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MAGAZINE SEPTEMBRE 2015 - 5 €

Des initiatives pour enrayer

le déclin régional Éric Massé (Initiative Indre)

Avec l’avènement de la smart city, la ville intelligente prend ses quartiers



Point de vue

Risque de relégation a région Centre-Val de Loire a perdu de sa superbe au cours des dernières années. Son tissu industriel s’est largement délité, probablement plus rapidement qu’ailleurs en dépit de ce que laisse entendre la légende officielle, et la montée en puissance des activités de service n’a pas compensé cette saignée. L’axe ligérien, moteur de la bonne santé économique d’antan, n’a aujourd’hui plus la force d’entraîner un territoire passé, depuis la dernière réforme, du statut de grande région à celui de petite ! Le spectre de la relégation rôde. Les racines de cette désescalade ne sont que partiellement d’ordre macro-économique. La comparaison avec les territoires voisins devrait inciter les décideurs à s’interroger sur la qualité des politiques menées depuis une vingtaine d’années. Comme l’illustre le dossier que nous consacrons ci-après au sujet, le saupoudrage des aides publiques et la complexité de leurs règles d’attribution n’adressent pas un bon signal aux entrepreneurs. D’autant que ce soutien reste conditionné à l’humeur versatile du courant écologiste de la majorité en place, en butte, ici comme ailleurs, à des « dérives sectaires », comme le regrettaient récemment des élus EELV sur le point de quitter le rafiot écolo.

L

Le gâchis est d’autant plus rageant que ce territoire ne manque pas d’atouts, dans le domaine de la cosmétique, des industries de la santé, de la sous-traitance aéronautique, des activités numériques et des énergies renouvelables. Les créateurs locaux de richesse, qui ne réclament pas un big bang, se contenteraient de la levée de quelques entraves, de la simplification des dispositifs et de témoignages d’empathie. Comme le démontrent chaque jour Initiative Indre et sa Boutique de Gestion, un modèle souple d’appui public, fondé sur l’intelligence collective et une culture de réseau, peut dynamiser un territoire… en faisant preuve de frugalité dans la consommation des deniers publics. On ne saurait trop recommander aux collectivités qui revendiquent la responsabilité du développement économique de s’inspirer de cette démarche collaborative. « Le poisson pourrit par la tête » : commentant cet adage, Érasme disait qu’il « concernait les mauvais princes dont la contagion infecte le reste de leur peuple ». En effet, lorsque le chef d’orchestre vacille, ce sont les meilleurs violons qui perdent la mesure.

avattier Jean−Christophe S


12-13

www.lettrevalloire.com Ce magazine est un hors-série de La Lettre Valloire, bimensuel d’information politique et économique en région Centre. Édité par MCM Presse SAS au capital de 160 000 € RCS Tours B 450 613 591 Siège social : 14, boulevard Heurteloup à Tours Adresse postale : BP 92031 37020 Tours Cedex 1 02 47 70 60 00 contact@lettrevalloire.com Rédaction : François-Xavier Beuzon (rédacteur en chef) Jean-Christophe Savattier (rédacteur en chef adjoint) Aurélie Vouteau (édition)

Éric Massé

Points Chauds 6-7

En Bref L’actualité du trimestre en bref.

8-9

La région Centre-Val de Loire proche de la relégation Délaissée lors de la réforme de l’organisation territoriale, frappée par une désindustrialisation massive, la région Centre-Val de Loire est entraînée dans une spirale de déclin.

Ont participé à ce numéro : Jacques Huguenin Stéphane Messer Stéphanie Payssan Bruno Villeneuve Maquette : Régis Beaune

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À LA UNE

Diffusion : Nadine Gomès Crédits photographiques : Cyril Chigot : Une, 30, 41 DR : 10, 11, 16, 18, 19, 21, 24, 25, 28, 29, 32, 34, 35, 36, 38, 49, 50 Stéphanie Payssan : 12, 40 Jean-Christophe Savattier : 20, 22 Stéphane Messer : 26 Jacques Huguenin : 44, 45, 46, 47 Bruno Villeneuve : 48 Éric Sander : 49

La collectivité régionale aura, dès la nouvelle mandature, des moyens accrus d’intervention économique. Concentrer les structures et simplifier les règles d’attribution devront être au cœur de son action.

Impression : Imprimerie Vincent, Tours (37) 12-13

Éric Massé : Initiative Indre et les BGE, un appui aux entrepreneurs Les Boutiques de Gestion de l’Indre et du Cher sont un exemple à suivre : à trois ans, le taux de survie des entreprises créées avec leur soutien dépasse 90 %, contre 66 % habituellement.

14

Les fonds européens en poche restante ? La programmation 2014-2020 des crédits européens du Feder et du FSE va-t-elle s’enliser dans les méandres de l’administration régionale ?

CPPAP : 0116 I 85872 ISSN : 1246-4333 Dépôt légal : septembre 2015 Directeur de la publication : François-Xavier Beuzon

MCM presse 4 La Lettre Valloire - Septembre 2015

Les Départements vont laisser le développement à d’autres

Le 1er janvier 2017, les Départements ne pourront plus financer leurs agences de développement, sauf à contractualiser avec la Région.

Les conditions du rebond de l’économie régionale

Publicité : François Xavier Beuzon

Informations légales : Abonnement annuel 2015 (23 numéros + magazines hors-séries) : 365 € Abonnement électronique avec édition bihebdomadaire : 465 € Prix de ce numéro : 5 €

16-18

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Montoire fait de la résistance Le conseil municipal de Montoire (41) refuse d’augmenter les impôts locaux pour rembourser un emprunt toxique contracté en 2007.

20-21

La filière porcine : circuit court ou court-circuit ? Malgré les difficultés, certains éleveurs de porc passent l’orage en misant sur le développement des circuits commerciaux de proximité.

22

Jean-Claude Galland mène la ferme familiale à bon porc Illustration du bien-fondé des circuits courts, la ferme des Bournaîchères, à Betz-le-Château (37), vend le tiers de sa production en direct.


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Sommaire

SEPTEMBRE 2015

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Économie 24-25

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Des toits végétalisés… et connectés La société Le Prieuré a inventé une toiture végétalisée connectée qui permet de mieux gérer la ressource en eau.

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SigrenEa connecte la collecte des déchets L’entreprise orléanaise SigrenEa développe une solution connectée pour optimiser la collecte des déchets.

La ville intelligente prend ses quartiers 30-31

32

Afin de mieux gérer leurs ressources et leurs équipements, les collectivités locales fondent beaucoup d’espoirs sur des applications numériques et connectées. Avènement de la smart city, ces solutions peuvent s’appliquer à la majorité des fonctionnalités urbaines. 26

Rambouillet va expérimenter les voitures autonomes Rambouillet Territoires, dans les Yvelines, avance des pions pour devenir le terrain d’expérimentation des objets connectés roulants.

Le Vendômois en mode énergie positive On peut être en zone rurale et se préoccuper de maîtrise de l’énergie. Le Pays Vendômois en fournit la preuve.

French Tech Loire Valley : et maintenant ? Après l’échec de leur candidature commune, les promoteurs de la French Tech Loire Valley comptent bien persévérer. MediaSize modernise les taxis La start-up MediaSize installe des écrans interactifs dans les taxis pour fournir des services digitaux à leurs clients.

34-35

En Bref L’actualité du trimestre.

36

Sephora et Caudalie se redéploient sur Orléans Caudalie et Sephora vont lancer des programmes d’extension de leurs installations, respectivement à Gidy et à Saran.

38

Il veut redonner tout son lustre à la faïence de Gien Après avoir redressé Biotherm, Cacharel et Lacoste, Pascal d’Halluin a repris la faïencerie de Gien.

40

Cizeta joue la carte de l’innovation Spécialisée dans les bas de contention et la phlébologie, l’entreprise saint-amandoise a quadruplé ses ventes en cinq ans.

41

Duvivier & Associés prend ses aises Le cabinet d’avocats Duvivier & Associés vient d’emménager boulevard Béranger, à Tours, pour poursuivre son développement.

42

Les chantiers Les chantiers régionaux en prévision.

50

Le carnet

43-49

Escapades ine fin de magaz Retrouvez en s e u iq m es écono nos itinérair es. et touristiqu

La Lettre Valloire - Septembre 2015 5


En bref

Points Chauds

RÈGLEMENT DE COMPTES A OK-CODEL a disparition programmée pour la fin 2015 du comité de développement économique d’Eure et Loir (Codel) n’est pas exclusivement due, comme l'indique le story telling officiel, à la prochaine mise en œuvre de la future loi NOTRe, qui obligera dès 2017 les Départements à abandonner leurs compétences économiques au profit des Régions. L'entêtement de Luc Lamirault, le président du Codel, à préserver coûte que coûte l'indépendance de cette structure qu'il préside depuis 1998 a fini par lasser ses collègues conseillers départementaux. D'autant qu'il se dit que ceux-ci auraient préféré qu'Éric Gérard, maire de la Loupe, soit le candidat de la majorité départementale sur le canton de Nogentle-Rotrou, où Luc Lamirault a été élu en mars dernier. Ses « amis » ont donc profité de l'occasion pour régler leurs comptes. Et, au passage, celui du Codel, avec quelques mois d'avance sur le calendrier prévu par le législateur.

L

MICHEL SAPIN OU LA CROISSANCE NULLE En véritable acrobate de la litote, de l’antiphrase et de la pensée magique, le ministre des Finances Michel Sapin a atteint les sommets de son art à la mi-août sur les antennes de France Inter. Invité à commenter le zéro pointé de la croissance française du second trimestre 2015, il a, sans rougir, affirmé « que la croissance nulle confortait les objectifs du gouvernement en matière de croissance. » Après avoir longuement disserté sur l’inversion des courbes, l’ex-président du conseil régional du Centre se lance donc dans une

refonte audacieuse de l’arithmétique. On lui souhaite un meilleur succès que dans sa lutte contre le chômage.

LAURENT BAUMEL DEVENU BAYROUISTE ? Voilà un ralliement inattendu. Laurent Baumel, ancien maire de BallanMiré et toujours député PS d’Indre-et-Loire, catégorie frondeurs, a dévoilé dans L’Express qu’il en venait « à souhaiter l’élection de François Bayrou en 2017 », puisque, poursuit-il, c’est « le seul moyen d’en finir avec cette monarchie républicaine ». Peut-être conscient d’être allé trop

loin dans le rejet de ses « amis » politiques, Laurent précise la pensée baumélienne : « Je ne dis pas que je souhaite la victoire de François Bayrou. Mais (le) duel Hollande-Sarkozy n’est pas un match acquis pour la prochaine présidentielle ».

La réélection de Laurent Baumel en 2017 non plus...

YANN GALUT RELANCE LA GAUCHE FORTE

Le député socialiste du Cher Yann Galut, qui avait créé début 2013 la Gauche forte, inspirée de la Droite forte de Guillaume Peltier et Geoffroy Didier, relance ce mouvement qui s'était fait plus discret ces derniers mois. Il s’appuie sur des parlementaires socialistes comme Marie‑Anne Chapdelaine (députée d’Ille-et-Vilaine), Colette Capdevielle (députée des Pyrénées-Atlantiques), Christophe Premat et Arnaud Leroy (députés des Français établis hors de France) et des élus locaux. Un colloque fondateur devrait être organisé au début de l’automne à l’Assemblée nationale ; l’objectif avoué est de fournir un contrepoids idéologique au FN et aux Républicains en vue des prochaines consultations électorales.

De Maurice Leroy, président du conseil départemental de Loir-et-Cher, à propos de la rallonge de 85 M€ de l’aide aux éleveurs promise par Manuel Valls : « Il faut se méfier des effets d’annonce qui sont souvent des annonces sans effet. » Toujours de Maurice Leroy, décidément en verve, la veille de la venue en Loir-et-Cher du président de la République : « Les agriculteurs vont être contents. Avec cette

6 La Lettre Valloire - Septembre 2015


Selon Françoise Amiot, l’adjointe au maire de Tours en charge des finances, la médiation engagée avec la Cacib, une filiale (ex-Calyon) du Crédit Agricole, au sujet du swap toxique de 20 M€ contractée par la ville en 2006 par l’ancienne majorité, pourrait aboutir d’ici à la fin de l’année 2015. «Nous souhaitons obtenir une ristourne significative sur le montant des intérêts dus, ce produit ayant la particularité de ne pas être adossé à du capital » explique Françoise Amiot. Ce profil spécifique a d’ailleurs empêché la municipalité de bénéficier du fonds de soutien aux collectivités affectés par des emprunts toxiques mis en place par l’Etat. Si la médiation échoue, la procédure judiciaire contentieuse engagée en 2012 par la Ville et suspendue à ce jour, reprendra de plus belle. Au total, le préjudice susceptible d’être supportée par le contribuable tourangeau jusqu’à la fin de vie de ce swap (fin 2016) pourrait s’élever à environ 40 M€. Sur la seule année 2016, l’addition s’élèverait à 8 M€.

AINSI SWAP-T-IL !

ACCORD A MINIMA PS-PRG Moins généreux avec le parti radical de gauche (PRG) que Les Républicains avec l’UDI, le parti socialiste a accordé aux premiers cités une seule tête de liste départementale – Harold Huwart en Eure-et-Loir – et quelques strapontins : une 6e place à la conseillère

CHIFFRE

DU TRIMESTRE

53% C’est le pourcentage d’internautes qui considèrent que l’axe économique Tours-Orléans est solide, 47% pensant donc le contraire (sondage publié sur le site lettrevalloire.com du 18 juin au 10 septembre)

régionale sortante Mélanie Fortier en Indre-et-Loire, une 7e place dans le Cher à Éric Maginiau, ancien adjoint à la Politique de la Ville de Serge Lepeltier, maire UMP devenu UDI de Bourges, et une 9e place dans le Loiret à Bernard

Fournier, autre conseiller régional sortant. En cas de défaite de François Bonneau, l’énarque Harold Huwart serait le seul élu radical de gauche de l’assemblée régionale.

OÙ SONT LES FEMMES ? Le sénateur Les Républicains JeanFrançois Mayet, ex-maire

de Châteauroux, s’est taillé un franc succès le 15 juillet dernier, lors d’une séance de la haute assemblée consacrée au projet de loi de modernisation du système de santé. Intervenant sur le sujet de la désertification médicale, il a jugé que la féminisation de la profession de médecin « posait problème », les

femmes « étant quand même là pour faire des enfants ». La saillie a suscité des réparties acerbes, notamment sur Twitter où Jean-Jacques Fraslin, animateur d’un site médical, a jugé que, décidément, certains sénateurs « en tenaient une couche ».

À BLOIS, UN JEU DE PAUME EN 2017

La première pierre de la future salle multi-fonctions (sportive, culturelle et économique) du Jeu de Paume, avenue de Châteaudun à Blois, a été posée le 10 juillet. Cet équipement, qui aura une capacité de 2 200 places en configuration sportive (basket-ball) et pourra abriter jusqu’à 3 150 personnes en concert assis-debout, devrait être livré au début de l’année 2017, sauf aléas climatiques. Son coût est de 25,7 M€ TTC, dont 80 % financés par la communauté d’agglomération Agglopolys : la conception est signée par le cabinet d’architecture Groupe 6.

sécheresse, il était temps que l’homme par qui la pluie arrive. » De Pascal Blanc, maire UDI de Bourges (18) à propos des difficultés financières de la ville et des mesures correctives qu’il doit prendre : « Je préfère l’impopularité provisoire à la tutelle ». De Philippe Vigier, député-maire de Cloyes-sur-le-Loir et tête de liste LR-UDI aux élections régionales, lors de l’inauguration de son QG de campagne : « Nous sommes tout près, ici, de l’Hôtel de Région. Ceci afin que le déménagement ne nous coûte pas trop cher ! »

La Lettre Valloire - Septembre 2015 7


Points Chauds

Politique économique

La région Centre-Val de proche de Délaissée lors de la réforme de l’organisation territoriale, frappée par une désindustrialisation massive qui la plonge dans les affres d’un chômage massif, la région Centre-Val de Loire est entraînée dans une spirale de déclin. Afin d’éviter une relégation définitive, il est urgent d’inventer une riposte politique qui soit à la mesure du péril encouru.

