublier », c’est parce qu’il savait combien le passé pouvait être « un fossoyeur du présent ». Collé au passé, il devient impossible de goûter ce qui se donne à vivre. Et la douce nostalgie de virer à la mélancolie, voire à la dépression, et ces souvenirs de nous gouverner. Le passé est une ressource lorque que l’on cesse d’être la victime d’un temps qui n’existe plus, et en redevenant l’acteur du seul qui nous appartienne vraiment : le présent. Extrait de Psychologies.com : http://www.psychologies.com/Therapies/Developpement-personnel/Epanouissement/Articles-et-Dossiers/Se-liberer-de-son-passe2/Le-passe-refuge-ou-prison#


Oubli L’oubli (du latin oblītus, dérivé de ob- liveo, au sens de “devenir noir”) est un état caractérisé par l’apparente absence ou disparition de souvenirs encodés dans la mémoire à long terme d’un individu. Psychologie L’oubli est un processus progressif ou spontané qui fait que l’individu ne peut se rappeler les souvenirs qu’il avait enregistrés. Il est cependant considéré comme bénéfique d’oublier une certaine quantité de souvenirs que le cerveau “juge” inutiles. Ce tri par l’oubli aurait lieu principalement durant le sommeil. Il existe cependant certains entrainements mnémotechniques visant à diminuer volontairement l’oubli d’information, principalement en se remémorant activement l’information.
 L’oubli peut également être due à des causes traumatiques, on parle alors d’amnésie. 
Une défaillance des mécanismes d’oubli peut être la cause d’une hypermnésie, une trop grande accumulation de souvenir, qui peut être considérée comme une pathologie (rarissime). Postulant que les souvenirs ne sont oubliés qu’en apparence, car ils sont stockés dans notre cerveau mais souvent difficiles à remémorer, Endel Tulving a démontré que ces mêmes souvenirs peuvent être retrouvés par l’évocation de leur contexte sémantique ou circonstanciel, grâce à la mémoire épisodique, qui permet de retrouver la mémoire des faits, s’ils sont intégrés dans le contexte temporel, spatial et émotionnel où ils ont été appris. L’oubli serait ainsi le résultat de la perte des repères liés à l’acquisition d’une information donnée. Évolution de la conception et du rôle de l’oubli Homère et Platon : Le périple d’Ulysse l’a conduit, avec ses compagnons, à l’île des Lotophages, ou mangeurs de lotos, le « fruit de miel » qui provoquait un oubli artificiel, permettant à ces indigènes de vivre en paix. Nietzsche : Dans sa préface à la seconde « Considération Inactuelle » , Nietzsche se définit comme résolument opposé à tout attachement au passé, qu’il nous incite à oublier, au nom du moment présent pleinement vécu : « Nous voulons servir l’histoire seulement en tant qu’elle sert la vie… L’homme… s’arc-boute contre le poids toujours plus lourd du passé. Ce poids l’accable ou l’incline sur le côté, il alourdit son pas, tel un invisible et obscur fardeau... Toute action exige l’oubli, comme tout organisme a besoin, non seulement de lumière, mais encore d’obscurité… ». Freud : La psychopathologie de la vie quotidienne de Freud est une approche lumineuse de la signification de l’oubli, et de sa fonction protectrice de l’ego. Freud a écrit : « … je suis arrivé à la conclusion que cet accident, si commun et sans grande importance pratique, qui consiste dans le refus de fonctionnement d’une faculté psychique (la faculté du souvenir), admet une explication qui dépasse de beaucoup par sa portée l’importance généralement attachée au phénomène en question …à côté du simple oubli d’un nom propre, il existe des cas où l’oubli est déterminé par le refoulement. ». Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Oubli

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Sisyphe ou l’éternel recommencement Pour avoir osé défier les dieux, Sisyphe fut condamné à faire rouler éternellement, dans le Tartare, jusqu’en haut d’une colline un rocher qui en redescendait chaque fois avant de parvenir au sommet, tel que raconté dans l’Odyssée. Toutefois, Homère ne faisait pas mention de la raison de ce châtiment. Interprétation D’après la théorie solaire, Sisyphe représente le soleil qui s’élève chaque jour pour replonger le soir sous l’horizon. D’autres y voient la personnification des marées ou des vagues qui montent pour soudain redescendre. Il peut s’agir aussi d’une métaphore de la vie elle-même où cette punition signifiait qu’il n’y avait de châtiment plus terrible que le travail inutile et vain, qu’un homme aussi astucieux soit condamné à s’abrutir à rouler un rocher éternellement. On perçoit l’absurdité du personnage tant dans le désespoir de tenter d’échapper à une mort inévitable, que dans la tentative d’achever un travail interminable. Dans son deuxième essai philosophique, Le Mythe de Sisyphe, Camus qualifie Sisyphe d’ultime héros absurde. Il y établit pourquoi la vie, malgré l’absurdité du destin, vaut la peine d’être vécue : “il faut imaginer Sisyphe heureux” dit Camus - une phrase d’abord prononcée par Kuki Shūzō. Ce mythe n’est pas exclusif aux traditions gréco-romaines. Il existe d’autres exemples de personnages qui parviennent à capturer la Mort en l’attachant dans un sac ou encore, en la cachant dans une bouteille de sorte que personne ne mourait des années durant. Le mythe de Sisyphe est évoqué dans le film documentaire Microcosmos, le peuple de l’herbe de Marie Pérennou et Claude Nuridsany (1996), à propos de l’inlassable travail du scarabée sacré, à la recherche d’une terre meuble où il enterrera la boule d’excréments qu’il roule devant lui et qui redescend inexorablement la pente. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Sisyphe

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Le livre dont vous êtes le héros Il semble que le premier à avoir eu l’idée d’un récit dicté par les choix du lecteur et susceptible de changer selon sa volonté ait été Raymond Queneau, qui applique ce principe dans Un conte à votre façon, écrit en 1967 et publié en 1981 dans le recueil Contes et propos. Les membres de l’OULIPO se sont beaucoup intéressés à ce que les mathématiques combinatoires peuvent apporter à la fiction, et ont proposé plusieurs exemples de fictions combinatoires. Or Un conte à votre façon, même s’il ne comporte pas de règles (il n’y a pas de feuille d’aventure ni de dés à utiliser), a inventé le principe d’un livre où à chaque étape le lecteur peut choisir entre différentes suites, chacune renvoyant à un paragraphe numéroté. L’idée du livre à plusieurs lectures a été mentionnée par Jorge Luis Borges en 1941 dans ses nouvelles Dans Le Jardin aux sentiers qui bifurquent et Examen de l’œuvre d’Herbert Quain du recueil Fictions. Dans Le Jardin aux sentiers qui bifurquent figure un livre-labyrinthe (fictif), qui n’a pas de sens si on lit les paragraphe dans l’ordre ; c’est au lecteur de trouver l’ordre de lecture correct. Dans Examen de l’œuvre d’Herbert Quain, Borges fait la critique de livres d’un auteur fictif, Herbert Quain ; l’un de ces livres fictifs, Avril mars, possède neuf début différents. Les livres-jeux, souvent appelés « livres dont vous êtes le héros », sont un genre de romans ayant pour caractéristique d’être interactifs, le déroulement de l’histoire dépendant des choix du lecteur. Ce genre, né dans les années 1960-1970, devient célèbre en 1982 avec Le Sorcier de la Montagne de feu. Il connaît son heure de gloire dans les années 1980 et au début des années 1990 avant de sombrer dans l’oubli. Mécanismes de jeu Les livres-jeux sont des livres dont les paragraphes sont numérotés. À la fin de la lecture d’un paragraphe, le lecteur a le choix entre plusieurs possibilités, représentant les actions du personnage qu’il incarne. Ces possibilités renvoient à d’autres paragraphes, qui développent les conséquences des choix du lecteur. Les paragraphes ne sont donc pas lus dans l’ordre des numéros, et chaque lecteur ne lira pas les mêmes paragraphes, puisqu’il ne fera pas les mêmes choix. Le livre peut donc générer plusieurs histoires. Les trois composantes du livre-jeu Le courage : les décisions prises par le lecteur, sa part de liberté. La chance : le hasard introduit par l’usage des dés, qui n’est pas systématique, certains livres-jeux ne font intervenir que les choix du lecteur. La destinée : le texte, les différents embranchements de l’histoire sont déjà écrits par l’auteur du livre. Dans la plupart des livres-jeux, le personnage principal a un but : réaliser une mission, une quête, découvrir son passé. Extrait de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Livre-jeu

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Un jour sans fin Un jour sans fin (Groundhog Day) est un film américain réalisé par Harold Ramis et sorti en 1993. Il met en scène un présentateur météo sur une chaîne de télévision régionale nommé Phil Connors. À chaque fois que son réveil sonne, c’est la même journée du 2 février qui recommence : Phil semble bloqué dans le temps jusqu’à ce qu’il ait donné un sens à sa vie. Synopsis Après une nuit de sommeil, Phil, en se réveillant, découvre qu’il revit à nouveau la journée du 2 février. La journée se déroule exactement comme la précédente sans que quiconque semble conscient de la boucle temporelle, sauf Phil qui se souvient parfaitement des événements qu’il a vécu la « veille ». Chaque matin, il continue de se réveiller à 6 heures le 2 février. Initialement perturbé ou agacé par cette situation, il commence à tirer profit, sans crainte des conséquences à long terme, de sa connaissance préalable de ce qui va se produire : il apprend les secrets des habitants de la ville et multiplie les actes qu’il n’aurait pas réalisé en temps normal comme un vol ou une conduite en état d’ivresse. Il séduit également une femme mais s’aperçoit à cette occasion qu’il est hanté par Rita. Toutefois, ses machinations pour séduire celle-ci se soldent toujours par un échec. Phil se désespère et tente de plus en plus radicalement de mettre fin à la boucle temporelle, enregistrant des reportages ridicules et offensants sur le festival, abusant des résidents et, finalement, kidnappant la marmotte mascotte du festival ; après une longue poursuite, il jette sa voiture du haut d’une falaise, semblant se tuer en même temps que la marmotte. Toutefois, en se réveillant, Phil constate que rien n’a changé, et ses nouvelles tentatives de suicide sont tout aussi vaines. Lorsque Phil explique la situation à Rita en lui donnant des preuves de sa bonne foi, elle lui dit qu’il devrait en profiter pour se perfectionner. Phil s’efforce alors d’en savoir plus sur Rita et améliore chaque jour sa connaissance d’elle-même et de la ville. Il fait aussi une rencontre déterminante : lors d’une soirée, il découvre qu’un vieux clochard, auquel il avait fait un don monétaire incroyable un peu plus tôt, agonise dans une ruelle. Après sa vaine tentative pour le sauver, il recommence chaque jour à tenter de le faire échapper à son destin, en vain. Il commence alors à utiliser sa vaste expérience de cette journée pour aider autant de personnes qu’il le peut. Il utilise également ce temps pour apprendre, entre autres choses, à jouer du piano, à sculpter sur glace et à parler le français (dans le doublage français, il apprend l’italien). Au bout du compte, Phil devient capable de se lier d’amitié avec presque tous ceux qu’il rencontre durant la journée. Il utilise son expérience pour sauver des vies, aider toutes sortes de citadins et se rapprocher de Rita. Il enregistre ensuite un reportage sur la célébration de la fête de la Marmotte si éloquent que toutes les autres stations orientent leurs micros vers lui. Après une soirée dansante où on le voit déployer des talents remarquables au piano, des célibataires sont « vendus » aux enchères pour raison caritative ; Rita, étonnée par l’acharnement de Nancy et d’une autre femme, finit par «remporter» Phil. Plusieurs habitants de Punxsutawney viennent alors tour à tour remercier Phil sous les yeux de Rita, séduite. Phil et Rita se retirent ensemble dans la chambre de Phil. Phil, qui a vécu une journée parfaite, se réveille enfin le matin en constatant que la boucle temporelle est brisée : c’est le matin du 3 février et Rita est encore allongée à ses côtés.


