TEMBRE 2014 - 5 €
La nouvelle vague
de l’iconomie
Attractivité des territoires : Le modèle unique n’existe pas
Point de vue
Bouillonnement créatif t si nous nous apprêtions à vivre de nouvelles « Trente Glorieuses » ? Les « iconomistes » ont la conviction que la 3e révolution industrielle, celle introduite à la fin des années quatre-vingt par les nouvelles technologies de communication, ne provoquera de véritable explosion de croissance qu’à l’horizon 2030. Et que cet élan se poursuivra, après un temps d’adaptation des structures économiques et sociales, durant vingt-cinq ou trente années. Les deux dernières vagues d’innovations de rupture (la machine à vapeur à la fin du XVIIIe siècle, l’électricité et le moteur à explosion à la fin du XIXe siècle) ont suivi la même évolution (lire page 28). Voilà une raison d’espérer pour des sociétés occidentales aspirées par un trou d’air sans précédent alors que, paradoxalement, elles vivent une incroyable ébullition créative. Après l’irruption d’Internet, les objets connectés et l’impression 3D vont peu à peu envahir notre quotidien, comme les usines virtuelles modéliseront les étapes du process industriel avant leur planification, permettant aux lieux de production de gagner en efficacité et en réactivité. Ce bouillonnement ne modifie pas seulement le rapport au travail, mais aussi celui au territoire. La bonne nouvelle, rapportée de nos entretiens avec l’urbaniste Philippe Estèbe et le sociologue
E
Jean Viard (lire pages 8 à 11), c’est qu’en matière d’aménagement, la fatalité n’existe pas. Jean Viard oppose les exemples de Béziers et de Montpellier, deux villes aux destins longtemps parallèles avant que le volontarisme politique de la seconde ne la transforme en l’une des principales métropoles françaises. Aujourd’hui, les nouvelles technologies peuvent enrayer la spirale mortifère de la désertification rurale, pour peu que les territoires aient les moyens de se doter d’autoroutes de l’information. Dans les pages qui suivent, nous relatons l’expérience d’entrepreneurs qui développent leur business à la campagne et les avancées de la télémédecine dans l’accès au soin des personnes isolées. La région Centre vit aussi sa révolution digitale. À Orléans, avec le projet de Très Grand Accélérateur, à Tours, avec la cantine des jeunes talents, mais aussi dans le Perche eurélien où s’apprête à naître l’une des toutes premières écoles numériques françaises, des entrepreneurs construisent l’économie du futur. Et « l’iconomie » ne se résume pas aux startupers ; la digitalisation gagne progressivement toutes les activités humaines, du commerce à l’industrie en passant par la recherche : la 3e révolution industrielle est bien en cours.
zon François−Xavier Beu
6-19
www.lettrevalloire.com Ce magazine est un hors-série de La Lettre Valloire, bimensuel d’information politique et économique en région Centre. Édité par MCM Presse SAS au capital de 160 000 € RCS Tours B 341 914 273. Siège social : 14, boulevard Heurteloup à Tours Adresse postale : BP 92031 37020 Tours Cedex 1 02 47 70 60 00 contact@lettrevalloire.com Rédaction : François-Xavier Beuzon (rédacteur en chef) Jean-Christophe Savattier (rédacteur en chef adjoint) Aurélie Vouteau (édition)
Points Chauds 6-7
8-11
En bref L’actualité du trimestre en bref.
16-17
Pascal Blanc : « Nos territoires sont intéressants pour les entreprises. » Pascal Blanc, désormais maire UDI de Bourges et président de la communauté d’agglomération Bourges Plus, n’a qu’un credo : la mutualisation.
18
Pascal Brindeau : « L’économie doit devenir notre priorité .» Pascal Brindeau, le nouveau maire UDI de Vendôme, veut faire de l’action économique une priorité de son mandat.
Attractivité des territoires : Le modèle unique n’existe pas
A participé à ce numéro : Jacques Huguenin Stéphanie Payssan Maquette : Régis Beaune Révision et corrections : Florence Augustine
En matière d’attractivité, chaque territoire répond à un modèle unique et doit, avant tout, respecter ses spécificités. Fait encourageant, la ruralité ne constitue pas un handicap insurmontable.
Publicité : Au support Diffusion : Nadine Gomès Crédits photographiques : Une, sommaire : Cyril Chigot DR : 6, 7, 10, 11, 20, 21, 22, 23, 24, 26, 27, 29, 30, 32, 33, 34, 40, 44, 46 AgglO Orléans : 8-9 Ville de Chartres : 12 E. Legouhy : 16 Jean-Christophe Savattier : 14, 18, 36, 37, 38, 42 Jacques Huguenin : 49, 50, 51, 52, 53
12
Impression : Imprimerie Vincent, Tours (37) Informations légales : Abonnement annuel 2014 (23 numéros et magazines hors-séries) : 360 € Abonnement électronique avec édition bihebdomadaire : 450 € Prix de ce numéro : 5 € CPPAP : 0116 I 85872 ISSN : 1246-4333 Dépôt légal : septembre 2014 Directeur de la publication : François-Xavier Beuzon
MCM presse 4 La Lettre Valloire - Septembre 2014
14-15
Jean-Pierre Gorges : « À Chartres, nous privilégions la politique de l’offre. » L’agglomération de Chartes est l’un des territoires les plus attractifs de la région Centre. Son président Jean-Pierre Gorges revient sur ce succès. Philippe Vigier : « Ce gouvernement fait tout à l’envers. » Le députémaire UDI de Cloyes-sur-le-Loir déplore la façon dont le gouvernement a conduit la réforme territoriale.
Économie 20-21
En bref L’actualité du trimestre en bref.
22-29
À LA UNE La nouvelle vague de « l’iconomie » La nouvelle économie tisse de nouveaux liens entre les individus en développant usages et services pour optimiser l’utilisation des biens physiques. Elle introduit aussi une économie de la créativité dans des territoires oubliés. La troisième révolution, celle de « l’iconomie », est en marche.
20-47
Sommaire
SEPTEMBRE 2014
30
Mon village percheron à l’heure du web Le Perche eurélien dessine le prototype d’une économie digitale en milieu rural.
32
Orléans, future surdouée digitale Les collectivités locales et les entreprises digitales de l’agglomération font cause commune pour créer le Très Grand Accélérateur de l’économie numérique à Orléans.
34-35
Olivier Carré : « Renouer avec la compétitivité économique. » L’élu orléanais, en charge du développement économique et numérique à l’AgglO, veut rassembler les énergies pour réussir le projet du Très Grand Accélérateur.
36-37
Palo Altours, les recettes de la cantine tourangelle À l’initiative de plusieurs web entrepreneurs tourangeaux, l’association Palo Altours fédère et mobilise toutes les ressources de l’écosystème numérique tourangeau.
38
Martin Héron « L’économie collaborative, une autre façon de consommer. » L’économie collaborative propose des modèles alternatifs d’échange de biens et de services.
44-46
46
Open Agrifood Orléans : L’agroalimentaire fait sa révolution à Orléans Avec l’Open Agrifood, Orléans veut donner le coup d’envoi de la 3e révolution agroalimentaire.
Les Crudettes reverdissent Le spécialiste de la 4e gamme (salades prêtes à consommer) Les Crudettes conquiert de nouveaux marchés.
50
Les chantiers Les chantiers régionaux en prévision.
58
Le carnet
49-53 40
Figarol dans les grandes largeurs La société corpopétrussienne Figarol vient de mettre au point une nouvelle machine d’impression numérique à sublimation.
42
Mercura veut pousser les feux Le spécialiste blésois des signalisations lumineuses embarquées entend étoffer et diversifier son offre.
Escapades ine fin de magaz Retrouvez en s e u iq m es écono nos itinérair es. et touristiqu
La Lettre Valloire - Septembre 2014 5
En bref
Points Chauds
LA RELANCE PAR L’INVESTISSEMENT es conseils généraux d’Eure-et-Loir, de l’Indre, du Loir-et-Cher et du Loiret, dont les exécutifs sont à droite et au centre droit, ont proposé un plan de relance régional de 50 M€ en 2014, puis de 100 M€ en 2015, se concentrant « sur des investissements productifs, et dans des secteurs où l’emploi local est dominant (BTP, etc.) ». Dans un communiqué commun, les quatre conseils généraux interpellent l’exécutif socialiste du conseil régional du Centre, lui demandant de « s’associer aux investissements routiers et d’infrastructures, qui sont aujourd’hui délaissés par elle pour des raisons éloignées de l’intérêt général, au détriment de l’activité et de l’emploi ». Quant à l’État, coupable selon les quatre pétitionnaires « d’une baisse aveugle des dotations de l’État aux collectivités territoriales », il lui est demandé de « remédier aux freins qui empêchent l’économie de redémarrer, le choc de simplification se faisant aussi attendre ».
L
YANN GALUT À CONTRE-COURANT Ni frondeur, ni béni-ouioui ! Yann Galut, le député PS du Cher cherche la bonne fréquence. Soucieux de replacer le débat économique, qui divise la majorité parlementaire, au sein du parti, il vient de créer une nouvelle « sensibilité » baptisée « Cohérence socialiste » avec plusieurs de ses pairs – notamment Karine Berger et Valérie Rabault – qui, c’est le moins que l’on puisse dire, ne partagent pas la ligne sociale-libérale du Premier ministre. L’avocat berruyer prépare déjà des propositions « décoiffantes » - on peut lui faire confiance ! –
susceptibles de former la trame d’une future motion. Prévoyant, il a déjà officiellement demandé à Jean-Christophe Cambadélis la tenue d’un congrès extraordinaire qui pourrait se tenir au printemps 2015.
MAL PARTI Voilà qui augure mal des futures relations entre les maires de Tours et d’Orléans. Ce dernier a
vivement réagi aux propos de Serge Babary qui posait une candidature de pure forme de la ville de Tours au statut de capitale régionale dans l’hypothèse d’une reconfiguration de celle-ci. Serge Grouard a qualifié « d’incongrue » l’annonce « du nouveau maire de Tours (on notera qu’il évite d’utiliser son patronyme, NDLR) qui se porte candidat pour devenir le chef-lieu de l’éventuelle région (…) Il s’agit d’une mauvaise manière notamment à l’égard d’Orléans qui est capitale de la région Centre ». Quelles que soient les couleurs politiques, l’entente est toujours aussi peu
cordiale entre les premiers magistrats des deux villes ligériennes.
« MENACE INFANTILE »
S’exprimant après le dernier remaniement ministériel dans
l’hebdomadaire Marianne, le député socialiste frondeur d’Indre-et-Loire Laurent Baumel a opposé à la « menace infantile de la dissolution un refus de principe », considérant que « ce droit de dissoudre le Parlement devrait tomber en désuétude lorsque le président de la République et les députés sont issus de la même majorité ». L’ancien maire de Ballan-Miré parle « d’une alternative logique à la dissolution : le renouvellement du gouvernement, et donc du Premier ministre, en accord avec l’ensemble de la majorité au Parlement, pour appliquer une autre politique ». À condition, aurait-il pu ajouter, que cet accord soit possible…
De Guillaume Peltier, vice-président national de l’UMP, co-fondateur de la Droite forte et maire de Neung-sur-Beuvron (41) : « Je ne suis pas Sarkolâtre. ». D’Éric Doligé, sénateur UMP et président du conseil général du Loiret, à propos de la réforme territoriale : « Entre chaque couche du millefeuille administratif, on a oublié l’épaisseur de la crème pâtissière ! ». D’Éric Doligé, encore, ironisant sur la coïncidence de la démission du gouvernement Valls et le discours – mouillé – du président de la République sur l’île
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Le 17 juin, en pleine grève des intermittents du spectacle et alors qu’il avait été nommé quelques jours plus tôt médiateur pour apaiser le conflit, le député PS d’Indre-et-Loire Jean-Patrick Gille a envoyé urbi et orbi le schéma ci-dessous avec le titre suivant : « Dossier de l’intermittence : un conflit complexe à 3 personnages bipolaires ». Une façon peu amène de communiquer son impuissance devant une situation quasi inextricable. On notera aussi l’emploi du qualificatif bipolaire habituellement destiné aux maniaco-dépressifs. Le député visait-il les deux ministres de l’époque en charge de ce dossier explosif ?
EXPLOSIF
VALSE EN LOIRET-CHER (SAISON 1) « Stupéfaction ! », « indignation ! » : il est peu de dire que Maurice Leroy, le président UDI du conseil général de Loiret-Cher, n’a pas apprécié le « limogeage » de Gilles Lagarde, le préfet de Loir-et-Cher avec lequel l’ancien ministre de la Ville avait noué une relation de proximité, voire de complicité. Celui qui contribua à dénouer la situation juridique complexe du Domaine de Chambord a été remplacé par Yves Le Breton – un ancien du secrétariat général du ministère de l’Intérieur où il travaillait depuis 2013 – à compter du 1er septembre. A priori, Gilles Lagarde, qui aura passé deux ans et demi en Loir-et-Cher, n’avait pas trouvé d’affectation au moment où nous écrivons ces lignes. De quoi alimenter le courroux de Maurice Leroy…
CHIFFRE
DU TRIMESTRE
500 C'est le nombre d'emplois que pourrait créer le Très Grand Accélérateur d'Orléans, qui doit s'installer dans l'ancienne usine de Famar, en bord de Loire (cf. page 32).
VALSE EN LOIRET-CHER (SAISON 2) Un départ n’arrivant jamais seul, Catherine Bachelier, sous-préfète de Vendôme, a demandé à quitter ses fonctions. Le président de la République a accepté sa requête le 4 septembre, décision parue au Journal Officiel du lendemain. Diplômée de Sciences-Po, ancienne collaboratrice
de la mairie de Paris, puis du ministère de l’Intérieur, l’épouse d’Henri Guaino est revenue au ministère
en service détaché pour « raisons familiales » ; elle était en poste dans le Loir-et-Cher depuis 2011.
SAPIN SUR UNE LIGNE COURBE
Après la courbe du chômage, la ligne politique… Le ministre géomètre des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin, a déclaré, à l’occasion de la nomination du gouvernement Valls 2, que « quelque chose a changé : la clarté de la ligne politique ». Une minute plus tard, il estimait que « la ligne n’avait pas bougé depuis la publication du rapport Gallois en novembre 2012 ». De quoi recevoir la noix d’honneur du Canard enchaîné dans son édition du 3 septembre 2014.
HAROLD HUWART PROMU Espoir du Parti radical de gauche de Jean-Michel Baylet, l’énarque Harold Huwart (ci-contre avec son président), fils du maire de Nogent-le-Rotrou et luimême conseiller municipal de la cité percheronne, a pris du galon au cabinet du ministre des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin. Arrivé au printemps dernier comme conseiller social, il a été nommé le 29 août au poste de conseiller auprès du ministre ; à ce titre, il prend en charge le pôle communication et presse.
de Sein à l’occasion du 70e anniversaire de sa libération : « Qui voit Sein voit sa fin. ». De Jean-Pierre Gorges, député-maire UMP de Chartres, à propos de la politique : « Quand on fait les choses, il faut que ça sente et ça fasse du bruit. L’eau de rose, ça ne sert à rien. ». Toujours de Jean-Pierre Gorges, à propos de l’homme politique providentiel : « Alain Juppé a échoué en 1995 quand il était Premier ministre. Donnez-moi la France pendant cinq ans, vous allez voir ! ». D’Yves Fromion, député UMP du Cher à propos de la politique économique menée par le tandem Hollande-Valls : « Nous sommes aujourd’hui aux ordres de l’Imperator allemand. ».
La Lettre Valloire - Septembre 2014 7
Points Chauds
Aménagement
Attractivité des territoires
Le modèle unique La tangentielle ouest d’Orléans vue du ciel.
En matière d’attractivité, il n’existe aucune fatalité, ni de position, bonne ou mauvaise, figée pour l’éternité. Chaque territoire répond à un modèle unique et doit, avant tout, respecter ses spécificités. Fait encourageant, la ruralité ne constitue pas un handicap insurmontable. 8 La Lettre Valloire - Septembre 2014
n’existe pas L
a question de l’attractivité de leurs territoires préoccupe les élus. À cet égard, la réforme engagée dernièrement par l’Élysée, qui doit se traduire par un redécoupage contesté, a naturellement relancé de vifs débats. Comme si le format des régions conditionnait à coup sûr leur réussite. « Il y a plusieurs profils d’attractivité », précise Philippe Estèbe, enseignant-chercheur et directeur de l’Institut des hautes études de développement et d’aménagement des territoires en Europe (Ihedate) : « Tout dépend de ce que l’on souhaite attirer : des capitaux, des tou-
ristes, des entreprises, des ingénieurs, des retraités ? ». Ainsi, si l’Île-de-France – 18 % de la population française pour 30 % du PIB – est très bien placée pour l’accueil des ingénieurs et des sièges sociaux, « elle est assez répulsive pour les retraités ». À Grenoble, on est « très bon pour attirer les chercheurs et les centres de R&D. Mais, dans le même temps, les indicateurs sociaux sont très mauvais, juge Philippe Estèbe. Ce territoire est fracturé de l’intérieur ». En région PACA, les touristes et les retraités affluent… mais les capitaux et les entreprises s’y font plus rares, « y compris, les en-
treprises à forte intensité technologique. Sophia Antipolis, c’est bien, mais c’est tout petit à l’échelle internationale ! ». Du coup, les chercheurs et les universitaires recommandent aux techniciens du développement de cartographier soigneusement le type d’activité ou de publics qu’ils souhaitent retenir ou attirer dans leurs filets. Et de ne pas chercher à rivaliser avec des idéaux types inaccessibles. Pas question non plus de s’endormir sur ses lauriers ou de s’enferrer dans le pessimisme. « Il existe des villes et des territoires qui jouissent d’une véritable rente, c’est le cas de Toulon avec La Lettre Valloire - Septembre 2014 9
Points Chauds
Le village de La Loupe (28) et ses environs accueillent plusieurs travailleurs de l’économie numérique, dont ceux de Mutinerie Village.