L

a région Centre-Val de Loire dévisse. Une série de graves revers économiques l’expose à un risque évident de relégation que seuls les partisans de la politique de l’autruche veulent ignorer. Le 1er janvier 2016, la région Centre-Val de Loire sera la moins peuplée des treize régions françaises (sans la Corse)

USINES À VENDRE

avec 2,6 millions d’habitants (4 % de la population nationale) et aura aussi le PIB le plus faible (3,3 % du PIB français). L’annonce du transfert de la majeure partie des activités de recherche du CEA (540 salariés) de Monts, au sud de Tours, vers le centre d’études scientifiques et techniques d’Aquitaine (Cesta), à Barp, près de Bordeaux, puis l’abandon du projet d’implantation tourangeau d’une plateforme Michelin Solutions ont été une sorte de ré8 La Lettre Valloire - Septembre 2015

vélateur. Certes, le sauvetage élyséen du CEA, intervenu in extremis, a éteint partiellement l’incendie. Mais le report à 2019 – échéance de la prochaine loi de programmation militaire – d’une décision définitive sur la pérennité de la plateforme tourangelle n’a pas apaisé toutes les inquiétudes. Ces défections constituent un véritable camouflet pour les élus. D’abord, elles vont entraîner d’importantes pertes d’emplois. Michelin Solutions prévoyait d’employer à Tours entre 150 et 200 personnes – pour compenser la fermeture de son usine de pneus de Joué-lès-Tours – et, en cas de départ des 540 salariés vers la région bordelaise, il ne devait rester qu’une cinquantaine de collaborateurs à Monts. Ensuite, elles portent un très rude coup à l’attractivité du territoire régional en matière de R&D. Le rôle structurant du CEA, qui avait noué toute une palette d’accords avec des laboratoires académiques et des soustraitants n’est plus à démontrer. Enfin, ces difficultés illustrent cruellement les absences de leadership politique. Pas une seule voix n’a porté manifestement assez haut et fort pour contrer une bonne fois pour toutes ces décisions qui, notamment dans le cas de Michelin Solutions, contreviennent à des engagements pris auprès des décideurs politiques, décidément bien impotents. En région Centre-Val de Loire, aucune figure de la carrure d’un Alain Rousset en Aquitaine, d’un Laurent Fabius en Normandie ou d’un Jean-Yves Le Drian en Bretagne n’aura pu impo-

ser sa volonté. Seule Marisol Touraine, l’ex-député de la 3e circonscription d’Indre-et-Loire, aura su relayer auprès de François Hollande le dépit des élus locaux, tous bords confondus, dans le dossier de la fermeture du CEA. Ces déconvenues viennent couronner, si l’on peut dire, la tragique tendance à la désindustrialisation du territoire. Selon une étude récente de l’Insee, les effectifs manufacturiers de la région se sont effondrés de 16 % sur la période 19822011, contre 9 % pour l’ensemble du territoire français, hors Île-de-France. Et si l’on ne retient que les fonctions de production dites concrètes – en excluant les fonctions abstraites et intellectuelles concourant à la fabrication de biens industriels – la saignée atteint près de 51%. Horresco referens, le nombre d’emplois de production concrète aurait été divisé par deux sur trente ans, de 270 000 à 135 000 ! Bien sûr, ces pertes ont été compensées par les gains d’emplois dans le champ de l’économie dite présentielle tournée vers les besoins de la population locale (action sociale, administration publique, services à la personne). Mais il n’est pas certain que cette substitution puisse constituer un motif de réjouissance sur le long terme. D’autant que cette modification structurelle de l’emploi n’a pas empêché le territoire régional de sombrer dans le chômage de masse. La crise, mais aussi bien l’incapacité des leaders régionaux à impulser une dynamique collective de développement, se paient cash sur le front de l’emploi. De multiples études ont d’ailleurs récemment


Loire la relégation

RÉGIONS

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13

bassins ont entamé leur dévitalisation industrielle dès la fin des années 90. La crise engagée en 2009 n’aura finalement eu qu’impact secondaire. » Partout, la litanie des signaux faibles et forts se poursuit : on cherchera ainsi vainement un projet régional sur la liste des 54 lauréats du 16e concours national d’aide à la création d’entreprises de

rations de fusions-acquisitions qui n’apportent aucune valeur ajoutée à un territoire qui les subit plutôt qu’il ne les suscite. Le Monopoly entre équipementiers automobiles qui a vu plusieurs d’entre eux s’échanger des usines du territoire régional, illustre cette fâcheuse déconnexion entre les grands centres de décision indus-

“ SELON UNE ÉTUDE RÉCENTE DE L’INSEE, LES EFFECTIFS MANUFACTURIERS DE LA RÉGION SE SONT EFFONDRÉS DE 16 % SUR LA PÉRIODE 1982-2011, CONTRE 9 % POUR L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE FRANÇAIS technologies innovantes publiée tout récemment par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. L’échec provisoire de la candidature ligérienne à la labellisation French Tech n’aura pas permis de faire souffler une brise d’optimisme. En face, le titre ronflant de « première région française d’accueil des emplois industriels d’entreprises étrangères », auto-décerné par les services économiques de la Région pour l’année 2014, retombe à plat. Il est dû pour l’essentiel (75 % du total) à des opé-

ÎIe-de-France Auvergne - Rhône-Alpes Poitou-Charentes - Limousin - Aquitaine Nord-Pas-de-Calais - Picardie Midi-Pyrénées - Languedoc-Roussillon Provence-Alpes-Côte d’Azur Champagne-Ardenne - Lorraine - Alsace Pays de la Loire Normandie Bretagne Bourgogne - Franche-Comté Centre-Val de Loire Corse

PIB en 2012

en milliards d’euros

624 239 158 152 150 150 149 104 90 87 73 69 8

triels et les collectivités locales, souvent mises devant le fait accompli. Même les robots s’y mettent. Randy Olson, un chercheur de l’université de Pennsylvanie spécialisé dans l’intelligence artificielle, vient de proposer un cheminement qui sélectionne, via l’exploitation d’un algorithme, les lieux touristiques les plus emblématiques de l’Hexagone. Sur les 32 étapes de ce road trip idéal, aucune ne se situe en Val de Loire… De quoi relativiser les atouts patrimoniaux tant vanJCS tés de la région. POPULATION

en millions d’habitants

12 7,6 5,8 6 5,6 4,9 5,5 3,6 3,3 3,2 2,8 2,6 0,3

(source Insée)

tordu le coup au mythe qui faisait de la région Centre-Val de Loire un oasis de prospérité miraculeusement préservé. Selon l’étude « Créations et destruction d’emplois en France en 2014 », publiée en mai dernier par le cabinet France Industrie & Emploi, la région a affiché l’an passé un solde négatif de 245 emplois, ce qui la classe parmi les cinq régions les moins performantes de l’Hexagone. La tendance à la détérioration de l’emploi est plus prononcée qu’à l’échelle nationale : de fin 2007 à la fin 2014, le taux de chômage a augmenté de 3,5 % en région Centre-Val de Loire tandis qu’il ne progressait sur la même période que de 2,5% pour la France entière. Certes, on pourrait sauver de cette faillite généralisée les îlots de résistance de certains bassins, notamment dans le sud de la région. Ainsi, à Châteauroux et à Vierzon, les effectifs des demandeurs d’emplois ont respectivement augmenté de « seulement » 23,72 % et 21 % entre 2010 et 2015. À comparer avec les 40,7 % enregistrés sur la même période à Orléans et les 37,5 % constatés à Tours. Mais les analystes préviennent des risques de surinterprétation de cette apparente résistance berrichonne : « Ces

La Lettre Valloire - Septembre 2015 9


Points Chauds

Politique économique

Les conditions du rebond La collectivité régionale aura, dès la nouvelle mandature et grâce à la loi NOTRe, des moyens accrus d’intervention économique. À condition de réfréner sa propension naturelle à la dispersion et au saupoudrage. Concentrer les structures et simplifier les règles d’attribution devront être au cœur de son action.

E

n dépit des déclarations rassurantes au sommet des pouvoirs publics, les années qui viennent de s’écouler n’ont pas vraiment été « business friendly ». Ballotées depuis trois ans entre dirigisme et social-libéralisme, les entreprises espèrent un redémarrage de l’activité en fin d’année ou plus sûrement en 2016. À moins qu’il faille patienter jusqu’en 2017… À force de regarder le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie, les patrons désespèrent. Et ceux de la région Centre-Val de Loire n’échappent pas à la règle. C’est même tout le contraire, la situation étant ici plutôt plus dégradée qu’ailleurs, l’article qui précède le démontrant, chiffres à la clé. S’il serait injuste d’attribuer le marasme ambiant à la seule action – timide – de la collectivité régionale, force est de constater qu’elle ne s’est guère emparée des possibilités que lui La Région a décidé de consacrer la majeure partie de son budget d’investissement à la réouverture de liaisons ferroviaires.

10 La Lettre Valloire - Septembre 2015

offrait la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, et notamment le renforcement de son rôle de coordinatrice du développement économique. Le 22 juin dernier, la conférence territoriale de l’action publique, qui réu-

exécutifs sont désormais de même couleur politique, attachés à relancer l’activité par des investissements dans le bâtiment et les routes ou l’accélération du déploiement du très haut-débit. Côté gauche, une Région qui a décidé dès le début de la mandature de

“ UNE RATIONALISATION DE CE CATALOGUE À LA PRÉVERT ET UNE SIMPLIFICATION DES CONDITIONS D’ATTRIBUTION DES AIDES SERONT DES TÂCHES À MENER DÈS LE DÉBUT DU MANDAT. nissait le conseil régional et les représentants des six conseils départementaux et de plusieurs autres collectivités, a montré les limites de ce rôle de coordination lorsque les acteurs présents autour de la table n’ont ni la même sensibilité, ni surtout la même vision de l’avenir. Côté droit, six Départements, dont les

consacrer la majeure partie de son budget d’investissement à la réouverture de trois liaisons ferroviaires (Voves-Orléans, Orléans-Châteauneuf et Tours-Loches). Route contre rail, ce sont deux conceptions de l’aménagement du territoire qui s’affrontent. Pourtant, dans un monde idéal, les principes de complémentarité et de partenariat devraient guider l’action des différents niveaux de collectivité. Aux élus de terrain de prendre les décisions d’aménagement et de développement local, la Région abondant les projets sous réserve qu’ils respectent les dispositions de la loi. Au niveau régional, en revanche, de trancher souverainement, naturellement en concertation avec les collectivités concernées, les enjeux supra-locaux. C’est ce principe de subsidiarité qui devrait conduire l’action d’une Région en harmonie avec toutes ses composantes territoriales. Sur ce point, il y a beaucoup de chemin à faire. Mais les divergences de vue se révèlent aussi à l’intérieur de la majorité. Alors que l’exécutif présidé par le socialiste François Bonneau soutient le transport aérien à Tours comme à Châteauroux,


de l’économie régionale sa composante Europe Écologie-Les Verts vote systématiquement contre les subventions aux deux aéroports. Un frein pour le développement du trafic voyageurs, alors que la région Centre est déjà la seule des régions touristiques françaises à ne pas posséder un grand aéroport international. Si les subventions au transport aérien finissent tout de même par être votées, le plus souvent grâce à l’opposition, les choses ne sont pas aussi simples lorsqu’on aborde le chapitre, très controversé à gauche, des interventions économiques au profit des entreprises. En imposant « des contreparties sociales et environnementales » aux bénéficiaires des aides régionales, les Verts ont largement contribué à décourager les porteurs de projets. Entre 2013 et 2014, le montant distribué aux entreprises industrielles a chuté de 45 %, passant de 27 M€ à 15 M€. Une nouvelle couche a été ajoutée à l’automne 2014, toujours à l’inspiration d’EELV, avec l’obligation de solliciter l’avis du comité d’entreprise (+ 50 salariés) pour l’obtention d’une aide de la Région. Dans une France déjà percluse de règlementations, cet ajout de tracasseries à l’utilité contestable ne peut qu’avoir un effet dissuasif pour les investisseurs. Il est évident que l’exécutif qui sortira des urnes le 13 décembre devra passer outre les préjugés anti-patrons d’une frange de la majorité actuelle pour renforcer son soutien aux entrepreneurs. N’en déplaise aux Verts et au Front de gauche, les mécanismes d’aide foisonnent, mais la logique de cette profusion pose question. Pourquoi tant d’aides CAP, dont les champs d’action se chevauchent mais dont les règlements diffèrent (CAP Innovation, mais aussi CAP Innovation touristique, CAP Création-Reprise, mais aussi CAP Artisanat Création-Reprise) ? Nous en avons recensé une bonne vingtaine. La productivité des fonc-

tionnaires territoriaux est d’ailleurs inépuisable, avec la création de dispositifs nouveaux à intervalles réguliers : 6 pour la seule année 2015. De quoi perdre le nord avec autant de CAP ! Dès 2007, la Cour des Comptes pointait « la confusion institutionnelle » engendrée par la diversification des aides. Une rationalisation de ce cata-

rique», avec pour objectif d’être « le support d’expérimentations, de mutualisations et de prestations de services » et de « contribuer à l’animation de la communauté régionale TIC. » Des missions pour le moins obscures pour cet organisme qui absorbe 4,3 M€ de subventions régionales pour un confortable budget de 6,7 M€.

logue à la Prévert et une simplification des conditions d’attribution seront des tâches à mener dès le début du mandat. La même dispersion des moyens règne dans les structures dépendant du conseil régional. Pour la compétence économique, nous en avons dénombré 6, en comptant l’Aéroport Marcel-Dassault de Châteauroux, dont la Région est propriétaire depuis 2007. Ces agences, établissements publics ou GIP représentent un budget d’un peu plus de 28 M€, dont près de la moitié est alimentée par des subventions régionales. Au total, une bonne centaine d’agents – sans compter ceux affectés à l’aéroport castelroussin – concourent à promouvoir le territoire régional et à accompagner les entreprises dans leurs projets. Parfois, dans la plus totale discrétion, comme le GIP Recia, qui se présente comme « centre de ressources et de compétences autour du numé-

Devant la disparition progressive des agences départementales (lire à la suite), le rôle de la Région deviendra primordial en matière de développement. La fusion des structures périphériques dans une grande agence de développement économique, associant peut-être aussi le tourisme comme l’a fait le Cher au plan départemental, aurait du sens. Certaines Régions ont déjà pris ce virage, comme l’Aquitaine. Est-ce un hasard s’il a été question de déplacer les agents du CEA de Monts vers le centre girondin de Barp – où est implanté le fameux laser Mégajoule (ci-dessus) – et si Thalès a choisi de regrouper ses chercheurs, y compris ceux de Vendôme, à Mérignac ? Début 2016, la Région étrennera une nouvelle gouvernance. Elle aura pour tâche primordiale de s’emparer du dossier de l’attractivité du territoire et du développement de ses entreprises. Il faudra faire vite car il y a urgence.

Le Cesta de Barp (33), qui abrite le fameux laser Mégajoule, devait accueillir les agents du CEA de Monts.

François-Xavier Beuzon

La Lettre Valloire - Septembre 2015 11


Points Chauds

Politique économique

ÉRIC MASSÉ, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL D’INITIATIVE INDRE

Initiative Indre et les BGE : un appui Déclinaison locale d’une initiative nationale, les Boutiques de Gestion de l’Indre et du Cher, toutes deux dirigées par Éric Massé, apportent un appui essentiel aux créateurs d’entreprises. Et les résultats sont là : à trois ans, le taux de survie des entreprises créées avec ce soutien dépasse 90 %, contre 66 % habituellement, et il reste très élevé (82 %) à cinq ans. Aujourd’hui, nous coordonnons dix-neuf outils financiers pour les porteurs de projets. Cela nous permet d’avoir un guichet unique pour des créateurs d’entreprises qui doivent parfois rencontrer cinq interlocuteurs pour recueillir les informations nécessaires. Une autre chose essentielle est à retenir : la BGE n’est pas spécialisée, ce qui fait qu’elle peut aider un créateur de n’importe quel secteur professionnel, du commerce aux professions libérales en passant par l’artisanat. Nous avons comme partenaire, par exemple, l’ordre des pharmaciens. Nous sommes au service de toute l’économie du territoire.