Ce film, basé sur un postulat simple, ouvre la réflexion à plusieurs niveaux. Tout d’abord l’épanouissement personnel, montrant qu’un homme cynique et imbu de sa personne peut devenir un héros local si les circonstances le lui permettent. Ensuite une réflexion philosophique sur le quotidien, car la routine et la répétitivité sont à plusieurs reprises suggérées dans le film. Enfin, le héros est amené à progresser humainement tout au long du film en découvrant que chaque personne, même la plus anonyme, a son identité, son histoire et sa raison d’être, ce qui l’amène à considérer l’autre, et à l’apprécier pour ce qu’il est, différemment de son premier regard. Le film ouvre ainsi une réflexion profonde sur la considération des « autres », la tolérance, l’égoïsme et les préjugés. Le tout situé dans un contexte irréel truffé de drôleries et d’allusions. C’est un film à considérer au second degré si l’on souhaite en percevoir la pleine portée. En tant que tel, le film est devenu un favori des bouddhistes, parce qu’ils voient ses thèmes d’altruisme et de renaissance comme un reflet de leurs propres messages spirituels. On peut également rapprocher le thème du film du concept nietzschéen d’éternel retour, rapporté à l’échelle d’une journée. Pour Nietzsche, tout individu doit chercher à mener son existence de façon à vouloir la revivre à l’identique et dans les moindres détails une infinité de fois, si cela était possible. Il s’agit d’une véritable épreuve, à laquelle Phil Connors échoue dans un premier temps. Le salut n’apparaît que lorsque le héros a pris conscience que la journée qu’il a passée pourrait enfin être vécue indéfiniment sans que cela constitue une malédiction, mais au contraire une forme de bonheur suprême. Aux États-Unis et, dans une moindre mesure, dans d’autres pays anglophones, l’expression « Groundhog Day » (jour de la marmotte) est entrée dans l’usage commun comme une référence à une situation désagréable qui se répète sans cesse. Le film a en outre fait l’objet de plusieurs études scientifiques dans des domaines divers. Extrait de Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Un_jour_sans_fin

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Traduction du texte d’introduction de la série “Days with my father” du photographe Phillip Toledano

Ma mère est décédée subitement le 4 Septembre 2006 Après sa mort, j’ai réalisé combien elle m’avait protégé de l’état mental de mon père. Il n’avait pas la maladie d’Alzheimer, mais il n’avait pas la mémoire à court terme, et a souvent été perdu. Je l’ai emmené à l’enterrement, mais quand nous sommes arrivés à la maison, il ne cessait de me demander chaque 15 minutes où ma mère était. J’ai dû expliquer encore et encore, qu’elle était morte. Cela le choquait à chaque fois. Pourquoi personne ne le lui avait dit? Pourquoi ne l’avais-je pas emmené à l’enterrement? Pourquoi ne lui avait-il pas rendu visite à l’hôpital? Il n’avait aucun souvenir de ces événements. Après un moment, j’ai réalisé que je ne pouvais pas continuer à lui dire que sa femme était morte. Il ne se souvenait pas, et il nous tuait tous les deux, constamment à revivre sa mort. J’ai décidé de lui dire qu’elle était allée à Paris, pour prendre soin de son frère, qui était malade. «Jours avec mon père» est un journal. Un enregistrement de notre relation, et le temps que nous avons passé au cours des trois dernières années. 2006-2009. Le projet intégral ici : www.dayswithmyfather.com Publié par Chronicle Books in 2010.


Un souvenir, un élément de mémoire individuelle. Un souvenir, un objet rapporté ou conservé pour se souvenir de quelque chose ou de quelqu’un. Un souvenir, un hommage rendu lors d’une expérience collective.


se souvenir

Verbe du 3e groupe se conjuguant avec le verbe ĂŞtre

je me souviens, donc je suis.



Installation Le Labyrinthe de Sisyphe / le 29 juin 2014 Les trois dernières semaines ont été dédiées à la mise en place de différents éléments au lieu même de la résidence, afin de présenter le projet à l’ensemble des jeunes présents pour l’occasion de la fête annuelle. En voici le texte explicatif. PRESENTATION PROJET PUZZLE Ceci est une mise en scène servant d’introduction au projet Puzzle, atelier d’écriture basé sur les photographies présentées dans leur ensemble dans le lieu de résidence artistique. Il faut imaginer en entrant dans cet espace, entrer dans la tête d’un individu (film fantastique Dans la peau de John Malkovich réalisé en 1999 par Spike Jonze ) renforcé par le dispositif de sphères et des bulles de savon symbolisant pensées et immersion (Le voyage fantastique basé sur le roman d’Isaac Asimov et réalisé par Richard Fleischer en 1966, à qui l’on doit également Soleil Vert). Pour cette plongée dans l’esprit et ses pensées, un fil doré (fil d’Ariane, fil conducteur du plongeur sous-marin) relie les images présentées. Ces photographies sous forme de Polaroid (instantané fixé, figé) sont comme des flashes récurrents, des images persistantes, des objets tangibles et les seuls éléments à notre connaissance du passé de l’individu. Dans cet espace, trois murs sont utilisés, le plafond, et au sol, trois tables présentent également des éléments de cette installation. Sur le mur de gauche sont affichées des références en rapport avec le thème de l’installation, ainsi que quelques notes et étapes de la réflexion (importance de la photographie N&B d’une reflet d’une personne sans visage). Sur le mur de droite, 45 sachets plastiques contenant un ou des objets sont présentés. Il s’agit pour l’essentiel d’un ancien projet intitulé reliques, modifié pour l’occasion. En l’occurrence ici aucune signification du contenu de chaque sachet n’est apportée et ils ont tous un point rouge comme légende. La table basse au bas du mur comporte un microscope où se trouve la même pastille rouge sur la lame en verre, accompagné d’un tube stérile utilisé pour les prises de sang. Ce dispositif met en évidence le lien entre souvenir et identité (renvoyant au portrait/reflet sans visage). Le seul sachet vide peut être interprété des trois façons possibles :

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• L’objet manquant (pièce de puzzle) • De l’air, un souffle, du vide • Une sollicitation pour imaginer ou projeter son objet De même, si on considère la possibilité que chaque sachet contienne l’objet le plus important émotionellement d’une personne (cf. épisode 7, saison 7 Docteur Who, Les Anneaux D’Akhaten), on peut penser que celui qui est vide est proposé par un individu aucunement matérialiste. En allant vers le mur du fond, on peut lire trois définitions de souvenir (dont celle de l’objet qui renvoie aux objets ensachés) et la conjugaison du verbe avec être (dont la première personne du singulier au présent est effacée, le JE/personne/Etre commençant à disparaitre).

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Sur le mur du fond, une soixantaine de Polaroids sont dispersés, chacun relié à un ou plusieurs autres par un fil léger et doré (de la suspente). Chaque section porte une étiquette avec des mots-clés. Au centre, sans aucune liaison, se trouve un miroir dans un cadre de Polaroid.

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Au plafond, 8 sphères en plexiglas transparent sont suspendues à différentes hauteurs. 8 comme le chiffre inversé symbolisant l’infini (et représenté par le ruban de Moebius présent dans la boîte noire carrée d’une table). Elles sont de tailles variées et contiennent des objets symboliques : • Nid d’oiseau / Lieu de refuge, enfance. • Nid de souris / Somme d’histoires, documents déchiquetés, fragments. • Yeux de poupée / les regards croisés. • Bougies d’anniversaire / raisonnement, structure de l’esprit au fil des ans • Poupée érotique en latex / Libido. • Hippocampe mort (sec)/ La partie éponyme du cerveau atteinte. • Cadenas à combinaison / pensées verrouillées, inconscient • Boussole porte-clé / désorientation au sens propre et figuré (perte de cette clé) A noter que la sphère contenant l’hippocampe est la seule suspendue avec le même fil doré que celui qui donne un lien entre chaque image. Fil sectionné. Ces sphères font écho avec les bulles de savon (vides d’objet/ de pensées/ de souvenirs) produites dans la pièce par une machine déclenchée par intermittence (réf aux visuels issus du film Le voyage fantastique). Sur la table délimitant la distance avec le mur de Polaroids : • Une montre arrêtée, comme cassée, dans une cage couleur chair. C’est une montre automatique (elle se remet en route lorsqu’elle est portée, grâce aux mouvements qui remontent le ressort). • Dans une boîte carrée noire, un modèle réduit de cerveau (un cerneau de noix/vanité), sur un petit miroir rond où se reflète une spirale temporelle habillant l’intérieur du couvercle. (Un des textes explicatifs donne les clefs des différents miroirs utilisés ronds ou carrés : porte, fenêtre, trou béant en abîme, reflet…) A côté du miroir, un ruban doré de Moebius (signe d’infini). Carré : réalité, forme cartésienne. Noir : obscurité, oubli (du latin oblītus, dérivé de ob- liveo, au sens de « devenir noir ») • Deux feuilles présentent un récit en guise de règle de jeu et le titre de l’installation. Une section du fil conducteur (lien doré) est présente sur la plaquette de présentation, signalant sa rupture.


La troisième table présente (un vocabulaire) plusieurs mots importants du projet, et donne leur définition ou sens au travers de différents domaines (psychologie, symbolisme, philosophie …) • Labyrinthe • Sisyphe • Alzheimer • Henry Gustav Molaison • Hippocampe • Identité • Boucle • Miroir • Nostalgie • Oubli • Perpétuité • Souvenir • Spirale • Vis sans fin Pour mieux imaginer le projet il est possible de le rapprocher de quelques références également documentées sur la table : • Le jour sans fin • Le livre dont vous êtes le héros Et sur le mur des références, le diagramme sert de guide en donnant les pistes reliant chaque mot ou notion utilisés. Au terme de la visite guidée, le sujet est annoncé : Nous découvrons une boîte à chaussures contenant lesdits Polaroids. Piqués par la curiosité et aidés d’un indice, nous arrivons à retrouver la personne à qui appartiennent les photographies. Il se révèle qu’elle est amnésique. Pris de sympathie, nous décidons de la revoir, et même de lui rendre visite régulièrement. Pour cela nous décidons de lui raconter chaque fois une histoire à partir de ses photographies, une belle histoire, lui réinventer ses souvenirs, différents à chaque visite. Pour cela, chaque jeune doit inventer une histoire à conter. Dans ce but, chaque visiteur peut se servir librement un prendre un livret de travail (regroupant toutes les photographies et comportant une partie dédiée aux notes) intitulé La belle Histoire. # : Projet alzheimer, amnésie, détails, Henry Gustav Molaison, immersion, merci, rôle, symbole, sympathie, tabula rasa.


Entrée

Documents de références et genèse

Vue globale et détails de l’installation au lieu de résidence

Table de présentation principale


© STÉPHANE GINER

et mur du fond

Conjugaison

Installation “ IPSÉITÉ(s) ”

Table des textes


Différents objets-clé de l’installation


8 sphères symboliques de l’installation


Relique Les reliques (du latin reliquiae, « restes »), sont les restes matériels qu’a ou qu’aurait laissés derrière lui une personne vénérée en mourant : soit des parties de son corps, soit d’autres objets qu’il a ou avait, pour les croyants, sanctifiés par son contact. La conservation et le culte de ces restes sont une pratique en vigueur dans plusieurs religions. Il en découle des croyances et des pratiques religieuses variées. À partir du Siècle des Lumières qui voit les philosophes et écrivains de l’Encyclopédie combattre l’obscurantisme religieux, il y a un glissement des reliques de personnage Saint vers les reliques profanes de grands personnages historiques. À qui servent donc les reliques ? Plusieurs réponses sont possibles selon le point de vue où l’on se place : théologique, psychologique, ethnologique ou sociologique. La langue française use du terme « relique » dans d’autres acceptions que strictement religieuses. Dans le langage littéraire, il désigne (seulement au pluriel) « les débris de quelque chose de grand » (définition de Littré). Ce sens s’appuie directement sur l’étymologie sans passer par le sens usuel du mot, c’est un pur latinisme. Les reliques dites d’affection : Il s’agit d’objets auxquels on accorde moralement un grand prix, tel que la boucle de cheveux d’une personne aimée. À l’époque romantique, on a usé de véritables reliquaires personnels pour conserver ce type d’objets. Ce sens s’appuie sur l’analogie, par extension du sens le plus usuel du mot. On parle aussi de reliques pour désigner les objets que détiennent et vénèrent les fans d’une vedette à laquelle ils vouent un véritable culte, tel que le maillot qui a été porté par un grand joueur. Cet emploi est métaphorique. Les reliques en tant que talisman : L’individu autant que le groupe ressent un besoin profond de maîtriser son destin et les menaces qu’il sent confusément peser sur lui. Chez presque tous les peuples on constate le besoin multiforme de détenir et de manipuler des objets dotés de pouvoirs magiques, qu’on appelle, avec des distinguos qui varient selon les auteurs, amulettes, talismans, fétiches ou grigris, voire porte-bonheur. Ces talismans dans certains cas étaient partiellement composés de restes humains. Les grandes religions ont progressivement converti ces usages. Au Sri Lanka, à Kandy, le Temple de la Dent passe pour abriter une molaire du Bouddha Sakyamuni. Édouard Charton a raconté en 1842 l’histoire étonnante de cette dent qui est un vrai personnage de roman. La dent est considérée comme une représentation symbolique de la vie de Bouddha. Des rituels et des cérémonies diverses se sont développées autour de la relique. Extrait de Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Relique


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Quelques-uns des objets-reliques exposés dans l’installation Le Labyrinthe de Sisyphe.


