Pharmacien de France n°1278 (partiel)

L’INTERVIEW

« Travailler seul sera plus compliqué » Jean Calop

Le PHaRMaCIeN

Préparations à grande échelle

Le mirage Zika

Un nouveau regard sur les contours des yeux

DÉCRYPTAGE P. 24

ENQUÊTE P. 30

BANC D’ESSAI P. 58

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DEFRANCE No 1278 MARS 2016

Les pharmaciens doivent-ils rester à bac + 6 ou passer à bac + 8 ?

Enjeux P. 16

L’Éditorial

Le PHaRMaCIeN DEFRANCE

Le danger de l’immobilisme

Philippe Gaertner

© MIGUEL MEDINA

Président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France

No 1278 I 57e année I 04/03/16 ISSN 0031-6938 I CPPAP : 0217 T 81323 www.lepharmaciendefrance.fr LE PHARMACIEN DE FRANCE 13, rue Ballu, 75311 Paris Cedex 09 Tél. : 01 42 81 15 96 Télécopie : 01 42 81 96 61 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Éric Garnier DIRECTRICE DE LA RÉDACTION : Jocelyne Wittevrongel RÉDACTEUR EN CHEF : Laurent Simon (lsimon@lepharmaciendefrance.fr) RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE : Anne-Laure Mercier (almercier@lepharmaciendefrance.fr) RÉDACTEURS : Élise Brunet (ebrunet@lepharmaciendefrance.fr) I Lydie Colders (lcolders@lepharmaciendefrance.fr) SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Joséphine Volat (jvolat@lepharmaciendefrance.fr) ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : Anaïs Bellan I Claire Grevot CRÉATION ET RÉALISATION : Rampazzo & Associés www.rampazzo.com - blog.rampazzo.com CORRECTION : Francys Gramet IMPRESSION : Lescure Théol 27120 Douains ILLUSTRATIONS : Photos : Miguel Medina Dessins : Martin Vidberg DIRECTEUR COMMERCIAL ET RESPONSABLE DE LA PUBLICITÉ : Christophe Bentz (cbentz@lepharmaciendefrance.fr) Tél. : 01 42 81 56 85 Fax : 01 42 81 96 61

S

i la tenue de la camenteuse… – passera par la collaboration Grande Confé- avec d’autres professionnels aux yeux desquels rence de la santé notre position devra être claire. S’il ne s’agit que a eu au moins de distribuer des boîtes et d’oublier le reste, une utilité, c’est alors ne changeons rien, restons master. celle de me rappeler que le monde n’a pas Si vous croyez comme moi que la pharmacie attendu l’officine pour bouger. La lecture des ne s’en sortira qu’en se repositionnant radicavingt-deux mesures qui constituent la feuille de lement, la conclusion est évidente et elle est route de cet événement tant attendu – et tant double : non seulement les pharmaciens doivent décrié – doit également vous interpeller. Ortho- devenir docteurs – au sens licence-master-docphonistes, infirmiers anesthésistes ou de bloc torat (LMD) du terme, c’est-à-dire passer à opératoire, kinésithérapeutes… toutes ces bac + 8 –, mais en plus ils doivent aider les pré­professions sont en mouvement vers le master. parateurs à intégrer les rangs des professionnels Notre proposition de mettre en place un diplôme paramédicaux, auxquels ils n’appartiennent pas d’études spécialisées pour le moment, en (DES) de pharmacie devenant titulaires « Le duo pharmaciengénérale n’a, à ce titre, d’une licence profespréparateur doit être rien d’une lubie ou d’un sionnelle. Tout cela maintenu et renforcé. » pour que, en définitive, placement politique.

Le constat est clair : les un préparateur bien pharmaciens doivent rester dans le peloton de ­formé puisse renouveler une ordonnance, en tête des professionnels de santé, avec les méde- lieu et place du pharmacien dont il dépend, cins, évidemment, mais aussi les dentistes. pour peu qu’elle ait déjà été validée.

Il n’est néanmoins pas seulement question de Le duo que forment nos deux professions au galons, même si, dans notre pays, l’intitulé des sein de nos entreprises doit non seulement être diplômes détermine le rang dans la société… et maintenu mais renforcé. C’est à ce titre que la incidemment dans le système de santé. Il est réforme du diplôme de préparateur est indisaussi question de compétences communes : pensable. Ce n’est certainement pas en nous continuer à développer les nouvelles missions arc-boutant sur nos acquis que nous les défen– entretiens pharmaceutiques, conciliation médi- drons : faire du surplace, c’est déjà reculer.

