Magazine de juin 2018

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MAGAZINE 2014 -5€ 5€ MAGAZINE N°44 -MARS JUIN 2018

SNCF

Le fer dans la plaie CHIMIE

On ne prête qu’aux REACH



Point de vue

La bataille du rail aura-t-elle lieu ? l’issue du débat parlementaire sur la réforme ferroviaire, bouclé en un temps record, est-on certain que toutes les (bonnes) questions ont été posées ? Personne n’est dupe sur la capacité de la SNCF à résoudre les maux qui ont eu raison de la patience des Français : retards, accidents et pannes à répétitions, tarifs prohibitifs et dégradation continue du service rendu au voyageur. Et la fin programmée du statut du cheminot, tout comme la reprise de la dette par l’État, n’y changeront rien. On attend déjà la réforme suivante, qui passera inéluctablement par la réduction du périmètre ferroviaire et la concentration des moyens colossaux qui lui sont consacrés. Dans cette édition de juin, nous nous sommes intéressés au réseau régional, à son coût pour la collectivité et à ses imperfections. L’addition, même revue à la baisse grâce à la renégociation à mi-parcours de la convention entre la Région et SNCF Mobilités, atteint un montant vertigineux : 76 € par an et par habitant pour seulement compenser ses pertes d’exploitation. Et il faudra ajouter, pour les années à venir et à condition que les financeurs suivent, les lourds

À

travaux d’infrastructures pour maintenir les petites lignes et rouvrir les liaisons Voves-Orléans et Orléans-Châteauneuf… 700 M€ au bas mot. La reprise des Intercités et leur remise à niveau font peser une nouvelle inconnue sur les finances régionales. Le système, y compris à l’échelle d’une région de taille moyenne comme le Centre-Val de Loire, est-il tenable ? Comme dans d’autres domaines, il est impératif de mettre à profit le formidable potentiel des nouvelles technologies pour disrupter l’offre de mobilités. Le car est polluant ? Mettons sur la route des cars électriques sur voies réservées. Les campagnes se sentent-elles isolées ? Utilisons les ressources d’un covoiturage adapté, comme celui déjà proposé en région parisienne et dans le Sud-Est de la France par la startup ecov, soutenue par la Caisse des Dépôts. Et si les grandes liaisons interurbaines, assurées par les TGV ou le POLT, doivent perdurer, que cela n’empêche surtout pas l’État et les collectivités de faire jouer la concurrence, dès la fin de l’année prochaine pour les TER, un an plus tard pour les TGV. La bataille du rail reste à mener. Mais aura-t-elle lieu ?

La rédaction

La Lettre Valloire - Juin 2018 3


12-15

www.lettrevalloire.com Ce magazine est un hors-série de La Lettre Valloire, bimensuel d’information politique et économique en région Centre. Édité par MCM Presse SAS au capital de 100 000 € RCS Tours B 450 613 591 Siège social : 14, boulevard Heurteloup à Tours Adresse postale : BP 92031 37020 Tours Cedex 1 02 47 70 60 00 contact@lettrevalloire.com

Points Chauds 6-7

En bref L’actualité du trimestre en bref.

8-9

Un fauteuil pour deux Le député (LR) Jean-Pierre Door a laissé les clés de l’exécutif du Montargois à Benoît Digeon à la mairie et Frank Supplisson à l’agglo.

10

Les « lignes rouges » de Gérard Larcher Le président (LR) du Sénat était en Touraine le 31 mai pour faire un bilan de la loi NOTRe, trois ans après son adoption.

Rédaction : François-Xavier Beuzon (rédacteur en chef) Jean-Christophe Savattier (rédacteur en chef adjoint) Aurélie Vouteau (édition) Ont participé à ce numéro : Serge Daniel Anthony Gautier Alexia Mellier Jean-Luc Vezon Bruno Villeneuve Maquette : Régis Beaune

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Publicité : AN Média (Aline Noirot) 07 78 25 26 87 Diffusion : Nadine Gomès Crédits photographiques : Christophe Simon/AFP : Une DR : 6, 7, 26, 28, 30, 32, 36, 40, 41, 42, 44, 45, 46, 47, 53, 54 Anthony Gautier : 8, 9, 10, 31 Cyril Chigot: 12, 14, 15, 17, 18, 20 , 21, 22 Géraldine Aresteanu: 16 Patrick Lazic : 19 Philippe Montigny/CAPA pour SNCF Réseau : 24 François-Xavier Beuzon : 34, 51 Jean-Christophe Savattier : 35 Bruno Villeneuve : 49 Château royal d'Amboise : 50 Jean-Luc Vezon: 52

À LA UNE Le fer dans la plaie Entre pannes géantes, grèves à répétitions et dégradation continue du service rendu au voyageur, la SNCF a épuisé la patience des usagers et des contribuables. N’est-il pas temps de concentrer les investissements sur les lignes à intérêt national et d’étudier sérieusement des alternatives pour le reste ?

20

Les TGV Tours-Paris en perte de vitesse ? Sur la ligne TGV Tours-St-Pierredes-Corps-Paris, la baisse de la qualité est sans interruption.

21

Orléans-Châteauneuf sur la voie de garage ? La relance de l’enquête publique et la tiédeur des élus orléanais pourraient faire capoter le projet de réouverture au trafic voyageurs de la ligne Orléans-Châteauneufsur-Loire.

22

Châteaudun-Paris en 1 h 10 ? L’accélération de la liaison entre Paris et Châteaudun désenclaverait le sud eurélien et aussi le sud francilien. Reste à trouver 46 M€ pour la financer.

24

Le Berry enfin sur la bonne voie ? Entre Vierzon, Châteauroux et Limoges, de gros travaux de rénovation sont engagés dans le cadre de la modernisation de la ligne reliant Paris à Toulouse (POLT).

26-27

Transdev met en route l’électrique Et si la résolution du problème des petites lignes ferroviaires passait par l’autocar électrique ?

28

Le covoiturage au secours des campagnes La startup ecov propose d’adapter des solutions de covoiturage aux petites collectivités locales.

30

ADP intéressé par l’aéroport de Tours ? Et si Aéroports de Paris s’intéressait à l’aéroport

Impression : Imprimerie Vincent, Tours (37) Informations légales : Abonnement annuel 2017 (23 numéros + magazines hors-séries) : 375 € Abonnement électronique avec édition bihebdomadaire : 475 € Prix de ce numéro : 5 €

16-17

CPPAP : 0121 I 85872 ISSN : 1246-4333 Dépôt légal : juin 2018 Directeur de la publication : François-Xavier Beuzon

MCM presse 4 La Lettre Valloire - Juin 2018

18-19

Philippe Fournié : « Nous sommes les donneurs d’ordre de la SNCF, pas ses clients » La Région Centre Val de Loire vient de renégocier à mi-parcours la convention avec la SNCF qui court jusqu’en 2020. La grosse enveloppe des travaux ferroviaires Le réseau ferroviaire régional souffre d’un sous-investissement chronique. Il bénéficiera enfin de 1,5 Md€ d’ici à 2026.


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Sommaire

JUIN 2018

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SmartHome à la conquête de nouveaux marchés Le tourangeau SmartHome étoffe son offre domotique et se lance à l’assaut des marchés professionnels.

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La sculpture dans tous ses états Aux Beaux-Arts de Tours, l’exposition Sculpturoscope propose une rencontre entre la statuaire et le numérique.

Altyor met le cap sur la Silicon Valley Le spécialiste orléanais des objets connectés va ouvrir prochainement une agence à San Francisco.

51

Richelieu met Chinon à une portée de pédale Une voie verte a été aménagée sur le tracé de l’ex-ligne ferroviaire reliant Richelieu à Chinon.

52

Le Monte Carlo des Vendômois Le rallye automobile Le Vendôme a connu un beau succès les 11, 12 et 13 mai derniers.

53

L’union fait la force Cinq “petits” châteaux du Loir-et-Cher ont fait cause commune.

54

Le carnet

de Tours ? L’idée n’est pas aussi saugrenue qu’elle en a l’air… 31

Orléans Loire-Valley prend de l’altitude L’aéroport de St-Denis-de-l’Hôtel veut s’inscrire dans la dynamique de la métropole orléanaise.

Économie 32-35

36

38

40-41

À LA UNE On ne prête qu’aux REACH Les fabricants de produits chimiques doivent se conformer depuis le 31 mai aux contraintes du règlement européen REACH. Ce dispositif risque d’exposer les entreprises les plus modestes à de graves difficultés économiques.

45

Minoteries Viron se pose à Gellainville Minoteries Viron va prochainement racheter l’ancien site Lego de Gellainville (28).

46

Nouveau développement pour TPC La Scop TPC (sous-traitance industrielle) ouvre une nouvelle unité à Saran (45).

47

La roue tourne pour AR Industries C’est le soulagement à Diors (36) après la reprise du fabricant de jantes automobiles AR Industries.

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Harmonie Mutuelle soigne le capital santé de ses salariés La mutuelle régionale s’engage dans le bien-être au travail et développe le télétravail.

Nos Infos Services

Synthron a revu son portefeuille de produits La société arrête certains produits, les coûts d’étude et d’enregistrement générés par REACH n’étant pas compatibles avec leur contribution économique. « C’est une vraie usine à gaz » L’utilité de REACH ne convainc pas les dirigeants d’Orrion Chemicals Orgaform, à Semoy (45). En bref L’actualité du trimestre en bref.

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50

Évadez-vous avec les escape games ! Les sites touristiques du Val de Loire misent sur les jeux d’évasion.

Paroles d’experts La prise en compte sources des politiques de res atégies humaines dans les str te RSE fait partie intégran Avec des enjeux sociétaux. ie Centre. notre partenaire Focs

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Points Chauds

En bref

PORTES OUVERTES

Très actif depuis quelques semaines, le député LREM d’Indre-et-Loire Philippe Chalumeau, conseiller municipal socialiste de Tours sous le dernier mandat de Jean Germain (20082014), s’est fendu d’une longue lettre d’explication de la politique gouvernementale et de sa contribution personnelle en faveur de la ville, à l’adresse de la quinzaine de membres d’un « collectif de groupes d’extrême-gauche » venus manifester devant sa permanence, le 18 mai dernier. Le député, absent de Tours ce jour-là, a néanmoins invité les membres du collectif, menés par Pierre Bitoun, un sociologue passé par l’Inra, auteur de plusieurs ouvrages anti-libéraux, partisan de la Sécurité sociale intégrale, de la sortie du nucléaire et lui-même ancien candidat aux municipales sur la liste « C’est au Tour(s) du Peuple » de Claude Bourdin, à le rencontrer le lendemain au même endroit. Sans succès... Les problèmes de stationnement en centre-ville sont décidément rédhibitoires pour l’organisation des journées portes ouvertes.

IMBROGLIO « Lorsqu’un problème est difficile, il faut toujours recourir à une solution compliquée », disait Edgar Faure. L’UDI, dont aurait pu se réclamer ce parangon du centrisme, est en train de le démontrer. Si Maurice Leroy soutient JeanChristophe Lagarde, réélu triomphalement président du mouvement le 17 mars, Hervé Morin s’en tient toujours à l’écart. Du coup, le parti qu’ils avaient fondé, Les Centristes, semble proche de sa fin après s’être affranchi de l’UDI l’an passé. Les radicaux valoisiens, co-fondateurs de l’UDI, ont fusionné avec l’ex-parti radical de gauche... sauf quelques membres, dont Yves Jégo, qui ont préféré rester à

l’UDI. Quant au groupe UDI, Agir et Indépendants de l’Assemblée nationale, il s’appuie sur les UDI membres de la FED de Jean-Christophe Lagarde, les Centristes et les ex-Centristes, les anciens LR d’Agir, les députés polynésiens et néocalédoniens, les ex-Radicaux et le MRSL des radicaux fusionnés. C’est effectivement compliqué...

INSOUMIS Débordant d’activisme antipatron depuis son élection au Palais Bourbon, le député MoDem du Loiret Richard Ramos a interpellé MichelÉdouard Leclerc lors du débat parlementaire sur le projet de loi agriculture et alimentation : « Non, les plus modestes ne

sont pas mieux nourris par votre système : ils sont toujours les mal-nourris de notre époque. » Le groupe Lactalis a eu droit aussi à son coup de pied de l’âne : « On comprend la colère de nos concitoyens quand ils découvrent que certains industriels de l’agroalimentaire, comme le groupe Lactalis, peuvent peut-être, par avidité, les tromper, les empoisonner, eux et leurs enfants. » C’est à se demander si l’électeur de la 6e circonscription du Loiret n’a pas été lui aussi trompé sur la marchandise, en se laissant berner par l’étiquette MoDem d’un candidat France Insoumise.

PAS SI ANGÉLIQUE… La députée européenne LR Angélique Delahaye préfère prévenir. Oui, elle sera bien

candidate à un nouveau mandat, mais cette maraîchère de profession ne fera pas la potiche de service. Toute auréolée de son statut de sortante, elle ne figurera sur les listes aux européennes de 2019 de sa formation politique qu’en position éligible, « et à un bon niveau d’éligibilité, sinon ce sera sans moi et je me retirerai pour me concentrer sur St-Martin le Beau », commune dont elle est maire. Qu’on se le dise : celle qui se situe sans aucun état d’âme dans la ligne Wauquiez n’hésitera pas à envoyer sur les roses les hiérarques Républicains.

CLASH BLÉSOIS Le feu couvait depuis plus d’un an, époque à laquelle Louis Buteau, l’adjoint au commerce du maire socialiste de Blois Marc Gricourt, quittait le PS pour rejoindre les rangs de la République en Marche (LREM). Mais Marc Gricourt aura attendu le mois d’avril, « poussé par les autres membres de l’équipe municipale », pour retirer sa délégation à son ex-adjoint au commerce. Et en faire désormais un adversaire résolu…

De Nicolas Perruchot, président (LR) du conseil départemental de Loir-et-Cher, interrogé par Le Figaro sur l’argent des syndicats : « Le monde syndical perd des adhérents mais sa santé financière est florissante. » De Philippe Fournié, vice-président (PS) du conseil régional en charge des transports, à propos de l’ouverture du rail à la concurrence et des relations de la collectivité avec la SNCF : « Nous avons choisi la ligne médiane entre le libéralisme à outrance et le conservatisme. » De Charles-Éric Lemaignen,

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La ministre loir-et-chérienne Jacqueline Gourault a piqué une grosse colère à l’Assemblée nationale, le 18 avril, lors de l’examen du projet de loi « asile et immigration ». Sommée par les députés LR de s’expliquer sur un « plan caché de régularisation de 40 000 sans-papiers » évoqué dans les colonnes du quotidien Le Monde, la ministre s’est emportée en interpellant Christian Jacob, le patron du groupe Les Républicains : « Obliger un ministre à répondre, ce sont des méthodes autoritaires qui ne sont pas acceptables en démocratie », lui a-t-elle lancé. Christian Jacob n’a pas été long à donner une petite leçon à la ministre sur les institutions en lui faisant observer « que c’est le gouvernement qui est responsable devant le Parlement, pas l’inverse. » En dépit des interventions de parlementaires LREM, les esprits ont continué à s’échauffer. Plusieurs députés de la majorité ont reconnu après ces débats électriques que la ministre avait fait « preuve d’une grande maladresse en l’absence de son ministre de tutelle Gérard Collomb. »

JACQUELINE GOURAULT S’EMPORTE

LAIGNEL DIT NON

CHAUD-FROID Afin de la consoler de ces dégelées électorales aux présidentielles 2007 et aux législatives 2012, Ségolène Royal a été nommée par le président de la République ambassadrice des pôles Arctique et Antarctique. C’est à ce titre, ou à celui d’envoyée spéciale de la France pour la mise en œuvre de l’Alliance solaire internationale – autre titre ronflant octroyée à l’excompagne de son prédécesseur par Emmanuel Macron –, que l’ancienne ministre de

(SNI) jusqu’en janvier dernier, a rejoint le groupe d’origine blésoise Idec comme directeur du développement. On se souvient que Manuel Flam avait tenté de lancer une carrière politique à Châteauroux en devenant secrétaire de la section locale du parti socialiste en 2008, avant de se retirer de la scène quatre ans plus tard. Au sein du groupe fondé et dirigé par Patrice Lafargue, il sera en charge de développer des projets immobiliers.

CHIFFRE

DU TRIMESTRE

Michel Polnareff avait immortalisé la poupée qui fait non, Le Figaro veut faire de même avec André Laignel, « le maire qui dit non à Macron ». À 75 ans, et après 41 ans passés

700 C’est le nombre d’emplois que pourrait créer le village des marques en projet à Sorigny, au sud de Tours. En contrepartie, le groupe américain Torg, qui a déposé le projet, prévoit seulement « une quarantaine d’emplois détruits » dans le commerce de centre-ville. Voire... De toutes façons, il faudra franchir l’obstacle des recours d’opposants, de la commission départementale d’aménagement commercial et vraisemblablement de la commission nationale. Ouf...

l’Environnement a inauguré le 7 avril la chaufferie biomasse de Selles-surCher (41), au côté de Charles Fournier, le viceprésident de la Région à la transition écologique. Peut-être histoire de se réchauffer...

