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MAGAZINE JUIN 2014 - 5 €

L’énergie

en quête d’efficacité André Kiener, directeur d’EDF Commerce Grand Centre

Le nouveau maire de Tours veut mobiliser les atouts de la ville



Point de vue

Charcutage e charcutage électoral, terme inventé par le parti communiste pour une affiche désormais célèbre où l’on voyait Jacques Chirac et Charles Pasqua déguisés en garçons bouchers, est un art difficile. Presque tous les gouvernements s’y sont risqués, entraînant fureurs de l’opposition… et silence approbateur de leur propre camp. Mais jamais, certainement, un pouvoir n’avait déclenché un tel pataquès, aussi mal préparé qu’incompréhensible, et réussi à mécontenter presqu’autant à gauche qu’à droite. Reprenons le film des derniers mois. Après avoir fait voter une loi, le 17 mai 2013, instaurant un redécoupage de la carte des 4 055 cantons français et un scrutin envoyant dans les conseils départementaux – nouvelle dénomination des conseils généraux – un nombre équivalent de conseillers mâles et femelles, puis procédé durant l’hiver à une partition très contestée des territoires, l’exécutif vient de lancer le projet, à la surprise quasi générale, d’une nouvelle réforme territoriale. Il est, cette fois, question de supprimer purement et simplement les départements d’ici à 2020. On peut se poser la question de l’intérêt de modifier une carte électorale destinée à être effacée dès le mandat suivant… Mais la partie la plus commentée de la réforme est la réduction du nombre de régions. Un dossier vieux comme la décentralisation auquel, là aussi, tous les gouvernements ont voulu s’attaquer. Pierre Méhaignerie déjà, alors ministre de l’Équipement et de l’Aménagement du ter-

L

ritoire de Jacques Chirac (1986-1988), voulait 12 Régions métropolitaines au lieu de 22. Le gouvernement Valls, agissant à la suite d’une inspiration soudaine du Président de la République, en veut 14. Pourquoi pas ? Certains projets de regroupement semblent légitimes (les deux Normandie, Bourgogne et FrancheComté, Alsace et Lorraine…) ; mais dans l’Ouest, le projet est totalement incohérent. Pour ménager les susceptibilités des barons socialistes, on a refusé de rattacher le Limousin et les deux Charente à l’Aquitaine, la Loire-Atlantique et la Vendée à la Bretagne, le Poitou, l’Anjou et le Maine à la région Centre. La grande région Centre Ouest serait ainsi devenue un espace cohérent de 5 millions d’habitants, contrepoids entre une Bretagne étendue à la façade Atlantique, comptant elle aussi un peu plus de 5 millions d’habitants, et l’Île-de-France. Qu’attendent de ce ménage à trois, des portes du Midi aux marges de l’Île-de-France, de l’Atlantique au seuil de la Bourgogne, les anciens condisciples de la promotion Voltaire ? Un duché-pairie dont le siège serait Poitiers, la plus petite mais la plus centrale des trois capitales régionales actuelles ? Quitte à rendre ingouvernable un espace où il faudrait parcourir 450 km et plus de 6 heures pour joindre sa ville la plus septentrionale, Dreux, à la plus méridionale, Brive-la-Gaillarde ? Les trois régions méritent décidément mieux qu’une feuille de boucher pour dessiner leur avenir.

zon François−Xavier Beu


6-14

www.lettrevalloire.com Ce magazine est un hors-série de La Lettre Valloire, bimensuel d’information politique et économique en région Centre. Édité par MCM Presse SAS au capital de 51 000 € RCS Tours B 341 914 273. Siège social : 14, boulevard Heurteloup à Tours Adresse postale : BP 92031 37020 Tours Cedex 1 02 47 70 60 00 contact@lettrevalloire.com Rédaction : François-Xavier Beuzon (rédacteur en chef) Jean-Christophe Savattier (rédacteur en chef adjoint) Aurélie Vouteau (édition)

Points Chauds 6-7

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A participé à ce numéro : Jacques Huguenin Sarah Louis Émilie Rencien Maquette : Régis Beaune 10-11

Révision et corrections : Florence Augustine Publicité : Au support Diffusion : Nadine Gomès Crédits photographiques : Cyril Chigot : Une, 30 DR : 6, 7, 8, 9, 15, 16, 17, 21, 22, 25, 29, 32, 33, 35, 38, 40, 41, 43, 44, 46, 47, 50, 51, 56, 58 Antoine Meunier Ville de Tours : 10 Jacques Huguenin : 12, 26, 27, 28, 52, 53, 54, 55 Jean-Christophe Savattier : 18, 36, 41, 42, 48, 51, 57 Cabinet d’architecture Arau : 24 Hamid Azmoun : 34 Aurélie Vouteau : 5, 51, 52, 53, 54, 55

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Informations légales : Abonnement annuel 2014 (23 numéros et magazines hors-séries) : 360 € Abonnement électronique avec édition bihebdomadaire : 450 € Prix de ce numéro : 5 € CPPAP : 0116 I 85872 ISSN : 1246-4333 Dépôt légal : juin 2014 18-19

MCM presse 4 La Lettre Valloire - Juin 2014

Municipales, les équipes sortantes gagnantes, sauf à Tours Si l’on excepte le spectaculaire échec de la gauche tourangelle, les municipales 2014 auront été marquées par le renforcement des équipes sortantes. Serge Babary : « Il faut mobiliser tous les atouts de la ville. » Le vainqueur du socialiste Jean Germain à Tours revient sur les raisons de son succès.

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Constance de Pélichy : « Gérer dans l’esprit d’une démocratie apaisée, moderne et efficace. » Constance de Pélichy a ravi le siège de maire de La FertéSt-Aubin à Philippe Froment.

14

Point sénatoriales En septembre prochain, les sénateurs des départements d’Eure-et-Loir, du Cher et de l’Indre vont remettre leurs sièges en jeu.

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L’éolien toujours sur un petit nuage En région Centre, la filière éolienne continue à croître.

22

Pascal Hoffmann La Caisse des dépôts, un acteur majeur des EnR La puissance publique a délégué à la Caisse des dépôts la mission de soutenir les énergies renouvelables dans les territoires.

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Orléans fait feu de tout bois Orléans s’est dotée d’importantes capacités de chauffage collectif utilisant la biomasse.

Économie

Impression : Imprimerie Vincent, Tours (37)

Directeur de la publication : François-Xavier Beuzon

En bref L’actualité du trimestre en bref.

À LA UNE L’énergie, en quête d’efficacité Le chemin vers l’utopique ville post-carbone est long et semé d’embûches. Grosse productrice d’électricité nucléaire mais aussi d’énergies renouvelables, la région Centre tente de trouver une voie originale. Thierry Schall : « L’énergie nucléaire reste indispensable. » Le directeur du Cnepe de Tours précise le rôle que peut jouer le nucléaire dans le futur mix énergétique.


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Sommaire JUIN 2014

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L’Eure-et-Loir « booste » l’emploi Le Département d’Eure-et-Loir a reconduit en 2014 le dispositif Boostemploi.

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Hervé Thermique, des acquisitions sous contrôle Le pôle Énergies-Services du groupe Hervé a réalisé deux acquisitions.

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Quand les normes énergétiques virent au casse-tête L’empilement des nouvelles réglementations thermiques pèse sur le bâtiment.

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Bernard Pichot : « SVP, une pause dans la création de nouvelles normes ! » Le patron de Centre Immo Promotion réclame une pause réglementaire.

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Javaux profite de la transition énergétique Le transformateur chartrain de mousses s’est positionné sur le marché des isolants thermiques. André Kiener : « Les PME ont tout à gagner à investir dans l’efficacité énergétique. » Le responsable de la direction commerciale régionale d’EDF défend les politiques d’efficacité énergétique déployées par l’opérateur. En bref L’actualité du trimestre en bref. Jean-Marc Vermorel : « Les entreprises exigent des compétences de plus en plus fortes. » Le service public de l’emploi tente de s’adapter à une demande de profils de plus en plus pointus.

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Un tissu industriel de plus en plus reprisé Le printemps n’aura pas été celui de la reprise, mais plutôt celui des reprises d’entreprises… réussies ou avortées. Que deviendra Servier après Servier ? Symboliquement, une semaine avant le décès de leur fondateur, les laboratoires Servier annonçaient leur virage vers la biopharmacie. Teranga s’étoffe avec le tourangeau Cebiphar Teranga, la holding de tête d’ACM Pharma vient de s’emparer de Cepiphar.

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Gekko Tape veut décoller Spécialiste de l’adhésif, le groupe tourangeau Gekko modifie en profondeur son organisation.

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Le blésois MCHS étend sa toile À Blois, le revendeur informatique MCHS poursuit sa marche en avant.

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Alexander Hoffmann, sur les traces de Bill Gates ? Un jeune informaticien du Montargois invente des logiciels capables de doubler la durée d’utilisation des batteries de smartphones.

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Crowdfunding, la finance à portée de tous Le crowdfunding est devenu le nouvel eldorado des jeunes sociétés.

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Wistiki, application killer pour distraits Les frères Lussato ont développé une solution qui permet de retrouver instantanément les objets de la vie quotidienne.

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Un Tourangeau, pur produit de l’american dream Un Jocondien a créé en Californie une agence spécialisée dans l’organisation d’excursions.

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Boreal se met à l’heure des objets connectés À Bourges, Boreal entend profiter pleinement de l’engouement pour les objets connectés.

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Les chantiers Les chantiers régionaux en prévision.

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Le carnet

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Escapades ine fin de magaz Retrouvez en s e u es économiq nos itinérair es. et touristiqu

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Points Chauds

En bref

LEBON, D’UN CABINET À L’AUTRE… est en vieille connaissance que David Lebon, l’opposant principal du maire UMP Chartres Jean-Pierre Gorges, a pris à 37 ans la direction du cabinet du ministre de l’Économie Arnaud Montebourg. « J’ai établi une forte relation de confiance avec le ministre que je connais très bien puisque j’ai été son conseiller parlementaire lorsqu’il était ministre du Redressement productif, avant de devenir chef de cabinet adjoint au même ministère. Et je l’avais beaucoup fréquenté en tant que président des Jeunes Socialistes», indique celui qui fut également directeur de cabinet adjoint de Martine Aubry quand cette dernière dirigeait le PS. Mais David Lebon, qui continuera à résider à Chartres – « c’est ma ville… » – n’a pas l’intention de renoncer à ses ambitions politiques locales. Le conseiller municipal chartrain s’occupera essentiellement de logistique ministérielle, « notamment des déplacements du ministre et du suivi de ses courriers ». Un poste exigeant qui « demande beaucoup de disponibilité ». D’autant que le vibrionnant ministre de l’Économie n’a pas la réputation d’épargner ses collaborateurs. David Lebon n’a aucune crainte quant à la gouvernance de la politique économique de la France, pourtant divisée entre le ministère de l’Économie et celui des Finances de Michel Sapin. « Cette dichotomie existe dans bien d’autres pays. Elle ne posera pas de problèmes », assure David Lebon. Sur certains dossiers où la double tutelle existe, les deux hommes pourront négocier avec leurs interlocuteurs – notamment les banques – en mode « good cop, bad cop », sourit David Lebon.

C’

PHILIPPE VIGIER PREND DU GALON Le député de la 4e circonscription d’Eure-etLoir a été élu par ses pairs président du groupe UDI à l’Assemblée nationale. Philippe Vigier, qui succède ainsi à Jean-Louis Borloo, démissionnaire, a recueilli 16 voix contre 12 au député de la Côte-d’Or François Sauvadet et 1 bulletin blanc. Une prise de galon pour un élu dont le nom revient de plus en plus souvent comme tête de file de la droite et du centre pour les prochaines élections régionales. Maurice Leroy étant décidé à renoncer à

ce siège pour laisser le champ libre à son collègue et ami, il reste à connaître la position de l’UMP. Quant à Philippe Vigier, réélu maire de Cloyes-sur-leLoir au 1er tour – sa liste étant la seule en lice –, il devra faire un choix entre ses nombreux mandats.

MAUDITE ARENA

Et si Serge Grouard avait senti que, pour être triomphalement réélu

maire d’Orléans au 1er tour (53,64 %), il était préférable d’enterrer – au moins provisoirement – son projet d’Arena en bord de Loire ? Michel Delebarre, inamovible maire de Dunkerque depuis 1989, n’a pas eu cette sagesse et il n’aura pas résisté à la fronde contre son propre projet d’Arena. C’est son ancien adjoint Patrice Vergriete, qui se présentait à la tête d’une liste divers gauche, qui a profité du mécontentement pour battre l’ancien ministre de la Ville et devenir maire de cette ville industrielle de 91 000 habitants. À

Dunkerque (59), le coût de l’équipement destiné à abriter les deux clubs phares de la ville (le basket avec Gravelines et le handball, champion de France cette année) et des infrastructures nécessaires dépassait les 250 M€.

UN FAUTEUIL POUR DEUX

L’ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault n’a pas fait que des heureux, le 6 mai dernier, en faisant son grand retour à l’Assemblée nationale. L’ancien maire de Nantes, en quête d’un siège dans l’hémicycle, s’est tout simplement approprié celui occupé par Jean-Patrick Gille, le député PS de la 1re circonscription d’Indre-etLoire. Qui accessoirement est l’un des 41 députés à s’être abstenu à l’issue du discours de politique générale de Manuel Valls… . J.-P. Gille, plutôt remonté, s’est fendu d’un tweet grinçant, indiquant qu’il était « fier d’avoir laissé ma place à Jean- Marc Ayrault (…) même si j’aurais apprécié qu’on me demande mon avis ».

De Philippe Vigier, député de la 4e circonscription d’Eure-et-Loir et président du groupe UDI à l’Assemblée nationale, à propos de lui-même : « La marque Vigier, c’est la proximité et le travail en équipe. Seul, je ne sais rien faire. ». De Laurent Baumel, député PS de la 4e circonscription d’Indre-et-Loire, inventeur du nouveau concept de « résistance participative » après son abstention lors du vote sur le plan d’économies présenté par le Premier ministre : « Nous ne sommes pas dans une logique scissionniste et

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ÉREINTAGE Le journaliste Périco Légasse, défenseur des produits du terroir et animateur d’une émission gastronomique sur TV Tours, s’en prend à Xavier Beulin dans un article paru dans l’hebdomadaire Marianne au mois d’avril. Le président de la FNSEA et agriculteur de Donnery (45) y est qualifié de «Crésus du terroir-caisse ». Dénonçant « la vision conquérante et agressive de l’agriculture à visage bancaire » incarnée par Xavier Beulin, Périco Légasse brandit l’étendard du « génie gastronomique, des réserves naturelles et des trésors alimentaires » de la France, menacée, selon lui, par « le productivisme générateur de malbouffe ».

CHASSÉ-CROISÉ La Touraine a obtenu, pour la troisième fois consécutive, une députée européenne. Dans une circonscription Massif central-Centre de 13 départements qui n’envoie que 5 députés à Bruxelles, c’est un exploit. Après Mylène Descamps (20022009) et Sophie Auconie (2009-2014), c’est Angélique Delahaye, déjà conseillère régionale UMP, qui a obtenu la faveur des électeurs. Une élection qui s’est d’ailleurs jouée à quelques milliers de voix, la nouvelle députée

CHIFFRE

DU TRIMESTRE

5 075 680 C’est le nombre d’habitants (selon le recensement de 2011) de la nouvelle région appelée à réunir les 13 départements des régions Centre, Poitou-Charentes et Limousin. européenne ne l’emportant que d’une courte tête face à Sophie Auconie, tête de liste UDI. Les deux candidates ont d’ailleurs dépêché l’artillerie lourde pour gagner des suffrages : Brice Hortefeux pour Angélique Delahaye et François Bayrou et Rama Yade pour Sophie Auconie ont fait le déplacement tourangeau pour soutenir leur championne.

CONTRE-PIED Si l’UMP et l’UDI sont vent debout contre le projet présidentiel de report d’un an des élections départementales et régionales prévues initialement en 2015, Éric Doligé, sénateur et président UMP du conseil général du Loiret, défend le contraire sur le site web de la lettre acteurspublics.

Soulignant l’incohérence des décisions d’un exécutif qu’il juge « aux abois », il considère que les élections « ne peuvent avoir lieu, au mieux, qu’en 2016 (…), sachant que des découpages électoraux vont être organisés dans les mois qui suivent », ajoutant qu’il est « indispensable de prendre le temps de la réflexion ». Éric Doligé, président du conseil général du Loiret depuis 1994, ne devrait pas briguer un nouveau mandat à la tête du Département.

RETRAITE ACTIVE

Le conseil général du Loiret, en concertation avec l’Ordre des médecins du département, a lancé une campagne de recrutement auprès de médecins libéraux à la retraite afin de pourvoir les 13 postes de médecins ne trouvant pas preneurs dans ses services. À mi-avril, le conseil général du Loiret n’employait, en effet, que 12 médecins sur les 25 dont elle a besoin pour évaluer personnes âgées et handicapées, rendre des visites dans les écoles ou accueillir des nourrissons en consultation. Une nouvelle démonstration des dégâts de la désertification médicale en milieu rural.

notre audience ne peut que s’élargir. ». De Jean-Pierre Saulnier, président socialiste du conseil général du Cher, à propos de la réforme territoriale proposée par le président de la République et le gouvernement : « Aujourd’hui, j’ai la nette impression de vivre dans un régime monarchique. ». De Frank Supplisson, conseiller régional (UMP) et adjoint au maire de Montargis : « Ça a été un combat acharné pendant trois semaines avec les Brésiliens ». À quelques jours de la Coupe du monde, l’élu montargois ne parlait pas football mais du groupe sidérurgique brésilien Gerdau auquel il a disputé – victorieusement – la reprise d’Ascométal.

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Points Chauds

Municipales

Municipales 2014, gagnantes, Si l’on excepte le spectaculaire échec de la gauche tourangelle, les municipales 2014 auront été marquées par le renforcement des équipes sortantes à Chartres, Orléans et Blois et les passages de témoin réussis entre les maires sortants de Bourges et Châteauroux et leurs dauphins respectifs. La progression du FN est sensible mais elle ne bouleverse pas les équilibres politiques.