ABONNEMENTS : Tél. : 01 42 81 15 96 Abonnement d’un an France-Corse (TTC) : 95 € I Guyane : 93,05 € I Guadeloupe, Martinique, Réunion : 94,03 € I Étranger : 160 € I Achat au numéro : 15 € I Étudiants et retraités : 75 € I 1 thème DPC (3 livrets) : 30 € I Certificat d’inscription à la Commission paritaire de la presse : no 0217 T 81323 ORGANE D’INFORMATIONS SCIENTIFIQUES ET PROFESSIONNELLES PHARMACEUTIQUES Le Pharmacien de France est édité par la SARL « Le Pharmacien de France ».

Siège : 13, rue Ballu, 75311 Paris Cedex 09.

Durée 99 ans à compter de 1977 Capital : 93 000 euros I Cogérants : Éric Garnier I Jocelyne Wittevrongel I Date du contrôle OJD : 24/11/2014.

Mars 2016 I No 1278 I 1

mars 2016 Sommaire

Le PHaRMaCIeN DEFRANCE

Actualité

16

4

8 15

L’INTERVIEW J ean Calop : « Travailler seul sera plus compliqué » L’ACTU EN BREF LE KIOSQUE

16 ENJEUX Pharma en 8 20 DOSSIERS DE LA FÉDÉ

DÉCRYPTAGE

Santé

Officine

30

58

30 ENQUÊTE Le mirage Zika

44 INVESTISSEMENT S’équiper d’un défibrillateur 46 OFFICINE EN BREF

32

PANORAMA

36 CONSEIL Médocs de mauvais goût 37 FICHE CONSEIL La dénutrition du sujet âgé Repérer le sujet

âgé fragile 40 INTERNATIONAL Dernière ponte

• •

51 MARCHÉ Réservé aux intimes 52 NOUVELLES TECHNOLOGIES 54 PRODUITS 57 SUBSTITUONS !

Glicazide 58 BANC D’ESSAI Un nouveau regard pour le contour des yeux 60

APERÇU

62 64

CULTURE AUTO-MOTO

Préparations à grande échelle C’est un fait, les pharmaciens délaissent leur préparatoire depuis des années. Une réglementation de plus en plus stricte et un équilibre économique pas évident à trouver ont écarté beaucoup de professionnels de cette mission

24

historique. La relève est assurée par des préparatoires géants, une soixantaine de sous-traitants en France, qui couvrent la grande majorité des besoins hexagonaux.

Plongée au cœur de ces pharmacies qui font les « prép’ » à votre place.

ABONNEZ-VOUS maintenant au Pharmacien de France. Rendez-vous sur www.lepharmaciendefrance.fr Ce numéro comporte un encart jeté de 8 pages « DPC Troubles métaboliques ».

Mars 2016 I No 1278 I 3

Actualité En bref

Le PHaRMaCIeN DEFRANCE

CE QU’ILS ILS L’ONT DIT ONT DIT

Marisol Touraine, ministre de la Santé.

(Source : Le Quotidien du médecin)

formation

Toujours fans du DPC Avec 23 083 pharmaciens formés tout au long de l’année 2015 contre 22 757 en 2014 au titre du développement professionnel continu (DPC), la profession confirme son intérêt pour le système. Rappelons que le DPC va connaître une mue considérable courant 2016, en devenant notamment triennal et avec la création de « parcours de DPC », dont la réalisation sera surveillée par l’Ordre. x

financement

Des millions pour la conciliation Essentiellement hospitalière, la conciliation médicamenteuse tarde encore quelque peu à se développer en ville. Néanmoins, elle est en pleine croissance : la direction générale de l’offre de soins (DGOS) a annoncé, au congrès de la ­Société française de pharmacie clinique (SFPC) qui s’est tenu à Montpellier début février, vouloir financer dix projets sur ce thème, à hauteur de 250 000 euros chacun. Les projets sélectionnés devront se déployer sur une période comprise entre septembre 2016 et septembre 2017 dans les hôpitaux concernés.