MANUEL FLAM CHEZ IDEC L’énarque Manuel Flam, ancien directeur de cabinet (2012-2013) de Cécile Duflot, alors ministre du Logement, puis directeur général de la Société nationale immobilière

dans le fauteuil de premier magistrat d’Issoudun, André Laignel s’insurge contre la décision du gouvernement de supprimer la taxe d’habitation : « François Hollande s’attaquait à nos finances, le nouveau président, lui, s’attaque à nos libertés », fulmine, avec un sens de la formule resté intact, le vice-président de l’Association des maires de France.

ancien président de l’AgglO d’Orléans : « Je reste LR et je n’irai pas comme d’autres à la soupe (...) je souhaite l’union de ma famille politique et je ne veux surtout pas faire un procès d’intention à son nouveau président. » De Gérard Cornu, sénateur (LR) d’Eureet-Loir et rapporteur du projet de loi de réforme ferroviaire : « Si on propose un Paris-Chartres en 45 minutes, il y aura du monde dans le train. » De Michel Autissier, président (LR) du conseil départemental du Cher, à propos de son obligation de supprimer certaines subventions : « Nous n’avons pas vocation à subventionner des murs de cimetières. »

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Points Chauds

Politique

Un fauteuil pour deux Contraint de quitter la scène politique locale, le député (LR) Jean-Pierre Door a laissé les clés de l’exécutif du Montargois à ses deux hommes forts, Benoît Digeon à la mairie et Frank Supplisson à l’agglo. Portrait croisé.

À

entendre les deux intéressés, la répartition des rôles s’est faite sans heurt, naturellement même : Benoît Digeon, 65 ans, dans le fauteuil de maire de Montargis ; et Frank Supplisson, 45 ans, à la tête de l’agglomération montargoise. Les deux fidèles lieutenants de Jean-Pierre Door, député-maire (LR) de Montargis frappé par le cumul des mandats après sa victoire aux élections législatives partielles de mars, sont donc montés d’un cran dans l’organigramme des deux exécutifs locaux pour se retrouver aujourd’hui en pole position. « J’ai juste fait les quinze mètres qui séparaient son bureau du mien », tempère Benoît Digeon, le bras droit historique de Jean-Pierre Door, un homme à la jovialité directe, par ailleurs patron bien connu d’une institution gourmande à Montargis, Mazet Confiseur. « C’est pareil qu’avant, Jean-Pierre me laissait les clés de la maison les mardis et mercredis, et il n’y a jamais eu beaucoup d’écart entre nos pensées et nos actes », pour-

suit celui qui est le compagnon de route de Jean-Pierre Door depuis 1989 et qui a exercé, à partir de 2001, plusieurs fonctions municipales avant de devenir son premier adjoint. « C’est un ami, on a une confiance absolue l’un envers l’autre », confie Benoît Digeon, célibataire sans enfant qui, avec son allure de personnage balzacien, rejoint tous les matins, depuis

“ JE SOUHAITE CONSERVER CETTE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE CAR JE NE VEUX PAS DEVENIR UN ÉLU PROFESSIONNEL un mois, « le bureau de Jean-Pierre». Difficile de lutter contre la force de quinze ans d’habitude. Dans le couple qu’il formait avec le maire sortant, Benoît Digeon était plutôt celui « qui devait trancher. (…) J’étais un peu là pour dire non, et celui qui arbitre est toujours moins bien vu ». D’où sa réputation, selon lui, d’être un homme de droite peu porté vers les concessions.

Frank Supplisson, président de la communauté d’agglomération de Montargis

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À quelques rues de la mairie, le siège de l’Agglomération montargoise et rives du Loing (AME) est installé depuis deux ans dans les anciens locaux d’une banque, aujourd’hui défraîchis. Les odeurs de peinture témoignent d’une rénovation en cours. Doté d’une carrure de troisième ligne de rugby, sport qu’il a pratiqué, – « il valait mieux me croiser à la cafétéria que

sur un terrain », lâche-t-il –, Frank Supplisson s’y déplace à grandes enjambées. Polytechnicien et énarque, ce quadragénaire ambitieux a déjà une expérience solide au plus haut niveau de l’État pour avoir travaillé auprès de plusieurs ministres, dont Éric Besson et Christine Lagarde. Un long passage par les hautes sphères de l’administration, doublé d’une expérience du monde industriel qui s’est traduite par la reprise, en 2014, d'Ascometal, un fleuron de l'industrie française alors en redressement judiciaire. « Je reprends des actifs industriels en difficulté », explique Frank Supplisson dont « l’autre » bureau se trouve à proximité de la gare de Lyon. « Je fais partie des 8 000 personnes du bassin montargois qui vont travailler à Paris tous les jours », indique-t-il. Après la reprise et la restructuration d’Ascometal, ce fut le tour l’an passé de l’entreprise Akers, de Thionville (57). Actuellement, le dossier d’une usine de galvanisation d’ArcelorMittal à Montataire (60) est sur son bureau


parisien. « Je souhaite conserver cette activité professionnelle car je ne veux pas devenir un élu professionnel », lâche-t-il. Phrases percutantes, mots choisis, le nouveau patron de l’agglo n’est manifestement pas homme à palabres. À première vue, pas grand-chose de commun entre ces deux hommes qu’une génération sépare. Hormis, bien sûr, la loyauté à un homme, JeanPierre Door, et la fidélité à une ville, Montargis. « Je n’ai pas d’intérêt financier à être maire, et ce n’est pas le plaisir d’avoir ma photo dans le journal non plus. Ce qui m’intéresse, c’est que les gens disent que, depuis vingt ans, Montargis a changé », se défend Benoît Digeon. À considérer le parcours du volontariste Frank Supplisson, on ne peut s’empêcher de penser que ce poste à la tête de l’agglomération montargoise – 15 communes et un bassin de vie de 70 000 habitants – est sous-dimensionné. C’est bien mal connaître l’homme qui voue un amour indéfectible à sa ville. Un amour qu’aucun poste prestigieux à Paris n’a jamais affaibli. « J’ai épousé cette ville, Montargis est ma part non- négociable », confie, sans sourciller, ce célibataire, père d’un enfant, plagiant Nicolas Sarkozy à propos de Cécilia. Un amour de jeunesse puisque Frank Supplisson, dont la famille est originaire de Gien, s’y est installé au moment d’entamer ses études à Polytechnique. « Avec ma rémunération d’élève, je devais toucher 1 400 € par mois comme sous-lieutenant, et je me suis acheté un studio que j’ai dû payer 6 000 € dans le quartier Kennedy. Le prix du studio était presque équivalent à celui du canapé que j’ai mis dedans », se remémore-t-il, assurant qu’il conserve « un très bon souvenir de cette vie dans un quartier populaire ». L’acte d’union a été scellé à ce mo-

Benoit Digeon, maire de Montargis.

ment-là. Et il est impossible à rompre depuis. Pour preuve, alors que le jeune énarque, très tôt engagé dans la vie locale, est recruté pour effectuer une mission de plusieurs mois en Chine, il négocie de pouvoir rentrer en France pour assister à chaque conseil municipal. « C’était une condition sine qua non pour que j’accepte ce poste. Je payais sur mes deniers l’aller-retour. Depuis 2001, j’ai dû rater une séance du conseil municipal. Montargis a toujours été ma priorité ». Pendant deux ans, les deux hommes vont donc assurer l’intérim, chacun à son poste et avec son tempérament. « On travaille main dans la main, Frank est mon premier adjoint, on se téléphone dix fois par jour », assure Benoît Digeon. Pour autant, en 2020, le scrutin municipal va rebattre les cartes. Et les velléités de Frank Supplisson pour prendre la relève de Benoît Digeon à la tête de la mairie sont un secret de Polichinelle. « Il n’y pense pas seulement en se rasant le matin. Moi, je ne pense qu’à mon emploi du temps quand je me rase », sourit, un brin captieux, Benoît Digeon. Sibyllin, Frank Supplisson se contente de confirmer qu’une équipe « renouvelée, avec beaucoup de talents, travaille à préparer la décen-

nie à venir ». Son existence sera officiellement dévoilée à l’été. D’évidence, le président de l’agglo a de fortes ambitions pour son territoire : « On a le plus gros potentiel de développement de la région », souligne-til, rappelant à l’envi que « le plus gros investissement industriel des quinze dernières années dans la région a eu lieu ici, avec ICT – fabricant italien de papier à usage sanitaire et domestique–, ses 150 M€ d’investissement et ses 250 emplois industriels créés ». Frank Supplisson devient intarissable quand il évoque les atouts du Montargois : « Dans les prochaines années, on pourra faire un nouvelle zone Arboria avec 500 nouveaux emplois pour que les gens vivent et travaillent à Montargis. C’est l’enjeu numéro 1 pour moi : ne pas nous transformer en une banlieue-dortoir de la région parisienne. » Si la succession de Jean-Pierre Door est aujourd’hui incarnée par deux hommes, un seul portera cet héritage en 2020. Et Frank Supplisson qu’Éric Besson, ex-ministre de l’Industrie, qualifiait de « guerrier », a d’évidence déjà en tête sa stratégie pour la prochaine bataille électorale. Anthony Gautier

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Points Chauds

Politique

Les « lignes rouges »

de Gérard Larcher

Le président (LR) du Sénat, Gérard Larcher, était en Touraine le 31 mai pour faire un bilan de la loi NOTRe, trois ans après son adoption.

L

e président du Sénat ne semble jamais aussi heureux que lorsqu’il s’éloigne de Paris. En déplacement en Touraine, toute la journée du 31 mai, Gérard Larcher, affable et détendu, a pris le temps d’échanger avec les journalistes sur les sujets liés, notamment, à l’application de la loi NOTRe, trois ans après son vote. Et c’est d’ailleurs sur la question du rôle du conseil départemental, un temps placé sur la sellette, que le président du Sénat a beaucoup débattu avec des élus locaux au grand complet durant cette visite placée sous le signe de « l’intelligence des territoires ». « La loi NOTRe est le fruit d’un armistice pour le devenir des Régions, des Départements, des communes et des intercommunalités. Comme tous les armistices, c’est imparfait », a ju-

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gé Gérard Larcher, précisant que les sénateurs se pencheront derechef sur cette loi dans deux semaines. « Il ne s’agira pas d’un big bang mais d’un ajustement pragmatique. On est rentré dans une phase où le Département a montré qu’il était incontournable, ce qui ne veut pas dire qu’il n’est pas en capacité d’évoluer. Je connais des départements qui réfléchissent à

épaules des Départements, particulièrement dans cette région : le numérique, la santé et l’accueil des mineurs non-accompagnés (MNA). Au sujet de la désertification médicale, le président du Sénat n’a pas vraiment tranché sur la question d’un conventionnement sélectif des médecins généralistes. « Vous ne pouvez pas piéger les étudiants, il faut dans ce cas les

“ IL Y A ICI UNE CAPACITÉ À ŒUVRER ENSEMBLE QUE L’ON NE RETROUVE PEUT-ÊTRE QUE CHEZ LES BRETONS une fusion avec un autre département. II ne faut pas que nous soyons des intégristes de la lecture de la loi NOTRe », a martelé Gérard Larcher. Questionné sur le peu de succès rencontré par la création de communes nouvelles, notamment en Indre-etLoire, Gérard Larcher a rappelé la vitalité « démocratique » de cette fusion entre communes modestes : « Ce sont les élus du territoire qui décident ou non de faire une commune nouvelle, et pas le préfet. Ça ne marche que si l’on respecte l’identité historique de chacun. Il y a des endroits où ça marche très bien et d’autres où c’est très difficile, en Eure-et-Loir par exemple ». Saluant la capacité des présidents des Départements de la région à travailler en bonne intelligence – « Je trouve qu’il y a ici une capacité à œuvrer ensemble que l’on ne retrouve peut-être que chez les Bretons », a-t-il lâché, amusé – Gérard Larcher a focalisé son attention sur trois sujets qui créent encore des inégalités territoriales fortes et pèsent financièrement sur les

prévenir très tôt. (…) Je privilégie une chose qu’on a oubliée : des incitations à caractère fiscal pour l’installation de praticiens », a-t-il affirmé, soulignant que le numerus clausus « ne suffit pas » : « La répartition des médecins, c’est comme l’onde sismique sur l’échelle de Richter. Plus vous vous éloignez du CHU, et ça va très vite, plus vous perdez en ligne. » Enfin, évoquant la réforme constitutionnelle qui le place en première ligne face au président de la République, Gérard Larcher ne s’est pas dit hostile à la réduction du nombre de parlementaires, mais sans doute pas d’un tiers comme le prévoit le texte actuel. « Il n’est pas question pour moi de déconnecter députés et sénateurs du territoire départemental ; il ne faut pas que les territoires pauvres en démographie n’ait plus de représentants. D’où l’idée d’au moins un député et un sénateur par département. » L’une des fameuses « lignes rouges » que le président du Sénat défend encore bec et ongles devant l’exécutif. AG


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Points Chauds

MobilitĂŠs

Le fer

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dans la plaie La réforme que le Parlement vient tout juste d’adopter sauvera-t-elle le chemin de fer français ? Entre pannes géantes, grèves à répétitions et dégradation continue du service rendu au voyageur, la SNCF a épuisé la patience des usagers et des contribuables. Au plan régional, l’addition ferroviaire, même revue à la baisse, atteint un montant vertigineux : 76 € par an et par habitant pour seulement compenser la perte d’exploitation du réseau régional. Et il faudra ajouter, pour les années à venir et à condition que les financeurs suivent, les lourds travaux d’infrastructures pour maintenir les petites lignes et rouvrir les liaisons Voves-Orléans et OrléansChâteauneuf… 700 M€ au bas mot. N’est-il pas temps de concentrer les investissements sur les lignes à intérêt national, comme le POLT ou les trains d’équilibre du territoire, et d’étudier sérieusement des alternatives pour le reste ? Liaisons par autocars électriques, notamment sur voies réservées, et covoiturage offrent de nouvelles perspectives. Les pages qui suivent ont pour objectif de dresser l’état des lieux et de poser le débat. Parce qu’au XXIe siècle, le rail n’est plus le seul et unique mode de transport terrestre collectif…

L

a convention TER renégociée par la Région et SNCF Mobilités, la branche de l’opérateur en charge de l’exploitation du réseau, était au menu de la session plénière du conseil régional le 16 mai. Le président Bonneau et son vice-président en charge des transports Philippe Fournié étaient tout heureux d’annoncer qu’ils avaient obtenu, à l’issue de discussions serrées, une réduction substantielle de la compensation annuelle versée à la SNCF, soit 196 M€ au lieu des 220,5 M€ prévus

en 2018. Avec l’objectif de contenir cette contribution sous la barre des 200 M€ dans les deux années suivantes. On comprend la satisfaction des deux élus socialistes : près de 25 M€ de moins à débourser chaque année, ce n’est pas négligeable. Mais il faut modérer leur joie. La Région devra débourser 50 M€ d’ici à 2023 au profit des “petites” lignes du réseau régional, une « part modeste », selon les propres mots de Philippe Fournié, des financements à engager pour « sauvegarder la circulation, la vitesse et la sécurité »

des huit lignes concernées, estimés à 250 M€ d’ici à 2025, auxquels il faudra ajouter quelques dizaines millions d’euros pour le fret. Et SNCF Réseau prévoit d’investir plus de 1,5 Md€ d’ici à 2026 sur l’ensemble des 2 400 km des voies ferrées composant le réseau régional. Tout comptabilisé, l’addition est colossale pour le contribuable. Pour la seule compensation des pertes d’exploitation du réseau régional TER et TET (trains d’équilibre du territoire, récupérés le 1er janvier), la facture annuelle par habitant atteint 76 €... La Lettre Valloire - Juin 2018 13


Points Chauds

La gare de Tours et ses 12 voies, la plus vaste du réseau régional.