Aménagement
l’arsenal ou de Besançon avec l’ancienneté de la présence militaire. La vallée de la Loire, avec ses châteaux, s’inscrit aussi dans cette logique qui reste fragile et peut s’avérer mortifère », prévient le sociologue Jean Viard, spécialiste des mobilités et des espaces, souvent appelé en tant que conseil par les élus. « Ces attractivités à géométrie variable sont une chance. L’expérience montre qu’il n’y a pas de modèle unique, ni de positions, bonnes ou mauvaises, installées pour l’éternité. L’équilibre des territoires se nourrit de toutes les complémentarités. Et c’est un équilibre qui évolue dans le temps », ajoute Philippe Estèbe. La comparaison entre le parcours de Béziers et de Montpellier est édifiante : Béziers, qui a connu son heure de gloire grâce à la viticulture et à l’industrie, est devenu « l’homme malade du Languedoc-Roussillon, comme en témoigne l’arrivée du Front national à la tête de la municipalité. Montpellier a fait le chemin inverse et brille aujourd’hui de tous ses feux ». Le parallèle entre les deux principales villes du département de l’Hérault démontre bien que « le volontarisme politique peut avoir des effets à condition de s’inscrire dans la durée ». À Montpellier, la longue domination politique de Georges Frêche aurait favorisé le ralliement sur le long terme
10 La Lettre Valloire - Septembre 2014
de tous les décideurs et leur pari commun sur les nouvelles technologies et l’économie de la connaissance. « C’est un fait : l’attractivité des territoires dépend de la capacité des élites locales à produire du consen-
qui a endossé ce rôle en devenant le maire entrepreneur de sa ville. Si les territoires ne doivent pas se conformer à un modèle unique, il existe des tendances fortes dont il est difficile de s’affranchir. « Ce qui est évident, c’est la prégnance de l’attractivité métropolitaine », ajoute Philippe Estèbe. Privés de grand centre urbain, les bassins de vie sont fortement exposés à un risque de décrochage : « La métropole, c’est le lieu où s’accumulent le capital et les ressources de l’économie de la connaissance. C’est le lieu où circulent les idées, les talents. Il s’y produit mécaniquement des effets de potentialisation des richesses et de clusterisation de l’économie. ». Mais ce tropisme métropolitain assèche-t-il les franges territoriales plus rurales, moins marquées par l’emprise urbaine ? « Ce n’est pas du tout tranché, la campagne, où le ca-
“ L’ÉQUILIBRE DES TERRITOIRES SE NOURRIT DE TOUTES LES COMPLÉMENTARITÉS. ET C’EST UN ÉQUILIBRE QUI ÉVOLUE DANS LE TEMPS
sus et à former des coalitions, des alliances entre des groupes sociaux parfois très éloignés les uns des autres. Et ce indépendamment des appartenances et des alliances politiques », commente le directeur de l’Ihedate. Le consensus politique longtemps vanté dans le Loiret a probablement été à l’origine de sa capacité à séduire industriels et investisseurs durant les années 80 et 90. « La question du leader politique en matière d’attractivité est, en effet, critique. C’est toute la problématique de l’incarnation, expose le sociologue Jean Viard. Il doit faire corps avec son territoire. Aujourd’hui, Bordeaux, c’est Juppé. Lyon, c’est Gérard Collomb comme Lille fut Mauroy en son temps. » C’est aussi Jean-Pierre Gorges, le député-maire de Chartres et président de Chartres Métropole (lire son interview, à la page 12),
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dre de vie et le bien-être priment, est aussi très attractive. » Des retraités à fort pouvoir d’achat épris de paysage et de patrimoine, des entrepreneurs qui souhaitent développer leurs activités sans s’exposer au stress intense des grandes capitales – comme en témoigne le parcours de ce créateur d’entreprise, distributeur de tee-shirts par Internet présenté dans l’enquête consacrée aux nouveaux modèles économiques que nous publions dans ce numéro (lire page 24) – contribueront pleinement à l’épanouissement de la ruralité. Il peut également être payant pour des élus de miser sur la valorisation de leurs traditions agricoles. C’est ce qui a été entrepris à Contres (41) avec la création d’un Agroparc visant à tirer parti de la food valley locale. « Il faut susciter du désir. Les territoires, y compris les ruraux, doivent
Jean Viard
Philippe Estèbe
“ IL NE FAUT PAS OPPOSER LES PAYSAGES, LA DOUCEUR DE VIVRE, ET LA QUALITÉ PROVERBIALE DE L’ACCUEIL À LA PERFORMANCE ÉCONOMIQUE
se mettre en scène dans le cadre d’un véritable récit, suggère Jean Viard. Il ne suffit plus de dire : nous sommes les meilleurs ! Il y a toujours un travail à accomplir sur l’identité d’un territoire et sur sa représentation. Nous vivons, ne l’oublions pas, dans la société du spectacle. Ce récit doit bien sûr s’appuyer sur des réalités. Sans cette mise en scène, il n’y a pas de développement possible. Il faut s’inscrire dans l’imaginaire collectif. » Ce récit n’a pas à se déployer forcément dans le culte du « fracas » de la croissance. « Il ne faut pas opposer les paysages, la douceur de vivre, la qualité proverbiale de l’accueil et la fluidité des transports à la performance économique, explique Jean Viard. Ces facteurs sont aujourd’hui des facteurs d’attractivité et prodiguent de nouvelles opportunités aux villes moyennes et aux espaces ruraux. » C’est – en dépit de ses piteux avatars judiciaires – ce que l’ancien maire socialiste de Tours, Jean Germain, avait tenté avec ses fameuses « Noces Romantiques », trivialement dénommées « mariages chinois ». Il s’agissait de vendre à de jeunes couples asiatiques l’opportunité de se marier (fictivement) au cœur du Val de Loire, réputé pour son appartenance au patrimoine culturel « romantique » mondial.
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D’autant que ce fameux modèle métropolitain peut connaître des remises en cause dans un futur proche. « Le rejet des nuisances provoquées par une trop forte urbanisation, la crise écologique et énergétique qui pourrait nous obliger à ré-internaliser les coûts des transports, sont en mesure de redonner leur chance à des coins de France aujourd’hui relégués », renchérit Philippe Estèbe. Les technologies de l’information et la généralisation de l’accès à Internet à haut débit composent naturellement autant de facteurs favorables à ce désenclavement. Comme à La Loupe (28) où une filière numérique se met en place autour du courtier en assurance Crealinks et de l’école numérique Simplon Village. D’où l’importance pour tous les acteurs, et notamment les acteurs publics, de préserver dans cette attente une « maintenance minimale des territoires » selon l’expression du directeur de l’Ihedate. Car, en dessous d’un certain seuil démographique, de présences minimales d’infrastructures de transport, de communication ou de service public, aucun retournement de fortune n’est possible. « On ne fait pas pousser de l’herbe dans le Sahara », juge cet expert des régions françaises qui estime qu’une part non négligeable du territoire national est proche du seuil fatidique.
Il s’agit notamment de la trop fameuse « diagonale du vide », cette bande dépeuplée qui, des Ardennes aux Pyrénées, cumule tous les désavantages de la ruralité, et où prolifèrent une misère résignée ainsi qu’un sentiment d’abandon. En région Centre, une partie du Berry participe évidemment de cette diagonale. « De plus, les zones d’ancienne tradition industrielle dans cette partie de la France – comme par exemple à Vierzon – ont du mal à se défaire d’une certaine culture du deuil. On ressasse le glorieux passé ouvrier et on oublie d’accueillir correctement le touriste qui est encore un peu un intrus », observe Jean Viard. Mais encore une fois, rien n’est irréversible. Un concours de circonstances, la volonté politique, la proximité d’une infrastructure sous-exploitée, la disponibilité d’importantes capacités foncières – « paradoxalement, le vide peut attirer, à condition que ces disponibilités soient aisément connectables au reste du monde », juge cet élu berrichon – peuvent procurer l’opportunité à des territoires de se redresser. Le projet de hub chinois (EuroSity) initié par l’ancien maire de Châteauroux Jean-
Le premier « hub de coopération économique franco-chinois » baptisé « EuroSity » a été inauguré le 11 juin dernier à Châteauroux.
François Mayet sur l’immense friche industrielle léguée par le 517e régiment du train pourrait, à condition qu’il se concrétise, illustrer cet axiome rassurant. Jean-Christophe Savatttier
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Points Chauds
Aménagement
JEAN-PIERRE GORGES, DÉPUTÉ-MAIRE DE CHARTRES ET PRÉSIDENT DE CHARTRES MÉTROPOLE
« À Chartres, nous privilégions
la politique de l’offre »
L’agglomération de Chartes est devenue en quelques années l’un des territoires les plus attractifs de la région Centre avec, à la clé, une belle collection de projets d’entreprises. Son président JeanPierre Gorges revient sur ce succès qui doit beaucoup à une politique d’investissements dans des équipements collectifs… et à une rigoureuse gestion des deniers publics. La Lettre Valloire : Comment expliquez-vous la progression de l’attractivité de l’agglomération chartraine ? Jean-Pierre Gorges : Nous avons fait le choix, il y a dix ans, de privilégier une politique de l’offre. C’est-à-dire que nous avons investi régulièrement dans des équipements publics (complexe nautique, centre culturel, école de musique) – près de 70 M€ sur la durée du dernier mandat auxquels s’ajoutent les sommes engagées par Chartres Métropole et les différentes SEM, soit près de 300 M€ au total – qui, aujourd’hui, font la différence. Désormais, ce sont bien souvent les salariés qui dictent les localisations. Le dumping fiscal, les aides directes à l’installation, ça ne marche plus ! Ce qui compte, c’est comment se déplace-t-on, dans quelles conditions peut-on faire du sport ou se divertir? Peut-on se loger facilement sans se ruiner ? La question du logement, et notamment du logement social, est centrale en matière d’attractivité. Il n’y a pas que des cadres dans les entreprises. Il faut constituer une offre de logements marquée par sa variété et sa qualité. La Lettre Valloire : Mais comment investir lorsque les caisses sont vides ? Jean-Pierre Gorges : Ce n’est pas du tout le cas à Chartres où, par ailleurs, nous avons réduit chaque année la pression fiscale. Le secret, c’est la maîtrise des charges de fonctionnement 12 La Lettre Valloire - Septembre 2014
qui produit un effet multiplicateur considérable. Ce qui est économisé en fonctionnement permet de dépenser beaucoup plus en investissement. Il n’y a pas beaucoup de territoires en France où cette politique est menée, c’est le cas à Chartres. La Lettre Valloire : Mais n’est-ce pas la proximité avec l’Île-de-France qui explique avant tout ce succès ? Jean-Pierre Gorges : Chartres se situe, en effet, non loin de Paris, mais cela ne remonte pas à mon élection ! Mon prédécesseur n’avait pas su exploiter cet atout géographique naturel qu’il a compromis en menant une politique de dépenses publiques à caractère social. Nous avons adopté une logique inverse et nous l’avons déployée dans la durée. J’ajoute que cette politique d’équipements collectifs a également eu un écho parce que nous avons choisi d’associer nos projets à des architectes de renom, comme l'Iranienne Zaha Hadid pour le futur parc des expositions. J’ajoute aussi que la proximité avec Paris, qui est bien sûr un avantage concurrentiel, nous prive, dans le même temps, de la présence de ressources universitaires. Elle nous oblige donc à nous employer dans d’autres registres. La Lettre Valloire : Pour autant, le bilan démographique de Chartres est plutôt négatif ? Jean-Pierre Gorges : Comme beaucoup de villes-centres, nous avons perdu des habitants, mais c’est un phénomène transitoire lié paradoxalement à notre politique de l’habitat. Nous avons détruit des logements pour en construire d’autres. Dans l’attente de leur réception, le nombre de résidants baisse mécaniquement. En revanche, nous gagnons des habitants dans l’agglomération et c’est bien ce qui compte. Par ailleurs, et c’est le chiffre qui retient mon attention, le nombre d’entreprises installées à Chartres a augmenté de 1 % sur la période 2008-2013, c’est-à-dire dans une période de crise économique intense ! Propos recueillis par Jean-Christophe Savattier
La Lettre Valloire - Septembre 2014 13
Points Chauds
Politique
PHILIPPE VIGIER, DÉPUTÉ ET MAIRE (UDI) DE CLOYES-SUR-LE-LOIR
« Ce gouvernement fait Le député-maire UDI de Cloyes-sur-le-Loir, cité parmi les possibles têtes de liste du centre et de la droite aux prochaines élections régionales, déplore la façon dont le Gouvernement a conduit la réforme territoriale. La Lettre Valloire : La plupart des députés appartenant au groupe UDI que vous présidez à l’Assemblée nationale se sont abstenus le 23 juillet, lors du vote sur la réforme territoriale. Pourquoi ? Philippe Vigier : Cette réforme territoriale était attendue par tous et indispensable. L’enchevêtrement des structures et la complexité de la répartition des rôles entre les collectivités territoriales entraînent des doublons et les mécanismes de décision sont devenus trop longs. L’architecture territoriale, telle qu’elle existe aujourd’hui, n’est plus capable d’aider les entreprises à aller chercher la croissance dont le pays a besoin. C’est partant de ce constat, et parce que nous ne sommes pas dans une opposition systématique, que plusieurs députés UDI, dont je fais partie, tout comme Maurice Leroy, se sont abstenus lors du vote en première lecture du projet de loi, fin juillet. La Lettre Valloire : Cette abstention ne vaut toutefois pas adhésion… Philippe Vigier : Bien entendu. Nous sommes en totale opposition avec la méthode choisie pour mener une réforme que nous jugeons cependant nécessaire. Avant de se préoccuper du redécoupage des territoires, le Gouvernement aurait dû commencer par remettre à plat la répartition des rôles entre les différents échelons de collectivité et résoudre le problème de leur autonomie fiscale. Au lieu de cela, la
question des compétences, pourtant 14 La Lettre Valloire - Septembre 2014
essentielle, ne sera traitée qu'à l’automne. Ce gouvernement fait décidément tout à l’envers. La tête de l’exécutif nous a joué un paso doble, pied droit en avant et pied gauche en arrière. Le 18 janvier, à Tulle, le président de la République explique qu’il n’est pas favorable à la disparition des départements. Au mois d’avril, lors de son discours de politique générale, Manuel Valls se fixe comme objectif de supprimer les conseils départementaux à l’horizon 2021. Alors même que son prédécesseur, Jean-Marc Ayrault, avait fait voter un an plus tôt un redécoupage des cantons avec renouvellement des conseillers départementaux en mars 2015. On voit bien que tout cela nage dans l’incohérence et que la marque de ce pouvoir est l’improvisation. La Lettre Valloire : Justement, que dire sur ce redécoupage… Philippe Vigier : Improvisation et incohérence, là aussi. On en a profité pour régler leur compte à des « amis », comme Martine Aubry, et solder ainsi des contentieux internes au parti socialiste… Mais le plus mauvais sort a été réservé à la région Centre qu’on a mariée sans consentement avec le Limousin et Poitou-Charentes, puis seulement avec ce dernier, le Limousin ayant donné sa préférence à l’Aquitaine… qui a finalement récupéré aussi Poitevins et Charentais, laissant la région Centre toute seule. On voit que tout cela n’a aucun sens. La Lettre Valloire : La région Centre seule, n’est-ce pas finalement aussi bien ? Philippe Vigier : Il est vrai qu’en comparaison du projet initial, qu’on dit être celui du président de la République, c’est une demi-satisfaction. Je défendais, avec d’autres, un projet Val de Loire qui aurait donné au Centre une façade sur l’Atlantique. En assouplissant le droit d’option qui doit permettre à un département, entre le 1er janvier 2016 et le 1er mars 2019, de quitter une région pour une autre. Dans l’absolu, cela pourrait permettre à la Loire-Atlantique et à la Vendée de rejoindre la région Bretagne et aux trois autres départements des Pays de la Loire (Maine-et-Loire, Sarthe et Mayenne) de se joindre à nos six départements pour constituer une
tout à l’envers » grande région Val de Loire. Mais les conditions imposées par le projet de loi Cazeneuve, majorité des trois cinquièmes du conseil général et des deux conseils régionaux concernés, rendent une opération de rattachement difficile. La Lettre Valloire : Comment vous est apparue la position de l’exécutif régional ? Philippe Vigier : Changeante. Le président Bonneau est tout d’abord allé voir ses homologues des régions Auvergne et Limousin pour parler mariage, alors que rien ne nous lie à ces deux régions. Puis, il a semblé se rapprocher de l’option Centre-Poitou-Charentes pour finalement se rallier à la solution Val de Loire… tout en prenant acte de la fin de non-recevoir de son collègue socialiste des Pays de la Loire qui préfère la Bretagne. La Lettre Valloire : On prononce votre nom comme chef de file d’une liste de droite et du centre aux prochaines élections régionales ? Philippe Vigier : Rien n’est fait, mais une chose est sûre, je n’irai pas si nous sommes en ordre dispersé. La Région
Centre me passionne et je lui ai beaucoup donné durant dix-neuf ans, dont seize dans l’opposition, de mandat de conseiller régional. J’ai démissionné récemment, suite à mon élection à la présidence du groupe UDI de l’Assemblée nationale, mais je reste très attentif à son avenir. Je déplore que cette région n’ait plus de projet structurant. En matière d’apprentissage, d’économie numérique, elle n’est pas assez présente. Et le développement du tourisme ne se limite pas à la Loire à vélo, qui est une excellente initiative. Prenons des idées ailleurs. Pour cela, il faut que l’exécutif écoute, soit perméable aux bonnes idées même lorsqu’elles viennent du camp d’en face. Maurice Dousset (président UDF du conseil régional du Centre de 1985 à 1998, NDLR), lui, avait confié une présidence de commission à Marie-Madeleine Mialot. J’aurais aimé que l’actuel président fasse preuve du même esprit d’ouverture.