La Lettre Valloire : Comment sont nées la Boutique de Gestion et Initiative Indre ? Éric Massé : L’État a défini quatre phases dans l’aide aux créateurs d’entreprises : l’accueil, l’accompagnement, le financement et le suivi de la création. En 2000, il a reconnu neuf réseaux pour aider et appuyer les créateurs d’entreprises, dont la Boutique de Gestion (BGE). Pour les financements, sont labellisés l’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie), Initiative France, France Active et le Réseau Entreprendre. Tous ces réseaux fonctionnent en tube. Dans l’Indre, nous avons commencé en 1998 en créant Initiative Indre. En 2005, nous avons décliné le fonds de France Active Garantie (FAG) en Indre Actif et avons ouvert la BGE en 2007. Depuis 2011, nous représentons aussi l’Adie. Nous avons imaginé le premier modèle inter-réseaux entre les associations qui accompagnent et celles qui financent. 12 La Lettre Valloire - Septembre 2015

La Lettre Valloire : Comment définir votre métier ? Éric Massé : Notre cœur de métier est d’appuyer les créateurs, notamment en les aidant à réunir des moyens financiers pour pouvoir s’installer par le biais de cautions, de financements bancaires et un peu de subventions. Au fil des années, nous avons développé ces missions en y ajoutant l’appui au développement des TPE, dont nous avons soutenu la création, avec des prêts de croissance et de recrutement. Nous réalisons aussi des audits et des recherches financières pour les entreprises et avons mis en place l’accueil sur le territoire des nouvelles entreprises. Nous participons à l’emploi de proximité et en direct car la concrétisation est immédiate. Nous avons aussi créé le Fonds de garantie d’initiative des femmes. Avec ces fonds de garantie, nous libérons les entrepreneurs de leur caution personnelle. Nous avons des fonds qui nous appartiennent, comme le fonds de prêt d’honneur, le réseau Alizé et les fonds de garantie Indre Actif et Cap Agri ; ces fonds sont abondés par nos partenaires publics et privés. Par ailleurs, nous avons lancé un Club des entrepreneurs qui regroupe des chefs d’entreprises et des jeunes créateurs. Un chef d’entreprise vit en réseau. L’isolement n’a jamais aidé personne. Il faut que les entrepreneurs puissent confronter leurs expertises, s’apporter des informations et des clients. La Lettre Valloire : Combien comptez-vous d’adhérents dans vos différentes structures ? Éric Massé : Nous avons créé un réseau qui regroupe 750 membres, dont des collectivités, des entreprises, des partenaires bancaires, des associations, des institu-


indispensable aux entrepreneurs tions qui sont membres de droit et des créateurs d’entreprise que nous avons accompagnés. Le Club d’entrepreneurs de l’Indre compte 265 membres : il y a 200 membres bénévoles dans les différents comités, 65 bénévoles pour le suivi post-création et 30 dans les commissions de travail. Dans le Cher, la BGE possède 78 adhérents. La Lettre Valloire : Quels résultats peut-on citer ? Éric Massé : En 2014, nous avons mobilisé 3,8 M€ par le biais des dispositifs que nous gérons, sans compter les aides personnelles et les micro-crédits. Nous avons réalisé 242 prêts à taux zéro, soit 1,3 M€ d’encours, et avons mobilisé 130 cautions. Cela fait, au total, quelque 28 M€ injectés dans l’économie du territoire. Cette année, au 31 août, nous en sommes déjà à 2,4 M€. Cet argent va directement aux entreprises pour la dynamisation du département. L’an dernier, nous avons soutenu 250 entreprises, ce qui représente 501 emplois. Chaque année, nous aidons financièrement entre 200 et 300 porteurs de projet. En dixhuit ans, nous avons soutenu environ 3 400 créateurs

d’entreprise. À trois ans, le taux de survie des entreprises créées avec notre soutien atteint entre 90 et 92 % et environ 82 % à cinq ans. La Lettre Valloire : Quels sont vos objectifs désormais ? Éric Massé : Dans l’Indre, nous devons consolider les moyens, coopter de nouveaux membres et travailler avec les outils que les partenaires mettent à disposition. Nous allons développer la partie ingénierie financière. Nous avons créé un club seniors pour les demandeurs d’emploi de plus de 50 ans car certaines entreprises du territoire cherchent des compétences qui sont sous leur nez mais ils ont du mal à recruter. Il ouvrira à l’automne. Dans le Cher, 129 créateurs ont été aidés en 2014, pour 204 emplois. Je suis en train de développer cette BGE pour arriver à un modèle de coopération. Enfin, il faut souligner également la création récente d’un Club des entrepreneurs dans le Cher.

Propos recueillis par Stéphanie Payssan

La Lettre Valloire - Septembre 2015 13


Points Chauds

Politique économique

Les fonds européens

en poche restante ?

En région Centre-Val de Loire, la programmation 2014-2020 des crédits européens du Feder et du FSE, soit 255 M€ et même près de 500 M€ si on y ajoute ceux du Feader, le nouveau volet de la PAC, va-t-elle s’enliser dans les méandres de l’administration régionale ?

L

es montants considérables des fonds européens – en additionnant Feder, FSE et le nouveau Feader, cela représente près de 500 M€ sur la période septennale 2014-2020 –, sont-ils correctement utilisés par la Région Centre-Val de Loire ? Depuis le transfert de compétence de l’État – qui s’est toutefois gardé une poire pour la soif sous la forme d’une enveloppe FSE spécifique de 55 M€ – la Région est devenue l’autorité de gestion, seul maître

à bord dans ce domaine. Auparavant, elle ne gérait en direct que la moitié de ses subsides au titre d’une délégation que lui accordait l’État. A elle, donc, de mener à bien l’instruction de ces dossiers complexes, et surtout de se conformer aux exigences de Bruxelles. Les instances politiques européennes souhaitent naturellement que ces sommes s’accordent avec leurs propres priorités. Leur emploi doit faire l’objet d’un programme opérationnel (PO) négocié 14 La Lettre Valloire - Septembre 2015

avec les services de Bruxelles. Son action s’articule autour de quelques axes spécifiques. Dans le cas de la Région Centre-Val de Loire et pour 2014-2020, sept thématiques ont été retenues (société de la connaissance, société porteuse d’emplois, société numérique, transition vers l’économie à faible teneur en carbone, solidarité avec les quartiers urbains les plus défavorisés, société apprenante et inclusive, accompagnement des jeunes vers l’emploi). L’enjeu est majeur puisqu’en raison du principe qui veut que chaque euro de la manne européenne

déclenche le versement d’un euro en local, le montant des investissements pourrait, en théorie, s’élever à près de 1 Md€. Si la Région a réussi à faire valider son PO 2014-2020 au titre du Feder et du FSE – 255 M€ à eux deux –, elle n’avait pas franchement brillé jusqu’alors par le taux d’utilisation de la manne européenne. « A peine 5 % des sommes disponibles ont été effectivement programmées sur la période en

cours. Et presque rien en faveur des entreprises. Si on établit une moyenne sur sept ans, ce sont plus de 20 % des sommes qui devraient déjà être programmées pour bien faire », nous indique une source proche des dossiers. Plusieurs raisons expliqueraient cet étonnant déficit dans l’usage des fonds. « Tout d’abord, ces affaires sont objectivement assez complexes à instruire, estime un très bon connaisseur des arcanes européennes. Par ailleurs, le nombre de projets éligibles n’est pas si nombreux. Et puis, par réflexe, les techniciens territoriaux préfèreront toujours consommer les crédits de leur propre collectivité, dont ils maîtrisent l’ingénierie ». « Mensonger, rétorque Laurent Olivier, directeur Europe et Partenariats à la Région Centre-Val de Loire. On ne peut pas prétendre que ces enveloppes restent inutilisées ». Ainsi, selon lui, 102% des crédits prévus au titre de la précédente programmation (20072013), soit 200,14 M€, ont été engagés. Et les bénéficiaires ont déjà perçu 136,76 M€. « Il reste donc 63,38 M€ à verser avant le 31 décembre 2015, date officielle de la fin du programme, affirme Laurent Olivier. Et il n’y aucune raison que nous n’atteignons pas les mêmes ratios sur 2014-2020 ». On peut également s’interroger sur l’affectation des 227 M€ prévus au titre du Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural) : l’argent européen est en effet disponible depuis le 1er janvier 2014 mais, à ce jour, pas un seul centime n’a été programmé… Jean-Christophe Savattier


Gérard Bouyer,

PrésIdENT dE LA CCI TourAINE

« L’EMPLOYABILITÉ EST AU CŒUR DE LA QUESTION DE L’EMPLOI »

La CCI vient de publier un livre blanc sur le sujet de l’employabilité ? En quoi cette question est-elle centrale ?

Gérard Bouyer : Tout simplement parce qu’elle est l’une des clefs de la résolution du chômage de masse. Les entrepreneurs sont aujourd’hui confrontés à une inadéquation flagrante entre leurs besoins et les qualifications des demandeurs d’emplois. C’est ce fossé qu’il faut résoudre, et ceci passe par une amélioration de la formation qu’elle soit initiale ou continue. C’est une évidence, dans un monde qui est en proie à des mutations de très grande ampleur.

Entrepreneurs, salariés, personnels de l’Education nationale, parents : il est de notre responsabilité collective d’améliorer les conditions de la formation professionnelle en s’attaquant sans doute prioritairement à l’apprentissage qui dans d’autres pays européens, est la voie royale vers la réussite. Justement le gouvernement semble avoir pris la mesure des enjeux ?

Gérard Bouyer : Peut-être, mais il est temps de passer des paroles aux actes. Et les récentes mesures prises pour inciter le recours à l’apprentissage ne me rassurent pas du tout ! Trop compliquées, segmentées, illisibles, elles ne sont pas du tout à la hauteur des enjeux.

Nous proposons dans notre livre blanc un dispositif beaucoup plus simple et immédiatement opérationnel. Je crois tout d’abord qu’il faut exonérer totalement de charges sociales toutes les entreprises qui emploient des jeunes apprentis sans tenir compte de leur taille.

Arrêtons avec les effets de seuil ! Il faut aussi assouplir considérablement le cadre légal en dérogeant au maximum aux règles d’interdiction de certains travaux et en évitant de laisser planer des doutes sur la responsabilité de l’employeur en cas d’accident du travail. Je crois également que tout en sécurisant le parcours du jeune, il faut adopter un mode de rémunération variable et progressif plus en adéquation avec la contribution du jeune à l’entreprise. Enfin, reconnaissons le droit à l’erreur et donnons au patron et au jeune la possibilité de rompre plus facilement le contrat de travail. La mise en place de ces mesures devrait être compatible avec une exigence d’engagement fort des entreprises dans le combat de l’apprentissage.

Téléchargeable sur www.touraine.cci.fr RECRUTER ET ME FORMER

CRÉER REPRENDRE TRANSMETTRE

INTÉGRER UN RÉSEAU

AMÉLIORER MA PERFORMANCE

M’INFORMER ET DÉCIDER


Points Chauds

Politique économique

Les Départements vont laisser le développement à d’autres L’annonce de la prochaine disparition du Codel préfigure la modification législative introduite par la loi NOTRe. Le 1er janvier 2017, les Départements ne pourront plus financer leurs agences de développement, sauf à contractualiser avec la Région. Mais celle-ci, confirmée dans son rôle de chef de file de la politique économique, pourra-t-elle se passer de ces relais de terrain ?

P

rises en tenaille entre la compétence économique allouée depuis 2004 aux Régions et la montée en puissance des communautés d’agglomérations et de communes sur ce terrain, les agences de développement économique départementales, qui ont longtemps tenu le haut du pavé, perdent pied. Contestées, dépouillées d’une partie de leurs missions, elles font les frais de la clarification des compétences assumées jusqu’alors par les différents niveaux de collectivités : une réorganisation devenue la priorité des pouvoirs publics, surtout avec l’adoption de la loi NOTRe (pour « Nouvelle organisation territoriale de la République »), sortie au mois d’août d’un long rallye parlementaire.

L’annonce de la disparition prochaine du Codel (comité de développement économique d’Eure-et-Loir) en est le dernier avatar. Fondée en 1983 par Jean-Luc Ansel – aujourd’hui directeur général de la Cosmetic Valley, un pôle

“ LONGTEMPS, LA RÉUSSITE DU CODEL A ÉTÉ D’ALLER PIOCHER DES ENTREPRISES DANS LE VIVIER DE LA RÉGION PARISIENNE

de compétitivité qui a essaimé du Codel – cette structure ne pouvait « plus perdurer en l’état », lâche Albéric de Montgolfier, président (LR) du conseil départemental d’Eure-et-Loir. Pour lui, le sort de l’agence « était scellé par l’adoption de loi NOTRe » qui va rom-

Luc Lamirault, président du Codel.

16 La Lettre Valloire - Septembre 2015

pre le lien financier entre les agences et la collectivité départementale. Si le gouvernement a accordé un an supplémentaire – jusqu’au 1er janvier 2017 – pour rendre effective la disposition, l’affaire est entendue.

En Eure-et-Loir, le Département n’a pas l’intention de se désengager totalement des missions initiées par le Codel (Business Contact, French Tech eurélienne, Polepharma…). Mais ses futurs concours s’inscriront à pas comptés puisque la collectivité n’exercera plus la compétence économique. La mutualisation permettra de réduire le poids de la charge financière annuelle, qui s’élevait à 1,5 M€ dans le cas du Codel. « Les deux grosses agglomérations d’Eure-et-Loir, Chartres et Dreux, se sont dotées de services économiques qui font le job. Elles vont continuer à le faire, indique une source interne. La valeur ajoutée du Codel n’était plus évidente. Les élus qui la supervisaient ont souhaité avant tout préserver leur pré carré ; ils se sont isolés… » Dans le Loiret, on a choisi de devancer l’appel pour justement éviter cet isolement. En 2014, les principaux opérateurs en charge de l’action économique locale (agence de développement économique du Loiret, communauté d’agglomération Orléans-


LE PARTENAIRE ÉCONOMIQUE DE VOS PROJETS

Éric Doligé,

PrésIdENT du GIP LoIrE&orLéANs éCo*

« La Région devra nous associer au développement économique » Le sénateur Éric Doligé, ancien président du conseil général du Loiret et président du GIP Loire&Orléans Éco, juge sévèrement la loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe) qui confie le développement économique local à la seule Région. La Lettre Valloire : Comment jugez-vous la loi NOTRe, et notamment son chapitre sur le développement économique, désormais entièrement dévolu à l’échelon régional ?

Éric Doligé : Cette loi est globalement mauvaise, et pas uniquement sur ce chapitre. La volonté de départ était de donner la compétence économique aux régions et tout a été fait pour évincer les départements. Pourtant, l’échelon le plus pertinent, dans cette matière, c’est celui qui est le plus proche des entreprises. Et je ne vois pas comment les nouvelles régions recomposées, compte tenu de leur taille – à cet égard, la nôtre est une exception, puisqu’elle conserve son périmètre –, seront en capacité de faire face aux problèmes de proximité. Qui connaît le mieux les entreprises de son territoire, celui ou celle qui préside la communauté de communes ou siège au conseil départemental – quand ce n’est pas le ou la même – ou la région ? La Lettre Valloire : Qu’avez-vous envie de dire au prochain exécutif régional ?

Éric Doligé : La loi NoTre laisse heureusement quelques portes ouvertes. La nouvelle majorité devrait s’intéresser à ce qui se fait dans le Loiret, où la bonne entente entre toutes les acteurs de l’économie (département, Agglo d’orléans, CCI, udel…) a permis de créer le GIP que je préside. Ce groupement est un bon interlocuteur pour la région et c’est peut-être une piste que les cinq autres départements devraient explorer. Je voudrais aussi souligner qu’en vertu de ce lien de proximité que nous entretenons avec nos territoires, il ne faudra pas oublier d’intégrer les conseils départementaux aux discussions du schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (srdEII). La Lettre Valloire : La date du 31 décembre 2016, retenue pour le passage de témoin Départements-Régions, vous semble-t-elle tenable ?

Éric Doligé : Je vois ça très mal. Les délais sont courts, surtout pour les régions recomposées. La mise en place des assemblées et des commissions vont repousser les premières décisions au printemps 2016. Il ne restera donc que quelques mois pour préparer la bascule des structures de développement économique vers les régions. soit la date-butoir sera reportée d’un an, ou plus, soit les régions devront signer des conventions avec les départements. Finalement, cette précipitation n’aura pas servi à grand chose. * Le GIP Loire&Orléans Éco, créé il y a un peu plus d’un an, mutualise les actions en faveur du développement économique du Loiret (Département, AgglO d’Orléans, Adel, CCI, Udel). Présidé par Éric Doligé, il est dirigé par Bruno Rousselet. La Lettre Valloire - Septembre 2015 15 Publi-reportage


Points Chauds

Politique économique

Les élus du Loiret lors du lancement de la marque Loire&Orléans.