Mobilités

et 316 € par foyer acquittant l’impôt ! Ce mode de transport qui date peu ou prou du XIXe siècle – le conseiller régional d’opposition Florent Montillot rappelait qu’Orléans est relié à Paris par le train depuis 175 ans – est-il encore aujourd’hui l’alpha et l’omega de la mobilité à faibles émissions de polluants ? L’importance des dépenses publiques à lui consacrer est-elle en cohérence avec les restrictions budgétaires et les avancées technologiques ? On aurait aimé que le débat régional du 16 mai ouvre quelques portes. Il n’y en eu guère, la seule véritable controverse ayant porté sur la gestion du système par la SNCF, la majorité se refusant à l’accabler, l’opposition se montrant forcément plus critique. La SNCF justement. Bien sûr, il n’est pas question de faire des cheminots, ni même de leur direction, des boucs émissaires. Mais il est permis de se poser des questions sur les coûts d’exploitation de l’entreprise nationale. Selon un rapport publié en début d’année par IRG-Rail – l’organisme qui regroupe les régulateurs indépendants européens, dont le français Arafer –, le prix global du ki-

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lomètre voyageur, en incluant les subventions de l’État et des Régions, est 20 % plus élevé en France (22,29 cents) qu’en Allemagne (18,82 cents) ou en Grande-Bretagne (18,37

confondus, est similaire à celui de la SNCF sur le réseau français (89 %). Quant à l’indice de satisfaction des usagers, mesuré par l’indicateur Rail National Passenger Survey, il est

“ LE PRIX DU KILOMÈTRE VOYAGEUR EST 20 % PLUS ÉLEVÉ EN FRANCE QU’EN ALLEMAGNE OU EN GRANDE-BRETAGNE

cents). On peut espérer une évolution prochaine : la France, très en retard sur ses voisins pour l’ouverture du transport ferroviaire à la concurrence, va enfin se lancer : en décembre 2020 pour le TGV et les trains nationaux, de fin 2019 à fin 2023 pour les TER. Et l’arrivée sur un marché de compagnies alternatives, qu’elles soient d’ailleurs privées ou publiques, n’est pas l’épouvantail couramment décrit. En Grande-Bretagne, qui a libéralisé son réseau il y a plus de vingt ans, le trafic voyageurs a augmenté de 30 % depuis et l’Allemagne, où l’ouverture à la concurrence remonte aux mêmes dates (source Arafer), l’a fait croître de 20 %. Et le taux de régularité britannique, tous opérateurs

passé de 72 % en 2002 à 83 % en 2017. Le cas de l’Italie est particulièrement intéressant. Sur le réseau à grande vitesse, l’arrivée d’un opérateur alternatif en 2012 a boosté l’opérateur historique qui a augmenté le nombre de trains circulant sur les LGV de 61 %. Et la concurrence du nouveau (Italo-NTV) a stimulé l’ancien (Trenitalia) de telle façon que le prix du billet de TGV a baissé de 40 % et que les deux entreprises ont développé conjointement des services à bord et en gare qui n’existaient pas, comme le wifi ou la restauration haut-degamme. En région Centre-Val de Loire, la concurrence, c’est demain. À partir de la fin de l’année prochaine, dit la loi. Mais si Philippe Fournié, l’actuel vice-président socialiste en charge des transports, a moins la religion du service public que son prédécesseur communiste Jean-Michel Bodin, il devra composer avec une majorité régionale soucieuse de ménager la vieille dame. L’élu a néanmoins clairement exposé sa position lors de la session du 16 mai : « Nous avons choisi la ligne médiane entre le libéralisme à outrance et le conservatisme. » La nouvelle convention TER, signée ces jours derniers, comporte un élément nouveau, qui n’a pas été commenté. Son échéance, prévue au 31 décembre 2020, pourra désormais être prolongée de deux ans, ou de deux fois un an, et non plus d’un an comme dans la convention initiale. Ce qui signifie que la Région s’est donné un an supplémentaire pour décider ou non de renouveler la


convention avec l’opérateur historique. Au risque pour celui-ci de voir le loup de la concurrence rentrer dans la bergerie. Il est probable que sans cette épée de Damoclès, la négociation des clauses examinées durant la revoyure aurait été plus ardue. Les recettes des trains sous l’autorité régionale ont plus que doublé avec l’intégration des TET (135 M€ pour l’ensemble du réseau sur la base des chiffres 2017, contre 65,4 M€ avec les seuls TER) et les charges ont augmenté de plus de moitié (271,2 M€ contre 178,2 M€ pour le seul TER), ce qui justifie l’avertissement de la Région à la SNCF : « Nous ne sommes plus votre principal client, mais votre plus gros donneur d’ordre. » L’amélioration de la ponctualité fait partie des challenges assignés à la SNCF. Dans ce domaine, l’enjeu principal sera de rapprocher les chiffres désastreux des trois lignes TET (79,16 % en 2017) de ceux, beaucoup plus présentables, des TER (90,8 % la même année). Autre défi, celui des recettes. Alors que le produit de la vente des billets de TER baisse (– 8,1 % entre 2014 et 2017), il est impératif de dynamiser l’activité commerciale ; la liberté tarifaire, désormais acquise par la Région, la recherche de synergies avec les autres modes de transport, notamment routiers, et les partenariats avec des acteurs touristiques ou des organisateurs d’événements devraient y concourir. Avec l’apport des TET, les recettes directes des trains régionaux devront atteindre 140 M€ en 2018 (contre 135 M€ en 2017), puis 141 M€ en 2019 et 142 M€ en 2020. La lutte contre la fraude fait partie intégrante de cet objectif. Une enquête conduite en 2017 a établi le taux de fraude à 10,4 %, TER et TET confondus, ce qui représente 14 M€ par an. La Région veut responsabiliser la SNCF dans ce domaine et l’a enjointe d’une obligation de résultat. De 9 000 trains objets d’un contrô-

le renforcé à bord en 2014, on est passé à 15 000 contrôles en 2017. Pour un résultat assez aléatoire puisque dans le même temps les recettes baissaient de plus de 8 %... À partir de cette année, le nombre de contrôles augmentera progressivement pour atteindre 21 000 en 2020. Avec l’objectif de faire passer le taux de fraude à 7,4 %. Mais trois points de fraude en moins représentent guère plus de 4 M€ encaissés au guichet... Le fer restera durablement coûteux, très coûteux... et financé, dans le cas de la Région Centre-Val de Loire et sur la base des prévisions 2018, à

41 % par l’usager et à 59 % par le contribuable. Demain, il deviendra indispensable de recourir à d’autres modes de transport à faibles émissions de carbone et de gaz : l’autocar électrique, comme celui testé par Transdev entre Orléans et Montargis (lire pages 26 et 27), pourra compléter ou remplacer les petites lignes ferroviaires trop déficitaires, et le covoiturage de nouvelle génération, comme celui proposé par la startup ecov.fr, offrira des solutions de mobilité notamment aux populations éloignées des grands centres urbains. Et pour relier ces derniers, Hyperloop ou un de ses cousins remplacera peut-être un jour le TGV. Mais ça, c’est pour après-demain...

Les retraites du fer plombent l’État Le régime spécial de retraite des cheminots laisse une charge astronomique au contribuable : l’État aura versé en 2017 une subvention d’équilibre de 3,3 Md€, le montant des cotisations salariales et employeur ne représentant que 37 % des prestations servies aux 255 000 bénéficiaires. Le régime est particulièrement avantageux : retraite à 55 ans pour les agents – repoussée en 2008 à 57 ans pour les personnes nées après 1967 – et à 50 ans pour les roulants – 52 ans depuis 2008 pour les conducteurs nés après 1972 – et une cotisation pour chaque employé équivalente à 8,79 % du salaire brut, alors qu’elle dépasse les 11 % pour les salariés du privé non cadres. La cotisation des cheminots devrait néanmoins progressivement se rapprocher du régime commun. Comment sortir de cette impasse, sachant qu’entre l’allongement de la durée de la vie et la baisse du nombre de cotisants (144 000 en 2018, soit 2,6 % de moins en deux ans), la compensation de l’État augmente de près de 2 % chaque année ? Même en tablant sur la disparition prochaine du statut de cheminot, il faudra néanmoins continuer de compenser les retraites jusqu’à extinction du statut, à l’horizon 2060...

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Points Chauds

Mobilités

PHILIPPE FOURNIÉ (PS), VICE-PRÉSIDENT DE LA RÉGION CENTRE-VAL DE LOIRE EN CHARGE DES

« Les donneurs d’ordre de la La Région Centre Val de Loire veut voler au secours des petites lignes menacées par le désengagement de l’Etat et y consacrer une enveloppe exceptionnelle de 50 M€. Elle vient aussi de renégocier à mi-parcours la convention avec la SNCF qui court jusqu’en 2020. La Lettre Valloire : Quelles sont les actions prioritaires que la Région entend mener dans le domaine ferroviaire ? Philippe Fournié : Nous avons d’abord décidé de consacrer un financement de 50 M€ d’ici à 2023 au profit des petites lignes du réseau régional qui représentent un peu moins de 800 km sur les 2 400 km de lignes exploitées. Je précise qu’il s’agit bien d’un programme d’urgence qui permet de pallier les atermoiements de l’Etat auquel nous demandons de compléter cette enveloppe par un apport d’un montant équivalent. Notons aussi qu’il s’agit d’un engagement à caractère exceptionnel puisque cette intervention est menée en dehors de notre champ de compétences. L’autorité organisatrice régionale n’est pas directement en charge des infrastructures ferroviaires, mais j’ai pensé, en plein accord avec le président François Bonneau, que nous devions prendre nos responsabilités et qu’il fallait donc un peu bousculer le calendrier. Il faut bien comprendre que l’enveloppe que j’évoque, qui était partiellement prévue au titre du contrat de plan État-Région (CPER), va financer des travaux indispensables à la poursuite de l’exploitation dans les conditions de sécurité et de vitesse actuelles. Ciblés sur les dessertes Tours-Loches, Tours-Chinon, Bourges-Montluçon, Le Blanc-Argent (dont l’exploitation est réduite à Salbris-Valençay, NDLR) et Paris-Châteaudun-Vendôme-Tours, ils permettront simplement d’empêcher une dégradation forte et immédiate, voire définitive du service. Les montants que nous déployons ne représentent en effet qu’une part 16 La Lettre Valloire - Juin 2018

modeste des financements qui doivent être consacrés à la revitalisation de ces lignes et qui ont été estimés à 300 M€ à l’horizon 2025-2030. Nous allons empêcher dans certains cas que la vitesse d’exploitation commerciale soit abaissée à 30 km, ce qui réduirait de beaucoup l’intérêt du train, y compris vis-à-vis du vélo à assistance électrique… La Lettre Valloire : Les services rendus par ces lignes secondaires justifient-ils de tels investissements ? Philippe Fournié : Je vous livre un chiffre qui permet d’estimer l’importance de ces petites lignes – l’appellation est trompeuse – pour l’aménagement et le développement harmonieux de notre territoire et de ses parties plus rurales. Les dessertes organisées sur les six petites lignes du réseau régional qui entrent dans les classifications UIC 7 à 9 connues des seuls techniciens, représentent en effet chaque année près de 5 millions de voyages. J’espère que tous les élus, y compris nos amis écologistes qui, parfois, émettent des réserves au sujet de notre politique ferroviaire, mesurent ce que représenterait le report modal de ce trafic vers le réseau routier. En heure de pointe, le train transporte environ 120 à 150 personnes entre Tours et Chinon. Cela correspondrait à trois cars de plus sur la route si cette desserte était abandonnée. Mais j’admets parfaitement que ces petites lignes, qui coûtent très cher à entretenir et à développer, doivent rendre un service réel. Il faut que le potentiel soit valorisé par des cadencements appropriés et la recherche de liaisons intermodales judicieuses, c’est par exemple le cas de la desserte Tours-Loches par Reignac-sur-Indre qui permettra de desservir l’ensemble du bassin de vie du Lochois. Il faut aussi prendre en considération les impacts spécifiques sur l’activité économique. La ligne Bourges-Montluçon dessert ainsi les Ateliers d’Orval, une unité industrielle de 115 salariés spécialisée dans la maintenance de wagons. La déshérence de la ligne conduirait l’entreprise à rechercher une autre localisation. La Lettre Valloire : Vous venez aussi d’opérer une révision à mi-parcours de la convention TER qui vous lie avec la SNCF jusqu’en 2020 ? Philippe Fournié : Nous avons renouvelé cette convention dans le cadre d’une discussion qui, initialement, ne


TRANSPORTS

SNCF, pas ses clients » l’espèce, il n’y a pas de sujet tabou. Si nous ne parvenons pas à nos fins, la SNCF sait que nous n’hésiterons pas à examiner de près les offres émanant de ses concurrents, qui d’ailleurs ne pourraient être que partielles. Certains de nos interlocuteurs ont parfaitement intégré que la Région n’est pas le meilleur client de la SNCF, elle est aujourd’hui son principal donneur d’ordre sur le territoire ! C’est plus qu’une nuance.

correspondait qu’à une simple revoyure. Mais j’ai souhaité que nous allions plus loin. Les échanges soutenus que j’ai conduit avec l’opérateur ont abouti à une diminution du montant de la convention qui s’élèvera à 196 M€, contre 220,5 M€ dans sa version initiale, incluant TER et TET (les trains d’équilibres du territoire, soit les trois lignes Intercités récupérées par la Région, NDLR). Je souligne que nous avons passé la convention au peigne fin pour réduire la facture sans toucher au périmètre des services et à la qualité des prestations. Nous avons aussi durci nos objectifs d’amélioration de la qualité de service et des résultats dans la lutte contre la fraude qui représente 10,4 % des recettes pour le TER et les TET confondus. C’est considérable. Nous sommes passés sur ces sujets d’une logique de moyens à une logique de résultat ; la convention prévoit une augmentation de 1 à 2 M€ des pénalités versées par l’opérateur s’il n’atteint pas les objectifs fixés. En revanche, nous l’avons intéressé financièrement : le produit de l’augmentation des recettes par rapport au prévisionnel sera réparti équitablement. Nous avons réellement apprécié l’état d’esprit d’ouverture et d’écoute de nos partenaires mais nous ne sommes qu’au début des politiques de service que nous souhaitons déployer ; il faut aller encore plus loin. La Lettre Valloire : Quitte à agiter le spectre du recours à un opérateur privé dans le cadre des prochains appels d’offre ? Philippe Fournié : Je suis un défenseur du service public mais j’estime que celui-ci doit profondément se réformer, car la défense du service public, ce n’est pas le statu quo. Pour autant, nous ne sommes pas des idéologues ! En

La Lettre Valloire : La Région a repris le 1er janvier dernier l’exploitation des TET. Quelles sont vos ambitions en la matière ? Philippe Fournié : Nous avons naturellement un objectif d’amélioration de la qualité de service sur les trois lignes TET (Paris-Orléans-Tours, Paris-Bourges-Montluçon et Paris-Montargis-Nevers) dont nous assurons désormais l’exploitation. Nous allons nous y employer en nous appuyant sur les 32 rames Omneo Premium Bombardier qui équiperont progressivement le réseau entre 2020 et 2022. C’est un matériel vraiment très qualitatif qui offrira de nouveaux services et options comme par exemple le wifi embarqué. Je pense que nous pouvons globalement espérer une augmentation de 5 % de la fréquentation, mais l’enjeu c’est d’améliorer progressivement le taux d’efficacité du service, qui prend en compte la ponctualité. Celui-ci est aujourd’hui d’environ 80 % et nous voulons le rapprocher de celui du TER (93 %). Nous voulons proposer des politiques tarifaires innovantes et audacieuses. Il faut cibler les jeunes, les anciens, mais également proposer des tarifications spéciales à l’occasion de la saison touristique ou d’événements porteurs comme le Printemps de Bourges. Propos recueillis par Jean-Christophe Savattier

50 000 voyageurs chaque jour en TER Les 420 TER circulant sur le réseau ferroviaire régional, dont 50 exIntercités, transportent 50 000 voyageurs quotidiennement. Et la fréquentation observée dans les gares témoigne de cette importance : 18 000 voyageurs sont recensés chaque jour dans les gares de Tours et de St-Pierre-des-Corps, 12 000 dans celles d’Orléans et de Fleury-les-Aubrais. Il est à noter que 40 % du trafic TER se concentre sur la seule desserte Paris-Chartres-Nogent le Rotrou. Depuis le 1er janvier 2018, TER Centre-Val de Loire a intégré trois lignes Intercités : Tours-Orléans-Paris, Paris-Bourges-Montluçon et Paris-Montargis-Nevers.

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Points Chauds

Mobilités

La grosse enveloppe des Le réseau ferroviaire régional accuse le poids des ans… et souffre d’un sous-investissement chronique. Bonne nouvelle, il bénéficiera enfin de 1,5 Md€ d’investissements d’ici à 2026. L’enveloppe sera très majoritairement consacrée à la rénovation de la liaison structurante Paris-Orléans-LimogesToulouse (POLT). Par ailleurs, la Région Centre-Val de Loire, autorité organisatrice des transports sur son territoire, a lancé plusieurs programmes de nouvelles dessertes. Si Chartres-Tours via Voves est acté, la prolongation Voves-Orléans attend toujours le coup de sifflet du chef de gare.

L

es 2 400 km de lignes du réseau ferroviaire régional ont besoin d’un brin de toilette ! C’est une très bonne nouvelle, les dirigeants de SNCF Réseau semblent avoir pris conscience qu’il n’était plus possible de reculer les échéances. « C’est un effort sans précédent, nous indique Jean-Luc Gary, le directeur territorial Centre Val de Loire de SNCF Réseau. Plus de 1,5 Md€ vont être engagés d’ici à 2026 pour la régénération du réseau structurant avec des montants annuels qui varieront selon la nature des travaux entre 150 M€ et 200 M€. » A entendre les cheminots, cet effort est loin de correspondre à une marotte soudaine des techniciens. « Si on compare les situations des différents réseaux dans le grand Ouest, l’âge moyen du réseau

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du Centre-Val de Loire est le plus élevé donc celui sur lequel les efforts doivent porter en priorité », admet sans fard Jean-Luc Gary. Les outrages du temps n’expliquent pas tout : la succession de différés dans la programmation des travaux a dégradé l’état des lignes. Et il s’agit aujourd’hui de cravacher pour rattraper le temps perdu au risque de compromettre la sécurité et la qualité de l’exploitation… déjà bien entamées. Partant, la branche de la SNCF en charge de l’entretien des infrastructures a prévu dès cette année de consacrer près de 190 M€ à des opérations majeures sur les lignes « structurantes » Paris-Orléans-Tours et Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) qui absorberont l’essentiel des enveloppes prévues. À elle seule, la ligne POLT totalisera près de