Propos recueillis par François-Xavier Beuzon
La Lettre Valloire - Septembre 2014 15
Points Chauds
Politique
PASCAL BLANC, MAIRE UDI DE BOURGES
« Je suis convaincu que nos sont intéressants Pascal Blanc, 55 ans, ingénieur depuis 1987 à l’Aérospatiale – MBDA – à Bourges, est entré en politique il y a seulement sept ans. Le Vichyssois d’origine est désormais maire UDI de Bourges et président de la communauté d’agglomération Bourges Plus. Les élections et le début du mandat ont été mouvementés pour celui qui n’a qu’un credo : la mutualisation. La Lettre Valloire : Pourquoi vous être engagé si tardivement en politique et quand avez-vous décidé d’être candidat à la mairie de Bourges ? Pascal Blanc : Je ne pensais pas un jour m’engager en politique. Je suis arrivé à Bourges en 1987. J’ai alors intégré le monde associatif et présidé le Bourges Athlétic Club de 2000 à 2006, qui a regroupé jusqu’à 3 000 adhérents. J’étais aussi membre de la chorale l’Accroche Chœur. Lorsque l’on fait partie du monde associatif, quand un maire cherche une équipe, on peut faire partie du vivier. Serge Lepeltier m’a ainsi proposé, en septembre 2007, de prendre la direction de sa campagne pour les élections de 2008 et un poste d’adjoint. J’ai adhéré au Parti radical, composant actuellement l’UDI, à ce moment-là. J’ai été maire adjoint en charge des travaux pendant six ans. J’y ai pris goût. J’ai fait mon boulot au service de la population. Je n’ai jamais fait de calcul politique. Le 21 mars 2013, Serge Lepeltier, a annoncé qu’il ne serait pas candidat aux municipales de 2014. Je ne savais pas que j’allais être candidat. J’ai tenté de faire l’union à droite mais cela n’a pas été possible. Le 24 juillet, l’UDI m’a investi face à Alain Tanton. Véronique Fenoll, UMP, et Alain Tanton se sont unis pour monter une liste. Jusqu’en octobre, j’ai tout fait pour qu’il n’y ait qu’une liste mais cela a échoué pour des problèmes de personnes. Alain Tanton n’a ja-
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mais joué le jeu après mon investiture. À l’automne, on concluait tout de même un protocole d’accord avant le premier tour pour fusionner les listes pour le second tour. Nous avons appliqué ce protocole et j’ai pris la tête de la liste fusionnée. Il y a eu un bon report de voix et la victoire a été assez facile. La Lettre Valloire : L’épisode de l’élection du président de l’agglomération pour laquelle vous aviez affirmé ne pas être candidat jusqu’à la veille de l’élection, a été houleux. Que s’est-il passé ? Pascal Blanc : J’avais toujours dit que je ne serais pas candidat à la présidence de Bourges Plus et que je soutiendrais une candidature UMP. J’ai donc demandé à Véronique Fenoll si elle voulait se présenter à ce poste car je souhaitais un candidat berruyer. Alain Tanton, président sortant, voulait également candidater. Je ne pouvais pas soutenir deux personnes de ma liste à la fois. J’ai sifflé la fin de la récréation et me suis porté candidat. Alain Tanton s’est maintenu face à moi. J’ai été élu mais je ne m’étais pas du tout préparé à présider l’agglomération. La Lettre Valloire : Quelles sont vos priorités pour la Ville et l’Agglomération ? Pascal Blanc : Nous sommes en ordre de bataille dans un contexte économique et budgétaire compliqué. En 2015, les dotations de l’État devraient diminuer de 2 M€ à Bourges. Je me suis engagé à ne pas augmenter les impôts. Nous devons donc diminuer les dépenses et faire preuve d’ingéniosité pour réaliser des économies. Nous allons travailler sur les transferts de compétences entre les communes et l’agglo et sur la mutualisation des moyens et du personnel. C’est un exercice qui n’est pas simple. La Lettre Valloire : Sur le plan économique, quelles sont vos orientations ? Pascal Blanc : Bourges et l’agglomération ont du potentiel.
territoires pour les entreprises » Je suis convaincu que nos territoires sont intéressants pour les entreprises car nous sommes au centre de la France avec des moyens de communication, un pôle universitaire et un cadre de vie agréable. Nous serons à l’écoute de ceux qui créent des emplois. Il faut coordonner les actions mises en place localement pour éviter la dispersion qui engendre l’inefficacité. Il y a, par exemple, deux pépinières d’entreprises, l’une dépendant de l’agglomération, l’autre du Département. On ne peut plus se le permettre. Nous devons créer des synergies pour être plus performants. La Lettre Valloire : Avez-vous des projets pour dynamiser l’emploi ? Pascal Blanc : Le centre commercial Avaricum, qui regroupera des enseignes comme Zara ou Habitat, est en cours de construction en centre-ville. Il sera créateur d’une centaine d’emplois locaux et d’autant indirects. Avaricum devrait ou-
vrir dans six mois. La base logistique d’Intermarché, qui se trouve à Levet, déménagera, a priori en 2016, sur le parc d’activités de la Voie romaine à Bourges. Une centaine de nouveaux emplois seront créés. Par ailleurs, Carrefour va installer une plateforme logistique sur la zone d’activités du Moutet, qui est en cours d’aménagement, avec là aussi une centaine d’emplois à la clef. Nous anticipons en viabilisant les terrains et en amenant le haut débit et la fibre optique dans les zones d’activités pour être prêts lorsque nous avons une demande d’installation. Des PME comme les Sirops Monin ou Recticel connaissent un énorme développement. C’est la preuve que les entreprises peuvent s’épanouir à Bourges. Et puis, l’économie touristique n’est pas suffisamment exploitée. Nous recherchons actuellement un investisseur pour la création d’un hôtel thalasso près du plan d’eau du val d’Auron. Propos recueillis par Stéphanie Payssan
La Lettre Valloire - Septembre 2014 17
Points Chauds
Politique
PASCAL BRINDEAU, MAIRE UDI DE VENDÔME
« L’économie doit devenir
notre priorité »
Pascal Brindeau, le nouveau maire UDI de Vendôme, veut faire de l’action économique une priorité de son mandat. Il souhaite également relancer le processus de fusion des intercommunalités de l’arrondissement dans une grande agglomération.
La Lettre Valloire : Comment expliquez-vous votre score convaincant (52 %), pourtant à l’issue d’une triangulaire ? Pascal Brindeau : Nous avons dérogé à une tradition politique vendômoise qui veut que les élections municipales se soldent par un faible écart entre les deux candidats. Plusieurs facteurs nous ont aidés. Le rejet de l’équipe sortante, et plus généralement la volonté de sortir de l’emprise du parti socialiste qui gérait la ville depuis vingt-cinq ans. Ensuite, la cohésion des forces politiques de droite et du centre ralliées à ma candidature, qui a inspiré la dynamique victorieuse. Il faut ajouter à ces deux principaux motifs l’effet de la vague nationale de rejet du président de la République et de son gouvernement. Une victoire de cette ampleur me donne de grandes responsabilités : j’ai pris la mesure des attentes et des inquiétudes de nos concitoyens vis-à-vis de la situation économique et sociale. La Lettre Valloire : La question économique était au cœur de votre campagne. Comment allez-vous la traduire dans l’action ? Pascal Brindeau : Avec un taux de chômage de 8,8 %, la situation vendômoise est certes plutôt meilleure qu’ailleurs.
10 La Lettre Valloire - Septembre 18 Mars 2013 2014
Mais notre tissu local de PME souffre. De plus, la desserte TGV n’a pas été suffisamment valorisée et nous pâtissons d’un déficit majeur d’offre immobilière dédiée aux entreprises. Nous n’avons pas, ces dernières années, investi suffisamment dans l’action économique. Sur un budget de 26 M€, la communauté de communes ne lui consacrait que 2 M€. Il faut relancer la machine. Nous allons pousser les feux sur un programme de bureaux situé à proximité de la gare TGV (450 m2 très vite disponibles, 1 000 m2 à terme). Ces locaux, libérés par la communauté de communes, devraient être disponibles dans le courant de l’automne. Je souhaite également développer la marque Vendôme, qui est une marque puissante, en nous appuyant sur des entreprises locales, fleuron de leur secteur, comme la société de tôlerie fine Dargaisse. Il y a de la place pour développer une véritable filière d’excellence, notamment dans le domaine du luxe. Enfin, nous allons nous associer avec trois autres villes moyennes, Vitré, Valence et Albi, dans le cadre d’une démarche commune de marketing territorial auprès des décideurs économiques de l’Île-de-France. L’idée de ce projet m’a été soufflée par mon ami Pierre Méhaignerie, le maire UDI de Vitré. L’économie doit devenir notre priorité. La Lettre Valloire : Aurez-vous les marges de manœuvre financière suffisantes ? Pascal Brindeau : Il le faudra bien. Le budget 2015 va être très compliqué à boucler, d’autant que nous sommes contraints de réduire de 12 % notre budget de fonctionnement. Ce ne sera pas une mince affaire. Je vous signale qu’avec la baisse des dotations annoncée récemment par l’État, c’est près de 3 M€ que nous devrons rendre en 2017. Nous allons devoir réviser certaines de nos politiques publiques, mais pas l’action économique ! Je désire aussi relancer la fusion de la communauté de communes du Pays de Vendôme avec les autres intercommunalités de l’arrondissement, dans la perspective de la création d’une agglomération. Ce projet a gagné en maturité, aidé par le récent renouvellement de la moitié des maires de l’arrondissement. Je souhaite que nous aboutissions au 1er janvier 2016. Propos recueillis par Jean-Christophe Savattier
La Lettre Valloire - Septembre 2014 11
Économie
En bref
LE CENTRE DE SERVICES DE MICHELIN S’INSTALLERA AUX DEUX-LIONS ierre angulaire du plan de réindustrialisation promis par Michelin suite à la restructuration drastique de l’usine de Joué-lès-Tours (37), le centre de services du groupe clermontois va s’installer dans le quartier des Deux-Lions. La société vient de prendre à bail un plateau de 887 m² situé dans le bâtiment de Bouygues Telecom qui n’exploite pas toutes ses capacités immobilières. Cette plateforme d’appel devrait immédiatement employer une vingtaine de collaborateurs avant de hisser ses effectifs à terme à plus d’une cinquantaine de salariés. Cette entité de Michelin Solutions, qui prodigue du conseil aux transporteurs routiers, devait originellement s’implanter dans la région lyonnaise, mais les dirigeants de Michelin se sont ravisés afin de se conformer aux engagements pris dans le cadre du plan social qui a frappé l’usine jocondienne ; notons que cette dernière était spécialisée dans la fabrication de pneus poids lourds.
P
SDH FERROVIAIRE REPRIS PAR MILLET La société Millet (environ 65 M€ de CA), spécialisée dans la location de wagons citernes et de wagons céréaliers a été autorisée par le tribunal de commerce d’Orléans à reprendre les actifs de SDH Ferroviaire, une société spécialisée à St-Denis-de-l’Hôtel dans la maintenance de wagons placée en liquidation judiciaire en mai dernier. Le projet proposé prévoit la reprise de 49 des 78 salariés employés sur le site.
au groupe Lefève, basé à St-Paterne-Racan (37). Cette activité, qui pesait 12 % du CA de Sky Acces et ne concernait que la seule agence de La Ville-aux-Dames (37), sera intégrée à Lefève Échafaudage, filiale dédiée du groupe tourangeau.
DACTYL BURO FILIALISE SON ACTIVITÉ INFORMATIQUE À l’occasion du rachat du berruyer TIB en février
SKY ACCES CÈDE DES ACTIVITÉS À LÉFÈVE
Souhaitant se concentrer sur son activité d’échafaudage motorisé, la société blésoise Sky Acces (105 salariés, 16 M€ de CA, 8 agences en France), a cédé son activité d’échafaudage traditionnel, dit tubulaire,
20 La Lettre Valloire - Septembre 2014
dernier, le bureauticien Dactyl Buro du Centre, dont le siège se trouve à Bourges, a filialisé l’ensemble de ses activités informatiques
dans la société Dactyl Buro Infogérance qui regroupera les actifs IT de TIB et de Dactyl Buro du Centre. Le volume d’affaires représentera environ 2,5 € ; cette structure emploiera une quinzaine de collaborateurs et sera implantée à Bourges, Orléans et Nevers.
BOURDIN PAYSAGES À FAY-AUX-LOGES L’entreprise Bourdin Jardins et Paysages (4,2 M€ de CA, 45 salariés), basée à Chécy, près d’Orléans, va ouvrir prochainement une plateforme de compostage de 15 000 m² à Fay-aux-Loges dans laquelle elle a investi 800 000 €. Elle sera dans un premier temps réservée aux professionnels et devrait accueillir entre 500 et 1 000 tonnes de déchets par an, dont ceux issus de sa propre exploitation.
BARAT REPREND LE GROUPE CEIT Implanté à St-Aignansur-Cher et à Blois (41), le groupe Barat, spécialisé dans la conception et la fabrication d’équipements ferroviaires, a été autorisé par le tribunal de commerce de Poitiers à reprendre les actifs du poitevin CEIT dont le redressement judiciaire avait été prononcé en avril dernier. Le projet prévoit la reprise de 83 salariés sur 214, ainsi que le maintien des sites de Loudun (86) et
de Rorthais (79), une entreprise dédiée à l’aménagement des intérieurs des véhicules ferroviaires.
KSB INVESTIT À CHÂTEAUROUX
Le fabricant de pompes multicellulaires à grande pression pour l’industrie KSB (2 Md€ de CA, 16 000 salariés dans le monde) va investir annuellement entre 1,3 et 1,5 M€ à Châteauroux durant les cinq prochaines années. L’unité emploie 115 salariés. Le projet vise à accueillir la fabrication de deux gammes de pompes de grande taille qui porteront à huit le nombre de gammes fabriquées à Châteauroux.
JOURDAIN S’ÉTENDRA À ESCRENNES
de 4 M€ – pourrait être engagé début 2015 pour une réception attendue en fin d’année.
TESSI MD VA QUITTER AMILLY POUR PANNES
Le fabricant de matériels agricoles Jourdain (53 M€ de CA, 183 salariés) va lancer la construction à Escrennes d’un bâtiment de stockage et de préparation de commandes de 10 000 m² sur un terrain d’environ 1,3 ha qui a été acquis auprès de la communauté de communes de Beauce et du Gâtinais. Le chantier de ce projet d’extension – qui représenterait un coût total
La société Tessi MD (64 salariés, 6,5 M€ de CA), une unité du groupe Tess de conditionnement (mise sous plis) et d’expédition de documents, s’apprête à déménager. Installée aujourd’hui à Amilly dans des locaux de 8 000 m², l’entreprise va transférer ses activités à Pannes, une commune voisine située à 7 km, dans les ex-locaux (6 000 m²) du transporteur SMTRT. Le projet (200 000 € d’investissement) devrait être opérationnel en octobre prochain.
MERCK SERONO INVESTIT 30 M€ À SEMOY L’usine Merck Serono de Semoy, qui emploie 350 salariés et une cinquantaine d’intérimaires à la production de médicaments contre le diabète, pourrait bénéficier d’un programme d’investissement de 30 M€, qui devrait être validé d’ici à la fin de l’année. Le laboratoire souhaite anticiper sur les nouvelles réglementations en matière de qualité et restructurer ainsi l’unité dédiée au conditionnement. Un atelier dédié à la granulation sera remplacé et une nouvelle unité de conditionnement installée ; une dizaine de cadres seront recrutés et une quinzaine d’intérimaires en production intégrés.
CREALINKS ENVISAGE CHARTRES
Le courtier grossiste et souscripteur en assurances Crealinks (13 salariés), qui va s’installer très prochainement dans les locaux de la pépinière numérique de La Loupe
(28), envisage de se doter d’un bureau à Chartres tout en maintenant son centre de gestion à La Loupe. L’objectif de Crealinks est de compter une cinquantaine de salariés d’ici à 2020.
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Dossier
NumĂŠrique
La
nouvelle vague
22 La Lettre Valloire - Septembre 2014
de
l’iconomie
La nouvelle économie tisse de nouveaux liens entre les individus en développant usages et services pour optimiser l’utilisation des biens physiques. Elle introduit aussi une économie de la créativité dans des territoires oubliés par les deux premières révolutions industrielles. La troisième révolution, celle de « l’iconomie », est en marche.