Val de Loire, CCI, Udel) ont réuni leurs compétences, leurs missions et leurs ressources humaines dans le groupement d’intérêt public (GIP) Loire&Orléans Éco. « Derrière notre projet qui, je le précise, n’a pas du tout conduit à la disparition de l’Adel en tant qu’entité autonome, on trouve la constitution préalable d’une marque commune et la volonté d’installer un guichet unique aisément accessible aux porteurs de projet, justifie Bruno Rousselet, directeur de l’Adel et du GIP Loire&Orléans Éco. Nous mutualisons notre savoir-faire qui a fait ses preuves avec les ressources de nos collègues de l’agglomération et les consulaires. Qui pourrait s’en plaindre ? », pour18 La Lettre Valloire - Septembre 2015

suit Bruno Rousselet qui souligne que c’est Éric Doligé, alors président du conseil général du Loiret, qui a pris l’initiative d’anticiper ces évolutions. « Cette affaire de mutualisation, même si elle s’inscrit dans la perspective des réformes territoriales en cours, n’est pas la seule explication !, estime un bon connaisseur du dossier. Depuis quelques années, on assiste à une érosion du crédit politique des agences départementales qui ne parviennent plus à accrocher, comme auparavant, des installations spectaculaires d’entreprises. Elles sont réglées en mode réaction et accompagnent le plus souvent des projets qui se seraient faits de toutes façons sans elles. C’est un pur effet d’aubaine. Il suffit d’ailleurs de consulter les derniers bilans d’activité annuels pour s’en rendre compte. » « Longtemps, la réussite du Codel a été d’aller piocher des entreprises dans le vivier de la région parisienne, en leur proposant des conditions idéales d’implantation, indique pour sa part Jean-Luc Ansel, patron du Codel de 1985 à 2005. Ce potentiel n’existe plus aujourd’hui. La crise est passée par là. » Consécutivement, les agglomérations et les communautés de communes se sont dotées de services économiques qui prennent de plus en plus de poids et challengent cruellement les agences. Cette perte de compétitivité a donc conduit les élus à précipiter les évolutions des périmètres, le contexte budgétaire aidant. En 2010, déjà, le conseil général de Loir-et-Cher procédait en précurseur à la dissolution de l’Adelec (agence de développement économique de Loir-et-Cher) et à la réintégration de ses collaborateurs au sein des services du Département. Cette agence, fondée au début des années 90, ne répondait plus au rôle qui lui avait été assigné et sa disparition était logique. Certains restent persuadés de l’intérêt de ces outils. Ainsi, le conseiller départemental et maire de Buzançais Régis Blanchet, nouveau président de l’agence de développement économique de l’Indre (ADEI), juge qu’une

agence « est un levier de proximité indispensable. Surtout pour un département comme le nôtre qui est parfois laissé pour compte. Je ne suis pas sûr que la concentration des moyens de prospection au siège de la Région, à Orléans, soit une bonne chose pour le Berry. » Pour être plus performants, les voisins du Cher ont fusionné leurs agences de développement touristique et économique dans une seule, l’Ad2T. En Touraine, à contre-courant de l’histoire, des velléités de recréer une agence sur les reliques de feu l’ADT ont récemment resurgi : la loi NOTRe a probablement enterré le projet. Mais, à l’avenir, qui financera le fonctionnement des dernières structures départementales ? Leurs tutelles, privées de la compétence économique, accepteront-elles de lâcher les deniers qui leur restent ? Selon Régis Blanchet, qui doit à la rentrée rencontrer à ce sujet Gil Avérous, maire de Châteauroux et président de la communauté d’agglomération castelroussine, « c’est à l’agglomération et aux communautés de communes de prendre leurs responsabilités si elles jugent que nous leur apportons un vrai service ». À Orléans, on estime que l’heure du choix approche. « Soit la Région, renforcée par la loi NOTRe dans le rôle de chef de file de la politique économique confié en 2004 par le législateur, considère qu’elle doit déléguer les missions de prospection et d’animation de terrain à des GIP comme Loire&Orléans Éco. Soit elle décide de se doter de vrais services de développement économique, qui lui font défaut aujourd’hui, et la pérennité des structures infra-régionales deviendra difficile à défendre », résume un élu du Loiret qui ne parvient pas à se résoudre à l’abandon de la souveraineté du Département sur ce chapitre. Les prochaines échéances électorales régionales et les arbitrages de l’exécutif élu devraient fournir rapidement des éléments de réponse. Jean-Christophe Savattier


Emprunt toxique Montoire fait de la résistance Le conseil municipal de Montoire-sur-le-Loir (41) a refusé d’augmenter de 30 % la part communale des taxes locales pour rembourser les intérêts d’un emprunt toxique contracté en 2007. Les élus devront choisir entre poursuivre les représentants des créanciers ou verser une indemnité de 7,2 M€ pour solde de tout compte.

Le contribuable de Montoire est mis devant le fait accompli

«O

n commence à me surnommer Tsipras », se désole Guy Moyer, le maire divers gauche de Montoire-surle-Loir ; élu en 2014 après avoir été premier adjoint le mandat précédent, l’édile montoirien se débat avec un emprunt toxique de 3,3 M€ contracté en 2007 auprès de Dexia par le maire socialiste de l’époque. Un emprunt qui distille aujourd’hui tout son venin : « La machine s’est emballée, se lamente l’élu. En 2015, nous devrions payer 540 000 € d’intérêts, soit 307 000 € de plus que ce que nous avons réglé en 2014 pour un même montant remboursé en capital par exercice (84 000 €). C’est tout simplement insoutenable ! » Sommé par la chambre régionale des comptes (CRC), saisie par le préfet de Loir-et-Cher, de s’acquitter des sommes dues, le conseil municipal de Montoire est entré en résistance le 3 août dernier. Pas question de modifier le budget primitif initialement voté – et jugé insin-

cère – en s’inspirant des recommandations préfectorales ; celles-ci préconisent, en effet, d’augmenter tout bonnement les taux d’imposition communaux de près de 30 %. « Les élus ne peuvent pas valider ce schéma », confirme Guy Moyer qui ne se fait guère d’illusions sur les effets de ce baroud d’honneur : « Le préfet va rendre exécutoire cette injonction. Mais au moins, nous n’y aurons pas consenti. » Si elle reconnaît que la potion est sévère, Sophie Lesieux, souspréfète de Vendôme, confirme que « compte tenu de la situation financière de la commune, il n’y a franchement pas d’autre solution que l’augmentation des taux », précisant au passage que la saisine de la CRC était requise « pour que la commune bénéficie d’une aide financière exceptionnelle devant être versée par l’Etat… » Si la municipalité semble pouvoir éviter la mise sous tutelle, elle se dirige vers une forte réduction de son autonomie financière. « Pour réparer

un véhicule municipal, il faudra que j’en réfère au préfet puisque la ligne budgétaire dépenses imprévues aura disparu », soupire le maire. D’autant que la pression exercée par l’emprunt maudit ne va pas baisser en intensité. Bien au contraire ! L’an prochain, la municipalité devrait, en principe, acquitter… 694 000 € d’intérêt pour 88 000 € de capital remboursé, le tout pour un budget de fonctionnement de 5 M€. Pour se donner un peu d’oxygène, le conseil municipal devra trancher dans les semaines à venir entre deux stratégies de sortie de crise. Soit en assignant définitivement la Société de Financement Local (SFIL), l’organisme d’État qui accompagne le troisième plan de sauvetage de Dexia, ce qui ne l’exonèrera pas des charges de remboursement pendant toute la durée de la procédure, soit en acceptant de verser une indemnité contractuelle de 7,28 M€. Celle-ci permettrait à la Ville de s’affranchir définitivement de son obligation de rembourser. « Montoire a intérêt à choisir le paiement de l’indemnité de sortie. Elle pourrait être financée à hauteur de 75 % par le fonds de soutien qui va être installé à l’automne par l’Etat », estime la sous-préfète. La voie contentieuse semble, il est vrai, beaucoup plus incertaine : en 2010, la Ville a, en toute connaissance de cause et alors qu’un code de bonne conduite (charte Gissler) avait été publié par l’État à l’attention des collectivités, souscrit une nouvelle fois un emprunt structuré à haut risque… Jean-Christophe Savattier

La Lettre Valloire - Septembre 2015 19


Points Chauds

Politique agricole

La filière porcine : circuit Cet été, les difficultés des éleveurs du porc ont placé le projecteur sur une filière qui peine à subsister. En région Centre-Val de Loire, loin de l’épicentre breton de cette crise, certains exploitants parviennent à passer l’orage en misant sur le développement des circuits commerciaux de proximité. Une stratégie qui butte sur ses propres limites.

L

Christophe Galland a créé à Amboise une épicerie fine dont les charcuteries sont issues de l'exploitation familiale.

es éleveurs enragent ! La crise estivale du porc a illustré ad nauseam le grand désarroi qui a gagné nos campagnes : alors que la demande alimentaire mondiale n’a jamais été aussi importante, les exploitants, et en particulier les éleveurs de porcs, ne parviennent plus à vivre décemment de leur travail. L’effondrement des cours – en partie lié aux conséquences de l’embargo russe – fait, bien sûr, l’objet de leur colère : « Le prix du porc au kg (1,40 €) qui nous a été proposé – rejeté par les industriels qui le jugent trop élevé – est inférieur à ce qu’il était… il y a trente ans lorsque j’ai

20 La Lettre Valloire - Septembre 2015

débuté », indique ainsi Jean-Claude Galland, l’un des dirigeants d’un élevage porcin familial installé à Betz-le-Château, près de Ligueil (37). Cet élevage (lire plus loin) compte près de 150 truies et livre à la transformation quelque 2 800 porcs chaque année, soit environ 330 tonnes de viande. « Et pendant tout ce temps, vous pouvez croire que nos charges fixes n’ont pas cessé de grimper ! » Certes, Jean-Claude Galland reconnaît que son activité a connu dix bonnes années entre 1982 et 1992, une décennie au cours de laquelle les planètes de la filière porcine étaient particulièrement bien ali-

gnées. « Le prix du porc variait entre 1,40 et 1,60 €, celui des céréales, qui représentent entre 50 % et 60 % des coûts, était plutôt bas, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Et surtout nous n’étions pas plombés par le coût du travail », se souvient l’éleveur avec nostalgie. Car tout s’est dégradé. Et notamment les coûts salariaux : sur l’ensemble de la période, le smic horaire est passé de 2,77 € à 9,61 €, avec une accélération ces dernières années. Poids des charges et des réglementations sociales et environnementales, pression des transformateurs et des distributeurs engagés dans une féroce guerre des prix : les opérateurs français de la filière, tout particulièrement les Bretons enlisés dans un modèle productiviste, ne luttent pas à armes égales avec leurs grands concurrents européens. « En Allemagne, les transformateurs de viande de porc emploient massivement des travailleurs étrangers dans des conditions très discutables et à des salaires dérisoires, très en deçà des nôtres », explique Christophe Galland, le frère de l’éleveur tourangeau qui a quitté l’exploitation familiale pour créer à Amboise une épicerie fine ; celle-ci commercialise plusieurs gammes de produits de terroirs… dont naturellement les charcuteries issues de l’exploitation familiale. Outre-Rhin, les industriels ont poussé très loin la division taylorienne du travail : chaque forçat de la découpe ne reproduit parfois qu’un seul geste tout au long de ses heures de travail. Cette division du


court ou court-circuit ? travail a aussi été géographiquement organisée sur l’ensemble de l’Europe du Nord dans une logique de coopération. Les Danois et les Néerlandais se cantonnent à la production des porcelets, qui sont exportés vers l’Allemagne où ils sont engraissés, abattus et transformés. Et si ces pays jouent entre eux la carte de la coopération, il n’en est pas de même avec leurs voisins français. Qui pâtissent parfois de véritables tours de cochons ! « Au moment de la crise, les Allemands ont volontairement baissé de 10 cents le prix au kilo alors que les éleveurs français avaient déjà un genou à terre », rappelle cet autre éleveur, installé dans le Berry. En France, le gabarit des exploitations a certes augmenté – en 2010, 21 % des élevages comptaient plus de 200 truies, contre seulement 12 % en 2000 – mais cette progression s’est faite dans un contexte de recul général de la production. Seulement 23 millions de porcs ont été produits en France en 2014, contre trois fois plus en Allemagne et deux fois plus en Espagne. « Oui, la filière française est en butte à un problème de compétitivité. Mais lorsque des éleveurs se regroupent et mutualisent des capacités, certains bien pensants crient au scandale. Regardez ce qui se passe autour de la ferme industrielle des mille vaches, en Picardie ! », s’indigne Christophe Galland. « Les démarches administratives qui sont exigées lorsqu’un éleveur souhaite s’installer ou simplement accroître la taille d’un cheptel sont de nature à dissuader les meilleures volontés », confirme Benoît Tassin, directeur adjoint de la chambre régionale d’agriculture. Elles sont largement plus fastidieuses que ce qui est en vigueur partout ailleurs en Europe : plusieurs années en

France, plusieurs mois ailleurs ! Si naturellement, beaucoup de réponses à cette crise estivale du porc doivent être trouvées dans l’urgence – on estime que 10 % des éleveurs français risquent de disparaître dans les prochains mois –, de nombreux observateurs estiment qu’il est temps de traiter le sujet dans le cadre d’une approche plus globale, propice à l’éclosion de nouveaux modèles. Bien qu’une telle démarche ne puisse pratiquement être généralisée à l’ensemble des exploitations, la mise en œ u v r e d’activités de transformation approvisionnant des circuits courts, autrement dit de proximité (vente à la ferme, marchés) constituerait l’une des pistes les plus prometteuses. Ainsi, les charcuteries Galland vendues à Amboise – et transformées à Betz-le-Château – représentent aujourd’hui entre 10 % et 15 % du chiffre d’affaires de l’exploitation. Qui écoule aussi ses produits à Chambray-lès-Tours où elle exploite le magasin de produits de bouche La Charrette aux côtés d’une douzaine d’autres producteurs locaux. « Ce n’est pas la panacée, mais ces nouveaux débouchés en circuit court permettent de passer les crises sans trop perdre de plumes », observe Jean-Claude Galland Une telle évolution de leur modèle peut-elle suffire à sortir les éleveurs de porcs du bourbier ? « C’est une piste intéressante qui permet aux

éleveurs de stabiliser leurs conditions d’exploitation de plus en plus exposées aux variations des prix, estime Benoît Tassin. Mais les circuits courts présentent des limites, tout simplement parce que les modes de vie des consommateurs et l’organisation de la société n’autorisent pas une généralisation. » Dans le monde moderne, les achats à la ferme ou sur un marché paysan ne peuvent pas supplanter les autres types d’achat les plus répandus (grande distribution, restauration collective hors foyer). « La transformation et la distribution sont des métiers très techniques dont il faut apprendre les règles. Ils requièrent de la polyvalence et de la dextérité. Et allongent les journées de travail », commente ce technicien agricole. « Il faut savoir revenir sur ses habitudes », explique Christophe Galland qui a convaincu son frère d’utiliser au moins partiellement des boîtes en métal – au lieu des traditionnels bocaux – pour les rillettes : « Ça rassure les touristes, surtout ceux qui viennent de loin et qui jugent le verre trop fragile. » « Le métier d’éleveur est un métier passionnant qui demande d’intégrer beaucoup de qualifications. Mais il exige aussi beaucoup de disponibilité et d’abnégation. En Touraine, nous sommes de moins en moins nombreux à maintenir la flamme », regrette Jean-Claude Galland. Jean-Christophe Savattier

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Points Chauds

Politique agricole

Jean-Claude Galland mène la ferme familiale à bon porc Illustration du bien-fondé des circuits courts, la ferme des Bournaîchères, à Betz-le-Château (37), vend le tiers de sa production en direct.

«C

ette année, pour la première fois, le chiffre d’affaires issu des produits que nous transformons et vendons en direct sera supérieur au chiffre généré par nos ventes à la coopérative, qui représente pourtant encore deux tiers des volumes », est fier de nous annoncer Jean-Claude Galland, le codirigeant d’un élevage porcin – la ferme des Bournaîchères – installé à Betz-le-Château, une commune du sud de la Touraine. Pour parvenir à écouler en direct ses jambons, rillettes et pâtés, l’exploitation familiale (800 000 € de CA) s’appuie sur trois débouchés principaux : le marché de Loches, le magasin La Charrette à Chambray-lès-Tours, contrôlé aujourd’hui par une douzaine de producteurs dont Jean-Claude Galland qui en fut l’un des initiateurs, ainsi qu’un réseau d’épiceries fines, au premier rang desquelles celle tenue par son frère Christophe à Amboise. « Nous bénéficions d’un fort courant de sympathie pour ces produits de terroir et de l’image de qualité attachée à la marque rillettes de Tours. Elle a

été renforcée par l’obtention d’une indication géographique protégée (IGP), un dossier sur lequel j’ai beaucoup travaillé lorsque j’étais vice-président de la chambre régionale d’agriculture », poursuit l’éleveur. À la tête d’une entreprise qui emploie cinq salariés à temps plein, il profite aussi de la quête d’authenticité qui trouve son expression dans le marché à la ferme organisé cette année – pour sa 26e édition – le week-end des 19 et 20 septembre: « C’est un moment très festif où l’on déguste nos produits en musique ». Ce grand succès populaire, qui attire des visiteurs et acheteurs de la toute la Touraine mais aussi du Poitou voisin, a accueilli certaines fois jusqu’à un millier de personnes. « Mais ce marché à la ferme, qui est une vraie fête de village, n’a pu tenir dans le temps que grâce à l’implication de la famille, des amis et de dizaines de bénévoles ». D’ailleurs, Jean-Claude Galland en est persuadé, cette réussite qui s’inscrit dans le cadre d’une tradition bien ancrée correspond à une demande quasi « identitaire » émanant des habitués.

« Nos clients ont le sentiment qu’ils préservent quelque chose d’important en venant à la ferme et en achetant un produit. Cela tient presque du geste citoyen ». Mais sans infrastructure de proximité, cette mobilisation autour des produits Galland serait vaine. Si les porcs destinés à la coopérative sont abattus par les grandes plateformes industrielles mancelles, les animaux voués à être transformés à la ferme sont tués à Valençay (36) où subsiste un abattoir de proximité multi-espèces. Ce qui permet aux carcasses de revenir à Betzle-Château dans les meilleures conditions de fraîcheur et de coût, quelques heures après avoir été abattues. « On ne félicitera jamais assez les collectivités locales d’avoir soutenu cet équipement en dépit de conditions d’exploitation difficiles », explique l’éleveur. Sans lui, plus de circuit court. Adieu veau, vache, cochon, couvée ! Le caractère polyvalent de la ferme Galland compose aussi l’un des facteurs importants de sa bonne résistance à la crise. « Nous produisons nous mêmes les céréales qui nourrissent nos animaux. Cela réduit notre exposition à la hausse des cours ». Mais ces atouts n’empêchent pas l’âpreté de la tâche, très éloignée de l’esprit du temps. « C’est un métier dur, exigeant, épuisant y compris psychologiquement. Les animaux ne connaissent pas les samedis et les dimanches, ni les 35 heures », juge JeanClaude Galland qui ne se berce pas d’illusions sur l’avenir de cette activité : « On voit pas mal d’éleveurs se lancer dans les céréales, l’inverse est beaucoup moins fréquent ». Jean-Christophe Savattier

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Économie

Ville connectée

La ville intelligente prend Afin de mieux gérer leurs ressources et leurs équipements, les collectivités locales fondent beaucoup d’espoirs sur des applications numériques et connectées. Ces solutions, avènement de la smart city, peuvent théoriquement s’appliquer à la très grande majorité des fonctionnalités urbaines. A condition de respecter les usages dont elles sont le support et s’assurer de leur appropriation par la population.