1,2 Md€ de travaux sur la période 2016-2026 (700 M€ pour la voie et les aiguillages, 200 M€ pour la signalisation et 300 M€ pour les équipements d’alimentation électrique). Et tant pis pour les petites lignes régionales qui représentent pourtant un précieux maillage de quelque 800 km ; elles devront attendre meilleure fortune… et la générosité de la Région. La collectivité vient, en effet, de décider un plan d’urgence de plus de 50 M€ en leur faveur (lire, à ce sujet, l’interview de Philippe Fournié, le vice-président de la Région en charge des transports). « Il faut comprendre que cette concentration de moyens, estime Jean-Luc Gary, répond à un objectif prioritaire : la régénération du réseau structurant le plus fréquenté. Il est donc tout à fait logique que les ressources soient d’abord orientées vers les lignes du réseau qui supportent 93 % des circulations régionales » Par ailleurs, SNCF Réseau n’exerce jamais de responsabilité directe sur les infrastructures entrant dans la catégorie dite des petites lignes. Elle « peut proposer son expertise technique, mais nous répondons en matière de travaux sur ces lignes secondaires à des décisions qui sont prises par la Région, l’autorité organisatrice des transports. » À ces chantiers structurants, qui relèvent de la responsabilité de l’État et de SNCF Réseau, vont s’addi-


travaux ferroviaires tionner les ambitieux programmes et retours quotidiens. Mais il semble cela », souligne l’élu – sous-estiprévus dans le cadre du contrat de qu’il y ait encore loin de la coupe aux ment le potentiel. Dans ce contexte, plan État-Région 2015-2020, une lèvres. « C’est un très beau projet, il est d’ores et déjà acquis que la qui a beaucoup de sens en matière réouverture de cette desserte Charconvention dotée de 470 M€. Première certitude, le projet de liai- d’aménagement du territoire, et tres-Orléans ne sera pas effective, ni son entre Tours et Chartres via la qui, politiquement, donnerait da- même probablement engagée, avant gare de Voves va prochainement vantage de cohérence à un terri- la fin du contrat de plan. devenir une réalité. « La rénovation toire parfois en mal d’identité », « Je suis également inquiet au sujet du tronçon Chartres-Voves pour un soutient Philippe Fournié. Pour au- du calendrier de l’ouverture de la montant de 65 M€ a été achevée et elle est ouverte au trafic voyageurs (3 A/R quotidiens en semaine) de- “ LE RÉSEAU RÉGIONAL EST INDISCUTABLEMENT LE PLUS ANCIEN DE TOUS CEUX EXPLOITÉS puis décembre 2016. Il ne reste plus DANS LA GRAND OUEST qu’à adapter la signalisation à € d’invesVoves (soit environ 5 M tissement) pour permettre aux trains de transporter des voyageurs tant beaucoup d’hypothèques res- liaison voyageurs entre Orléans et entre les deux villes sans rupture de tent à lever : la proximité du fuseau Châteauneuf-sur-Loire, un projet charge à Voves », explique Jean Luc avec la base aérienne 123 d’Orléans- pourtant déjà arrivé à maturité », Gary. À priori, ces chantiers mineurs Bricy ainsi que la présence de s’alarme Philippe Fournié. devraient être conduits dans le cou- quelques silos céréaliers qui pose des Le programme, qui s’apparente à rant de l’année 2019. Il sera donc questions de sécurité « auxquelles une desserte de tram-train possible de circuler entre Tours et des études complémentaires de- (voir l’article que nous lui Chartres d’une seule traite, en moins vraient pouvoir répondre sans dif- avons consacré à la page de deux heures – sauf pour les trains ficultés », plaide le vice-président de 21) fait l’objet d’un assez qui desserviront Château-Renault, la Région. Enfin, la nécessité de sé- large consensus, mais cerVendôme et Châteaudun – au plus curiser et d’aménager les passa- taines réserves émises par le ges à niveau actuels et l’ensemble maire d’Orléans, ainsi qu’un tard à la fin de 2020. des franchissements procure du fil à épineux problème de passage à La perspective ravit Philippe Fournié, retordre aux techniciens et aux élus niveau à Châteauneuf-sur-Loire, a l’élu régional désormais en charge qui s’affairent autour de ce projet es- conduit le préfet à diligenter des transports. Il estime que cette timé initialement à 150 M€… mais des études comliaison devrait notamment être emdont la facture pourrait exploser, es- plémentaires à pruntée par « les étudiants résitime-t-on dans les couloirs de SNCF l’étude publidant habituellement dans l’aggloque qui avait mération chartraine et qui fré- Réseau. Quand on le rapporte à la fréquen- pourtant reçu quentent l’université de Tours ». Qui pouvait croire à un tel scénario ? tation évaluée dans les premières un avis favoPourtant, la seconde étape, qui études – soit entre 2 500 et 3 000 rable. consiste à rénover les voies ferrées voyageurs/jour – le montant de l’ar- En conséentre Voves et Orléans, devrait don- doise, qui pourrait allègrement s’en- quence, la ner à la gare de Voves – une bour- voler au-dessus des 200 M€, ne d é c l a r a gade beauceronne de 3 200 âmes – manque pas de faire tousser certains tion d’util’aspect d’un… véritable hub régio- observateurs. « Je souhaite que ce lité publinal. Surtout, elle permettrait de rou- projet majeur pour notre territoire que (DUP) vrir le trafic voyageurs entre Chartres soit bien ficelé », souligne prudem- a été remiet Orléans qui est fermé depuis... ment Philippe Fournié qui juge que se aux calen1942. Les deux villes pourraient les chiffres de fréquentation établis des grecques. ainsi être reliées en près d’une avant l’ouverture de Chartres-Voves – Jean-Luc Gary (SNCF Réseau) heure autour d’une dizaine d’allers « ils ne sont pas si mauvais que JCS

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Points Chauds

Mobilités

Les TGV Tours-Paris

en perte de vitesse ?

La SNCF n’est plus dans son sillon ! C’est le moins que puissent dire les usagers de la ligne TGV Tours-St-Pierre-des-Corps-Paris. Si la grève perlée est un problème épisodique, la baisse de la qualité de la liaison est sans interruption : retards à répétition, rames vieillissantes, ralentissement de la vitesse. A l’inverse, sur le tronçon Tours-Bordeaux, les liaisons vont bon train.

L’

association des usagers TGV Tours-Paris a mené une enquête en 2017 révélant que sur 320 trains empruntés, 35 % ont eu au moins 5 minutes de retard. « La situation se dégrade depuis quinze ans, constate Christophe Becker, qui fait partie des TGVistes quotidiens du Tours-Paris (4 000 abonnés). Ce sont des retards de quelques minutes

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mais sur un trajet qui dure plus ou moins 1 h 15, selon qu’il y ait un arrêt ou non à Vendôme, ça paraît long. Les excuses sont souvent liées au matériel défaillant : des portes qui ne ferment plus, des sièges cassés, des problèmes de freins… » À ces désagréments viennent s’ajouter les jours de grève et une hausse de 2 à 3 % du prix des billets en moyenne chaque année. Conséquence : de plus en plus d’usagers font « la grève de l’achat » à l’image d’Olivier, 39 ans. « Pourquoi paierais-je un abonnement pour un service de mauvaise qualité ? Je paierai quand ils auront terminé de nous priver de notre liberté de travailler ». À Tours, les cheminots ne sont pas les seuls à se battre pour leurs droits. En 2013, quelques usagers surnommés les “Pigeons du rail” et des élus locaux avaient interpellé Jean Auroux, le médiateur du projet LGV Sud-Europe Atlantique, sur une inquiétude : celle que les trains directs Paris-Bordeaux aient la priorité sur les ParisTours. Pour rappel, depuis le 2 juillet 2017 et la mise en service de la LGV L’Océane, les trains TGV Paris-Bordeaux empruntent d’abord la portion mise en service en 1990 entre ParisMontparnasse et St-Pierre-des-Corps avec des pointes à 300 km/h avant de filer à 320 km/h sur la nouvelle ligne en direction de Bordeaux. Les rives de la Garonne ne sont plus qu’à 2 h 05 des rives de la Seine. À la naissance du projet, la construction d’une troisième gare – d’une

dizaine de millions d’euros - avait été évoquée pour permettre à Tours de bénéficier des retombées de cette ligne filante. Un projet aujourd’hui oublié des mémoires collectives. « Il y a déjà une halte à St-Pierre-des-Corps et la gare de Tours. Cela aurait été complétement inutile », rappelle JeanPatrick Gille, ancien député PS d’Indre-et-Loire. Au final, l’agglo de Tours et le conseil départemental s’étaient refusé à mettre des billes dans le financement de la LGV. Sans regret. Sur les 32 collectivités toujours impliquées dans le projet, certaines ont aujourd’hui des difficultés à payer leur écot à la SNCF. Seule consolation pour l’entreprise publique, les « bons chiffres » de fréquentation de la nouvelle ligne TGV : 2,7 millions de passagers sur les six premiers mois (+ 70% par rapport à l’ancienne ligne) à raison de 18,5 allers-retours directs par jour et 15 allers-retours avec arrêt à St-Pierre-des-Corps, Poitiers ou Angoulême. En prime, après avoir dû partager les sillons de la ligne avec les Paris-Bordeaux, les TGV St-Pierre-des-Corps-Paris devront bientôt composer avec les trains directs Bordeaux-Londres : « Des discussions sont en cours avec les opérateurs concernés (Lisea, mais aussi SNCF Réseau, Eurotunnel et High Speed 1) ». Si 25 % des sillons sont encore disponibles, il est à prévoir que le projet ne se fera pas sans quelques fritures sur la ligne. Alexia Mellier


Orléans-Châteauneuf

sur la voie de garage ?

La relance de l’enquête publique et la tiédeur des élus orléanais pourraient faire capoter le projet de réouverture au trafic voyageurs de la ligne Orléans-Châteauneuf-sur-Loire. Dans l’attente du dénouement, le conseil régional va engager 10 M€ afin de maintenir l’activité fret.

L

e projet de réouverture au trafic des voyageurs de la liaison Orléans-Châteauneuf-sur-Loire, pour l’heure uniquement affectée au fret, a-t-il encore une chance de voir le jour ? La proposition est séduisante sur le papier. S’apparentant à une desserte banlieusarde de type tram-train, les 27 km seraient susceptibles de transporter quotidiennement, selon les estimations, près de 9 000 voyageurs en desservant les six communes situées sur le parcours (Orléans, St-Jean-deBraye, Chécy, Mardié, St-Denis-de-l’Hôtel et Châteauneuf-sur-Loire). «De plus, il y aurait deux arrêts en correspondance avec la ligne B du tramway, à Orléans-Ambert et à St-Jean-de-Braye», note Philippe Fournié, l’élu régional en charge des transports, farouche supporteur du projet. De quoi irriguer tout l’est de l’agglomération orléanaise. Les premiers résultats de l’enquête publique, connus depuis décembre, avaient été plutôt favorables, si l’on excepte trois réserves techniques, « des babioles », estime Philippe Fournié. Mais le préfet du Loiret, jugeant que le dossier n’était pas suffisamment sécurisé, a relancé la procédure. Et cette fois, pas moins de onze réserves techniques sont apparues. Entre les suppressions et les aménagements de passages à niveau, la construction de sept ouvrages d’art et d’un passage souterrain et, surtout, la création d’une huitième voie en gare d’Orléans couplée à la suppression de 150 places sur le parking Munster, le projet s’est compliqué… et les délais se

sont allongés. L’ouverture commerciale était programmée pour 2021 mais il faudra probablement attendre dix-huit mois, voire vingt-quatre de plus. Dans le meilleur des cas ! Car ces retards risquent de faire capoter le projet « parce que nous risquons de passer à côté des 40 M€ de fonds européens », souligne le vice-président de la Région sans cacher son dépit. L’impasse budgétaire, pour une ligne dont le coût devrait finalement s’établir à 220 M€, pourrait même avoisiner les 60 M€, puisque l’État peine à confirmer l’enveloppe de 20 M€ sur laquelle il s’était engagé. L’affaire n’a pas manqué de prendre un tour politique. Lors de la session régionale du 16 mai consacrée à la politique ferroviaire, Philippe Fournié a vivement dénoncé l’attitude des élus orléanais qui s’opposent « en conseil municipal, mais trouvent que c’est

un bon projet à la métropole… ». Favorable au projet « pour améliorer la mobilité », mais opposé à ce que de lourds travaux soient engagés en gare d’Orléans, le maire Olivier Carré et sa majorité ont voté un avis défavorable en novembre dernier, suivi par le conseil municipal de St-Jean-deBraye qui s’était pourtant initialement prononcé en faveur de la desserte. Qu’importe. Philippe Fournié ne jette pas l’éponge. Il nous confirme qu’à défaut de lancer le projet Orléans-Châteauneuf-sur-Loire dans les délais requis, le conseil régional n’hésitera pas à engager une enveloppe dans le renouvellement a minima de la voie afin d’éviter l’arrêt de l’activité fret. L’état des équipements condamne cette infrastructure si rien n’est fait. Le coût serait proche de 10 M€… Jean-Christophe Savattier

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Points Chauds

Mobilités

Châteaudun-Paris

l’espoir des 1 h 10

Portée à bout de bras par le conseiller régional Fabien Verdier, l’accélération de la liaison entre Paris et Châteaudun désenclaverait le sud eurélien mais aussi le sud francilien. Reste à trouver 46 M€ pour la financer.

F

abien Verdier, conseiller régional et conseiller municipal sans étiquette de Châteaudun, a pris son bâton de pèlerin pour convaincre les deux Régions concernées et la SNCF d’accélérer la liaison ferroviaire entre Paris et Châteaudun. Aujourd’hui, cinq à six TER partent chaque jour de Châteaudun pour parcourir en 1 h 25 (le plus rapide) et 1 h 40 (le plus lent) les 132km qui séparent la sous-préfecture d’Eure-et-Loir de la gare de Paris-Austerlitz. À cela, s’ajoutent autant de liaisons, mais jamais en moins de 2 h 30, vers Paris-Montparnasse, via Chartres et après 1 h d’autocar entre Châteaudun et Chartres. Au retour, même fréquence, avec un record de 1 h 23 pour le TER partant à 13 h 57 de la gare d’Austerlitz. Les trains s’arrêtent à Bonneval (entre 1h 16 et 1 h 30 de trajet pour Paris-Austerlitz), Auneau (51 minutes à 1 h 02), puis à Dourdan et Brétigny-sur-Orge, dans l’Essonne.

22 La Lettre Valloire - Juin 2018

« Si je me fonde sur l’étude réalisée par RFF en 2013, il suffirait de quelques mesures pour accélérer la liaison entre Châteaudun et Paris, explique Fabien Verdier. La plus efficace – chiffrée entre 17 à 18 M€ en 2012, NDLR – serait de créer une voie d’évitement de 300 mètres à Breuillet, à mi-chemin entre Dourdan et Brétigny-sur-Orge, pour permettre

tégrant tous les travaux d’aménagement, 46 M€ au maximum. Et la SNCF pourrait économiser autour de 600 000 € par an en frais de fonctionnement », assure Fabien Verdier qui a obtenu du président Bonneau que la Région Centre-Val de Loire commande une étude de faisabilité du projet. Les résultats devraient être connus cet été.

“ LE GAIN DE TEMPS POURRAIT ATTEINDRE 22 MINUTES, RAMENANT CHÂTEAUDUN À GUÈRE PLUS DE 1 H 10 DE PARIS-AUSTERLITZ aux TER de s’affranchir des RER C. Le gain de temps serait d’au moins 15 minutes ». Ensuite, quelques minutes pourraient être gagnées en relevant les vitesses en entrées et sorties de gare (60 km/h au lieu de 30 km/h) et en ligne (160 km/h au lieu de 140 km/h) et en remplaçant la signalisation. Au total, l’élu pense que le gain de temps pourrait atteindre 22 minutes, ce qui ramènerait la durée moyenne du trajet entre Châteaudun et Paris de 1 h 35 à guère plus de 1 h 10. Bonneval serait à 1 h de Paris-Austerlitz et Auneau et ses entreprises industrielles (Novadis-Andros, Ono Packaging, Coveris...) à moins de 40 minutes... Couplée à une augmentation du nombre de trains – jusqu’à douze dans chaque sens – et à la priorisation des TER sur les RER C à raison de huit allers-retours par jour, le gain de clientèle pourrait atteindre 60 000 voyageurs par an, toujours selon l’étude RFF. Le coût global ? « En in-

Le conseiller régional a aussi écrit en janvier 2017 à Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France et du Stif, le syndicat des transports de la région. Une dizaine de maires et d’élus de l’Essonne et des Yvelines cosignaient le courrier. La présidente a manifesté son intérêt pour l’amélioration des dessertes de cette partie sud de la région, puisque les 25 000 Dourdannais pourraient gagner aussi un temps appréciable : 30 minutes de TER pour rejoindre Paris-Austerlitz, contre près de 50 minutes aujourd’hui et 1 h 10 avec le RER ! Reste la question du financement. Fabien Verdier suggère, ni plus, ni moins, que d’affecter les 200 M€ prévus au CPER pour réaliser la voie Voves-Orléans aux travaux d’amélioration de Châteaudun-Paris qui coûtent quatre fois moins. L’idée, audacieuse, risque de susciter de vifs débats au sein de l’assemblée régionale... FXB


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Points Chauds

Mobilités

Le Berry

enfin sur la bonne voie ?

Entre Vierzon, Châteauroux et Limoges, de gros travaux de rénovation et de sécurisation sont engagés dans le cadre de la modernisation de la ligne reliant Paris à Toulouse, la fameuse POLT ; ils vont rythmer les années à venir, alors que de nouvelles rames sont annoncées pour 2023.

D

Travaux de renouvellement des voies ferrées à Vierzon.

epuis 2016, SNCF Réseau s’est engagé dans une vaste opération pluriannuelle de modernisation de la ligne POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse), radiale de 712 km qui désenclave le Berry et le Limousin. Au total, pas moins de 1,2 Md€ seront investis pour régénérer cette ligne, dite de train d’équilibre du territoire (TET), vitale pour les départements du Cher et de l’Indre. Le renouvellement du matériel, la modernisation et la sécurisation du réseau ont donc été entrepris il y a deux ans et s’étendront jusqu’en 2026. Chaque année, plusieurs chantiers coup de poing ont lieu durant des weekends, fériés pour la plupart. Ainsi, lors du dernier weekend de Pâques, aucun train n’a circulé pour permettre le remplacement de 19 km de rails, la dépose de câbles haute tension ou la reprise de caténaires sous des ponts-routes entre la gare des Aubrais (45) et celle de Vierzon (18). L’an passé, neuf aiguillages ont

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été modifiés entre Montierchaume et Neuvy-Pailloux, tandis que 3,5 km de voies étaient renouvelés entre Châteauroux et Luant, ainsi que 800 mètres de traverses et de ballast autour d’Issoudun.

nouvelé. La SNCF a lancé fin 2016 un appel d’offres pour équiper la ligne de nouvelles rames capables de rouler au moins à 200 km/h ; les résultats devraient être connus au printemps prochain.