A
lors que le débat français se fige sur les vertus comparées des politiques économiques de l’offre et de la demande, le monde a pris un virage radical, sans se préoccuper des débats savants entre sociaux-libéraux et pseudokeynésiens. Les nouveaux entrepreneurs, jeunes, créatifs, peu enclins à s’embarrasser des contraintes du monde d’hier, révolutionnent l’économie et redonnent vie à des territoires et des pans d’activité à bout de souffle. Le quotidien britannique The Guardian citait il y a peu l’exemple d’un jeune chinois, Hua, qui s’est adossé à Taobao, une filiale d’Alibaba, le géant de l’e-commerce d’Hangzhou, pour relancer une activité traditionnelle, la fabrication de nattes
de bambou située à Peixie, un village perdu au milieu de la province de Fujian (sud-est de la Chine). Désormais, les nattes commercialisées en ligne sont livrées sous deux jours dans un rayon de 1 000 kilomètres autour de leur lieu de production et Hua a réussi à développer son business et à embaucher. Cette réussite n’a pas laissé insensibles les autorités locales, qui ont décidé de fournir des entrepôts pour la logistique des entreprises en ligne et de les exempter de loyer. Aujourd’hui, plusieurs néo-entrepreneurs de Peixie marchent sur les traces de Hua, des jeunes reviennent des grandes villes et se mettent au travail avec leur ordinateur portable. Le Brésil, reprenant à son compte une idée chilienne (Start-up Chile), a lancé en 2012 Start-up Brasil. Le
programme propose à de jeunes sociétés, principalement dans le secteur des nouvelles technologies, d’intégrer l’un des 9 accélérateurs du pays pour une période de six à douze mois. Les 100 entreprises sélectionnées chaque année ont la possibilité de recevoir jusqu’à 100 000 $ d’aides financières du gouver nement et des investisseurs privés peuvent défiscaliser leurs profits en injectant entre 10 000 et 495 000 $ dans chacune de ces heureuses privilégiées : un quota est même La Lettre Valloire - Septembre 2014 23
Économie
Numérique
réservé aux talents étrangers. L’an passé, le World Trade Center de Sao Paulo a accueilli la première édition de Demo Brasil, grand rendez-vous inspiré de la formule créée au début
Le Togolais Afaté Gnikou a construit une imprimante 3D écologique et démocratique.
des années 90 dans la Silicon Valley et qui a essaimé aussi en France grâce à la petite sœur du cluster californien, l’association d’entreprises innovantes Silicon Sentier : sur 500 start-up inscrites, les les 56 finalistes, répartis entre les Demonstrator (celles qui possèdent déjà un produit) et les Alpha Pitch (porteurs de projets encore au stade de l’idée), ont défendu leur projet en seulement six minutes devant un parterre d’investisseurs, d’entrepreneurs, de business angels et de représentants de grands groupes internationaux. Les apporteurs de capitaux, venus faire leur marché, n’ont pas été déçus et se sont rués sur la deuxième édition, organisée à Rio de Janeiro les 3 et 4 juin derniers, juste avant l’ouverture de la Coupe du monde de football. En Afrique, l’exemple vient de Lomé, au Togo, avec WoeLab, qui se définit comme un « Fablab de quartier » ou « une petite république numérique ». Le centre d’innovation togolais a incubé plusieurs projets numériques, dont l’étonnante imprimante 3D W. Afate ; « écologique et démocratique », elle permettra, dit son concepteur, Afaté Gnikou, de valoriser les déchets informatiques du continent africain en contribuant à vider les gigantesques dépotoirs qui, comme à Agbogbloshie, au Ghana, s’étendent sur plusieurs kilomètres carrés. Cette imprimante du pauvre a séduit le site
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de crowdfunding français Ulele qui a récolté 4 316 € pour aider à achever sa mise au point. Une somme modique, mais suffisante, qui a dépassé de 23 % l’objectif fixé. Le web cherche à s’imposer partout, y compris dans des sites de rêve, qu’on imagine plutôt d’ordinaire propices au farniente. L’idée de The Beachside Startup Villa, une pépinière pour talents en herbe située à Dar Bouazza, au sud de Casablanca, a germé dans la tête de deux startupers marocains, Othman Tsouli Mdidech et Mohamed-Amine El Hannanai : pour 800 $ par mois, les créateurs peuvent être hébergés, blanchis et nourris au bord de la plage
bergeur européen de sites Internet, a investi les anciennes filatures du quartier du Sartel, à Roubaix. Des milliers de serveurs ont remplacé les usines textiles de la première révolution industrielle, dont le dernier fleuron, la Lainière de Roubaix, a disparu dans les tout premiers jours de l’année 2000 : tout un symbole. OVH, qui a ouvert une filiale au Canada il y a deux ans, emploie quelque 400 personnes dans la ville du Nord. Une illustration de ce processus de création toujours en mouvement, que Schumpeter qualifiait de « destruction créatrice ». Des initiatives plus modestes, à l’échelle de petites villes ou même
“ L’IMPRIMANTE 3D DU TOGOLAIS AFATÉ GNIKOU A SÉDUIT LE SITE DE CROWDFUNDING FRANÇAIS ULELE QUI A RÉCOLTÉ 4 316 € POUR AIDER À ACHEVER SA MISE AU POINT
des Tamaris, un paradis pour surfeurs, et se consacrer au seul développement de leur projet numérique. La France apporte bien entendu sa contribution à cette génération spontanée, même si elle ne fait pas partie des cinq pays les plus cotés pour lancer son business qui sont, dans le désordre, les USA, le Canada, l’Australie, Hong-Kong et Singapour, selon le classement de la Washington State University. L’économie numérique a déjà redonné vie à des territoires oubliés : OVH, le premier hé-
”
du monde rural, éclosent un peu partout. En 2006, Benoît Zeller a lancé dans son village de l’Aveyron LookZippy, un site en ligne de vente de tee-shirts. Pas encore une success story, mais un vrai défi pour ce jeune entrepreneur heureux d’être revenu sur ses terres natales après plusieurs années en région parisienne : « Créer une entreprise, ce n’est pas plus compliqué lorsqu’on habite un village du fin fond de l’Aveyron qu’à Paris ou à Lyon », explique-t-il sur le site de l’APCE (Agence pour la création d’entreprise).
Site OVH de Roubaix.
L’OPTIMISATION DE L’ACHAT D’UN BIEN IMMOBILIER POUR DES CONCUBINS NON LIÉS PAR UN PACS Rencontre avec Nicolas DUVIVIER, juriste en droit des sociétés et spécialiste en gestion de patrimoine du cabinet DUVIVIER & ASSOCIÉS.
Ignorés par la loi, les concubins sont fiscalement traités comme des étrangers. La position des concubins lors de l’achat en direct de leur résidence principale est réglée par le jeu de l’indivision. Au décès de l’un deux, le survivant se retrouve dans la position délicate d’indivisaire avec les héritiers du concubin prédécédé. De plus, si le concubin a légué au survivant ses droits dans l’indivision, les droits de succession sur la part transmise seront dus au taux de 60 % (après abattement de 1 594 €). La société civile se révèle un outil ingénieux pour l’acquisition par des concubins d’un bien immobilier.
des nus-propriétaires, le concubin survivant conservera le contrôle de la société et pourra continuer à occuper le logement sans aucune difficulté. Second avantage de l’ingénierie, à l’extinction de l’usufruit, la pleine propriété sera reformée sur 50 parts sociales (la moitié du bien), sans aucune fiscalité. Seule la nue-propriété des 50 autres parts tombera dans la succession du concubin prédécédé. En présence d’un enfant, le jeu de l’abattement de 100000 € (succession en ligne directe) viendra neutraliser la fiscalité sur les 50 parts en nue-propriété.
Le recours à la société civile peut permettre d’assurer le maintien dans les lieux du concubin survivant jusqu’à son propre décès, et ce, avec une fiscalité allégée. Deux techniques doivent être proposées : le démembrement croisé des parts de SCI ou l’insertion d’une clause de tontine dans les statuts.
Au décès du second concubin, les héritiers de chaque concubin détiendront la pleine propriété de la moitié des parts sociales.
LE DÉMEMBREMENT CROISÉ DES PARTS DE LA SCI
L’INSERTION D’UNE CLAUSE DE TONTINE DANS LA SCI Lorsque des concubins achètent un bien en tontine, le décès du premier fera du survivant le seul propriétaire de la totalité du bien depuis son acquisition.
Monsieur DUPONT et Mademoiselle MARTIN âgés respectivement de trentecinq et quarante ans vivent en concubinage depuis dix ans et souhaitent acquérir à deux un logement d’une valeur de 200 000 €.
D’un point de vue successoral, cette clause évince totalement les héritiers du concubin prédécédé, elle ne répond pas au même objectif que la SCI en démembrement croisé.
Leur premier objectif est tout naturellement tourné vers la protection du concubin survivant en cas de décès. En conséquence, ils désirent que le survivant puisse occuper paisiblement le logement sans ingérence des héritiers. D’autre part, ils désirent minimiser le montant de la fiscalité inhérente aux droits de succession.
Cependant, d’un point de vue fiscal, lorsque la tontine est insérée dans un acte d’acquisition, le jeu de la clause rend exigibles les droits de succession à hauteur de 60 %. Une exception est prévue pour l’acquisition de l’habitation principale des concubins mais elle est de portée limitée puisqu’elle ne s’applique que si l’immeuble coûte moins de 76 000 € (droits de vente de 5 % environ).
Ils constituent une SCI en pleine propriété. La SCI achète le bien. Les concubins réalisent ensuite des cessions ou donations des parts en démembrement croisé. Le capital de la société est alors divisé en 100 parts numérotées de 1 à 100. Monsieur DUPONT détient la nue-propriété des 50 premières parts et l’usufruit des 50 suivantes. Mademoiselle MARTIN détient l’usufruit des 50 premières parts et la nue-propriété des 50 dernières parts. En conséquence, si Monsieur DUPONT décède le premier, Mademoiselle MARTIN aura l’usufruit des 50 premières parts et surtout la pleine propriété des 50 parts restantes. Si Mademoiselle MARTIN décède la première, Monsieur DUPONT aura la pleine propriété des 50 premières parts et l’usufruit sur les parts suivantes. Dans les deux hypothèses, à condition d’avoir rédigé avec la plus grande précaution la clause des statuts relative aux droits respectifs des usufruitiers et
Cet inconvénient fiscal est totalement éludé par la constitution d’une SCI achetant tout type de bien et l’insertion d’une clause de tontine dans les statuts de la société. En effet, au décès du premier concubin, le survivant sera réputé propriétaire depuis l’origine de toutes les parts de la société, ce qui exclut l’exigibilité de tout droit de succession (droit de vente de l’ordre de 5 % sur les parts transmises). Ainsi, pour l’achat en direct d’un bien de 200 000 € avec une clause de tontine, le décès de l’un des concubins rendra exigibles des droits de succession sur 60 % du bien, soit 120 000 € (sans compter l’abattement de 1 594 €). Si les concubins constituent une SCI et insèrent une clause de tontine dans les statuts, le survivant deviendra propriétaire de la totalité des parts sociales moyennant le paiement d’un droit de 5 % (10 000 €), soit une économie de près de 110 000 €.
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Économie
Numérique personnes – chercheurs, bloggeurs, community managers, start-upers… mais aussi architectes, journalistes ou avocats… –, au milieu d’un domaine de 40 ha, riche de bois, de champs, de prés et de potagers… mais équipé du Wi-Fi. À moins de dix kilomètres de là, à La Loupe, Anna Stépanoff, aidée des collectivités locales, lance cet automne Simplon Village, une école du numérique destinée en priorité aux publics éloignés de l’emploi : une trentaine de personnes par promotion (six mois) s’y formeront à des métiers liés au web selon une méthode pédagogique totalement novatrice (lire page 30). Comme le
La région Centre est, quant à elle, en train de bâtir son « territoire créatif » dans le parc naturel du Perche, en Eure-et-Loir. Quarante ans après les premiers néoruraux, des travailleurs du digital, adeptes new age d’une sorte de « retour à la terre 2.0 », ont investi une ferme de St-Victor-deButhon, en plein cœur du parc naturel du Perche, pour créer « un espace de travail partagé et de permaculture (c’est-à-dire des pratiques visant à une production agricole durable, NDLR) ». Petit frère d’un premier espace de coworking créé en 2012 dans le XIXe arrondissement, « Mutinerie Village » peut accueillir jusqu’à 15
26 La Lettre Valloire - Septembre 2014
Laval ont créé le site panierdenosvilles.com. Les clients peuvent passer une commande avant 10 h et être livrés, le jour même, dans un point relais ou une entreprise pour peu que l’un ou l’autre soit situé sur l’une des huit communes de l’Ouest lyonnais desservies (120 000 habitants au total) : légumes bios, viande, pain, fromages, poissons ou vins, toute l’offre alimentaire est disponible, et même le fleuriste s’est prêté au jeu. Le paiement du panier, sécurisé, se fait en ligne. Depuis peu, le Loir-etCher a emboîté le pas des Lyonnais avec baladodrive.fr qui propose aux Blésois de commander en ligne des
“ LES « ICONOMISTES » PRÉVOIENT QUE LA VAGUE DE CROISSANCE FORTE SUCCÉDANT À LA TROISIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE NE VERRA PAS LE JOUR, AU MIEUX, AVANT LES ANNÉES 2030
disent les « mutins » de la ferme de St-Victor, « le web est en train de profondément redéfinir notre rapport au territoire ». Ce vent d’espoir est peut-être la réponse à l’inquiétude exprimée par l’économiste Laurent Davezies, auteur il y a deux ans du très lucide essai intitulé : La crise qui vient : la nouvelle fracture territoriale (Seuil-La République des idées). Le numérique révolutionne aussi le commerce en milieu rural. Dans la campagne lyonnaise, les commerçants d’Oullins et de St-Genis-
”
produits de la ferme et de venir les chercher chaque vendredi dans un entrepôt de la zone industrielle nord de la ville, mis à disposition par la chambre de métiers, initiatrice de l’opération avec sa consœur de l’agriculture. En moins de six mois, l’initiative est déjà une réussite. Ce n’est certes pas en pensant aux circuits courts de l’agriculture loiret-chérienne qu’une trentaine d’économistes français ont inventé le concept et néologisme « d’iconomie », qui se définit comme « l’économie de la troisième révolution in-
Économie
Numérique
dustrielle ». Prenant pour références les deux premières révolutions industrielles, celle introduite dans la seconde moitié du XVIIIe siècle par la machine à vapeur de James Watt (1767), puis celle, un siècle plus tard, qui a imposé presque concomitamment le moteur à explosion (1870), le téléphone (1876, Graham Bell) et surtout l’électricité (1878, Thomas Edison), ils ont cherché à modéliser l’économie de demain. Car, dans les deux premiers cas, ils ont pu établir le même constat : un demi-siècle après l’émergence de ces innovations de rupture, les sociétés qui les avaient adoptées ont connu une période de très forte croissance. Retardées par la crise de 1929 et la seconde guerre mondiale, les conséquences bénéfiques de la deuxième révolution industrielle ont vraiment été ressenties lors des Trente Glorieuses (1945-1975), comme les dividendes de la première révolution avaient dû attendre le Great Victorian Boom (1850-1873) en Angleterre
28 La Lettre Valloire - Septembre 2014
ou le second Empire, en France ; le règne de Napoléon III a, en effet, coïncidé presque exactement avec un quart de siècle de prospérité (1848-1873) entre deux grandes dépressions économiques. C’est en se fondant sur ces observations que les « iconomistes » prévoient que la vague de croissance forte succédant à la troisième révolution industrielle, issue des nouvelles technologies de la communication (l’adoption du protocole
TCP/IP et du mot Internet remonte à 1983), ne verra pas le jour, au mieux, avant les années 2030. Mais pour que les Français puissent prétendre à ce nirvana, il faudra vaincre les freins hexagonaux à la créativité. Le New York Times s’est penché, le 23 août, sur le cas d’Ornikar, une start-up fondée par deux jeunes diplômés d’école de commerce, Alexandre Chartier et Benjamin Gaignault, pour dispenser des cours de conduite en ligne. Mal leur
École Simplon Village.
en a pris : six organisations professionnelles représentant les propriétaires d’auto-écoles les ont attaqués en référé devant le tribunal de commerce de Paris pour concurrence déloyale. Il leur est reproché de n’avoir pas obtenu l’agrément préfectoral d’auto-école et de ne pas disposer de local commercial pour faire signer de contrat d’enseignement, comme le stipule la loi. « Il en va de la protection des consommateurs », se défend le représentant du principal syndicat, arc-bouté contre l’envahisseur numérique. On rappellera aussi le combat mené par les taxis d’Europe entière, avec des répercussions aux États-Unis mêmes, contre les compagnies de véhicules de tourisme avec chauffeurs (VTC). Le californien Uber, dont l’essentiel du succès repose sur son appli pour smartphones, a été, comme les start-upers d’Ornikar, assigné devant le tribunal de commerce de Paris. L’Association française des taxis (AFT) lui reproche l’utilisation de compteurs horokilo-
métriques, réservée aux taxis homologués, alors qu’il devrait facturer au client une prestation forfaitaire, définie au moment de la prise de commande. Accusé des mêmes entorses à la réglementation par d’autres compagnies de VTC, comme le français AlloCab, Uber a perdu la première manche judiciaire, le 1er août, se réservant le droit d’interjeter appel. Pour ne rien arranger, le géant californien, valorisé plus de 18 Md$ par les analystes financiers, est aussi montré du doigt par le ministre français des Finances, Michel Sapin, parce qu’il ne paie pas ses impôts en France. On le voit, la troisième révolution industrielle a encore des réticences à lever. Mais espoir… Des initiatives, comme celle de la cantine de Tours, ou des projets comme le Très Grand Accélérateur d’Orléans, que nous évoquons dans les pages qui suivent, préparent son avènement. L’économie numérique, déjà en passe, selon l’économiste Christian Saint-Étienne,
d’être dépassée par « l’iconomie entrepreneuriale », c’est-à-dire l’irruption des TIC dans la plupart des activités humaines, a un autre atout : elle développe de nombreuses externalités, c’est-à-dire la possibilité de fournir de l’activité à d’autres agents économiques dans un gigantesque réseau. Menace pour les avantages acquis ou nouvel âge d’or ? La révolution digitale est en marche…
Benjamin Gaignault et Alexandre Chartier, les fondateurs d'Ornikar, sont en butte aux propriétaires d'auto-écoles.