L

es collectivités locales doivent, dans un contexte financier très contraint, repenser leur organisation, ainsi que leur offre de services à la population. Une population qui souhaite bénéficier d’une palette de prestations toujours plus dense, qui n’alourdisse pas sa feuille d’impôt et soit compatible avec les standards du développement durable !

Une vraie quadrature du cercle. Heureusement, la technologie vient à la rescousse des décideurs publics ! Pour réussir ce tour de force, les responsables de villes de grande et de moyenne tailles commencent à tirer

“ GARE À NE PAS CÉDER À L’ILLUSION TECHNOLOGIQUE. LA VILLE INTELLIGENTE NE DOIT PAS ÊTRE UN LIEU FROID BARDÉ DE CAPTEURS profit des diverses applications déployées dans le cadre du concept dit de smart city, c’est à dire de ville intelligente dans la langue de Molière… « La smart city, c’est une démarche qui vise à connecter les équipements, les élus et les habitants dans une logique d’optimisation des services publics », explique ainsi un consultant spécialisé dans l’accompagnement des collectivités locales. Et qui s’appuie sur la palette des technologies numériques en vigueur dans la sphère des objets connectés et du « machine to machine » (MtoM). La plupart des équipements urbains, que l’on soit dans le domaine des transports ou de l’éclairage public, s’appuient sur des réseaux qui peuvent produire beaucoup de données d’exploitation en continu. La collecte et le traitement de ces données facilitent l’interaction avec les équipements publics. Elles ouvrent la voie d’un pilotage plus fin qui accroît la qualité du service rendu tout en réduisant – théoriquement – les coûts de fonctionnement.

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« Les applications sont foisonnantes, indique notre interlocuteur. Elles couvrent un large spectre d’interventions qui permettent, par exemple, de gérer à distance la récupération et le stockage des déchets, mais aussi

les flux de circulation automobile à des carrefours très encombrés, ou encore l’éclairage public. » L’objectif sera d’optimiser, par exemple, les tournées des véhicules chargés de ramasser les déchets avant qu’ils soient amenés vers les plateformes de traitement. Dans le domaine de l’éclairage public, des applications pourront utilement réguler le fonctionnement des points lumineux – en atténuant et en augmentant leur intensité –, et ce en fonction du passage des flux de véhicules ou de piétons. Il est aussi tout à fait possible de réguler la signalisation lumineuse d’un carrefour multivoies au gré de la circulation observée par des capteurs. Ces mêmes réseaux peuvent aussi approvisionner des panneaux numériques indiquant en temps réel la disponibilité de places de parkings. « La gestion intelligente des bâtiments fait également partie de la panoplie du genre », explique le responsable régional d’un opérateur spécialisé dans les solutions urbaines intelligentes.


ses quartiers De même, les applications de vidéosurveillance qui offrent la possibilité d’assurer la sécurité des biens et des personnes, tout en préparant au mieux les interventions des forces de l’ordre ou des équipes de secours – à condition de ne pas sombrer dans le cauchemar orwellien –, rentrent dans cette catégorie. Toutes les fonctionnalités urbaines sont de nature à être réinterprétées par les applications estampillées smart city, mais gare à l’illusion technologique. Comme le souligne Carlos Moreno, un scientifique francocolombien grand spécialiste des systèmes urbains connectés, « la ville intelligente ne doit pas être un lieu froid, bardé de capteurs ». Ces technologies doivent, avant tout, répondre à des usages qu’elles peuvent d’ailleurs générer. Et parfois, des applications « low tech » répondent tout aussi bien aux enjeux de la ville intelligente et aux besoins des habitants. Aux États-Unis, un service baptisé « Ideation Nation » a appelé les geeks américains à proposer des solutions simples et peu coûteuses pour améliorer le quotidien des habitants de leurs quartiers. On trouve dans ce catalogue la mise en place d’une solution de paiement sur mobile des contraventions mineures, des applications mobiles permettant d’identifier le meilleur itinéraire pédestre ou cyclable, du mobilier urbain pour recharger son téléphone – parfaitement utile, si l’on veut bénéficier des applications précédentes ! – ou la création d’un centre de gestion de la nourriture destiné à lutter contre les gaspillages alimentaires. Ce dernier est fondé sur une plateforme d’information en ligne qui cartographie les denrées invendues par les GMS. Des aliments qui sont, ensuite, susceptibles d’être récupérés par les associations humanitaires.

« Ce qui est critique dans ces applications qui mobilisent et s’appuient sur l’intelligence collective des habitants, c’est leur dimension expérimentale. Elles doivent s’imposer par l’exemple », soutient à cet égard le maître d’œuvre d’un système de gestion intelligente du stationnement et de l’arrosage public installé récemment à Chartres. Fondée sur les boîtiers communicants développés par la startup locale Sysplug – se reporter à l’article paru dans notre magazine de juin 2013 –, la solution a été « embarquée » sur les mâts de l’éclairage public entre la rue Georges-Fessard et la place de la Poissonnerie. En fonction des retours et de l’appropriation par les utilisateurs, la municipalité prévoit d’étendre l’expérience à d’autres endroits de la ville, notamment dans les quartiers

qui vont s’étendre autour du nouveau Pôle Administratif de la place des Halles et de la gare.

Paulino Lopez et Jean-François Charbonnier, les deux fondateurs de Sysplug.

Jean-Christophe Savattier

Montréal expérimente le pay-by-plate Fini le temps des pervenches qui déambulent le long des trottoirs en quête d’un automobiliste négligent. A Montréal, d’ici à cinq ans, on pourra payer son stationnement sur son mobile en notifiant son numéro d’immatriculation (pay-by-plate). Dans le même temps, une application de géolocalisation associée permettra de renseigner les automobilistes en cartographiant en temps réel les places disponibles (18 000 pour la capitale du Québec). Cette application, expérimentée depuis le début de l’année par Accessum, l’organisme qui gère le stationnement à Montréal, est fondée sur l’exploitation de capteurs « de la taille d’une rondelle de hockey (sic) » ; ceux-ci indiquent la présence d’un véhicule sur un emplacement. Au moment de payer – sur son mobile ou à une borne – le « client » doit juste décliner… sa plaque minéralogique. À terme, les bornes de paiement devraient disparaître et être remplacées par des terminaux multifonctions qui proposeront, par exemple, la vente de titres de transports collectifs. Il est également prévu d’enrichir l’application par la mise à disposition d’itinéraires touristiques ou une sélection de restaurants. Les pervenches locales ne vont pas complètement sortir du paysage : elles sillonneront la ville à bord de véhicules équipés de scanneurs de plaques d’immatriculation qui identifieront immédiatement les mauvais payeurs…

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Économie

Ville connectée

Rambouillet va expérimenter les voitures autonomes Les constructeurs automobiles planchent sur des véhicules autonomes. Rambouillet Territoires, dans les Yvelines, avance des pions pour devenir le terrain d’expérimentation de ces objets connectés roulants.

«N

ous nous positionnons clairement pour que la communauté d’agglomération Rambouillet Territoires soit le lieu d’expérimentation, en France, des voitures autonomes ! Nous y réfléchissons déjà avec Renault, la RATP et l’équipementier Continental. Et nous sommes en mesure de privatiser des routes en quelques mois ! » : Volontaire, Jean-Christophe Attard, directeur général des services, caresse cette idée avec son président Jean-Frédéric Poisson, par ailleurs député (LR) des Yvelines, à l’initiative du projet. Une ambition étayée depuis quelques années déjà par une démarche innovante de la communauté d’agglomération qui met le paquet sur les transports et la mobilité. En novembre 2013, celle-ci troque les six

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voitures de service, à motorisation diesel, pour un parc de cinq Bluecar électriques, identiques à celles que l’on peut voir circuler à Paris. Un bon point pour l’environnement et une petite révolution dans les usages: « Il n’y a plus de voitures affectées à tel ou tel service. Nous réservons des créneaux via nos smartphones. Après une période d’adaptation, cela fonctionne bien ! » Mais Rambouillet Territoires voit plus loin. Une nouvelle étape est franchie avec l’achat (50 000 € de budget) et la livraison en juin dernier de quatre voitures électriques conçues par France Craft Automobile. Cette entreprise de l’Essonne est spécialisée dans la fabrication de véhicules propres vendus en kit ; elle a repris la production des F-City, ces voiturettes électriques conçues par le franc-comtois Fam Automobiles et qui étaient pour partie fabriquées et assemblées en région Centre-Val de Loire (cf. notre édition de décembre 2010). « Les voitures et leurs batteries nous appartiennent, précise Jean-Christophe Attard. Ce qui n’est pas le cas avec les Bluecar. Autre avantage, elles se rechargent sur de simples prises en quelques heures. » Ces quatre F-City sont, en outre, « connectées » grâce à un partenariat avec un opérateur de téléphonie ce qui permet, pour le moment,

de donner des informations sur leur position et leur consommation. Ces véhicules vont être testés par les 25 communes de l’agglomération qui seront équipées, en janvier 2016, d’une quarantaine de bornes électriques de rechargement. L’investissement total est évalué à 400 000 €. « L’opération sera financée à 75 % par l’Ademe et la Région Île-de-France », assure le directeur général. Si l’engouement pour l’usage des F-City se confirme, Rambouillet Territoires envisage même de livrer un véhicule à chaque commune. « Notre objectif est que ces véhicules soient à la disposition de tous, des associations, des centres communaux d’action sociale, des clubs de sport et bien sûr des habitants. Nous travaillons sur une interface pour en généraliser l’usage ». La phase suivante, la plus ambitieuse et la plus « tendance » consistera à rendre les véhicules électriques autonomes. Ce qui pourrait être expérimenté dès la fin de l’année : « En fonction d’un planning de réservation, et entre deux courses, elles se déplaceraient toutes seules et seraient à la disposition des utilisateurs à la bonne heure et au bon endroit », ajoute le responsable des services communautaires. Un gros projet qui n’est envisageable qu’avec « l’aide de l’État ». Et puis, la mise en service des voitures autonomes soulève des problèmes comme celui, par exemple, de la responsabilité en cas d’accident. Cela suppose une adaptation du droit civil et pénal, du code de la route, en fait de tout l’environnement règlementaire français… aujourd’hui principal frein du développement des véhicules autonomes ! Stéphane Messer


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Économie

Ville connectée

Le Vendômois

en mode énergie positive

On peut être en zone rurale et se préoccuper de maîtrise de l’énergie. Le nord du Loir-et-Cher a l’intention de réduire sa facture en s’appuyant sur les dispositifs de l’État et les ressources techniques des opérateurs.

Ségolène Royal était le 8 juillet dans le Vendômois pour signer une convention avec Isabelle Maincion, présidente du Pays Vendômois.

e début du mois de juillet a été riche de visites dans le Vendômois. Le 8, la ministre de l’Écologie Ségolène Royal signait une convention de mise en œuvre du programme TEPCV (Territoires à énergie positive pour la croissance verte) avec Isabelle Maincion, présidente du Pays Vendômois, un des neuf territoires du Centre-Val de Loire* lauréats, en février 2015, du premier appel à projets lancé par le ministère de l’Écologie. Deux jours plus tard, le 10, la même Isabelle Maincion paraphait, avec le président d’Engie (ex-GDF Suez) Gérard Mestrallet et au côté du maire de Vendôme

L

plus tard, il adoptait un plan climat et créait deux postes de thermiciens pour accélérer les actions en faveur de la maîtrise énergétique (travaux d’isolation de l’habitat et des équipements publics, diagnostic d’éclairage public, achats d’énergie). Aujourd’hui, le Pays a saisi l’occasion des labels TEPCV du ministère pour empocher 500 000 €, représentant les trois quarts des dépenses, qui devront être justifiés par des travaux destinés à l’amélioration de la performance énergétique du territoire. Seule contrainte, mais de taille : que les chantiers soient achevés le 31 décembre de cette année.

Pascal Brindeau, la mise en œuvre de la démarche Terr’innove. Les deux conventions concourent à un même objectif : faire du Vendômois un modèle en matière de maîtrise de la consommation énergétique. Le Pays (6 communautés de communes et 105 communes pour 70 000 habitants) n’en est pas à son galop d’essai en matière de développement durable. Dès 2010, il votait son Agenda 21, deux ans

Les collectivités ont donc forcé le rythme pour que, dans ce délai très court, les lampes de type « boule » à mercure de 550 points d’éclairage public puissent être remplacées par des lampes à LED, ou que les salles des fêtes de St-Ouen ou celle du Temple, à Vendôme, soient rénovées pour présenter un bilan thermique satisfaisant : les services communaux vont également recevoir des véhicules électriques.

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Si tout est effectivement bouclé pour Noël, le Vendômois pourra prétendre à une deuxième tranche portant cette fois sur un montant supplémentaire de 1,5 M€ à engager d’ici à la fin 2017 : cette enveloppe substantielle, qui devra être beaucoup plus largement abondée par les collectivités territoriales, pourrait être utilisée à la construction d’un bâtiment à énergie positive. De son côté, Engie s’est engagé à accompagner la transition énergétique du Vendômois. « Nous avons déjà signé 20 Terr’Innove en France, souligne Sabine Guillien, déléguée régionale de ce groupe industriel aux multiples filiales. L’objectif est d’aider le territoire à tracer une feuille de route présentant différents scénarios pour gagner en efficacité et sobriété énergétique et, d’autre part, valoriser la production d’énergies renouvelables. » Cette tâche, confiée à un chef de projet, s’étale sur un an. À l’issue de quoi, les collectivités impliquées ont toute latitude pour engager ou pas les chantiers préconisés et lancer, le cas échéant, les appels d’offres correspondant. Sans qu’Engie revendique d’ailleurs – ce qui, de toutes façons, contreviendrait à la loi – un quelconque favoritisme dans leur attribution. François-Xavier Beuzon

* avec la Ville d’Orléans, les agglomérations de Blois, Dreux et Montargis alliée au Pays Gâtinais, le Pays Loire Beauce et celui de la Touraine Côté Sud, deux communautés de communes du Haut Boischaut et le parc naturel de la Brenne. Des 26 régions française, la région Centre est celle qui a déposé le plus de dossiers (48), de-


Des toits végétalisés… et connectés À Moisy (41), la société Le Prieuré a développé une toiture végétalisée connectée qui permet aux collectivités de mieux gérer la ressource en eau.

E

n quête de diversification, l’exploitation agricole Le Prieuré, de Moisy (41), s’est lancée avec beaucoup d’énergie sur le marché des toitures végétalisées. Ce type de couvert est de plus en plus prisé en milieu urbain, parce qu’il retient les eaux pluviales, empêchant ainsi le ruissellement et les inondations. « Compte tenu de l’imperméabilisation croissante des sols des villes et la survenue d’épisodes climatiques extrêmes, les débordements des réseaux pluviaux à l’origine d’inondations catastrophiques sont redoutés par les responsables des collectivités », explique Raphaël Lamé, gérant de société Le Prieuré Végétal. Son bureau d’études a, dans cette perspective, conçu une offre très originale et innovante fondée sur l’installation de toitures composées de

bacs et de sous-bacs pré-cultivés (Hydropack) accueillant un mince substrat et une plante de rocaille, le sédum, très économe en eau. « En cas de pluie, l’eau stockée – dont une partie va s’évaporer – permet de réhydrater la plante », poursuit Raphaël Lamé. Elle est aussi évacuée, via une micro-vanne affichant un débit lent, vers des sous-bacs puis vers le réseau d’eaux pluviales. Dans la version hydroactive de cette application originale, des capteurs – mis au point par une start up bretonne – enregistrent l’état de remplissage des bacs et transmettent l’information au gestionnaire de l’immeuble. Ce dernier peut actionner à distance les vannes de vidange lorsque les bacs ont atteint leur capacité maximale ou lorsque des fortes intempéries sont annoncées.

« L’étape prochaine sera d’automatiser l’exploitation en intégrant des données météo précises et fiables, ce que nous ne sommes pas encore en mesure de proposer », admet le gérant du Prieuré Végétal. Jean-Christophe Savattier

SigrenEa connecte la collecte des déchets L’entreprise orléanaise SigrenEa développe une solution connectée qui permet d’optimiser la collecte des points d’apports volontaires de déchets.