Pour ce projet, cette installation de sachets-souvenirs issus du projet Autoportrait(s) /1999, a été adapté de la façon suivante : Une pastille rouge est disposée centrée sous chaque sachet et représente un goutte de sang. Cela ramène au microscope et au tube de prélèvement disposés sur la table basse. Le dispositif s’intitule IPSÉITÉ(s). L’idée est de proposer une démonstration où l’on peut imaginer voir au microscope un souvenir par goutte de sang, de ceux-là nous constituant et imager la notion d’identité construite par le vécu. Quelle est la différence génétique entre deux jumeaux ? rien ou presque rien de ce point de vue là, mais chacun a un vécu différent et donc son identité propre conservée dans ses souvenirs.

ipséité /ip.se.i.te/ féminin : (Philosophie) Identité propre ; ce qui fait qu’une personne est unique et absolument distincte d’une autre. Caractère du sujet pensant qui a le pouvoir de se représenter lui-même comme demeurant malgré les changements qui affectent son corps et son esprit. Conscience réflective de soi à soi-même.

« Nous vivons dans l’oubli de nos métamorphoses. » Paul Eluard, Le dur désir de durer.

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recherches & notes



Différentes phases d’agencement dans le but d’affiner la sélection et tester les correspondances et combinaisons possibles.



1ère et deuxième pages du livret délivré aux jeunes.


Texte disposé dans l’installation, en guise d’avant-propos par lequel commençait le livret destiné aux jeunes.

La belle histoire…

Je suis un imposteur, pas un magicien. Je ne possède pas d’appareil Polaroid, ce sont des faux, les photographies sont retouchées et recadrées en carré. Mais je n’ai pas su aller au bout du principe du faussaire, car si le fait que les cadres de pola sont les mêmes afin de vous laisser un indice perturbateur, il aurait fallu que j’utilise des photographies provenant du web, d’autres auteurs. Il y a dans ces clichés des images personnelles ou relatant des moments importants, et quelques autres plus banales pour noyer le poisson. Qui suis-je ? Ne se pose –t’on pas au moins une fois cette question ? Qui suis-je ? Vous ne me connaissez pas, ni mon sexe, ni mon âge, ni ma couleur ou ma confession. Voici le jeu, je vous jette mes images en vrac, en pâture, ou si vous préférez vous les découvrez au fond d’un meuble chez Emmaüs dans une boîte à chaussures. C’est comme un puzzle, celui d’une vie. Vous devez réécrire une histoire avec. Je prendrai la plus belle comme souvenir. Un amnésique.


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Le résultat du projet se trouve sur les pages suivantes, c’est le fruit d’un atelier d’écriture avec Haïtem, Cécilia, Gabriel, Jérémie, et Sikou. Si toutefois le point de détail, “d’une histoire à produire comme souvenir agréable à raconter” n’est pas toujours parfaitement respecté, comme l’essentiel étant de jouer et combiner les images pour créer une idée originale, alors l’objectif est bien atteint.

On peut imaginer reproduire l’expérience avec d’autres publics, vous pouvez vous aussi imprimer les 6 planches contact A4 de l’ensemble des images du projet et les découper pour partager et continuer l’expérience. Elles sont disponibles sur GoogleDrive (7 Mo) ici : http://bit.ly/1C7YBty Vous êtes invités ensuite à envoyer vos productions littéraires légendées des références photographiques (n°) à : labyrinthedesisyphe@gmail.com

Guide de lecture Sur la page de gauche le portrait de l’auteur, le titre de son histoire s’il a souhaité en donner un, puis le texte. Chaque partie renvoie à une image de la page de droite, précisé par un chiffre en exposant. Celui-ci correspond toujours à l’ordre des images en partant du haut à gauche vers la droite, puis de même pour la rangée inférieure.


Haïtem

Sous France Un jour j’ai décidé de partir, de quitter ma famille et mon pays. J’ai commencé à chercher des contacts pour quitter le pays. C’était pas facile mais j’ai fini par en trouver un, c’était par la mer1. Deux jours après j’ai pris un bateau, ce voyage pour moi a été important malgré les difficultés mais je suis toujours vivant grâce à Dieu. Après ce voyage, j’ai été placé dans un foyer et là tout a basculé : j’ai commencé à traîner et à faire des problèmes comme un jeune, tout simplement, qui essaie de s’en sortir mais j’ai fini par être condamné à une peine de prison2. Une bagarre par-ci, une bagarre par là, j’ai pris des coups et je me suis fait des bleus mais c’est comme ça3. Un jour j’étais dans mon trou en train de regarder par la fenêtre, il y avait la pluie partout4, à ce moment-là je pensais à ma mère et à toute ma famille. C’est dur de m’adapter à un pays, à une langue et à des jeunes que je ne connais pas. En plus, je ne fais aucune confiance à qui que ce soit. Deux mois plus tard, j’ai commencé à paniquer et à stresser tellement on vivait comme de la merde : entre quatre murs, j’avais l’impression que je n’étais pas un humain mais un singe derrière des barreaux5. Mais j’étais sûr qu’un jour je finirai par trouver l’espoir6, pour l’instant ce n’est pas le cas.



Cecilia

C’est l’histoire d’un être qui nait, cet être c’est vous, c’est moi, c’est nous. Violemment arraché de son placenta, de sa poche de protection il va devoir apprendre les codes qui vont lui permettre de supporter la vie jusqu’à ce qu’il en parte... Peu à peu il grandit, crée des liens avec des personnes qui l’aiment et son père devient son meilleur ami ou son amoureux, il se découvre et découvre le monde et une fois ça fait, il découvre maintenant l’impact de ses actes et de ses mots. 2 Mais toujours dans sa quête de lui, il en arrive à douter de la crédibilité de ceux qui l’entourent et peu de temps après de la sienne. Il remet en question tout ce qu’il fait, toutes ses croyances, tout ce qu’il est. 3 Puis un jour il découvre que des gens de son entourage croient en un dieu, en des choses divines, pour justifier le caractère humain, leur condition sur Terre. Donc il s’y met pour voir si cette divinité peut lui porter secours dans ce moment de solitude pesante et même s’il n’y arrive pas vraiment, il a envie d’y croire au fond de lui, envie de croire qu’il n’est pas seul. Mais seulement ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il n’est pas le seul à croire qu’il n’est pas Seul, et c’est ce qui fait sa communauté, celle à qui il consacrera beaucoup de temps et de réflexion dans son quotidien, par des gestes simples, comme ceux qui sont inscrits sur les tablettes des dix commandements. Et un beau jour il perd un être cher comme sa soeur qui était toute jeune. Continuera-t-il d’y croire en sachant que c’est injuste? ou se dira-t-il : “il veut tester ma foi en lui”. 1



Gabriel

Le temps ne s’écoule plus comme il le devrait. Tantôt filant, tantôt fuyant mais ne revenant jamais en arrière. 2On le remarque dans les saisons, on tente de se persuader que tout est un éternel recommencement, mais on se leurre. 3 Les gens s’adaptent tant bien que mal, changeant leurs masques au gré des évènements. Cela ne s’avère pas forcément conscient ni même payant. 4Ils s’enfoncent dans un flot d’illusion, 5se perdent dans l’horizon, détestant la vie mais l’aimant tout autant. 6Leurs sentiments les consumment, 7les menant parfois même souvent au vice, ils ne se rendent pas compte qu’ils se limitent, 8 que le mince fil de la vie devient plus fin. 9Ils se réveillent, se perdent dans la foule, idôlatrent des icônes aux regards amicaux. 10Plus semblant avoir tout perdu, détruisent les vestiges de ce qu’ils ont été, se drapent dans le vide destructeur. 11Ils s’allongent, s’endorment en pensant ne plus jamais s’éveiller, souhaitant la mort sans pour autant la vie. 12Ils s’effondrent dans leurs pensées, et se réveillent. 13Ils regardent le ciel, et se disent que ce n’est pas mal non plus, que la vie donne du beau comme du laid, mais que l’un sans l’autre ce n’est rien. 14 Le temps continue sa ballade, les gens le suivent mais ne le subissent pas pour autant. 1



Jérémie

C’est l’histoire d’un vieux couple qui vivait dans un petit village. Ils se connaissaient avant d’être mariés, 2ils ont vécu leur jeunesse dans le même quartier. C’était des jeunes très brillants. Elle était mannequin. 3Elle faisait régulièrement la une des magazines, tandis que de l’autre côté, Jean-françois se fait une carrière de folie. Il était ingénieur dans l’aérospatiale. 4JeanFrançois a eu la chance d’aller sur la lune durant sa jeunesse. 5 Jean-François et Marie étaient tous les deux chrétiens, ils croyaient en Jesus. Ils se sont mariés dans une église catholique, et ont fait leur fête dans une grande salle où il y avait des décorations magnifiques (6tête de Versace, des lumières super jolies, et leurs deux photos collées au mur). 7 Pendant sa jeunesse elle aimait se prendre en photo. 8Son oncle a été décapité au moyen-âge parce qu’il avait volé dans une plantation de maïs. 9 Le couple aimait bien contempler la nature. Pour eux c’était très important car cela leur inspirait la renaissance de la vie et la réincarnation des Hommes. 10 Le frère de Jean-François s’est ouvert le crâne 11suite à un accident de voiture qui a été si tragique qu’il a causé sa mort. 12Il portait une montre retrouvée sur le lieu de l’accident, rouillée et couverte de gouttes de pluie. 13 Suite à l’effondrement de leur maison par une étrange catastrophe naturelle, Jean-françois est enseveli et meurt. 14 Depuis ce jour-là, Marie la veuve, porte son alliance à sa mémoire et pour elle c’est comme si toute sa vie s’était arrêtée ce jour. 1



SIKOU

Fiona est une jeune femme 2qui avait des problèmes d’œil. Et elle l’a négligé. Elle a vécu longtemps avec cette maladie, et au bout de deux ans, ce problème d’œil est devenu 3 un problème de cerveau. Elle n’avait pas assez d’argent pour se soigner. Fiona a demandé de l’aide partout, et dans ses amis personne ne pouvait l’aider. Du coup, Fiona est devenue folle et grave. Elle n’est pas restée en vie longtemps. Fiona est morte. 1

Salim, un migrant africain. Salim a réussi à traverser la mer. Une fois qu’il est arrivé au pays, 2il a vécu dans les rues. Au bout d’une semaine 3il est tombé sur les flics qui l’ont mis en prison où il est resté longtemps. Il est passé devant le juge puis ils l’ont libéré. Salim cherchait du travail partout. 4 Après un mois, il a rencontré une vieille dame et ils se sont parlés. Une vieille dame qui s’appellait Sabrina. Sabrina a adopté le jeune migrant. 5 Elle avait une bibliothèque chez elle, et elle lui a appris à lire et à écrire, avant d’aller à l’école. 6 Salim est resté plus de quinze ans avec Sabrina. Il a fait des études et il a réussi sa vie. 1

Un vieux couple Laure et Charlotte 2partent à la mer pour profiter de la vie. Charlotte et Laure s’entendaient bien et étaient inséparables, un couple de 40 ans. Elles se connaissaient depuis l’enfance, cela a continué puis c’est devenu un couple. Charlotte avait deux enfants, une fille et un garçon. Laure n’a jamais eu d’enfant. Cela faisait déjà longtemps qu’elles vivaient ensemble, lorsqu’un jour Charlotte proposa à sa copine Laure de partir à la mer. Il faisait beau et tout, une fois arrivé à la mer. 3 Elles se sont baladées tranquillement puis Charlotte est entrée dans l’eau. Elle est partie se baigner une demi-heure. Laure ne voyait plus sa copine, elle était morte dans l’eau. Ils ont retrouvé son corps au bord de la mer. Laure n’a pas mangé pendant une semaine. 4 Elle s’en rappellera toute sa vie. 1



