L’INTERVIEW
« Une molécule soigne, pas une marque »
RMaCIeN
Muriel Dahan, Igas
DEFRANCE
Le PHaRMaCIeN
L’officine change de branche
Vioxx rappelé au box
Du soleil en capsules
ENJEUX P. 16
ENQUÊTE P. 32
BANC D’ESSAI P. 58
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DEFRANCE N o 1 2 8 0 M A I 2 0 1 6
Grâce à la loi 41, les pharmaciens québécois évoluent dans leur milieu naturel. DÉCRYPTAGE P. 24
VIVE LA PHARMACIE LIBRE !
L’Éditorial
Le PHaRMaCIeN DEFRANCE
David Pérard
Quand le pharmacien se réinvente
© MIGUEL MEDINA
Directeur de la rédaction du Pharmacien de France
No 1280 I 57e année I09/05/16 ISSN 0031-6938 I CPPAP : 0217 T 81323 www.lepharmaciendefrance.fr LE PHARMACIEN DE FRANCE 13, rue Ballu, 75311 Paris Cedex 09 Tél. : 01 42 81 15 96 Télécopie : 01 42 81 96 61 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Garnier DIRECTEUR DE LA RÉDACTION : David Pérard RÉDACTEUR EN CHEF : Laurent Simon (lsimon@lepharmaciendefrance.fr) RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE : Anne-Laure Mercier (almercier@lepharmaciendefrance.fr) RÉDACTEURS : Élise Brunet (ebrunet@lepharmaciendefrance.fr) I Claire Frangi (cfrangi@lepharmaciendefrance.fr) SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Joséphine Volat (jvolat@lepharmaciendefrance.fr) ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : Anaïs Bellan I Claire Grevot I Caroline Guignot I Alice Monas CRÉATION ET RÉALISATION : Rampazzo & Associés www.rampazzo.com - blog.rampazzo.com CORRECTION : Francys Gramet IMPRESSION : Lescure Théol 27120 Douains ILLUSTRATIONS : Photos : Miguel Medina Dessins : Martin Vidberg Infographie Conseil : Pascal Marseaud DIRECTEUR COMMERCIAL ET RESPONSABLE DE LA PUBLICITÉ : Christophe Bentz (cbentz@lepharmaciendefrance.fr) Tél. : 01 42 81 56 85 Fax : 01 42 81 96 61 ABONNEMENTS : Tél. : 01 42 81 15 96 Abonnement d’un an France-Corse (TTC) : 95 € I Guyane : 93,05 € I Guadeloupe, Martinique, Réunion : 94,03 € I Étranger : 160 € I Achat au numéro : 15 € I Étudiants et retraités : 75 € I 1 thème DPC (3 livrets) : 30 € I Certificat d’inscription à la Commission paritaire de la presse : no 0217 T 81323 ORGANE D’INFORMATIONS SCIENTIFIQUES ET PROFESSIONNELLES PHARMACEUTIQUES Le Pharmacien de France est édité par la SARL « Le Pharmacien de France ». Siège : 13, rue Ballu, 75311 Paris Cedex 09. Durée 99 ans à compter de 1977 Capital : 93 000 euros I Cogérants : Éric Garnier I Jocelyne Wittevrongel I Date du contrôle OJD : 19/10/2015.