À

Olivet (45), SigrenEa, créée en 2009 par Jérôme Valette qui préside toujours cette société de 11 salariés, développe une solution qui a commencé à séduire collectivités et opérateurs de la collecte et du traitement des déchets. « Nous proposons à nos clients d’économiser en moyenne près de 25 % sur les coûts de collecte, en les avertissant de l’état de remplissage des conteneurs d’apport volontaire », explique son directeur général Franck Charlet. La solution développée par la jeune société consiste à embarquer une sonde de télémesure dans des conteneurs à déchets pour mesurer périodiquement leur taux de remplissage. « L’information est envoyée deux

fois par jour à une plateforme informatique déployée chez le client », poursuit Franck Charlet. Le traitement de ces données, recueillies en temps réel, permet d’organiser en les optimisant les tournées de collecte de containers effectuées par camion. « En règle générale, le taux de remplissage des containers ne dépasse pas 50 % au moment du ramassage. Notre application assure au moins un taux de 50 %, voire de 75 % », affirme Franck Charlet. Les collectivités ou leurs prestataires agissant dans le cadre d’une délégation de service public (DSP) sont facturés sur une base mensuelle de 9 à 15 € par container. « Nous équipons les Villes de Tours, d’Orléans et de

Chartres », indique le dirigeant qui fonde aussi beaucoup d’espoirs sur l’export et le potentiel d’autres marchés, hors collectivités locales : « Nous avons déjà remporté de belles affaires auprès d’opérateurs spécialisés tels que Suez Environnement ou la Coved. » SigrenEa (500 000 € de CA prévus en 2015) devrait prochainement intégrer le protocole de connectivité cellulaire développé par la société Sigfox, appelé à devenir la référence de ce type d’applicaJCS tions. La Lettre Valloire - Septembre 2015 29


Économie

Numérique

French Tech Loire Valley : Les promoteurs de la candidature French Tech Loire Valley ont ravalé leur déception. Ils entendent exploiter à fond les acquis de leur démarche collective. La valorisation des deux incubateurs installés à Tours et à Orléans fait partie du catalogue des bonnes intentions. Des actions fortes à l’international sont aussi à l’étude. Ce qui n’exclut pas de s’interroger sur ce qui a fait défaut.

U

ne fois ravalée leur déception, les promoteurs de la candidature French Tech Loire Valley n’ont pas tardé à rebondir. Dès l’annonce de la mauvaise nouvelle, le Tourangeau Thibault Coulon comme l’Orléanais Olivier Carré, devenu entretemps maire de sa ville, répétaient sur tous les tons : « L’aventure continue ». Pas question de stopper les machines, « il s’agit d’aller jusqu’au bout de la démarche ». Tout d’abord, rappelle Thibault Coulon, « ce projet a conduit nos collectivités à se doter de deux incubateurs à haute qualité de service – l’ex-site Mame à Tours, le Lab’O à Orléans – qui se déploient sur 14 000 m2 et qu’il convient d’exploiter au maximum ». D’ici à la fin du mois de septembre, plusieurs jeunes entreprises du numérique, installées en région parisienne et intéressées par les ressources de l’infrastructure tourangelle, devraient effectuer une première visite de reconnaissance. Dans cette perspective, les élus tourangeaux souhaiteraient que les équipes de la mission de reconversion des ex-salariés de

Thibault Coulon

Michelin, qui occupent partiellement le site Mame, en principe jusqu’à la fin décembre, libèrent progressivement ces locaux. « Ce qui est intéressant, c’est que nous

principe. Enfin, les responsables des deux alliées devraient étudier d’autres pistes de coopération après avoir fait cause commune dans le numérique. Et passer par pertes et profits plu-

“ LA PLUPART DES STARTUPS QUE NOUS AVONS MISES EN AVANT SE SITUENT À UN STADE ULTRA-PRÉCOCE DE DÉVELOPPEMENT. QUANT AUX PLUS ANCIENNES, IL SUFFIT DE REGARDER LEURS BILANS...

sommes, du point de vue de la prospection, dans une démarche commune avec Orléans. Notre offre immobilière sera commercialisée sous la même marque : French Tech Loire Valley ! ». Certes, le Lab’O orléanais, aménagé sur le site de l’ex-usine Famar, n’a pas encore atteint tout à fait le point d’achèvement de son homologue tourangeau. Mais ce décalage ne constitue pas un handicap. Bien sûr, « il n’est pas question » de revenir sur la création d’un fonds d’investissement de proximité (FIP) qui pourrait être doté de 20 M€. Cette initiative, inédite dans le cadre des candidatures au label French Tech, avait d’ailleurs été saluée par la ministre lors de son passage en Touraine. Les collectivités concernées, ainsi que Bpifrance, ont déjà donné leur accord. Et deux banques mutualistes de la place s’apprêtaient à répondre positivement à cette invitation, à l’heure où nous écrivons ces lignes. Elles viendraient ainsi abonder les concours de Bpifrance et des deux agglomérations ligériennes qui ont validé le

sieurs dizaines d’années de rivalité stérile et parfaitement contre-productives. Mais elles n’échapperont pas au devoir d’inventaire des forces et faiblesses de cette candidature manquée. Selon Thibault Coulon, « le manque de temps, qui n’a pas permis une véritable co-construction avec nos amis orléanais et le gouvernement » constituerait l’explication principale de cet échec. Afin de candidater à une nouvelle vague de labellisation dans des conditions optimales, une délégation ligérienne doit d’ailleurs rencontrer la mission French Tech d’ici à la fin du mois de septembre. « On nous a fait comprendre que notre projet pêchait par manque de dimension internationale », explique Thibault Coulon. Pour y remédier, les responsables de la French Tech Loire Valley envisagent de participer à l’édition 2016 du Consumer Electronic Show (CES), la grand-messe de la high tech mondiale qui se tiendra du 6 au 9 janvier prochain à Las Vegas. Ils devraient aussi contribuer à l’Innovation Week,


et maintenant ? un autre grand rendez-vous – français, cette fois-ci – organisé au mois d’octobre prochain. L’absence d’un véritable leader issu du monde de l’entreprise et précédé d’une forte réputation dans les milieux du numérique – une lacune qui avait été relevée par plusieurs observateurs – a aussi pesé dans la balance. « La plupart des startups que nous avons mises en avant se situent à un stade ultra-précoce de développement. Quant aux plus anciennes, il suffit de regarder leurs bilans pour prendre conscience de leur fragilité », soutient cette source proche de la candidature orléanaise. Certes, on pourra objecter que les Orléanais pouvaient justement s’appuyer sur l’activité d’Easyflyer, spécialisée dans l’imprimerie en ligne de grands formats et rachetée récemment par l’américain Cimpress. Mais le succès incontestable remporté par la startup n’estompe pas la faiblesse relative des autres prétendantes. Afin de muscler la version ligérienne de la French Tech, une convention va prochainement être signée avec Orange, « qui doit davantage s’impliquer dans notre projet », annonce Thibault Coulon. Il juge aussi « qu’il faut s’allier avec deux autres grands opérateurs de dimension nationale ».

Au-delà de la présence symbolique, mais jugée obligatoire, d’Orange dans les incubateurs, au plus près des entreprises, les élus souhaitent que l’opérateur historique s’engage dans une véritable mission de conseil et d’assistance. À Orléans, il nous semble étrange que personne n’ait approché Amazon, l’un des quatre « Gafa » (Google, Apple, Facebook, Amazon), pour étudier des coopérations avec la vallée numérique locale. L’absence de réelle spécialité aura également contribué au rejet de la French Tech Loire Valley. « Nous étions dès le départ dans une logique multithématique : la logistique, le biomédical, l’agriculture 3.0, le tourisme, parce qu’elle correspondait à la réalité sur le terrain », se justifie Thibault Coulon qui n’exclut pas de se recaler sur une thématique unique en cas de dépôt d’une seconde candidature. Une nouvelle séquence de labellisation thématique – à l’image de celle qui a permis à Angers d’être retenue dans le domaine des objets connectés en juin dernier – doit être organisée par les pouvoirs publics. On se souvient qu’Axelle Lemaire, lors de l’exposé des atouts de la candidature ligérienne, avait réagi très favorablement à l’évocation de la piste « agro 3.0 » !

« Mais il faudra inévitablement trouver un sujet commun à Tours et à Orléans ou, peut-être, requérir une double labellisation dans le cadre du prochain appel d’offre thématique qui doit être organisé par les pouvoirs publics d’ici à la fin de l’année », avance Thibault Coulon. Si c’est juste l’agro, Tours sera sec ! Si on part sur le biomédical, Orléans restera à l’écart. Enfin, la question de l’extension du périmètre territorial aux autres écosystèmes régionaux, notamment ceux de Chartres et de Bourges qui frappent à la porte, devra aussi être tranchée…. label ou pas label ! « Mais il faudra bien cartographier ce qui est amené par ces partenaires. OK sur le principe, mais il ne faut pas s’unir pour s’unir ! Cet éventuel rapprochement doit être construit sur des apports précis », prévient Thibault Coulon. Mais pour la plupart des acteurs locaux du numérique, une véritable dynamique collaborative est née. « Cet engagement dans la labellisation nous aura permis d’identifier un potentiel que nous ne soupçonnions pas, observe cet entrepreneur tourangeau du net. A nous de faire en sorte que le soufflé ne retombe pas ».

Jean-Christophe Savattier

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Économie

Numérique

MediaSize modernise les taxis Première occupante de la pépinière numérique de Vendôme, la start up MediaSize installe des écrans interactifs dans les taxis pour fournir une palette de services digitaux à leurs clients.

A

près les agressions contre les chauffeurs et clients d’UberPop au mois de juin, les taxis ont sérieusement besoin de redorer leur image et d’entrer de plain-pied dans le siècle digital. La start up MediaSize, qui vient d’ouvrir un bureau sur Outremer, la pépinière numérique du parc technologique de Vendôme (41), peut les y aider. Cette société parisienne installe des écrans interactifs multimédia (en fait, une simple tablette) sur l’appui-tête des sièges avants des taxis, face aux passagers arrières du véhicule : si le contenu est d’abord destiné à distraire et informer les clients, des applications permettent aussi de traduire automatiquement au chauffeur les demandes des touristes étrangers et

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même de payer la course à l’aide de son smartphone. « Nous équipons déjà environ six cents taxis et nous atteindrons bientôt le millier », explique Hugues de Laubadère, le fondateur de la société. La poursuite du déploiement passe par des accords avec des groupements, comme celui déjà signé avec le parisien Alpha Taxis, n°2 du marché avec ses 1500 véhicules. En attendant, peut-être, un deal avec les taxis de la région CentreVal de Loire. Pour ne pas brouiller le message, MediaSize a fait le choix de se concentrer sur l’équipement des quelque 80 000 taxis français et de délaisser les VTC, concurrents des premiers. Hugues de Laubadère regarde aussi vers l’international, car sa solution,

unique sur le marché français, ne semble pas avoir beaucoup d’équivalents à l’étranger. La société, qui compte aujourd’hui une douzaine de collaborateurs, compte renforcer son effectif… peut-être au bénéfice de Vendôme. Une ville avec laquelle elle noue des liens forts puisque le bâti métallique dans lequel est fiché la tablette est fabriqué chez Dargaisse. François-Xavier Beuzon


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Économie

En bref SEROP S’AGRANDIT À ESVRES

STEVA RENFORCE MONTOIRE-SUR-LE-LOIR pécialisée dans la fabriS cation d’éléments

pour cabines d’engins agricoles et de chantier, l’exusine Altia de Montoire-sur-le-Loir (41), reprise par le groupe Steva en fin d’année dernière, va faire l’objet d’importants investissements. L’entreprise (environ 20 salariés, 3,5 M€ de CA prévus pour 2016) engagera à l’automne les travaux d’une extension de 1 000 m². Ce programme va conduire la société à embaucher une petite dizaine d’intérimaires dont les emplois pourraient être pérennisés si la conjoncture le permet. Par ailleurs, la direction compte investir environ 800 000 € dans de nouveaux équipements industriels. Steva, qui a réussi à préserver le portefeuille client d’Altia, a également remporté de nouveaux contrats dans le secteur automobile.

LES TRANSPORTS PANON PRENNENT 11 000 M² À CHECY Les Transports Panon, déjà présents à Semoy (45), ont pris à bail 11 000 m² d’entrepôts à Chécy pour leur client Christian Dior. Ils s’installent en lieu et place de DSV Solutions, qui a perdu l’an passé un contrat avec le fabricant de peintures industrielles Akzo Nobel au profit du transporteur et logisticien orléanais Deret.

ASCO NUMATICS S’ÉTEND À LUCE Filiale française du groupe américain Emerson spécialisée dans les vannes et les 34 La Lettre Valloire - Septembre 2015

SWISSLOG FRANCE PROJETTE D’INVESTIR

composants pneumatiques, Asco Numatics (81 M€ de CA) a inauguré l’extension de son unité de production de Lucé (28), qui emploie 450 salariés. Asco Numatics a investi 5,5 M€ dans ce programme qui permet au site lucéen de devenir le siège européen du groupe Emerson (24 Md$ de CA, 115 000 salariés dans le monde).

Installée à St-AmandMontrond (18), Swisslog FranceTélédoc, spécialisée dans la manutention automatisée, prévoit d’investir. L’entreprise n’a pas encore fait le choix entre une extension in situ et la construction d’une nouvelle usine, qui resterait basée sur la commune. Swisslog France-Télédoc, qui est également implantée à St-Denis (93), n’engagerait pas ce programme d’expansion avant 2016.

À l’étroit dans ses 1 600 m² à Esvres-surIndre (37), le mécanicien de haute précision Serop (4 M€ de CA, 37 salariés) investit 400 000 € dans une extension de 660 m². Le bâtiment, qui accueillera de nouvelles machines d’ici à deux ans (400 000 € d’investissement prévus), devrait être livré à la fin de l’année.

SIDER VA DOUBLER À BUZANÇAIS Déjà installée à Buzançais où elle exploite une plateforme de préparation de commandes d’environ 25 000 m² (75 salariés), Sider, un distributeur de produits de quincaillerie et de bricolage, s’apprête à engager un très important programme d’extension de ses capacités qui pourrait l’amener à doubler sa surface. Sider dispose à Buzançais d’une réserve foncière de 13 ha.


PEC TRANS CONSTRUIT SUR SYNERGIE VAL DE LOIRE Installée aujourd’hui à Lailly-en-Val, la société Pec Trans Logistique (2 M€ de CA en 2013) devrait acheter un terrain de 1 ha sur le parc d’activités Synergie Val de Loire de Meungsur-Loire pour y construire 3 000 m² de locaux, comprenant un bâtiment logistique, un quai de chargement et un portique de lavage.

EASYFLYER N’IRA PAS AU LAB’O Un moment annoncée au Lab’O (ex-site Famar) le long de la Loire, l’imprimerie en ligne Easyflyer, filiale depuis le mois d’avril du groupe Cimpress (VistaPrint),

va finalement s’étendre en louant des locaux attenants à son unité actuelle de la zone des Montées.

SEPTEM INVESTIT À MONTRICHARD Le Fidec a accordé un prêt d’honneur de 100 000 € à un spécialiste de la mécanique de précision installé à Montrichard (41), la société Septem (9 salariés). Celle-ci, qui travaille aussi bien pour l’aéronautique, l’automobile que la connectique et l’optique, a déjà investi dans l’agrandissement de ses locaux (500 m²). Elle compte acquérir à l’automne un tour de décolletage 10 axes à poupée mobile.

VORWERK-SEMCO VOIT TOUJOURS PLUS GRAND Le fabricant de robots ménagers Vorwerk-Semco est décidément boulimique. Après avoir annoncé en janvier dernier un projet d’extension de 2000 m², la société prévoit déjà un second agrandissement de 9000 m² de son unité de Cloyes-sur-le-Loir (28). Le site, qui emploie environ 300 salariés, atteindra donc 21000 m², soit quasiment le double de la surface actuelle. Il accueillera d’ici à deux ans une nouvelle ligne de montage du Thermomix TM5 et de nouvelles presses d’injection. Si la demande du marché est au rendezvous, l’intégration d’une autre ligne de montage serait possible. Ces investissements du groupe permettront d’accompagner la forte croissance des ventes du Thermomix, notamment le nouveau modèle TM5. Depuis 2012, les ventes du TM5 à écran tactile – véritable vedette de la gamme du fabricant –, ont dopé la production de la plateforme industrielle française qui assure les trois quarts des volumes des modèles récents. Pas étonnant dans ce contexte que l’usine de Cloyes-sur-Loire ait bénéficié ces dernières années de 60 M€ d’investissements en cumulé. Une soixantaine de salariés vont étoffer en 2015 les effectifs du site qui va dépasser la barre des 400 collaborateurs.

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Économie

Industrie

Sephora et Caudalie

se redéploient sur Orléans

La filière cosmétique orléanaise est resplendissante. À côté du géant Parfums Dior et de ses 1 500 salariés de St-Jean-de-Braye, Caudalie et Sephora vont lancer des programmes d’extension de leurs installations, respectivement à Gidy et à Saran.

Caudalie a installé son centre logistique européen à St-Jeande-Braye il y a une dizaine d'années.

