Newsletter n°11 juin 2014

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n° 11 – juin 2014

la

n e w s l e t t e r dc

La lettre d’information de la l d c à Tanger

Coup de cœur

de

É pépé FERENC KARINTHY Focus

Tiara jeunesse

P.2 Édito P.3

é d itions afri que ori e nt Premières lignes

M erci R oland T opor de Salim Jay Quel lecteur êtes-vous ?

E ntretien avec ARTHUR LARRUE

Paraît chaque mois

P.4

P.6

An 02 Nous venons de fêter le premier anniversaire de notre newsletter ! Merci de nous avoir accompagné, presque chaque mois, pendant un an. Un an de newsletter, c'est : 10 coups de cœur, 8 éditeurs présentés, 6 personnalités ayant répondu à notre questionnaire sur la lecture et plus d'une centaine de parutions sélectionnées et annoncées. C'est également des centaines d'heures de lecture, donc de plaisir, et l'envie de faire connaître ces ouvrages qui nous confortent dans nos engagements. C'est peut-être peu de chose, mais dans notre deuxième année, en cet an 02, on essaiera de faire mieux encore. Déjà, nous venons d'initier un programme de résidence d'écrivains à la librairie. Arthur Larrue est le premier a avoir été ainsi accueilli et c'est lui que nous avons interrogé ce mois-ci sur son rapport aux livres.

& l a sélection de livres du mois : Lit térature, histoire, sociologie…,

Maxime Rodinson, Abdessamad Dialmy… www.librairie-des-colonnes.com


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Coup de cœur

de

É pépé Ferenc Karinthy

Avec Épépé,

ro m an h o n g ro is paru p o u r la p r e -

m i è r e f o is e n

1970,

au rait p u na î tr e u n g e nr e

n o u v e au : l ' e n q u ê t e lin g u isti q u e . ro m an é to nnant , s o u v e nt c u lt e

»,

C e p e n d ant , q ualifi é d e « li v r e

il é tait sans d o u t e tro p sin g u li e r p o u r

d o nn e r li e u à u n e t e ll e p o st é rit é .

Épépé ? Ébébé ? Étyétyé ? Budaï est linguiste. Il connait de ce fait, nombre de langues. Outre celles qu'il parle couramment – au moins une dizaine –, il y a celles dont il a quelques notions et d'autres dont il connait l'existence et le fonctionnement sans les parler vraiment, pourtant, celle qu'il entend pour la Ferenc Karinthy, première fois dans cette ville où il est arrivé on ne sait comment – lui le ÉPépé, présentation premier –, il n'y comprend rien du tout. Il n'arrive même pas à la rattad'Emmanuel Carrère, cher à une famille connue. Rien. Il n'y comprend rien. Zulma, 288 pages, Lorsqu'il a pris l'avion, c'était pour Helsinki, une ville qu'il connait 125 dh. un peu pour y être déjà venu. Il était invité à un congrès de linguistique. Quand il descend de l'avion cependant, après avoir dormi une bonne partie de voyage, c'est dans une tout autre ville qu'il déambule. Une ville où l'on parle cette langue étrange et où nul ne le comprend. Une ville dont il est prisonnier ne pouvant communiquer avec personne. Une ville tentaculaire et inquiétante où partout une foule compacte se presse ou fait la queue. Une sorte de cauchemar se met alors en place, selon un principe simple que l'auteur arrive pourtant à faire durer avec une maestria certaine tout au long du roman. Malgré une faculté d'analyse exceptionnelle, une solide érudition et tous les stratagèmes qu'il met en place, Budaï ne parvient en effet à aucun résultat probant. Seuls lui parviennent quelques grognements qu'il ne déchiffrera jamais : « On lui répond chaque fois de cette même manière incompréhensible sur cette intonation inarticulée, craquelante : ébébé ou pépépé, étyétyé ou quelque chose comme ça. » Le roman, paru pour la première fois en Hongrie en 1970, et traduit dans une vingtaine de langue depuis, est de ces livres qui, inexplicablement, ne deviennent jamais des succès de librairie mais qui lorsqu'on les a lu, ne vous quittent pas, de ces livres « cultes » que l'on se passe et se conseille. Un livre sur l'incompréhension et l'incommunicabilité, évoquant Orwell, Kafka, Perec… Un chef-d'œuvre d'intelligence et d'inquétante drôlerie.