O
n a beaucoup parlé ces dernières près. C’est pourquoi les trois prochaines années années – particulièrement de mon mandat seront consacrées à l’optimisadepuis 2009 et la loi Bachelot – tion du magazine, à travers de nouvelles des métamorphoses de l’officine, rubriques, le développement de nouveaux outils de la rénovation du métier de print et/ou web, pour reprendre ces anglicismes pharmacien, de nouvelles missions. La profes- à la mode. Le Pharmacien – je mêle volontairesion serait à un « tournant », à un « moment ment la profession et son magazine – ne sortira charnière »… et, au-delà des tournures toutes grandi des défis qui l’attendent dans les années faites et des clichés sous vide, force est de à venir qu’en regardant vers l’avenir. Car la crise reconnaître que c’est certainement vrai. économique n’existe pas seulement dans le Le métier que pratiquaient nos prédécesseurs milieu de la santé ; nous réalisons la chance de ne sera pas celui de nos successeurs. vous avoir : 7 000 abonnés payants qui font le En tant que directeur de la rédaction du Phar- choix de nous lire tous les mois, c’est un privimacien de France, je ne peux que m’en réjouir. lège. Un titre de presse n’existe pas sans ses Car, sorti de l’agitation des infos de dernière lecteurs et, croyez-moi, peu de titres peuvent en minute, des fils de dépêche dire autant. Mais la fidélité et des réactions en tous se mérite : c’est parce que « Comme vous, genres, l’actualité ne s’apêtes modernes et je crois à l’ouverture vous précie en réalité qu’avec avant-gardistes que votre et au progrès pour un peu de recul. C’est ce magazine se doit égalepari de l’analyse et de l’aument de l’être. notre profession. » dace que je veux continuer Comme vous, je suis pharà relever dans mes nouvelles fonctions à la tête macien ; comme beaucoup d’entre vous, je suis du plus vieux mensuel de la presse profession- syndicaliste ; comme vous tous, je crois à l’ouvernelle des pharmaciens. ture et au progrès pour notre profession, en Plus que dynamique, notre profession est vivante, n’oubliant pas ses fondamentaux que sont le malgré une image compassée qui lui colle à la service et la proximité. Alors, à ceux qui pensent peau. Et elle évolue tellement vite que Le Phar- encore que les pharmaciens sont coincés, je leur macien de France se doit de la suivre au plus réponds : lisez Le Pharmacien de France !
Mai 2016 I No 1280 I 1
mai 2016 Sommaire
Le PHaRMaCIeN DEFRANCE
Actualité
Santé
16
32
4 L’INTERVIEW Muriel Dahan : « Une molécule soigne, pas une marque »
32
ENQUÊTE Vioxx rappelé au box
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PANORAMA
8 15
L’ACTU EN BREF LE KIOSQUE
16 ENJEUX L’officine change de branche 20 DOSSIERS DE LA FÉDÉ
DÉCRYPTAGE
Officine
58
36 CONSEIL Le vieil homme et le mélanome 37 FICHE CONSEIL Pour une exposition solaire sans danger L’ABC(DE) du mélanome 40 INTERNATIONAL De la Kaamelott
• •
44 INVESTISSEMENT La croix ou la bannière 46 OFFICINE EN BREF 51 MARCHÉ Les crèmes cicatrisantes se renforcent 52 NOUVELLES TECHNOLOGIES 54 PRODUITS 56 SUBSTITUONS ! Mométasone 58 BANC D’ESSAI Du soleil en capsules 60
APERÇU
62 64
CULTURE JEUX DE MOTS
Vive la pharmacie libre ! Souvent qualifié d’eldorado de la pharmacie d’officine, le Québec est-il vraiment l’exemple à suivre ? Au premier abord, il semble bien que oui : côté pile, la loi 41, votée en juin 2015, instaure sept nouvelles missions et pas des moindres,
24 comme un droit de prescription ou le renouvellement d’ordonnances. Mais côté face, le modèle économique de ces nouvelles tâches peine à convaincre et les anciennes générations ont du mal à s’en emparer. Une ombre au paradis officinal ?
ABONNEZ-VOUS maintenant au Pharmacien de France. Rendez-vous sur www.lepharmaciendefrance.fr Ce numéro comporte un encart jeté de 8 pages « DPC Maux de cœur ». Mai 2016 I No 1280 I 3
Actualité En bref
Le PHaRMaCIeN DEFRANCE
CE QU’ILS ILS L’ONT DIT ONT DIT « Il y a un mur de Berlin entre la ville et l’hôpital. Or, même à Berlin, il n’y a plus de mur. »
accompagnement
2 645 entretiens AVK en deux mois Les adhésions aux entretiens antivitamines K continuent, même si leur rythme s’est nettement ralenti depuis juin 2013 : entre le 1er janvier et le 29 février dernier, les officinaux ont recueilli 1 207 adhésions au dispositif et ont mené 2 645 entretiens. Côté asthme, l’Assurance maladie ne compte que 235 adhésions et 266 entretiens sur la même période. Depuis leur instauration, seuls 4 722 ont été réalisés… x
données
Une ressource gâchée Le ministère de la Santé lance une consultation publique sur l’ouverture des données de santé mais, quand bien même les Français y seraient favorables, que pourra en faire le gouvernement ? Car, à en juger le rapport de la Cour des comptes sur l’utilisation, déjà possible, des données de santé – rapport qui a fuité sur le site ActeursPublics.com mi-avril –, les pouvoirs publics (Assurance maladie, directions de la Sécurité sociale ou de la santé…) les sousutilisent, quand ils n’en freinent pas l’accès à d’autres acteurs, publics ou privés. Les sages de la rue Cambon estiment ainsi qu’« un retard considérable a été pris […] au bénéfice de la santé publique et de la recherche ». x 10 I No 1280 I Mai 2016
« La médecine libérale est morte […] les vrais libéraux sont minoritaires. J’estime qu’il faut plutôt parler de médecine entrepreneuriale. »
Michèle Lenoir-Salfati, préfiguratrice de l’Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC). (Source : Le Quotidien du médecin)
Guy Vallancien, urologue et membre de l’Académie de médecine. (Source : L’Opinion)
DR
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© MIGUEL MEDINA
Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français. (Source : CSMF)
« Les professionnels reçoivent des propositions […] de DPC pour se former à la gestion du stress dans un riad de Marrakech. »
biosimilaires
Les pharmaciens en disgrâce ? L’autorisation donnée au pharmacien de substituer des biosimilaires pourrait bien rester lettre morte.