L

a Cosmetic Valley orléanaise est décidément florissante. Près de deux ans après l’inauguration d’Hélios, le gigantesque (18 000 m2 !) centre de recherche parfums et cosmétiques des Parfums Christian Dior à St-Jean-de-Braye (1 500 salariés au total, en comptant l’unité de production), c’est Caudalie, le spécialiste des produits de beauté à base de substances naturelles extraites de la vigne (polyphénols, vinolevures, resvératrol, viniférine...), qui renforce ses installations dans la capitale régionale. Vingt ans après la création de la marque et un peu moins de dix après l’ouverture de son centre logistique européen à St-Jean-de-Braye – un bâtiment de 4 800 m2, certes plus modeste que les installations voisines du groupe LVMH – la société fondée par Mathilde et Bertrand Thomas envisage de migrer vers le nord de l’agglomération, sur la commune de

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Gidy, où elle côtoiera un autre fleuron de l’industrie orléanaise, les laboratoires Servier. Pour cela, une société patrimoniale des deux époux Thomas vient d’acquérir un terrain de 17 ha. Cette vaste emprise foncière, située sur une partie de la zone d’activité Pôle 45, devrait accueillir des locaux administratifs, un centre de R&D, un autre de formation et une plateforme logistique de Caudalie (environ 150 M€ de CA). En dépit de nos demandes, le gabarit exact de ce programme immobilier ne nous a pas été précisé. Par ailleurs, une autre société du groupe LVMH, le distributeur de produits cosmétiques Sephora, va déménager d’un point à un autre de Saran. La plateforme de 1000 m2 dédiée au

traitement de la comptabilité et de la supply chain de sa filiale française, hébergée actuellement dans les locaux que possède le transporteur et logisticien Deret rue du Champ Rouge, est devenue au fil du temps trop exiguë. Afin de disposer de plus de place et d’une meilleure visibilité, le distributeur de produits cosmétiques transférera cette unité d’environ 70 collaborateurs dans un bâtiment de 4 000 m2 qui sera construit sur Pôle 45 : c’est le même Deret qui sera le promoteur-investisseur de ces nouveaux locaux… tout en continuant à assurer la logistique des quelque 300 points de vente Sephora en France à partir de ses propres plateformes. FXB

Cecaf et ACL en redressement judiciaire Si les donneurs d’ordre de l’industrie cosmétique se portent bien, ce n’est pas toujours le cas de leurs sous-traitants. Au début du mois de juin, la holding Nalice Finance, qui contrôle à St-Jean-de-Braye la Cecaf et ACL (Atelier Cosmétique du Loiret) – respectivement 47 et 26 salariés –, a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce d’Orléans : la période d’observation a été fixée à six mois. Cet épisode judiciaire vient interrompre l’aventure engagée en 2010 par Cédric Troussard, qui avait alors repris Cecaf. Trois ans plus tard, et après le rachat d’ACL et de Cosmetic Collections Maquillage, le petit groupe annonçait 6,5 M€ de CA pour 120 salariés. Les difficultés seraient en fait apparues avec la reprise à la barre du tribunal de commerce de Cosmetic Collections Maquillage en juillet 2012 : l’entreprise, rebaptisée Cecaf Maquillage, n’avait pu être redressée et son dirigeant dû se résoudre à la liquidation judiciaire en novembre 2013. Une nouvelle fois reprise et rebaptisée Orléans Cosmetics par Christophe Dulong, elle emploie désormais une trentaine de personnes à St-Cyr-en-Val.


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Économie

Industrie

Il veut redonner tout son lustre

à la faïence de Gien

Pascal d’Halluin est un spécialiste des marques de luxe en perte de vitesse. Après avoir redressé Biotherm, Cacharel et Lacoste, il a repris la faïencerie de Gien avec l’intention d’en faire un symbole de l’art de vivre à la française.

L

Le décor peint à la main est le cœur du savoir-faire de la faïencerie de Gien.

es plats ne repassent jamais deux fois, dit-on. Pourtant, c’est bien au deuxième passage que Pascal d’Halluin et son associé Yves de Talhouët ont eu l’opportunité de racheter la faïencerie de Gien pour l’euro symbolique. « Nous étions entrés en négociation fin 2012 avec le précédent propriétaire, Louis Grandchamp des Raux, par l’intermédiaire de la banque Rothschild, explique-t-il. Mais nous ne nous sommes pas entendus sur le prix et en sommes restés là. » En février 2014, le vent tourne. La maison mère de la faïencerie, Gien Finance, dépose son bilan avec un passif de 3 M€. Trois mois plus tard, Pascal d’Halluin et son associé emporte l’affaire face à sept autres candidats. « Nous avons présenté un plan de développement sur le long terme avec des moyens financiers et la garantie du maintien des 156 salariés en les associant au capital à hauteur de 10% », expliquent les repreneurs qui veulent redonner à cette manufacture créée en 1821 le rang qu’elle avait perdu. Pour y parvenir, Pascal d’Halluin compte utiliser les recettes qui lui ont réussi dans ses précédentes expériences de « redresseur de marques ». Dans les

années 80, tout jeune diplômé de Sciences Po et de l’Insead, il entre chez L’Oréal et met en œuvre le réveil de la marque Biotherm au côté de Jean-Paul Agon, futur patron du leader mondial des cosmétiques. Il s’attaque ensuite au redressement de la marque Lee Cooper sur le marché français : sept ans plus tard, la marque de jeans sera revendue onze fois son résultat annuel. C’est ensuite le groupe suisse Maus qui lui confie la relance de Lacoste qui était devenu l’emblème des banlieues. Il parviendra à faire revenir le crocodile sur la poitrine d’une clientèle urbaine plus stylée. Un nouveau challenge l’attend, cette fois pour son propre compte. Le plan repose sur quatre axes principaux. En premier lieu, le repositionnement de la marque avec une nouvelle identité visuelle : la charte graphique sera dévoilée en mars prochain. Dans le même temps, la faïencerie de Gien va « faire appel à des artistes internationaux pour créer de nouveaux décors,

comme Olivier Gagnère qui signera une collection cet automne », précise Pascal d’Halluin. Il prévoit également de renouer avec une tradition du Gien : le décor peint à la main. « C’est le cœur du savoir-faire de cette maison, rappellet-il. Nous le réserverons à des pièces d’exception en visant les marchés émergents. » La clientèle touristique sera ciblée avec des créations mettant en valeur des monuments, comme le château de Versailles qui proposera en 2016 des objets de décoration et des cadeaux «made in Gien ». Le développement à l’international constitue le troisième point fort du projet : « L’export représente aujourd’hui 35 % de la production. Nous prévoyons de le faire passer à 70 % en cinq ans. » Enfin, le circuit de distribution va être totalement repensé. Il s’appuiera sur des « corners » dans les magasins de grandes enseignes, comme aux Galeries Lafayette, mais aussi dans les capitales mondiales, et sur une stratégie digitale qualitative. Pour accompagner ce plan de développement, un investissement de 1 M€ est programmé sur trois ans. Le chiffre d’affaires de 12 M€ devrait rester au même niveau en 2015 avant de décoller à partir de 2016. Mais il faudra encore du temps pour redonner à la faïencerie de Gien tout son éclat : sept ans, prévoit son nouveau manager. Bruno Villeneuve


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Économie

Industrie

Cizeta joue la carte de l’innovation Spécialisée dans les bas de contention, l’orthopédie et la phlébologie, l’entreprise a quadruplé ses ventes en cinq ans. Elle axe son développement sur l’innovation. Charles Dubourg

I

nstallée depuis 2008 à St-AmandMontrond (18), Cizeta Medicali France n’en finit pas de grandir. Ce fabricant de bas de contention d’origine italienne vient, en effet, de tripler sa surface pour la porter à 2 700 m2. « Notre croissance est en moyenne de 20 % par an, note le directeur général Charles

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Dubourg. En 2014, le CA a atteint 11 M€ et cette année, il devrait être de 12,5 M€. En 2016, nous prévoyons de croître encore de 20 % car nous aurons de nouveaux produits sur le marché. » En cinq ans, l’entreprise a quadruplé ses ventes. Si son cœur de métier reste le bas de contention, l’orthopédie et la lymphologie sont en pleine expansion. « Nous traitons environ 750 commandes par jour », ajoute son dirigeant, qui rappelle que 2 % du CA est consacré à la recherche et au développement. Charles Dubourg a d’ailleurs imaginé et créé une attelle de cheville nommée A2T, qui vient de remporter le Trophée régional de l’innovation. Cette attelle, pour laquelle Cizeta a investi 200 000 €, est entièrement fabriquée en France. Pour l’instant, les différents éléments sont seulement assemblés à St-Amand

mais, avec l’agrandissement des bâtiments, une partie fabrication pourra être installée sur le site, notamment le moulage des parties plastiques. Le service commercial compte 30 salariés, auxquels s’ajoutent 25 collaborateurs répartis entre les services R&D, administration et marketing. « Nous embauchons en moyenne 10 personnes par an et consacrons 3 % du CA à la formation », précise Charles Dubourg. L’agrandissement qui vient d’être réalisé, avec notamment une plateforme de stockage et d’’expédition entièrement informatisée, peut supporter un quasi triplement du volume d’activité. En attendant, Cizeta optimise l’espace disponible en le proposant à des confrères du secteur paramédical pour héberger leur logistique. Stéphanie Payssan


Duvivier & Associés prend ses aises Le cabinet d’avocats Duvivier & Associés vient d’emménager boulevard Béranger, à Tours. Une nouvelle étape pour ces professionnels du droit en plein développement.

C

hez Duvivier & Associés, la rentrée 2015 se fait dans les cartons. Le cabinet d’avocats a emménagé cet été sur 600 m2 le long du très élégant boulevard Béranger, à Tours, et il achève son installation dans des locaux plus en rapport avec son développement. « En 1987, en reprenant ce cabinet fondé en 1956, j’ai pris conscience que nous ne pourrions nous développer qu’en étant pluridisciplinaires », explique son dirigeant Jacques Duvivier. Droit social et fiscal, opérations de fusions-acquisitions, contentieux civil et commercial, mais aussi gestion de patrimoine au profit de chefs d’entreprises désireux de préparer leur retraite… Aucun domaine n’est négligé pour rendre un « full service » à des clients qui veulent aller à

l’essentiel en s’adressant à un interlocuteur unique. Au printemps dernier, Duvivier & Associés s’est rapproché de Gérard Chautemps, un ténor du barreau de Tours, dont les compétences en droit pénal et commercial élargissent encore le champ d’intervention. Sa principale collaboratrice, Julie Duvivier, en a profité pour intégrer l’équipe. Elle ne sera pas dépaysée puisque cette jeune juriste est la propre fille de Jacques Duvivier. Aujourd’hui, le cabinet compte 50 collaborateurs répartis sur cinq bureaux : le berceau historique de Tours, mais aussi Paris, Rennes, Blois et Poitiers. Une ouverture à Angers est envisagée dans les prochains mois. Une nouvelle page s’ouvre…

Jacques Duvivier

www.duvivieretassocies.fr

La Lettre Valloire - Septembre 2015 41


Économie

Chantiers H&M figurent parmi les enseignes pressenties.

EURE-ET-LOIR

LOIRET

La chambre des métiers et de l’artisanat d’Eureet-Loir vient de retenir le cabinet d’architectes chartrain Berthelier-Tribouillet pour la réhabilitation et l’extension du bâtiment du pôle automobile du CFA de Chartres. Ce site est dédié à l’apprentissage de la mécanique et de la tôlerie. À l’issue de ce programme de 6 M€, qui sera réceptionné à la rentrée 2016, le pôle sera doté d’une surface de 3 750 m².

CHER

balnéothérapie seront construits.

des Fougerolles à la Villeaux-Dames ainsi qu’une résidence de tourisme comprenant 101 appartements. Les travaux de cet ensemble vont débuter au cours du dernier trimestre 2015 pour une ouver ture programmée en 2017.

INDRE-ET-LOIRE

Tour(s) Habitat, l’office public de l’habitat tourangeau, va construire 45 logements pour les séjours temporaires d’apprentis et jeunes en alternance rue du Plat d’Étain, à Tours, sur une parcelle de terrain que lui a cédée le ministère de la Défense. Livraison : septembre 2016.

Un centre de loisirs de 350 m² sera construit à proximité du parc municipal du Châtelet ; le montant du programme s’élève à environ 500 000 € .

EURE-ET-LOIR Un immeuble de 700 m², comprenant 4 étages, va voir le jour à Chartres, à côté du cinéma Les Enfants du Paradis. Le bâtiment accueillera la 11e salle du centre cinématographique au niveau -1, et le reste du bâtiment sera occupé par l’agence immobilière Citya. La CdC des Trois-Rivières a programmé pour 2 M€ l’extension du centre nautique de Cloyes-sur-le-Loir. Un espace détente, une salle de cardio-training, une salle de fitness, une salle de soins esthétiques et un bassin de

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Une résidence pour seniors de 29 logements (du T2 au T4) va voir le jour à Ingré. Les travaux débuteront fin 2015 pour une livraison à l’été 2017. La commercialisation démarrera dès la fin de l’année.

La CdC Loches Développement a prévu de déplacer l’actuelle déchetterie de Chanceaux-près-Loches vers un nouveau site sur la ZI de Vauzelles, à Loches. Les travaux de ce nouvel équipement, qui sera implanté sur une emprise de 0,5 ha, débuteront fin octobre 2015 pour une livraison à l’été suivant. Le budget de l’opération est estimé à 600 000 € . Le promoteur nantais West Finances va engager la construction d’un hôtel**** de 105 chambres sur la ZA

LOIR-ET-CHER La municipalité de Blois envisage de relancer la construction de 11 450 m² de surfaces commerciales dans le quartier du chevet Saint-Vincent, pour un coût de 4,1 M € . Monoprix et

La municipalité d’Ingré compte également construire une nouvelle école de musique. Le montant des travaux, qui devraient être réalisés en deux phases, est estimé à 3,7 M € .

LOIR-ET-CHER Dans le cadre du projet de réhabilitation du quartier Rochambeau, à Vendôme, les sociétés Nexity et Acapace – Les Jardins d’Arcadie - sont porteurs d’un projet de résidence pour seniors de 95 logements (5 200 m²), qui devrait voir le jour en 2016.


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La Jordanie, carrefour des mondes et des cultures Au cœur du Moyen-Orient, aux portes de l’Asie et de l’Arabie, le petit royaume Hachémite est une grande destination pour qui souhaite découvrir des cultures millénaires, randonner au milieu de paysages à couper le souffle ou rester bouche bée face à des monuments grandioses.

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Le châtelain de Meung et Beaugency lance sa croisade touristique Un vent de renouveau souffle sur les vieilles pierres des châteaux de Meung-sur-Loire et de Beaugency, à l’ouest du Loiret. Leur nouveau propriétaire, Xavier Lelevé, veut en faire des places fortes de l’activité touristique et événementielle. 49

Des fleurs jusqu’à la Toussaint Le festival international des jardins prolonge l’été jusqu’aux chrysanthèmes du 1er novembre. Pour sa 24e édition, il a fait place à l’insolite.


Escapades

Ailleurs

La Jordanie, carrefour Au cœur du Moyen-Orient, aux portes de l’Asie et de l’Arabie, le petit royaume Hachémite est une grande destination pour qui souhaite découvrir des cultures millénaires, randonner au milieu de paysages à couper le souffle ou rester bouche bée face à des monuments grandioses. Bienvenue en Jordanie, terre de toutes les beautés. a Jordanie pose un réel problème au visiteur. Il y a tant à y voir et à y faire que l’on ne sait par quel lieu commencer pour parcourir ce pays de 92 000 km² et de 8 millions d’habitants. Une semaine, au bas mot, est nécessaire pour appréhender les principales richesses culturelles et naturelles de

L

En dépit du conflit qui ensanglante la Syrie et l’Irak, à sa frontière nord, la Jordanie sur laquelle règne Abdallah II depuis 1999, demeure provisoirement (et durablement, on l’espère) un havre de paix, qui devrait faire partie du « top 10 » de tout amoureux des voyages. À peine débarqué de l’avion, une visite d’Amman s’impose. Ne serait-ce que pour goûter le cosmopolitisme de la capitale de ce royaume Hachémite, fondé au lendemain de la Première guerre mondiale,

peut y admirer les vestiges du Temple d’Hercule construit sous Marc Aurèle (161 à 180 après J.-C.), d’une église byzantine (VIe siècle après J.-C.) et du Palais omeyyade (720 à 750 après J.-C.). Dans la ville basse, ne pas manquer le théâtre romain restauré (6 000 places) qui accueille encore des spectacles, le forum romain et la mosquée Al Husseini construite en 1924 sur le site d’une mosquée datant de la période omeyyade. À 50 km au nord d’Amman, Jerash, deuxième

cette passerelle entre la mer et le désert, entre la vallée du Jourdain à l’Est et les canyons désertiques de l’Ouest, entre les ruines de la cité romaine de Jerash au nord et les tombeaux nabatéens de Pétra, au sud.

dans laquelle le moderne et l’antique se côtoient sans crier gare. Faute de disposer de beaucoup de temps, la priorité est de déambuler dans la citadelle, perchée sur une colline qui offre un point de vue panoramique. On

site le plus visité de Jordanie après Pétra, constitue l’une des cités romaines les mieux préservées du monde, avec ses temples, ses théâtres, ses thermes, son hippodrome (où se déroulent des animations), son arc d’Hadrien, sa

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des mondes et des cultures splendide Place Ovale et son artère principale de 800 mètres de long, le Cardo Maximus, bordée de 200 magnifiques colonnes. Après Jerash, cap au sud, direction Madaba, à 32 km d’Amman. Son église orthodoxe Saint-Georges abrite une extraordinaire mosaïque byzantine de deux millions de pièces sur une superficie de 25 mètres sur 5, datant du VIe siècle. Cette fresque colorée représente toute une partie du MoyenOrient : Jérusalem, d’autres villes saintes, des collines et des vallées jusqu’au delta du Nil, sans oublier la mer Morte, face à laquelle des poissons rebutés par la salinité de l’eau font demi-tour pour regagner le golfe d’Aqaba ! Non loin de Madaba se dresse

le Mont Nebo, au sommet duquel Moïse (qui y aurait son tombeau) et bien plus tard, en l’an 2000, le pape Jean-Paul II, admirèrent la Terre Sainte à leurs pieds : le Jourdain, la mer Morte, Jéricho et Jérusalem. Quelques

kilomètres seulement séparent le Mont Nebo de Béthanie, au bord du Jourdain, un lieu de calme et de sérénité où Jean-Baptiste baptisa le Christ, ce dont attestent divers vestiges dissimulés dans la verdure. La mer Morte, non loin de Béthanie, se situe à 417 mètres au-dessous du niveau de la mer. Il ne s’agit en fait que d’un lac ultra salé de 810 km² dont la profondeur atteint 400 mètres dans sa partie septentrionale. Ce site fascinant, aux rives parsemées d’énormes blocs de cristaux de sel aux allures de patates de corail, se trouve au point le plus bas de la surface du globe terrestre. Et le niveau de ses eaux continue à descendre, tant l’évaporation est supérieure au maigre apport fourni par le Jourdain, jadis un fleuve majestueux devenu aujourd’hui une mince rivière, et par les sources qui dévalent en hiver des monts de Judée et de Moab. Les eaux de la mer Morte, les plus salées de cette planète (340 grammes par litre), interdisent toute vie… Et toute immersion pour le baigneur ! On peut donc y lire le journal en toute quiétude, assis ou couché à la surface de l’eau, en prenant garde d’éviter toute éclaboussure sur les yeux. La mer Morte est non seulement une attraction touristique de réputation mondiale mais aussi un centre de cures thermales hors pair grâce à sa densité exceptionnelle en substances minérales, dix fois supérieure à celle des autres mers. On vient s’y faire enduire de boues argileuses noires qui purifient la peau et respirer un air chargé de brome à l’effet apaisant sur le système nerveux.