D’après les dernières données disponibles, la conciliation médicamenteuse n’est pratiquée que dans un cas sur cinq environ. À suivre ! x 10 I No 1278 I Mars 2016

« Nous aurions du mal à établir une liste des zones surdenses en médecins. » Nicolas Revel, directeur général de l’Assurance maladie.

(Source : Le Quotidien du médecin)

© MIGUEL MEDINA

Pascal Perri, chroniqueur sur RMC. (Source : Rencontres de l’officine le 6 février à Paris)

© MIGUEL MEDINA

« Pour une responsable de gauche, ce ministère est l’un des plus beaux. »

DR

« Ce qui a de la valeur aux yeux des patients, c’est la solution, pas le produit. »

études

Le Clesi ne fait plus pharmacie Le Centre libre d’enseignement supérieur international (Clesi) traverse une mauvaise passe.

L

’

ex-université Fernando-Pessoa, rebaptisée Centre libre d’enseignement supérieur international (Clesi), qui proposait de diplômer des étudiants sans passer les concours, ne fait plus recette. « Le Clesi a dû licencier […] et se trouve en grosse difficulté ­financière », témoigne

un ex-collaborateur. Avec des inscriptions à la filière pharmacie déjà rares – une douzaine d’étudiants à la rentrée 2013 –, le Clesi a dû fermer cette formation, au moins pour l’année 2015-2016.

Pas assez rentable. Ce que confirme un coup d’œil aux sites internet des écoles de Béziers et Toulon, qui ne proposent plus que des cursus de physiothérapie ou d’odontologie pour 9 975 euros par an ou des préparations au concours d’infirmier pour 2 200 euros. Si, pour l’instant, les pharmaciens peuvent être rassurés, une procédure menée par les dentistes est toujours en cours pour faire fermer les deux antennes. x

VACCINATION

Un débat sous tutelle Thomas Dietrich était secrétaire général de la Conférence nationale de santé (CNS). « Était », parce qu’il vient de claquer la porte de ce parlement des patients en publiant un brûlot sur la « démocratie sanitaire ». Il revient notamment sur les conditions d’organisation du grand débat autour de la vaccination, annoncé par ­Marisol Touraine le 12 janvier dernier, à l’occasion de la remise du rapport Hurel, « une somme sidérante de lieux communs », à lire le démissionnaire à la plume acide. Initialement

dévolue à la CNS, comme nous l’annoncions sur notre site en juillet 2015 (lire notre article « La CNS prépare un grand débat »), l’organisation de ce débat a finalement été confiée à un conglomérat placé sous l’égide de l’Agence nationale de ­s anté publique, « une agence sous tutelle de l’État et

qui mène dans le même temps des campagnes de communication pro-vaccination ». Illogique, selon lui. D’autant que le comité d’orientation du débat, censé garantir son indépendance, est aux mains d’un proche de la ministre de la Santé, Alain Fischer. Sa conclusion est donc sans appel : « Tout est mis en œuvre pour que la concertation accouche de conclusions qui aillent dans le sens de la politique que veut mener ce gouvernement. » Pour le bien de la politique vaccinale, espérons qu’il ait tort.

Actualité

Le PHaRMaCIeN DEFRANCE

REPÈRES

2 à 4 % 450

43 %

571 414

C’est le taux de rejet moyen estimé par l’Assurance maladie pour la part complémentaire, un chiffre « variable selon les professions concernées ». Il est deux fois moins élevé sur la part obligatoire, soit 1 à 2 %.

des Français apprécieraient « des conseils personnalisés sur l’hygiène de vie, le sevrage du tabac » en officine, mais seulement 36 % « un soutien et des prestations personnalisés » pour les pathologies lourdes ou chroniques. Paradoxal.