L
e vent tournerait-il ? Rien ne prouve que les textes d’application devant entériner le droit donné par la loi au pharmacien de substituer des biosimilaires en initiation de traitement lui réserveront toujours une place centrale. Dans une recommandation adressée à la direction
générale de la santé (DGS), l’Agence du médicament (ANSM) pourrait introduire la « possibilité d’une interchangeabilité de la prescription par le médecin, dans des conditions précises d’information des patients et sous réserve d’une excellente traçabilité », indique Catherine Bourrienne-Bautista, déléguée générale du Gemme (Générique, même médicament). Cette nouvelle disposition coexistera-t-elle avec la sustitution par le pharmacien ou l’écartera-t-elle ? Cette seconde hypothèse est à craindre : les autorités répètent en effet à l’envi qu’elles ne reproduiront pas les erreurs commises avec le générique… x
GÉNÉRIQUES
En attendant les inhalés… La parution du texte concernant la générication des substances végétales et minérales se sera fait désirer. En effet, cette mesure d’économies avait été prévue par la loi de financement de 2015, votée fin 2014, il y a plus d’un an et demi. Il s’agissait de doper le marché du générique en y incluant certains principes actifs qui y échappaient jusqu’ici. Mais la sortie effective de génériques reste pour l’instant suspendue au bon vouloir des industriels : « Il n’y a pas de “listes” prévues a priori.
La disposition n’est pas obligato i r e m a i s r e lèv e d ’ u n e démarche volontaire des laboratoires qui souhaitent voir leur produit inscrit au Répertoire des génériques », explique-t-on à l’Agence du médicament (ANSM). En citant tout de même le Permixon (Pierre
Fabre), à base d’extrait de palmier, mais aussi le lierre grimpant, le ginkgo biloba, l’actée à grappes, le millepertuis ou la valériane. Reste que ce texte est l’arbre qui cache la forêt : les pharmaciens attendent toujours la publication du décret concernant les médicaments inhalés par des dispositifs médicaux, notamment les antiasthmatiques, réclamée par la FSPF fin avril. Le marché des génériques est en effet bloqué par les brevets déposés sur les dispositifs. Pour combien de temps ?