S

i l’on excepte le grand chambardement tourangeau et la chute des maires socialistes de Tours et Joué-lès-Tours, le scrutin municipal en région Centre aura souvent conforté les équipes sortantes, accréditant la thèse selon laquelle les maires installés bénéficient bien d’une longueur d’avance, à condition que leur bilan soit reconnu par leurs électeurs… et qu’ils ne jouent pas les prolongations ! C’est ainsi que les UMP Jean-Pierre Gorges et Serge Grouard, tous deux maires de leurs villes depuis 2001, ont été reconduits respectivement à Chartres et Orléans sans rencontrer de réelles résistances. Cette continuité a été aussi respectée dans trois villes du sud de

Gil Avérous

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la région, où les maires en place avaient choisi de transmettre le flambeau à des dauphins désignés de longue date : cela a été le cas dans les deux villes préfectures berrichonnes de Châteauroux et de Bourges, mais aussi à Loches, dans le sud de la Touraine. Gil Avérous (UMP) a réussi, non sans avoir été contesté dans son propre camp, le pari de conserver à droite Châteauroux, conquise en 2001 par Jean-François Mayet, qui avait décidé de ne pas se représenter. Même succession tendue à Bourges, où Pascal Blanc (UDI) a dû affronter à la fois la gauche et la triple dissidence de deux des principaux adjoints du maire sortant, Véronique Fenoll (UMP) et Alain Tanton (UDI) d’une part, et de Franck Thomas-Richard. Enfin, l’ex-premier adjoint de Jean-Jacques Descamps (UMP), Marc Angenault, a facilement conservé à droite le fauteuil de maire face au socialiste Jean-Marie Beffara ; l’électeur lochois a certainement voulu éviter les affres du choix à un élu qui cumule déjà la 1re vice-présidence de la Région Centre et le siège de député d’Indre-et-Loire. A contrario, les urnes auront réservé une bien mauvaise surprise à deux barons socialistes tourangeaux qui tentaient la passe de… quatre. À Tours, Jean Germain (PS) sort par la petite porte, largement défait par l’UMP Serge Babary, président – en congé le temps de l’élection – de la

CCI Touraine. L’autre poids lourd de la gauche tourangelle, Philippe Le Breton (PS), maire de Joué-lès-Tours également depuis 1995, mord cruellement la poussière pour quelques centaines de voix. Le facteur national a certainement joué dans ce double ratage, « mais il existe bien une malédiction du quatrième mandat », comme l’indiquait, lorsque nous l’avions interrogée à l’automne dernier (voir notre magazine de décembre), Viviane Le Hay, chercheuse à l’IEP de Bordeaux. C’est sans doute à cette aune de la durée qu’il faut évaluer la réélection à Blois du socialiste Marc Gricourt, maire facilement reconduit à l’issue de son premier mandat et épargné par l’impressionnante vague bleue du 30 mars. Autre enseignement du scrutin, l’abstention a souvent pénalisé les candidats de la gauche et constitué l’explication centrale de leur échec ; à Bourges, où beaucoup pensaient que la socialiste Irène Félix avait une chance réelle de regagner cet ancien fief communiste, l’abstention s’est élevée à 46,25 %, soit près de 10 points de plus que la moyenne nationale (36,45 %) et 3 points de plus qu’au premier tour de 2008 (43,77 %). Ce sont bien les électeurs de gauche qui seraient restés à la maison, entraînant la nette défaite de la candidate socialiste, battue de plus de sept points par Pascal Blanc. À Dreux, où l’abstention a flirté avec les 50 %, le-


les équipes sortantes sauf à Tours candidat du PS Valentin Gambuto ne parvient à rassembler que 23,65 % des suffrages. Et se trouve enfoncé par l’UMP Gérard Hamel (48,10 %), seul maire des grandes villes de la région à réussir la passe de quatre. Si l’abstention a gêné la gauche, la mobilisation des électeurs de la droite et du centre a parfois été patente. C’est le cas à Vendôme, où l’échec de la maire socialiste sortante, Catherine Lockhart, défaite par l’UDI Pascal Brindeau, s’est accompagné d’une participation élevée (67,31 %) comparée aux standards du second tour. On retrouve le même schéma à Fondettes (37), où l’UMP Cédric de Oliveira bat nettement le sortant Gérard Garrido à l’issue d’une triangulaire, recueillant 53,89% des suffrages au second tour où l’abstention s’établit à « seulement » 32,78 %. Les scores du Front national en région Centre étaient très attendus par les observateurs. Ceux-ci restent finalement contenus, baissant même fréquemment d’un tour à l’autre, et les triangulaires provoquées par le maintien au second tour des candidats Bleu Marine n’ont pas provoqué les catastrophes promises au candidat de la droite dite « républicaine ». L’exemple le plus frappant étant celui de Tours, où le candidat FN a perdu plus quatre points entre les deux tours – de 12,93 % à 8,57 % –, ne pouvant empêcher la victoire du candidat UMP. Idem à Dreux où la candidate frontiste n’a engrangé que 12 % des suffrages le 30 mars, perdant près d’un point et demi en une semaine. Deux villes connaissent toutefois une forte poussée du parti de Marine Le Pen. À Vierzon, vieille place forte communiste, le FN remporte trois sièges au conseil municipal avec

18,25 % des voix. De quoi illustrer la théorie du « gaucho-lepénisme » chère au politologue d’origine tourangelle Pascal Perrineau. Un gaucho-lepénisme qui, comme dans le nord ou le quart nord-est, prospère sur des territoires frappés par une durable et profonde désindustrialisation. À Blois, quatre élus frontistes sont propulsés à l’Hôtel de Ville suite au bon score réalisé au second tour (19,16 %), pour une fois en hausse par rapport à celui du premier tour. Le très mauvais report sur le candidat de l’UMP Jacques Chauvin s’expliquant sans doute par une usure… cette fois de l’opposant.

Pascal Blanc

Jean-Christophe Savattier et François-Xavier Beuzon

Forte poussée contestataire en région Centre aux élections européennes En région Centre, les élections européennes du mois de mai ont, comme ailleurs, été marquées par le succès de l’abstention. Celle-ci s’établit à 55,12 %, soit un niveau légèrement inférieur à la moyenne nationale (56,12 %). Dans ce contexte, les électeurs auront manifesté avec force leur rejet de l’exécutif. La liste socialiste emmenée par le président de la région Limousin Jean-Paul Denanot ne recueille que 12,82 % des suffrages, soit un bon point de moins que le score enregistré par le PS au plan national. Et trois de moins que celui réalisé sur l’ensemble de la circonscription Massif central-Centre. Toujours au registre de la poussée protestataire, on notera le véritable triomphe de la liste Front national qui emporte largement la première place avec 26,52 % des voix, loin devant l’UMP (21,14 %). Le parti de Marine Le Pen réalise sur le territoire régional près de deux points et demi de plus que sur l’ensemble de la circonscription (24,18 %) et envoie ainsi deux élus (Bernard Monot et Jeanne Pothain) au Parlement européen sur cinq sièges à pourvoir. Cette radicalisation de l’électorat atteint son climax dans le Loir-et-Cher où le FN atteint les 28,50 % des suffrages, le Loiret (28,05 %) et le Cher (27,50 %). Elle correspondrait essentiellement à une expression politique des franges urbaines et du monde rural ; le FN n’obtient que 16,47 % des voix à Tours et plafonne dans une fourchette de 11 à 12 % à Orléans, Bourges, Blois, Chartres et Châteauroux. Autre fait marquant, Sophie Auconie, la députée européenne UDI sortante, manque d’un cheveu sa réélection, sa liste ne parvenant pas à accrocher les 10 % (9,94 % sur l’ensemble de la circonscription Massif central-Centre).

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Points Chauds

Municipales

SERGE BABARY, MAIRE UMP DE TOURS (37)

« Il faut mobiliser tous les Le vainqueur du socialiste Jean Germain à Tours revient sur les raisons de son succès. L’exprésident de la CCI souhaite améliorer le rayonnement et l’attractivité de la ville qu’il juge insuffisamment exploités. La Lettre Valloire : Quelques semaines après les municipales, à quels facteurs attribuez-vous votre succès ? Serge Babary : Il y a eu une conjonction d’éléments favorables. Le rejet du pouvoir socialiste et la vague bleue qui en a découlé ont naturellement produit leur effet. Pour autant, les facteurs locaux ont été déterminants ; je veux parler bien sûr de l’usure du pouvoir après trois mandats et de l’éloignement de mon prédécesseur vis-à-vis des Tourangeaux qui

se posaient beaucoup de questions sur la disponibilité réelle de leur maire cumulant plusieurs charges électives. Quand on est à Paris, on n’est pas à Tours. Il faut ajouter à ceci la qualité de la campagne de proximité que j’ai menée avec mon équipe. Une campagne conduite de manière systématique, qui m’a amené à rencontrer plusieurs milliers de Tourangeaux. Le sentiment profond que nous avons ressenti est que beaucoup d’entre eux se sentaient méprisés, notamment pendant le dernier mandat, et qu’ils avaient juste besoin d’un peu de considération. Je pense que j’ai su répondre à cette attente. Ce n’est pas une posture. Comme je l’ai toujours fait, je saurai toujours prendre du temps pour aller à la rencontre de mes concitoyens sur les marchés, dans les quartiers. Les gens veulent voir leurs élus et pas simplement quelques jours avant les élections. Je pense que mon prédécesseur s’est trop isolé. Peut-être par tempérament et en fonction de certaines circonstances… Surtout parce que le pouvoir isole lorsqu’il n’est pas assez partagé et lorsque celui qui l’exerce s’installe dans une trop longue durée. La Lettre Valloire : La majorité qui s’est réunie derrière vous est-elle assise sur des bases solides ? Les risques de fragmentation, parfois évoqués, sont-ils réels ? Serge Babary : Tout d’abord, et cela doit servir de leçon pour toutes les échéances électorales à venir, j’ai réussi à rassembler tous les courants de la droite et du centre. Cela n’avait jamais été fait localement, du moins depuis le début de l’ère de mon prédécesseur. Les gens attendaient cela ! Comment prétendre vouloir rassembler tous les Tourangeaux lorsqu’on n’est pas capable de rassembler son propre camp ? Nous l’avons fait. Cette majorité est solide ; nous avons réussi à éviter les chicaneries et les problèmes d’ego parce que les rôles et les attributions des uns et des autres ont été clairement établis avant le scrutin, pendant la campagne. J’ajoute que celui ou celle qui serait tenté de fragmenter notre majorité prendrait une lourde responsabilité vis-à-vis de son propre avenir politique. Nous avons du pain sur la planche et il n’est pas question que nous soyons distraits par des querelles subalternes. Encore une fois, tant en phase de conquête que dans ce temps de l’action politique, aux responsabilités, nous devons faire preuve de solidarité et d’unité. Je n’ai d’ailleurs aucune crainte à ce sujet.

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atouts de la ville. » La Lettre Valloire : Quels sont les dossiers dont vous avez dû vous emparer immédiatement ? Serge Babary : Il a fallu, dans l’urgence, régler des dossiers critiques comme celui de l’accueil périscolaire qui avait été bloqué par l’équipe précédente. Des solutions ont été trouvées ; elles semblent satisfaire le plus grand nombre. Il y a toujours des mécontents, qui contestent le principe même de la réforme des rythmes scolaires, mais je rappelle qu’elle n’est pas de la responsabilité du maire; j’applique, dans le cas d’espèce, une décision gouvernementale. Nous l’avons fait. Un accord a été trouvé entre toutes les parties prenantes. Cela va coûter une petite fortune à la municipalité mais nous l’avons fait. La Lettre Valloire : Et pour les chantiers à plus long terme ? Serge Babary : Je ne veux plus que l’urbanisme se déploie à Tours de façon anarchique. Il n’y a plus d’unité architecturale, les programmes se succèdent sans souci de cohérence. Il nous faut une vision globale. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé d’installer un comité d’urbanisme qui sera composé d’élus, des responsables de l’atelier d’urbanisme et de professionnels qualifiés ayant démontré leur compétence. Il nous faut un cadre de référence et en finir avec cet empilement lamentable de programmes qui a d’ailleurs provoqué beaucoup de mécontentement. Par ailleurs, nous avons débloqué le projet de réaménagement du haut de la rue Nationale. Une enquête publique vient d’être lancée et devrait s’achever à la fin de l’été. Les commerçants doivent rapidement savoir à quoi s’en tenir. Je rappelle que cet important programme de requalification prévoit l’installation de deux hôtels 3 et 4 étoiles, de 5 000 m2 de commerce et la création du Centre contemporain Olivier Debré. Nous allons également reprendre le sujet de l’aménagement de la gare, mais il faut être pragmatique : l’urgence, c’est tout d’abord de travailler sur la liaison entre les gares de Tours et de St-Pierre-des-Corps qui doit pouvoir être améliorée sans recourir à la construction d’un téléphérique ou d’un funiculaire ou je ne sais trop quoi ! Je pense qu’en matière de grands travaux et de projets, l’heure est à la pause. Les Tourangeaux sont las des grands bouleversements. Nous allons travailler en profondeur, nous nous devons de ramener de la vie et de l’activité dans les quartiers. Ce ne sera pas toujours spectaculaire mais la bonne santé de la ville et le bien-être de ses habitants sont à ce prix.

La Lettre Valloire : La question du développement économique et de l’attractivité de la ville est-elle centrale dans votre projet ? Serge Babary : Décisive ! Notre ville ne rayonne pas assez, pas au niveau de son potentiel économique, patrimonial et culturel. La question est tellement importante que deux élus, l’un au développement économique, l’autre à l’attractivité, sont à la manœuvre. Il faut mobiliser tous nos atouts dans cette bataille : l’université, le CHRU et ses équipes de médecins et de chercheurs, les pôles d’excellence et de compétitivité. La culture et le patrimoine doivent être au premier plan. Je compte bien faire de Tours un pôle international majeur de la francophonie grâce à l’Institut de Touraine. Il faut profiter de tous les événements comme la 50e édition des Fêtes musicales en Touraine ou le Jubilaire de Saint-Martin en 2016 pour redorer le blason de la ville. Bien sûr, nous allons travailler à la création d’autres événements. Il va falloir aussi être très vigilant sur la liaison TGV avec Paris. Nous ne sommes plus à une heure de Montparnasse, mais plutôt à une heure et quart ! Je souhaite également très rapidement aboutir sur le dossier de la création d’une agence de développement économique qui regroupera la Ville, Tour(s) Plus, la CCI et le conseil général. Nous avons besoin d’un levier puissant à cet égard. Les équipes existent ; il faut juste les adosser à un vrai leadership. Je vous rappelle à ce sujet que je suis viceprésident de l’agglomération en charge du développement économique. Je suis très confiant car si la Touraine souffre, elle a la chance de s’appuyer sur des secteurs comme le ferroviaire, l’énergie, l’aéronautique qui ne sont pas trop touchés par l’atonie des marchés. Et puis notre tissu de PME reste très dynamique et compte parfois des leaders sur des niches méconnues. Il faut simplement remettre un peu de dynamique collective. La Lettre Valloire : Pourquoi avoir laissé la présidence de la communauté d’agglomération à Philippe Briand, maire de St-Cyr-sur-Loire ? Serge Babary : Après avoir proclamé que je serai un maire à 100 %, je n’allais pas me jeter sur la première présidence qui passait ! Je pense que si la ville de Tours doit être reconnue pour la part qu’elle représente, elle ne doit pas mettre Tour(s) Pus à son service. Ce qui était un peu le cas lorsque le maire de Tours présidait l’agglomération et qu’un même DGS dirigeait les deux collectivités. Propos recueillis par Jean-Christophe Savattier

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Points Chauds

Municipales

CONSTANCE DE PÉLICHY, NOUVEAU MAIRE DE LA FERTÉ-ST-AUBIN (45)

« Gérer dans l’esprit d’une démocratie apaisée, moderne et efficace. » Constance de Pélichy (centre droit) a ravi le siège de maire de La Ferté-St-Aubin au socialiste Philippe Froment. La commune était pourtant réputée imprenable.

L

e printemps 2014 restera une saison « extraordinairement chargée en émotions » pour Constance de Pélichy. À 28 ans, elle a, contre toute attente, battu, avec 51,61 % des suffrages exprimés, le maire socialiste sortant. Et le 10 avril, elle a appris la mort de « son père spirituel », Dominique Baudis, « un homme exceptionnel ». À peine remise de ces émotions, elle se prépare aujourd’hui sereinement à tenir son engagement de cam-

pagne : donner « un nouvel élan » à sa commune de 7 300 habitants et la gérer « dans l’esprit d’une démocratie, apaisée, moderne et efficace ». Un défi audacieux lorsqu’on est femme et jeune, de surcroît : « Je ne me pose pas la question de mon âge pour savoir si je peux être un bon maire ou non. De toute façon, on n’élit pas juste un maire, mais aussi une équipe pour l’entourer. Or la mienne est de qualité et va m’aider à prendre les bonnes décisions. ». Madame le Maire (le plus jeune du Loiret) est bien armée pour jouer ce rôle. De brillantes études tout d’abord: après le bac au lycée Pothier d’Orléans, une bi-licence en droit, histoire de l’art et archéologie, puis une maîtrise de droit public économique à l’université de Paris I (Panthéon-Sorbonne) et enfin un master en vie parlementaire et relations institutionnelles à Paris II (Panthéon-Assas). Un solide apprentissage de la politique ensuite : comme assistante parlementaire au Parlement européen de 2009 à 2014 (aux côtés de Dominique Baudis jusqu’à sa nomination comme défenseur des droits en 2011) et en tant que militante, engagée dans la campagne des législatives en 2007, puis des municipales en 2008 dans le 13e arrondissement de Paris derrière une femme de conviction, Véronique Vasseur, l’auteure du fameux Médecin-chef à la prison de la Santé, et enfin durant les européennes de 2009, au service de Dominique Baudis. La campagne des municipales 2014 aura été la première bataille menée en son nom,

sans étiquette de parti pour « garder son indépendance ». « Lorsque j’ai voulu me réinstaller dans ma région, explique cette Blésoise de naissance qui a grandi à Orléans, j’ai choisi La Ferté-St-Aubin, d’où est originaire ma meilleure amie. C’est son père qui m’a invitée au sein de l’association de soutien aux élus de l’opposition. J’ai alors compris que j’avais la possibilité de faire bouger les choses. ». Le nouveau maire a comme ambition pour La Ferté de l’aider à « renouer avec son identité de ville à la campagne (…) Nous voulons aussi embellir le cadre de vie, favoriser l’emploi et l’économie, réaménager certains équipements, stabiliser la dette et l’imposition, maîtriser les charges de fonctionnement ». Bref, faire œuvre de « pragmatisme »… Parce qu’elle veut se consacrer à cette charge, Constance de Pélichy ne songe pour l’instant à briguer aucun autre mandat. Elle veut aussi continuer à pratiquer l’alpinisme et le semi-marathon, lire des bandes dessinées, cuisiner, voyager et rester associée avec son frère et ses deux sœurs dans les entreprises de ses parents, INCB (fabrication de contrôle d’accès en établissement scolaire) et Cartoflex (impression) dans la ZI d’Ingré, et surtout avoir des enfants, son « seul plan de carrière » ! La priorité de Madame le Maire est pour l’heure de « choyer les 150 agents de la commune afin de leur redonner l’envie de s’investir pour leur collectivité ». Car la qualité du « service public » due aux Fertésiens en dépend. Jacques Huguenin


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Points Chauds

Sénatoriales

Des sénatoriales sans suspens En septembre prochain, les sénateurs des départements d’Eure-et-Loir, du Cher et de l’Indre vont remettre leur siège en jeu. Il ne faut pas s’attendre à des bouleversements.

Albéric de Montgolfier

L

es sénatoriales qui se tiendront le 28 septembre 2014 concerneront trois départements de la région : le Cher, l’Eure-etLoir et l’Indre. Afin, probablement, d’opacifier un scrutin dont les byzantines subtilités échappent déjà au commun des mortels, le législateur a choisi de scinder les règles électives : si le Cher et l’Indre, qui sont respectivement représentés par deux élus au Palais du Luxembourg, auront droit à une élection au scrutin majoritaire à deux tours, les trois sièges renouvelés en Eure-et-Loir seront, quant à eux, attribués à la proportionnelle à la plus forte moyenne, sans panachage, ni vote préférentiel. Comprenne qui peut ! Il ne faut pas attendre des modifications des dernières municipales

14 La Lettre Valloire - Juin 2014

qu’elles entraînent de grands changements pour ce renouvellement. Les amateurs de thriller repasseront ! Avec une légère nuance pour l’Eureet-Loir. Certes, le président UMP du conseil général Albéric de Montgolfier, 50 ans cet été, ne devrait pas connaître de sueurs froides, à la mesure de sa très forte implantation locale et de son activisme au Palais du Luxembourg notamment au sein de la prestigieuse et influente commission des Finances. De même, Gérard Cornu, 62 ans, ancien maire de Fontenay-surEure, qui totalise plus de vingt ans de vie parlementaire, devrait également retrouver son fauteuil. Mais de l’avis des observateurs, il pourrait en être autrement pour Joël Billard, 61 ans, le troisième sénateur sortant UMP – par ailleurs maire de Bonneval – qui « semble le plus exposé à la concurrence des candidats de gauche », nous indique un élu chartrain. La proportionnelle pourrait ainsi donner des ailes au maire PRG de Nogent-leRotrou François Huwart, 67 ans, qui vivrait son éventuelle élection au Sénat comme un couronnement de carrière. La vice-présidente PS du conseil régional, Marie-Madeleine Mialot, se mêlera également à la lutte,

avec des chances réduites de succès compte tenu de la faiblesse de son implantation locale. Dans l’Indre, en revanche, c’est la stabilité absolue qui devrait ressortir du scrutin. Le sortant UMP Jean-François Mayet, 74 ans, qui a réussi à transmettre le fauteuil de maire de Châteauroux à son directeur de cabinet Gil Avérous, entend bien réussir un repli bien mérité sur le Sénat. Et y retrouver son complice, le président UMP du conseil général Louis Pinton, 65 ans, qui ne semble pas être en mesure d’être contesté. La gauche berrichonne, ébranlée par les résultats des municipales, n’avait pas encore pressenti de candidat à l’heure où nous écrivons ces lignes. Le schéma est quasiment identique dans le Cher où les modifications du collège électoral ne devraient pas impacter les élections de septembre prochain. L’UMP François Pillet, 64 ans, qui avait succédé à Serge Vinçon suite au décès de ce dernier, retrouvera probablement son siège. Il en sera probablement de même pour l’inamovible Rémy Pointereau, 61 ans, également membre de l’UMP. Jean-Christophe Savattier

La gauche pourrait perdre le Sénat Les victoires de la droite aux dernières municipales ont modifié l’équilibre politique du collège des grands électeurs ; ces changements pourraient aboutir à un renversement de la majorité de gauche au Sénat. Celle-ci ne détient plus que 8 sièges de plus que l’opposition (178 sur 348) : 5 sièges perdus suffiraient donc à faire la bascule. Tous les regards seront braqués en septembre prochain sur Toulouse, la Haute-Vienne et les Bouches-du-Rhône où la droite peut regagner des positions. Jean-Pierre Raffarin, actuel vice-président de la Haute Assemblée, vise le plateau présidentiel et a commencé ses consultations pour y parvenir.