François-Xavier Beuzon
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Économie
Numérique
Mon village percheron à l’heure du web Entre l’assureur Crealinks, futur animateur de la pépinière d’entreprises de La Loupe, l’école numérique Simplon Village d’Anne Stépanoff et le collectif de coworkers « Mutinerie Village » de StVictor-de-Buthon, le Perche eurélien dessine le prototype d’une économie digitale en milieu rural.
A
Les jeunes de Mutinerie Village, entre économie numérique et retour à la terre.
nna Stépanoff peut présenter un CV à faire pâlir les recruteurs : Harvard, Normale Sup’, la Sorbonne, quelques années comme enseignant-chercheur et un passage de trois ans chez McKinsey. La trentaine venue, cette brillante jeune femme a souhaité quitter les trépidations de la vie parisienne pour trouver un peu de quiétude et une maison familiale à St-Eliph, un village des environs de La Loupe, en plein cœur du Perche eurélien et de son parc naturel. Au mois d’avril dernier, alors qu’elle caresse le projet de fonder une école numérique pour mettre en pratique ses méthodes d’enseignement, elle répond à l’appel à projets de l’école Simplon, une ancienne usine de Montreuil (93) reconvertie en lieu de formation au web pour des publics éloignés de l’emploi. Objet : essaimer cette expérience pédagogique dans d’autres lieux, particulièrement en milieu rural. Son profil correspond à celui recherché par l’école du 9.3. La communauté de communes des Portes du Perche et le
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conseil général décident de financer l’opération. En octobre prochain, six mois après le premier contact, Anna Stépanoff ouvrira les portes d’une première promotion de 30 jeunes, souvent en situation d’échec professionnel. Le lieu a été aussitôt identifié. L’ancien collège de La Loupe, à côté de la gare, était justement en cours de rénovation pour être transformé en pépinière d’entreprises. Simplon Village – c’est le nom de l’école – s’installera au rez-de-chaussée, en attendant que les 200 m2 de l’ancien gymnase soient rénovés. Et les étages seront occupés par la société de Thierry Vandecasteele et quatre ou cinq TPE liées à l’univers digital qu’il a convaincues de venir s’installer dans la bourgade percheronne. Le projet tombe à point nommé pour Crealinks, un courtier grossiste et souscripteur en assurances dont le chiffre d’affaires s’envole depuis trois ans : près de 500 000 € en 2012, plus de 1,7 M€ en 2013 et audelà de 2 M€ en 2014… Employant 13 personnes depuis la rentrée, Thierry Vandecasteele vise une croissance rapide : son objectif, à cinq ou six ans, est d’employer une cinquantaine de personnes, dont l’essentiel dans le centre de gestion de La Loupe.
À moins de dix kilomètres de là, dans le décor bucolique d’une ferme de StVictor-de-Buthon, un collectif de la génération numérique a créé « Mutinerie Village », un espace de coworking permettant de travailler au grand air et de cultiver ses choux selon les préceptes de la permaculture, un ensemble de pratiques relevant de l’agriculture durable. Xavier, l’un de ses animateurs, ne renie pas ce double arrimage à la modernité digitale et à un retour à la terre qui fleure bon les années 70. « La différence avec cette époque, c’est que nous ne vivons pas en vase clos. Nous sommes connectés au monde en permanence, grâce au web. » La preuve, les résidants de Mutinerie Village, souvent des Parisiens venus se mettre au vert pour travailler à leur projet digital (et moyennant un forfait all inclusive de 40 € HT par jour), veulent coopérer à leur nouvel écosystème percheron. Pour promouvoir une écologie 2.0, ils ont tissé des liens avec Arbocentre, l’association régionale qui veut favoriser « le développement durable de la forêt en région Centre », et EcoPertica, une coopérative qui se définit « comme un centre de ressources sur l’écoconstruction dans le Perche ». François-Xavier Beuzon
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Économie
Numérique
Orléans, future surdouée Les collectivités locales et les entreprises digitales de l’agglomération font cause commune pour créer rapidement le Très Grand Accélérateur de l’économie numérique à Orléans. Un projet quasi unique en France par son concept et son modèle de fonctionnement.
O
n se souvient du slogan choc des années 80 : « Montpellier la surdouée, berceau du futur ». Orléans et son maire de l’époque, Jacques Douffiagues, avaient alors refusé de se laisser distancer par la métropole languedocienne. Une période dorée d’une dizaine d’années allait suivre, avec l’arrivée de Honda, de Scott Paper, d’Hitachi et de tant d’autres… Cette ambition, Orléans veut la retrouver avec le Très Grand Accélérateur, un lieu pour aider les start-up à devenir les leaders de l’économie de demain. Le site était tout trouvé : l’ancienne usine Famar, bâtie en bord de Loire dans les années d’après-guerre par l’architecte suisse Jean Tschumi pour le compte du laboratoire pharmaceutique Sandoz. Une façon aussi de clore à bon compte la polémique
née du projet d’Arena, cette fois définitivement abandonné par la municipalité Grouard III. L’AgglO, la Ville d’Orléans et des entreprises, en première ligne desquelles Pentalog et sa filleule Easyflyer, veulent transformer cette jachère industrielle en un lieu dont la vocation ira bien au-delà de celle de traditionnel incubateur de start-up. « Car le modèle classique de la pépinière réunissant des entrepreneurs d’horizons différents, sans intérêts convergents, n’est plus assez efficace au regard de la nouvelle économie digitale », indique Fabien Prêtre, l’un des parrains du projet et pdg de l’imprimerie en ligne Easyflyer. « Le Très Grand Accélérateur (TGA) devra être une tête de pont permettant aux entreprises de s’ouvrir sur le monde et de s’articuler avec d’autres
L’AgglO candidate au label « Métropole French » Donner à l’agglomération orléanaise l’image d’un acteur majeur du numérique tant en France qu’à l’étranger, voilà à quoi pourrait servir le label Métropole French Tech, lancé par Fleur Pellerin, à l’époque ministre en charge de l’Économie numérique, et auquel l’AgglO est candidate. « Obtenir le label permettrait de booster la mise en place d’accélérateurs privés et l’installation de start-up, d’attirer des entreprises étrangères et de propulser des entreprises orléanaises à l’international. On a rarement vu une telle mobilisation autour d’un projet », se réjouit Vincent Marcé, responsable des études prospectives à Orléans Technopole. Pour autant le dossier de candidature n’en est qu’à la simple déclaration d’intérêt et suscite des interrogations. Celle de Frédéric Lasnier, directeur général de Pentalog, en particulier, qui craint que « le label ne meure de sa belle mort si on ne lui trouve pas d’amplificateur international et les crédits publics qui vont avec ». www.frenchtech-orleans.fr.
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accélérateurs », ajoute Frédéric Lasnier, co-parrain du projet et pdg de la société de services informatiques orléanaise Pentalog. Fabien Prêtre
Le lieu, qui pourrait accueillir jusqu’à 50 start-up de 10 salariés chacune, soit environ 500 nouveaux emplois, aura une triple vocation et trois espaces distincts, si les collectivités suivent les recommandations du tandem Lasnier-Prêtre. D’abord un espace de coworking pour que des chefs d’entreprises de toutes tailles puissent « phosphorer sur le digital ». Ensuite, des bureaux mis à la disposition de créateurs de start-up, après sélection par un jury publicprivé. Enfin, des mètres carrés extensibles, louables à la demande (au même titre qu’on peut aujourd’hui louer de la disponibilité informatique à la demande), « ce qui permet de coller à la croissance très rapide et typique des start-up digitales », note Fabien Prêtre. L’intérêt du site sera aussi, grâce à ses bureaux et entrepôts, de « faire cohabiter de la logistique, du e-commerce et des spécialistes du hightech, insiste Fabien Prêtre, ce qui n’existe nulle part ailleurs ». Mais la grande originalité pourrait résider dans le modèle de financement public des entreprises que Frédéric
digitale Lasnier et Fabien Prêtre proposent à l’AgglO et « qui pourrait permettre aux collectivités de gagner de l’argent, ce qui n’est pas tabou ». Il repose sur le concept des « modalities for equity », soit l’échange d’un contrat de location, de prestations de technologie ou de savoirfaire, contre des actions de startup… Le système, qui serait géré par une société d’économie mixte, est calqué sur le « Technology for Equity » développé par l’incubateur et fonds d’investissement Pentalabbs de Pentalog (cf. notre édition de septembre 2013). Dans tous les cas, le projet de TGA « constituerait une opportunité politique de réconciliation de l’entrepreneuriat digital avec l’univers institutionnel, plaide Frédéric Lasnier. La collectivité soutiendrait un développement de capitalisme local qui fait tellement défaut à la France ». Tous les acteurs locaux intéressés, à l’instar de Pascal Grégoire, pdg de la SSII IT&M Solutions et vice-président de l’Udel, voient aussi un levier « pour la défense et le développement de l’emploi à forte valeur ajoutée sur le bassin orléanais, qui a perdu beaucoup de forces vives et donc de clients potentiels ». Et les entreprises du secteur numérique « auraient l’occasion d’investir dans de jeunes pousses prometteuses, voire d’intégrer à terme l’accélérateur pour y capter des projets importants ». La priorité est maintenant « d’agir vite, sans se compliquer la tâche ni engager trop de dépenses », insistent les promoteurs privés du TGA. Ce qui suppose de bousculer le temps politique, toujours trop long au goût des entrepreneurs. La balle est donc dans le camp des élus.
Frédéric Lasnier
Pentalabbs a déjà le pied sur l’accélérateur Pentalabbs, d’abord département interne de Pentalog avant de devenir société de capital-développement, vient de signer plusieurs nouvelles participations, dont Sharalike, une plateforme de partage de photos et de vidéos installée à Boston, aux États-Unis. Ces participations s’ajoutent à celles dans Easyflyer, l’imprimerie en ligne de Fabien Prêtre, 30 personnes aujourd’hui pour un CA qui double tous les ans (2,8 M€, aux dires de son dirigeant, en 2013), Ecotravel (mise à disposition de véhicules avec chauffeurs, 20 salariés à St-Denis-en-Val), Rue de la Paye (services de paie externalisés, 50 salariés dont 30 à Bucarest), Market Science, People Centric et 5M Ventures.
Jacques Huguenin
La Lettre Valloire - Septembre 2014 33
Économie
Numérique
OLIVIER CARRÉ, DÉPUTÉ DU LOIRET, 1ER ADJOINT AU MAIRE D’ORLÉANS ET 1ER VICE-PRÉSIDENT DE L’AG
« Renouer avec la compétitivité L’élu orléanais, en charge du développement économique et numérique à l’AgglO, veut rassembler les énergies pour réussir le projet du Très Grand Accélérateur de start-up. La Lettre Valloire : Quels sont les projets en cours de l’AgglO et de la Ville en faveur de l’économie et des entreprises du numérique ? Olivier Carré : Notre ambition est d’offrir un lieu de rencontre, de regroupement et d’émergence de multiples acteurs du numérique, quelle que soit leur taille, des start-up aux grandes entreprises. Le digital s’insinue partout, dans la décision du consommateur comme dans les process de fabrication et de commercialisation. C’est un fantastique levier de croissance non seulement pour les acteurs du
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numérique mais aussi pour l’ensemble du tissu productif, en particulier dans notre agglomération. Il n’y a pas si longtemps, le bassin orléanais avait un taux de chômage de 3 points inférieur à la moyenne nationale. Cet écart s’est réduit à 1 point, d’où la nécessité de renouer avec la compétitivité économique, d’aider nos entreprises à trouver des opportunités de croissance. Peu importe le lieu où elles se trouvent ; l’essentiel est qu’elles puissent y innover, valoriser leurs marques, faire évoluer leurs process et s’adapter aux besoins nouveaux. Créer ce lieu est donc une chance pour Orléans et son bassin d’emplois. La Lettre Valloire : Ce lieu sera-t-il une sorte de nouvelle pépinière ? Olivier Carré : Il s’agit d’aller bien au-delà du concept de pépinière et de créer une sorte de « hub » quasi unique en France, un générateur de croissance, capable d’attirer de nouveaux talents et de permettre à des entreprises de toutes
GLO, CHARGÉ DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET DU NUMÉRIQUE
économique » tailles et de tous secteurs – pas uniquement de l’économie numérique - de travailler ensemble. La Lettre Valloire : Le site Famar sera-t-il effectivement celui du super accélérateur de l’économie numérique ? Olivier Carré : Oui, car il y a là, en bordure de Loire, 8 000 m² de bureaux et 15 000 m² d’ateliers-entrepôts disponibles et opérationnels en quelques mois. Ce qui n’interdit pas, bien au contraire, d’envisager ultérieurement un deuxième lieu, davantage centré sur les services, sur la ZAC de la rue André Dessaux, au nord d’Orléans, comme l’envisage Charles-Éric Lemaignen, le président de l’AgglO. Ce « hub » ne sera pas non plus concurrent, mais complémentaire et partenaire de l’incubateur Pentalabbs, au château des Hauts, à la Chapelle-St-Mesmin. La Lettre Valloire : Quel est le rôle des collectivités locales dans ce projet ? Olivier Carré : D’abord rassembler. Le rôle du politique doit être neutre. Il doit faire en sorte que des entreprises de
toutes tailles puissent travailler ensemble, de façon équitable et dans de bonnes conditions. Il faut que les entreprises qui croîtront sur ce site ne rencontrent ni contrainte d’espace ni problème de financement. Ce sont les entreprises ellesmêmes, pas les collectivités, qui assureront la promotion et l’efficacité du hub. La Lettre Valloire : Que pourrait apporter le label « Métropoles French Tech » à l’AgglO et à son hub numérique ? Olivier Carré : Ce label ne servira pas à obtenir des subventions publiques, mais à valider l’ambition et la capacité de l’AgglO d’offrir aux acteurs du numérique les moyens d’échanger et de construire ensemble, et à obtenir une reconnaissance nationale, voire internationale dans le domaine du savoir-faire numérique. Il permettra aussi aux entreprises répondant à un certain cahier des charges d’être davantage aidées. Mais, avant l’obtention du label, la priorité est bel et bien de réussir ce projet sur le site Famar. Propos recueillis par Jacques Huguenin
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Économie
Numérique
Palo Altours, les recettes À l’initiative de plusieurs web entrepreneurs tourangeaux, l’association Palo Altours a rallié le réseau national des espaces de coworking connu sous le nom de la Cantine numérique. Installé dans le quartier populaire du Sanitas, ce lieu effervescent fédère et mobilise toutes les ressources de l’écosystème numérique tourangeau.
«C’
est impressionnant » : Jordan Gomès, fondateur avec son frère Julien des… Frères Gomès, une start-up tourangelle dédiée au développement d’applications web et mobiles, ne boude pas son plaisir. Instigateur pionnier en 2011, aux côtés d’autres jeunes entrepreneurs 2.0 (notamment Julien Dargaisse, l’un des dirigeants de BuzzleMe), de Palo Altours, une association qui œuvre au développement de l’écosystème numérique en Touraine, il se réjouit du chemin déjà parcouru. Et s’étonne des incroyables perspectives qu’elle semble offrir aux différentes parties prenantes.