PHILIPPE LEJEAILLE

De mémoire1. Un cygne dans le pétrole, un chat noir empaillé, un renard écrasé, un chimpanzé enfermé, un cheval blanc au galop, un cochon dépecé à manger. Un couple de vieilles dames lesbiennes, une autre vieille dame déguisée en Barbie, un « sans domicile fixe » enfermé dehors, une jeune fille qui n’est pas encore une personne, une autre enserrée dans son corset, un malade et son cathéter, un enfant de maternelle avec son faux tatouage, un cosmonaute sur la Lune, un supplicié décapité voire décharné, une foule aux pensées légères comme Bob l’éponge, un autre cosmonaute dans un retable médiéval, le crâne décoré d’un défunt de Papouasie, un œil au regard lointain et fragile, une main de veuve, deux parents dans une horloge où le temps s’écoule encore avec eux, une cuisse martyrisée. Une vitre glacée, un lit vide et empli d’absence, une voiture fracassée, des dents arrachées dans un pistolet pour uriner, des clés, la pièce perdue d’un puzzle, un carnet ouvert de nostalgie, une maison dévastée, une montre témoin du temps arrêté, un dessin d’enfant. Des larmes, de la moisissure, encore de la moisissure, des graines rouge sang, des caméras de surveillance, de la peau, de la chair malformée, le nombril, des graffitis, des masques abandonnés. Chez le dentiste, dans un placard, sous les feuillages, devant la mer, dans le ciel, dans un cauchemar, à l’hôpital, dans un camp. La crise, la religion, la guerre, la superstition, l’anticonformisme, le courage, la pollution, le nucléaire. La lumière au bout du tunnel. Du blanc, du beige, du rouge, du noir, du vert, des ronds, des carrés, des diagonales, l’horizontale, la verticale… Quelle musique !TOUTES LES IMAGES DANS LE DÉSORDRE



Le Crabe. La maladie vint par surprise, lente et sournoise, 2se disséminant insidieusement partout. Les séjours à l’hôpital furent longs3, éprouvants et répétés comme un inexorable 4chant du cygne. Puis il y eu Le jour, 5ce jour fracassant6, où 7le soleil devint à tout jamais blanc et blafard, 8où le plancher rejoignit le plafond, où le sol se déroba sous ses pieds, où sa maison fut éventrée. 9Il laissa un lit plein d’absence où 10 sa peau douce et chaude disparut pour toujours. 11Les pleurs envahirent jusqu’aux 12vitres devenues glacées. 1

Il était son miroir, 14son temps présent, son mouvement perpétuel. 15Le deuil devint le seul temps conjugué, 16celui qui s’arrête dans cet incendie de douleurs. 17Le nombril est la première cicatrice d’une séparation, celle-ci serait sa dernière. Lui, ne ferait plus sa 18tête de cochon. Et il emportait d’elle sans un bruit 19 toutes les expressions de son visage, ne lui en laissant qu’20un grimaçant. 13



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uand nous avons lancé l’idée de la « résidence d’artiste », c’était un terme un peu ronflant qui nous permettait d’avoir un repère minimum et de lancer l’aventure. La collaboration avec Les Sens de l’Art bornait la question culturelle. Lorsque nous avons reçu nos deux premiers artistes Philippe LEJEAILLE et Stéphane GINER, le roi n’était pas notre cousin. Nous n’avions pas cependant de plans de bataille bien arrêtés, juste quelques idées.

- Faire du lieu de Transition un espace perméable à la culture et en faire notre « bannière ». - Ne pas être dans des contraintes de production et d’échanges. - Ouvrir le lieu aux artistes et les intégrer à notre quotidien tout en respectant les espaces et les temps de chacun.

Nous avons écoulé le temps de cette expérience, relevé nos manques, nos impréparations, nos satisfactions. Le constat était quand même celui d’avoir pas utilisé l’ensemble de nos compétences et d’avoir à peine effleuré la rencontre des deux univers. Stéphane GINER a été très pris professionnellement et s’est sorti du dispositif non sans avoir créé le blog « module 26 ». Philippe s’est beaucoup investi même s’il a eu des moments de doute, il a tenu bon, envers et contre tous. La première étape de l’exposition au mois de juin et sur la fête de Transition, la concrétisation du projet de livret avec photos choisies avec quelques jeunes, voit le jour. Une sélection de photos sera encadrée et exposée sur les sites. Merci à tous, à des degrés divers dans cette expérience, que nous allons continuer avec d’autres personnes et les leçons apprises.

D’abord l’exposition avec Philippe qui se démenait à offrir à chaque curieux le sens de la visite et les différents éclairages sur ces photos et objets, affiches dans le local de la résidence. Le choc de ce pêle-mêle d’images. D’abord, par son format inhabituel, proche. Plus par les sujets variés, étranges kaléidoscopes des humeurs et des interrogations du photographe. Curieux mélange de ce monde qui vous entoure et que nous ne voyons plus. Ces arrêts sur image fascinants effraient, amorcent des sourires et trouvent un écho en chacun de nous. Le fil de nos vies se tisse de l’enfance à la vieillesse, du simple au sophistiqué, de la vie à la « mort ». Merci l’artiste.

Bernard LABROUE Directeur de Transition.


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a résidence d’artiste est le projet tout simple de faire entrer des artistes dans un foyer où vivent des adolescents, faire venir le dehors à l’intérieur, faire qu’un photographe s’imprègne de l’ambiance d’un lieu de vie et fasse une création qui lui soit à la fois personnelle et qu’elle devienne une expérience collective. Cette première aventure nous donne envie d’en reproduire d’autres, avec d’autres artistes, d’autres médias, d’autres techniques mais aussi d’autres rencontres, d’autres jeunes… Mais la page n’est pas tournée concernant Philippe Lejeaille, on ne se sépare pas de lui comme çà ! Il laisse une trace. Marque les esprits. Par sa présence et par le projet qu’il a mis en place ; Pour preuve ce livret. Il a d’abord créé une exposition superbe faite de photographies, de textes et d’objets suspendus. L’espace de la résidence où il a travaillé pendant quatre mois a été transformé pour la fête de fin d’année de l’institution. Nous avions l’impression de pénétrer dans les méandres d’un labyrinthe ou d’un cerveau. Les photographies sont elles des souvenirs ? Quel est

ART ET PSYCHANALYSE

Philippe Lejeaille me demande d’écrire sur cette création en supposant peut-être que la psychanalyse aurait quelque chose à dire sur l’art. Si elle a beaucoup à dire, elle l’a appris de l’artiste. A la fois parce qu’elle est attentive à la création, à la fonction de la création, mais aussi parce que l’art enseigne sur ce qui ne peut pas se dire avec les mots, l’indicible. C’est également l’objet de la psychanalyse qui pousse notre curiosité et nous engage tel des aventuriers dans la vie ; dont personne n’a le mode d’emploi d’ailleurs. Ce que nous apprend ce projet photographique ne peut pas s’écrire. Ce sur quoi nous pouvons nous avancer, c’est sur son cheminement. L’artiste cherche tel un aventurier en quête. Il se met à la place d’un malade Alzheimer qui enquête sur sa mémoire perdue. Et c’est là l’intérêt de cette histoire, une histoire à trou, des chapitres censurés de l’histoire. Peut-on reconstituer l’histoire ? Peuton se souvenir de tout ? Assurément non. Et ce n’est pas seulement le drame du malade Alzheimer. Les souvenirs se perdent. Et c’est quelque fois par un tri sélectif qui n’est pas sans satisfaire celui qui oublie. Car l’oubli a une fonction. Il permet de mettre ailleurs ce qui est insupportable. L’horreur.

le lien entre l’image et les objets photographiés ? Estce que les mots suffisent à décrire une image? Que reste t’il d’une image ? Comment faire pour qu’elle reste en mémoire ? Autant d’interrogation que cette exposition soulevait, autant dans sa forme, dans la manière qu’il a eu de présenter son travail que dans le fond de sa démarche artistique et de son message. Le photographe a également ouvert des questions par sa présence et par la proposition qu’il a faite aux jeunes vivant dans le foyer d’écrire sur ses photos.

Le livret est la trace d’une rencontre et la preuve qu’il reste toujours une mémoire si l’on transforme l’image en mot et si l’on relie les souvenirs entre eux. Il regroupe des souvenirs épars. Il fait sortir de l’amnésie et de la confusion mentale celui qui ne se retourne pas sur ses pas. Car celui qui ne regarde pas en arrière de temps en temps, celui qui ne se raconte pas l’histoire de sa propre vie et qui ne la partage pas avec les autres s’appauvrit autant qu’il avance. C’est donc un livret à lire à haute voix et à regarder à plusieurs pour que l’histoire se construise encore et encore. Ça n’est pas le moment ?! L’hors-heure. Le retour du passé claque à la porte ou sur la joue sans prévenir. C’est l’heurt, ça fait mal. Le passé rattrape. La trappe s’ouvre et les souvenirs emprisonnés remontent à la surface. Impossible de se sauver, le corps et l’esprit sont bâillonnés. Désorientés ou contraints à s’orienter du réel ? Tel est l’enjeu. L’artiste ici demande à ce que les images prennent un sens, il nous fait réaliser un livret pour que les souvenirs chaotiques prennent forme. Faire le tri dans les images, Mettre dans l’ordre, mettre de l’ordre, reconstituer le puzzle, trouver le fil, prendre les choses par un bout et démêler le vrai du faux. Mais l’artiste surtout nous démontre que c’est le chaos des images qui domine et que l’ordre est à trouver pour chacun et cela pour faire histoire. Des images sur les mots, des mots sur les images et de l’ordre dans le chaos. Sa démarche est faite de petits bouts, de souvenirs collectés à droite à gauche comme le malade d’Alzheimer qui ne peut lier ensemble deux souvenirs car sa mémoire échappe à s’inscrire dans le lien avec ses proches. Le drame de ne plus pouvoir parler, de ne plus pouvoir penser. Comment l’aider à se souvenir ? Tel est le projet.

Vincent LADADE - Psychologue.


M

athias Duclos, Cléa Lovin, Sophie Piau-Mateos, Valentine Plard et Sandy Vincent, éducateurs spécialisés en formation (au sein du CRFMS Erasme) ont réalisé un stage à la MECS Transition début 2015 ayant pour thème “Partenariat et Réseaux”. Dans ce cadre là, j’ai été invité à intervenir pour apporter mon témoignage sur la résidence d’artiste lors d’une réunion de discussions au sujet de la place de la culture dans l’accompagnement éducatif. Etaient présents différents acteurs et professionnels du champ social et du domaine culturel. 5 questions m’ont été posées dont voici le résumé : Pourquoi avoir voulu participer à cette résidence ? Pour le plaisir. Pour la découverte de ce profil de jeunes, afin de mieux comprendre les adultes que l’on croise. Pour expérimenter le principe de résidence artistique. * La découverte de l’autre est assez récurrente dans l’activité de photographe. Ce métier est un passeport/sésame pour découvrir et s’enrichir de nouveaux univers, avec toujours l’assurance que c’est temporaire. Quelle idée vous faisiez-vous de ce travail avec les jeunes ? Aucune. Je partais dans l’inconnu, et même avec une vision quelque peu utopique juste avant l’atelier d’écriture. * Il est naturel également de parler de l’appréhension qui a précédé l’installation à Jules-Julien, la peur de ne pas savoir comment réagir en fonction de comportements hypothétiquement forts, n’ayant jamais travaillé dans le social. Comment avez-vous réussi à sensibiliser les jeunes ? Créer du lien ? En restant ouvert. C’est l’attitude que nous adoptons tous en étant plongé dans un lieu inconnu, lors d’un changement de ville, lors de la perte de repères. On est à l’affut, on signifie une certaine disponibilité, on favorise les opportunités et les possibilités de s’adapter plus rapidement. J’ai laissé la porte ouverte, et les jeunes vivre leur vie, parler sans systématiquement poser de questions. Laissé ceux qui avaient envie de s’asseoir sur le canapé sans remplir obligatoirement l’espace de paroles. Le silence est aussi un lien. Nous avons aussi partagé des moments comme l’atelier vélo avec Simon. Des moments d’échanges où partager des notions de bricolage et se remonter les manches en jardinant démontre que nous sommes semblables. Aujourd’hui, l’expérience étant dépassée, je ne crois pas me tromper en disant que chaque participant est venu se creuser les méninges et a su finaliser sa production, pour moi, et pas pour le projet en soi. Cela reste une rencontre. En tant qu’artiste, le fait d’être immergé dans un lieu de vie a t-il eu un impact sur votre création ? Sur ma vie oui, sur ma création non, sur cette création oui. De vrais liens se sont créés, il y a eu des rencontres et de l’amitié. Je suis conscient que c’est pour un temps très court, que nos chemins ont plus de chance de ne pas se recroiser. Toute la vie est faite ainsi, ici c’est simplement plus prévisible. Mais cela n’empêche pas d’avoir un impact et en cela c’est déjà essentiel sinon suffisant. L’impact sur cette création résulte de l’effet de 2 paramètres : la particularité de chaque jeune ayant des vécus et des cultures variés, et l’intensité de réponse à mes actions. Le choix des photographies s’est avéré, de par le premier paramètre, devenir un casse-tête pour réussir à s’adresser à tous qui était un objectif principal.


