L'incontournable Magazine 03

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" Le fait que les hommes tirent peu de profit des leçons de l'Histoire est la leçon la plus importante que l'Histoire nous enseigne " P H OTO C I TAT I O N

Aldous Huxley Extrait de Collected Essays

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INTRO

ÉDITO N° 3

03 DIRECTION DE LA P U B L I C AT I O N E T D E LA RÉDACTION

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LES NOUVELLES DU MONDE LIBRE 6

LES GALERIES INCONTOURNABLES 10

Philippe Deschemin DESIGN GRAPHIQUE DIRECTION ARTISTIQUE

Sébastien Pascot / Atelier Petit Cosmos contact@petitcosmos.com PUBLICITÉ

contact@lincontournable-lyon.fr

Horrible massacre à Lyon, J-P Clerc, lithographie, Belfort, 19e siècle. Révolte des Canuts de 1834. Inv (9)54.458 © Musées Gadagne.

Les Sons Étranges. ISSN en cours, dépôt légal à parution. L I N C O N T O U R N A B L E - LYO N . F R L'Incontournable Magazine est une marque déposée. Toute reproduction ou représentation totale ou partielle

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TÉHESSÉ 46

JARRING EFFECTS

ART

AUDITORIUM DE LYON

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SNAPSHOT

LITTÉRATURE ARBITRAIRE 22

GILLES ROCHIER 26

LES INDÉS DE L'IMAGINAIRE 30

LA NOUVELLE DONT VOUS ÊTES LE HÉROS 32

P U B L I C AT I O N

WAR ANYWAY

CIE LILY KAMIKAZ

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CONTRIBUTEURS

COUVERTURE

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CCNR

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Lise Garnier, Rudy Boissy, Cindy Legrand, Hugues Berard, Sébastien Pascot, Philippe Deschemin, Stéphanie Jost, Alejandra Adeikalam. Un grand merci à tous ceux qui de près ou de loin participent à l'élaboration du magazine, sans oublier nos amis annonceurs et vous très chers lecteurs.

DOSSIER TRANSBORDEUR TOÏ TOÏ, LE ZINC

LES CHŒURS ET SOLISTES DE LYON BERNARD TÉTU

DANSE

contact@lincontournable-lyon.fr CO N TA C T

MUSIQUE

QUIZZ 36

HISTOIRE

LES CANUTS 38

des textes et des créations graphiques est interdite.

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JAZZ À VIENNE 53

DÉMON D'OR 54

EXTRAS

LE BON PLAN CULTURE 56

CADEAUX 58

HOROSCOPE 100% GARANTI 59

LA SÉLECTION INCONTOURNABLE 60


ÉDITO N° 3

M▲I JUIN 2●13

Le printemps a timidement pointé le bout de son nez et l’été s’apprête à faire de même. Nous voici ensemble à nouveau durant deux mois, vous accompagnant culturellement à l’approche de ces temps estivaux. Il s’est passé énormément de choses depuis notre dernière livraison. Les mois de mars et avril furent riches en événements et rebondissements. La tête dans le guidon, travaillant comme des forçats, nous n’avons pu échapper aux tumultes des remous la vie culturo-médiatique.

du pays sur l’autel de la croissance, et de quelle manière elle a réprimé les soulèvements ouvriers des années 80. En revanche toute la classe politique lui aura rendu un hommage appuyé. Pour Hugo, ce fut tout l’inverse, scènes de tristesses dans le monde entier exprimées par les petits peuples alors que la nomenklatura sans frontières se réjouissait de sa mort. Les intérêts des uns ne sont pas ceux des autres. L’un des grands combats d’Hugo a été la lutte contre la corruption et la fraude, n’est-ce pas messieurs les politiques français ? Puis il y eut des tentatives d’assassinats symboliques : Frédéric Taddeï attaqué par Patrick Cohen et une ligue bien pensante composée des recommandables Marc-Olivier Fogiel, Pierre Ascolovitch et Cyril Hanouna. La dream-team des censeurs des temps modernes. Sans oublier la Corée du Nord qui montre les dents… et Dieudonné qui contre toute attente triomphe avec sa tournée Foxtrot. Revenons à l’affaire Taddeï. Le présentateur anime une émission de débats sur le service public depuis plus de cinq années : Ce soir ( ou jamais ! ). La particularité de cette émission est de proposer des débats variés dont