“ L’AN PASSÉ, NEUF AIGUILLAGES ONT ÉTÉ MODIFIÉS, TANDIS QUE 3,5 KM DE VOIES ET 800 MÈTRES DE BALLAST ÉTAIENT RENOUVELÉS DANS L’INDRE Afin de sécuriser la ligne et de gagner en temps de parcours, le Département de l’Indre a souhaité faire disparaître les différents passages à niveau. Après plusieurs chantiers menés ces dernières années, de lourds travaux, financés dans le cadre du contrat de plan État-Région 2015-2020 (5,5 M€, répartis entre la Région Centre-Val de Loire pour 2,23 M€, l’État 2,15 M € et SNCF Réseau 1,18 M€), permettront d’en supprimer trois entre Migny et Ste-Lizaigne d’ici au printemps 2019. Si SNCF Réseau assure la maîtrise d’ouvrage ferroviaire de ce chantier, le Département de l’Indre prend en charge les travaux routiers d’accompagnement. Le weekend des 10 et 11 novembre 2018 sera réservé à la pose des poutres du pont-route qui enjambera la voie ferrée à l’endroit de l’actuel passage à niveau n°163 de la RD 34. Trois autres suppressions de passages à niveau sont programmées, mais non encore planifiées, dans les mois suivants. Le matériel roulant sera aussi re-

Ces trains de nouvelle génération, que d’aucuns espèrent être « autre chose que des TER améliorés », entreront en service à l’horizon 2023. Guillaume Pépy a confirmé que la ligne POLT bénéficierait enfin du wifi dans son matériel roulant, et cela dès le printemps 2019. En parallèle, une action visant à mettre en accessibilité les quais de la gare de Châteauroux, avec la pose de deux ascenseurs et le rehaussement des quais, est dans les tuyaux pour 2019, le tour de table financier étant en cours. Bien que prometteuses, ces améliorations ne masquent pas certaines inquiétudes, comme à Argenton-surCreuse, où un comité de défense de la gare vient d’être créé. Des questions restent en suspens, comme le maintien du personnel et du service commercial de la gare qui pourrait devenir un point d’arrêt non géré (Pang). Craignant aussi une diminution du nombre des arrêts, le comité a obtenu un rendez-vous avec le directeur des trains Intercités. Serge Daniel


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- Juin 2018 La Lettre Valloire La Lettre Valloire - Décembre 2016 25 25


Points Chauds

Mobilités

Transdev met en route Et si la résolution du problème des petites lignes ferroviaires passait par l’autocar électrique ? Transdev a tenté l’expérience au printemps, pour relier Orléans à Gien et à Montargis. En espérant la transposer sur une plus grande échelle dès 2021.

L

e casse-tête des petites lignes ferroviaires, celles classées de 7 à 9 selon l’Union internationale des chemins de fer (UIC) – près du tiers du réseau national pour 2 % du trafic voyageurs – n’est pas résolu, en dépit des objurgations des élus locaux. Le coût global de leur remise à niveau est estimé à quelque 5 Md€, une paille que toutes les parties prenantes, État, Régions et gestionnaire du réseau, hésitent à débourser. En région Centre-Val de Loire, quatre sont concernées. Elles représentent environ 300 km de voies ferrées qui ont fait, ou font encore, l’objet de lourds travaux de rénovation : ToursChinon, Tours-Loches, Dourdan-Châteaudun-Vendôme-Tours et ChartresCourtalain. On y ajoutera deux cas particuliers, Bourges-Montluçon, ligne desservie par un Intercités dont l’exploitation vient d’être transférée à la

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Région, et l’une des dernières équipées de voies métriques en France (l’écartement des voies est de 1 mè-

testé du 9 au 19 avril dernier sur deux des lignes du réseau régional REMI, celle d’Orléans à Gien et celle d’Orléans à Montargis, qui transportent 800 000 voyageurs chaque année. Durant les dix jours de l’expérimentation, un véhicule électrique de 55 places, motorisé par le chinois Yutong, a parcouru les quelque 70 km séparant Orléans des deux sous-préfectures du Loiret en un peu plus d’une heure. Son autonomie (200 km en moyenne et jusqu’à 250 km selon les conditions d’exploitation) ne permet pas de faire plus d’une rotation aller et retour avant chaque recharge des batteries, mais les résultats, tant économiques qu’écologiques, sont parlants : un coût au kilomètre trois à quatre fois inférieur à celui d’un autocar à moteur thermique, une forte réduction des émissions de CO2 et une disparition du NOx et des COV.

“ LE TRANSFERT SUR ROUTE D’UN SERVICE FERROVIAIRE DE VOYAGEUR EN ZONE PEU DENSE PERMET UNE ÉCONOMIE DE 70 À 80 % tre, et non de 1,43 mètre comme sur le reste du réseau) : Salbris-Valençay (ex-Le Blanc-Argent). Mais fermer une ligne ferroviaire est une décision qui peut se prendre très vite. La rouvrir demande vingt ans… La substitution de la route au rail n’est plus une lubie. D’ailleurs, le rapport Spinetta souligne que « le transfert sur route d’un service ferroviaire de voyageur en zone peu dense permet une économie de 70 à 80 % selon le niveau de service retenu. » À plus forte raison si l’autocar est électrique... Transdev l’a

Ces résultats sont d’autant plus importants que la législation européenne imposera dès 2020 aux gestionnaires de flottes d’acheter 50 % d’autocars à basses émissions, gaz ou électriques. Et en 2025, ce sont tous les renouvellements qui seront concernés. Déjà exploitant de TER routiers entre Tours et Chinon et Tours et Châteaudu-Loir, Transdev pourra proposer lors de la prochaine convention régionale TER, en complément du train et de l’autocar à moteur thermique, une alternative électrique, au moins pour


l’électrique quelques liaisons, sur ces deux trajets courts (moins de 50 km) permettant deux rotations aller et retour chaque jour. Et l’expérience Orléans-ChâteauneufGien avait aussi pour but de démontrer qu’avant de lancer un chantier de 220 M€ pour la réouverture de 27 km de voies ferrées et de six gares entre Orléans et Châteauneuf-sur-Loire, il serait intéressant d’examiner l’option des autocars électriques. «D’autant, explique Élisabeth Oger, directrice marketing et développement du pôle régional Centre-Val de Loire de Transdev, que les projections du nombre de voyageurs quotidiens (8 000 à 9 000 par jour, soit 40 TER à pleine capacité, NDLR) nous semblent largement surestimées. » En divisant la fréquentation par deux,

et considérant qu’un autocar électrique pourrait assurer quatre rotations quotidiennes entre Châteauneuf et Orléans, une dizaine de véhicules seraient suffisants pour assurer la liaison. Pour un coût d’exploitation infiniment moindre et un investissement (entre 5 et 6 M€ pour l’achat de 10 autocars électriques) quarante fois inférieur à celui nécessaire à la réouverture d’une ligne fermée aux voyageurs… en 1939. Mais Transdev ne se limite pas à ce projet. La filiale de la Caisse des Dépôts, qui s’appuie sur la gestion de plusieurs réseaux ferroviaires en Europe, espère bien profiter de l’ouverture à la concurrence pour entrer sur le marché national lors du renouvellement de la convention TER, fin 2020 ou fin 2021. La Région ne se prononce pas, mais son nouveau vice-président aux transports

est moins fermé à la libéralisation que ne l’étaient ses prédécesseurs communistes (cf. l’interview de Philippe Fournié aux pages 14 et 15). Préoccupé par les transports interurbains de voyageurs, Transdev n’en oublie pas pour autant les réseaux urbains. Avec le Rouen Normandy Autonomous Lab, il mène dans la métropole rouennaise (490 000 habitants) une expérience inédite de transport à la demande par véhicule électrique autonome. La solution est soutenue par l’ensemble des collectivités. Voilà qui pourrait bien séduire les élus de Tours Métropole qui doivent décider d’ici à la rentrée qui de l’exploitant actuel Keolis ou de Transdev gèrera le réseau Fil Bleu à partir du 1er janvier 2019. FXB

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Points Chauds

Mobilités

Le covoiturage

au secours des campagnes

Utiliser la voiture, peut-être demain électrique, pour réduire les zones blanches de la mobilité. La startup ecov, soutenue par la Caisse des Dépôts, propose d’adapter des solutions de covoiturage aux petites collectivités locales.

D

epuis le mois d’octobre, Covoit’ici, la solution de covoiturage de proximité développée par la startup ecov, a ouvert six stations sur la communauté de communes de l’Ouest Rhodanien (COR), un territoire rural de 50 000 habitants situé entre Lyon et Roanne. Un panneau lumineux en bordure de voirie indique aux automobilistes la destination demandée par le passager en attente, qui s’est inscrit préalablement sur la borne connectée voisine. C’est comme un arrêt de bus, à la différence que plus de la moitié des conducteurs s’arrêtent de manière spontanée, sans connaître le dispositif Covoit’ici. Ils peuvent aussi s’enregistrer sur la plateforme web et proposer des trajets, comme avec Blablacar. Se servir de la borne n’a rien de compliqué : le passager renseigne sa destination et est informé du nombre de véhicules susceptibles de le covoiturer et du temps d’attente estimé. L’appareil délivre un ticket ; le coût de

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la course – en moyenne de 14 km – est de quelques euros et même offert en phase de lancement. Le retour d’expérience est plus que positif : dans l’Ouest parisien, le nombre de covoiturés a augmenté de 80 % en un an et l’attente à chaque station n’est que de 13 minutes en moyenne et inférieur à 5 minutes sur certains sites. Après un premier tour de table de 1M€ bouclé l’an passé avec France Active et Mobiliz Invest (groupe Renault), Arnaud Bouffard et Thomas Matagne, les deux fondateurs d’ecov, viennent de lever 1,2 M€ auprès de la Caisse des Dépôts pour développer le réseau lancé au printemps 2016 dans les Yvelines et étendu depuis en Rhône-Alpes, puis en Provence. « La première étape est d’établir un diagnostic de covoiturabilité du territoire, explique Elsa Rosset, en charge de la communication. En fonction du résultat, nous mettons en place le service avec le concours des collectivités territoriales. » Ce sont ces derniè-

res qui le paient, mais pour un montant modique. Ainsi, celui déployé pour la COR a coûté 220 900 €, pris en charge à 50 % par le Feder, 30 % par le ministère de l’Écologie et seulement 20 % à la charge de la collectivité.« Nous avons calculé que Covoit’ici nous revient moins cher que notre service de transport à la demande (TAD) dès la sixième personne transportée par jour », précise Etienne Seguin, chargé de mission mobilité à la COR. Cette question de la mobilité, qui concerne les quelque 19 millions de Français vivant dans une zone blanche, sans transports collectifs, préoccupe en haut lieu, ce qui a amené la ministre des Transports Elisabeth Borne à évoquer lors des dernières Assises de la Mobilité la création de « taxis amateurs » pour les espaces ruraux. C’est en quelque sorte ce qu’expérimente Laurent Carcélès, un habitant du village de La Saucelle, dans le Perche eurélien. Depuis un an, il a lancé un service de transport en voiture électrique baptisé Les Libellules. Avec trois Renault Zoé, il effectue des courses de courte distance, dans un rayon d’une quarantaine de kilomètres autour de son village, mais reconnaît « qu’il est de plus en plus sollicité pour des distances plus longues ». Le prix est à peu près équivalent à celui d’un taxi (1,50 €/km), sauf en cas d’achat d’une carte d’abonnement mensuelle qui, pour 50 €, permet de réduire sensiblement le prix de la course. Le système fonctionne bien, 5 jours sur 7, et Les Libellules assurent désormais entre 20 et 30 courses chaque jour. FXB


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Points Chauds

Mobilités

ADP intéressé par

l’aéroport de Tours ? Et si Aéroports de Paris s’intéressait à l’aéroport de Tours ? L’idée n’est pas aussi saugrenue qu’elle en a l’air... En se projetant à vingt ou trente ans, le 2e gestionnaire européen de plateformes aéroportuaires explore des solutions de déconcentration de ses plateformes franciliennes. Et celle de Tours-Val de Loire, à 1 h 30 du cœur de Paris, pourrait être une solution...

C

omment l’aéroport de Tours peut-il survivre au départ de l’école de chasse, programmé pour 2020 ou 2021 ? Peut-être avec ses propres moyens, mais plus sûrement en s’adossant à un grand acteur du marché. Le groupe Aéroports de Paris (ADP) et sa filiale turque TAV Airports, 2e gestionnaire aéroportuaire européen avec ses 26 plateformes et les quelque 228 millions de passagers qui y transitent chaque année – dont plus de 100 millions pour les trois équipements franciliens (Roissy, Orly et Le Bourget) –, pourrait s’intéresser de près à quelques aéroports situés à une heure de Paris afin de déconcentrer, à terme, une partie du trafic parisien. Celui de Tours-Val de Loire, actuellement géré par la société Edeis – qui a repris fin 2016 les activités françaises du canadien SNC-Lavalin – figure dans la liste des plateformes susceptibles d’être examinées par ADP. Pourtant, alors que les aéroports français de taille comparable à l’équipement tourangeau ont connu des croissances fortes en 2017 (+ 13,3 %

pour Grenoble, + 6,2 % pour Limoges et un incroyable + 30 % pour Caen-Carpiquet, géré par la CCI locale), celui de Tours, qui occupe une modeste 34e place au plan national, a reculé de plus de 4 points, tombant à 190 000 passagers. Dans ses conditions, et avec la perspective du départ de l’école de chasse qui alourdira les charges d’environ 2 M€ par an, l’exploitant actuel devra très rapidement faire les preuves qu’il peut redresser le manche et retrouver la croissance. Ce ne sera vraisemblablement pas le cas en 2018 où, à fin mai, aucune nouvelle ligne n’était attendue. ADP pourrait-il être la solution ? « Un aéroport s’équilibre avec 800 000 passagers par an, explique ce bon connaisseur de l’aérien. En intégrant les subventions publiques et la prise en charge à venir des prestations aujourd’hui assurées par l’armée, Tours Val de Loire perd 3 à 4 M€ par an. Ce ne serait pas un gros problème pour ADP qui génère 1,6 Md€ d’Ebitda chaque année pour un CA de 3,6 Md€ (en hausse de 37 % au premier trimestre,

NDLR). Une perte minime, dans l’attente du jour où Tours atteindra l’équilibre. » Le gestionnaire devra renforcer le trafic civil, sans nuisance nouvelle puisque l’armée va libérer 70 000 mouvements aériens chaque année. Actuellement, Tours propose 4 allers-retours hebdomadaires vers Londres, 3 vers Porto et 2 vers Marseille, Marrakech et Dublin, plus les vols estivaux vers la Corse. Rien vers l’Espagne, l’Italie et l’Europe du Nord, ni l’est de la Méditerranée. Si Tours Métropole prolonge la ligne A du tramway de 700 ou 800 mètres entre le lycée Vaucanson et l’aérogare, celle-ci se trouvera alors à 24 minutes de la gare SNCF de Tours, elle-même à 1 h 07 de Montparnasse. Avec une augmentation annuelle de 7 %, le trafic aérien mondial, qui a dépassé les 4 milliards de passagers en 2017, devrait encore croître fortement d’ici à 2030 avec l’envie de voyager des classes moyennes, de plus en plus nombreuses dans les BRICS et les pays en voie de développement. Et la France, qui représente un peu plus de 4 % du marché mondial, va considérablement renforcer son trafic intérieur (32 millions de passagers en 2017, soit une augmentation de 3,5 % en un an). Tours, qui a laissé filer sous son nez les nouveaux TGV ParisBordeaux, ne peut pas se permettre de gâcher une nouvelle chance. François-Xavier Beuzon

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L’aéroport Orléans Loire-Valley

prend de l’altitude L’aéroport de St-Denis-de-l’Hôtel a rallongé sa piste et modifié son nom en Orléans Loire-Valley pour mieux s’inscrire dans la dynamique de la métropole orléanaise.

U

ne piste rallongée de 208 mètres pour un nouvel essor ! L’aéroport de St-Denis-de-l’Hôtel, rebaptisé opportunément aéroport Orléans Loire-Valley, peut désormais se prévaloir d’une piste de 1 600 mètres de long (contre 2 400 à Tours et 3 500 à Châteauroux), tandis qu’une rampe d’approche lumineuse de 720 mètres offrira aux pilotes des conditions optimales de sécurité à l’atterrissage. L’objectif de ces aménagements de 2 M€, portés essentiellement par le Département du Loiret, est double : satisfaire aux nouvelles normes de sécurité européennes et ouvrir l’aéroport à un trafic aérien plus dense, avec la possibilité de faire atterrir des avions pouvant transporter jusqu’à 100 passagers. « Parmi nos objectifs, il y a l’ouverture de lignes régulières mais pour cela il faut que l’on trouve des partenaires tels que la Région et la métropole », explique Jean-François Vassal, le directeur de l’aéroport. Quand on évoque avec lui une concurrence directe avec l’aéroport de Tours, Jean-François Vassal se fait prudent. Et réaliste. « Je ne suis pas dans cette logique. Nous ne pourrons

pas accueillir des Airbus Ryanair auxquels il faut une piste de 2 000 mètres. Nous voulons fournir aux habitants du Loiret des vols de qualité qui serviront les intérêts de la métropole d’Orléans. Je ne connais pas de métropole qui n’ait pas d’aéroport. » Même analyse de la part de Frédéric Néraud, vice-président du Département et président du syndicat mixte qui gère l’aéroport depuis trente ans. « Avec le projet CO’Met à Orléans – le futur équipement couplant parc des expos, salle de congrès et de sport, NDLR – il y a la perspective d’accueillir des congressistes en grand nombre et un tourisme d’affaires. Et puis, nous allons étudier sérieusement la possibilité de proposer des lignes régulières ou même saisonnières. (…) Nous avons des demandes fortes pour la Corse, les grandes villes du littoral méditerranéen, Marseille, Montpellier, Nice, etc. Nous n’excluons pas non plus les destinations du Nord, Amsterdam ou Londres. » L’allongement de la piste permet de faire atterrir et décoller des avions réservés aux voyages d’affaires ou de groupes, dont les Falcon de Dassault et les Q400

de Bombardier. « Nous allons offrir des conditions de sécurité qui sont celles des plus grands aéroports », se félicite Jean-François Vassal. Benoît Lonceint, à la tête d’une société de location d’avions depuis 2010, Air PME devenu Flighty.fr, salue « les équipements de tout premier plan de cet aéroport ». Le chef d’entreprise organise, depuis peu, des vols réguliers à destination de Lille, Lyon, Strasbourg, Bordeaux et Nantes à partir de plusieurs aéroports de la région. Et pour lui, pas de doute non plus, un nouvel horizon s’est bel et bien ouvert pour l’aéroport orAG léanais.