Pour rendre réceptif, j’ai dû, au fur et à mesure, changer de formule, de méthode d’approche ou de communication. En cela la forme finale du projet s’est certainement densifiée. Enfin et surtout, cette création n’aurait jamais vu le jour sans cette opportunité. C’était une idée en l’air plus ou moins lointaine, comme d’autres déjà oubliées. Pour un autre public, je n’aurai pas inventé une création sous forme de jeu. * En fait d’immersion il s’agit plutôt d’un bain de pied…les jeunes sont en cours en journée et le mercredi après-midi ont leurs activités sportives ou autres. J’ai compensé cela par des visites aux studio de St-Denis, où les plus âgés ont des emplois du temps différents. Présentation de la création effectuée avec les jeunes Cinq jeunes : Cecilia, Haïtem, Gabriel, Jérémie et Sikou. Globalement on peut dire que chacun a eu sa méthode et son tempo. Gabriel a produit son texte en 10 minutes au premier atelier, démontrant rapidité, efficacité et son aisance. Sikou a fait trois histoire en 1h30, la troisième et dernière étant la plus riche avec le nombre le plus réduit d’images. Ce qui est une belle performance, tenir l’effort et la concentration sur une durée aussi longue malgré une maitrise pas encore totale de la langue française. Il est revenu sur son travail une quinzaine de jours après pour y ajouter des détails comme des prénoms. Jérémie à longuement travaillé sur 2 après-midi seul, pour parfaire un long texte. C’est cette fois un choix de se plonger longuement dans l’exercice apprécié, au point de le faire durer. Et Haïtem à qui l’on doit la finalisation de ce projet, a promptement commencé mais terminé son histoire grâce à Sandrine (educ) 2 mois plus tard. Sa démarche révèle que c’est possible, envers et malgré les soucis, mais que ceux-ci sont à prendre en compte. La finalisation n’en est que plus glorieuse et l’investissement de l’équipe éducatrice et plus particulièrement ici de Sandrine est indispensable et notable. Enfin Cécilia l’a réalisé seule, directement sur son smartphone. Cette approche est tout aussi instructive. C’est la version nomade de la réflexion, le smartphone est synonyme de toujours avec soi et disponible pour poser ses idées où que l’on soit. Il n’y a eu dans les consignes, aucune limite ni d’obligation posées. On peut apprécier le caractère souvent autobiographique des productions. Le jeu de mots du titre d’Haïtem est intéressant comme la boucle de Gabriel entre les 3 premières et trois dernières images utilisées à l’envers. Il y a soit la lecture simple d’une image cela donne de la description, soit l’utilisation de ce qu’elle symbolise, cristallise, évoque. Cela varie selon les auteurs. -

C

ar, il ne faut pas se tromper malgré les différents artifices (production d’une installation, livret, aspect photographique du projet ou production d’un épais catalogue comportant de nombreux documents en guise de dissection du projet) sans les histoires des jeunes, il n’y avait plus de projet car cela en était le seul objectif. La disposition volontaire (intentionnelle) au « cœur » du catalogue en est l’affirmation. Le projet prend vie au travers de leurs créations, elles en sont le pouls qui anime l’idée, avec ce petit peu de leur vie partagée qu’ils ont insufflé de leur inspiration.


DE L’IDÉE À L’OBJET Le point de départ. L’amnésie, forme de tabula rasa, est-elle paradoxalement une clé du bonheur en libérant de l’inhibition des souvenirs accumulés ? Cette interrogation, il y a plusieurs années, est devenue une des bases de la construction de ce projet. La seconde vient du constat que finalement bon nombre de photographes produisent (et présentent) des images très semblables. Seul le discours change et valide la démarche. Quels textes imaginer alors pour ma production ? La dernière base de ce projet est mon goût pour les combinaisons visuelles, diptyques ou autres, multiplications et imbrications de sens ou d’idées. Thème et processus du jeu. En fait d’amnésie, l’oubli fait partie du processus de mémorisation. Une petite partie seulement des choses est retenue et stockée. Nous reconstruisons à chaque remémoration. Les notions de puzzle et d’altération sont ainsi abordées. Des études ont démontré comment il est possible de s’appuyer sur cette faille pour créer ou implanter de faux souvenirs. L’importance de l’autre. D’abord la nécessité d’être en retrait : ce n’est pas une exposition de photographies ou la démonstration d’un photographe, ce n’est pas sériel, les qualités et les origines des clichés sont trop hétéroclites. Non, les photographies redeviennent des images, celles que l’on trouve, découvre, collectionne, épingle, imagine, et qui nous accompagnent (mémoire visuelle). L’acte de création : digérer et régurgiter ce que l’on a absorbé. Mon objectif a été de proposer aux jeunes de réellement créer. Non pas d’être le simple spectateur d’une construction, mais d’être actif, d’en faire partie intégrante.Le choix de concevoir avec des sources populaires ou familières comme Wikipédia, ou de faire référence à des films blockbusters, allait dans ce sens,­leur prouver qu’ils étaient également capables de faire ce que j’avais imaginé. La notion de Temps. Cette notion est importante pour le photographe. L’acte photographique est déjà en soi une mémorisation, où l’on fixe l’instant et où l’on crée un référent. Le temps de pose qui y est lié est essentiel. William Klein démontre dans Contacts (1986) que les clichés connus d’un grand photographe ne représentent, une fois les temps de pose additionnés, que 2 secondes de sa vie.


La forme fait sens. Le recours à l’utilisation des cadres Polaroid a deux origines. Tout d’abord, résoudre une contrainte. Il était nécessaire de lisser les photographies ayant des styles et des rendus différents (instantané, esthétique, artistique) tout en offrant une proposition variée et surprenante d’une image à l’autre tant les thèmes sont différents. L’artifice du Polaroid s’est finalement imposé comme filtre/masque. Ensuite, il se justifie car il est synonyme d’objet témoin en lien et en contact direct avec l’évènement. Il devient alors le témoignage, voire la preuve, d’une présence ici et là de l’auteur. Le film Memento dont je pris plus tard connaissance me conforta dans cette voie. Le Polaroid a imposé de fait le format carré (ce qui est fixe et cartésien), agréable et équilibré qui s’oppose ou répond aux disques, ronds, sphères et bulles qui renvoie à l’aspect plus conceptuel du projet. Notion d’agréable et de bonheur. L’objectif final était d’avoir des histoires divertissantes, mais ce n’est pas exactement le cas. Les expériences négatives laissent une empreinte bien plus forte dans notre mémoire que les instants de plaisir. Cette fugacité explique peut-être l’envie de les reproduire si souvent (addictions diverses). Aujourd’hui on sait qu’il est possible d’effacer l’empreinte négative des souvenirs via un médicament, le Métyrapone, qui bloque la production de cortisol, l’hormone liée au stress. Le principe du jeu réside dans la subjectivité de chacun. J’ai cherché à trouver le plus petit dénominateur commun.

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// KALEIDOSCOPE Dans la mesure où il possède à la fois un nombre fini d’éléments dans un espace fini (clos) et où il autorise pourtant un nombre indéfini de combinaisons, il donne une illustration concrète, symbolique, de la façon dont on peut créer quelque chose de nouveau par un simple réagencement de ce qui existait déjà auparavant. Il donne ainsi une figure réconciliant les termes apparemment opposés de la permanence et du changement, de l’identité et de la différence. Suite rapide d’impressions, de sensations vives et variées. Ce ne sont pas les éléments qui font le tout, mais la forme que prend leur combinaison. Schopenhauer utilise l’image du kaléidoscope pour montrer la forme de métempsycose qui caractérise l’histoire : les plantes, animaux, hommes et peuples meurent et naissent sans cesse, et sous un changement apparemment incessant, ce sont toujours les mêmes figures qui réapparaissent : les individus meurent, l’espèce vit toujours. Ce qui permet de faire signe vers un optimisme sous ce pessimisme fondamental : « l’espèce, voilà ce qui vit toujours, et, dans la conscience de l’immutabilité de l’espèce et de leur identité avec elle, les individus existent confiants et joyeux ». « L’histoire a beau prétendre nous raconter toujours du nouveau, elle est comme le kaléidoscope : chaque tour nous présente une configuration nouvelle, et cependant ce sont, à dire vrai, les mêmes éléments qui passent toujours sous nos yeux. » — Le monde comme volonté et comme représentation, chapitre XL.

- Wikipédia.


K Le projet s’appelait initialement Puzzle, indiquant l’intention : l’autre est la pièce finale et manquante pour aboutir l’œuvre. Toutefois Kaléidoscope dont la définition évoque bien plus les combinaisons possibles de ce jeu (sa caractérisque initiale), justifie son nom. L’autre est un des trois miroirs (la subjectivité), j’en suis un en ma qualité d’auteur (intention) et le dernier sera le lecteur (la réflexion).

Les autres sont notre KALEIDOSCOPE. Notre identité est composée de facettes mobiles. A la fois récepteur et émetteur, éponge des comportements, où l’effet miroir comportemental et le mimétisme sont en constant mouvement.

Ce projet prend vie au travers de vos créations, elles en sont le pouls qui anime l’idée, avec ce petit peu de vie partagée et insufflé de votre inspiration.


« La prétendue évidence du sentir n’est

pas fondée sur un témoignage de la conscience, mais sur le préjugé du monde. Nous croyons bien savoir ce que c’est que “ voir “, “ entendre “, “ sentir “, parce que depuis longtemps la perception nous a donné des objets colorés ou sonores. Quand nous voulons l’analyser, nous transportons ces objets dans la conscience. Nous commettons ce que les psychologues appellent l’ “ expérience error “, c’est à dire que nous supposons d’emblée dans notre conscience des choses ce que nous savons êtres dans les choses. Nous faisons de la perception avec du perçu. Et comme le perçu lui-même n’est évidemment accessible qu’à travers la perception, nous ne comprenons finalement ni l’un ni l’autre. Nous sommes pris dans le monde et nous n’arrivons pas à nous en détacher pour passer à la conscience du monde. »

La Phénoménologie de la perception. Maurice Merleau-Ponty


Renvoi Miroirique « C’est avant tout le regardeur qui fait le tableau : Les oeuvres d’art fonctionnent uniquement par renvoi miroirique. » Marcel Duchamp Polysémie « Le contexte de diffusion influe sur l’image qui est polysémique. En effet, elle peut avoir des sens différents selon le contexte dans lequel on la rencontre, le titre qu’on lui donne ou même le lieu dans lequel elle est exposée. Ainsi, une légende donnée à l’image va orienter notre lecture et peut-être même la détourner de son sens original. Un recadrage peut aussi modifier le sens ou le renforcer ou encore faire ‘‘ mentir ‘‘ l’image. D’autre part, une image n’aura pas le même statut si elle se retrouve dans le cadre d’une exposition, d’une couverture de livre, d’un magazine ou d’un journal...» L’Atelier des Photographes, Sébastien CALVET, Arles 2015.

« Une analogie est un processus de pensée

par lequel on remarque une similitude de forme entre deux choses, par ailleurs de différentes natures ou classes. Dans le discours, une analogie explicite est une comparaison, tandis qu’une analogie implicite est une métaphore. La comparaison entre 2 routes tortueuses n’est pas une analogie, car ce sont 2 objets de même type : c’est une ressemblance. En revanche, dire qu’une route serpente est une analogie : on repère ici la similitude entre deux choses de type différent. » - Wikipédia


« Une forme n’est jamais quelque chose d’abstrait, elle est toujours le signe de quelque chose. C’est toujours un homme, un oiseau ou quelque chose d’autre. » Joan Miró

J

T L’interprétation des images : le cerveau cherche toujours à trouver une correspondance. C’est le principe du test de Rorschach.