« Dans le désespoir de sa solitude, pour chercher une compagnie dans cette commotion morale, il évoque la liftière en train d'allumer une cigarette à l'étage supérieur : il la sent maintenant très proche, il ressent une nécessité quasiment vitale de s'accrocher à elle, ne serait-ce qu'en pensée. Pourtant non seulement il est incapable de partager avec elle ce cauchemar vécu, mais il ne sait même pas le nom qu'il doit lui donner, à défaut de communication élémentaire : Bébé, Tétété, Epépé ? » [extrait]

+

R Une chronique du livre est disponible sur le site de la station de radio Europe 1 (5 min. 44 sec.). On entend notamment l'écrivain Emmanuel Carrère défendre Épépé, un de ses « livres de chevet ». R Sur le site de Zulma, son éditeur, le dossier de presse (en pdf) consacré à la réédition du livre.


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Focus

Tiara Jeunesse

é d iti o ns afri q u e o ri e nt La

m ais o n d ' é d iti o n casa b lancais e

A fri qu e -O ri e nt v i e nt d e cr é e r u n e n o u v e ll e c o ll e cti o n d é d i é e au x to u t - p e tits : T iara j e u n e ss e . E ll e l ' inau g u r e av e c quatr e al b u m s si g n é s d e la m ê m e au t e u r e e t d e la m ê m e d e ssinatric e . Q uatr e p e tits li v r e s o ù s e m ê l e nt h u m o u r e t fantaisi e . Q uatr e p e tits li v r e s à lir e , à d ir e , à é c o u t e r e t m ê m e , p o u r c e rtains , à chant e r .

Premières lectures Connaissez-vous l'histoire de Pois chiche, ce tout petit bonhomme qui partit en voyage ? Et celle de Mademoiselle Khanfoussa, toujours coquette et en quête d'un mari ? Ou celle encore de Chtim Chlim, la tête brûlée qui a bravé tous les danger pour épouser la fille du Sultan ? Et celle-ci, celle de Pimousse, la poule rousse qui vient de pondre son premier œuf ? Toutes ces histoires ont été écrites par Nehza Lakhal-Chevé, auteure, conteuse et chanteuse franco-marocaine et ont été illustrées par Chadia Chaïbi-Loueslati, dessinatrice passant allègrement d'une technique à une autre pour trouver, chaque fois, l'expression adapté à son jeune public. Si vous ne connaissez pas ces histoires, c'est peut-être, pensez-vous, parce que vous avez passé l'âge de lire ce genre d'ouvrages. Jetez-y un œil pourtant. Et si vous avez des enfants commencez à leur lire l'une d'entre elles. Il y a fort à parier qu'ils vous la redemande encore très prochainement. Pensées pour un public à partir de 2, 4 ou 6 ans, certaines sont accompagnées d'un CD où se rencontrent, avec bonheur, le conte et la chanson.

+

R Sur le site Internet de Nehza Lakhal-

Chevé : un extrait de Pimousse, la poule rousse, lu par l'auteur et quelques extraits de ces chansons qui restent si facilement dans la tête à peine les a-t-on entendues.

N e z h a L a k h a l -C h e v é & Chadia ChaïbiL o u e s l at i , Le Mariage de Mademoiselle Khanfoussa, 28 pages, 50 dh.

N e z h a L a k h a l -C h e v é & Chadia ChaïbiL o u e s l at i , Chtim Chlim et la fille du sultan, 40 pages, 50 dh.

N e z h a L a k h a l -C h e v é & Chadia ChaïbiL o u e s l at i , Pimousse, la poule rousse, 27 pages, 60 dh. (livre+disque)

N e z h a L a k h a l -C h e v é & Chadia ChaïbiL o u e s l at i , Le Voyage de pois chiche , 31 pages, 50 dh.


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Premières lignes

M erci R oland Topor d e Salim Jay Un livre nouveau se découvre, chaque mois, à travers ses premières lignes. Ce mois-ci, c’est un essai, de Salim Jay, sur un artiste iconoclaste : Merci Roland Topor.