INFORMATIONS PRATIQUES S’Y RENDRE De nombreux voyagistes proposent des circuits au départ d’Amman (5 heures de vol depuis la France) ou de courtes excursions d’un ou deux jours pour Aqaba et Pétra, au départ de Taba, dans le Sinaï, en Égypte. Avant de partir, se renseigner sur la situation politique du pays sur le site : www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-auxvoyageurs/conseils-par-pays/jordanie12269.

DÉCALAGE HORAIRE GMT + 2 heures d’octobre à mars et GMT + 3 heures d’avril à septembre.

CLIMAT Méditerranéen, chaud et sec pratiquement toute l’année, notamment de mai à octobre. Température moyenne annuelle de 23°C. Les meilleures saisons pour visiter la Jordanie sont le printemps et l’automne.

SANTÉ Aucun vaccin obligatoire, mais soyez à jour de vos vaccinations classiques. Ne boire que de l’eau embouteillée.

MONNAIE Le dinar jordanien (JOD), divisé en 100 piastres. 1 JOD = 1,30 € ou 1 € = 0,77 JOD.

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Escapades

Ailleurs

EN SAVOIR PLUS Visitez les sites : www.visitjordan.com (Office de tourisme de Jordanie), www.jordanievoyage.fr (guides Evaneos) ou www.lonelyplanet.fr (guides Lonelyplanet).

Dana, près de Shobak, au sud du pays. S’y promener permet d’observer de nombreuses espèces animales et végétales, pour certaines très rares, à l’instar de l’Iris Nigricans, l’iris Réserve naturelle noir de Jordanie. de Dana. Du Wadi Mujib, il est facile de rejoindre, un peu plus au sud, l’extraordinaire forteresse de Karak, érigée en 1161 et perchée à 900 mètres d’altitude. Ce témoignage du génie militaire et architectural des Croisés mérite une déambulation sous ses salles en pierre voûtée et au fil de ses longues galeries souterraines. À noter que la Jordanie recèle en divers endroits du pays de nomÀ proximité des rives de la mer Morte débutent les très belles gorges du Wadi breux autres châteaux du désert, chréMujib, l’une des quatre grandes réserves tiens et omeyyades, à l’instar de Shobak, naturelles de Jordanie avec celles d’Az- Azraq, Qasr al-Mushatta ou Qusayr raq et de Shaumari, à 125 km à l’est Amra, classé au patrimoine mondial d’Amman, au cœur du désert, et de de l’Unesco.

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Un séjour en Jordanie commence ou se termine souvent par Pétra et le désert du Wadi Rum auxquels on accède soit en arrivant du golfe d’Aqaba, en mer Rouge, soit par l’autoroute du désert qui dessert la Jordanie du nord au sud du pays. Pétra, la « Cité perdue » taillée dans la pierre par les Nabatéens il y a plus de 2000 ans et redécouverte en 1812 seulement par le voyageur suisse Johann Burckhardt, mérite amplement d’être considérée comme la huitième merveille du monde. Il faut au moins une longue journée pour admirer la plupart des incroyables monuments qui jalonnent ce site mystérieux et hallucinant de beauté, enchâssé au creux d’un superbe massif montagneux de couleur ocre. Pour profiter au maximum du panorama montagneux qui dissimule Pétra, mieux vaut passer une nuit dans l’un des hôtels qui permettent de l’ad-


Le site de Pétra.

mirer le matin au lever du soleil ou le soir peu avant la tombée de la nuit, lorsque s’embrase l’horizon. Pétra, qui fut jadis un carrefour stratégique à la jonction des routes du commerce de la soie et des épices reliant la Chine et l’Inde à l’Arabie, la Grèce et Rome, est un lieu magique qui se laisse désirer. Pour y accéder, il faut en effet d’abord parcourir sur 1,5 km l’étroit défilé du Siq (2 mètres de largeur par endroits), coincé entre de hautes falaises de grès rouge… Le Siq débouche tout-à-coup sur le saisissant Al-Khazneh, le Trésor (nom dû à l’urne qui couronne ce monument et censée

abriter le trésor d’un pharaon), rendu célèbre par la séquence finale du film Indiana Jones et la dernière croisade. À peine remis de l’émotion que procure la vision de ce tombeau à double étage de colonnes (40 mètres de haut sur 30 de large), le visiteur s’engage sur des sentiers bordés de centaines d’autres tombeaux, temples et salles funéraires, au sein desquels la roche se décline en une extraordinaire palette de couleurs chaudes. Pétra abrite aussi un théâtre de 3 000 places datant du Ier siècle après J.-C. et une rue à colonnades qui s’achève par un arc monumental. À l’extrémité de ce site immense, un escalier de plus de 900 marches mène au deuxième plus fameux monument de Pétra, le Deir ou Monastère (47 mètres de largeur sur 40 de hauteur) et à un plateau qui offre une vue magnifique sur le désert et les montagnes environnantes. Au sud de Pétra s’étend un autre territoire extraordinaire, le Wadi Rum, « vaste, résonnant, à l’image de Dieu », pour reprendre la description qu’en fit Thomas Edward Lawrence, dit Lawrence d’Arabie, l’officier-archéologueespion-aventurier britannique qui aida le prince Fayçal Bin Hussein à mener la révolte arabe contre les Turcs lors de la Première guerre mondiale. Ce majestueux désert, le plus vaste de Jordanie, constitue un labyrinthe de canyons, d’arches, de grottes abritant des dessins de plus de 4 000 ans d’âge et de blocs monolithiques dont certains culminent à 1 750 mètres d’altitude. Le must de cette « Vallée de la lune » est d’y passer une ou plusieurs nuits en camp de toile, aux côtés des Bédouins, pour pouvoir admirer la nuit

Amman

FORMALITÉS Passeport valide et visa à demander auprès des ambassades ou consulats jordaniens, dès l’arrivée au Queen Alia International Airport d'Amman ou au passage de n'importe quelle frontière du pays (à l'exception au passage du pont King Hussein et sur un ferry en provenance d'Égypte).

étoilée et les levers-couchers du soleil en ce lieu époustouflant où fut en grande partie tourné le film de David Lean, Lawrence d’Arabie, en 1962. En fin du séjour en Jordanie, pour se laver du sable du désert, on ne peut que conseiller d’aller se baigner dans les eaux chaudes et limpides du Golfe d’Aqaba, au bord de la mer Rouge. Les fonds marins y sont préservés et les plongeurs ne manqueront pas d’aller explorer l’épave du Cedar Pride, un navire marchand coulé en 1986 par 27 mètres de fond et à 150 mètres du rivage seulement, pour servir de récif artificiel à une faune et une flore Jacques Huguenin exubérantes.

Iribid Mafraq Jerash

Ammam

As Safaoui

Les Châteaux du désert

Mer Morte

Madaba Al’ Kerak Tafila Jebel Atatia

Pétra

Jebel Mubak

Ma’an

Bayir

Qa’ al Jafr

Al’Aqaba

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Escapades

Le châtelain de Meung et Beaugency

lance sa croisade touristique Un vent de renouveau souffle sur les vieilles pierres des châteaux de Meung-sur-Loire et de Beaugency, à l’ouest du Loiret. Leur nouveau propriétaire, Xavier Lelevé, veut en faire des places fortes de l’activité touristique et événementielle.

A

u pied de l’imposante forteresse de Meung-sur-Loire, un cortège d’enfants du centre aéré visite le parc tandis que, dans la salle des gardes, un maître d’armes donne une leçon d’escrime à un groupe de touristes en tongs et bermudas. « Nous sommes passés de 12 000 visiteurs à plus de 30 000 en trois ans », se félicite Xavier Lelevé, le nouveau propriétaire du château. Débordant d’idées et d’énergie, il appartient à cette génération de châtelains du XXIe siècle qui entendent réconcilier Histoire et économie en déployant toute la technologie contemporaine. Dans les souterrains du château, là même où François Villon fut emprisonné, le visiteur revit l’histoire médiévale grâce à une projection vidéo sur 180 m². Un robot virtuel propose une visite anachronique qui fait se côtoyer Molière et Jamel Debbouze. « Ils ont tous les deux un regard critique sur la société, explique Xavier Lelevé. C’est une façon de retenir l’attention des jeunes qui sont souvent rebutés par les visites de monuments historiques. » Dans le même esprit, les

célèbres poupées Barbie et Ken revisitent l’Histoire de France par le costume. Après un parcours professionnel dans les domaines de la communication et de l’événementiel, Xavier Lelevé a créé sa propre entreprise en 2003, Arteus Event. Originaire de Versailles, il a assouvi sa passion pour les demeures historiques en achetant d’abord le château de Villiers dans l’Essonne, alors propriété du comédien Philippe Clay, pour en faire un lieu de réceptions très couru. De passage à Meung-sur-Loire avec son épouse Élise, il est tombé en admiration devant le château : « C’est un bijou architectural et historique qui associe le style médiéval et celui du XVIIIe siècle. Mais il était largement sous-exploité. » Il en devient propriétaire en 2010, y installe le siège de son entreprise et investit 1M€ dans la réfection de la chapelle, de la grande cuisine, de l’Orangerie et d’une partie des toitures. Trois ans plus tard, le conseil départemental du Loiret frappe à sa porte pour lui proposer le château de Beaugency, fermé au public depuis onze ans : « Nous avons fait affaire car j’ai

senti qu’il y avait une véritable opportunité de développement économique et touristique entre Cléry, Beaugency et Meung-sur-Loire, autour des figures de Dunois et de Jeanne d’Arc. » Sous l’impulsion de son nouveau propriétaire, le château de Beaugency a rouvert ses portes au public en octobre 2014. En décembre, grâce à l’animation « Noël au château », il a accueilli 8 000 visiteurs. « Il y a un potentiel d’essor touristique dans ce territoire formé par Meungsur-Loire et Beaugency en s’appuyant aussi sur Cléry-St-André et sa basilique abritant le tombeau de Louis XI », estime Xavier Lelevé. Un pass a été créé entre Meung et Beaugency avec des formules de visites groupées. En revanche, le projet de création d’une navette fluviale entre Beaugency et Meung-sur-Loire est en cale sèche faute de disposer de pontons de chaque côté de la Loire. Xavier Lelevé se fixe pour objectif d’atteindre 50 à 60 000 visiteurs d’ici à quelques années pour ses deux châteaux: « C’est loin d’être inatteignable lorsqu’on sait que le labyrinthe de Beaugency attire 35 000 visiteurs en deux mois. » Le nouveau châtelain espère surtout atteindre le « petit équilibre » pour couvrir les charges de fonctionnement par les visites et les privatisations d’espace. Quant à l’amortissement des investissements, c’est une autre affaire. « Une génération n’y suffira pas », soupire-til en souriant. Bruno Villeneuve

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Des fleurs jusqu’à la Toussaint Le festival international des jardins de Chaumont-sur-Loire (41) prolonge l’été jusqu’aux chrysanthèmes du 1er novembre. Pour sa 24e édition, il a fait place à l’insolite.

P

our sa 24e édition, le festival international des jardins de Chaumont-sur-Loire est sorti des sentiers battus, en s’intéressant aux « jardins extraordinaires et de collection. »

Depuis le 23 avril, et jusqu’au 1er novembre, il propose 30 créations surprenantes, aux noms évocateurs (cabinet de curiosités végétales, Carnivore parc, la rareté se manget-elle ? …), des compositions « riches

de végétaux rares, de plantes insolites », présentées de manière inattendue, avec une scénographie, des matériaux et un design innovants. À voir avant les frimas… FXB

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1. Le jardin des bougainvilliers 2. Le jardin d'Orphée 3. Réflexion d'un collectionneur 4. Carnivore parc 5. Fleur bleue

Entrée : 12,50 € (7,50 € pour les étudiants, demandeurs d’emplois et jeunes de 12 à 18 ans, 5€ pour les enfants de 6 à 11 ans). Ouvert tous les jours de 10 h à 18 h 30 (18 h à partir du 1er octobre).

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Carnet virat formé de Frédéric BaudinCullière, dgs de la Ville de Tours, François Lemoine, dgs de St-Cyr-sur-Loire, et Patrick Prévost, dgs de Joué-lès-Tours.

CHER Eric Perronno a été nommé chef d’établissement de l’usine Nexter Munitions de la Chapelle-SaintUrsin où il succède à Serge Borderieux qui fait valoir ses droits à la retraite. Entré dans le groupe en 2004, cet ingénieur occupait le poste de responsable du département des projets industriels.

Le député-maire de St-Cyrsur-Loire et président de Tour(s)Plus Philippe Briand a été réélu questeur de l’Assemblée nationale au nom du groupe Les Républicains ; il a obtenu plus de 90 % des suffrages exprimés. Philippe Briand occupe cette fonction depuis 2007.

LOIR-ET-CHER

RÉGION Pascal Simon succède à Aline Mériau, présidente de la Fédération du Bâtiment du Loiret, à la présidence du BTP CFA Centre, poste qu’elle occupait depuis 2012. Elle reste cependant administratrice nationale du CCCA BTP (Comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics). Jean-Marie Boursier, directeur adjoint de la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire, a été porté au poste de directeur du site. Il succède à François Goulain, qui avait été nommé à la tête de la centrale en 2012.

INDRE-ET-LOIRE Le tourangeau Pascal Cormery, président de la MSA

Frédéric Doué, le directeur de cabinet du préfet de Loir-etCher, a été nommé le 18 août dernier directeur du cabinet du préfet des Côtes d’Armor. Il succède à Gilles Quénéhervé, lui-même nommé dans le Lot. Touraine depuis 2009, a été élu président de la Caisse centrale de la MSA en remplacement de Gérard Pelhate. Pascal Cormery a été vice-président de la Chambre d’agriculture d’Indre-et-Loire de 2001 à 2010. Il a également été président de la FDSEA d’Indre-et-Loire entre 2001 et 2007.

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Bruno Jacquemin, qui dirigeait la CCI du Loiret depuis onze ans, l’a quittée le 1er juillet pour se consacrer à des projets personnels. Annick Gombert est devenue maire du Blanc, suite au décès d’Alain Pasquer. Âgé de 62 ans, cet ancien professeur d’histoire-géographie était devenu maire en 2012, suite à la démission de Jean-Paul Chanteguet atteint par la loi sur le cumul des mandats.

LOIRET Hugues Saury, président du conseil départemental du Loiret et ancien maire d’Olivet, a été nommé président du

LOIRET Tanguy Poupart devient directeur général adjoint de la coopérative agricole Axéréal ; il poursuivra ses missions à la direction des métiers du grain et de la meunerie.

Parti pour le tribunal administratif de Poitiers, Philippe Lacaille, l’ancien dgs de la Ville de Tours et de Tour(s)Plus, a été remplacé par un trium-

EURE-ET-LOIR

conseil d’administration de LogemLoiret ; il succède à Xavier Deschamps ; LogemLoiret gère 16 500 logements dans près de 150 communes du département.

LOIRET




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