Gérard BouYer

PRÉSIDENT DE LA CCI TOURAINE

« Nous devoNs favoriser la formatioN à tous les Niveaux »

le Président de la CCi touraine insiste sur l’importance critique de la formation professionnelle et de l’apprentissage pour la compétitivité des entreprises.

Pourquoi la formation vous paraît-t-elle un enjeu critique pour le monde de l’entreprise ?

Gérard Bouyer : Tout simplement parce qu’aussi bien au niveau de la formation initiale qu’à celui de la formation continue, l’acquisition de compétences solides et renouvelées permettent de préserver l’employabilité des salariés et la compétitivité des entreprises. À vrai dire, dans un univers hyperglobalisé où beaucoup de pays accèdent à l’éducation et à des savoirs de facture « occidentale », nous n’avons pas d’autre choix que de pousser les feux dans ce domaine pour espérer préserver nos acquis dans la compétition mondiale. À cet égard, nous nous sommes félicités du vote d’une loi portant sur la réforme de la formation professionnelle qui devrait, je l’espère, simplifier et alléger certaines procédures. l’apprentissage est-il suffisamment développé dans notre pays ?

Gérard Bouyer : Évidemment non, et il constitue pourtant une chance formidable pour nos jeunes qui sont en butte à d’importantes difficultés d’insertion dans la vie active. C’est également une chance pour les entreprises qui peuvent se doter de compétences et de jeunes talents qu’ils ont du mal à identifier. Mais nous sommes collectivement responsables de l’image péjorative qui colle encore à la peau de l’apprentissage. Les CCI ont d’ailleurs un rôle important à jouer auprès des jeunes, des parents, des entreprises et de l’Éducation nationale pour que l’offre de formations en apprentissage soit mieux perçue. Par ailleurs, des menaces pèsent sur le financement et la liberté d’affectation des entreprises qui paient la taxe d’apprentissage. Comment ces menaces se caractérisent-elles ?

Gérard Bouyer : Le projet de réforme pour 2015 prévoit notamment la réduction du nombre de collecteurs et la mise en place d’un organisme unique par région, la limitation des habilitations aux établissements pouvant recevoir de la taxe d’apprentissage et de nouvelles modalités de répartition qui renforcent les moyens des conseils régionaux en diminuant la liberté d’affectation des entreprises. Ceci ne va pas dans le bon sens.

RECRUTER ET ME FORMER

CRÉER REPRENDRE TRANSMETTRE

INTÉGRER UN RÉSEAU

AMÉLIORER MA PERFORMANCE

M’INFORMER ET DÉCIDER


Dossier

Transition énergétique

L’énergie

Grand dessein des sociétés développées, qui veulent éviter le scénario noir de la panne électrique mondiale, la transition énergétique cherche un juste compromis entre des intérêts divergents. Mais le chemin vers l’utopique ville post-carbone est long et semé d’embûches. Grosse productrice d’électricité nucléaire mais aussi d’énergies renouvelables, la région Centre tente de trouver une voie originale.

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en quête d’efficacité

T

iraillée entre l’activisme de groupes politiques aussi bruyants qu’ils sont minoritaires et les intérêts économiques de l’une de ses principales filières industrielles, la France se fraie un chemin chaotique vers la transition énergétique. Après deux ans d’atermoiement, le gouvernement s’est enfin donné les moyens politiques de faire adopter une loi sur le sujet. Ségolène Royal, qui mettra tout son poids dans la bataille, présentera son projet au Conseil des ministres du 18 juin, quelques jours après le bouclage de cette édition. On sait que l’ancienne candidate aux élections présidentielles, dont les positions sur l’énergie nucléaire ont évolué au fil des années, souhaite donner la priorité à l’isolation des bâtiments, qui consomment près des deux tiers de l’électricité produite en France. Concernant le mix énergétique, elle s’en tiendrait à l’objectif de 50 % d’électricité d’origine nucléaire

d’ici à 2025. Rien de bien nouveau par rapport aux positions d’EDF, régulièrement exprimées par son président Henri Proglio depuis plusieurs années, qui veut découper le gâteau de la production électrique en trois tranches : 50 % pour le nucléaire – contre environ 75 % aujourd’hui –, 25 % pour le thermique à flamme – 9% aujourd’hui – et 25% pour le bloc des EnR (l’hydraulique représente 11,7 % aujourd’hui et les autres énergies renouvelables 4,6%). Comme on le voit, l’évolution du mix favorisera d’abord les centrales thermiques au charbon, fioul et gaz, encore très polluantes malgré les progrès enregistrés. On n’est pas à un paradoxe près au pays d’Ubu roi. Si la région Centre, tant qu’elle existe dans ce périmètre, reste l’une des places fortes du nucléaire en France – deuxième région productrice après Rhône-Alpes – elle apparaît aussi comme l’une des bonnes élèves en matière d’EnR : l’éolien continue de

croître à un rythme soutenu (+18,6% l’an passé) et d’importantes centrales solaires sont ou vont prochainement être mises en service. Cette originalité ménage les susceptibilités de l’électricien national – plus de 8 000 collaborateurs sur le territoire régional – et celles des écologistes. Sur l’autre versant de la transition énergétique, celui des économies de consommation, la situation est moins idyllique. Comme on peut le lire dans les pages qui suivent, les professionnels du bâtiment demandent une pause dans la frénésie réglementaire. Après une RT 2012 tatillonne, parfois incohérente et entraînant des surcoûts importants – de 10% à 20% du prix de revient d’un logement – les métiers du bâtiment s’inquiètent de la 6e mouture des réglementations thermiques, promise pour la fin de la décennie. Attention que trop de règles ne finissent pas par tuer la règle. François-Xavier Beuzon

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Économie

Transition énergétique

THIERRY SCHALL, DIRECTEUR DU CNEPE DE TOURS

« L'énergie nucléaire reste Le directeur du Cnepe (Centre national d’équipement de production d’électricité) de Tours, l’une des principales plateformes d’ingénierie d’EDF, précise le rôle que peut jouer le nucléaire dans le futur mix énergétique.

La Lettre Valloire : La transition énergétique sonnet-elle le déclin du nucléaire ? Thierry Schall : Je crois que sur ce sujet, il faut faire preuve de beaucoup de pragmatisme. Il suffit d’observer ce qui se passe chez nos voisins allemands pour comprendre que cette affaire ne souffre pas d’un traitement à courte portée. Outre-Rhin, où l’on a engagé un processus de transition il y a une vingtaine d’années et où la culture est très favorable aux énergies alternatives, les politiques et l’opinion s’aperçoivent que le coût du processus et la sortie à vitesse accélérée du nucléaire décidée en 2011 seront beaucoup plus coûteux que prévus. Et que cela risque de compromettre la productivité du fameux modèle industriel allemand. De très grandes capacités éoliennes off shore ont été installées dans le nord de l’Allemagne. Mais pour les relier au sud, où est installée la majeure partie de l’outil industriel, il va falloir tirer des lignes à haute tension sur l’ensemble du territoire. Ce sont des programmes complexes qui ne semblent pas très bien acceptés par l’opinion. La Lettre Valloire : Quelle est la situation en France ? Thierry Schall : Dans le nucléaire, nous sommes dans le temps long. À coût constant, la montée en puissance des énergies renouvelables ne pourra pas se faire en propor18 La Lettre Valloire - Juin 2014

tion des abandons de programmes nucléaires. Savez-vous que le Cnepe travaille aujourd’hui sur un projet d’appel d’offres initié par l’Arabie Saoudite ? Ce pays, un des premiers producteurs de pétrole au monde, envisage de construire une vingtaine de centrales nucléaires de dernière génération. Tout simplement parce que les dirigeants, qui commencent à préparer le peak oil (pic pétrolier), ont fait leurs comptes. Ils ont compris que sur le long terme le nucléaire offrait les meilleures garanties de stabilité de coûts et de sûreté des approvisionnements. Au Royaume-Uni, où nous travaillons à la construction de la centrale EPR de Hinkley Point, le gouvernement va signer un contrat de fourniture avec EDF jusqu’en 2055. C’est un fait, le nucléaire offre aujourd’hui le meilleur rapport qualité/prix/puissance/sécurité et beaucoup de pays font le constat de cette réalité bien établie. Au Cnepe, je rappelle que nous travaillons aux deux tiers pour le parc nucléaire installé et à un tiers pour des projets nouveaux, comme l’EPR de Flamanville ou encore les grands appels d’offres internationaux que j’ai déjà cités. Le nucléaire est réellement une industrie d’avenir et il doit s’insérer dans le mix énergétique tout en faisant place, bien sûr, à toutes les énergies alternatives, parce que c’est souhaitable et que cela va dans le sens de l’histoire. L’idée, c’est de trouver les bons équilibres, de ne pas déstabiliser le modèle français au risque de compromettre la compétitivité de notre économie. Le coût de l’énergie est une variable critique qui va conditionner la santé de nos entreprises et la performance de notre industrie. Elle est aussi l’une des composantes du pouvoir d’achat des ménages. La transition énergétique doit être soutenable. Je crois que c’est tout à fait possible dans le cadre d’un débat dépassionné. La Lettre Valloire : En France, pour pouvoir gérer la transition énergétique, sans compromettre la demande d’énergie et la compétitivité de notre économie, est-il préférable de réinvestir dans le parc nucléaire existant ou de se doter de nouveaux sites de production ? Thierry Schall : La vérité est entre les deux. En tant que technicien du nucléaire, je pense toutefois que nos centrales, qui sont en moyenne exploitées depuis une tren-


indispensable. » Le Cnepe, la tête de pont de la filière électronucléaire régionale Installé au cœur du parc Grandmont de Tours sur 16 000 m2, le Cnepe, qui a connu une croissance « champignon » ces dernières années – les effectifs sont passés de 562 salariés en 2007 à plus de 1 000 en 2014, avec 113 recrutements en 2013 –, constitue bien la tête de pont de la filière électronucléaire régionale. Cette plateforme d’ingénierie, qui travaille sur toutes les parties… non nucléaires des centrales (refroidissement, fabrication de vapeur, sources froides, salle des machines), injecte localement, chaque année, quelque 30 M€ dans l’économie locale, via des contrats de sous-traitance avec des prestataires spécialisés (bureaux d’études et entreprises industrielles) installés en région Centre. « Toutes régions confondues, le montant de ces contrats s’élève annuellement à 600 M€, soit un doublement sur les cinq dernières années », précise Thierry Schall. Véritable tour de Babel, compte tenu de la variété des pays d’origine des ingénieurs accueillis sur le site, le Cnepe va prochainement récupérer des locaux (7 000 m2) qui étaient exploités à Grandmont par des services commerciaux d’EDF. Ces derniers devant rallier les bâtiments de la direction Commerce Grand Centre qui viennent d’être réceptionnés dans le quartier tourangeau des Deux-Lions.

taine d’années et qui, théoriquement, devront être remplacées dans une dizaine d’années, peuvent parfaitement fonctionner dix ans, voire vingt ans de plus. Et ceci sans rien céder aux exigences de sûreté ; c’est même tout à fait le contraire et c’est bien la force du modèle français. Les Américains exploitent leurs unités de production nucléaire pendant près de soixante ans ! En France, pour préserver la durée de vie de nos centrales en service depuis une vingtaine d’années, il faudra investir environ 1 Md€ par réacteur, ce qui correspondra à une production par réacteur de 7 TWh sur vingt ans. Aucune autre énergie ne peut fournir un tel rapport coût/ca-

pacité/sûreté. Dans le même temps, il faut bien sûr continuer à promouvoir les énergies renouvelables. Mais la modification du mix énergétique, qui aboutira inéluctablement à une baisse de la part du nucléaire, ne peut pas se faire dans la précipitation. J’ajouterai enfin que le dernier rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) montre où est l’urgence et insiste sur la nécessité d’accroître la part des énergies peu carbonées (renouvelable, hydraulique et... nucléaire) dans la production d’électricité. Propos recueillis par Jean-Christophe Savattier

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Économie

Transition énergétique

L’éolien toujours sur son petit En région Centre, la filière éolienne continue à croître à un rythme plus élevé que la moyenne nationale. En dépit des obstacles qui se dressent sur sa route.

I

l suffit, pour s’en convaincre, d’emprunter la route nationale 10 ou de monter à bord du TGV Atlantique. Dans les grandes plaines beauceronnes, entre Chartres et Orléans, les mâts des aérogénérateurs se succèdent de façon quasi ininterrompue jusqu’aux portes de l’Île-deFrance, avec d’ailleurs un sens plus ou moins heureux du paysage… En région Centre, l’éolien a le vent en poupe ! Dans son volet consacré à la production d’énergie électrique sur le territoire régional, le bilan 2013 de RTE (Réseau de transport d’électricité), vient d’ailleurs confirmer ce qu’il est aisé de constater de visu. Si la production issue des énergies renouvelables a bien crû l’an passé à un

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rythme soutenu (+ 21,5 %), elle le doit d’abord à la production de la filière éolienne puisque celle-ci a augmenté de 18,6 %. « C’est très sensiblement supérieur à la moyenne nationale », indique un porte-parole de RTE qui souligne que pour l’ensemble du territoire national, la progression n’est que de 6,4 %. En puissance installée*, l’éolien consolide sa première place au classement régional des EnR avec 781 MW, loin devant le photovoltaïque (154 MW), l’hydraulique (92 MW) et le thermique renouvelable (59 MW). « Elle est en progression de 11,3 % en 2013, ce qui est encore une fois supérieur à la moyenne nationale », poursuit ce même interlocuteur, qui classe la ré-

gion Centre au 4e rang des régions françaises dans ce domaine. L’Eure-etLoir tire particulièrement son épingle du jeu puisque la puissance éolienne est de 350 MW (et bientôt 400 MW avec le projet du Moulin d’Emanville, voir ci-dessous), loin devant le Loiret (178 MW) et l’Indre (11 MW). Et cette dynamique ne paraît pas compromise par les freins qui ont pesé ces derniers mois sur le développement de la filière. « Une vingtaine de sites sont aujourd’hui en projet et pourraient aboutir dans les trois ans à venir », remarque-t-on chez RTE : ces différents programmes représentent une puissance potentielle additionnelle de 280 MW. « Il y a, en région Centre, une véri-


nuage table appétence des décideurs et des élus pour l’éolien », indique un développeur. Une appétence qui s’ajoute à des conditions géophysiques favorables, une abondance de foncier agricole disponible et un habitat dispersé. Certes, une partie bruyante de l’opinion s’insurge contre l’édification des mâts d’aérogénérateurs au nom de la préservation des paysages, des espèces migratoires ou de la tranquillité du voisinage – et certaines réunions publiques « sont parfois sportives », comme le relève notre interlocuteur – mais aucune opposition systématique au déploiement des fermes d’éoliennes n’empêche, à ce stade, les projets d’aboutir. Excepté peut-être en Indre-et-Loire où la puissance installée est égale à… zéro ! La suppression des zones de développement éolien (ZDE), prévue au titre de la loi Brottes sur l’énergie,

devrait, en région Centre comme ailleurs, réduire le nombre de contentieux relatifs aux projets. « Mais il y a encore beaucoup d’insécurité juridique et politique sur les délais d’instruction des permis et sur le coût de rachat de l’électricité (82 €/MWh les dix premières années d’exploitation, NDLR) », explique Xavier Nass, le directeur général de JP Énergie Environnement, un développeur et producteur d’énergies renouvelables qui achève, sur les communes d’Allonnes et de Beauvilliers, en Eure-et-Loir, la ferme éolienne du Moulin d’Emanville : ces 17 machines, dont la puissance installée atteindra 51 MW, ont nécessité un investissement de 80 M€ largement soutenu par la Caisse des dépôts (lire page suivante), Natixis Lease et la Caisse d’Épargne LoireJean-Christophe Savattier Centre.

* Puissance installée : la puissance dite "installée" d’un aérogénérateur s’exprime en kilowattheure ou en mégawattheure ; elle mesure la quantité d’énergie produite en une heure lorsque que la machine est exploitée dans des conditions optimales.

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Économie

Transition énergétique

PASCAL HOFFMANN, DIRECTEUR RÉGIONAL DE LA CAISSE DES DÉPÔTS

La Caisse des dépôts, un acteur majeur des EnR La puissance publique a délégué à la Caisse des dépôts la mission de soutenir le développement des énergies renouvelables dans les territoires. Son directeur régional nous en détaille les raisons. La Lettre Valloire : Pourquoi la Caisse des Dépôts s’implique-t-elle de façon aussi importante dans la production d’énergies renouvelables ? Pascal Hoffmann : Nous avons trois priorités. La première est d’accompagner les politiques publiques dans des projets d’intérêt général. En matière d’énergies renouvelables, la Caisse des dépôts contribue à l’atteinte des objectifs fixés à la France dans le cadre du paquet européen ÉnergieClimat. La deuxième est de décentraliser la production énergétique sur le territoire national et créer ainsi de la richesse locale. Enfin, la troisième est de maintenir la concurrence dans un secteur concentré. Pour mémoire, l’objectif de production d’énergies renouvelables issu du Grenelle de l’environnement et du paquet européen est d’augmenter de 10 à 23 % la part des énergies renouvelables dans la consommation intérieure française à horizon 2020. La réglementation liée aux installations de production d’EnR est toujours très instable et rend difficile la recherche d’investisseurs et de financements. En tant qu’investisseur de long terme, la CDC donne des « gages» aux autres partenaires des projets pour en assurer la stabilité et la solidité. La Lettre Valloire : Quelle est la logique financière et industrielle de ces projets ? La Caisse des dépôts en attend-elle un retour sur investissement ou s’agit-il d’une mission d’intérêt général sans but lucratif ? Pascal Hoffmann : La CDC investit dans des sociétés de projets aux côtés de PME pour développer de nouvelles unités de production d’énergies renouvelables. Elle intervient donc en

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greenfield, de façon minoritaire, dans des sociétés de projets sur des technologies matures. Nous visons, en tant que tiers de confiance, un effet de levier équivalent à 8 fois notre apport de fonds propres et attendons une rentabilité équivalente à celle de nos partenaires, sans toutefois poursuivre de démarche spéculative. La Lettre Valloire : Peut-on déjà mesurer l’impact économique des interventions de la Caisse des dépôts, notamment en terme d’emploi et d’indépendance énergétique ? Pascal Hoffmann : Les retombées d’emploi sont réelles, notamment dans la filière biomasse, même si elles sont difficilement quantifiables. Les territoires y gagnent aussi, sur le plan de l’indépendance énergétique comme sur le plan économique, avec les redevances versées aux collectivités locales. La Lettre Valloire : Quels sont les principaux investissements accompagnés par la Caisse des dépôts en région Centre ? Pascal Hoffmann : Trois projets sont engagés à ce jour. Le premier est en exploitation depuis juillet 2011 : il s’agit de la centrale photovoltaïque de Chaillac, dans l’Indre, qui a nécessité un investissement de 13,2 M€ porté par la SAS Barisol (51 %) et la CDC (49 %). Le deuxième, une unité de biométhanisation située dans le Sancerrois, est en phase de lancement. Elle est destinée à traiter 38 000 tonnes de déchets issus de l’agriculture et de l’agroalimentaire et produira de l’électricité et de la chaleur en cogénération : l’investissement est de 8,2 M€ et nous en supportons près de 35 % avec nos deux partenaires, dont la SAS Marnay Énergie. Enfin, le troisième, un parc éolien développé par JP Énergie Environnement à nos côtés (la CDC détient 30% de la SAS Beauce Énergie, qui l’exploite), est en construction à Allonnes et Beauvilliers, en Eure-et-Loir, depuis le début de l’année 2013 ; la mise en service des 17 machines, représentant 51 MW, est imminente. Le parc a nécessité un investissement de 80 M€ et sa production devrait couvrir la consommation d’une ville de 30 000 habitants. Propos recueillis par François-Xavier Beuzon


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Économie

Transition énergétique

Orléans fait feu de tout bois Orléans s’est dotée d’importantes capacités de chauffage collectif utilisant la biomasse. D’autres collectivités pourraient lui emboîter le pas. Mais la filière pâtit de la pusillanimité des aides publiques. agglomération orléanaise a pris une longueur d’avance dans le domaine du chauffage collectif urbain utilisant des sources d’énergies renouvelables. Ainsi, au nord d’Orléans, dans le quartier des Groues où doit être édifié un écoquartier, plusieurs équipes s’affairent et se relaient depuis le mois de mars