Mallorca le 25 octobre 2010 à 17h46’40” # Nuage cerveau-méduse.


http://analogiesnumeriques.tumblr.com/

Cette page Tumblr regroupe les images de la série Le Labyrinthe de Sisyphe soumises au traitement de Google Image. C’est mon dernier jeu, une démonstration absurde où je propose au numérique de faire une analogi(qu)e. En proposant chaque image au moteur de recherche, on lui demande d’en trouver les différentes occurrences. Le résultat d’images similaires peut tout autant être intéressant, étrange ou totalement hors sujet. C’est une façon pour moi de montrer encore la potentielle variation entre le message envoyé et l’interprétation visuelle. Chacun suivant son âge, son expérience, ses codes, ses limites, son envie, recevra l’intention avec une attention particulière voire inattendue. C’est le public qui fait une œuvre, animée par l’échange qui se produit, entre l’objet et le spectateur. Il en va de même dans les rapports sociaux : la complexité des paramètres de nos identités, de surcroît évoluant dans le temps, font que nous avons tous des divergences d’opinions. Cette multiplicité de points de vue est notre richesse.


4 L’outil


La belle histoire

_______________________ CARNET D’EXPLORATION

PROJET PUZZLE MODULE 26


PERSISTANCE RÉTINIENNE PERSISTANCE RÉTINIENNE PERSISTANCE RÉTINIENNE


TROISIEME SEXE Enfant, j’ai découvert l’image lenticulaire avec un dessert lacté, la roche aux fées. 2 images en une, ou plus (le GIF sans l’ordinateur !). Mais l’entre-deux, la limite de la surimpression, peut être intéressant. Cette image interstitielle, composée de ce troisième œil dans ce mix de deux visages de genres différents, m’a semblé bien particulière de par son essence religieuse, et assez à propos suite aux derniers faits de société. J’ai appliqué un traitement de façon à simuler du maquillage, produire une mascarade. Depuis la nuit des temps, l’être humain essaie de conjurer son angoisse de la mort et des espaces infinis en expliquant le monde qui l’entoure par les actions des esprits et des dieux. # Égalité des droits, liberté de pensée, obscurantisme, masque, maquillage, mascarade, travesti(r).

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MAMIE BARBIE C’est un portrait volé, un portrait de rue. Il y a à la fois de la Barbie avec cette perruque très synthétique et ce visage de mamie, l’œil peint comme un hiéroglyphe. Tout en elle est contraste, cette peau qui tombe et cette perruque à l’aspect aussi artificiel que celui d’une poupée, le maquillage et la grimace enfantine. # barbie vieille, perruque, grimace, clownesque, oxymore, sympathie, oudjat.


CHAT NOIR Cette photographie a été prise à la résidence. Elle fait partie des nombreux objets que je souhaitais photographier sur fond blanc, soit pour les immortaliser, soit pour composer de nouvelles images. Cette vieille peluche, usée et quarantenaire se déplace de cave en cave depuis quelques années dans un carton avec d’autres. Elle fait partie du très petit nombre d’objets de mon enfance, nombre encore plus réduit si je ne considère que les jouets. La peluche a un poil assez ras et ce n’est pas un objet particulièrement mou, elle ne change pas de forme, comme si ce n’était qu’un objet décoratif ou un animal empaillé. Autant je l’adorais, autant chaque soir elle me faisait peur avec son regard fixe. Regard vert qui réapparaissait sous forme de phosphènes, une fois les yeux clos. # Peluche, usé, chat noir, peur, regard fixe, nuit, cauchemar, peur enfantine, phosphène, épié.


SUIVRE SA ROUTE Fixer l’ordinaire à travers les petits détails plus particuliers de la vie. Ceux qui sont insignifiants et anodins pour qui ne sait pas respirer, inspirer, contempler. Une gêne légère à l’œil, un tracé déjà dessiné finement, la route à suivre. # Œil, regard, route, direction, carte routière, ailleurs, invitation à suivre.

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CICATRICE Cette photographie a été prise quelques jours après la naissance de cet enfant. J’ai choisi ce cadrage pour axer le regard sur le nombril en devenir : évoquer la toute première cicatrice de l’être humain. Cette image évoque donc la naissance en général, la cicatrice, la séparation. # Cicatrice, naissance, lien, séparation, marque, douleur, souvenir, chéloïde, mémoire.


CAR CRASH Cette photographie a été prise dans une casse auto. Je m’y étais déplacé pour finaliser une série composée de diptyques : un bouquet pris en photo sur la route en mémoire des morts, et un cliché de voiture accidentée. J’ai choisi un cadrage serré dans la matière et la tôle froissée. On n’associe pas particulièrement d’odeur à une image sauf si elle rappelle du vécu. Il peut donc manquer ici l’odeur de brûlé, de carbonisé, celle du bitume chaud, de l’huile de vidange, du carburant, du fer pour amplifier l’impression. # Rouge, crash, accident, voiture, carbonisé, brûlé, épave, drame, fatal, choc, fracas.


COCHON Cette photographie est issue d’un reportage sur la tuerie du cochon, encore pratiquée dans les campagnes, une tradition rurale en voie de disparition. La veille j’appréhendais l’évènement, ne sachant pas à quoi m’attendre, ni quel accueil on me ferait. On entend souvent dire que l’on n’oublie pas le cri de la bête. En réalité, l’impression que donnent mes images est bien plus forte que ce que j’ai vécu. J’ai fini ce reportage par cette image, lorsqu’après avoir voulu photographier la tête de l’animal, Robert m’a demandé d’attendre pour la rincer. Le temps de tourner le dos et observer une autre action, il me héla en se marrant. C’est ainsi finalement que j’ai tiré le portrait du tueur en gardant son anonymat et pris mon premier double portrait ! Les expressions “faire ou avoir une tête de cochon” me viennent naturellement à l’esprit. Cette série me permet de faire une parabole sur un texte subtil, La Seiche de Maryline Desbiolles où l’auteure éclaire poétiquement un point de vue : manger et cuisiner la mort. « Manger la mort, la faire sienne, la mastiquer lentement, la goûter, s’en pourlécher les babines, manger la mort après qu’on lui a coupé la tête ... » comme pour l’exorciser chaque fois... • La Seiche, Maryline Desbiolles , édition du Seuil - ISBN: 978-2020331630 # Tête de cochon, masque, tête coupée, manger, tuer.

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CONTE Ambiance d’hiver. Du brouillard, un soleil comme une lune, et ces arbres qui semblent manger le ciel. Il y a quelque chose d’irréel, du domaine des contes. # Hiver, conte, blafard, imminent(ce), étrange, loup.


CORPS A CORPS Cette image est le résultat d’un montage de plusieurs photographies. Toujours faciné par le corps, cette déconstruction évoque la maternité. Plutôt que d’inspiration, il serait plus juste de parler de choix guidés par la mémoire. L’Origine du monde de Courbet, et des images de malformés suite aux catastrophes industrielles ou nucléaires, ou encore suite à l’effet tératogène de l’agent orange ou de médicaments comme la thalidomide, sont remontées à la surface pour ces corps mêlés où apparaissent des membres tronqués et une main sur un sein. Ici la mutilation est conçue, pas issue d’une soustraction. L’ image qui me revient fortement est celle de Tomoko Uemura dans son bain, prise à Minamata en 1971 au Japon par Eugène Smith. # Maternité, malformation, peau, corps, intégrité, mêlés, monstruosité, tératogenèse, agent orange, thalidomide.


UN VIEUX COUPLE Encore de la street photographie, en Espagne. Ce sont deux vieilles dames, et pourtant on dirait un vieux couple. Si le tirage est trop petit, notre cerveau croit voir une femme et un homme. Cela est d’abord dû au premier détail qui m’a attiré, la forme de calvitie du personnage situé à droite. Elle est plus habituellement vue sur le crâne d’un homme. Vient ensuite son code vestimentaire, un pull à carreaux et un pantalon gris qui s’opposent à la robe à fleurs. Cependant cette personne porte des chaussures féminines, des boucles d’oreille, un collier et un bracelet, un trait de bleu aux paupières, et un sac à main, vraisemblablement le sien puisque la dame rousse tient une bourse noire. Ce cliché reste important pour moi dans d’autres détails sur la personne à gauche : le barbouillage du rouge à lèvres presque clownesque, la peau et le muscle qui pendent du bras s’appuyant sur la canne, la déformation des mains et des chevilles. # Vieux couple, deux femmes, vieillesse.


DÉTENTE Cette photographie a été prise comme si j’étais allongé dans mon jardin. J’ai photographié les feuillages du haut avec une faible profondeur de champ de façon à mieux rendre l’impression d’enveloppement. Ici, les yeux au ciel, le moment est propice à la détente. Une brise vient caresser le feuillage dans un bruissement délicat. Le merle noir libère ses vocalises. # Arbre, ombrages, feuillage, bien-être, tranquillité, abri, rêver, sieste, jardin, bois, bruissement, inspiration, plénitude.


DEUIL Cette photographie a été prise lors d’un repas de famille. J’ai été happé par ce détail explicite sur cette main âgée. J’ai scruté cette main, ses veines si présentes et cette peau affinée à devenir transparente. On peut voir beaucoup d’une personne en observant déjà ses mains. Les mains font, elles sont l’action. Deux anneaux sur le même annulaire, le deuil de l’époux ou l’épouse. # Deuil, vieillesse, main, continuer, souvenir, mémoire, solitude.


ELLES En guise de photographie, cette fois le scan de deux couvertures de livre. Le premier tronqué avec deux hommes dessinés, l’un agenouillé près de l’autre allongé, est un manuel du secouriste civil de 1968. L’autre livre traite de la psychologie des jeunes filles en 1963, avec entre autre comme chapitres : la jeune fille cherche à être heureuse, le drame d’être femme, appel de la race ou destin personnel ... Déjà le titre à lui seul est éloquent où QUE, faisant référence à des objets, est utilisé à la place de QUI. # Moeurs, société, femmes, droits, lutte, égalité.


GÉNÉRATION Cette photographie a été prise à la récréation dans une cour de maternelle. J’ai passé 8 jours dans cet établissement et ce cliché est à l’initiative de l’enfant qui me montre fièrement son tatouage temporaire provenant d’un bonbon. J’ai cadré serré, et pris la photo rapidement par réflexe, dans ce flot de bruits, de cris et de course dans tous les sens que sont chaques récréations. C’est bien après, sur l’écran de l’ordinateur que j’ai lu le texte sur son motif de nuage noir. « De l’air ! », comme le cri écologique d’une nouvelle génération… # Slogan, cri, écologie, enfant, mains, tatouage, chewing-gum, cour de récréation, avenir, génération, pollution.


GRIBOUILLE Une autre maternité. Une photo au smartphone, pour fixer ce résultat de dessin et de découpage de deux soeurs (2 ans et demi et 5 ans) avec leur grand-mère, exposé sur le réfrigérateur. J’ai trouvé cette interprétation d’une étrange justesse, à ce petit détail de triangle rouge, fixant les enfants à la place du ventre, à la fois sexe stylisé et évocation de la menstruation. # Maternité, collage, gribouillage.


GUERRE Cette photographie a été prise à Belchite. Il s’agit d’un village espagnol complétement détruit durant la guerre d’Espagne et conservé en l’état. Cette pièce est la seule d’une habitation où je me suis risqué. Les bâtiments largement détruits, continuent d’être rongés par le temps qui s’écoule. Il n’y a pas de politique ni de dispositif de conservation à proprement parler, pour l’instant. Cela pourrait être ailleurs, à un autre moment, aujourd’hui, demain. Un endroit où l’on vivait, où l’on s’est tapi peut-être pour tenir une ligne de front. C’est l’image de la maison comme symbole de famille et de protection. # Maison, guerre, exil, asile, mort, perforé, éventré, effondré, destruction, conflit, béant.


HISTORIQUE Un moment historique. Ici je n’ai fait que reproduire une image découpée dans un magazine. Une image qui me fait rêver depuis que je suis enfant, ou plutôt sa déclinaison en noir et blanc avec quelques autres photographies d’époque de l’évènement. 1969, j’aurais aimé vivre ce moment en direct. Certes j’ai connu le 11 septembre qui a eu un retentissement mondial, mais le premier pas sur la Lune est un évènement positif. Depuis que l’Homme doué de conscience vit sur cette planète, il n’a cessé de voir, de s’interroger, de se sentir observé (comme par l’œil de Caïn) par la Lune ou d’en être effrayé. C’est en réponse à ces millions d’années d’interrogation, que l’instant, réel ou pas, a été historique (puisqu’il a été vécu comme tel et absorbé comme souvenir). Cet évènement a été vécu et a marqué des millions de personnes, ce qui lui donne corps. On peut y voir aussi l’autoportrait de Neil Armstrong par le reflet dans la visière dorée. # Historique, mondial, mémoire collective, rêve, inconscient collectif, projection, zététique.