Roland Topor et les brodeuses de Varsovie Les images et les phrases de Roland Topor disent toujours plus qu’il ne semble. De la couverture de son premier recueil de dessins, Les Masochistes (Le Terrain vague, 1956), émane comme une paradoxale tendresse. On y voit, en effet, une brodeuse attelée à la confection d’une fleur dont elle décore sa cuisse, à même la peau. Des couturières et des brodeuses, il y en eut dans la famille Topor ! Au début des années soixante, Roland Topor se penche à nouveau sur une photographie en noir et blanc qui appartient à sa mère. Elle a été prise en Pologne dans les années vingt. Zlata Binsztok, qui épousera plus tard Abram Topor, est entourée de jeunes femmes qui travaillent dans l’atelier de broderie de sa mère. Ce rare témoignage iconographique de la vie varsovienne de Zlata, Roland le transfigure en couleurs dans une émouvante peinture à l’huile, de facture classique. Chaque visage apparaît finement suggéré par un geste infiniment respectueux. Ce qui touche, en plus de la qualité de l’exécution, c’est la ligne mélodique du tableau. On entend presque le bruissement dans lequel travaillent ensemble six femmes attentives. Quatre d’entre elles se partagent le même ouvrage, puisqu’il est habituel que les brodeuses associent leurs efforts. Cette toile est une sorte de Cène à laquelle ne participerait que la moitié des protagonistes habituels. L’intensité obtenue par l’artiste ne s’en trouve pas diminuée, dans ce décor d’un atelier protégé du monde extérieur par des tentures aux couleurs automnales. Un mannequin de couture surmonté d’un chapeau rappelle que l’aspiration des clientes à être à la mode réclamait d’être satisfaite. Les jeunes ouvrières sont vêtues simplement, dans des couleurs variées, comme pour bien suggérer la personnalité de chacune, mais dans les années soixante Zlata était la seule à pouvoir encore les nommer. C’est le tableau de Roland Topor qui me trouble le plus, alors même que cet artiste n’a pas volé sa réputation de dérangeur, voire de provocateur. La pudeur de cette toile est éclatante. On y voit avec une belle clarté la déclaration d’amour d’un fils pour sa mère, comme si cet amour avait déjà pu se former du temps où Zlata était une jeune fille célibataire. Cette peinture d’inspiration réaliste tranche, certes dans l’œuvre de Roland Topor, mais elle possède le charme d’une rêverie qui défie le temps et l’espace. S alim J ay , Merci roland topor, Fayard, 216 pages, 229 dh. ◄


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Essai/Beau livre

A na ! F r è r e s d’ a rme s ma ro c a i ns … de J.-P. Riera & C. Touron P aru p o u r la p r e m i è r e f o is e n 2006, c e li v r e é crit par d e u x p ro f e ss e u rs d ' histo ir e – J e an -P i e rr e R i e ra e t C hristo p h e T o u ro n – para î t d e n o u v e au au j o u r d ' h u i d ans u n e é d iti o n c o nsi d é ra b l e m e nt au g m e nt é e e t e nrichi e , tant d ans s e s t e x t e s q u e d ans s o n ic o n o g ra p hi e .

Un livre monument 2014 aura vu se multiplier les cérémonies et célébrations marquant le centenaire du début de la Première Guerre mondiale ou le soixante-dixième anniversaire du débarquement allié en Normandie à la fin de la seconde. Dans ce contexte, la réédition de ce livre. – Ana ! Frères d'armes marocains dans les deux guerres mondiales – sonne comme un salutaire rappel à la mémoire de ces combattants longtemps oubliés. Cette nouvelle édition paraît, de surcroît, considérablement augmentée par rapport à la première version, sortie en 2006 et vite épuisée. Fruit d'un travail pédagogique de longue haleine, mené et encadré par Jean-Pierre Riera et Christophe Touron au Lycée Lyautey de Casablanca, le livre se présente comme une somme : 488 pages, illustrées de près de 600 photographies, coupures de presse, cartes et documents, rares ou inédits. Revenant en détail sur de nombreux faits d'armes, tus à l'époque à cause de la censure, aussi bien que sur les conditions de vie au front et le quotidien des simples soldats, il rend enfin justice à ces dizaines de milliers d'hommes, dont beaucoup ont péri, engagés dans ces conflits maJ e a n -P i e r r e R i e r a & jeurs aux côtés de la France. Faisant se succéder témoignages et analyses, Christophe Touron, récits et textes de synthèse, il compose un tableau saisissant permettant de Ana ! frères d’armes marocains dans les comprendre histoires individuelles et enjeux globaux. deux guerres mondiales, Un livre qui tient autant du devoir de mémoire et de transmission aux Senso Unico, nouvelles génération, qu'à une nécessaire, bien qu'impossible, réparation 488 pages, envers ces oubliés de l'Histoire. Les bénéfices des ventes seront reversés à 800 dh. une association au profit des vétérans marocains de l'armée française.