L’

alternativement pendant la saison de chauffe (d’octobre à mars), puis pendant l’été, accroissent grandement son efficacité énergétique. » Celle-ci s’élèvera à environ 60 % alors que le taux moyen des plateformes biomasse se situe plutôt autour de 50 %. Elle sera en mesure de délivrer 25,3 MW d’énergie thermique ainsi

mairie d’Orléans, soit l’équivalent des émissions moyennes de 40 000 véhicules. Une performance écologique qui s’inscrit pleinement dans les engagements prévus au titre de l’Agenda 21 auquel la cité johannique a décidé de se conformer. Les chaufferies biomasse ne sont pas seulement bénéfiques du point de vue

pour construire une seconde centrale biomasse ; elle devrait être opérationnelle cet automne. Le site, qui va nécessiter un investissement d’environ 55 M€ engagé dans le cadre d’une délégation de service public (DSP) par Cofely (groupe GDF Suez), sera en mesure d’assurer le chauffage de 12 000 équivalents logements. Les clients, de l’ordre d’une vingtaine, « sont des bailleurs sociaux ou des gestionnaires de grands établissements publics tels que des hôpitaux », indique un porte-parole du délégataire. Cette plateforme de cogénération – productrice à la fois de chaleur et d’électricité – sera dotée d’une technologie sans équivalent en France, qui n’est dupliquée qu’à quelques exemplaires en Europe. « La centrale est dotée de deux turbines, l’une à contre-pression, la seconde à condensation, qui, en fonctionnant

que 12 MW d’électricité. Fonctionnant grâce à l’apport annuel de 110 000 tonnes de bois énergie, le site, très automatisé, n’emploiera que 14 salariés. Cette plateforme vient compléter les installations de la première chaufferie biomasse orléanaise mise en service en 2012 par Dalkia à La Source, toujours dans le cadre d’une DSP. Le site, qui a également requis un investissement de 50 M€, est équipé d’une chaufferie biomasse de 25 MW qui produit de la chaleur pour le réseau urbain (17 MW) et 7,5 MW d’électricité. Avec ces deux centrales à bois, l’agglomération d’Orléans a trouvé moyen de « verdir » son bilan énergétique. « Si on cumule l’activité des deux unités biomasse, on peut estimer qu’elles permettent d’éviter annuellement près de 90 000 tonnes d’émission de CO2 », indique-t-on à la

du développement durable. « Elles permettent aussi à nos clients de réduire significativement leur facture d’énergie », souligne Guillaume Coupeau, le directeur du développement de Dalkia pour le Centre-Ouest. Depuis la mise en service de la chaufferie biomasse, la dépense a été réduite de 20 %. « Malheureusement, nos clients n’ont pas ressenti cette diminution parce que dans le même temps, le volet gaz de leur facture a sensiblement augmenté », poursuit Guillaume Coupeau. L’impact positif sur la structuration aval de la filière bois ne constitue pas le moindre des bénéfices des chaufferies collectives utilisant la biomasse. La collecte et la transformation du bois-énergie favorisent aussi l’activité d’exploitants-forestiers et la valorisation énergétique de sous-produits de la forêt – notamment du bois

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d’éclaircie – qui ne peuvent pas être utilisés par les papetiers et les fabricants de meubles. « Et il s’agit d’emplois non délocalisables puisque situés dans un rayon d’une centaine de kilomètres autour de la plateforme », indique Pierre de Montlivault, directeur général de Bois Énergie, une filiale de Dalkia, et administrateur de la Fedene. Celui-ci juge toutefois que de nombreux freins pénalisent encore le développement de la filière biomasse : « Une fiscalité plus incitative fondée sur un système de bonus-malus pourrait pousser les propriétaires forestiers à valoriser leurs biens. ». Un comité stratégique bois, installé récemment, pourrait prochainement faire des propositions sur le sujet. Mais c’est surtout l’aide à l’investissement et à l’exploitation de ces centrales biomasse – le coût d’une chaudière biomasse est

Pierre de Montlivault

cinq fois supérieur à celui d’une chaudière gaz – qui apparaît aujourd’hui largement insuffisante aux yeux des professionnels. « Le fonds chaleur, cité comme un exemple d’aides publiques par la Cour des comptes, est doté annuellement de

220 M€. Il en faudrait le double pour pouvoir se conformer aux objectifs français sur le chapitre biomasse d’ici à 2020 », estime Pierre de Montlivault. De même, le tarif de rachat d’électricité par EDF – 140 € le kilowattheure – n’est pas suffisant pour les pionniers de la cogénération. « Les premiers appels d’offres publics, qui ont d’ailleurs permis de lancer le projet orléanais, étaient fondés sur un prix supérieur de 10 %. ». Mais les professionnels de la filière biomasse devront-ils éternellement tendre la sébile aux pouvoirs publics ? « Le moment n’est pas favorable parce que les prix du gaz se sont stabilisés à cause de la crise. Mais lorsque l’activité redémarrera, on s’apercevra que le modèle économique de la filière biomasse est pertinent », conclut Pierre de Montlivault. Jean-Christophe Savattier

RT 2012, la suite d’une longue série réglementaire La RT 2012 est la 5e version d’une série de RT (RT 1974, RT 1988, RT 2000 et RT 2005) qui ont peu ou prou pour finalité de limiter la consommation énergétique des bâtiments neufs. Issue du Grenelle de l’Environnement, la RT 2012, applicable à tous les bâtiments neufs, résidentiels et tertiaires, dont le permis de construire est déposé depuis le 1er janvier 2013, impose un objectif de consommation d’énergie primaire inférieure à 50 kWh/m²/an. Ce seuil varie selon la région climatique (6 régions) : il ne s’applique ainsi pas de la même manière à Orléans qu’à Tours !

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Économie

Transition énergétique

Quand les normes énergétiques Les nouvelles réglementations thermiques ont vocation à favoriser la construction de maisons ou immeubles moins gourmands en énergie et plus respectueux de l’environnement. Sauf que l’empilement de ces normes pèse dangereusement sur le dos des entreprises du bâtiment, déjà bien affectées par la crise.

E

n théorie, la réglementation thermique RT 2012 et toutes celles qui l’ont précédée ou sont en préparation partent d’une louable intention : consommer moins d’énergie et faire du bien à la planète. La RT 2012 oblige ainsi les professionnels du BTP à améliorer l’isolation, le chauffage et l’étanchéité à l’air des nouveaux bâtiments collectifs ou individuels. En pratique, sa mise en application ressemble souvent à un casse-tête, même si la démarche est « une révolution culturelle pour la profession », indique Aline Mériau, présidente de la Fédération française du bâtiment (FFB) pour le Loiret (1 000 entreprises adhérentes, dont 85 % artisanales, sur les 3 500 que compte la Fédération régionale) et présidente des CFA du BTP de la région Centre. « Cette réglementation, ambitieuse et novatrice, oblige les entreprises à travailler davantage ensemble qu’autrefois », reconnaît Aline Mériau, elle-

Pascal Hillenveck, secrétaire général de la Capeb Centre et Élisabeth Boulnois, chargée de mission emploi-formation à la Capeb Centre.

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même gérante de l’entreprise d’électricité Elicaum, à Fay-aux-Loges (45). En conséquence, entreprises et artisans doivent se former aux nouveaux équipements, matériaux et normes, ce qui impose d’adapter les référentiels métiers et les différentes plateformes de formation. « Nous sommes tous en phase d’apprentissage de la RT 2012, ce qui prend du temps », résume Aline Mériau. « Les organismes de formation ont du mal à suivre les exigences des normes, confirme Élisabeth Boulnois, chargée de mission emploiformation à la Capeb Centre, qui représente 2 500 entreprises de moins de 10 salariés. Cela demande un investissement permanent dans les plateaux techniques et la formation des formateurs, et ces renouvellements ne sont pas toujours faciles à mettre en œuvre, car ils reposent parfois sur des incitations financières ou réglementaires transitoires. » « De toute façon, les artisans et les PME n’ont pas le choix. Ils sont

désormais obligés d’avoir une éco-qualification RGE

(reconnu garant de l’environnement) s’ils veulent travailler sur des chantiers RT 2012 et faire bénéficier à leurs clients d’un crédit d’impôt », explique Pascal Hillenveck, secrétaire général de la Capeb Centre. Deux qualifications, gérées par Qualibat, ont d’ailleurs été créées : « l’éco-artisan » par la Capeb et « les pros de la performance énergétique » par la FFB. « Pour les artisans, le problème est l’amoncellement de qualifications dans tous les domaines avec, de surcroît, des dossiers à monter et des cotisations à payer, témoigne Pascal Hillenveck, autrement dit l’accumulation de lourdeurs. Nos adhérents croulent aussi sous la masse des informations et sollicitations de fournisseurs ou autres partenaires, parfois divergentes, qui leur tombent dessus en cette période de morosité économique. Ce qui était au départ une perspective de nouveaux marchés est devenu une contrainte supplémentaire. » D’autant que l’application de la RT 2012 est aussi synonyme de surcoût


virent au casse-tête (10 % selon la FFB, jusqu’à 20 % au dire de certains professionnels) pour le client, même si ce surcoût doit être considéré comme un investissement devant permettre de générer à terme des économies… « Si les gens aisés sont

prêts à investir et attendre le retour sur investissement, estime Pascal Hillenveck, les moins aisés, en revanche, ont tendance à annuler ou retarder le projet de construction d’une maison aux normes, même s’il existe des aides attribuées sous conditions de ressources. » De plus, tout propriétaire occupant d’un bâtiment RT 2012, et demain RT 2020, doit être lui-même suffisamment éduqué et formé à bien utiliser et entretenir les équipements électriques et électroniques de ces bâtiments « basse consommation » ou à « énergie positive ». Pari difficile à gagner… Et ce n’est pas tout... « Nous avons constaté des incohérences dans la mise en œuvre de la RT 2012 qui se traduisent notamment par son incompatibilité avec d’autres règlementations, la non-conformité des mises en œuvre des isolants avec les DTU (les documents techniques unifiés : les règles de l’art) ou encore le manque d’avis technique concernant la mise en œuvre des produits», indique Aline Mériau qui a saisi

les services de l’État du problème, aux côtés de bureaux d’études et de l’Ofbat (Office du bâtiment), une instance de concertation paritaire entre le Syndicat des architectes et la FFB. « L’architecte, premier acteur de la construction directement concerné par la RT 2012 dès l’esquisse de son projet, est confronté à des incohérences entre les diverses réglementations, mais aussi avec les documents d’urbanisme qui, souvent, sont en complète opposition avec les contraintes bioclimatiques, s’agissant notamment de l’orientation des bâtiments, confirme Alain Barodine, architecte et président de l’Ofbat. Cet élément primordial de performance énergétique peut, en cas d’une implantation non favorable, engendrer une isolation beaucoup plus importante et des travaux plus coûteux. » Enfin, gare au non-respect de la RT 2012 ! Dans chaque département, la DDT (Direction départementale des territoires, qui regroupe notamment l’ancienne DDE), a pour mission de contrôler de façon inopinée, après la réception des travaux, la conformité des nouveaux bâtiments aux exigences de la RT. Les contrevenants, les entreprises comme les particuliers, risquent des sanctions ou une obligation de reprise de travaux pour atteindre la performance exigée.

« La DDT est dans un rôle de contrôle, alors qu’il faudrait qu’elle fasse de la prévention, de l’accompagnement, de la pédagogie auprès des entreprises », déplore Aline Mériau. Bref, il faut donc aujourd’hui « calmer le jeu », « faire une pause réglementaire », « laisser le temps aux artisans de se former et s’adapter à l’actuelle RT avant de passer à celle de 2020 », conclut l’ensemble des acteurs de la construction. Il en va de la qualité des réalisations et surtout de la survie de nombreuses entreprises, noyées sous les charges et les normes, alors qu’elles sont obligées de rogner leurs marges et que leur carnet de commandes ne dépasse guère les trois mois.

Aline Mériau

Jacques Huguenin

RT 2012, la suite d’une longue série réglementaire La RT 2012 est la 5e version d’une série de RT (RT 1974, RT 1988, RT 2000 et RT 2005) qui ont peu ou prou pour finalité de limiter la consommation énergétique des bâtiments neufs. Issue du Grenelle de l’environnement, la RT 2012, applicable à tous les bâtiments neufs, résidentiels et tertiaires, dont le permis de construire est déposé depuis le 1er janvier 2013, impose un objectif de consommation d’énergie primaire inférieure à 50 kWh/m²/an. Ce seuil varie selon la région climatique (6 régions) : il ne s’applique ainsi pas de la même manière à Orléans qu’à Tours !

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Économie

Transition énergétique

BERNARD PICHOT, PRÉSIDENT DE CENTRE IMMO PROMOTION

« SVP, une pause dans la création de nouvelles normes ! » Le patron de Centre Immo Promotion, l’un des principaux promoteurs immobiliers de la région Centre, a anticipé l’arrivée de la RT 2012. Mais il réclame une pause réglementaire. La Lettre Valloire : Quel est l’impact de la RT 2012 sur votre métier et vos programmes immobiliers ? Bernard Pichot : La RT 2012 a le même niveau de performance que la RT 2005 avec le label BBC, que nous recherchions déjà. Nous avons donc anticipé la mise en œuvre de cette nouvelle RT pour les nouveaux logements, même si elle nous a conduits à tâtonner pendant deux ans pour faire la chasse aux ponts thermiques, installer des systèmes de chauffage, de ventilation et de production d’eau chaude plus performants que par le passé. Vis-à-vis de l’immobilier d’entreprise, la priorité est d’agir sur l’orientation nord-sud du bâtiment, son isolation extérieure et son inertie, son système de chauffage-climatisation et ses dépenses d’électricité. La tendance est de réaliser la coque en tout-béton, avec une peau extérieure ventilée et isolée, des matériaux qui génèrent une grande inertie et permettent de stopper les apports thermiques extérieurs le jour et de restituer la fraîcheur de la nuit et, à l’intérieur, d’installer des détecteurs de présence, des luminaires graduables en fonction de la luminosité de la pièce, de grandes fenêtres avec vitres isolantes et des stores extérieurs orientables manuels ou automatisés. En règle générale, moins l’enveloppe extérieure est performante en isolation, plus il faut de bons équipements intérieurs. La RT 2012 nécessite une réflexion plus poussée qu’autrefois, une remise en question de nos habitudes. Nous devons faire appel à des bureaux d’études spécialisés pour nous conseiller, discuter avec l’architecte, et nos fournisseurs doivent être capables de nous proposer de nouveaux procédés ou équipements.

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La Lettre Valloire : Comment vos clients réagissentils ? Bernard Pichot : L’application de la RT 2012 génère un surcoût moyen de 5 à 12 %, voire davantage dans les zones à fortes contraintes architecturales. Mais c’est le prix à payer pour que les utilisateurs consomment et paient moins d’énergie. Comme il est difficile de vendre les logements beaucoup plus chers, nous devons négocier à la baisse le prix des terrains et optimiser les coûts de construction en partenariat avec les concepteurs et les entreprises. Pour nos clients de l’immobilier d’entreprise, le choc est plus violent, car la RT 2012 est en train de créer un parc de bureaux obsolète. Les bâtiments édifiés il y a quelques années sont déjà dépassés. La démarche pour les occupants est donc de renégocier leur loyer pour pouvoir assumer leurs charges énergétiques, beaucoup plus lourdes que celles des immeubles de nouvelle génération. La Lettre Valloire : Comment vous préparez-vous à l’apparition de la RT 2020 ? Bernard Pichot : Aller vers la RT 2020 et le Bepos (bâtiment à énergie positive, NDLR) va impliquer de rendre parfaitement étanche à l’air extérieur un bâtiment et, en contrepartie, d’optimiser la circulation de l’air et la consommation énergétique à l’intérieur. Pour y parvenir, il va falloir quasiment tout automatiser et s’appuyer sur une domotique perfectionnée. Le succès d’un Bepos dépendra donc surtout de la réactivité de l’utilisateur et de sa capacité à maîtriser ces automatismes, ce qui n’est pas gagné ! Le problème, c’est que trop de contraintes, souvent contradictoires, pèsent sur le BTP : les normes acoustiques vont ainsi à l’encontre de celles du Bepos… Nous souhaitons donc une pause dans la création continue de normes par les pouvoirs publics. Propos recueillis par Jacques Huguenin


Javaux profite de la transition énergétique Le transformateur chartrain de mousses s’est positionné sur le marché des isolants thermiques, un marché dopé par le durcissement des normes environnementales et notamment de la fameuse RT 2012.

À

Maintenon, près de Chartres (28), la société Javaux, spécialisée notamment dans la transformation et la découpe de mousse en polyéthylène, a rapidement compris tout l’intérêt d’un positionnement sur les marchés de l’isolation thermique pour le bâtiment, des marchés dopés par le durcissement des normes environnementales. « La norme RT 2012 et ses spécifications techniques constituent une source importante de business », reconnaît volontiers Thierry Saviane, le pdg d’une entreprise (30 salariés, 5,5 M€ de CA en 2013) qu’il a reprise en janvier 2011 après avoir été l’un des dirigeants d’Ametis à Gallardon (28), un spécialiste de l’étiquette adhésive pour l’industrie pharmaceutique.

« À ce jour, le secteur du bâtiment, au sens large, représente 25 % de la facturation. Mais il est difficile d’isoler précisément ce qui est induit par l’application de la RT 2012. » L’entreprise chartraine, qui peut produire tous types de formats (rondelles, profilés, adhésifs) de manière très spécifique, a donc décidé d’engager une prospection commerciale ciblée. « C’est toujours assez complexe d’identifier les bons contacts commerciaux, poursuit Thierry Saviane, mais il y a un fil rouge. » De façon générale, les entreprises de menuiserie industrielle ainsi que les spécialistes des « ouvrants » et des ponts thermiques constituent des utilisateurs potentiels des produits Javaux, des produits susceptibles « d’isoler, d’étanchéifier et de calfeutrer ».

Pour autant, Thierry Saviane redouble de prudence : il n’entend pas tout sacrifier à l’engouement pour la rénovation énergétique. « Nous continuons aussi à travailler pour d’autres marchés notamment le médical qui représente 25 % du CA. » Les 50% restants étant composés par les marchés du luxe et notamment par la bagagerie haut de gamme. Jean-Christophe Savattier

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Économie

Transition énergétique

ANDRÉ KIENER, DIRECTEUR D’EDF COMMERCE GRAND CENTRE

« Les PME ont tout à gagner à investir dans l’efficacité énergétique. » Le responsable de la direction commerciale régionale d’EDF défend les politiques d’efficacité énergétique déployées par l’opérateur qui multiplie les initiatives dans ce domaine. La Lettre Valloire : Pourquoi EDF s’est-il lancé dans la bataille de l’efficacité énergétique ? André Kiener : Nous ne sommes pas qu’un simple fournisseur d’électricité ou de gaz comme la plupart de nos concurrents mais un énergéticien en mesure d’aider nos clients à maîtriser leurs dépenses d’énergie. Grâce à nos quelque soixante-dix ans d’expérience dans la relation clientèle et notre implantation de proximité – je rappelle que la direction Commerce Grand Centre d’EDF compte un bon millier de collaborateurs en régions Centre, Poitou-Charentes et Limousin – nous sommes capables d’accompagner nos clients professionnels comme nos clients particuliers grâce à nos offres et nos filiales dédiées, telles EDF Optimal Solutions et Verdesis et à nos partenaires EDF Bleu Ciel. Il faut tout de même bien comprendre qu’un travail sur les comportements, les équipements et les usages peut générer des économies de 10 à 15%, voire plus, sur les factures. L’enjeu est donc considérable pour les particuliers, les collectivités locales, bien sûr, qui ont pris pas mal d’avance sur le sujet, mais aussi pour les entreprises qui ont besoin de regagner de la compétitivité. Aujourd’hui, en dépit des efforts réalisés par

les ménages et en raison de nouveaux usages – notamment liés à la généralisation des équipements électroniques –, la consommation d’électricité des particuliers progresse d’environ 1% par an. Chez les professionnels, la consommation décline plutôt de 1 à 2%, une érosion qui s’explique en partie par l’impact de la désindustrialisation. La Lettre Valloire : Comment les entreprises peuventelles réduire leurs dépenses d’énergie ? André Kiener : Il y a de multiples leviers. Sur le plan des équipements, les entreprises peuvent travailler sur l’éclairage en remplaçant l’existant par de la basse tension ou des éclairages LED. Les industriels peuvent améliorer l’exploitation de leurs moteurs en choisissant des modèles à vitesse variable. Les entrepreneurs peuvent aussi investir dans de nouveaux équipements moins énergivores, c’est notamment le cas dans le domaine de la transformation plastique avec les nouvelles générations de presse à injecter. Il y a, bien sûr, tout le potentiel d’économie que représente le poste chauffage-climatisation-ventilation. Je rappelle que des dispositifs de type CPE (contrats de performance énergétique) pour les collectivités et PPE (plans de performance énergétique), permettent à tous ces acteurs d’amortir leurs investissements par les économies d’énergie qui seront réalisées au cours de l’exploitation. Des économies sur lesquelles nous engageons notre responsabilité après réalisation d’un audit. La Lettre Valloire : Les entreprises accordent-elles un crédit suffisant à ces politiques d’efficacité énergétique ? André Kiener : Les collectivités ont pris de l’avance sur le sujet, les plus grosses entreprises également ; c’est moins le cas pour les PME/PMI et les TPE. Nous devons mener un important travail de sensibilisation auprès de cette catégorie de clientèle qui a évidemment tout à y gagner. Nous estimons que les professionnels peuvent obtenir en deux ou trois ans un bon retour sur un investissement pour l’efficacité énergétique. À condition bien sûr d’être correctement accompagnés... Propos recueillis par Jean-Christophe Savattier

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Économie

En bref

LA FAÏENCERIE DE GIEN REPRISE PAR PASCAL D’HALLUIN n redressement judiciaire depuis février dernier, la holding Gien Finance, qui contrôle la Faïencerie de Gien (11 M€ de CA, 160 salariés), a été reprise par la société Tabag dirigée par Pascal d’Halluin. Ce dernier, qui s’est engagé à préserver la totalité des effectifs, et même à procéder à des embauches, est un spécialiste du marketing de la mode. Il a notamment œuvré pour le compte des marques Cacharel, Lacoste, Lee Cooper et L’Oréal Parfums (1986-1994). Le tribunal a accepté qu’une nouvelle société en cours de création – la SAS Pont aux Choux – se substitue prochainement à la société Tabag. Elle sera dirigée par Yves de Talhouët, qui fut le président de HP France ; il devrait également assurer la direction opérationnelle de la Faïencerie de Gien.