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Économie

Industrie

32 La Lettre Valloire - Juin 2018


CHIMIE

On ne prête qu’aux REACH Les fabricants de produits chimiques doivent se conformer depuis le 31 mai aux contraintes du règlement européen REACH. Celui-ci impose aux industriels d’enregistrer une très large gamme de produits après la réalisation de coûteuses et complexes études destinées à mesurer leur impact sur la santé humaine. Aussi louable soit-il, ce dispositif risque d’exposer les entreprises les plus modestes à de graves difficultés économiques.

L

e couperet est tombé ! C’est à la date du 31 mai 2018 que tous les acteurs du secteur de la chimie devaient se conformer au fameux règlement REACH qui oblige à ce que la quasi intégralité des substances chimiques utilisées, fabriquées ou importées sur le territoire européen, soient enregistrées auprès de l’Agence européenne des produits chimiques (Echa). Naturellement, la procédure ne s’apparente pas à une formalité administrative de routine : elle re-

quiert, bien au contraire, la réalisation d’études préalables complexes et coûteuses qui visent à évaluer la toxicité et l’impact de ces composants sur l’environnement et la santé humaine. L’objectif de ce dispositif très contraignant adopté en 2007 – après plusieurs années de féroce empoignade entre Bruxelles et différents lobbies industriels – est de forcer les producteurs à retirer du marché ou à trouver des produits de substitution aux matières les plus dangereuses, notamment les phtalates dans les plastiques, les

retardateurs de flammes bromés, ainsi que les composants cancérigènes, reprotoxiques et mutagènes. Et de transférer vers les producteurs et les importateurs le poids des dépenses liées à ces évaluations… « Le tamis est devenu beaucoup plus fin au fil du temps et de l’évolution de la réglementation, explique ce consultant spécialisé dans l’accompagnement des procédures d’enregistrement. Tout d’abord, ce sont les volumes de produits chimiques supérieurs à 1 000 tonnes La Lettre Valloire - Juin 2018 33


Économie

Industrie

Jean-Claude Maesano (Chryso)

qui ont été concernés par le dispositif, puis les volumes supérieurs à 100 tonnes. Et, in fine, la jauge a été abaissée à seulement une tonne en 2018. » Conséquence concrète, « des entreprises de taille modeste fabriquant des produits de niche dans de faibles quantités sont durement touchées par les mesures, explique Jean-Claude Maesano, président de l’Union régionale des industries chimiques (UIC) pour la région Centre-Val de Loire. Certes, on ne peut que souscrire au principe d’une évaluation de l’impact des produits chimiques sur la santé, mais la mise en œuvre de la réglementation par les pouvoirs publics devra tenir compte des spécificités et de certaines vulnérabilités économiques. » Pour un enregistrement et les études associées, le ticket varie en fonction des risques décelés et atteint parfois 150 000 €, voire 200 000 € par produit, calculent les industriels. La somme peut être mutualisée entre les différents opérateurs concernés « mais son montant ne dépend pas du tout des tonnages produits ou commercialisés ou du chiffre d’affaires », rappelle le président de l’UIC régionale, qui dirige aussi l’usine Chryso de Sermaises-du-Loiret (45), un fabricant d’adjuvants pour le bâtiment. « Une telle charge financière s’avère rédhibitoire pour les petites sociétés indépendantes de 34 La Lettre Valloire - Juin 2018

grands groupes, surtout si elles ne parviennent pas à partager la dépense avec d’autres fabricants. Elle peut conduire l’entreprise à renoncer à fabriquer le produit, même si celui-ci représente une part importante de sa facturation, plus de 30 % dans certains cas », s’inquiète Jean-Claude Maesano. Il redoute qu’une application trop rigoureuse de la loi projette quelques unes de la trentaine d’entreprises membres de l’UIC Centre-Val de Loire vers des difficultés : « Ce que nous craignons, c’est un effet domino : des sous-traitants risquent d’être privés d’une précieuse part de leurs ventes. Et des producteurs

composants chimiques différents, les dépenses liées aux procédures d’enregistrement se sont élevées depuis 2012 à 1,5 M€, rapportées à un CA d’environ 40 M€. Elles ont concerné une trentaine de produits : « C’est un montant très important que nous avons assumé, tout en procédant à une revue de détail de notre portefeuille. Ce qui nous a conduit à abandonner une centaine de fabrications marginales ou des commodités pour lesquelles le jeu ne valait pas la chandelle », nous indique ainsi Eric des Courières, le directeur des opérations du groupe : « On ne peut pas dire que REACH a compromis le modèle éco-

“ LA MISE EN ŒUVRE DE LA RÉGLEMENTATION PAR LES POUVOIRS PUBLICS DEVRA TENIR COMPTE DES SPÉCIFICITÉS ET DE CERTAINES VULNÉRABILITÉS ÉCONOMIQUES en amont de la chaîne utilisant des composants de niches seront exposés à des ruptures d’approvisionnement. » Bien sûr, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Pour les industriels s’appuyant sur une plus large gamme de produits, l’impact de la réglementation européenne sera plus facilement absorbé. Chez Synthron, à Château-Renault (37), une usine qui produit près de 135

nomique de l’entreprise ; le chiffre d’affaires perdu devrait être rattrapé par les ventes que nous générons avec d’autres produits même si la perte est réelle. » À la Stéarinerie Dubois (140 salariés, 66 M€ de CA), un fabricant d’esters gras mondialement connu et installé à Ciron (36), l’application de REACH a également conduit à une profonde remise en question : un tiers des 150 références concernées est passé à la

Axyntis innove en oncologie Le groupe de chimie fine Axyntis, qui vient d’engager à Pithiviers plus de 3 M€ dans différents projets d’investissements (cf. notre édition de décembre 2017), se positionne décidément à la pointe de l’innovation. D’ici trois à cinq ans, la société va installer sur ce site une unité de bioproduction qui sera dédiée à la fabrication de Vindoline, un alcaloïde entrant dans la composition d’anticancéreux, à partir d’une souche de levure. Jusqu’à présent, cette molécule était extraite d’une plante, la pervenche de Madagascar, cultivée en Inde et au Texas et dont l’extraction était coûteuse. Le projet se déroule dans le cadre d’une coopération 100 % régionale, puisque ce process a été développé par le laboratoire de recherches Biomolécules et Biotechnologies végétales de l’université de Tours. Et les techniciens de la future plateforme de bioproduction d’Axyntis seront, pour une large part, formés au sein de Bio3 Institute, le centre tourangeau de formation et de recherche sur les biomédicaments.


trappe. Il ne s’agit d’ailleurs pas forcément des substances les plus toxiques, « mais de petites fabrications pour lesquelles il n’était pas possible de supporter les dépenses administratives et d’analyse », estime-t-on à la Stéarinerie Dubois où l’on précise que d’importantes ressources ont été affectées à la substitution ou à la reformulation de plusieurs produits. David Simonnet, président d’Axyntis, un groupe qui exploite d’importantes capacités industrielles à Pithiviers (45), confirme que le montant de l’addition REACH n’est pas à prendre à la légère. Pour près de 400 dossiers enregistrés (50 % dans les colorants, 50 % dans la chimie), la facture s’est élevée à 6 M€ « dont la moitié cons-tituée par la mise à disposition de collaborateurs », nous indique le dirigeant, qui ajoute que « rapporté à notre chiffre d’affaires qui s’établit à 90 M€, il s’agit d’une dépense considérable représentant deux ans d’investissement ou une année de cash flow libre ».

Pour autant, David Simonnet ne voit pas que des inconvénients à la tatillonne réglementation européenne. « Certes, à court terme, ces dépenses risquent de pénaliser les entreprises, notamment les plus fragiles. Elles peuvent aussi avoir un effet négatif sur les politiques d’innovation mais l’ensemble du dispositif REACH constitue aussi des protections vis-à-vis de certains de

nos grands concurrents extra-européens », observe ce chantre de la relocalisation des activités de production chimique sur le Vieux continent. Le président d’Axyntis estime ainsi que REACH « contribue à réarmer l’Europe sur le plan normatif ». Les chimistes américains ou asiatiques, ainsi d’ailleurs que leurs distributeurs, n’ayant pas effectué les démarches d’enregistrement dans les délais requis ne pourront tout simplement plus produire ou exporter vers l’Europe. « Pour autant, il aurait été souhaitable de prévoir un accompagnement financier pour les acteurs les plus vulnérables », tempère JeanClaude Maesano. Le président de l’UIC Centre-Val de Loire espère que l’administration française fera preuve de mansuétude envers les retardataires, en accordant quelques délais pour ceux empêtrés dans les méandres de la réglementation.

David Simonnet (Axyntis) Jean-Christophe Savattier

La Lettre Valloire - Juin 2018 35


Économie

Industrie

Synthron a revu son

portefeuille de produits

La société tourangelle a dû supprimer près de cent produits de son catalogue, les coûts d’étude et d’enregistrement générés par REACH n’étant pas compatibles avec leur contribution économique. Cette réorganisation devrait être compensée par le développement organique et le lancement de nouveaux produits.

C

hez Synthron, à Auzouer-enTouraine, la mise en conformité avec le règlement REACH n’a pas été prise à la légère. « Nos équipes y travaillent depuis le début de la décennie», nous indique ainsi Éric des Courières, le directeur des opérations d’un groupe qui emploie une bonne centaine de salariés sur son site de Touraine. Si on ajoute les frais d’enregistrement et les études préalables indispensables à la qualification des produits, le motant du programme REACH s’est élevé à plus de 1,5 M€, rapporté à un CA d’environ 40 M€. Au-delà de l’importance de l’enveloppe, l’application très contraignante du dispositif a conduit le groupe à revoir de fond en comble son portefeuille de produits : « Au début du processus, notre catalogue comprenait 135 produits éligibles à REACH. Mais une très grande partie d’entre eux n’étaient fabriqués que dans de faibles volumes commerciaux ou constituaient des commodités intégrées dans d’autres fabrications. Les coûts unitaires générés par les enregistrements n’étaient pas compatibles avec leur contribution économique. » Au final, seulement 35 produits ont été enregistrés, ce qui a conduit le

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groupe à supprimer un bon nombre de références de son catalogue : « La grande majorité des productions conservées se situe dans la bande des 10 à 100 tonnes fabriquées », explique Éric des Courières. Tous les produits enregistrés auprès de

tamment ceux correspondant à la bande supérieure à une tonne : « Des petits producteurs, et des sous-traitants dans des métiers connexes comme celui des cosmétiques, sont pénalisés. Ils sont contraints d’abandonner la fabrication de compo-

“ LA RIGUEUR DES DISPOSITIONS EUROPÉENNES SUR CE SUJET PÉNALISE LES ETI l’agence européenne (Echa) l’ont été dans le cadre de consortiums regroupant d’autres fabricants, ce qui a naturellement permis de mutualiser les coûts : « Nous avons également trouvé dans certains cas des solutions de substitution, mais il y aura bien sûr in fine un impact réel sur notre chiffre d’affaires. Pour autant, les perspectives de développement de notre gamme et le lancement de nouveaux produits issus de notre centre d’études et d’innovation devrait nous permettre d’atténuer les conséquences de la réglementation. » Selon le directeur de l’usine auzouérienne, la réglementation REACH aurait sans doute gagné, « en dépit de son principe tout à fait légitime », à faire preuve de davantage de discernement pour les petit volumes, no-

sants chimiques qui ne comptent pas forcément parmi les plus compromettants pour la santé humaine.» Par ailleurs, « il paraît évident que la rigueur des dispositions européennes sur ce sujet pénalise les ETI en renchérissant leurs coûts. Elle impacte aussi les politiques de R&D ; il est aujourd’hui beaucoup plus facile de développer de nouveaux produits aux États-Unis, par exemple, qui ne sont pas impactés par une telle réglementation ». Pour autant, le contexte réglementaire ne dissuade par le dirigeant d’investir au profit de son site du nord-est tourangeau : celui-ci s’est doté d’un nouvel atelier de production exploité par Protavic International, une société du groupe spécialisée dans la chimie de l’électronique. Elle produit notamment des colles conductrices, ainsi que des résines UB à haute valeur ajoutée à base de silicone, époxy, acrylique, polyamide ou polyuréthane. Jean-Christophe Savattier


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Économie

Industrie

« C’est une vraie usine à gaz » Orrion Chemicals Orgaform, une PME installée dans la périphérie orléanaise, doit retracer l’origine et la conformité avec le référentiel REACH des composants chimiques qu’elle utilise pour ses productions. Une tâche jugée fastidieuse dont l’utilité ne convainc pas ses dirigeants.

« C’

est une vraie usine à gaz » : le jugement que Michel Rondeau, le responsable QEHS (QualitéEnvironnement-Hygiène-Sécurité) d’Orrion Chemicals Orgaform, porte sur REACH est lapidaire : « Quand nous achetons un mélange de produits chimiques, comment voulez-vous que l’on puisse établir sa traçabilité ? Le fabricant lui-même a acheté des produits à un autre fabricant européen ou à un importateur et cela ne relève pas de sa responsabilité de nous transmettre tous les numéros d’enregistrement REACH. Mais cela relève de la nôtre. » Pour autant, la nécessité de se conformer au règlement européen REACH n’a pas abouti à « une révolution », estime-t-on dans cette PME installée à Semoy, dans la périphérie orléanaise. Il ne pouvait pas en être autrement puisque l’entreprise ne produit pas directement de produits chimiques pour fabriquer ses différents adhésifs et ses multiples colles, destinés aussi bien aux industriels de l’automobile qu’à ceux de l’agroalimentaire. « Nous achetons auprès de four-

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nisseurs des produits chimiques que nous formulons et mélangeons. Nous ne produisons pas de molécules en propre, et à ce titre nous n’avons aucune déclaration à faire au titre de REACH », ex-

fait indispensable... « Quand les importateurs ont bien fait les choses, une fiche de sécurité en seize chapitres nous est transmise. Mais ce n’est malheureusement pas toujours le cas, et là, ça devient vrai-

“ DES CONSÉQUENCES IMMÉDIATES EN TERME DE TRACASSERIES ADMINISTRATIVES

plique Michel Rondeau. Si l’entrée en vigueur du dispositif n’a donc pas eu d’impact direct sur la production de l’usine, exception faite de l’obligation de supprimer les fameux phtalates des mélanges réalisés, elle a eu, en revanche, des conséquences immédiates en terme de tracasseries administratives particulièrement chronophages. « Nous devons nous assurer que les substances que nous achetons en dehors du marché européen sont bel et bien autorisées. Il nous faut obtenir les preuves documentées que nos fournisseurs ont bien déclaré leurs produits », poursuit Michel Rondeau qui confie que si l’étendue de cette tâche est énorme, elle ne lui semble pas tout à

ment très compliqué », souligne le responsable QEHS d’Orrion Chemicals. Pour un produit aussi courant que l’acétone, un véritable cas d’école selon notre interlocuteur, « on réclame auprès du fabricant européen ou de l’importa- teur le numéro d’enregistrement, mais il n’est pas aisé à obtenir ». Interrogé sur la contribution de REACH à la protection sanitaire des consommateurs, Michel Rondeau reste, là encore, très dubitatif. Pour lui, ce nouveau carcan réglementaire incarne ce que l’Europe a de moins reluisant pour nombre de Français : des contraintes à n’en plus finir… Anthony Gautier


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Économie

En bref

TERRA CERES VA CONSTRUIRE UNE USINE À CONTRES Spécialisée dans la production d’aliments bio et sans gluten, la jeune société Terra Cérès (800 000 €, 8 salariés), installée au sein de l’incubateur Food Val de Loire de Contres (41), va se doter de capacités industrielles. Son dirigeant Éric Blondeau nous confirme la construction d’une unité d’environ 2 200 m² sur l’Agro Parc de Contres, à proximité immédiate de ses locaux. Le financement sera assumé par les collectivités, l’ensemble du projet, tous types de dépenses confondus, représentant un montant de 4 M€. L’unité – qui suscitera la création d’une dizaine d’emplois sur dix-huit mois –, pourrait être opérationnelle au troisième trimestre 2019.

GARIOU RACHÈTE TOURAINE TRANSPORT Sébastien et Cyrille Gariou, avec Thierry Moreau, tous trois dirigeants et associés des Transports Gariou, installés au Brouzils (85), viennent de boucler l’acquisition de Touraine Transport, une PME de

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Parçay-Meslay, au nord de Tours, spécialisée dans le transport par plateaux. C’est en prévision du départ à la retraite de Christophe Patois, dirigeant de Touraine Transport (17 salariés pour 1,8 M€ de CA), que les Transports Gariou (70 salariés pour 8 M€ de CA) ont saisi cette opportunité.