Jérôme Cahuzac, Margaret Thatcher et Hugo Chavez sont morts. Le premier a été victime d’une mise à mort politique et médiatique, la seconde s’est éteinte paisiblement à 87 ans et le dernier a perdu son combat contre la maladie après avoir éradiqué ( entre autres ) l’analphabétisme dans son pays. L’annonce de la mort de la Dame de fer a donné lieu à des liesses de joie dans tout le Royaume-Uni. On se rappellera comment Maggie a sacrifié la classe ouvrière

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les thèmes sont tout aussi politiques que culturels, mais surtout le présentateur fait preuve d’un professionnalisme sans faille en faisant intervenir des personnalités qui ne sont pas forcement des habituées des plateaux télé et que l’on pourrait difficilement qualifier ( en référence à l’excellent documentaire de Serge Halimi ) de chiens de garde du système. Cette émission est l’un des rares espaces médiatiques où l’on peut entendre autre chose que les discours et sons de cloche des idéologies dominantes. Apparemment c’est bien cela qui turlupine l’animateur de la matinale sur France Inter, M. Patrick Cohen. Du moins c’est ce que ce dernier a directement reproché à Frédéric Taddeï sur le plateau d’une émission de France 5 en mars dernier. M. Cohen invectiva Frédéric Taddeï avec cette question : " Allez-vous continuer à inviter des gens comme Tarik Ramadan, Nabe, Dieudonné, Soral  ? " prétextant que ce sont " des cerveaux malades " en ajoutant la mine gênée comprenant qu’il est en train de dire une ânerie que " ces gens véhiculent des thèses complotistes , et que l’on commence comme cela et que l’on finit négationniste ". La réponse de Taddeï sera cinglante " à vous entendre on croirait que des gens viennent chez moi raconter que les chambres à gaz n’ont jamais existé ! Ce n’est jamais arrivé ! ". Frédéric Taddeï ajoutera " Pour moi, il n’y a pas de liste noire [...]. Je m’interdis d’être le procureur ou le défenseur des uns et des autres, et surtout de censurer qui que ce soit à partir du moment où il respecte la loi [...]. Si j’étais sur un média comme Fox News, je ferais comme vous, je privilégierais un certain son de cloche. Je n’ai pas une liste noire des gens que je refuse a priori d’inviter sous le prétexte que je ne les aime pas. Le service public ne m’appartient pas ". L’échange fera le tour des réseaux sociaux, la polémique enflera et Patrick Cohen sera invité sur un plateau de télé le matin suivant pour se justifier de l’existence d’une liste noire sur France Inter. Face à lui aucun contradicteur, hormis un timide David Abiker qui lui demandera si les auditeurs-spectateurs n’en ont pas assez de voir ou d’entendre toujours les mêmes experts. Le passage le plus incroyable de l’échange Taddeï / Cohen repose peut-être sur le syndrome évident de double pensée Orwellien dont est victime Patrick Cohen. Ce dernier avance l’argument suivant : Dieudonné à été condamné par la justice donc il ne doit pas être invité. Taddeï lui répondra " Voulez-vous que je vous fasse la liste des ministres condamnés que vous avez invités ? Certains même le lendemain de leur condamnation ? ". Aucune réponse de Patrick Cohen. Quelques jours plus tard, les amis viendront à la rescousse. Marc-Olivier Fogiel organisera un petit débat partisan sur le sujet dans lequel Claude Ascolovitch jouera les censeurs absolus transcendé par une mission au service du bien. A-t-il oublié que son hôte Marc-Olivier Fogiel fut lui même condamné pour injure raciale en