E

LA BISCUITERIE ROUGIER RACHETÉE La biscuiterie Poult (190 M€ de CA, 750 salariés), qui exploite notamment la biscuiterie Rougier (21 M€ de CA, 70 salariés) à Sully-sur-

Loire (45), a été cédée par le fonds LBO France à Qualium, un investisseur en fonds propres filiale de la Caisse des dépôts. Poult est une entreprise leader sur le marché des biscuits secs commercialisés en

marque distributeur avec près de 330 millions de paquets vendus par an : le groupe exploite quatre autres sites industriels sur le territoire français.

GRAPHIVAL VA DÉMÉNAGER À JOUÉ-LES-TOURS

Racheté l’an passé par Olivier Delpech, l’ancien directeur de l’usine Michelin de Joué-lès-Tours (37), l’imprimerie Graphival (17 salariés) a de nouveaux projets. À l’étroit dans ses locaux actuels de Ballan-Miré (37), l’entreprise prévoit de déménager à la fin de l’année à Joué-lès-Tours dans un bâtiment dont elle sera propriétaire sur la ZI des Bretonnières ; des travaux de rénovation sont programmés afin de remettre le site aux normes environnementales.

HF COMPANY ACHÈVE LA CESSION DE SON PÔLE CONFORTIQUE Le groupe HF Company (environ 100 M€ de CA), dont le siège se trouve à Tauxigny, près de Tours (37), a finalisé la cession de son pôle Confortique à un pool d’investisseurs composé de Demeter Partners, de BNP Paribas Développement et d’Innovafonds pour une valeur d’entreprise de 23,5 M€. Ce pôle Confortique composé des sociétés Avidsen, Extel, Maisonic et de leurs filiales à l’international, représente un CA de 38 M€ et emploie environ 310 salariés. Les sièges de ces sociétés cédées se situent tous en Touraine si l’on excepte Extel, implanté en région lyonnaise.

Le mardi 1er juillet 2014, à partir de 8 h 30 FOCSIE Centre organise dans ses locaux 6-8 avenue de l’Alouette (Tours Sud), un petit-déjeuner sur le thème « Concilier vie privée et vie professionnelle : santé, égalité et organisation du travail en questions ». Réservation au : 02 47 41 94 96

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NEXTER RACHÈTE MECAR ET SIMMEL DIFESA Après avoir racheté en février dernier le toulousain Paul Boyé Technologies, le groupe d’armement Nexter, installé notamment à Bourges et à la Chapelle-St-Ursin (18), vient de boucler une nouvelle opération de croissance externe. Pour 168 M€, il vient d’acquérir le belge Mecar (125 M€ de CA, 355 salariés) et l’italien Simmel Difesa (59 M€ de CA, 255 salariés) auprès du groupe britannique Chemring, dans le but de renforcer son pôle munitions

(terrestres, aéronautiques et navales).

REVIL ET NEYRAT S’INSTALLE SUR ARBORIA Toutes deux propriétés de la famille Neyrat, les sociétés Revil (80 salariés, 12 M€ de CA) et Neyrat (30 salariés, 4 M€ de CA), respectivement dédiées au gros œuvre et aux travaux de finition, et installées à ce jour à Villemandeur (45), vont, probablement en octobre 2014, déménager dans des locaux de 1 900 m² sur le parc d’activités Arboria à Montargis (45). L’investissement, qui s’élève à environ 1,5 M€, se traduira par une trentaine d’embauches sur les deux ou trois prochaines années.

HB FULLER INAUGURE À BLOIS Le fabricant de colles industrielles HB Fuller, qui emploie 96 salariés à Blois (41), vient d’inaugurer sur son site une nouvelle unité de 1 500 m² spécialisée dans les formulations pour l’emballage ; un ancien bâtiment a été réhabilité à cet effet. Le programme d’investissement de cette opération s’élève à 10 M€ et couvre la modernisation et l’installation de deux lignes de production automatisées ainsi que la réorganisation du laboratoire de recherche. L’unité fabrique des centaines de références de colles (emballages, électronique, étiquettes alimentaires, édition, textile, hygiène, etc.) pour une production d’environ 20000 tonnes.

BAZILLE S’INSTALLE À ASCOUX

Implantée aujourd’hui dans des locaux obsolètes à Yèvre-la-Ville, près de Pithiviers (45), la société Bazille (une quinzaine de salariés, 1,8 M€ de CA en 2013) va prochainement déménager sur la ZA

d’Ascoux (45). Didier Georgelin, le pdg de ce fabricant de tournants sphériques pour la robinetterie industrielle, va lancer à l’automne la construction d’un bâtiment de 1 600 m² dans lequel Bazille déménagera probablement en août 2015.

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Économie

Emploi

JEAN-MARC VERMOREL, DIRECTEUR RÉGIONAL DE PÔLE EMPLOI

« Les entreprises exigent des compétences de plus en plus fortes. » Le service public tente de s’adapter à une demande de profils de plus en plus pointus de la part des entreprises, alors que la situation de l’emploi reste toujours très tendue. Acteur majeur d’un marché ouvert à la concurrence, notamment celle des job boards, Pôle Emploi tient aussi à être le garant des bonnes pratiques de recrutement. La Lettre Valloire : Quelle analyse peut-on tirer des résultats de votre dernière enquête BMO (Besoins en Main-d’Œuvre) ? Jean-Marc Vermorel : Les résultats de l’enquête menée durant le dernier trimestre 2013 et qui porte sur les prévisions d’embauche en 2014 montrent que nous sommes encore dans une période de stabilisation. Cette année, les projets de recrutement exprimés par les entreprises régionales interrogées s’élèvent à 53 017, contre 53 000 en 2013. Signe encourageant : 17,6 % des établissements du territoire envisagent d’embaucher, un progrès par rapport à l’an passé où nous étions à 15,8 %. Près de 6 projets sur 10 concernent le secteur des services, ce qui en dit long sur son importance pour notre économie. L’autre enseignement majeur est la forte proportion des recrutements jugés « difficiles » (43,2 %). C’est une tendance forte : les entreprises exigent des compétences de plus en plus fortes et peinent à trouver des profils en adéquation. La Lettre Valloire : Comment répondre à cette exigence de compétences demandée par les employeurs ? Jean-Marc Vermorel : Notre outil, c’est la formation. L’an passé, le plan « 30 000 formations », mis en place par l’État et les partenaires sociaux, a connu un vif succès en région Centre. L’objectif de 1 100 formations a été largement dépassé et nous en avons assuré 1 400 en axant plusieurs sur les métiers dits «en tension», q u i sont

ceux sur lesquels les plus gros problèmes de recrutement sont constatés. Cette année, le gouvernement a fixé un cap de 100 000 entrées en formation supplémentaires : la région Centre devra y participer à hauteur de 3,55 % en s’appuyant sur les moyens alloués par l’État et sur les financements dégagés par tous les financeurs habituels de la formation professionnelle continue des demandeurs d’emploi, dont Pôle Emploi. La Lettre Valloire : Quels sont les secteurs qui rencontrent le plus de difficultés à recruter ? Jean-Marc Vermorel : Le secteur de la construction reste celui où les freins à l’embauche sont les plus patents avec, en 2014, 59,5 % des recrutements jugés « difficiles ». On observe toutefois un léger mieux par rapport aux années précédentes où les 60 % étaient largement dépassés. Les progrès des conditions de travail proposées aux salariés rendent pourtant ce secteur plus attractif : le marché du travail y est stable, mais la pyramide des âges élevée devrait renforcer les besoins en personnel. Vient ensuite l’industrie manufacturière, avec une proportion de 51,1 % de recrutements difficiles, puis les services (43,8 %). Nous observons toujours les mêmes contraintes dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, avec la question prégnante de la mobilité géographique. La Lettre Valloire : Quelle est aujourd’hui la place de Pôle Emploi sur son marché ? Jean-Marc Vermorel : En région Centre, Pôle Emploi compte 1780 agents et 34 agences. Nous sommes l’acteur majeur d’un marché de l’emploi largement ouvert à la concurrence, avec notamment celle des job boards qui fleurissent sur le web. L’an passé, à notre initiative, les annonces de plusieurs sites en ligne leaders (Regionsjob, Keljob, Jobijoba, etc.) ont été intégrées à notre site pole-emploi.fr : ils ont accepté notre charte qui passe notamment par le strict respect de la loi, par exemple de non-discrimination à l’embauche. Nous sommes dans notre rôle qui est de proposer le maximum d’offres aux demandeurs d’emplois. Propos recueillis par François-Xavier Beuzon

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L’Eure-et-Loir « booste » l’emploi Le Département d’Eure-et-Loir a reconduit en 2014 le dispositif Boostemploi, qui a permis à 500 Euréliens de retrouver le chemin de l’emploi en 2013.

L

e Conseil général d’Eure-et-Loir n’attend pas le retournement de la conjoncture pour tenter d’inverser la courbe du chômage, un chômage qui a crû sur ce territoire de 4,8 % en 2013 (21 093 personnes inscrites à Pôle Emploi à fin décembre). Ainsi, la collectivité présidée par Albéric de Montgolfier a reconduit cette année le dispositif Boostemploi, créé en 2009, et qui a permis à 500 Euréliens de retrouver le chemin de l’entreprise en 2013. La formule, qui n’entend pas naturellement régler à elle seule la question du chômage de masse que subit notre pays, est fondée sur un principe simple : améliorer l’information et la préparation des demandeurs d’emploi.

Pratiquement, Boostemploi, qui, en 2013, a utilisé 21 espaces cyberemploi – ceux-ci ont reçu plus de 22 500 visiteurs sur la période – met à la disposition des chômeurs des forums locaux et thématiques, ainsi que des ateliers de coaching. Ces actions, ouvertes à tous les publics concernés pas les questions d’emploi, ont été étroitement développées et mises en place avec Pôle Emploi. Sur le premier semestre de l’année en cours, onze rendez-vous, dont huit forums locaux et un forum thématique, ont été programmés. À l’heure où nous écrivons ces lignes, deux forums de l’emploi étaient ainsi prévus à Janville et à Yèvres, les 3 et 24 juin. Tandis qu’un atelier mé-

tier (deux étaient prévus sur le premier semestre) devait se tenir le 12 juin à La Loupe. « Les forums sont des plateformes qui mettent en relation de manière simple et pragmatique les offres et les demandes », indique un porte-parole du conseil général d’Eure-et-Loir. Enfin, quatre nouveaux espaces cyberemploi seront ouverts cette année sur l’agglomération drouaise (à Anet, Brezolles, Chérisy et StRémy-sur-Avre) et viendront compléter l’offre existante. Jean-Christophe Savattier

La Lettre Valloire - Juin 2014 35


Économie

Industrie

Hervé Thermique,

des acquisitions sous contrôle

Le pôle Énergies-Services du groupe Hervé a réalisé deux acquisitions qui viennent étoffer sa couverture géographique et la palette de ses métiers. Une originalité : chaque rachat doit être validé par les équipes concernées par les opérations.

H

ervé Thermique, qui regroupe les activités ÉnergiesServices du groupe Hervé, dont le siège social se trouve à Jouélès-Tours – des activités qui représentent 90 % du CA du groupe fondé par Michel Hervé (500 M€ en 2013) –, vient de réaliser deux importantes opérations de croissance externe. Des opérations qui viennent étoffer un pôle « qui rassemble toutes nos activités de gestion des énergies et du bâtiment pour tous les lots du second œuvre dans une logique exclusivement BtoB », indique le président du directoire Emmanuel Hervé. Il s’agit typiquement de prestations de service en maintenance, d’exploitation et de travaux d’installation dans les métiers du génie climatique, du génie électrique, des piscines et du traitement de l’eau, ainsi que des énergies

Emmanuel Hervé

36 La Lettre Valloire - Juin 2014

renouvelables et de la performance énergétique. Hervé Thermique s’est ainsi récemment emparé du montpelliérain Actem, une entreprise spécialisée dans la maintenance tertiaire qui emploie 80 salariés pour un CA de 9 M€. L’an passé, le groupe avait jeté son dévolu sur la société lyonnaise Billon positionnée sur le bardage, la couverture, l’isolation et le logement collectif neuf : « Nous mettons en œuvre ces rachats à la fois dans une stratégie d’extension géographique et de recherche de forte complémentarité avec nos différents métiers », poursuit le dirigeant. C’est à partir de son maillage d’agences – une cinquantaine exploitées à ce jour – qu’Hervé Thermique étend sa couverture. « C’est à partir de nos sites de Rhône-Alpes que nous avons réussi à nous installer en Suisse romande. Présents à Lille depuis trois ans, nous commençons à nous tourner vers la Belgique », explique Emmanuel Hervé. La complémentarité métiers fut également l’une des grandes motivations de ces acquisitions. « Avec le rachat d’Actem, nous allons nous positionner sur le marché de la maintenance hôtelière, un segment sur lequel cette société est présente via sa filiale Actem’Otel. Par ailleurs, le rachat de Billon nous a permis d’intégrer des nouveaux métiers. » Mais si la direction affiche des objectifs stratégiques explicites, notamment sa volonté de déplacer le centre de gravité des implantations territoriales historiquement fortes dans l’ouest de la France, « ces acquisitions ne sont pas décidées d’en haut de ma-

nière pyramidale », affirme Emmanuel Hervé. Qui rappelle qu’au titre de la fameuse politique de management participatif, les 2 850 salariés sont répartis dans des unités autonomes pilotées par un manager, qui ne dépassent pas en moyenne une quinzaine de collaborateurs. Compte tenu de cette organisation et des valeurs partagées qui la sous-tendent, « chaque rachat doit être validé par les équipes locales concernées par ces opérations. C’est à eux de déterminer si ces projets ont du sens et sont en mesure de créer de la valeur ». Un tel parti pris a une conséquence immédiate : « Je ne suis pas en capacité d’annoncer un plan d’affaires pour les années à venir, avoue sans complexe le dirigeant. Ce que je sais, en revanche, c’est que dans nos métiers du bâtiment qui connaissent tout de même d’importantes tensions, les notions de service, d’accompagnement et de partenariat avec nos clients détermineront notre croissance. ». Jean-Christophe Savattier

Chiffres clés du groupe Hervé • 2 800 salariés • 500 M€ de CA • 54 implantations • 25 sociétés, dans 3 pôles distincts : Énergies-Services, Industrie et Numérique.


« L’OBO LIBÉRAL » Rencontre avec Nicolas DUVIVIER, juriste en droit des sociétés et responsable du service gestion de patrimoine du cabinet DUVIVIER & ASSOCIÉS.

Un NOUVEL OUTIL à l’intention de l’ensemble des professions libérales. SITUATION Monsieur François Libéral exerce son activité depuis plusieurs années. Sa notoriété est maintenant bien assise et ses compétences reconnues par tous. François a passé la quarantaine, travaille beaucoup mais a le sentiment qu’il ne pourra pas assumer seul le développement de sa clientèle qui ne cesse de croître. François a par ailleurs conscience qu’il aura du mal, comme beaucoup de ses confrères libéraux, à transmettre son cabinet à l’approche de la retraite. Il sait aussi, très pertinemment, que le montant de cette dernière, au vu de la conjoncture actuelle et à venir, ne sera pas élevé et ne lui permettra peut-être pas de vivre décemment les longues années de retraite qu’il aura à passer avec son épouse. Il est enfin asphyxié par les lourdes charges d’impôts et cotisations sociales qui pèsent sur ses épaules au quotidien.

d’investissement et lui a conseillé d’investir dans la « pierre » en adossant un contrat de placement en assurance-vie. Il a contracté un emprunt bancaire à cette occasion dont les échéances sont intégralement couvertes par les loyers encaissés. Lors de la seconde opération de vente de ses titres à la SPFPL, François a touché le montant de sa participation dans la société d’exercice libéral (70 %) et se trouve de nouveau à la tête d’un capital net après impôt de 280 000 €. De nouvelles opérations d’investissement lui sont prescrites par le service patrimoine de son cabinet d’avocats. François ayant atteint l’âge de la retraite décide de passer le « flambeau » à ses associés de la SPFPL, et leur cède ses titres (25 %) ainsi qu’exposé ci-dessus pour un montant net de 180 000 €.

SYNTHÈSE Montant du patrimoine de François à la retraite, issu de la seule préconisation d’OBO LIBÉRAL :

SOLUTION La solution va consister dans un premier temps à le faire passer en société d’exercice libéral qu’il va constituer avec un jeune confrère dont il connaît les compétences professionnelles. La constitution de cette société sera une véritable opportunité pour ce jeune confrère qui intégrera immédiatement une structure qui « tourne » et lui permettra de reprendre à terme le contrôle du cabinet et éventuellement intégrer dans l’avenir d’autres confrères de même culture que la sienne, afin de faire face au développement de la clientèle. La société ainsi constituée va procéder au rachat de la clientèle de François au moyen d’un emprunt bancaire complété au besoin par un crédit vendeur consenti par François. Un pacte d’associés ainsi qu’un règlement intérieur seront ensuite mis au point, afin d’organiser précisément les obligations de chacun des associés ainsi que les conditions de sorties éventuelles. Dix ans se sont maintenant écoulés, le cabinet poursuit son développement, l’emprunt de la société d’exercice libéral est remboursé. François et Louis, son jeune confrère, ont entre-temps constitué une société civile immobilière dans laquelle ils ont installé leur cabinet afin d’offrir un cadre d’accueil agréable et efficace pour leur clientèle. Leur conseil leur a par ailleurs parlé de la société de participation financière de professions libérales (SPFPL). Ils voient dans cet outil une réelle opportunité de se regrouper avec des confrères de spécialités complémentaires à la leur, afin d’offrir à leur clientèle un champ d’intervention plus étendu. Cette SPFPL, constituée sous la forme d’une holding va procéder à l’achat des titres de la société d’exercice libéral de François et Louis au moyen d’un emprunt bancaire. Un pacte d’associés et un nouveau règlement intérieur seront également mis au point.

• Investissements réalisés lors de la première opération ……................................................................................

500 000 €

• Investissements réalisés lors de la deuxième 500 000 € opération ……................................................................................ Solde d’emprunt à rembourser

- 150 000 € 350 000 €

• Assurance-vie contractée lors du départ à la retraite ……............................................................................ TOTAL

350 000 €

180 000 € 1 030 000 €

CONCLUSION L’OBO LIBÉRAL : une réelle opportunité pour les professions libérales sur le plan: • professionnel : l’outil idéal de transmission du cabinet et de rapprochement avec d’autres confrères. • patrimonial : du fait des effets de leviers financiers (technique du cash out) permet au professionnel libéral de se constituer un patrimoine conséquent en vue de la retraite. • fiscal : Permet au professionnel libéral de loger son activité professionnelle dans une structure assujettie à l’impôt sur les sociétés et par voie de conséquence optimise la pression fiscale et sociale (non chiffrée ci-dessus) mais extrêmement significative sur la période.