Actualité
Le PHaRMaCIeN DEFRANCE
REPÈRES
16 %
560
84 %
324
conseillent des objets connectés à leurs patients, un chiffre faible, mais en hausse par rapport à l’an dernier. Les glucomètres (69 %) et les tensiomètres (62 %) sont en tête. (Source : 4e baromètre Vidal
ont cumulé emploi et retraite en 2015. Ce chiffre augmente chaque année un peu plus : ils étaient 325 en 2012 et 159 en 2010. (Source :
ne font pas confiance aux grandes surfaces pour vendre des médicaments, selon un sondage réalisé par Satispharma pour le salon PharmagoraPlus. (Source : APM)
d’avantages ont été versés par les industriels aux professionnels de santé depuis 2012, selon un rapport de la Cour des comptes publié en mars. Novartis a été l’entreprise la plus généreuse (10,5 millions d’euros), suivie par AstraZeneca et Bayer Healthcare. (Source : APM)
des médecins
des patients
pharmaciens
Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales)
millions d’euros
– Ordre des médecins)
biologie
informatique
LaboFrance a vu le jour mi-avril dernier. Si les regroupements de laboratoires sur fond d’ouverture du capital ont été légion ces dernières années, LaboFrance, fort de 800 laboratoires de biologie médicale (LABM), 10 000 salariés et 1 000 biologistes, a une particularité : il s’agit de groupements régionaux et de réseaux d’indépendants, représentant au total 1,2 milliard d’euros sur les 4 milliards du marché total. Selon LaboFrance, 27 % des LABM sont aujourd’hui entre les mains d’acteurs financiers. x
Mise en place à la demande de l’Assurance maladie, la transmission du numéro RPPS (Répertoire partagé des professionnels de santé) des médecins hospitaliers par les officinaux est effective depuis l’été 2015. En février 2016, 30,1 % des prescriptions hospitalières citaient le RPPS du prescripteur, taux supérieur à celui des ordonnances libérales, qui stagnait sous les 25 % en novembre. Les délégués de l’Assurance maladie ont toutefois été chargés de résoudre des soucis de transmission. Attendez-vous à leur visite ! x
Naissance d’un géant indépendant
Un RPPS sur trois transmis à la Sécu
MACRO / ÉCO
Les complémentaires continuent leur concentration Les mégafusions se sont succédé dans le petit monde des complémentaires santé. Résultat : en moins de quinze ans, leur nombre a été divisé par trois, passant de 1 700 en 2001 à 573 en 2014. Le constat est particulièrement frappant pour les mutuelles et les instituts de prévoyance. Le nombre de sociétés d’assurance a également reculé « mais dans des proportions bien moindres », explique la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees). Ce sont ces dernières les plus dynamiques : alors qu’elles ne détenaient que « 19 % du marché de la complémentaire santé en 2001, elles en gèrent 28 % en 2014 ».
1 800
1 702
1 600 1 400 1 200
1 074
Nombre d’organismes exerçant une activité de complémentaire santé de 2001 à 2014
1 000
784
800
573
600 400 200 0 2001 Mutuelles
2005
2009
Sociétés d’assurance
2014 Institutions de prévoyance
Champ : organismes assujettis à la taxe ou à la contribution CMU en 2001, 2005, 2009 et 2014
Source : fonds CMU
Mai 2016 I No 1280 I 11
La pharmacie à 360° ! DPC DPC Le PHaRMaCI eN DEe FRANCE à la pag
N Le aCIeCE PHaRM DE FRAN OURS eT TOUJ eNCORe TIFIQUeS LeS aVK S SCIeN NCeS page 2 ONNa aCTUaLITÉ page 3 YSeS D’ORD 4/5 aNaL pageS
à la page
OagULaNT page 2aNTIC SOUS L’ÉQUILIBRe eN SURepage MOUVeMeNT 3 DU NOUVe UNe BLeS DU NeZ » aU CÔTÉ e pageS page 6 TRaITeMeNT 4/5 aNaLY « Je SaIgN SeS D’ORDO page 7 LeCTURe NNaNCeS TeST De page 8
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l, c’est n « L’alcoo avec «mo J’ai un aphte le » possib ent ? » « Les doule traitem urs dans la bouch m’empêche e de manger »nt
« Dois-je mesurer ? » mon INR
drais « Je vou ine »
s « Je vien de me couper t» le doig
« Je peux de l’aspir manger épicé ? »
« Comm ent prend re mon produ it antifongique ?»
ne « Je saig , du nez oi ! » z-m
« J’ai la bouch e sèche »
aide sous « Je suisje pars« Quelle sirop, AVK et nces »aliment « Ce je peux atio n dre ? » en vaca me conseille pren vous ? » lez-
sont « Quels nts les alime ? » interdits
« J’ai perdu le goût des aliments »
3|3
« Ma bouch e me brûle »
« J’ai un bleu à la jambe »
« Je vais me faire arracher » une dent
lles 1| Nouvseio s canc 3 nLe er mis uau à la netrement
« Je voudra is un bain de bouche antiseptique »
: Stom AODleS ue AVK et iOns À risq atiteS : Form’ Utip 1400004 situAt : Code 1240 vations Utip Inno 1400003 Utip Innov Code 1039 Code 1039ations : 1500046
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