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Quel lecteur êtes-vous ?

A rth u r L ARRUE

Un(e) auteur(e) nous parle de la façon dont il, ou elle, lit, des ouvrages qui ont marqué sa vie et peut-être scellé une vocation. Ce mois-ci, c'est un jeune écrivain, et traducteur, en résidence à la Librairie des Colonnes, Arthur Larrue, qui a bien voulu répondre notre petit questionnaire.

Les habitués des rencontres de la librairie, ont déjà pu se faire une idée de qui est Arthur Larrue lors de la présentation de son premier roman, Partir en guerre – le 27 mai dernier – et lors de celle de sa nouvelle traduction du Nez de Nicolas Gogol – le jeudi 12 juin. Aux autres, on pourrait dire que ces deux livres – roman et traduction – sont parus chez Allia, une maison d'édition qui s'est fixée pour but de « satisfaire et dérouter un lectorat avide d’“autre chose” ». On pourrait ajouter qu'il a également écrit une nouvelle, intitulée « Kolossoff », inspirée de la vie du pianiste russe Grigori Sokolov. On se doutera alors d'un certain tropisme vers la Russie, également patrie de Nicolas Gogol. Cette intuition sera confirmée par le fait que Partir en guerre se passe précisément dans ce pays. Il y vécut quatre ans. De la Russie qu'il découvrit, on pourra se faire une idée en lisant le roman qui retrace un épisode de sa vie, au contact de Voïna, un groupe d'artistes anarchistes. Il n'y vit plus parce que la publication de ce roman déplut aux autorités, et que ni son poste d'enseignant à l'université de Saint-Pétersbourg ni son visa ne furent donc reconduits. Depuis, il a notamment donné de singulières leçons sur des classiques de la littérature française et russe dans une librairie parisienne et a été le premier auteur en résidence à la Librairie des Colonnes de Tanger. On pourrait conclure en disant qu'il est né en 1984, à Paris et qu'il ressemble, peu ou prou, au portrait qu'il nous a fourni de lui, et qui est reproduit ci-dessous… Enfant ou adolescent, quel est le premier livre qui vous a marqué ?

Arthur Larrue : Un gros ouvrage très illustré et ancien sur la vie de Napoléon. Je coloriais les uniformes, j’ajoutais des abeilles aux abeilles des drapeaux (elles étaient plus aisées à dessiner que les aigles). J’ai découvert l’Orient et la Russie avec ce livre. Je crois parfois que je n’en suis jamais sorti. J’ai vécu quatre années en Russie pour rencontrer des cosaques et je suis venu à Tanger pour trouver des mamelouks. Quelles sont les œuvres qui vous ont poussé à devenir écrivain ?

Un sonnet des Regrets [de Joachim du Bellay – ndlr], je ne sais plus lequel. Je crois que ce sont tous les livres ensemble, avec les portraits des écrivains et les radiations des bibliothèques. Je me rendis compte assez jeune que tout le monde se tenait coi devant les livres, qu’on s’efforçait devant eux, et plus que devant n’importe quel sujet ou objet, d’observer un certain maintien. Quant à ceux qui ne lisaient pas, ils ruminaient une sorte de mauvaise conscience ou de culpabilité d’école. Devenir grand signifia par conséquent pour moi : prendre la place des maîtres. Le désir de couper la barbe d’Hugo et d’énucléer Sartre se fit très vite sentir. J’opérai Sartre en premier. Je n’ai coiffé Hugo que plus tard. Quel est votre livre préféré ?

Le Nez de Nicolas Vassilievitch Gogol.


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Je n’aurai jamais traduit un autre livre que celui-là. Je lis dans le Nez une liberté totale, une maîtrise admirable, et cette grande victoire – rare, très rare – de la fantaisie sur l’intelligence, de l’imagination sur l’esprit de sérieux. Je continue de lire une cosmologie dans le Nez, et toujours en riant à pleine bouche. Le Nez est devenu pour moi une sorte de centre. Je rencontre quelqu’un et je regarde son nez. Par ailleurs, la femme que j’aime possède un nez tout à fait singulier et absolument minuscule.