EN RÉSUMÉ : ASPECTS PATRIMONIAUX Lors de la vente de sa clientèle, François aura touché un prix de 400 000 €. Il a acquitté l’impôt sur la plus-value et les contributions sociales et est en conséquence à la tête d’un capital net de 262 000 €. Le service patrimoine de son cabinet d’avocat l’a accompagné dans ses projets

Une technique extrêmement intéressante mais qui doit être élaborée avec la plus grande précision par une équipe de professionnels rompus à ce genre de montage réunissant des compétences juridiques, fiscales et patrimoniales et ayant enfin une bonne connaissance des règles déontologiques propres à chaque profession libérale.

40 COLLABORATEURS AU SERVICE ET À L’ÉCOUTE DE PRÈS DE 1 500 ENTREPRISES Cabinet DUVIVIER & ASSOCIÉS 112, rue de Boisdenier 37000 TOURS Tél. 02 47 05 79 18 E-mail : tours.boisdenier@duvivieretassocies.fr

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Cabinet DUVIVIER & ASSOCIÉS 7, quai de la Saussaye 41000 BLOIS Tél. 02 54 74 73 61 E-mail : blois@duvivieretassocies.fr


Économie

Industrie

Un tissu industriel

de plus en plus reprisé

Le printemps n’aura pas été celui de la reprise, mais plutôt celui des reprises d’entreprises… réussies ou avortées. D’anciens fleurons industriels comme FagorBrandt, la Faïencerie de Gien, SDH Ferroviaire ou la Française de Roues changent de main ou perdent pied.

E

Pascal d’Halluin, nouveau patron de la Faïencerie de Gien, est passé par Cacharel, Lacoste et L’Oréal.

n dépit des rodomontades du Don Quichotte de Bercy, le tissu industriel régional continue de se déliter. Les reprises de sites en difficulté se sont enchaînées tout au long du printemps, parfois au prix de sévères coupes dans les effectifs. Après un feuilleton qui s’est achevé le 15 avril, le tribunal de commerce de Nanterre a donné son accord au projet de sauvetage du fabricant d’électroménager FagorBrandt France, porté par le groupe algérien Cevital d’Issad Rebrab : 1 200 des 1 600 emplois sont préservés. Le travail a repris à St-Ouen (41), comme à St-Jeande-la-Ruelle (45). Dans le Loir-et-Cher, l’effectif au 15 juin était de 206 personnes, soit à peine moins qu’au 1er janvier, et l’usine fonctionne de manière satisfaisante en dépit des problèmes d’approvisionnement de pièces chez les fournisseurs. Au mois de juin, le plan de charge de 22 000 produits finis (tables de cuisson, minifours, hottes) devrait être tenu. L’usine bénéficie du phénomène de reconstitution

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des stocks, à la fois pour son propre besoin de stocks tampons et pour celui de ses clients de la grande distribution. Le rythme actuel devrait per-

mai, le projet de la société Tabag dirigée par Pascal d’Halluin. Cet ancien cadre de Cacharel, Lacoste et L’Oréal, qui laissera la direction opérationnelle

“ L’USINE BRANDT FRANCE DE ST-OUEN BÉNÉFICIE DU PHÉNOMÈNE DE RECONSTITUTION DES STOCKS. durer au moins jusqu’à la fin de l’année, en attendant que de nouveaux marchés (Afrique du Nord…) viennent prendre le relais. Signe positif : la direction a eu recours à des intérimaires pour la première fois depuis bien longtemps. À St-Jean-de-laRuelle, qui emploie quelque 500 personnes, le redémarrage de la production de cuisinières et de fours demande un peu plus de temps. Mais, là aussi, la reconstitution progressive des stocks donne à l’usine plusieurs mois de visibilité. Les salariés de SDH Ferroviaire, à St-Denis-de-l’Hôtel (45), sont aussi dans l’attente d’un sauveteur de dernière minute. Le tribunal de commerce d’Orléans a prononcé la liquidation de sa maison mère, l’équipementier ferroviaire AORF, et ordonné la poursuite de l’activité à l’usine loirétaine et de celle de sa société sœur ABRFI, à Châteaubriant (44), jusqu’au 11 juillet. Passé ce délai, la reprise des deux sites (160 salariés au total) deviendra très compliquée. En revanche, la Faïencerie de Gien (45) semble à la fois sauvée et entre de bonnes mains. Le tribunal de commerce d’Orléans a accepté, le 21

de la vénérable institution giennoise à Yves de Talhouët, est rompu aux lois du marketing des produits de luxe : le repreneur s’est engagé à conserver les 160 salariés et même à procéder rapidement à des embauches. Moins « glamour » que les articles en faïence vendus sous l’étiquette « Gien », dans les boutiques du fabricant place de la Madeleine ou à St-Germain-des-Prés, les jantes d’automobiles de la Française de Roues, à Diors (36), cherchent activement un repreneur après que l’indien Deltronix, qui avait racheté cette fonderie d’aluminium à Montupet en 2010, a jeté l’éponge. Le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) s’est emparé du dossier et tente de départager les candidats, au nombre desquels l’allemand Borbet et l’espagnol Mapsa. L’enjeu est à la mesure de la sauvegarde de l’emploi des 380 salariés. En dépit des 4,6 M€ de passif accumulés par la précédente direction, les pouvoirs publics espèrent une issue heureuse. La première tâche du repreneur sera de diversifier un portefeuille client trop tourné vers les marchés de l’Hexagone : Renault et PSA représentent 70 % de la facturation. François-Xavier Beuzon



Économie

Industrie

Que deviendra Servier après Jacques Servier s’est éteint le 16 avril dans sa quatre-vingt-treizième année. Avec lui disparaît, neuf mois après Pierre Fabre, le dernier représentant d’une certaine idée de l’industrie du médicament, née dans les années d’après-guerre. Symboliquement, une semaine avant le décès de leur fondateur, les laboratoires Servier annonçaient leur virage vers la biopharmacie.

L

e 17 avril, en fin de matinée, près de la moitié du personnel de Gidy, la plus importante usine du groupe, était réunie pour écouter, de la bouche de Patrice Martin, le directeur du site orléanais, la lettre laissée par Jacques Servier. Environ 500 personnes, émues jusqu’aux larmes, témoignaient de leur attachement « pour un grand homme, un patron comme on n’en fait plus, qui dirigeait un groupe de 20 000 personnes comme une entreprise familiale », selon les mots du secrétaire adjoint du comité d’entreprise. De quoi alimenter le procès en paternalisme – un de plus ! – instruit contre le fondateur des laboratoires Servier. Cet attachement indéfectible de la très grande majorité de ses collaborateurs à la figure inaltérable du commandeur, qui contraste évidemment avec la curée organisée au dehors, pose la question de l’avenir d’un acteur majeur de l’industrie pharmaceutique qui affiche un CA de 4,2 Md€ – près de 3 Md€ pour les laboratoires proprement dits et 1,17 Md€ pour les deux filiales génériques à 100 %, le hongrois Egis et le français Biogaran – le plaçant aux alentours du 25e rang mondial des producteurs de médicaments. Sur le plan capitalistique, la pérennité de Servier est assurée depuis une quinzaine d’années par la création d’une fondation hébergée aux Pays-Bas ; celle-ci détient l’ensemble des actions du laboratoire et le protège ainsi de toute tentative d’OPA. Et la continuité a été assurée avec la nomination à la présidence du

40 La Lettre Valloire - Juin 2014

directeur financier Olivier Laureau. Sur le plan scientifique, l’entreprise, qui fête ses soixante ans cette année, a tiré la leçon du Mediator et s’est résolue à diversifier son portefeuille, encore majoritairement composé de molécules matures. Le 9 avril, tout juste une semaine avant la disparition de leur fondateur, les cadres du laboratoire annonçaient, lors d’une conférence de presse organisée au siège de Suresnes (ci-contre), un virage vers la biopharmacie. L’innovation est plus que jamais le credo de l’entreprise et cinq domaines thérapeutiques seront privilégiés : les ma-

ladies cardiovasculaires, sur le traitement desquelles Servier a fondé son développement, celles du SNC, l’oncologie, la rhumatologie et le diabète de type 2. La R&D – dont les dépenses représentent près du quart du CA de Servier – continuera de s’appuyer sur les quatre centres de recherche maison (3 000 chercheurs au total), dont celui d’Orléans, plus particulièrement dédié à la pharmacocinétique et à la galénique, mais elle se tournera de plus en plus vers les partenariats extérieurs. Le laboratoire a 150 contrats de collaboration en cours dans le

Soixante ans d’histoire Le décès de Jacques Servier n’aura suscité que de rares commentaires. La sphère politique, qui se répand habituellement en hommages vibrants et émus à chaque disparition de personnalité, se sera étrangement tue, comme si l’évocation du fondateur du deuxième laboratoire français risquait de la compromettre. La mémoire collective ne retiendra que le réquisitoire sans nuance d’une pneumologue brestoise. Méritait-il tant de haine ? « Homme discret », comme le rappelaient ses employés de Gidy, pudique comme ceux de sa génération, Jacques Servier aura finalement payé, autant que son implication présumée dans l’affaire ellemême, son absence de manifestation d’empathie face aux victimes du Mediator. Le public et les médias attendaient qu’il s’émeuve devant la tragédie des victimes ; il n’a opposé que la froideur du médecin posant un diagnostic. À sa naissance, en 1922, où l’on pansait encore les plaies de la Grande Guerre, l’espérance de vie ne dépassait guère 50 ans. En 2014, elle est de plus de 80 ans. Durant soixante ans, il aura participé, au premier chef, aux formidables progrès scientifiques qui permettent aux Français de vivre, en moyenne, trente ans de plus. C’est d’abord cela que nous voudrons retenir de lui.


Servier ? monde entier : ses partenaires sont aussi bien des organismes publics de recherche académique français (Inserm, CNRS, Institut Curie, Institut Pasteur) et étrangers (université de Milan, Columbia University et les Israéliens de Weizmann Institute…) que des sociétés privées, comme des biopharms américaines (Celladon, Macrogenics, Miragen, Intercept…) ou françaises (Cellectis, Hybrigenics ou Genfit). Cette politique de long terme et gourmande sur le plan capitalistique – que le renoncement au versement de dividendes rend supportable – devrait prochainement porter ses fruits : sur les 32 candidats médicaments aujourd’hui en phase d’essais cliniques, 3 sont à la porte du marché. Le premier d’entre eux devrait être l’anticorps gevokizumab (interleu-

kin-1 bêta), co-développé avec la drug discovery californienne Xoma, qui pourrait être autorisé sous trois ans pour une indication cardiovasculaire ou rhumatologique (les deux sont explorées). Ce virage indispensable vers la biopharmacie a été pris par tous les grands laboratoires mon-

diaux, vingt ans après leur précurseur, le suisse Roche. Les laboratoires Servier ne pouvaient pas rester à l’écart de ce grand mouvement. Avec la mort de son fondateur, une page se tourne, mais une nouvelle histoire va s’écrire. François-Xavier Beuzon

Teranga s’étoffe avec le tourangeau Cebiphar Teranga, la holding de tête d’ACM Pharma à Bellegarde-du-Loiret (45), vient de s’emparer du tourangeau Cepiphar.

C

o-présidée par Éric Petat, la holding familiale Teranga, qui contrôle ACM Pharma (4,4 M€ de CA en 2013) installée à Bellegarde-duLoiret (45) et spécialisée dans les

Eric Petat

services à l’industrie pharmaceutique, a acquis courant mars le laboratoire tourangeau Cebiphar (4,8 M€ de CA, une soixantaine de salariés) : installé à Fondettes (37), ce dernier est spécialisé dans le contrôle et le développement analytique physico-chimique. « Nous sommes des spécialistes reconnus de l’analyse et du contrôle microbiologique mais il nous manquait ces compétences », explique Éric Petat. Grâce à l’entrée de Cebiphar dans son périmètre, le groupe va désormais proposer une offre globale aux industriels de la pharmacie, de la cosmétique et des biotechs « sans pourtant qu’ACM Pharma et Cebiphar perdent leurs identités commerciales ».

Le groupe composé également d’ACM Agro et d’UPS Consultants – toutes trois implantées à Bellegardedu-Loiret – va bénéficier d’un effet de taille. « Sur l’exercice 2014, nous anticipons un CA de 13 M€ et visons à terme une facturation de 15 M€ », souligne Éric Petat qui prévoit plusieurs investissements. « Nous devrions poursuivre le développement du plateau technique de Cebiphar pour élargir le champ de ses prestations. » Le projet d’extension mis à l’étude par Alain Peyrot, l’ex-pdg de Cebiphar, n’est pas abandonné, « mais nous devons d’abord stabiliser cette acquisition avant de l’engager », précise son nouveau patron. Jean-Christophe Savattier

La Lettre Valloire - Juin 2014 41


Économie

Industrie

Gekko Tape veut décoller Spécialisé dans le négoce et la transformation d’adhésifs, le groupe tourangeau Gekko vient de modifier en profondeur son organisation. Ses dirigeants briguent une place parmi les leaders sur un marché plutôt atomisé.

L

e groupe Gekko (8,5 M€ de CA en 2013, une trentaine de collaborateurs dont dix à Chambray-lès-Tours), né de la fusion en septembre 2013 du tourangeau Val de Loire Adhésifs, du choletais Charles Brosseau et du rennais Profitec, passe à la vitesse supérieure. Co-dirigé par un triumvirat composé de Pascal Lai-

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zin, d’Éric Cépeck et de Frédérick Brunet, cet ensemble, spécialisé dans le négoce et la transformation de colles et d’adhésifs industriels, « entend devenir à terme l’un des leaders français ». Un objectif qui n’apparaît pas inaccessible compte tenu de la forte atomisation du marché. Positionnée désormais sur trois métiers correspondant à trois sociétés distinctes (Gekko Tape pour les adhésifs, ADT pour la transformation et VDLS pour les adhésifs imprimés utilisés dans la signalétique et le mobilier urbain), la société a concentré ses activités sur deux sites : Chambray-lès-Tours, où est situé le siège social du groupe, et Rennes. Gekko Groupe, qui devrait prochainement investir dans de nouveaux équipements

industriels, « va plus que jamais fonder sa démarche commerciale sur une proposition de solutions et de résolutions de problèmes techniques auxquels sont confrontés nos clients (entre 3 000 et 4 000 références actives) », explique Éric Cépeck. Les dirigeants, qui ont mis à l’étude le transfert-extension de leur site rennais, envisagent également, mais à moyen terme, d’étendre les capacités tourangelles. « Nous allons procéder à quelques recrutements dans les mois à venir », indique Pascal Laizin qui souhaite aussi étendre la couverture territoriale de la société, très présente dans le Grand Ouest, « en commençant par la Normandie ». Jean-Christophe Savattier


Le blésois MCHS étend sa toile À Blois, le revendeur informatique MCHS poursuit sa marche en avant en menant une politique d’acquisitions soutenue. Et sans rien lâcher sur le front technologique.

L

e revendeur blésois de solutions informatiques MCHS, qui exploite à Blois l’enseigne Mac & Co dédiée aux professionnels et le magasin grand public Hype Store, poursuit une vigoureuse politique d’acquisitions. Le groupe a annoncé en avril dernier le rachat des deux magasins Apple d’Arcan’Store basés à Thionvillle (57) et à Levallois-Perret (92) : le premier deviendra Hype Store et le second Mac & Co. Grâce à cette acquisition, qui survient après celle en février dernier de 1Formatik, un Apple Premium versaillais, MCHS est aujourd’hui installé dans huit villes françaises. « Nous comptons poursuivre notre politique d’acquisitions et d’extension géographique en rachetant éventuellement d’autres points de vente Apple»,

précise Franck Bataille, l’un des dirigeants. MCHS devrait réaliser un CA consolidé de 34,5 M€ avec une soixantaine de collaborateurs ; les deux tiers de ce volume seront réalisés sur les marchés professionnels. Franck Bataille précise au passage que la palette d’interventions du groupe ne se cantonne pas au seul Apple. « Nous sommes également certifiés Partner Gold HP », poursuit le dirigeant d’un groupe qui a développé une vaste plateforme de services en intégration d’infrastructures, d’hébergement et de solutions mobiles. Ce savoir-faire technologique conduit MCHS à œuvrer au service d’initiatives locales particulièrement innovantes. Il a ainsi été le maître d’œuvre d’une expérience de cartable électronique menée dans un collège de Meung-sur-Loire

Franck Bataille

à l’initiative du conseil général du Loiret. MCHS a également été le principal prestataire de la création d’un centre opérationnel de vidéoprotection dans le Loir-et-Cher ; exploité par la gendarmerie, il centralise en un point unique les réseaux de vidéoprotection d’une quarantaine de communes rurales. Une première nationale ! Jean-Christophe Savattier

La Lettre Valloire - Juin 2014 43


Économie

Énergies nouvelles

Alexander Hoffmann, sur les traces de Bill Gates ? En 2014, il se vendra près de 2 milliards de smartphones Androïd et un milliard de PC sous Windows. Or c’est ce fabuleux marché que vise un jeune informaticien autodidacte du Montargois, inventeur de logiciels capables de doubler la durée d’utilisation des batteries.

À

Alexander Hoffmann lors du Concours des jeunes inventeurs de Monts 2014.

23 ans, il défie la plupart des meilleurs ingénieurs en informatique, grâce à sa seule intuition. D’ailleurs, Intel ne s’y est pas trompé. Le fabricant de microprocesseurs s’est empressé d’entourer Alexander Hoffmann de ses conseils et de lui prêter des ordinateurs de dernière génération pour développer ses projets. Étonnant parcours que celui de cet autodidacte qui sera peut-être un jour le Steve Jobs ou le Bill Gates français. Né à Francfort (Allemagne) et arrivé à Pannes, près de Montargis, à l’âge de 3 ans, Alexander n’était pas « formaté » pour devenir un as du logiciel. Ses parents ne sont pas du métier et il n’a commencé à « bidouiller » des programmes informatiques qu’à 13 ans… Pourtant, à peine décroché son bac génie électronique, il s’est lancé en 2010, sous statut auto-entrepreneur, dans la conception d’un logiciel servant à assister les novices en informatique (en particulier les personnes

âgées). « Malheureusement, confie-til, ce logiciel était trop gourmand en puissance et en mémoire. Du coup, l’ordinateur plantait ! » Nullement découragé, le jeune informaticien revoit sa copie et met au point un système d’optimisation de puissance au sein du même logiciel. « Mes clients se sont mis à acheter le logiciel uniquement pour bénéficier de ce module, dont j’ai fait un programme à part entière, explique Alexander. Mon « Kar Power Faster », qui s’installe en 30 secondes et ne coûte que 10 €, à comparer aux 60 € d’une nouvelle batterie, augmente la rapidité de traitement, gère plus finement la mémoire et surtout double la durée d’utilisation de la batterie.» Cette invention lui a permis de rafler sept prix, dont la médaille d’or du Concours Lépine en mai 2011. En février 2014, Alexander est passé à la vitesse supérieure et a fondé une SARL baptisée Savee. Il y a investi tout l’argent gagné en vendant son logiciel,

soit 45 000 € de capital personnel, plus 10 000 € d’un prêt à 0 % accordé par l’association d’aide aux créateursrepreneurs Initiative Loiret ainsi que le montant d’un emprunt contracté auprès du Crédit Agricole. Alexander n’oublie pas non plus l’aide à l’innovation que lui avait octroyée Orléans Technopole pour démarrer son job et qui l’a ensuite orienté vers Initiative Loiret. Le Montargois s’attaque désormais à la mise au point d’une application visant à faire bénéficier tous les mobiles Androïd des mêmes capacités que son logiciel pour PC. « Cette appli permet de refroidir automatiquement le microprocesseur du mobile dès que cela s’avère nécessaire et ainsi de booster sa batterie, sa vitesse et sa mémoire d’utilisation », résume-t-il. Cette fameuse « appli » devrait être prête vers la mi-juillet. Elle sera ensuite testée par quelques utilisateurs avant d’être commercialisée à la rentrée sur Internet dans une version gratuite avec publicité ou d’être intégrée directement dans les smartphones par divers constructeurs. Alexander est par ailleurs « en réflexion » pour voir comment investir également le juteux marché des iPhone. Parce qu’il croit en son projet, Alexander espère embaucher cinq salariés dans les trois ans à venir et projette de louer dès la rentrée prochaine des bureaux sur la ZA de Pannes, équipée en haut débit. « Tout est possible en informatique, résume le jeune entrepreneur. Il suffit de savoir ce que l’on veut. Innover, c’est comme partir à la pêche et mettre tout en œuvre pour réussir à attraper le poisson. » Jacques Huguenin

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Économie

Énergies nouvelles

Crowdfunding, la finance à la portée de tous Le crowdfunding, version remastérisée par le web de la finance participative, est devenu le nouvel eldorado des jeunes sociétés. Trois entrepreneurs loirétains viennent d’y avoir recours pour réunir les fonds nécessaires au développement de leur business.