Mathurin Body
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L’acte fondateur de Palo Altours a été son rattachement au réseau des Cantines numériques, ces espaces de coworking dédiés aux entrepreneurs du web http://reseaudescantines.org/ déjà implantés à Paris, Nantes, Tou-
le stress et de dissiper certains doutes », indique ce membre assidu. La création d’entreprises dans le domaine de l’économie numérique s’apparente à une course contre la montre. Et chacun sait qu’à l’issue de
“ NOUS SOMMES DES FÉDÉRATEURS ET DES ACCÉLÉRATEURS DE L’ÉCOSYSTÈME NUMÉRIQUE TOURANGEAU
louse ou Rennes. Grâce au coup de pouce des collectivités locales, la Cantine numérique, version Val de Loire, a planté son râtelier dans le quartier populaire du Sanitas à Tours, où elle occupe le premier étage d’une pépinière d’entreprises de 1200 m2. « Un lieu physique, c’est fondamental, même dans la sphère de l’économie numérique. Symboliquement, il faut un port d’attache », estime Julien Dargaisse, bombardé coordinateur de la Cantine. Il n’est besoin que de quelques minutes de présence pour prendre la mesure du bouillonnement intellectuel et de la ferveur qui se sont emparés des lieux. Web entrepreneurs, pour la plupart issus d’écoles d’ingénieurs en informatique ou d’écoles de commerce, viennent, en toute liberté, confronter en petit comité leurs idées, chercher des talents, régler un problème de code informatique ou rencontrer d’éventuels partenaires. La « cool attitude » de rigueur n’est qu’une façade. Les échanges décontractés qui s’instaurent spontanément « permettent aussi d’évacuer
”
ce processus de sélection darwinien, peu de projets passeront la rampe… « Nous sommes des fédérateurs et des accélérateurs de l’écosystème numérique tourangeau qui pouvait déjà s’appuyer sur la Webschool (ex-Ateliers du web tourangeau) », affirme Julien Dargaisse ; il estime que cette communauté représente un potentiel d’au moins 3 000 personnes. Le succès des manifestations patronnées par Palo Altours prouve, qu’en effet, les bords de Loire peuvent parfois prendre des airs de Californie ! «Nous avons parfois plus de 60 personnes présentes à nos différentes réunions », comptabilise Jordan Gomès. Des rendez-vous devenus des incontournables des experts digitaux des environs. Il en est ainsi des Startup Weekend : « L’idée, c’est de créer une start-up en 54 heures en réunissant une équipe autour d’un projet ou d’une idée. Le meilleur concept est distingué après un examen de passage devant un jury d’experts », résume le cofondateur des Frères Gomès. « Les Startup Weekend, c’est un vé-
de la cantine tourangelle ritable accélérateur de particules », reconnaît Mathurin Body, l’un des derniers lauréats – en mars dernier – de la manifestation. Cet ingénieur en informatique, dont le début de carrière s’est déroulé au service de grands comptes, a réussi à valider à l’issue de ce process éclair son projet de création de « Pirates de Loire ». L’idée est de fournir aux touristes visitant le Val de Loire une application mobile – uniquement sur iPhone – qui aide au choix d’itinéraires basés sur la gastronomie et le patrimoine historique. « L’application intègre aussi des jeux et des énigmes. Leur résolution permet de bénéficier de réduction sur des entrées ou sur des produits du terroir », explique Mathurin Body qui imagine déjà d’éventuelles déclinaisons géographiques (Pirates de Corse, Pirates de la Réunion, Pirates de Mayotte, etc.) à une « app » qui n’a pas encore dépassé la phase de preuve du concept. Des déclinaisons qui pourraient, bien sûr, être cédées sous la forme de franchise ou de licence. « Naturellement, nous sommes orientés business, mais nous avons aussi vocation à servir l’intérêt général. Palo Altours doit contribuer à la diffusion de la culture numérique au sein des publics les plus larges », prévient Julien Dargaisse. Cette préoccupation a conduit les responsables de Palo Altours et de la Cantine numérique à proposer des « Coding goûters ». Ouvertes aux enfants de 6 à 14 ans – la prochaine réunion sera organisée le 27 septembre prochain – ces sessions proposent des approches aux rudiments du code et du développement informatique. De quoi participer à la formation des futures élites du web ! Les grincheux pourraient objecter que cette effervescence n’a pas encore généré d’entreprise pérenne. Qu’aucun modèle économique in-
contestable n’est sorti des fourneaux de la Cantine du Sanitas. « Nous sommes davantage dans une logique de R&D que dans une logique de stricte incubation, riposte Julien Dargaisse. Ce qui n’exclut pas que certaines des idées qui ont germé dans ce lieu deviennent des entreprises viables, et pourquoi pas de véritables success stories. » Parfois au prix d’une modification du modèle initial. C’est notamment le cas de BuzzleMe qui, à l’origine, proposait aux recruteurs une vidéothèque contenant des présentations de candidats. « Nous allons plutôt proposer à des grands comptes d’exploiter notre application en marque blanche dans une logique BtoB », précise Julien Dargaisse, qui anticipe un CA de 600 000 € à l’issue de l’exercice 2015. Julien Dargaisse Jean-Christophe Savattier
Les Frères Gomès visent le campus de Berkeley Créée en 2011, la start-up des frères Gomès constitue l’un des projets les plus prometteurs de la communauté numérique tourangelle. Installée dans la pépinière du Sanitas et employant déjà sept salariés, l’entreprise s’était positionnée initialement sur le marché de la réalisation d’applications mobiles exploitées sur iPhone, iPad ou sur des terminaux tournant sous Androïd. « Nous avons rapidement décidé de développer des produits sous marque propre, notamment dédiés aux marchés des objets connectés », explique Jordan Gomès. L’un des deux programmes de recherche menés par cette fratrie 2.0, en partenariat avec Advisen, a été repéré par les experts de l’Intel Business Challenge : « Nous avons été retenus parmi les 25 meilleurs projets européens dans le cadre de cette compétition très relevée. ». À l’heure où nous écrivons ces lignes, les Gomès Brothers devaient s’envoler vers la Lituanie pour défendre une nouvelle fois leur projet : « L’enjeu est énorme, puisque si nous avons la chance de figurer dans le top 5 final, nous serons invités à suivre un séminaire de coaching sur le campus de Berkeley en compagnie des meilleurs experts mondiaux. ». De quoi naturellement donner un coup de fouet décisif au développement de cette pépite numérique tourangelle.
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Économie
Numérique
MARTIN HÉRON, STRATÉGISTE ET CO-FONDATEUR DE BANLIEUE OUEST (TOURS)
L’économie collaborative, une autre façon de consommer Selon le jeune dirigeant du cabinet tourangeau de R&D en communication Banlieue Ouest, l’économie collaborative propose des modèles alternatifs d’échange de biens et de services. Les grandes marques commencent à s’intéresser au sujet. Une étude a d’ailleurs démontré une fracture générationnelle dans la perception de l’économie collaborative. Les quinquagénaires, lorsqu’ils utilisent BlaBlaCar, le font dans une attitude d’hostilité affichée à l’égard de la SNCF. Les trentenaires donnent un contenu moins idéologique au covoiturage en la désignant comme une simple alternative. D’ailleurs, les Français sont déjà des adeptes de l’économie collaborative sans le savoir lorsqu’ils utilisent les sites eBay ou le Bon Coin !
La Lettre Valloire : Comment définir l’économie collaborative ? Martin Héron : Née au début des années 2000 dans la région de San Francisco à la faveur d’une sorte de renouveau culturel du mouvement hippie, elle est fondée sur l’échange de biens et de services entre deux ou plusieurs particuliers par l’utilisation d’une plateforme numérique ou physique. Elle a été popularisée par les échanges de fichiers musicaux « peer to peer (P2P) » comme Napster. Aujourd’hui, le concept se diffuse dans beaucoup de segments de l’économie « classique » en proposant des alternatives crédibles aux modèles anciens; c’est le cas de BlaBlaCar, la plateforme de covoiturage qui vient compléter l’offre actuelle de transports. La Lettre Valloire : Vous parlez d’alternative ou de complémentarité. Mais l’économie collaborative n’estelle pas en mesure de menacer des pans entiers de l’économie classique ? Martin Héron : Il ne faut pas relier l’économie collaborative à une sulfureuse pulsion anticapitaliste ou « antisystème » ; elle ne cherche pas à dynamiter le cadre actuel. Bien sûr, elle est fondée sur des valeurs fortes de solidarité, la nécessité de consommer « autrement » dans une perspective écologique, mais elle répond aussi à un simple besoin de réaliser des économies. La crise a ainsi probablement promu ces pratiques qui permettent de dépenser « malin ». 38 La Lettre Valloire - Septembre 2014
La Lettre Valloire : Les grandes marques de la « vieille » économie sont-elles intéressées par les perspectives de l’économie collaborative ? Martin Héron : Les grandes marques sont très intéressées par le relais de croissance que représente l’économie collaborative, estimant qu’elle répond à une demande forte des consommateurs. Mais elles sont, dans le même temps, mal à l’aise avec un concept qui n’est pas toujours compatible avec leur mode d’organisation vertical. L’économie collaborative a tendance à écraser les systèmes hiérarchiques. Les grandes entreprises sont plutôt en veille sur le sujet ; certaines (la SNCF, Auchan, Carrefour, des banques) sont prêtes à tenter des expériences mais elles manquent souvent de ressources internes pour faire avancer les projets. Le risque, c’est d’assister au développement de projets qui n’auront de collaboratif que l'adjectif et qui décevront les consommateurs.
Banlieue Ouest : la R&D de la com… Banlieue Ouest se définit comme une société de R&D dans le domaine de la communication. Fédérant une communauté d’experts, la société s’adresse aux start-up comme aux grands comptes et interviendra dans le domaine du service and product content, qui désigne les outils publicitaires permettant de communiquer sur une marque tout en fournissant un service aux consommateurs. Exemple : le site de comparaison de prix de l’enseigne de grande distribution Leclerc. banlieue-ouest.com - 21 rue Buffon - 37000 Tours
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Économie
Numérique
Figarol dans les grandes largeurs Spécialiste de l’impression grand format, la société corpopétrussienne Figarol vient de mettre au point une nouvelle machine d’impression numérique à sublimation. Une première qui lui ouvre de nouveaux marchés.
Trois ans de développement ont été nécessaires à Frédéric Roux (ci-dessus, avec à sa droite le directeur commercial Fabrice Godard) pour mettre au point son imprimante à sublimation Figatex 5000.
rédéric Roux, patron du groupe Faire Valoir (trois sociétés employant 36 personnes au total pour un CA 2014 de 5,6 M€), aura dépensé 400 000 € et mis trois ans à développer Figatex 5000, un traceur à sublimation destiné à imprimer des textiles en grand format pour les marchés de l’événementiel. Un investissement important pour Figarol, une PME d’une vingtaine de salariés installée à St-Pierre-des-Corps (37), mais une avancée technologique qui lui donne « trois ans d’avance sur ses concurrents ». Ce spécialiste de « la théâtralisation de l’espace », déjà patron d’Amega Signalétique et d’Imega Installations à Chargé (72), a racheté Figarol il y a
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festations sportives et culturelles : les plus grandes agences de communication ou d’organisation d’événements ont recours à Figarol, comme par exemple pour le salon de l’automobile et celui de l’agriculture ou pour le Festival de Cannes. L’acquisition de Figarol a ajouté une nouvelle activité à celles des deux sociétés mancelles, qui « théâtralise » plutôt les points de vente : Leroy Merlin et Carrefour, parmi d’autres grandes enseignes de distribution, font partie des clients d’Amega et d’Imega. En vendant son entreprise à Frédéric Roux, Norbert Figarol savait qu’il pouvait s’appuyer sur quelqu’un capable de l’aider à aller au bout de son projet, l’impression en sublimation
deux ans et demi à son fondateur, un photographe corpopétrussien qui a peu à peu évolué vers l’impression numérique en très grand format sur différents supports (tissus, bâches, toiles, adhésifs…), pour l’équipement des salons, conventions d’affaires ou mani-
(procédé qui permet à l’encre, sous l’effet de la chaleur, de teinter la masse du tissu) de tissus polyesters en très grande largeur. « Jusqu’alors, il fallait coudre entre elle les bandes de tissu pour atteindre le format désiré. Avec Figatex, il est possible d’impri-
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mer des rouleaux entiers avec une laize de 5 mètres », précise Frédéric Roux, ingénieur chimiste de formation. Avec la sublimation, l’impression gagne à la fois en rendu chromatique et en résistance. Atout supplémentaire, elle utilise des encres aqueuses, sans odeur ni produit toxique et donc parfaitement écologiques. Le procédé Figarex – « non breveté, souligne Frédéric Roux, car la gestion des brevets aurait occasionné des dépenses trop importantes » – est développé à partir d’une presse numérique de marque Matan Digital Printers. À cette imprimante transformée doit s’ajouter une machine de calandrage à chaud qui aura pour rôle d’activer la sublimation. Elle sera reçue dans le courant de l’automne à StPierre-des-Corps, ce qui permettra à Figarol d’imprimer ses premières grandes laizes. De nouveaux marchés s’ouvrent pour la PME : notamment à l’international, domaine où elle était absente. « Nous avons désormais un savoir-faire et un matériel uniques, se félicite son dirigeant. À nous d’en profiter tant que nous garderons notre longueur d’avance. » Une assistante trilingue vient d’ailleurs d’être recrutée pour prospecter l’Allemagne et le RoyaumeUni. Mais la Figatex 5000 donne aussi une visibilité sur un marché concurrencé au petit groupe dirigé par Frédéric Roux, qui précise : « L’innovation est un facteur différenciant qui doit nous aider à poursuivre notre progression. ». Décidé à ne pas s’arrêter en si bon chemin, l’ingénieur déposera d’ici à la fin de l’année deux nouveaux brevets, l’un pour Figarol et l’autre pour Amega. François-Xavier Beuzon
catherine de coLbert,
VICE-PrésIDENTE DE LA CCI TOurAINE
« L’innovation est un gisement de compétitivité »
L’année 2014 a été placée sous le signe de l’innovation par le réseau consulaire ? Quelle part la cci touraine a-t-elle prise dans cette mobilisation ?
catherine de colbert : Nous nous mobilisons avec une grande détermination au service de cette cause majeure pour l’avenir des entreprises françaises. Je rappelle que l’objectif que s’est fixé le réseau consulaire est l’organisation de 450 manifestations, en France, sur l’ensemble de l’année 2014. Pour notre part, nous avons prévu d’accueillir au cours du mois de septembre le skipper François Gabart, connu pour naviguer sous les couleurs de la MACIF, et ce dans le cadre d’une conférence intitulée « De l’audace à l’innovation ». La démarche de cet ingénieur est tout à fait édifiante et exemplaire des bonnes pratiques qui doivent être déployées dans le cadre d’un projet d’innovation dont le but ultime doit être de conduire vers la performance. Puis, naturellement, nous sommes des parties prenantes de la Conférence régionale de l’innovation qui se tiendra le 30 septembre à Orléans. Vous le voyez, la CCI Touraine est sur le pont sur ce sujet… Quel message principal souhaitez-vous adresser aux chefs d’entreprises ?
catherine de colbert : Je pense qu’il est important de rappeler que l’innovation est avant tout un état d’esprit. Et qu’elle ne se limite pas du tout à l’innovation technologique. On peut mener avec grand profit des politiques d’innovation en créant de nouveaux modèles d’affaires, en développant de nouveaux services ou de nouvelles méthodes commerciales. Il y a vraiment 1 000 façons d’innover ! Les dirigeants doivent comprendre qu’ils ont tout à gagner à créer au sein de leurs entreprises des communautés innovantes dans une logique collaboratrice. Ces politiques créent de la valeur et sont un véritable gisement de compétitivité. mais en ces temps difficiles, n’ont-ils pas d’autres chats à fouetter ?
catherine de colbert : Nous sommes régulièrement sollicités par des chefs d’entreprises qui ne savent pas toujours à quel saint se vouer lorsqu’ils envisagent de s’engager dans une stratégie d’innovation qui doit, bien sûr, être structurée. Certes, le contexte n’est pas porteur, les entrepreneurs ont en effet tendance à se concentrer sur leurs fondamentaux. Mais ils doivent savoir que la CCI Touraine constitue le meilleur relais ; nos équipes peuvent les aider à organiser leurs projets d’innovation et à monter les dossiers de demande d’accompagnement et de financements publics.
RECRUTER ET ME FORMER
CRÉER REPRENDRE TRANSMETTRE
INTÉGRER UN RÉSEAU
AMÉLIORER MA PERFORMANCE
M’INFORMER ET DÉCIDER
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Économie
Industrie
Mercura veut pousser les feux Racheté en début d’année par le suédois Binar, le spécialiste blésois des signalisations lumineuses embarquées entend étoffer et diversifier son offre afin de remédier à la baisse de la commande publique.
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nstallée à la Chaussée-St-Victor, près de Blois (41), la société Mercura, spécialisée dans la conception de signalisations lumineuses embarquées – notamment dédiée aux forces de police et aux services de secours – semble repartir du bon pied. Déstabilisée par les ennuis de santé de son principal actionnaire et dirigeant Jean Echaniz, l’entreprise (58 salariés, 14,7 M€ de CA) a traversé une période « compliquée », reconnaissent ses dirigeants. Après le passage d’un manager de transition – et l’échec d’une tentative de RES –, le blésois a finalement été racheté en février dernier par le groupe suédois Binar, via sa filiale française Standby également positionnée sur le marché des signalisations lumineuses et sonores pour les véhicules de service.