Quel lecteur êtes-vous ?

A rth u r L a r ru e

Y a t-il des auteur-e-s qui vous accompagnent lorsque vous écrivez ?

Un nombre conséquent d’auteurs m’accompagnent, bien que le verbe « accompagner » soit un chouilla pacifique pour désigner le genre de relations que j’entretiens avec les ombres. Je les admire pour les voler, les violer, les rabrouer et les admirer à nouveau. Je joue avec eux et contre eux. Ils me servent, me grossissent, précisément comme des ombres. Quant à leurs noms, je citerai les mêmes que ceux de n’importe quel lecteur. Je vous propose de continuer cette liste : Céline, Faulkner, Conrad, Saint-Simon, Duras, Akutagawa, Morand, Barbey d’Aurevilly, Kafka, Baudelaire, Villon, Bergson, Simenon, Tchekhov, Heidegger, Nerval, Kharms, Hammett, Pasternak, Hemingway, Kleist, Manchette, Yourcenar, Salinger, Racine, Gontcharov, Garcia Marquez, Beckett… Un livre incontournable pour vous.

Celui que je dois écrire et vers lequel tous ceux que je lis convergent. Quel grand classique n’avez-vous jamais fini ?

Ulysse de Joyce, que j’ai fini par commencer par la fin. Que lisez-vous en ce moment ?

Ulysse de Joyce, avec lequel et dans lequel je voyage.

Arthur Larrue, Partir en guerre, Allia, 2013, 128 pages, 78 dh.

Nicolas Gogol, Le nez, traduction d’Ar thur Larrue, Allia, 2014, 80 pages, 78 dh.


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Essai

de P o u rq u o i

I s l a m e t c a p i ta l i s m e M a x i m e Ro d i n s o n

l e ca p italis m e s ’ e st - il d é v e lo p p é d ans l e m o n d e m u s u l m an p lu s

tar d i v e m e nt q u ' e n s o n a p p o rtait u n e

O cci d e nt ? C' e st à c e tt e r é p o ns e d è s 1966 d ans c e

faisant , il m e ttait à m al b i e n d e s m yth e s e t

M a x i m e R o d in li v r e au j o u r d ' h u i r é é d it é . C e des idées reçues. q u e sti o n q u e

Un autre esprit du capitalisme Quand un livre traitant de politique, écrit voilà près de 50 ans, reparaît aujourd'hui, on ne manque pas de se demander quelle peut être son actualité si loin de l'époque qui l'a vu naître. D'autant que la fin des années 1960 est une période largement marquée par l'espoir dans le socialisme, un peu partout dans le monde et que, Maxime Rodinson, sociologue et historien orientaliste à la brillante carrière, est un auteur d'inspiration marxiste. Cependant, en 1966, si ce dernier demeure fidèle à ses convictions de toujours, il n'est plus membre du parti communiste depuis 1958. Du marxisme, il n'a ni le dogmatisme, ni l'aveuglement. Inclassable, il va même souvent à l'encontre des positions des tenants de l'orthodoxie. Ses analyses, si elles conservent par endroit la marque d'un temps révolu, n'en sont pas pour autant caduques et les questions qui se posaient alors continuent pour certaines de tarauder les esprits : Quels liens entretient l'Islam avec le capitalisme ou le socialisme ? Le monde musulman a-t-il suivi les voies d'un développement lié à des prescriptions religieuses ? Du marxisme, Rodinson conserve également une méthode qui par bien des points s'avère toujours fructueuse. Analysant les sociétés musulmanes, il se sert, là comme ailleurs, des outils des sciences sociales, sans préjugés, sans essentialiser la religion, en revenant, en fin connaisseur qu'il était, aux textes et aux pratiques. Les livres de Maxime Rodinson ont beaucoup fait parler d'eux lors de leur première publication, gageons qu'aujourd'hui encore, ses analyses demeureront stimulantes pour bien des lecteurs, qu'ils y adhèrent ou non.

Maxime Rodinson, Islam et capitalisme, préface d’Alain Gresh, Démopolis, 316 pages, 288 dh.