+1 945%

par rapport à l’objectif initial, 680000€ collectés, c’est le record des projets financés en Europe sur une plateforme de crowdfunding (Ulule), établi par la web-série Noob... Les exemples de ce financement participatif à la sauce web ne manquent pas, particulièrement au bénéfice de la nouvelle économie. Et ils vont se multiplier, puisque les experts estiment que la France recèle un potentiel de collecte d’environ 6 Md€ pour les six ans à venir. Le crowdfunding – littéralement « financement apporté par la foule » – revêt plusieurs aspects. Pour se lancer dans le monde du business ou développer sa petite entreprise, le don entre personnes physiques reste la méthode la plus simple et d’ailleurs la plus répandue. Des plateformes d’intermédiation sur le Net permettent de le faire, sans même avoir jamais rencontré le bénéficiaire de sa générosité. La seule contrepartie admise est non monétaire, soit un échange de don. Une autre voie pour les investisseurs en herbe est d’entrer au capital d’une jeune société ; des plateformes web permettent aussi d’investir dans des start-up que l’on ne connaît pas, c’est le principe de l’equity based crowfunding. Dans les deux cas, les revenus sont imposables, tant au titre des dividendes reçus que des éventuelles plus-values lors de la cession. Il reste le prêt, mais il n’est autorisé entre particuliers que s’il ne produit pas d’intérêts, l’activité rémunérée de prêteur de deniers étant un monopole bancaire. Cette disposition pourrait d’ailleurs 46 La Lettre Valloire - Juin 2014

évoluer prochainement avec la création d’un statut de conseiller en financement participatif pour les plateformes de crowdfunding. Ces nouveaux modes de financement rentrent peu à peu dans les mœurs. C’est ainsi qu’Augustin Aulanier, chef à bord de son restaurant orléanais «Voici venu le temps », s’est lancé dans une collecte de 5 000 € pour rendre ses locaux accessibles aux personnes handicapées. Mais au-delà de ces aménagements, financés en sept semaines, cet adepte des produits frais et de saison a pu conforter son projet grâce au soutien reçu, à l’intérêt porté par les internautes et à la notoriété acquise grâce à la plateforme de financement participatif KissKissBankBank. Autre utilisateur de ce site français, l’équipe de Top Chrono, une entreprise de Sandillon spécialisée dans le chronométrage sportif. Son objectif : collecter 30 000 € pour développer une appli-

cation pour smartphones, revendiquée «100 % française », qui promet de révolutionner les habitudes des coureurs à pied (les « runners ») : à ce jour, 26 % de la somme nécessaire ont été réunis grâce à 164 généreux donateurs. Corinne Ajinca, la dirigeante de Ace International Foods, une toute petite société de St-Lyé-la-Forêt, à la lisière de la forêt d’Orléans, a choisi de recourir au crowdfunding pour diffuser en Europe du Nord et en Suisse ses produits exotiques prêts à la consommation (voir ci-contre). Cela lui permettra de financer ses déplacements, le BFR lié à l’augmentation de ses ventes ainsi qu’une campagne de communication. Les participants sont également des ambassadeurs, des prescripteurs et des diffuseurs de ses produits. À ce jour, 90 investisseurs ont suivi Ace International Foods sur Particeep.com… Sarah Louis

Baromètre 2013 du « crowdfunding » en France Fonds collectés : 2011 et avant : 7,9 M€ 2012 : 27 M€ 2013 : 78,3 M€

2011 : 10 000 2012 : 21 000 2013 : 32 317

Nombre de crowdfunders : 2011 : 130 000 2012 : 320 000 2013 : 650 000

Catégories de projets : 21% de projets associatifs 6% audiovisuel 4% environnement et énergies

Nombre de projets financés :


Wistiki, application killer pour distraits Les frères Lussato ont développé une solution qui permet de retrouver instantanément les objets de la vie quotidienne. Leur projet a été initialement financé par des fonds récoltés sur la plateforme de crowdfunding My Major Company.

«N

ous voulons devenir les leaders du marché des objets perdus » : c’est par cet amusant raccourci que Bruno Lussato, qui a créé Wistiki avec ses deux frères Théo et Hugo, décrit le modèle d’affaires de la start-up parisienne. Ce commando familial a développé une application de géolocalisation des objets de la vie quotidienne égarés par les grands distraits. « L’application de géolocalisation est gratuite et téléchargeable sur smartphone, explique Bruno Lussato, mais la vraie innovation, c’est d’avoir développé des objets, les Wist, qui, accrochés à vos clefs ou à vos lunettes, communiquent avec votre smartphone en mode Bluetooth. » Il est possible de faire biper les Wist – vendus 19,90 € en GMS – dans un rayon de 30

mètres ou de les géolocaliser sur… toute la surface de la Terre. L’autre caractéristique du projet des frères Lussato – âgés respectivement de 25, 24 et 22 ans – est son mode de financement. La start-up, créée en janvier 2014, a réussi à lever initialement un peu plus de 80 000 € sur la plateforme de crowdfunding My Major Company. « Pour être exact, il s’agit de préventes. Nous nous sommes engagés à fournir des Wist à ces investisseurs de la première heure. » Ce premier apport très innovant a été complété par les contributions de busines angels à hauteur de 225 000 €, soit 15 % du capital, « valorisant ainsi la société à quelque 1,5 M€ », indique Bruno Lussato qui ne tarit pas d’éloges sur les bienfaits du crow-

funding : « C’est un formidable accélérateur de projets. Il permet bien sûr de récolter des fonds, mais aussi de se faire connaître et de réaliser une étude de marché. C’est aujourd’hui le meilleur moyen d’évaluer la sensibilité du marché à une proposition de valeur. ». Jean-Christophe Savattier

Les 3 frères Lussato

La Lettre Valloire - Juin 2014 47


Économie

Énergies nouvelles

Un Tourangeau, pur produit

de l’american dream Ce jeune Jocondien a créé en Californie une agence spécialisée dans l’organisation d’excursions. Elle emploie aujourd’hui une vingtaine de salariés.

Benoît Cerceau

À

31 ans, Benoît Cerceau, un Jocondien titulaire d’un BTS de tourisme décroché au lycée tourangeau St-Ursule, a réussi son rêve américain. Très tôt passionné par la culture américaine, ce frenchie très culotté a, en effet, quitté un job confortable au sein de Voyageurs du Monde pour créer en 2006 – à 21 ans ! – en Californie une agence spécialisée

dans l’organisation d’excursions et de tours dédiés à la clientèle francophone. « Je n’avais que 130 000 $ en poche, toutes mes économies. C’était de la folie, mais je suis quelqu’un de très déterminé. » Dix ans plus tard, le succès est au rendez-vous : installée dans la cité des Anges, Cali’fun emploie aujourd’hui une vingtaine de salariés et réalise un CA de plus de 3 M$. « Nous travaillons avec près de 300 tour-opérateurs dans une logique BtoB, mais aussi avec des clients particuliers qui souhaitent que l’on organise pour eux des voyages découvertes du Grand Ouest », explique Benoît Cerceau. Visant la clientèle française, suisse mais aussi québécoise, Cali’fun a accueilli en 2013 près de 13 000 touristes. Ce jeune entrepreneur aurait pu en rester là. Mais comment résister à l’irré-

pressible et étonnante « culture pro business américaine ». Benoît Cerceau s’est donc jeté dans la création d’un service d’accompagnement et de conciergerie dédié aux voyageurs individuels. L’offre baptisée OnSpot, fondée sur un site Internet, se déploie sur les États-Unis, le Canada et les Bahamas, et bientôt au Brésil, coupe du monde oblige ! Elle a déjà accueilli son 100 000e voyageur. «OnSpot a un gros potentiel. Les venture capitalist de la Silicon Valley en sont d’ailleurs convaincus puisque je devrais lever auprès d’eux entre 5 et 7 M$. » Quel regard porte notre Tourangeau sur la France de 2014 ? « J’aime la France, mais du point de vue de la création d’entreprises, le fossé entre les cultures américaine et française est vertigineux et s’accroît. » Jean-Christophe Savattier

Boreal se met à l’heure des objets connectés À Bourges, Boreal, une entreprise spécialisée dans le développement d’applications informatiques mobiles entend profiter pleinement de l’engouement pour les objets connectés.

V

oici une jeune entreprise berruyère qui parvient parfaitement à capter l’engouement pour les applications spécifiquement requises par les utilisateurs des objets communicants mobiles qui emplissent aujourd’hui notre quotidien, qu’il s’agisse de smartphones, de tablettes tactiles ou bientôt des futures lunettes « intelligentes » qui seront commercialisées par Google. Ainsi, Boreal, spécialisée dans le développement d’applications pour smartphones, tablettes et de façon générale pour tout type d’objets connectés, s’attend à connaître une nouvelle phase de croissance en 2014, nous in48 La Lettre Valloire - Juin 2014

dique Romain Fromenteau, le jeune – 27 ans – fondateur et gérant de cette société fondée en 2008. « Je venais d’achever mon master dans une école de commerce lorsque j’ai décidé à 21 ans de créer Boreal », dit-il. La société (environ 1 M€ de CA en 2016, 6 salariés) devrait procéder dans les mois à venir à l’embauche de deux collaborateurs, « probablement d’un commercial et d’un technicien », estime le dirigeant. Ce dernier nous indique par ailleurs qu’il cherche un nouveau point de chute (environ 200 m2) pour son équipe technique installée aujourd’hui dans des locaux situés près

de l’IUT de Bourges, et dont le bail expirera à la fin de l’année 2014. Le modèle économique de Boreal la conduit à proposer aux utilisateurs finaux – entreprises et collectivités – une offre applicative standard en vente « one shot » ou en location (mode Service As A Service) ainsi que des applications sur mesure. Elle s’appuie aujourd’hui sur un portefeuille d’une cinquantaine de clients. « Notre gisement de croissance, ce sont en effet tous les supports connectés qui vont prendre des parts complémentaires de marché. Nous fondons ainsi pas mal d’espoirs sur les tablettes flexibles. »JCS


CEVI, CONCESSIONNAIRE IVECO À CHAMBRAY-LÈS-TOURS 11 GARAGES POIDS LOURDS AU SERVICE DES PROFESSIONNELS DU TRANSPORT

« LE SERVICE… SANS CONCESSION ! » TOURS SUD CHAMBRAY-LÈS-TOURS

02 47 80 75 00 TOURS NORD PARÇAY-MESLAY

02 47 40 22 43 BLOIS

02 54 74 64 99

CHÂTEAUROUX

02 54 22 43 10

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05 49 93 14 99

POITIERS

05 49 52 76 06

PARTHENAY

05 49 94 64 22 www.cevi.fr info@cevi.fr

Constitué à partir de sa base tourangelle, située à Chambray-lès-Tours, aux portes de Tours, le groupe CEVI (Centre Véhicules Industriels) spécialisé dans la distribution, l’entretien et la customisation de poids lourds Iveco, Man et Fiat, a réussi à se doter d’une exceptionnelle couverture territoriale, qui s’est renforcée, depuis 2005, par des acquisitions ciblées de concessions. Présidé par Mohamed Boudali, le concessionnaire, qui connaît une progression régulière du CA avec 165 collaborateurs, est ainsi très actif, de Blois jusqu’aux portes de Bordeaux, en passant par La Rochelle et Angoulême. Il est devenu un acteur de référence sur le marché du poids lourd en s’appuyant sur un puissant réseau de onze agences et de trois agents, homogène, cohérent, et voué à un seul objectif : la satisfaction du client. « Nous sommes, en effet, engagés dans une démarche très forte de service, de conseil et de qualité qui s’est déjà concrétisée par l’obtention de la certification ISO 9001, indique Mohamed Boudali. Nos clients raisonnent de plus en plus en terme de TCO (coût réel de possession) ; dans ce cadre, nous leur apportons des solutions leur permettant de réduire le coût au kilomètre des véhicules, et ce dans le total respect, bien sûr, de leurs contraintes d’exploitation. » La palette de services est très complète puisqu’elle va du négoce jusqu’à la mise à disposition des véhicules, en passant par la contractualisation de conventions d’entretien sur mesure, la customisation à la demande – le groupe dispose de son propre atelier de carrosserie industrielle – et la location courte et longue durées, activités assurées par une filiale du groupe (Ceval). « Nous venons d’intégrer à cette palette une prestation spécifique de gestion de flotte et de mise à disposition de véhicules de remplacement », précise le dirigeant. Cette stratégie de services s’appuie sur une politique de formation interne « qui va bien au-delà de nos obligations légales. Mais c’est une condition indispensable de notre réussite. »


Économie

Chantiers va être mis en route. Les travaux s’élèvent à 5,2 M€.

CHER La CNAC a autorisé la création d’un centre commercial de 12 000 m² sur 6 ha de la ZI des Quinze Pierres à St-Pryvé-St-Mesmin. L’ensemble comprendrait, outre un supermarché de 2 500 m², un espace culturel de 700 m² et 17 boutiques de moins de 300 m² ; des commerces de proximité (pressing, coiffeur, opticien, etc.) pourraient s’y installer. Le projet représente un investissement de 15 M€. L’ouverture est programmée pour septembre 2016.

CHER La CDAC a donné son feu vert à deux projets de création d’ensemble commerciaux à Bourges et à Vier zon. Le premier de 1 348 m² comprendra un magasin Lidl, une boucherie et un commerce alimentaire ; le second de 1 378 m² sera constitué d’un magasin Lidl ainsi que d’une boucherie. Un programme de construction de 23 logements locatifs sociaux est prévu pour septembre 2014 à St-Florent-sur-Cher. Les travaux, estimés à 2,6 M€, devraient se terminer l’année suivante.

vont être construits ainsi qu’un parking public. Le programme, d’un montant d’environ 1 M€, devrait être livré en 2015. La municipalité de Mainvilliers a voté la création de la ZAC « Les Clozeaux » qui comprendra la construction de 120 à 160 logements sur une surface de plancher maximale constructible de 16 000 m².

INDRE

LOIRET

EURE-ET-LOIR

50 La Lettre Valloire - Juin 2014

INDRE-ET-LOIRE Un bâtiment est prévu sur l’île Aucard, à Tours, pour le patronage laïque Paul-Bert. Les travaux, dont le montant s’élève à 845000 €, commenceront à l’été 2015.

Un foyer d’accueil médicalisé de 45 lits de 2 000 m² de surface utile va être construit à ChezalBenoît. Les travaux sont estimés à 3,8 M€.

À la place de l’ex-usine Monin, située rue de la Fuye à Nogentle-Rotrou, 14 logements locatifs

Un projet d’unité de méthanisation de 800 m² est à l’étude à Ciron. Les travaux pourraient démarrer au second semestre 2014 pour une livraison prévue à la rentrée 2015. Un second village d’entreprise va voir le jour au printemps 2015 à Issoudun, route de Bourges. Il s’agit d’un bâtiment de 1 853 m² scindable en deux sous-ensembles de 923,5 m². Le coût de l’opération est de 1,5 M€.

Les anciens locaux de Garnier Meubles au Blanc seront réhabilités d’ici à mars 2015 pour devenir un hôtel d’entreprises comprenant 4 à 5 ateliers, d’une surface variant entre 300 et 700 m². Il comprendra également 3 bureaux (15 m²) disponibles en location ainsi qu’une salle de réunion.

Une consultation publique va être engagée à l’automne 2014 pour la future gare d’Ingré. Les études techniques se dérouleront jusqu’en 2016 et les travaux de 2017 à 2019. La mise en service est prévue pour 2020. À Lorris, un programme de restructuration des 86 chambres de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (ehpad), ainsi que leurs espaces associés,

Le conseil municipal de Pithiviers vient de donner un avis favorable au projet d’aménagement de la zone du Bois-Médor, qui

prévoit la construction d’un écoquartier d’environ 300 logements. Un appel d’offres sera lancé en septembre prochain pour la construction d’un internat de 330 lits au lycée Voltaire d’Orléans. Les travaux devraient débuter en janvier 2015 pour une livraison prévue en mai 2017. Le montant de l’investissement est de 11,8 M€. Un village d’entreprises, d’une superficie de 3 000 m² à terme, va voir le jour sur la ZA de la Bosserie-Nord à Gien. Il comprendra des locaux d’artisans. La première phase, qui démarrera en 2015, prévoit la construction de 1 200 m². Le Super U de Beaune-la-Rolande va passer de 3 200 à 4400m² ; le hall d’exposition sera aménagé avec de nouveaux commerces (opticien, coiffeur, cordonnerie…). Le service drive changera quant à lui d’emplacement. La livraison est prévue pour début 2015.


52-55

Maurice, un petit coin d’Éden « L’île d’or, d’azur et d’émeraude. » C’est ainsi que Malcolm de Chazal, poète, écrivain et peintre mauricien, décrivait son île natale. À juste titre. Ce petit coin de paradis planté au cœur de l’océan Indien possède tous les atouts pour séduire une large clientèle. 56

Chambord peut regarder vers l’avenir Alors que la situation semblait inextricable, la direction du Domaine de Chambord a réussi à trouver une solution au litige avec les commerçants de la place Saint-Louis. Les idées de restructuration sont enfin lancées. 57

Pour prendre le manche sans risquer le crash À Tours Nord, la société Aviasim propose à ses clients de piloter un Airbus A320 dans un simulateur et un environnement hyperréaliste. 57

Plus douce sera la chute

« L’indoor skydiving », le simulateur de chute libre sans parachute, fait partie des drôles de produits que conçoit Philippe Malempré. Un inventeur qui rêve de partir à l’assaut des marchés européens…


Escapades

Ailleurs

Maurice, un petit « L’île d’or, d’azur et d’émeraude. » C’est ainsi que Malcolm de Chazal, poète, écrivain et peintre mauricien, décrivait son île natale. À juste titre. Ce petit coin de paradis planté au cœur de l’océan Indien possède tous les atouts pour séduire une large clientèle : les amateurs de farniente, par la qualité de ses infrastructures hôtelières, les familles, par son climat toujours agréable et ses plages splendides, les randonneurs, par ses sites naturels variés, et les amateurs de plaisirs nautiques, par ses spots de plongée, de windsurf ou de kite-surf.