Denis Lahoreau
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Les équipes des deux sociétés se connaissaient bien puisqu’elles étaient liées de longue date par des accords de commercialisation croisés. « Nous allons désormais relancer la machine, notamment le développement de nouveaux produits que nous avions un peu gelé ces derniers temps », se félicite Denis Lahoreau, le nouveau directeur
rophares à LED, de systèmes électroniques de gestion, d’ensembles de toits et de triangles ainsi que de systèmes de mesure de vitesse… entendez des radars (cinénomètres, radars jumelles, dopplers) employés pour contrôler et verbaliser les automobilistes ! « Pour cette partie de notre portefeuille, nous nous occupons uniquement de la com-
“ LA PLUPART DE NOS CLIENTS, QUI DÉPENDENT DE LA COMMANDE PUBLIQUE, ONT RÉDUIT LEURS ACHATS
général de Mercura, précédemment directeur financier de l’entreprise. Car les temps sont rudes. Dépendant quasi essentiellement de la commande publique, et notamment d’un très important contrat pluriannuel portant sur la livraison de rampes lumineuses à LED pour la Police nationale, l’exploitation a été fortement impactée par la réduction progressive des budgets. « Pour ce seul contrat, nous sommes passés d’un rythme de 6 500 véhicules équipés par an à une cadence annuelle de 1 000 à 1 500 véhicules », estime Jacques Caron, le directeur grands comptes de Mercura. « C’est une évidence, le chiffre d’affaires va reculer cette année d’au moins 10 %. La plupart de nos clients, SDIS, SAMU, collectivités locales, ministères, et les carrossiers qui dépendent tous de la commande publique, ont réduit leurs achats », prévient Denis Lahoreau. Pour compenser cette érosion de l’activité, Mercura va étoffer son catalogue de produits, déjà plutôt diversifié, puisqu’il est composé de gy-
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mercialisation de produits américains », nuance Jacques Caron qui ajoute que l’entreprise a également fourni une partie de l’électronique développée par Thales et équipant les barrières qui devaient assurer la régulation de l’écotaxe. « Heureusement, nous avons été payés (500 000 €, NDLR) pour ce contrat, sinon nous ne serions plus là ! » Relance de la R&D qui s’appuiera sur les ressources d’un bureau d’études intégré et d’une cellule de tests et de mesures installée à La Haye-Fouassière, près de Nantes (44), meilleure structuration de l’approche commerciale régionale, embauche d’un commercial export – qui ne pèse aujourd’hui que 7 % du volume d’affaires –, Mercura se met manifestement en ordre de marche pour saisir toutes les opportunités. « Nous répondons actuellement à un très important appel d’offres (2,5 M€) de l’UGAP, nous confie Denis Lahoreau. En cas de succès, nous serions amenés à créer une seconde équipe (2x8) à Blois. » Jean-Christophe Savattier
CIP, FILIALE DE SOGEPROM, LANCE UNE OPÉRATION MIXTE BUREAUX ET LOGEMENTS SUR LE QUARTIER DES 2 LIONS À TOURS
Centre Immo Promotion (CIP), filiale de Sogeprom, est à l’initiative d’une opération d’envergure dans le quartier des Deux-Lions à Tours, sur une emprise foncière d’environ 1,7 ha occupée précédemment par la société Mediprema. Les partenaires du projet ont voulu structurer l’espace en s’inscrivant dans le paysage urbain existant. Aussi, au sud, trois immeubles de bureaux prendront place le long de l’avenue Marcel-Dassault, et quatre immeubles de logements seront édifiés au nord de la parcelle. Ces programmes immobiliers seront « irrigués » par une coulée verte est-ouest qui délimitera la partie résidentielle de la partie tertiaire. Cette coulée verte constituera un véritable « espace intérieur » à l’échelle du quartier.
PROGRAMME DE LOGEMENTS Pour cette opération de logements, CIP et Sogeprom se sont associées à la société Ataraxia. Le projet résidentiel se compose de quatre bâtiments de six niveaux chacun (quatre étages avec un niveau d’attique sur RDC), totalisant 152 logements. Cet ensemble immobilier offre des logements allant du T2 au T4, composés de beaux et lumineux espaces à vivre se prolongeant vers l’extérieur par d’agréables balcons et terrasses. Parmi ces logements, 66 (répartis sur deux bâtiments de 33 logements chacun) ont été vendus en bloc à la société LogiOuest. Les autres logements sont en cours de commercialisation. PROGRAMME DE BUREAUX HQE Pour l’opération de bureaux, CIP et Sogeprom se sont associées avec la Société d’équipement de la Touraine pour développer 9 300 m² de bureaux. Les trois bâtiments prévus dans ce programme seront certifiés HQE par Certivéa. Deux bâtiments (G et H), reliés par une passerelle et un noyau central développant au total 5 400 m² de surfaces utiles, sont d’ores et déjà attribués à la société Orange. L’opérateur y regroupera 350 salariés basés actuellement sur les sites de Grandmont et de Maginot. Le troisième bâtiment (F) abritera au RDC un restaurant d’entreprises. LES TRAVAUX Les travaux de démolition du site, lancés courant juillet, seront achevés ce mois-ci. L’édification des immeubles sera lancée ce même mois pour les deux opérations dont les premières livraisons sont prévues pour le 1er semestre 2016. Architecte de conception : Groupe 6 assisté de GHA, Atelier Claude Blanchet, EURL Alain Savéan
Centre Immo Promotion, créée en mars 2006, intervient sur toute la région Centre. Son activité porte sur des opérations d’immobilier d’entreprise, avec plus de 22 000 m2 de bureaux livrés (dont 10 000 m2 en 2014) et sur des opérations de logements, résidences seniors, résidences hôtelières, avec plus de 500 lots livrés (dont 150 en 2013) et plus de 300 engagés. Sogeprom, filiale de promotion immobilière de la Société Générale, est présente depuis plus de quarante ans sur l’ensemble des marchés de l’immobilier : logements et résidences services, immobilier d’entreprises et hôtelier, centres commerciaux, en incluant la commercialisation et le property management.
NOUV EAU
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Économie
Agroalimentaire
OPEN AGRIFOOD ORLÉANS (20-21 NOVEMBRE 2014)
L’agroalimentaire fait sa révo Avec l’Open Agrifood, Orléans veut donner le coup d’envoi de la 3e révolution agroalimentaire, capable de répondre aux enjeux de demain.
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Xavier Beulin
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es organisateurs de l’Open Agrifood d’Orléans, manifestation qui réunira pour la première fois l’ensemble des opérateurs de la chaîne agroalimentaire, ont mis le paquet. En s’appuyant sur l’expérience du World Forum de Lille et sur le principe du forum de la Rome antique, Xavier Beulin, président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), et Emmanuel Vasseneix, le patron de LSDH (Laiterie de Saint-Denis-de-l’Hôtel), comptent faire débattre de la 3e révolution agricole et alimentaire
dans plus de trente lieux, et cela au cœur d’Orléans. Sont prévus deux plénières internationales, neuf colloques, vingt déjeuners thématiques et trente et un ateliers qui devront permettre de « trouver des idées devant déboucher sur des plans d’actions concrètes », autour de personnalités connues, telles que Takao Furuno, fondateur de Duck Rice, le pionnier japonais d’un riz biologique, dont la culture est moins gourmande en eau, Franck Riboud, qui cède le 1er octobre la direction opérationnelle de Danone à son numéro 2 Em-
lution à Orléans manuel Faber, Christophe Bonduelle, le président de Bonduelle, Serge Papin, celui du distributeur Système U, Tristram Stuart, lauréat du Prix international de l’environnement pour sa lutte contre le gaspil-lage alimentaire, et l’académicien Erik Orsenna. L’objectif sera de « co-construire un modèle agricole et alimentaire capable de répondre aux enjeux de demain », c’est-à-dire de concilier, en s’appuyant sur l’innovation, à la fois la rentabilité et les performances des entreprises de l’agroalimentaire, mais aussi la qualité du contenu de nos assiettes et le respect de l’environnement. « Le respect de la biodiversité doit faire partie intégrante des process agricoles si l’on veut que l’agricul-
ture soit durable, insiste Xavier Beulin, et ce n’est pas du tout incompatible avec l’agro-business. » Il s’agit aussi, pour Emmanuel Vasseneix, « d’en finir avec le délit de sale gueule autour de l’agroalimentaire et donner envie aux jeunes de revenir à ces métiers, en sachant que la France a une image d’excellence dans l’agroalimentaire ». Le forum, justement, sera très largement ouvert aux écoles, lycées agricoles, universités et aux jeunes de tous horizons, auxquels seront proposés des speed dating, des présentations de métiers, des focus techniques et également un concours sur un sujet alliant agroalimentaire et RSE (responsabilité sociale et environnementale).
Au-delà de ces 48 heures vouées à valoriser un modèle français reposant sur « le droit à une alimentation de qualité, source de plaisir et marqueur culturel », les organisateurs ambitionnent de créer « une vallée numérique du végétal » à Orléans. Le but ? « Mettre le digital au service du végétal en faisant travailler plusieurs disciplines ensemble (y compris les sciences humaines et sociales pour faire le lien entre toutes les techniques), afin de faire d’Orléans un pôle unique au monde », ajoutent les organisateurs. Une ambition qui rejoint celle des promoteurs du Très Grand Accélérateur… Jacques Huguenin
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Économie
Agroalimentaire
OPEN AGRIFOOD ORLÉANS (20-21 NOVEMBRE 2014)
Trois questions à Emmanuel Vasseneix, pdg de LSDH La Lettre Valloire : Pourquoi ce forum et pourquoi maintenant ? Emmanuel Vasseneix : Parce qu’il existe actuellement une vraie préoccupation des citoyens et consommateurs français sur les questions touchant à la santé, au développement durable et à la qualité de ce que nous mangeons. Et parce qu’en parallèle, il va falloir se préparer à nourrir correctement demain les 9 milliards d’habitants de la planète… Ce moment est le bon pour permettre à de multiples acteurs de l’agroalimentaire d’aborder librement ces enjeux. Cet événement est destiné à définir un état d’esprit, une posture responsable face aux défis de l’avenir.
La Lettre Valloire : Le fait que les deux parrains soient issus de l’agro-business, Xavier Beulin et vous-même, ne va-t-il pas jeter la suspicion sur les motivations du forum ? Emmanuel Vasseneix : Non, car il n’y a aucune perspective de business dissimulée derrière ce forum. Nous ne pensons pas aux retombées marchandes, mais à ce que nous devons laisser aux générations futures. La Lettre Valloire : Pourquoi avoir choisi Orléans et pas une autre ville de France ? Emmanuel Vasseneix : Parce qu’Orléans est au centre de la France et d’une région qui dispose d’un potentiel agroalimentaire très fort. Celui-ci mérite d’être mieux connu et valorisé.
Les Crudettes reverdissent Repris il y a moins d’un an par la Laiterie de Saint-Denis-de-l’Hôtel, le spécialiste de la 4e gamme (salades prêtes à consommer) Les Crudettes conquiert de nouveaux marchés.
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édé en fin d’année dernière par le groupe Pomona à la Laiterie de Saint-Denis-de-l’Hôtel (LSDH), l’entreprise d’Emmanuel Vasseneix très impliquée dans l’Open Agrifood d’Orléans (lire ci-dessus), la société Les Crudettes va fournir en salades composées les restaurants KFC à partir de son usine de Châteauneuf-surLoire (45) ; sa seconde unité de Cabannes, près de Cavaillon (13), livre déjà les KFC du sud de la France. À terme, les Crudettes devraient livrer 2 millions d’unités aux quelque 170 restaurants que le spécialiste du poulet frit possède en France. Les perspectives d’activité de la nouvelle filiale du groupe LSDH s’en ressentent : le CA devrait atteindre 85 M€ en 2013, soit 11 % de plus que l’année précédente. Peu à peu, la gamme des produits proposés par ce spécialiste de la… 4e gamme (selon la définition, les fruits et légumes lavés, épluchés,
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coupés et conservés sous vide) s’élargit : des sachets de salades et légumes des débuts, la production s’est étendue aux produits de snacking (salades composées, crud’wich et fruits à croquer), soit au total 400 spécialités différentes et 100 millions d’unités produites chaque année dans le Loiret et les Bouches-du-Rhône. Les synergies
entre les usines voisines des Crudettes à Châteauneuf-sur-Loire et de la Laiterie à St-Denis-de-l’Hôtel sont à l’étude ; elles devraient porter sur la mutualisation des livraisons et du stockage : le groupe emploie désormais plus de 700 personnes dans le département.
Antartic va s’étendre à St-Martin-d’Abbat Filiale du groupe ITM Entreprises (Intermarché), la société Antartic, qui exploite une unité d’embouteillage de sodas, jus de fruits, d’eau minérale, ainsi que de soupes à St-Martin-d’Abbat (45), va de nouveau accroître ses capacités de stockage d’ici à 2017. Le projet, susceptible de créer une trentaine d’emplois, va permettre à cette plateforme de libérer de l’espace afin d’augmenter les capacités de conditionnement de soupes. L’unité, qui emploie 270 personnes, exploite à ce jour 14 lignes de conditionnement. La capacité s’élève à 330 millions de litres pour environ 300 références de produits. Antartic a réalisé un CA de 170 M€ sur l’exercice 2013, contre 137 M€ en 2011.
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Économie
Chantiers
INDRE-ET-LOIRE Le contractant général Icec, désormais dirigé par Jean-Yves Rey, un ingénieur passé par Forclum, vient d’achever la construction d’un immeuble de bureaux pour la société Indena (extraction de principes actifs des végétaux), à Tours Nord, et d’une unité de fabrication et de rénovation de conteneurs métalliques de 2 500 m 2 à Mettray (ci-dessus) : la conception architecturale est signée par le cabinet Tardits.
CHER Le pôle commercial Avaricum de Bourges, qui développe 13 000 m² de surface de vente, et ses 80 logements associés vont enfin voir le jour. La livraison est prévue pour début 2015. Avaricum comprend 6 moyennes surfaces et une trentaine de boutiques (Monoprix, Mango et Zara parmi d’autres).
EURE-ET-LOIR Le futur centre de secours principal de Chartres (7 500 m² sur 8,5 ha), actuellement en construction à Champhol, sera livré en 2015 ; le montant du programme s’élève à 20 M€. Le centre de réadaptation fonctionnelle d’Illiers-Combray va ouvrir une antenne de 1 000 m² à côté des urgences de l’hôpital Louis-Pasteur à Chartres. Le bâtiment, qui sera livré en juin
2016, comprendra un espace de balnéothérapie et un poste technique de rééducation complet. Un lotissement va voir le jour sur une emprise de 5 ha, ZAC des Marchés, à Bleury, commune limitrophe des Yvelines. Le programme comprend la construction de 32 maisons individuelles et 13 lots groupés sont prévus en plusieurs tranches. La commune de Margon a entamé un chantier de 1,7 M€ pour la construction d’un lotissement de 30 lots dont une partie sera transformée en écoquartier. La livraison est prévue pour la fin de l’année ou le tout début 2015.
INDRE-ET-LOIRE La CDAC a donné son feu vert à l’extension de la grande surface de bricolage Castorama, à Chambray-lès-Tours. L’enseigne disposera, après travaux, de 2400 m² supplémentaires, ce qui portera sa surface de vente à 14 640 m². Le projet, qui nécessitera un investissement de 10 M€, comportera l’intégration de la jardinerie plein air à l’intérieur du bâtiment et la création, en
Une nouvelle clinique vétérinaire de 600 m² va voir le jour en 2015 sur la zone de la Bosserie à Gien. Le coût du projet, qui comprend bâtiments et nouveaux matériels, est d’environ 2 M€ . Cette nouvelle clinique emploiera une douzaine de salariés (vétérinaires, secrétaires, assistants). Un programme de lotissement comportant 25 lots (de 500 à 800 m” sur une totalité de 2 ha) est en cours à Amilly. La livraison est prévue d’ici au printemps 2015.
lieu et place de la jardinerie, d’un Bâti Drive pour récupération rapide des matériaux achetés. Le village de vacances VVF d’Amboise va connaître une rénovation complète (toiture, désamiantage, isolation). Le montant des travaux s’élève à 5 M € . La première phase démarre ; la seconde se déroulera au cours de l’hiver 20152016.
LOIR-ET-CHER Le conseil général du Loir-etCher, gestionnaire de la plateforme aéroportuaire du Breuil, s’apprête à vendre un terrain de 0,25 ha comprenant un bâtiment désaffecté à un promoteur qui projette d’y installer un hôtel. Le prix de vente a été fixé à 85 000 €. Le Département a lancé un projet ambitieux de dévelop-
LOIRET Le musée Girodet de Montargis va doubler sa surface pour atteindre 3 000 m². Un appel d’offres sera lancé prochainement. Le chantier devrait débuter en fin d’année pour une ouverture en 2016. Le coût des travaux est estimé à 5,2 M€. À Orléans, le lycée agricole (550 élèves) va être rénové. Le programme de 5,6 M€ comprend la construction de 1 800 m² de locaux (ateliers, garages, jardinerie) et la réhabilitation du gymnase d’ici à 2016. La conception du projet a été confiée au cabinet orléanais Créature Architectes. À St-Jean-de-Braye, une nouvelle piscine va voir le jour dans le complexe sportif du Petit-Bois. Le futur équipement (un grand bassin et un espace petite enfance) sera situé à côté de la
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piscine actuelle ; les alentours seront aménagés. Le coût du projet s’élève à 6 M€.
pement de la plateforme du Breuil, située à mi-distance de Blois et de Vendôme, en construisant une nouvelle aérogare de 400 m2 avec une tour de contrôle et un bâtiment pour le service de lutte contre les incendies. Un parc d’activité d’une vingtaine d’hectares devrait permettre d’accueillir de nouvelles entreprises sur un site où est déjà présent Neolux, le fabricant de solutions d’éclairage LED.
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Les couleurs du pays maya Rares sont les destinations qui arrivent à séduire à la fois petits et grands, amateurs de farniente et fanas de sport, amoureux de nature et épris de culture… La péninsule du Yucatan, qui sépare le golfe du Mexique de la mer des Caraïbes, présente toutes les qualités requises pour faire passer des vacances inoubliables, à budget raisonnable. Alors, bienvenue en pays maya !
Escapades
Ailleurs
Les couleurs du Rares sont les destinations qui arrivent à séduire à la fois petits et grands, amateurs de farniente et fanas de sport, amoureux de nature et épris de culture… La péninsule du Yucatan, qui sépare le golfe du Mexique de la mer des Caraïbes, présente toutes les qualités requises pour faire passer des vacances inoubliables, à budget raisonnable. Alors, bienvenue en pays maya !