IMPRIMIS SE REGROUPE À SARAN Le groupe Imprimis, constitué par Philippe Ravoire à la suite du rachat successif de Prévost Offset à St-Jeande-la-Ruelle, puis de BBV Imprimerie à Orléans, et plus récemment de Rotoprim à Ormes, opère un regroupement d’activités sur l’ancien site de

Docapost qu’il vient d’acquérir au 280 rue Marcel Paul, à Saran (45) : Imprimis dispose sur place de 1 100 m² couverts et pourrait prochainement étendre cette surface.

CLAAS S’INSTALLE À YMERAY Le groupe allemand de machinisme agricole Claas, qui possède un centre de formation au Coudray, près de Chartres, va s’implanter à Ymeray (28) pour y créer un pôle d’excellence où il regroupera son siège social – aujourd’hui à Fresnes (94) –, ses filiales distribution Claas Réseau Agricole et financement Claas Financial Services, ainsi qu’un centre de formation pour tracteurs, actuellement à Evreux (27). Claas a acquis 16 ha de terrain qui abritaient les locaux de l’ancienne carrosserie automobile Kirchhoff.


JOURDAIN S’ÉTEND À ESCRENNES

LES TRANSPORTS RAPITEAU À SORIGNY

L’entreprise Jourdain, un des leaders mondiaux du matériel de stabulation pour les animaux d’élevage, va encore s’agrandir à Escrennes, au nord de Pithiviers (45). Déjà déployée sur 14 ha, l’entreprise va déposer un permis de construire pour un nouveau bâtiment de 12 000 m², sur 16 ha de la ZAC Saint-Eutrope. Ce bâtiment, dont les travaux devraient démarrer début 2019, abritera une nouvelle société, baptisée J3 Prod, qui fabriquera des produits de la gamme Jourdain.

Les transports Rapiteau & Fils (140 salariés, 17 M€ de CA, près de 250 cartes grises), dont le siège est à Orignolles (17), ont acquis un terrain de 13 ha sur la zone d’activités Isoparc à Sorigny (37); ils viennent d’y engager la construction d’un bâtiment de 1 200 m². L’unité tourangelle, qui sera dédiée à l’activité de transports de lots sur palettes, emploiera à terme une dizaine de salariés.

APPRO SERVICE VEUT S’ÉTENDRE À FOSSE

Le logisticien Appro Service, une filiale du groupe Actura spécialisée dans l’agrofourniture, projette une extension de son site de Fossé (41) dont la surface de stockage couvre 30 000 m2 (divisée en 22 cellules) ; un nouvel entrepôt de 12 000 m2 classé Seveso doit être construit au nord du site.

LSDH INVESTIT MASSIVEMENT SUR SES SITES Le groupe La Laiterie de St-Denis-de-L’Hôtel (LSDH) a acquis 20 ha à Fay-aux-Loges (45) pour la construction de 30 000 m² dédiés au stockage à température ambiante en 2019. Au siège de St-Denis-de-l’Hôtel (45), plusieurs investissements sont programmés : la création en 2019 d’un centre d’extraction de 15 000 m² face à l’usine (20 M€), la construction d’un pôle de préparation et d’un atelier de stockage pour les produits frais de 12 000 m² et la création d’une ligne pour les bouteilles plastiques sans opercule cette année, suivie de deux autres en 2019 (20 M€). Parallèlement, à Châteauneuf-sur-Loire (45) où sont installées Les Crudettes, sa filiale spécialisée dans les salades sous vides, 15 000 m² seront construits en 2019 pour stocker et expédier les produits froids (20 M€) et une serre de 4 000 m² créée en juin pour cultiver des salades et des herbes aromatiques en propre. Les usines de Varennes-sur-Fouzon (36) et de Jus de fruits d’Alsace à Sarre-Union (67) bénéficieront de 10 M€ d’investissement chacune afin d’être optimisées.

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Économie

Objets connectés

SmartHome à la conquête de nouveaux marchés

Le tourangeau SmartHome, spécialisé dans les applications confortiques et domotiques, étoffe son offre et se lance à l’assaut des marchés professionnels. La spin-off d’HF Company vise notamment les segments du smart building et de la smart city.

Alexandre Chaverot, pdg de SmartHome

S

pin-off du groupe tourangeau d’électronique HF Company, SmartHome redouble d’audace. « Notre taille actuelle nous condamne à l’agilité et à l’innovation permanente », observe Alexandre Chaverot, le président de cette société entièrement dédiée à la confortique et à la domotique, qui a décidé de quitter Chambray-lès-Tours pour rejoindre le quartier des Deux-Lions, à Tours. « Sur ce marché de la domotique résidentielle, SmartHome fait figure de Petit Poucet face à des géants comme Somfy, Legrand ou Schneider ». Pourtant, ce gabarit modeste ne l’a pas empêchée de s’accaparer de parts de marché qu’elle défend avec pugnacité. «Nous sommes n°1 français du portail vidéo et n°2 de la motorisation de portails, derrière Som-

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fy », revendique Alexandre Chaverot. Fort de ces acquis, ce dernier souhaite franchir des étapes supplémentaires. Après avoir regroupé en début d’année les différentes sociétés du groupe (Avidsen, Extel et le site de vente en ligne Maisonic) dans une même structure SmartHome France (44 M€ de CA en 2017, 120 salariés), qui détient aussi les filiales espagnole, italienne et belge, le groupe tourangeau, créé en 2014, se lance à la conquête de nouveaux marchés. « Nous allons étoffer notre offre, qui compte plus de 1 100 références, avec des gammes très innovantes notamment dans le domaine de la purification de l’air et des robots tondeuses à gazon », annonce Alexandre Chaverot qui s’appuie sur un bureau d’études interne à l’origine de la plupart des produits commercialisés. Non content de couper l’herbe sous

le pied de ses concurrents, SmartHome projette aussi d’investir les marchés professionnels, tout particulièrement ceux ayant partie liée avec le smart building – c’est à dire la gestion intelligente du bâtiment – et la smart city, ou gestion intelligente de la ville. Cette double ambition va l’amener à recruter de nouveaux talents commerciaux et à nouer des partenariats avec des gestionnaires d’immeubles. Mais la grande affaire du moment, c’est bien sûr le déménagement de la société qui regroupe toutes ses activités sur un double plateau de 1 500 m2 dans le quartier d’affaires tourangeau des Deux-Lions. La transfert intervient après que la logistique a été externalisée à l’opérateur Staci : « À terme, le nouveau siège devrait compter 70 salariés », estime Alexandre Chaverot qui table sur un CA de JCS 60 M€ à l’horizon 2020.

Les ambitions d’Objetdomotique Installée au sein du site Mame, l’incubateur tourangeau des startups du numérique, la société Objetdomotique (5 salariés), spécialisée dans l’intégration d’applications de e-santé et de sécurité, veut passer à la vitesse supérieure. Créée en 2014 par Guillaume Tessier, le jeune pousse, qui vient d’accueillir une participation minoritaire de Groupama à son capital, devrait signer un accord de « soutien financier » avec la Région et Bpifrance, en contrepartie duquel elle s’engagerait à recruter une petite trentaine de salariés sur les deux ou trois prochaines années. Objetdomotique, forte des 800 000 € levés depuis sa création, a développé une offre paramétrable de solutions connectées de maintien à domicile des personnes âgées. La startup a également mis au point des applications de déclenchement d’alerte (intrusions, attentats) pouvant être déployées en milieu scolaire, et de façon générale dans les lieux recevant du public.


La Lettre Valloire - DĂŠcembre 2017 43


Économie

Objets connectés

Altyor met le cap

sur la Silicon Valley

Le spécialiste orléanais des objets connectés va ouvrir prochainement une agence à San Francisco. L’entreprise familiale, qui vient de faire l’objet d’une transmission père-fils, entend doubler son CA d’ici à 2020.

I

nstallé à St-Cyr-en-Val, au sud d’Orléans, le groupe Altyor (38 M€ de CA en 2017), qui revendique une place de leader sur le marché français des objets connectés, met le cap à l’Ouest. Son dirigeant Yanis Cottard, récent repreneur d’une entreprise fondée par son père il y a vingt-cinq ans, nous annonce l’ouverture prochaine d’une agence à San Francisco. Elle sera sans doute située au cœur de la Silicon Valley : « C’est La Mecque des objets connectés, explique-t-il. Une entreprise comme la nôtre se devait d’être présente sur ce marché. » Il est exact qu’avec 500 000 unités industrialisées en 2017, Altyor occupe une position prépondérante sur le secteur. Le modèle économique est fondé sur la conception en OEM (Original

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Equipment Manufacturer) de solutions connectées exploitées sous les couleurs des clients. « Le grand public ne connaît pas Altyor mais beaucoup d’utilisateurs d’objets connectés ont eu en mains un produit fabriqué par l’entreprise », indique le dirigeant. Parmi ses dernières réalisations figurent des solutions de maintien à domicile pour Europe Assistance, une application de porte-monnaie électronique dédiée aux enfants pour Docapost, ainsi qu’une solution de protection du domicile qui doit être commercialisée par Somfy Protect. « L’une de nos grandes forces, c’est la maîtrise de notre process industriel qui est très intégré », précise Yanis Cottard qui souligne que l’entreprise familiale a évolué de l’injection plastique, son métier d’origine, vers le numérique : « Aujourd’hui, nous contrôlons toutes les étapes de la chaîne de conception, de la fabrication des pièces plastiques et mécaniques jusqu’à l’électronique et aux architectures serveur. » La PMI orléanaise s’appuie sur des capacités industrielles offshore très si-

gnificatives : 170 de ses 240 salariés sont en effet localisés à Shanghai, « mais nous conservons la R&D et une partie du manufacturing à St-Cyr-enVal où nous pouvons nous appuyer sur 70 collaborateurs », complète son pdg. À court terme, l’agenda d’Altyor fait une large place à la réorganisation de la société dans la foulée de l’opération de transmission initiée en fin d’année dernière. À l’issue d’une opération accompagnée par Bpifrance et le fonds d’investissement Etoile ID (Crédit du Nord), tous deux désormais présents au tour de table, Yanis Cottard détient 38 % du capital au côté de quatre autres associés : « Nous avions déjà intégré deux sociétés sœurs, Technochina et PDCI, que j’avais créées avec Yannis Brun. Mais le dispositif manquait de clarté et de visibilité. Les participations sont désormais remontées dans une holding qui détient plusieurs filiales déclinant le nom et la marque Altyor. » Fort de ce regroupement, le dirigeant prévoit de doubler la CA d’ici à 2020. JCS


Minoteries Viron

se pose à Gellainville

Minoteries Viron pose une nouvelle brique de son développement avec le rachat prochain de l’ancien site Lego de Gellainville, près de Chartres, qui est appelé à regrouper ses activités logistiques, puis de formation.

L

e minotier chartrain, créateur au début des années quatrevingt-dix de la farine Rétrodor, va acquérir l’ancien site Lego de Gellainville, à côté de Chartres. Le projet, encore suspendu à la confirmation de la vente des locaux et de l’emprise foncière par la SPL Chartres Aménagement, qui en est le propriétaire depuis deux ans, consiste dans un premier temps à créer sur place une plateforme logistique. « La nouvelle réglementation et les difficultés de circuler en ville nous obligent à livrer de plus en plus souvent à nos clients la farine en sacs, et non plus en vrac par camions citerne », explique Alexandre Viron, pdg de l’entreprise familiale. En quelques années, la part du vrac dans les livraisons est passée de 75 % à 45%, les sacs de 25 kg l’ayant remplacée à due proportion. Cette évolution de la logistique rendait nécessaire l’acquisition d’entrepôts. Dès que le processus de vente sera finalisé, le nouvel occupant prendra possession des 5 000 m2 du bâtiment du Jardin d’Entreprises. « Nous le prendrons comme tel avant d’envi-

sager des travaux d’aménagement et d’automatisation », ajoute le pdg des Minoteries Viron dont l’outil de production s’appuie sur le moulin Lecomte, bâti sur une rive de l’Eure au Coudray, et sur le moulin de Saumeray, à côté de Bonneval. Le premier a été acheté par Edmond Viron, le grand-père d’Alexandre, en 1927. Dans un second temps, l’entreprise transfèrera du Coudray vers Gelainville l’École des Moulins Viron, un centre de formation destiné aux professionnels de la boulangerie et de la pâtisserie. Il délivre des formations techniques sur la fabrication des produits de panification, mais aussi liées à la vente, l’accueil et l’expérience client, au merchandising ou à la gestion d’un point de vente. « Nous allons pouvoir accueillir de plus grands groupes, notamment en provenance de l’étranger, ce que nous ne pouvions pas faire dans nos locaux actuels », se réjouit le chef d’entreprise. Enfin, dans un troisième et dernier temps, les anciens locaux de Lego – occupés un temps par ID Logistics avant que Chartres Métropole ne songe à en

faire un parc des expositions provisoire, idée abandonnée depuis – permettront de rapatrier de Luisant le personnel et le magasin de Boulanger Distribution, une société-sœur de Minoteries Veron qui vend, aux particuliers comme aux professionnels, des produits de base pour la boulangerie et la pâtisserie (sucre, crémerie, arômes, préparations, améliorants du pain...). Les Minoteries Viron, qui emploient 45 personnes à l’activité meunerie et une quinzaine pour le transport, affichent un CA d’environ 17 M€, tandis que Boulanger Distribution (une douzaine de salariés) réalise quelque 8 M€ de CA (chiffres 2016). FXB

Le moulin Lecomte est bâti sur une rive de l’Eure au Coudray, près de Chartres.

La Lettre Valloire - Juin 2018 45


Économie

Industrie

Nouveau développement pour TPC La Scop TPC, qui exerce plusieurs métiers dans la sous-traitance industrielle, va ouvrir une nouvelle unité à Saran, au nord d’Orléans.

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onfrontée à un important développement, la société coopérative ouvrière de production (Scop) TPC, installée à St-Jean-deBraye et Amilly (45) ainsi qu’à Nogentle-Rotrou (28), va ouvrir une nouvelle unité sur Pôle 45 à Saran, au nord d’Orléans ; elle vient, en effet, d’y acheter 10 000 m² de locaux qui étaient exploités par les transpor-

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teurs logisticiens Deret, Geodis et Alliance Healthcare Répartition. Spécialisée dans le conditionnement à façon, la transformation agroalimentaire, l’externalisation de services administratifs et le montage, le câblage et l’assemblage mécanique, la société, à l’origine abraysienne, entend développer sur ce nouveau site des capacités de stockage et des activités de préparation de commandes qui connaissent un important développement. TPC, qui a obtenu le statut d’entreprise adaptée pour ses activités orléanaises, envisage d’employer à Saran près de 80 salariés dont une part importante constituée par des transferts de postes de travail déjà créés et accueillis dans des locaux secondaires provisoirement loués.

Les dirigeants envisagent d’installer dès cet été deux premières cellules de production sur le site de Pôle 45, puis d’attendre le départ complet du répartiteur pharmaceutique Alliance Healthcare pour finaliser l’installation ; des travaux d’aménagement seront réalisés dans cet intervalle. TPC est la composante principale du groupement coopératif Calice – un statut instauré par la loi ESS du 31 juillet 2014 – créé il y a deux ans à l’occasion de l’acquisition du fabricant eurélien de ressorts Sefard, qui emploie une cinquantaine de personnes ; l’ensemble constitué par Calice emploie aujourd’hui au total plus de 230 salariés, dont 213 associés, pour un CA de l’ordre de 15 M€. Jean-Christophe Savattier


La roue tourne pour AR Industries C’est le soulagement à Diors, près de Châteauroux, après la reprise par Liberty House du fabricant de jantes automobiles en aluminium AR Industries, sous procédure de sauvegarde depuis janvier dernier.

D

es deux potentiels repreneurs d’AR Industries (Liberty House, filiale du groupe britannique Gupta family group – ou GFG – fondé par les frères Ajay, Atul et Rajesh Gupta, et le chinois Citic Dicastal), seul le premier nommé a déposé une offre ferme, validée par le tribunal de commerce d’Orléans le 29 mai avec prise d’effet au 1er juin. Menées sous l’égide du ministère de l’Économie et des Finances, les négociations avec Renault-Nissan et le groupe PSA, les donneurs d’ordre d’AR Industries, ont abouti à un volume de commandes garanti d’un million de roues par an jusqu’en 2020, ce qui était une condition sine qua non du rachat ; au final, 348 des 376 salariés du site sont conservés.

GFG a repris en début d’année l’usine d’aluminium Rio Tinto de Dunkerque, principal fournisseur de matières premières d’AR Industries. En tablant sur les synergies entre les deux sociétés, Liberty House espère concurrencer les poids lourds du secteur, comme le chinois Dicastal, et développer le portefeuille de clients du site berrichon. « Des contacts ont déjà été pris et des visites sont programmées. Pour autant, nous savons que, comme les processus de qualification et les essais prennent beaucoup de temps, il n’y aura pas de volumes significatifs de la part de nouveaux constructeurs d’ici à 2020. À plus long terme, l’objectif est de revenir à 1,5, voire 1,8 million de roues produites », explique Philippe

Baudon, le nouveau directeur d’AR Industrie. Pour remettre à niveau l’outil industriel, l’entreprise bénéficiera d’investissements importants sur trois ans (1,4 M€ en 2018, puis 2 M€ en 2019 et 2020). Cela lui permettra de gagner en productivité, en qualité, en sécurité et aussi en respect de l’environSerge Daniel nement.

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Économie

Social

Harmonie Mutuelle soigne le La mutuelle régionale s’engage dans le bien-être au travail en proposant des séances sportives régulières à ses salariés et en développant du télétravail.