Jardin de Pamplemousses

oyons honnête. Maurice est un peu moins bien pourvue en reliefs tourmentés que La Réunion, sa voisine française de l’archipel des Mascareignes, à 220 km au sudouest. Mais cette petite île (2 040 km² de superficie, 65 km de long sur 48 km de large, pour 1,2 million d’habitants) compense très largement son absence de volcans ou canyons vertigineux, par

S

point le plus élevé culmine à 600 mètres d’altitude, entrecoupé de gorges, cascades ou cratères éteints. Quelques pitons de moyenne montagne, en particulier celui de la Rivière Noire, qui domine l’île de ses 828 mètres d’altitude, et ses rivaux en taille, le Pieter Both (823 mètres) et le Pouce (812 mètres). De vastes plaines côtières, enfin, qui sont de fertiles

cieux et des tempéraments. Maurice s’apprécie pratiquement toute l’année, en raison de son climat tropical tempéré par l’océan Indien et les alizés, mais aussi grâce à la gentillesse de sa population, véritable mosaïque d’ethnies (Blancs descendants de colons français, créoles dont les ancêtres étaient des esclaves, Hindous arrivés de l’Inde du Sud ou encore Chinois

une grande diversité de sites très attractifs et faciles d’accès. De longues plages de sable blond, tout autour de ses 330 km de côtes, en grande partie protégées par une ample barrière de corail. Un vaste plateau central, dont le

terres basaltiques en majeure partie envahies par les champs de canne à sucre, la principale ressource agricole de Maurice… À cette relative douceur des paysages correspond une vraie générosité des

venus du sud-est de l’empire du Milieu). Ce sont autant de peuples témoins des multiples péripéties qui ont marqué l’histoire de cette base stratégique, entre Afrique et Asie, depuis l’arrivée des Arabes au Xe siècle jusqu’à

52 La Lettre Valloire - Juin 2014


coin d’Éden l’indépendance du pays en 1968, en 1 200 à 1 500 euros par personne) à passant par les colonisations hollan- visiter la République mauricienne (un régime parlementaire copié sur le daise, française et britannique. Côté nature, Maurice vaut surtout modèle britannique), voici, du nord au pour ses arbres élancés (filaos, banians, sud et d’est en ouest, quelques lieux palmiers…), ses fleurs aux couleurs à ne pas manquer. éclatantes (frangipaniers, bougainvil- Le nord-ouest, du Cap Malheureux à la capitale, Port-Louis, se caracliers, hibiscus, anthuriums…) et sa térise par une succession faune plus variée sous l’eau de baies, de plages de que sur terre. Le fasable ponctuées meux oiseau Dodo, de roches noires gros oiseau au bec (Pereybère, Trou crochu et aux aux Biches, Montailes atrophiées, Choisy…), de peemblème de l’île, tits villages de pêa en effet disparu cheurs et d’îles ou depuis la fin du îlots propices à la XVIIe siècle, pour détente et aux activités cause de chasse éhonGanga Talao nautiques. L’un des plus tée. Le même triste sort, beaux sites est sans nul doute le Cap l’extinction pure et simple, a été réservé aux tortues terrestres géantes de Malheureux, avec sa vue sur l’île Coin Maurice et de sa cousine, Rodrigues (à de Mire et sa toute petite chapelle au 563 km au nord-est), même si l’on peut toit rouge, Notre-Dame auxiliatrice. encore admirer de majestueux spéci- Il ne faut pas rater également la visite mens importés des Seychelles, dans di- du Jardin de Pamplemousses, à l’intévers parcs ou réserves. La vie sous-ma- rieur des terres, entre Grande Baie et rine, en revanche, mérite amplement Port-Louis. Ce magnifique jardin botaque l’on chausse palmes, masque et nique de Sir Seewoosagur Ramgoolam tuba, voire que l’on s’arnache d’un (Premier ministre aimé des Mauriéquipement complet de plongée, pour ciens qui a conduit le pays à l’indépenlui rendre visite. Poissons multico- dance) abrite notamment une fabulores (perroquets, trompettes, anges, leuse collection d’arbres (bambous, arempereurs…), rascasses volantes, mu- bres à épices, palmiers royaux, palmiers rènes, requins, et même dauphins, ba- talipots…) et de plantes exotiques, à leines à bosse ou cachalots, à certaines l’instar des célèbres nénuphars géants périodes de l’année sur la côte ouest, (Victoria Amazonica aux feuilles jusqu’à ont trouvé, de part et d’autre de la bar- 3 mètres de diamètre) qui parsèment rière de corail mauricienne, un havre le bassin au même nom. La très embouteillée capitale, Port-Louis, ne méde paix et de prospérité. Si cette description vous a convaincu rite guère que l’on si attarde : juste le de consacrer ne serait-ce qu’une se- temps d’admirer quelques bâtiments maine de séjour (pour un coût moyen coloniaux, voire de monter sur la

INFORMATIONS PRATIQUES S’Y RENDRE De nombreuses compagnies aériennes desservent Maurice, en particulier Air Mauritius et Air France. Le vol dure 11 à 12 heures.

DÉCALAGE HORAIRE + 4 heures de novembre à fin mars (GMT + 4) et + 2 heures d’avril à fin octobre (GMT + 4).

CLIMAT Les périodes les plus agréables sont d’avril à juin et de septembre à novembre. De mai à octobre, durant l’hiver austral, il fait plus frais et plus sec, mais chaud et humide de novembre à avril, en sachant que le climat varie assez sensiblement d’un lieu à l’autre. Il y a par exemple beaucoup de vent durant l’hiver austral au sud-ouest, au pied du Morne Brabant.

SANTÉ Aucun vaccin exigé. Seul gros risque sanitaire : les sévères brûlures du soleil.

LANGUE L’anglais est la langue officielle, mais le français et le créole sont communément utilisés.

MONNAIE La roupie mauricienne (MUR). 1 € = 40 à 42 MUR.

FORMALITÉS Passeport valable 6 mois après la date du retour et titre de transport pour le retour. Par ailleurs, il faut attester que l’on a suffisamment d’espèces sonnantes et trébuchantes pour pouvoir vivre durant le séjour sans travailler.

La Lettre Valloire - Juin 2014 53


Escapades

Ailleurs

Cascade de Chamarel

sion de belles baies et plages (à Flic-enFlac, Tamarin et ses salines, Grande RiEN SAVOIR PLUS vière Noire, Petite Rivière Noire), points Deux sites Internet à visiter : de départ pour aller en bateau obserwww.tourism-mauritius.mu, site ver des cétacés, faire de belles plongées officiel de l’office de tourisme mauricien, ou se baigner dans les eaux turquoises et www.ilemauricepratique.com, site d’un qui entourent l’île aux Bénitiers et groupe d'expatriés et de Mauriciens désireux quelques rochers à l’architecture de faire découvrir leur île. curieuse jaillis de la mer. À l’extrémité sud-ouest de l’île, Tamarin Baie de le Morne Brabant, inscrit au patrimoine mondial de l’humanité, constitue le site naturel le plus spectaculaire de Maurice. Du haut de ses 556 mètres, ce piton, qui servit de refuge à des esclaves en fuite, surplombe le lagon et les quelque 5 kilomètres de plage en arc de cercle qui ceinturent la péninsule du Morne, lieu mythique pour tous les adeptes du citadelle (Fort Adé- vent et de la glisse. Dans l’arrière-pays montagneux de laïde) pour admirer la vue. Le sud-ouest, jusqu’au Morne ce splendide sud-ouest se trouve Brabant présente lui aussi une succes- également le Parc national des gorges

54 La Lettre Valloire - Juin 2014

de la Rivière Noire : un refuge écologique de 8 000 hectares arrosé de cascades et qui abrite 311 espèces de plantes endémiques, 9 espèces d’oiseaux que l’on ne trouve qu’à Maurice, ainsi qu’une colonie de cerfs et des macaques, lesquels se révèlent toujours prêts à venir agresser le touriste qui a le malheur d’avoir des fruits sur lui. Autre « must », à la sortie du parc, les terres colorées de Chamarel, des dunes de sept couleurs, provenant de cendres volcaniques mises à nu par l’érosion ou d’oxydes métalliques de différentes sortes, ainsi que la cascade de Chamarel qui tombe de 100 mètres de hauteur pour plonger dans une végétation luxuriante. Le sud de l’île, se compose d’une côte plutôt rocheuse sur laquelle viennent parfois se briser d’impressionnantes vagues, notamment sur les falaises de Gris-Gris ou dans l’anfractuosité du Souffleur, à la manière d’un geyser. Non loin de la commune de Rivière des Anguilles, le parc zoologique de La Vanille, dit réserve des Mascareignes, abrite une incroyable réserve de rep-


tiles, en particulier des crocodiles, des iguanes et surtout d’impressionnantes tortues géantes des Seychelles qui se laissent approcher, caresser, voire chevaucher par les enfants ! Un peu plus au nord, au débouché de la route du thé et de Bois-Chéri, bienvenue en Inde, ou presque. Le site de Ganga Talao (ou Grand Bassin) constitue un lieu de pèlerinage qui attire chaque année près de 500 000 Hindous lors de la Grande Nuit de Shiva (fête de Maha Shivaratree). Sur les bords d’un grand lac volcanique ont été édifiés des temples et statues dédiés aux dieux hindouistes. Dépaysement garanti parmi les offrandes et les fragrances d’encens. La côte est, enfin, de Mahébourg, au sud, à Poudre d’Or, au nord, se caractérise par un superbe lagon et une succession de longues plages de sable (à l’instar de celle, immense, de Belle Mare) ou de criques sauvages, bordées

par une végétation luxuriante de filaos et de bougainvilliers. De divers villages SE LOGER de cette côte sont proposées des excursions jusqu’à l’île aux Biches, inhaDe la chambre d’hôte au combitée et baignée par des eaux cristalplexe hôtelier 6 étoiles, vous avez le choix ! Le site www.resamaurice.com lines, qui avait un petit goût de paravous propose ainsi près de 70 formules d’hédis avant qu’elle ne soit un peu trop enbergement pour tous budgets. Par ailleurs, vahie par des hordes de touristes. rares sont les tour-opérateurs qui ne proNon loin de cette île, il est également posent pas Maurice dans leur catalogue, conseillé d’aller naviguer le long de l’esparfois en séjour combiné avec La Réunion. tuaire de la Grande Rivière Sud-Est, d’explorer ses gorges et de plonger sous ses cascades. SE DÉPLACER À proximité de la Pointe d’Esny, le parc Il est facile et bon marché de marin de Blue Bay invite à de belles louer une voiture (attention on randonnées palmées parmi les jarroule à gauche), de prendre un taxi ou un dins de coraux… Qu’il est strictebus des transports publics. La taille réduite ment interdit de ramasser. L’île aux de l’île permet de séjourner à un seul enAigrettes constitue elle droit et de circuler facilement d’un point à aussi une réserve nal’autre. turelle qui héberge Cap Malheureux quelques plantes Mont-Choisy Pereybère et animaux endémiques de Trou aux Biches Maurice. Pamplemousses Enfin, à partir de Mahébourg, Port-Louis bourg typique Pieter Both qui doit son nom à 823 m Le Pouce un ancien gouverneur 812 m français, Mahé de La Grande Bourdonnais, et de l’aéroport, Rivière Sud-Est Curepipe une autoroute (la seule à MauGrande rice) permet de rallier rapideRivière Noire Mare aux Vacoas ment Port-Louis et Grande Baie, Parc national tout au nord-ouest, en traversant Petite L’île aux des gorges de Mahébourg Aigrettes l’intérieur de l’île. On y passe par Rivière Noire la Rivière Noire la ville de Curepipe, rendue Pointe d’Esny Morne Brabant Rivière des 556 m Anguilles célèbre par ses artisans qui fabriquent des maquettes de bateaux, mais aussi près du Trou aux Cerfs, un le Gris-Gris ancien volcan aux pentes escarpées, et de la Mare aux Vacoas, un réservoir niché dans un cratère éteint à 600 mètres d’altitude, qui alimente en eau les communes du plateau central mauricien. Bref, la minuscule Maurice est un monde en soi qui mérite au moins deux semaines de séjour… inoubliables! Jacques Huguenin

es de Terres coloré

Chamarel

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Escapades

Chambord peut regarder

vers l’avenir

Alors que la situation semblait inextricable, la direction du Domaine de Chambord a réussi à trouver une solution au litige avec les commerçants de la place Saint-Louis. Les idées de restructuration sont enfin lancées. directeur général de Chambord. « Les Buildinvest, l’entrepreneur Frédéric recettes doivent aussi être développées Jousset (fondateur de Webhelp) et le à un moment où les subventions éta- restaurateur Jean-Jérôme Degoursi tiques diminuent. Il fallait donc re- (Petrus à Paris), et GL Events, une nouveler l’offre proposée sur place. grosse société d’évènementiels basée Nous avons besoin d’avoir davantage à Lyon. Le choix devrait être arrété ces de lieux de restauration.» L’exemple tous prochains jours par le conseil d’addu Clos-Lucé à Amboise a été cité. « Il ministration du Domaine national et la y a 4 restaurants, les gens restent plus remise des clés sera effectuée le 1er juillongtemps et reviennent.» let. En attendant, Jean d’Haussonville Dans le détail, l’installation d’un bar à fourmille de projets. «Nous multivins « Les Caves du roi » est annoncée, plions les efforts de communication et tout comme l’ouverture d’un « Monu- affichons une stratégie numérique qui ment Café », un concept d’établisse- commence à porter ses fruits », a-t-il ment avec buffet à volonté, produits expliqué. « Nous allons rénover la bio et formule à 15 €. Un salon de thé- place et la halle d’accueil, avec peutglacier pourrait aussi voir le jour, tan- être une billetterie à l’entrée du village dis qu’une terrasse est envisagée et une passerelle sur le Cosson… e conflit entre le Domaine na- dans le jardin à l’anglaise du château. Chambord est une vitrine de l’art de tional de Chambord et les com- Concernant la reprise de l’hôtel Saint- vivre à la française. » Le but de tous merçants présents sur le site Michel, un appel d’intérêts a été lancé ces changements est chiffré, celui semble s’être apaisé. Un accord est in- en mars et quatre propositions sont ac- d’atteindre le million de visiteurs d’ici tervenu, deux ans après l’avis du tuellement en lice : la société Assas à 2019-2020. Émilie Rencien Conseil d’État déboutant la commune Asset Management, le groupe français de ses demandes et rétablissant l’intégrité domaniale de Chambord. Des indemnités débloquées fin 2013 Le directeur général du Domaine, Jean d’Haussonville, qui souhaitait Ce sont 1,860 M€ qui ont finalement été accordés par Bercy aux transformer les baux des commerces commerçants de Chambord sur le départ. L’hôtel Saint-Michel a en concession, a donc eu gain de fait augmenter l’enveloppe avec 3 M€ consentis par Paris. Et autre bonne nouvelle, l’opération n‘aura pas coûté un euro au cause. Sur les douze exploitants, la moicontribuable. Les repreneurs devront s’acquitter de 100000 € à tié des commerçants (dont deux déleur entrée. « Rien n’aurait été possible sans ce travail partenarial parts à la retraite) a plié bagage, tandis à trois », ont souligné le préfet du Loir-et-Cher Gilles Lagarde, que l’autre a accepté la concession. Un Jean d’Haussonville, et le patron de la CGPME régionale, Patrice nouvel espace commercial et hôtelier Duceau. « Nous avons tous joué des rôles différents dans les négoest ainsi en train de se mettre en ciations. Cela ne fut pas facile car c’était un cas unique, sans précéplace sur la place devant le Château. dent en France, sans jurisprudence ni textes prévus pour. «Les touristes sont de plus en plus exiL’administration a été extrêmement prudente et nous avons un peu geants. Une réputation du lieu, un créé le droit. L’objectif était que la situation des commerçants soit traitée avec équité et que les salariés ne soient pas des victimes. » bouche-à-oreille positif, c’est important », a justifié Jean d’Haussonville, le

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Pour prendre le manche sans risquer le crash À Tours Nord, la société Aviasim propose à ses clients de piloter un Airbus A320 dans un simulateur et un environnement hyperréaliste.

Q

ui n’a jamais rêvé de s’installer aux commandes d’un avion de ligne et de tenter un décollage des pistes d’Orly ou une approche délicate de l’île de Mykonos ? C’est l’expérience unique que propose à Tours Nord – pour la somme de 99 € dans la formule de base – la jeune société lyonnaise Aviasim créée par Thomas Gasserès ; ce dernier vient d’y installer son premier franchisé, après avoir testé la formule avec succès en gestion intégrée, à Lyon et à Toulouse. Le concept est simple : Aviasim permet à tous ceux qui veulent s’y essayer – après avoir été briefé par un vrai pilote – de s’installer dans un simulateur de vol qui reproduit, au détail près, le cockpit et les commandes d’un Airbus A320. Attention, il ne s’agit pas d’une attrac-

tion de foire ! Le simulateur n’est pas installé sur des vérins hydrauliques mais l’expérience procure des sensations uniques et très proches de la réalité. « Nous sommes la seule entreprise de loisirs en Europe à exploiter des simulateurs de l’A320 », explique Thomas Gasserès, qui projette d’ouvrir chaque année en France entre deux et trois sites franchisés, le prochain devant s’installer à Bordeaux. « L’idée, c’est d’accueillir des particuliers, des passionnés de l’aviation mais aussi des entreprises dans le cadre de programmes d’incentive ou de stages de cohésion d’équipe. » Aviasim va également ouvrir ses portes aux pilotes désireux de compléter leur formation ; des stages antistress – la peur phobique de l’avion touche près de 10 % de la population – viendront

compléter cette offre originale. L’investissement consenti par le franchisé à Tours est d’environ 220 000 €. À tenter dans d’autres villes régionales ? JCS http://www.aviasim.fr/

Plus douce sera la chute « L’indoor skydiving », le simulateur de chute libre sans parachute, fait partie des drôles de produits que conçoit Philippe Malempré. Un inventeur qui rêve de partir à l’assaut des marchés européens…

U

n tout petit village peut abriter de grands projets. C’est le cas de Labrosse, près de Pithiviers (45), où Phi-

lippe Malempré, un ingénieur belge de 38 ans, imagine et conçoit de puissants ventilateurs de simulateurs de chute libre, comme ceux de l’Aérokart de Paris (voir ci-contre) et de Roosendaal aux Pays-Bas. Dans ces chambres avec soufflerie qui reproduisent les sensations du parachutisme, chacun peut s’envoyer en l’air sans sauter d’un avion et à quelques mètres seulement du plancher des vaches… Avant de créer son bureau d’études GM Ingénierie, en 2010, Philippe Malempré avait navigué sur toutes les mers du globe pour superviser le montage de plateformes pétrolières ou remorquer des bateaux en perdition. Un étonnant parcours, qui l’a conduit à réfléchir à une nouvelle génération de simulateurs, moins coûteux que les précédents, et

dont le premier modèle devrait être mis en service en France l’an prochain. Outre la mise au point de ces engins pour amateurs de sensations fortes, Philippe Malempré propose à ses clients d’autres types de « solutions à la carte », en thermographie, analyse vibratoire et alignement au laser… Il planche également actuellement sur « des concepts de ventilation bien spécifiques dans le domaine des énergies renouvelables », mais préfère pour le moment n’en souffler mot. Pour passer à la vitesse supérieure, « et partir à l’assaut des marchés européens », Philippe Malempré recherche aujourd’hui des partenaires… afin de voler encore plus haut. Jacques Huguenin

www.gmi-ventilateur.eu

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Carnet INDRE-ET-LOIRE Arnaud de Ponnat, 40 ans, entré en 2005, après un début de carrière chez PSA, à l’usine d’Amboise du mécanicien de précision Mecachrome, devient directeur général (CEO) du groupe basé à Amboise qui possède, en outre, des unités industrielles à Aubigny-surNère (18), Vibraye (72), au Québec (Mirabel), au Maroc (Tanger) et désormais en Loire-Atlantique. Il succède à Julio de Sousa, 54 ans, qui prend le poste de président (chairman) de la société, tout juste cinq ans après en avoir pris la direction.

Ancien responsable de la direction financière des laboratoires Servier, Olivier Laureau, 57 ans, a été nommé président de la fondation et du groupe pharmaceutique Servier, suite au décès de son fondateur Jacques Servier.

LOIRET

RÉGION Le pôle de compétitivité S2E2 (Smart electricity cluster) change sa gouvernance. Olivier Simone, le directeur des opérations de la société Énergie Relais, implantée à Gellainville (28) et spécialisée dans la fabrication et l'installation de solutions de production d'énergie, devient le président de cette structure dont le siège se trouve à Tours Nord (37), dans les locaux de l'usine STMicroelectronics. Il succède à Thierry Allard suite à la démission de ce dernier.

CHER Après six années à la tête du Syndicat départemental d’énergie du Cher (SDE18), Aymar de Germay a été réélu avec plus de 90 % des voix. Les 318 élus représentant les communes et communautés de communes ont également voté pour les 15 vice-présidents du SDE 18, qui regroupe les 290 communes du département du Cher pour lesquelles il organise le service public de distribution d’électricité et de gaz.

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de l’équipementier ferroviaire Faiveley Transport, qui exploite deux importantes unités industrielles à la Ville-aux-Dames et Saint-Pierre-des-Corps, dans la banlieue de Tours. Il succède à Thierry Barel qui dirigeait la société depuis 2011.

EURE-ET-LOIR Leo Pharma annonce la nomination de Michel Fillon en tant que vice-président opérations industrielles France, à la tête du site de production de Vernouillet où il succède à Luc Levasseur. Chimiste de formation, Michel Fillon a conduit l’essentiel de sa carrière chez Novo Nordisk à Chartres, une usine qu’il dirigeait depuis 2007.

INDRE-ET-LOIRE Stéphane Rambaud-Measson vient d’être nommé président du directoire et directeur général

Gérard Bouyer a été élu président de la CCI Touraine, en remplacement de Serge Babary devenu maire de Tours. Gérard Bouyer était précédemment premier vice-président de la CCI, en charge de l’industrie, de l’emploi, du développement durable, de l’environnement et de l’insertion.

LOIRET Seul candidat à sa succession, Xavier Beulin a été réélu à la tête de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), qui regroupe 320 000 adhérents. Âgé de 55 ans, le céréalier du Loiret – également président du groupe industriel Sofiprotéol – repart donc pour un second mandat.

Pierre Guyot, pdg du fabricant de matériel agricole John Deere France et dg de l’usine de moteurs de Saran depuis sept ans, vient d’être nommé au siège mondial du groupe, à Moline, dans l’Illinois (USA). Il devient viceprésident en charge des achats et approvisionnements. Bruno Rodique, actuel directeur de l’usine John Deere de Gray (70), lui succède à la présidence française et à la direction de l’usine saranaise qu’il connaît bien pour y avoir été directeur adjoint des ressources humaines durant six ans (1999-2005).




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