Site de Tulum.
ert, blanc, bleu. Lorsque l’avion entame sa descente vers l’aéroport de Cancun, ce sont ces trois couleurs que l’on aperçoit par le hublot. Vert comme la forêt tropicale qui recouvre la quasi-totalité de la péninsule, blanc comme le sable de ses magnifiques plages, bleu comme l’émeraude des deux mers qui baignent les côtes de cette partie de la république fédérale du Mexique, divisée en trois États : le Yucatan au nord-ouest, le Quintana Roo au nord-est et à l’est,
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cap au sud, au-delà de Playa del Carmen, ville elle-même envahie par les visiteurs du monde entier, pour trouver des hébergements à taille plus humaine et à vocation plus écologique. En ce pays du farniente, il n’y avait encore rien ou presque, il y a soixante ans, sinon des temples mayas, des cocotiers et des récifs de corail. De fait, la première motivation pour séjourner dans la péninsule du Yucatan peut être uniquement de s’y reposer et d’y goûter les plaisirs d’un environne-
nullement perturbés par la présence de l’homo turisticus. La péninsule est également un véritable paradis pour amateurs de « snorkeling » (la simple observation des coraux et poissons avec palmes, masque et tuba), notamment du côté d’Akumal et de Tulum, ou de plongée sous-marine en bouteilles. Les fonds marins de la côte est sont peuplés de tortues vertes peu farouches, de requins nourrices endormis dans l’anfractuosité de blocs coralliens et de tarpons dont la taille peut dé-
le Campeche au sud-ouest. À peine débarqué, mieux vaut fuir Cancun, capitale du Quintana Roo, le Las Vegas mexicain, immense réservoir à touristes (américains en majorité) et son incroyable densité d’hôtels colossaux. Donc,
ment préservé (mais jusqu’à quand ?). La plupart des hébergements sont en effet installés au cœur d’une végétation exubérante et il est fréquent de croiser au détour d’une allée divers animaux (iguanes, singes, coatis, agoutis…),
passer les 2 m pour un poids de plus de 100 kg. Mais les « spots » préférés des amoureux d’aventures subaquatiques restent Cozumel, Holbox et les Cénotes. L’île de Cozumel, à une demiheure de bateau de Playa del Carmen,
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pays maya est bordée par une splendide barrière de corail, la deuxième plus grande de la planète, qui s’étire jusqu’au Honduras. Explosion de couleur et de vie garantie, notamment sur le récif de Palancar. Tout au nord de la péninsule, à trente minutes de la côte du golfe du Mexique, il ne faut pas non plus manquer la visite d’Isla Holbox, sanctuaire d’oiseaux, sur terre et dans les airs, et de requins-baleines, en mer, avec la possibilité de nager à leur contact de juin à septembre. On peut aussi voir ces
énormes poissons dans les parages d’Isla Mujeres, à l’extrémité nord-est de la péninsule. Plus difficiles d’accès sont en revanche les Cénotes, ces puits d’eau douce qui trouent en de multiples endroits le sol
sous-calcaire de la péninsule. Certaines de ces piscines naturelles, qui communiquent entre elles par un immense labyrinthe de couloirs souterrains, peuvent se parcourir avec un bloc de plongée sur le dos, sous la conduite obligatoire d’un guide expérimenté et en suivant un fil d’Ariane. On y serpente en effet entre les aiguilles millénaires de magnifiques stalactites et stalagmites, et il est impossible de faire surface, sauf dans quelques cathédrales sousmarines dont le sommet reste émergé… Frissons garantis ! Mais on peut aussi se contenter, un peu partout, de plonger et de se baigner dans l’eau claire de ce qui furent jadis les puits sacrés des Mayas : ils y jetaient des offrandes ou des victimes sacrificielles à l’intention de leurs dieux, comme en témoignent les restes humains retrouvés au fond de plusieurs Cénotes. La plupart de ces grottes aquatiques, parfois très profondes, auraient été créées sous l’impact de la gigantesque météorite qui s’écrasa sur le Yucatan, il y a 65 millions d’années, et provoqua la disparition des dinosaures ! Autre moment de pur bonheur naturel, l’escapade à Sian Ka’an (« ce qui vient du ciel », selon les Mayas), réserve de la biosphère, extraordinaire mariage de la terre et de la mer, magnifique union de mangrove, de marais, de forêt tropicale, de dunes et de récifs coralliens, au sud-est de la péninsule. À bord d’une barque à moteur, on peut y croiser
INFORMATIONS PRATIQUES S’Y RENDRE De nombreuses compagnies aériennes, charters ou régulières, desservent Cancun. Il est possible de prendre un vol sec bon marché avec escale à Madrid ou Cuba, ou des vols directs, notamment dans le cadre d’un voyage organisé proposé par l’un des nombreux tour-opérateurs qui proposent la destination. Le vol dure 10 à 11 heures à l’aller et un peu moins longtemps au retour.
DÉCALAGE HORAIRE – 7 heures en hiver par rapport à la France (GMT – 7), – 8 heures en été (GMT - 8).
CLIMAT Chaud et humide, notamment de mai à octobre, avec parfois de grosses averses, voire des cyclones durant l’été. Meilleure saison de décembre à mai, en évitant la période des fêtes de fin d’année prise d’assaut par les touristes américains, voire le « Spring break » d’avril, qui voit affluer des étudiants américains déchaînés.
SANTÉ Aucun vaccin exigé. Mais gare aux piqûres de moustiques et aux brûlures du soleil. Ne boire que de l’eau embouteillée. Vérifier que ses vaccins contre la fièvre jaune, les hépatites A et B, et la typhoïde sont bien à jour.
MONNAIE Le peso mexicain (le « MXN » ou « $ », à ne pas confondre avec le dollar américain, l’« US$ », accepté partout). 1 MXN ou $ = 0,056 € environ.
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Escapades
Ailleurs
Hacienda
EN SAVOIR PLUS Lonelyplanet.fr, toujours assez complet, Tripadvisor.fr, pour trouver de bons plans, ou Visitmexico.com, site du Conseil de promotion touristique du Mexique, parmi beaucoup d’autres.
Si à la nature vous préférez la culture, là aussi vous n’aurez que l’embarras du choix, tant il y a de temples et de pyramides mayas millénaires à admirer. À tout seigneur tout honneur, le site de Chichen Itza, à 120 km de Mérida, dans Site de Chichen Itz a l’État du Yucatan, mérite la primeur, car il est l’un des plus vastes (15 km²) et des mieux conservés de la péninsule. En ces lieux cohabitèrent deux villes et deux civilisations, celle des Mayas, du VIe au Xe siècle, puis celle des Toltèques (ou Itzas) après l'an mille. Y domine la fameuse pyramide du Castillo (ou pyramide de Kulkulkan, le quelques-unes des 300 espèces d’oidieu-serpent toltèque) : 30 m seaux présentes sur les 528 000 hectares de haut, 55 m de base et 4 escaliers de du parc, des alligators lézardant sur un 91 marches, plus 1 au sommet qui, banc de sable, des groupes de dauphins chacune, représentent les 365 jours de joueurs, voire des lamantins, ou encore, l’année. El Castillo surplombe un masous la surface de l’eau, de grandes raies gnifique parc et une vingtaine d’autres aigles, de belles tortues et de gros mé- célèbres monuments comme l’Obrous. Les terres fermes de Sian Ka’an servatoire ou Caracol, le temple des servent, quant à elles, de refuge à ces Guerriers et sa statue de Chac-Mool mammifères charismatiques d’Amé- servant d’autel à sacrifices, le Couvent rique centrale que sont le jaguar, le ou Iglesia, sans oublier le grand terrain puma, l’ocelot et le tapir. (170 m x 50 m) du cruel jeu de Pelota :
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les perdants étaient décapités et leurs têtes exposées sur le Mur des Crânes ! Autre site impressionnant du Yucatan, à 80 km au sud de Mérida, sur la route de Campeche, Uxmal fut sans doute la plus raffinée et la plus grande des cités mayas, au VIIe siècle après J.-C. On y admire la pyramide du Devin, seule pyramide semi-elliptique de toute l’Amérique précolombienne, ornée de masques de Chac, le terrible dieu de la pluie, ainsi que le palais du Gouverneur, temple de 100 m de long, le Quadrilatère des Nonnes, formé de quatre palais réunis autour d’une cour carrée, ou encore la Grande Pyramide, la plus vaste d’Uxmal. Sur la route des sites mayas du Quintana Roo, deux villes du Yucatan méritent éventuellement une halte : Mérida, métropole de 800 000 habitants mais dotée d’un sens de la fête et du folklore unique au Mexique, dit-on, et surtout Valladolid, charmante ville coloniale à taille humaine, avec son couvent San Bernardino, ses églises et ses Cénotes. L’antique cité de Coba, à une centaine de kilomètres de Playa del Carmen, trône au milieu d’une forêt tropicale dans laquelle résonnent les bruits d’animaux. On se déplace à bicyclette ou en triporteur sur ce site qui occupait jadis
oba Site de C
70 km² et connut son apogée entre le VIe siècle et le Xe siècle. Bien qu’aujourd’hui plongée au cœur de la verdure, Coba fut sans doute jadis l’une des plus vastes et plus puissantes cités mayas, si l’on en juge par la quarantaine de chaussées pavées qui quadrillent la région et les nombreuses ruines disséminées dans la jungle. Les deux monuments les plus remarquables en sont Nohoch Mul, la plus haute pyramide du Yucatan (42 mètres de hauteur), et le temple des Peintures, ainsi nommé parce qu’il recèle quelques stèles sculptées et des traces de fresques polychromes. L’idéal pour achever un périple sur la péninsule maya est sans doute de le terminer à Tulum (la « Forteresse »), au pied de laquelle débarquèrent en 1518 les premiers conquistadores. Située à 130 km au sud de Cancun, c’est l’une des « cartes postales » les plus connues du Mexique, avec son fameux Castillo, dressé sur une falaise au-dessus d’une
mer turquoise. Ce site maya, le seul à avoir été édifié sur la côte, offre la double opportunité de se baigner sur une petite plage de rêve et de flâner parmi des vestiges au nom évocateur (temple du Dieu du Vent, temple du Dieu descendant, temple des Fresques…), offrant des points de vue magnifiques sur la mer en contrebas. Dans cette ancienne cité de commerçants et de pêcheurs, qui fut habitée par les Mayas jusqu’à l’arrivée des colonisateurs espagnols, subsistent également des murailles qui ceinturaient les bâtiments administratifs et religieux. Cette péninsule du Yucatan n’est pas qu’une destination idéale pour les adultes. Les enfants également peuvent s’y distraire dans de multiples parcs d’attractions. Une mention spéciale pour Xcaret, à proximité de Playa del Carmen : ce parc éco-archéologique de 130 hectares occupe lui aussi ce qui fut jadis un centre d’échanges commerciaux des Mayas. On peut y nager dans les eaux cristallines d’un véritable Cénote et d’une rivière sousmarine, visiter un musée dédié à la civilisation précolombienne, assister à un spectacle grandiose balayant toute l’histoire du Mexique, se promener dans un espace réservé aux animaux tropicaux, caresser tortues et requins dormeurs, ou encore, hélas, nager avec des dauphins… Hélas, car ces sympathiques mammifères sont emprisonnés dans un bassin et doivent se soumettre chaque jour au bon vouloir de hordes de touristes qui ont payé et font la queue pour les « tripoter ». Si la rencontre avec les dauphins vous tente, mieux vaut aller passer une journée dans le lagon de Sian Ka’an à la rencontre d’animaux évoluant en totale liberté. Jacques Huguenin
LANGUE L’espagnol bien sûr, mais aussi l’anglais, tellement les touristes américains sont nombreux sur la la Riviera maya !
FORMALITÉS
$
Pas de visa, mais un passeport valable 6 mois après la date du retour et un formulaire migratoire touristique (FMM), disponible aux bureaux de migration à l'entrée du territoire mexicain.
SE LOGER Partout. Les hôtels de tous prix et de toutes catégories s’alignent les uns à côté des autres tout le long de la côte caribéenne, notamment autour de Cancun et de Playa del Carmen. On peut aussi séjourner en chambre d’hôte, bed & breakfast, petite auberge, camping-caravaning et en cabanas (habitations charmantes au toit en feuilles de palme).
SE DÉPLACER En bus, taxis collectifs ou voiture de location.
Cancun Valladolid
Mérida
YUCATAN Uxmal Campeche
Playa del Carmen
Coba
Celectun
Xcaret Chichen itza
Tulum
QUINTANA ROO Sian Ka’an
CAMPECHE Bacalar
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Carnet
RÉGION Le pôle de compétitivité régional Cosmetic Valley a reconduit MarcAntoine Jamet à la présidence de cette instance. Chargé, depuis juin 2011, de piloter la stratégie du pôle, Marc-Antoine Jamet a qualifié la Cosmetic Valley parmi les pôles de "seconde génération", et vient de l’engager dans un troisième contrat de performance qui a été signé par l’État et 25 collectivités territoriales. Magistrat à la Cour des comptes, Marc-Antoine Jamet est le secrétaire général du groupe LVMH depuis 2001, groupe membre de la Cosmetic Valley depuis l’origine via plusieurs entités : Guerlain à Chartres (28) et Orphin (78), Parfums Christian Dior et LVMH Recherche à Saint-Jean-de-Braye (45).
RÉGION
de l’université d’Orléans, a été nommée au Haut conseil de stabilité financière, présidé par Michel Sapin, le ministre des Finances. Cette structure veille à la stabilité économique en France.
tement d’énergies (SDE 28), qui comprend 309 communes adhérentes et gère 9000 km de réseau électrique. Le président a évoqué parmi les objectifs de son nouveau mandat : le déploiement en Eure-et-Loir de 125 bornes de recharge pour véhicules électriques.
INDRE
Responsable communications et relations institutionnelles d’EDF pour la région Centre, Damien Hennequart, 51 ans, a été promu directeur des relations extérieures au sein du Forum atomique européen (Foratom). Il est détaché par EDF pour 3 ans à Bruxelles, où il fera la liaison entre l’industrie du nucléaire et les membres de la commission du Parlement européen.
Suez Environnement, à la présidence du pôle de compétitivité Dream Eau & Milieux. Marc Brugière est membre du bureau de Dream, délégué au comité de bassin Loire-Bretagne et administrateur de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, depuis 2012. Il est diplômé de l’École centrale de Paris et titulaire d’une licence d’histoire à la Sorbonne.
Christophe Chassande, ingénieur général des Ponts, des Eaux et des Forêts, a été nommé directeur de la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL Centre), en remplacement de Nicolas Forray. Il était jusque-là directeur adjoint au sein de la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture au ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie.
Loïc de Villeneuve a été nommé directeur de LCL Banque privée pour la région Ouest. Il prend la responsabilité d’une équipe de 62 collaborateurs répartis sur quatre régions : Pays de Loire, Bretagne, Basse-Normandie et Centre. Il succède à Éric Rojkoff.
Thibault Coulon, adjoint au maire de Tours, en charge du développement économique et de l’emploi, succède au député socialiste d’Indre-et-Loire Jean-Patrick Gille à la présidence de l’AFPP (Association de formation professionnelle polytechnique) de Touraine.
Patrick Poisson, pdg d’AFL à Montargis (45), est élu à la présidence régionale de la Fédération française du bâtiment (FFB). Il succède à Gérald Gallier qui a occupé ce poste pendant six ans. Patrick Poisson a été président de la FFB Loiret de 2009 à 2011.
Joël Pélicot, conseiller municipal de St-Antoine-du-Rocher et ancien conseiller régional, devient pour trois ans président du comité de bassin Loire-Bretagne en remplacement de l’ancien maire de Bourges Serge Lepeltier.
Marc Brugière, délégué régional du groupe EDF en région Centre, prend la succession de Daniel Villessot, directeur scientifique de
EURE-ET-LOIR
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Erik Masson a été nommé directeur général de Regeltex, le fabricant de gants isolants de sécurité qui emploie une cinquantaine de salariés à Issoudun. Il remplace Jean-Gérard Infante qui a été mis à pied.
INDRE-ET-LOIRE
LOIRET
Michel Derrac, directeur chargé de l’accompagnement des mutations économiques à la Datar, a été nommé directeur départemental des finances publiques d’Eure-et-Loir. Il a également piloté la Direccte Centre de 2010 à 2013.
Aline Mériau a été réélue à la présidence de la fédération départementale du bâtiment (FFB 45) pour une durée de trois ans. Dirigeante de la société d’électricité générale Elicaum à Fay-auxLoges, Aline Mériau occupe ce poste depuis 2011.
Xavier Nicolas a été réélu pour six ans à la tête du Syndicat dépar-
Raphaëlle Bellando, la directrice du laboratoire d’économie
LOIRET Installé à Olivet, l’éditeur de solutions de dématérialisation des échanges commerciaux (EDI, dématérialisation fiscale des factures…) TX2 Concept a porté au poste de directeur des opérations Stéphane Jobard. Précédemment directeur commercial et marketing de TX2 Concept, Stéphane Jobard bénéficie d’une solide expérience dans l’industrie des nouvelles technologies ; il a débuté sa carrière chez Sogeti avant d’intégrer d’autres grandes entreprises comme Sage, Coheris, Vedior Front RH.