J

oignant le geste à la parole, c’est à califourchon sur de gros ballons d’exercice orange que les responsables régionaux d’Harmonie Mutuelle ont posé après avoir présenté leur dispositif de bien-être au travail. Une façon symbolique de montrer l’engagement de l’entreprise pour soigner le capital santé de ses collaborateurs. « Notre métier, c’est la santé de façon globale, qu’il s’agisse de prévention, de remboursements de soins ou de prévoyance. Il est donc normal que nous prenions aussi en compte la santé de nos propres collaborateurs», explique Virginie Malnoy, la directrice régionale d’Harmonie Mutuelle.

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Ayant son siège à Orléans, la direction régionale couvre un vaste territoire formé par les régions Centre-Val de Loire, Île-de-France et Hauts-deFrance. Depuis février dernier, sur le périmètre de la région Centre-Val de Loire, Harmonie Mutuelle propose à ses salariés de s’adonner à des activités sportives régulières. Au préalable, une enquête a été réalisée auprès de 740 collaborateurs afin de connaître les sports qu’ils souhaiteraient pratiquer. La relaxation et le renforcement musculaire arrivent en tête des attentes, juste avant la course à pied. Sur trois sites, à Orléans, Tours et Bourges, des séances d’activité spor-

tive sont organisées deux fois par semaine pendant une heure, soit pendant la pause déjeuner, soit en fin de journée. Au total, 90 personnes suivent actuellement ce programme qui est testé pour une période de six mois, les frais étant pris en charge par l’entreprise. Pour piloter cette tonique opération, Harmonie Mutuelle a fait appel à un coach sportif orléanais, Nordine Attab, un ancien préparateur physique d’Orléans Loiret Basket qui intervient dans ”Le magazine de la santé“ de Michel Symes sur France 5. « Le premier objectif, explique-t-il, c’est de vaincre la peur du mot sport. Ensuite, il faut aider chacun à prendre con-


capital santé de ses salariés science de son corps et parvenir à libérer les tensions que provoque la position assise sur une chaise pendant de longues heures. » À base d’exercices de cardio training, les séances s’ouvrent progressivement sur une initiation à la course à pied. Il est question de constituer une équipe de collaborateurs pour disputer les 10 et 20 km de Tours, un type d’épreuves que la mutuelle sponsorise largement sur son territoire. Une autre façon de préserver la santé de ses salariés consiste à leur proposer des conditions de travail plus épanouissantes. C’est l’objet de l’accord expérimental en faveur du développement des nouveaux modes de travail signé par l’ensemble des organisations syndicales d’Harmonie Mutuelle. La direction régionale d’Orléans tient un rôle pilote dans cette ex-

périmentation du télétravail et du travail nomade avec 700 collaborateurs volontaires sur les 1 400 au niveau national. En utilisant un équipement informatique et des systèmes sécurisés fournis par l’entreprise, les salariés peuvent travailler à domicile jusqu’à deux jours par semaine. Le travail nomade concerne, lui, les collaborateurs disposant d’une grande autonomie et pouvant exercer leur activité en différents lieux. « En favorisant un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, le télétravail représente une bonne solution d’épanouissement personnel, estime Thomas Coutanceau, le directeur des ressources humaines. Par la suite, l’expérimentation pourrait être portée à 30% de l’effectif, avant d’être généralisée en fonction des résultats. » L’accord intègre

également un « droit à la déconnexion » qui passe par une charte du bon usage des mails et des alertes en cas d’empiètement sur les horaires de la vie privée. Bruno Villeneuve

Prêts pour l’exercice (de gauche à droite) Virginie Malnoy, directrice régionale, Thomas Coutanceau, DRH, Magali Blanchet, responsable communication, et Nordine Attab, coach sportif.

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Économie

Culture et Tourisme

Évadez-vous avec

les escape games !

Imaginez-vous enfermé dans une pièce dont vous ne pourrez sortir qu’en résolvant une énigme, après avoir découvert des indices scellés dans des coffres cadenassés… Vous avez une heure pour réussir ! Voici le principe des escape games, ces jeux d’évasion qui font fureur. Les sites touristiques du Val de Loire y ont vu une occasion unique de renforcer leur attractivité en redonnant le goût de l’histoire à leurs visiteurs.

«E

n décembre 1588, le roi Henri III prépare l'assassinat du duc de Guise. Il convoque une poignée de ses fidèles dans une pièce du château tenue secrète. Le roi confie à chacun d'eux une partie de son plan et leur demande de garder le secret scellé sous clef... Votre mission sera d'infiltrer les partisans du roi pour tenter de déjouer ce guet-apens, il ne vous reste que 60 minutes... » : Voici le point de départ de l’escape game – ou jeu d’évasion en français – proposé cette année au château de Blois par la société tourangelle Escape Time. Pour une vingtaine d’euros par personne – comprenant le ticket d’entrée au château, plus l’accès à la pièce – les joueurs doivent résoudre l’énigme, sous la houlette d’un maître du jeu cos-

« À la conquête de l’empire », nouvel Escape Game du château royal d’Amboise

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tumé qui peut les guider et leur fournir des indices en cas de besoin. La formule a permis au jeu d’Escape Time d’être élu « meilleur escape game de la région Centre-Val de Loire » en 2017. Cette année, la société est également

d’Amboise qu’elle a créé une nouvelle énigme baptisée « À la conquête de l’empire, alliances et trahisons ». Jouée dans une pièce à l’étage du château à partir du 15 juillet prochain, elle se déroule fictivement sous le règne de

“ SON ESCAPE GAME A PERMIS À LA FORTERESSE DE CHINON D’ENREGISTRER UNE HAUSSE DE FRÉQUENTATION DE 3 % ENTRE 2016 ET 2017 devenue partenaire de la forteresse royale de Chinon, propriété du conseil départemental d’Indre-et-Loire, avec une énigme consacrée à Jeanne d’Arc dont elle a l’exploitation pour vingtquatre mois. Depuis deux ans, le site chinonais a pu tester les retombées positives de ces jeux d’évasion nés au Japon il y a une douzaine d’années puisqu’il proposait déjà « Le secret de Richard Cœur de Lion », une énigme grandeur nature menée dans l'une des tours habituellement fermée au public ; elle lui a permis d’enregistrer une hausse de fréquentation de 3 % entre 2016 et 2017. Pour le créer, la forteresse avait fait appel au tourangeau Escape Yourself, leader du marché de l’escape game en France avec ses 6 M€ de CA, qui a franchisé sa formule sur une vingtaine de sites, comme Chartres, Rennes ou La Rochelle et bientôt Orléans et Bourges. Après Chinon et l’abbaye royale de Fontevraud, Escape Yourself est remontée le long de la Loire puisque, cette année, c’est pour le château

François Ier ; l’espace de jeu compris entre 20 et 30 m² permettra d’ac- cueillir 4 à 5 sessions (de 2 à 6 personnes) par jour, invitant les joueurs à endosser les habits d’enquêteur du roi pour percer les secrets d’une intrigue mêlant histoire et géopolitique. Pour permettre d’élargir la clientèle aux visiteurs étrangers, certains sites comme Amboise et Chinon proposent aussi des séances de jeu en anglais. L’animation des salles est en général assurée par le personnel des sites. Escape Yourself propose ainsi une formation aux employés des monuments ; le château de Blois a, quant à lui, fait le choix de faire appel à des comédiens professionnels pour assurer l’animation de sa salle. Avec la célébration des 500 ans de la Renaissance en Centre-Val de Loire, nul doute que d’autres sites régionaux seront séduits par le principe de ces jeux d’évasion qui permettent de façon ludique de (re)découvrir un lieu et son histoire. Aurélie Vouteau


La sculpture dans tous ses états Présentée au musée des Beaux-Arts de Tours jusqu'au 10 septembre, l’exposition Sculpturoscope est le fruit d’une coopération entre un laboratoire d’informatique et des historiens de l’art de l’université de Tours. Une rencontre étonnante entre la statuaire de la Renaissance et le numérique.

C’

est un projet de recherche mené par deux laboratoires universitaires et le musée des Beaux-Arts de Tours qui est à l’origine de l’exposition Sculpturoscope, visible dans l’ancien Palais des Archevêques jusqu’au 10 septembre. À un an de la grande célébration de la Renaissance en Val de Loire, ce groupe associant les informaticiens du Lifat et les chercheurs du Centre d’études supérieures de la Renaissance (CESR) a choisi de décrypter le thème de la Vierge à l’Enfant grâce aux technologies numériques. Dans la lignée des grandes œuvres picturales de la Renaissance italienne (Vinci, Botticelli, Raphaël), le Val de Loire est devenu au premier tiers du XVIe siècle le berceau d’un art sculptural dédié à ce symbole de la douceur, magnifié par les artistes du Quattrocento. Des maîtres comme Michel Colombe (né à Bourges vers 1430 et mort à Tours en 1515), son neveu et élève Guillaume Régnault ou l’italien Giro-

lamo Pacchiarotti, qui a exercé son art à Tours de 1498 à 1532 sous le nom de Jérôme Pacherot, ont laissé des sculptures d’une grande finesse représentant Marie et Jésus. Près de cinq siècles plus tard, l’ordinateur sublime le ciseau du sculpteur. Ainsi, à partir de plusieurs vestiges d’une grande Vierge à l’Enfant extraits des ruines de l’ancien couvent des Carmes, rue des Tanneurs à Tours, l’interface Point-It projette sur l’œuvre son histoire, son iconographie et ses couleurs d’origine : la robe blanche de la Vierge, son manteau cyan, son voile et la tunique de l’enfant bleu outremer. Plus loin, une délicate Vierge à l’Enfant en terre cuite, trouvée en 1869 dans l’ancien cimetière de Blois, a été passée au scanner X. Grâce aux images obtenues, le visiteur peut manipuler virtuellement sur écran cette petite statue haute de 80 cm, en la tournant dans tous les sens pour s’imprégner du raffinement de sa coiffe et des plis de sa robe. Et que

dire, dans la première salle de l’exposition, de cette petite Vierge d’Ivoyle-Pré, reproduite en 3D pour que le visiteur puisse la toucher, la soulever et ainsi en apprécier la forme et le poids… cinq siècles après sa création. FXB

Richelieu met Chinon à une portée de pédale Une voie verte, exclusivement réservée aux piétons et aux cyclistes, a été aménagée sur le tracé de l’ancienne ligne ferroviaire reliant Richelieu à Chinon. Les collectivités veulent en faire un axe touristique majeur.

L

es quelque 20 km séparant Richelieu du quartier Saint-Lazare à Chinon ont été transformés, au prix de lourds travaux (4 M€ investis), en une voie verte réservée aux piétons et aux cyclotouristes. Le long du parcours, quatre anciennes gares ont été rénovées pour accueillir des touristes qui auront aussi à leur disposition

cinq stations thématiques, consacrées à la gastronomie, à la faune et à la flore, à Rabelais, au patrimoine et, ce qui coule de source en s’approchant de Chinon, à l’œnologie et à la viticulture. Un site internet et une application dédiée, en cours de développement, complèteront l’information.

Ce trajet, relié à cinq boucles cyclotouristiques dont la Loire à Vélo, permet d’accéder à quelques joyaux du patrimoine de ce coin de Touraine : le château du Rivau, la chapelle de Champigny-sur-Veude, la collégiale de Fay-la-Vineuse ou le village de Crissay-sur-Manse. FXB

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Économie

Culture et Tourisme

Le Monte Carlo des Vendômois Le rallye automobile Le Vendôme a connu un beau succès les 11, 12 et 13 mai derniers. Partis de la Place Vendôme, 41 véhicules d’époque ont sillonné la campagne jusqu’à... Vendôme et assuré la promotion du territoire.

C

oup d’essai réussi. « Le double objectif de promouvoir les voitures d’époque et le tourisme est atteint», explique Philippe Plantier, président de l’association Valve (Villes Accueillant en Liberté les Véhicules d'Époque). L’idée de partir de la célèbre place Vendôme, au cœur de Paris, pour rejoindre... Vendôme et les bords du Loir a séduit 41 possesseurs de véhicules d’époque, populaires ou prestigieux. Les partenaires ont tous salué les retombées du rallye. Outre l’impact médiatique sur les réseaux sociaux, les retombées économiques sont réelles, la dépense directe étant estimée à 100 000 € sur quatre jours. Quant à l’image de marque, elle sort renforcée,

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en particulier à Paris, où la Ville avait planté son barnum pour communiquer. Quelque 5 000 personnes ont ainsi pu découvrir les richesses du Vendômois en présence d’ambassadeurs de la marque. « C’est une belle promotion pour le Vendômois qui entend jouer la carte du tourisme avec sa marque Vendôme bien plus qu’une place », se félicitait le maire Pascal Brindeau. Même satisfaction pour Christian Hallouin, président de l’office de tourisme du Pays de Vendôme : « Les retombées sont réelles pour les hôteliers et restaurateurs, ou bien des sites touristiques comme la Commanderie d’Arville. L’événement colle à la stratégie de l’office de cibler une clientèle

parisienne, susceptible de passer au moins deux nuits en Vendômois. » Dominique Berrurier, gérante de l’hôtel*** Le Vendôme, souligne « une source de revenus pour l’économie locale », tandis que Jean-François Jolly, au volant de sa superbe Triumph TR3, se disait ravi de son escapade. Jean-Luc Vezon


L’union des châtelains fait la force Pour prendre le sillage des célèbres monuments appartenant au patrimoine touristique et culturel ligérien, cinq “petits” châteaux du Loir-et-Cher ont fait cause commune.

«E

nsemble, nous sommes plus forts », se sont persuadés cinq “petits” châteaux du Loir-et-Cher. Deux d’entre eux appartiennent au Centre des monuments nationaux, donc à l’État (Fougères-sur-Bièvre et Talcy), trois sont privés (Beauregard, Troussay et Villesavin), mais tous ont la particularité d’être proches l’un de l’autre et d’avoir des fréquentations (6 000 à 35 000 visiteurs par an) très éloignées des chiffres des célèbres monuments voisins, Chambord et son million de visiteur en 2017, Cheverny, Chaumont-sur-Loire et Blois qui dépassent tous les 300 000 visiteurs. Avec le soutien de l’office de tourisme de Blois Chambord-Val de Loire, les cinq sites proposent pour la deuxième

année consécutive un pass petits châteaux à 34 € pour toute la saison. Le pass est disponible sur place, mais aussi dans les points d’information des quatre grands châteaux précités qui ont donc accepté de jouer le jeu de la solidarité territoriale. L’an passé, les sites avaient déjà mené une première campagne d’affichage sur le Val de Loire avec pour accroche : « Nos petits châteaux ont du caractère ». Les 23 et 24 mai derniers, une journée porte ouverte a

été organisée à destination des hébergeurs afin de faire mieux connaître ce patrimoine un peu à l’écart des grands circuits touristiques. Dans chacun de ces cinq châteaux, une signalétique présentera les quatre autres. « Bien souvent, on nous demande si d’autres petits châteaux de ce type sont ouverts à la visite, c’est un peu comme un privilège pour les visiteurs d’accéder à une propriété privée », conclut l’un des propriétaires. FXB

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Carnet

blésoise de Cadbury-Schweppes pendant huit ans.

LOIRET Anne-Lise Grosmougin a été nommée directrice du site giennois du fabricant d’ascenseurs Otis ; elle succède à Fabienne Loréal qui devient directrice exécutive de la fabrication et de la chaîne d’approvisionnement d’Otis Americas. Diplômée de l’Insa de Lyon et titulaire d’un master en génie mécanique de la Wayne State University (Michigan), Anne-Lise Grosmougin a débuté sa carrière aux États-Unis en 1995 chez Detroit Diesel Corporation puis chez General Motors avant de rejoindre Otis en 2007.

RÉGION Le 15 mars dernier, Edith Chatelais a pris ses nouvelles fonctions de secrétaire générale aux affaires régionales (SGAR) de la région Centre-Val de Loire. Âgée de 57 ans, Edith Chatelais a accédé au corps des administrateurs civils en 2007, avant de suivre le cycle supérieur de perfectionnement des administrateurs civils à l’Ena et d’effectuer son stage au SGAR de Martinique.

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EURE-ET-LOIR Le groupe B. Braun, spécialisé dans la fabrication de dispositifs médicaux, a nommé Yann Quéré au poste de directeur de son site de Nogent-le-Rotrou. Avec plus de 500 salariés, cette usine est la plus importante du groupe sur le territoire. Ingénieur généraliste, Yann Quéré exerçait la fonction de directeur des opérations de St-Michel Biscuits après avoir dirigé les opérations de l’usine

LOIR-ET-CHER Mathieu Lheriteau deviendra au 1er août directeur général des services d’Agglopolys, la communauté d’agglomération de Blois ; il succède à Alain Farine, qui a quitté son poste en début d’année pour la Haute-Savoie où il occupe les mêmes fonctions pour la communauté d’agglomération d’Annemasse (74). Mathieu Lheriteau était jusqu’à présent directeur général des services de la Ville de Noisy-le-Grand (93), une commune de l’est parisien de 65 000 habitants.

LOIRET Le président de la société Redex de Ferrières-en-Gâtinais Bruno Grandjean, également à la tête de la Fédération des industries mécaniques (FIM), a été élu à la présidence de l’Alliance pour l’industrie du futur (AIF). Il succède au président d’Arcelor-Mittal France Philippe Darmayan. Créée en 2015, l'AIF est une plateforme de collaboration entre les acteurs de la recherche, de l'enseignement, les entreprises industrielles françaises et des acteurs du financement d’entreprises. La présidente du directoire de la Caisse d’Épargne Loire-Centre Nicole Etchegoïnberry a été élue présidente du conseil de développement d’Orléans Métropole. Créé en 2003, ce dernier est constitué de membres issus des milieux économiques, sociaux, culturels, éducatifs, scientifiques, environnementaux et associatifs.


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