C’est le nombre de dossiers médicaux partagés ouverts au 3 février 2016. Un nombre qui ne décolle toujours pas, malgré un lancement il y a déjà cinq ans et une reprise en main il y a quelques mois par l’Assurance maladie. (Source : Asip santé)

(Source : Assurance maladie)

jours

C’est le délai moyen pour la mise sur le marché d’un dispositif médical (DM) en France. « Trop long », selon les industriels du secteur qui appellent le gouvernement à financer les utilisations précoces de DM. (Source : Snitem)

(Source : sondage PHSQ)

suisse

belgique

Les révolutions se font parfois à pas de velours. En Suisse, où les pharmaciens ont le droit de vacciner dans certains cantons, par exemple contre la grippe dans les cantons de Berne, de ­Fribourg ou de Neuchâtel mais aussi de Soleure ou de Zurich, le nombre de professionnels pratiquant la piqûre augmente doucement. Ils sont 408 à posséder le certificat de formation complémentaire Vaccination et Prélèvements sanguins nécessaire, et 437 en cours de formation. x

passé commande de la même préparation, à savoir des gélules de dexaméthasone de 0,5 mg. Résultat ? Pas brillant. Sur les 44 officines ainsi testées, la préparation n’était conforme que dans 1 cas sur 5. « Vingt-huit pharmaciens ont utilisé trop peu de principe actif […] ; dans sept préparations, les capsules ne contenaient pas la même quantité de poudre. » L’Association pharmaceutique belge oriente les pharmaciens vers des formations qualité pour remédier au problème. x

La vaccination à l’officine Attaqués sur les preps C’est encore un testing auquel n’ont pas pensé les associations gagne du terrain de consommateurs hexagonales. En Belgique, Tests-Achats a

**­MACRO / ÉCO

Les pharmaciens sont les rois du tiers payant Puisqu’on parle de tiers payant généralisé, intéressons-nous aux performances des différentes professions de santé. Pour les pharmaciens, c’est tout vu : le tiers payant est déjà généralisé à l’officine avec des taux de 93 %, suivis de près par les biologistes. Mais d’autres professions ne s’en sortent pas trop mal non plus, à ­commencer par les infirmiers, qui assurent un tiers payant intégral (TPI) dans deux cas sur trois. En réalité, les mauvais élèves sont plutôt à c ­ ompter parmi le corps médical, avec 6 % seulement en moyenne de TPI. Pas vraiment une surprise.

3 % 31 %

16 %

32 % 11 %

73 % 84 %

81 %

29 %

93 %

70 % 65 % 31 %

29 %

21 %

6 %

6 %

Généralistes Généralistes secteur 1 secteur 2

6 % Spécialistes secteur 1 (hors radio)

84 %

65 %

40 % 10 %

10 %

Taux hors tiers payant Source : Assurance maladie.

24 %

63 %

65 %

7 % 22 %

6 % Spécialistes Radiologues secteur 2 (hors radio)

Taux tiers payant AMO* hors AMC*

Infirmiers

Kinés

9 %

9 %

Sagesfemmes

Dentistes

Pharmaciens

Biologistes

Taux tiers payant AMO* + AMC* *AMO : assurance maladie obligatoire *AMC : assurance maladie complémentaire

Mars 2016 I No 1278 I 11

La pharmacie à 360° !

DPC DPC Le PHaRMaCI eN DEe FRANCE à la pag

N Le aCIeCE PHaRM DE FRAN OURS eT TOUJ eNCORe TIFIQUeS LeS aVK S SCIeN NCeS page 2 ONNa aCTUaLITÉ page 3 YSeS D’ORD 4/5 aNaL pageS

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page 6 LeS SOINS De BOUCHe page 7 « aU QUOTI J’aI UNe pLaIe BUCCa DIeN page 8 TeST Le » De LeCTU Re

l, c’est n « L’alcoo avec «mo J’ai un aphte le » possib ent ? » « Les doule traitem urs dans la bouch m’empêche e de manger »nt

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« J’ai la bouch e sèche »

aide sous « Je suisje pars« Quelle sirop, AVK et nces »aliment « Ce je peux atio n dre ? » en vaca me conseille pren vous ? » lez-

sont « Quels nts les alime ? » interdits

« J’ai perdu le goût des aliments »

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« Ma bouch e me brûle »

« J’ai un bleu à la jambe »

« Je vais me faire arracher » une dent

lles 1| Nouvseio s canc 3 nLe er mis uau à la netrement

« Je voudra is un bain de bouche antiseptique »

: Stom AODleS ue AVK et iOns À risq atiteS : Form’ Utip 1400004 situAt : Code 1240 vations Utip Inno 1400003 Utip Innov Code 1039 Code 1039ations : 1500046

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016

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