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HIVER Il fait froid dehors, mais cette buée prouve qu’il fait tout de même meilleur dedans. Des gouttelettes se rassemblent et dégoulinent, il y a comme de la mélancolie avec cette lumière froide, blafarde. Et puis cette humidité avec ce froid dehors cela fait frissoner. C’est l’hiver, et rien dehors n’évoque la vie ou le mouvement. Comme des larmes qui coulent sur un visage. # Froid, hiver, vitrage, glacé, buée, dessiner du doigt, enfance, gouttes, coule, glisse, temps qui s’écoule.


HORIZON Cette photographie a été prise à Mallorca*. Il y a toujours quelque chose d’attirant à regarder la mer ou l’océan. Chaque fois que je suis face à cette surface d’eau sans fin à en devenir l’horizon, je prends un cliché. J’ai choisi un cadrage emplissant l’image tout en laissant apparaître ce qui pourrait être l’horizontale originelle pour notre espèce. Cette image est indissociable de l’odeur d’iode et du bruit incessant des vagues. Faisant l’éponge, notamment des faits d’actualité, j’associe aussi cette image au voyage, celui dont dépend la survie ou la mort de ceux qui fuient leur pays. Regarder l’horizon, c’est regarder loin devant soi, imaginer l’avenir, formuler l’espoir. Ici il est mince. La mer est longue, presque sans fin. La bande du haut, l’arrivée est terriblement étroite et réduite, proportionnelle à l’espoir (succès) de terminer le voyage. * Pourquoi toujours vouloir franciser les noms de pays ou de villes étrangers ?! # Horizon, eau, vie, bleu, flotter, poisson, mouvement perpétuel, onde, hypnotique, sel, loin, infini, contemplation, s’abandonner, noyade, voyage, boat-people, exil, vide, odysée, ailleurs, espoir.


COUP(s) La marque d’un coup violent, la trace sous la peau, un hématome. Cette photographie a été choisie pour figurer dans cette série pour évoquer tous types de maltraitance, et particulièrement celles restées muettes, ou banalisées. Une contribution à la Journée du 25 novembre. # Coup, violence, maltraitance, douleur, NON, cri.


INCENDIE L’incendie d’une maison la nuit du 28 au 29 septembre 2013. J’ai attendu le 3 octobre pour photographier l’impact de cet incendie. Quelles traces pouvait-il rester d’une famille prise ainsi par surprise en pleine nuit ? Quel constat est-il possible de faire lorsque l’on a tout perdu, vêtements, affaires personnelles, objets, souvenirs, papiers administratifs, données et photos sur ordinateur... ? Et puis la montre, objet personnel, et transmissible, symbole fort du temps arrêté, comme celles d’Hiroshima ou de Nagasaki. On imagine en la voyant ce qu’un corps la portant aurait pu subir. # Tout perdre, incendie, traces, introspection, empathie.

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CLÉS La clé, les clefs, avec de vieux portes-clés, simplement des numéros rouges, un aspect fortement vieilli. Envie d’éveiller la curiosité. Que peut-il se cacher derrière ces simples chiffres ? Qu’ouvrent-elles ? Pour découvrir quoi ? La clé, c’est aussi la solution, la réponse. # Ouvrir, clé, entrée, curiosité.


LA PIÈCE MANQUANTE Une pièce de puzzle, perdue au milieu de nulle part. En tout cas au sol, dehors, et la végétation ne ressemble pas à la pelouse d’une habitation. C’est au bord de la route, en Camargue que se trouve ce fragment d’image, dont nous n’aurons pas plus d’indices puisque nous ne voyons que son envers. Une chose est certaine, sans cette pièce le jeu ne vaut plus rien. # Puzzle, pièce, perdu(e), impossible, manquante.


LE PLACARD JARDIN Cette photographie a été prise à l’intérieur d’une vieille maison à Beaumont de Lomagne (82500). Une maison encore dans son « jus ». A la recherche de vieux papiers-peints, j’ai atterri dans ce placard, sorte de couloir-dressing faisant partie d’une chambre. # Ancien, vieux, fleurs, placard, jardin secret, charme, histoire, usé, Fauveau.


LIBERTÉ Des murs, des barbelés, tout évoque l’enfermement. Pourtant il s’agit d’une prise de vue faite dans une rue de Lyon. Nous sommes donc bien à l’extérieur. # Liberté, enfermement, prison, camps.


ABSENCE Des draps défaits, on reconnait que c’est un lit public au fil rouge sur les draps, comme ceux de la SNCF. C’est un lit d’hôpital. Il est vide et défait, il marque l’absence. # Lit, mort, absence, public.


LUEUR Cette photographie a été prise en Corse. C’est une petite chapelle en pierre. Il y a cette sensation d’enfermement, d’enterrement presque, qui contraste avec cette ouverture lumineuse. A l’extérieur, baignant dans une lueur aveuglante, une végétation luxuriante. # Tunnel, lumière, recueil, espoir, tombe.


POUR L’INSTANT, TOUT VA BIEN... On ne peut pas être plus clair avec cette image pour évoquer la maladie, et inspirer la gêne avec ce cathéter à la carotide. Photographie faite au smartphone, à Marseille. # Maladie, tout peut basculer, notion de temps modifiée.


LE COSMONAUTE L’église de San Blas est un bâtiment roman du XIIIe siècle situé à Anento, en Espagne. A l’intérieur, on peut découvrir le retable gothique de Maître Blasco de Grañén dont est issue cette photographie de détail. Le chœur est couvert de plâtre, la chaire mudejar est l’une des rares de ce genre à être encore préservée. # Cosmonaute, scaphandrier, regard, émotion, mélancolie.


MASKS Des masques en caoutchouc, tous les mêmes. Les visages du mannequin pour apprendre les premiers gestes de secours. Nous sommes dans une caserne de pompiers. L’histoire de ce visage est incroyable. C’est bien un moulage à l’origine. Ma mémoire m’envoie Mondwest, un film avec Yul Brynner de 1973, une histoire de robots à l’apparence humaine. Tous ces visages pêle-mêle, des apparences vierges, inexpressives, ou bien une palette d’expressions possibles. Paraitre et horreur. # Visages découpés, masques, paraitre, chirurgie esthétique.

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MASQUE Une tête de mort, une relique, un objet magique, là encore il s’agit d’évoquer un autre monde. Celui-ci est issu du peuple Asmat vivant en Papouasie où le pouvoir du défunt et du coupeur de tête se réunissaient dans le crâne trophée. Lien invisible entre les vivants et les morts, il est porté comme un ornement sur la poitrine ou sur le dos comme une passerelle physique et spirituelle avec les puissants guerriers d’antan. Son caractère sacré est souligné par l’ornement : plumes de cacatoès, graines larmes de job, fibres naturelles et résine dammar. Dans de nombreuses sociétés primitives, le crâne est le siège de la puissance et de l’âme de l’individu. Elles y distinguent la matérialité du corps et l’intemporalité de l’esprit, et considèrent la tête comme une partie détachable. Les rituels de conservation du crâne permettent à l’entourage du défunt d’assurer sa survivance au sein de la nature. Certains squelettes préhistoriques portant des traces de séparation volontaire du crâne démontrent le caractère ancestral de ce rite. # Crâne, relique, mort, croyance, rituels, vaudou, sorcellerie, païens, culte.


AUTODAFÉ Une histoire qui se consume. « Là où on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes. » Heinrich Heine, Almansor. Un homme qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle. # autodafé, obscurantisme, réflexe, savoir, transmission, Fahrenheit 451, papillon.


PULLULATION Encore du visqueux, un rouge puissant. Cela peut être viscéral, vivant, des oeufs. # Rouge sang, oeufs, graines, passiflore.


MIROIR Le miroir, la pièce essentielle de l’installation, en rapport avec la pièce de puzzle et les clés. Vous, l’autre, la pièce manquante au projet, l’autre sans qui le projet n’est pas. C’est la réponse de l’autre, son interprétation qui donnera vie et corps au projet, sinon ce n’est qu’un amas d’images et de mots. Le miroir c’est aussi le temps présent en direct, le présent absolu, en cours. # Vérité, travesti, inversé, abîme, reflet, fenêtre, Orphée, écho, ego, résonance, acouphène, larsen, vide, joker du jeu.

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NOYADE Comme une noyade, un suicide dans cette eau noire et visqueuse, comme du pétrole. Le cygne incarne deux blancheurs, deux lumières ; celle du jour, solaire et mâle ; celle de la nuit, lunaire et femelle. Une autre image de conte. # Eau noire, maculé, cygne, sombre, noir & blanc, plongée dans l’obscur, chant du cygne.


PASSÉ Comme une image d’épinal, la photographie d’un viel album photo trouvé dans une cave. On peut s’égarer à imaginer la vie forcément révolue de cette personne voire de sa famille à travers l’intégralité de l’album. Presque une mise en abyme du projet. Et ce charme de l’ancien, les tirages signés, le portrait dans un ovale en relief. # Imaginer, inconnue, passé, racines, histoire, famille.


PAYSAGE Une centrale nucléaire avec son beau premier plan de verdure. Du bleu et du rose sur les modules extérieurs ! # Nucléaire, couleurs de jouet.


PENSÉES Un instantané dans la rue, où on pourrait voir les pensées d’une foule, des pensées représentées par des produits télévisés. Une métaphore du bourrage de crâne. # Cervelle vide, pouvoir télévisé, monopolisation, prêt-à-penser, propagande subliminale, conditionnement.

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LE SUAIRE / 7.9.73 - 4.3.98 Un simple mouchoir en papier, un bref moment de vie, une relique, une émotion. A la plage, MARIE-PAULE MÜLLER a découvert son Cancer, là d’où viennent les Crabes…

MUTILATION SOUFFLE MÉMOIRE TROIS ANS

SEIN POUMONS CERVEAU MORT

ESPOIR COMBAT OPPOSITION RÉALITÉ

“Nous traversons le présent les yeux bandés…” - Milan Kundera, Risibles Amours. “Derrière elle, d’un coup, le plafond rejoignit le plancher …” - Boris Vian, l’Ecume des jours. “Elle me disait qu’un jour où l’autre elle y arriverait, et tout cela me bouleversait…” - Bret Easton Ellis, Zombies. # Pleurs, larmes, relique, tristesse, chagrin, indélebile.

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APRÈS LA PLUIE Simultanément un ciel noir et bleu : après la pluie vient le beau temps, métaphore de l’ombre qui passe pour les mauvais moments que l’on peut traverser, ou une autre image du verre à moitié plein ou à moitié vide. # Optimisme, pessimisme, beau temps, orage, tempête, ciel noir.


POLLUTION Faire des photographies d’une voiture en roulant offre forcément des images inhabituelles. Des bouts de zones commerciales, des immeubles en bord de voies rapides... et cette enseigne au nom bien à propos surplombée par une usine synonyme de pollution. # Ecologie, enjeu planétaire, la cigale et la fourmi, pollution, basculement.


• Un graffiti pour un message civique, nettoyé. # s’exprimer, droit, graffiti civique.


DORMIR DEHORS Cette image pourrait signifier la crise. Le matelas dehors me fait déjà penser aux laissés pour compte. L’arrivage annoncé de produits surgelés me donne l’impression de pénurie, l’empillement de boîtes identiques comme dans un entrepôt, les messages écrits à la main collés à la vitre et le slogan “ literie en folie “ avec un matelas bas de gamme ne font guère rêver. C’est d’une tristesse consternante. # Crise, rue, basculement, promotions, dehors, exclusion.


PROTHÈSE Nous sommes proches encore du tableau de Courbet et de la maternité. Toutefois cela semble être un objet de plastique, de latex. Un corps tronqué, comme une prothèse ou un accessoire aux tons chair. # prothèses, sexe, abstraction, Hans Bellmer.

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RELIQUES Chez mon dentiste, j’ai photographié la salle d’attente, son cabinet, quelques-uns de ses instruments, et j’ai réalisé quelques autoportraits au cours d’une intervention. Une forme de thérapie certainement. Mais comme il n’en est rien sorti d’essentiel, j’ai pensé à travailler plus directement avec le matériau de base : la dent, un bout de corps. Je suis entré dans une phase de recherche pour une installation. Mais si j’avais souvenir d’une tribu dont les membres entrant dans l’adolescence se faisaient tailler les dents en pointe, la surprise fut réelle de ne rien trouver de conséquent en croyance et symbole à exploiter. # Dent, mutilation, relique, douleur, phobie, gourmandise, sourire, carie, dents de sagesse, vieillesse, âges, «sans-dents», férocité, dentiste, pistolet.