« Le monde musulman est spécifique. Il n'est pas exceptionnel. Il n'échappera pas aux lois générales de l'histoire humaine. Son avenir est un avenir de luttes. Luttes de classes ou plus généralement de groupes sociaux, luttes de nations ou plus généralement de sociétés globales. On pourra atténuer ces luttes, les apaiser, leur faire adopter des formes de compétition pacifique. L'idéologue pourra planer au-dessus de la mêlée, s'en désintéresser, poursuivre ses recherches ou ses méditations en dehors ou au-delà de ces luttes, les déclarer sans importance. Les appels à Allah, à l'âme musulmane, à la solidarité de l'oumma traditionnelle ou de la nation pourront les masquer, toujours au profit de certains. Ils ne pourront les supprimer » [Extrait du livre]

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R « Le monde muslman, Marx et la révolution » : un entretien avec Alain Gresh (17 min), auteur de la préface du livre de M. Rodinson, enregistré à l'occasion de cette réédition, est disponible sur Internet. R Ici ou là, des portraits de M. Rodinson, parus en 2004, au lendemain de sa mort, dans des revues scientifiques.


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Essai

S o c i o lo g i e d e l a s e x u a l i t é a r a b o - m u s u l m a n e d ’A b d e s s a m a d D i a l m y Sexisme et patriarcat « L’ouvrage de Abdessamad Dialmy est le symbole d’une vision progressiste sur la sexualité dans les pays arabo-musulmans. L’auteur décrit minutieusement et rigoureusement le sexisme sévissant encore dans ces pays, et ses conséquences néfastes sur la vie et le sort de millions de musulmans qui souffrent des lois rétrogrades gouvernant la société dans ses diverses composantes. Il dénonce les abus résultant de cet état de fait et propose une conception de la sexualité fondée sur le réalisme scientifique biologique, sociologique, psychologique, etc., qui accorde à chacun ses droits et plus particulièrement à la femme musulmane, victime des sévices et de la maltraitance des adeptes du système patriarcal, lequel continue à dominer le monde arabo-musulman et à confiner la femme dans son rôle procréatif et d’objet de jouissance. Il est temps de libérer la femme arabo-musulmane du joug patriarcal et de lui permettre de recouvrer sa dignité en lui accordant ses droits de jouissance sexuelle à égalité avec son partenaire, l’homme. » [Présentation de l’éditeur] A bdessamad D ialmy , Sociologie de la sexualité arabo-musulmane, L’Harmattan, 254 pages, 182 dh.

Essai

La de

révolution du plaisir

Sh e r e e n e l f e k i La sexualité dans le monde arabe « Un nouvel élan de liberté sexuelle semble parcourir le monde arabe : les soulèvements populaires, l’émancipation des femmes et l’évolution des mœurs bouleversent les schémas culturels les plus rigides et les plus ancrés. C’est une autre révolution, intime et souterraine, qui s’annonce. Du Maroc en Égypte et jusqu’au Liban, la domination masculine reste de rigueur, mais les femmes, souvent plus éduquées, gagnent plus d’argent. Des mères de famille, souvent premières gardiennes de l’ordre patriarcal, militent pour l’éducation sexuelle de leurs enfants : question de santé, mais aussi d’apprentissage du plaisir qui garantit la paix sociale. Au Caire, et dans les milieux ruraux du sud de l’Égypte, l’obsession de la virginité avant le mariage marque le pas, alors que le commerce de la lingerie explose. La révolution sexuelle dans le monde arabe aura-t-elle lieu ? Entre l’acte et la parole, entre le poids souvent oppressant de la tradition et les nouvelles aspirations, cette enquête inédite permet d’observer au plus près les signes avant-coureurs du changement. » [Présentation de l’éditeur]

S hereen E l F eki , La révolution du plaisir, Autrement, 368 pages, 275 dh.


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Sélection

nouveautés

EN BREF

Littérature

Essai

Littérature

Moha Souag, Nos plus beaux jours, Éditions du Sirocco, 96 pages, 70 dh.

Roger Faligot, TriconTinentale, La Découver te, 634 pages, 325 dh.

Rachid Boudjedra, Printemps, Grasset, 304 pages, 270 dh.

GRAND FORMAT POCHE Poésie

Essai

Littérature

F o u a d G u e s s o u s ( d i r .), Anthologie de la poésie du melhoun marocain, 584 pages, 180 dh.

Alain Badiou, La république de platon, Pluriel, 600 pages, 149 dh.

Saphia Azzedine, La Mecque-Phuket, J’ai lu, 155 pages, 89 dh.


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