REGARDS Cette photographie a été prise lors de la résidence. Il s’agit d’un rhizome d’iris desséché. Les premiers temps de la résidence ont consisté en l’installation d’un studio photographique, et cela a favorisé la prise de vue d’objets et d’éléments divers et variés, voire insolites. J’ai opté pour un éclairage et un post-traitement contrasté pour mettre en évidence la matière. Cet élément végétal devient sous cet angle plus sculptural. Ainsi suspendu dans l’air, il évoque les mobiles et semble dansant. On peut y reconnaître trois formes d’œil aux cils tentaculaires ou échevelés. Il y a donc 3 regards, celui du haut dans une contemplation, le second fixe et inquisiteur, le dernier à l’envers pouvant évoquer le voyeurisme et la folie. Il y a quelque chose du grigri, de la poupée vaudou, de l’objet de sortilège et de mauvais œil. # Regards, bête, monstre, facettes, œil, folie, voyeur, contemplation, sculpture, écarquiller, voir, Abel & Caïn, peur dans le noir, flotter, marin, vaudoo, grigri, sortilège, effrayant.


LA BELLE HISTOIRE C’est en rendant visite à un artiste que j’ai pu faire ce cliché. Il a eu la générosité de m’ouvrir ses livrets où sont assemblés croquis, aquarelles, coupures de journaux, et des notes. Des années de carnets noirs remplis d’évènements, de pensées, d’art. # une vie racontée, carnets, artiste, personnel, nostalgie, découvrir, rouvrir, Kierzkowski, partager.


ROUKY Cette photographie a été prise lors d’un trajet. Je n’avais pas encore vu de renard. Malgré l’impact, il est beau et la couleur de son pelage est superbe. Même si mon œil a d’abord été attiré, en conduisant, par la grande tâche de sang sur le bitume, j’occulte très rapidement rouge et viscères. Il garde encore comme un élan, du mouvement, de l’éveil avec l’oreille dressée. Toute sa tête est faite de pointes et paraît stylisée pour un dessin animé. Il a l’air tellement doux. Je reste fasciné par cet animal. Je l’imagine en vie alors que j’observe un cadavre. # Peluche, renard, Rox & Rouky, écrasé, viscères, mort, bondissant, élan, route.


LAISSÉ POUR COMPTE Cette photographie a été prise à Lyon, l’été 2013. Il s’agit d’une personne allongée, la tête dépassant de cet abri, brillante sous le soleil déjà brûlant. J’ai fait le choix de le présenter dans son contexte. Une évidence au regard des grilles se situant entre lui et moi, partie intégrante de la prépondérance du quadrillage, implacable dureté de l’urbain. J’ai préféré la couleur pour deux raisons, c’est une photographie actuelle et je ne veux pas laisser en douter avec le noir&blanc. Le noir et blanc n’aurait d’ailleurs pas permis à l’œil de détecter à coup sûr cette tête dans l’image, car elle n’est, et c’est subjectivement voulu, qu’un détail insignifiant dans tout cet ordre presque radical et écrasant. Il pourrait être mort. # Exclusion, enfermé dehors, grille, Sans-abri, ville, prison, abandonné, implacable, quadrillé, écrasant, DAL.


RENCONTRE Se croiser, se frôler, passer à côté. Filer. # Rencontre, se croiser, passer à côté l’un de l’autre, se râter.


JE SUIS ... Me voici dans un endroit nouveau, et je deviens une éponge. Nous arrivons chez un ami, musicien, professeur, passionné d’art, sportif aguerri. En découvrant sa bibliothèque j’imagine un concept simple : la photographie de celle-ci pourrait traduire le portrait d’une personne, son absence en dire tout aussi long. Je démarre donc cette idée là, avec le peu que j’ai pour m’adapter à l’exiguité du lieu, mais rien de mieux qu’une base pour réfléchir et améliorer un nouveau projet. Si les livres sont instructifs, les bibelots ou cadres photos le sont tout autant. “Nous sommes ce que nous lisons et ce que nous lisons nous façonne.” # Savoir, culture, curiosité, construction, possibilités, portrait figuré.

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SOUMISSION Peinture médiévale espagnole prise au musée d’art de Gérone, en Espagne. Ceci est un détail du retable de San Bartolomé qui provient de l’église Santa Eulalia de Cruïlles attribué au Maître de Olot. J’ai été fasciné par cette fabuleuse nuance, entre l’orange et le rosé. Toutefois, au regard des dernières actualités*, cette couleur orange et ce prisonnier décapité trouvent un écho hélas bien trop comtemporain. * note de septembre 2014.

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# Soumission, barbarie.


STRESS Ceci est la vision que j’ai tout le temps de l’examen ou de l’intervention chez mon dentiste. Ce scialytique et ces néons éblouissants. Plus l’anxiété monte et la douleur s’élève, plus je les fixe. Ici on touche au visage, à l’intérieur même, avec des outils, et dans des bruits désagréables bien plus propres à la mécanique. Les yeux rivés au plafond. La bouche ouverte. S’éblouir, les mains posées l’une sur l’autre sur le ventre, entrer en apnée, arrêter le Temps, s’y soustraire, s’éblouir et sortir de son corps, ne plus le ressentir. Être ailleurs. Hypnotisé par les néons et l’œil fixe du scialytique comme l’œil de Caïn. # Torture, calvaire, hypnose, échapper, se soustraire, abstraction.


SURVEILLANCE - 84 Un espace public, armé de caméras. Il y a celles à l’extérieur et celles dans nos intérieurs, nos ordinateurs. Nous vivons un temps charnière, entre celui où l’individu pouvait être anonyme et celui où il livre volontairement toutes ses informations personnelles. L’espace public est de plus en plus envahi de caméras et les logiciels de reconnaissance faciale deviennent effrayants d’efficacité. Ces derniers sont sur FB ou intégrés aux applications d’import de photographies, si ce n’est sur les espaces de stockage en « Cloud ». # Anonyme, fiché, surveillance, numéro 6.

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TEMPUS FUGIT Le passé, le deuil, le temps qui passe, et le souvenir. Temps suspendu, 1/100 de seconde, le 24 juillet 2010 à 10h57m25s aux coordonnées 47.482756, -0.577661. # Inexorable, temps, souvenir, temps équivalent espace (distance).

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TENDRESSE Cette photographie a été prise dans le cadre d’une série sur la chair en macro. Elle plonge dans la pilosité du duvet, la transparence de la peau, la finesse délicate de l’épiderme. # Peau, sensible, tactile, chair de poule, grain de peau, couleur, sensations, contact, chaleur, intime, passion, chair, frisson.


TRACE Cette photographie a été prise à Bonifaccio. Il s’agit d’un grand mur où se situent quelques bancs en pierre en bord de mer. C’est un passage vers un escalier. J’y ai photographié en gros plan la maison en 2009, un motif que je trouvais pour la première fois dans les graffitis que je pouvais rencontrer. A mon retour en Corse en 2012, j’ai fait ce cliché-ci. J’ai choisi un traitement noir&blanc contrasté pour faire ressortir la gravure dans la matière. Cela donne aussi quelque peu l’impression d’un tableau noir laissé à l’expression libre. Cela n’est pas sans rappeler les fameuses photographies de Brassaï des murs de Paris entre 1930 et 1950. Mais c’est aussi un rendu censé évoquer la pierre de rosette. Cela pourrait être dans une cave, dans une grotte, une cellule. Presque une île se dessine à gauche de la maison par le crépi tombé par plaques. Une maison, des prénoms, quelques cœurs. Que d’individus, et cette envie déjà préhistorique de vouloir laisser sa trace… # Maison, prénoms, passage, île, carte, mer, cellule, grotte, mur, préhistorique, gravé, pierre de rosette, cœur, amour, trace, craie, tableau noir, qui ?, immortaliser, dates.

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WELCOME Toulouse, quartier de la Roseraie. # Oser sortir du rang, cultiver la diffĂŠrence.


MIROIR L’ enfermement, une dernière fois. Le règne animal à notre merci de différentes façons. # Emprisonné, exhibé, vivant, anthropomorphisme, bouddhisme, ressemblance, émotion, article 528 du code civil français.

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NIGHTMARE Le terme anglais « nightmare » signifie littéralement jument de la nuit mais se traduit en français par le mot « cauchemar » qui avant l’intéprétation récente de mauvais rêve, signifiait ressentir la sensation d’être foulé ou écrasé durant le sommeil. # Etalon, cheval, galop, force, obscur, course, échapée, menace, thumos, psychopompe.


• Révélations ou L’envers du Miroir les photos utilisées en version brute et les séries dont elles sont tirées. http://module26.tumblr.com/ • La bibliothèque des médias des sources d’informations supplémentaires radiophoniques, vidéos et autres, ou celles évoquées dans le livret tel que bandes annonces de films, articles de presse... http://bonusmodule26.tumblr.com/ • Histoire suivante sera alimenté des nouvelles histoires, suivant la seconde vie du projet. http://histoiresuivante.tumblr.com/ https://www.facebook.com/


Les Sens de l’Art est une association régie par la loi 1901, née en 2005 à l’initiative d’artistes et de chefs d’entreprises. Elle est déclarée aujourd’hui d’intérêt général. L’association s’autofinance et ne bénéficie d’aucune subvention. L’INTENTION DEVENIR UNE PLATEFORME D’ECHANGE POUR LA CREATION - Réunir des compétences et des énergies autour de projets créatifs d’intérêt général - Développer une pensée commune pour élargir et démocratiser les actions culturelles - Contribuer à la prise de conscience de l’impact qu’ont l’art et la culture sur l’Homme et la société LA FONCTION PROMOUVOIR LA CREATION Créer, collaborer, diffuser et partager sont les étapes essentielles dans la démarche de tout créateur. Les Sens de l’Art se veut porteuse d’un réseau mixte associant les acteurs culturels locaux, l’entreprise et le grand public pour la réalisation de projets créatifs pertinents, utiles à l’intérêt général. DEMOCRATISER L’ACCES A L’ART La médiation est indispensable à la démocratisation de l’accès l’art. Il s’agit de nourrir l’interaction entre la création et le public pour interroger, échanger et communiquer. Les Sens de l’Art provoque la rencontre et le dialogue pour valoriser le savoir et les compétences de chacun.

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REMERCIEMENTS Vincent Ladade // Psychologue / MECS Transition-Erasme Bernard Labroue // Directeur / MECS Transition-Erasme Didier Estival // Artiste & Art-Thérapeuthe / Rodez Wilfried Gontran // Psychanalyste - formateur - superviseur Chargé d’Enseignement en Psychologie - Université Jean-Jaurès.

Stéphane Giner // Photographe & Graphiste / freelance Julien Kaliski // Coordinateur / Les Sens de l’Art Delphine Sudre // Présidente / Les Sens de l’Art Pauline Treguier, Laura Manaa, Simon Tinchant, Sandrine Loustalan, Magali Goron, Reine Lauzel, Daniel Duprat, Martine Guerinaud, Nadine Delbes, Nicolas Leclercq, Julien Bousquet, Sabah, et tout le reste du personnel et de l’équipe de Transition ainsi que les jeunes croisés au cours de cette année 2014.

Sadjia Abadou, Virginie Rubira, Charo Usieto Gracia, Fernando Marco Melero, Angel et Ana Herrero Roche, Estelle Hamel.

Les Sens de L’ Art contact@lessensdelart31.com http://www.lessensdelart31.com/ TRANSITION contact@mecs-transitions.org http://www.erasme.asso.fr/etablissements/mecs Philippe LEJEAILLE www.lejeaille.com

Plus de renseignements sur la maladie : http://www.francealzheimer.org/



# Kaléidoscope, Amnésie, Alzheimer, Photolangage, Photographie, Combinaisons, Polysémie, Art. # Idée, Objet, Action, Réflexion, Recherche, Réalisation, Timeline, Possibilités, Process.

Cet ouvrage multiforme, entre carnet de travail, recueil, et catalogue d’exposition, existe aussi dans une version papier où les liens sont remplacés par des QR Codes. Il a été imprimé à 40 exemplaires grâce au financement de Les Sens de l’Art. Il reste disponible à la commande au prix coûtant de 30 € directement sur Blurb.fr



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