2005 ? Cela le gêne sûrement moins, ce qui vaut pour certains ne vaut pas pour les autres. L’intellectuel Cyril Hanouna se joindra à la danse en demandant simplement la suppression de l’émission de Taddeï sous prétexte qu’elle ne fait pas assez de part de marché. Ah ! le marché… Il faudra attendre Daniel Schneiderman pour lire un papier intéressant sur la polémique. Ce billet sera publié dans Libération quelques jours après le début de l’affaire. On ne vous le cachera pas, notre position est similaire à celle de l’ancien présentateur de l’émission Arrêt sur Images. Dans son remarquable article on pouvait lire : " C’est parfaitement le droit de Cohen de ne pas inviter Ramadan, Soral, Nabe ou Dieudonné. Aucun cahier des charges du service public ne l’oblige à le faire [...] Cohen serait parfaitement fondé à dire “ j’estime qu’il existe des théologiens plus pertinents, des humoristes plus drôles. ” Manchettes, sujets, invités : être journaliste, c’est choisir, trier, hiérarchiser ". Mais il ajoute : "  Se priver d’invités parce qu’on n’est pas d’accord avec eux est, pour un journaliste payé par le contribuable, une faute professionnelle. Et non seulement c’est indéfendable, mais c’est contre-productif  ". De notre côté, nous irons plus loin. Si ces gens ont " des cerveaux malades " comme le dit Patrick Cohen, et bien opposons-leur des contradicteurs. Invitons-les et désamorçons via des débats démocratiques leurs idées. Les exclure des débats publics c’est les acculer à une posture de victimes. Cette affaire est symptomatique d’une époque de censure et d’autocensure généralisées. Ce qu’il y a de plus effrayant c’est que Patrick Cohen et ses amis sont certainement persuadés d’œuvrer pour le " bien ". Lors de son altercation avec Taddeï, à la question posée par l’animatrice " Mais ! On peut bien penser ce que l’on veut ? ", Patrick Cohen répondit sèchement et avec une assurance folle : " Non ! ". La messe est dite. Bienvenue dans le monde moderne, un monde où le fascisme intellectuel a pour cheval de Troie la doctrine des bonnes intentions. On nous assassine intellectuellement, mais n’ayons crainte c’est pour notre bien. PA R P. D E S C H E M I N

Bonne lecture ! ➊ Au plus haut des Cieux, Anne Brunet, 2007, encre sur papier.

" Chacune des oeuvres d’Anne Brunet semble vouloir confier sa fécondité à la rondeur des nuages, à l’abondance des ANNEBRUNET.ME formes, aux gouttes suspendues des Anne Brunet est artiste résidente de la larmes ; dans l’univers d’Anne Brunet, le Galerie 13 Jeannette Mariani, motif est le sujet inconscient d’une envie 36, Rue du Mont Thabor, 75001 Paris. infinie de douceur. " GALERIE13JM.COM Frédéric-Charles Baitinger

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LES NOUVELLES

DU M●NDE LIBR

Les Courtes Scènes, du 21 mai au 1er juin 2013 au Théâtre des Clochards Célestes sont l’occasion de découvrir tous les soirs deux spectacles : Foi, d’après l’œuvre de Sainte Thérèse d’Avila, présenté par le collectif Bis et Premier amour, ( photo ) d’après l’œuvre de Samuel Beckett, présenté par le Ring Théâtre. Plus d’infos sur clochardscelestes.com

À Vienne, Rock House est une véritable caverne d'Ali Baba pour tous les amateurs de musique ( disques, vêtements, accessoires). Elle héberge l'association Music School qui permet à chacun d'apprendre à jouer d'un instrument ( guitare, basse, piano ). Infos sur rockhouse38.fr

Le spectacle Carina Salvado, vendredi 17 mai à 20h30 est l’occasion de venir écouter Carina Salvado, illustre représentante de la lignée des fadistas du début du XXe siècle. Le fado est un genre musical portugais prenant la forme d’un chant mélancolique. Plus d’infos sur theatre-jean-marais.com

Coup de projecteur sur une association débordante d’énergie : Abscisse production. L’association propose d’accompagner les artistes dans leurs démarches de diffusion, communication et production dans le secteur culturel. Dans leurs girons on peut apercevoir les excellents Pethrol. abscisseprod.com

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The Light In Sores, nouveaux venu sur la scène musicale hexagonale. L'Incontournable Magazine leur souhaite plein de réussite. Infos et écoute sur myspace.com/thelightinsores

Du 24 au 26 mai la Maison de la Danse accueille le mini-festival annuel La Maison sans dessus dessous. Trois jours et trois scènes alliant création, questionnement sur la fonction de l’art aujourd’hui et jouant avec la frontière des disciplines. Au programme des artistes comme Eugénie Rebetez, Frédérick Gravel, Thierry Collet… Programme et infos sur maisondeladanse.com


© Bruno Théry

© Roe Ethridge

La 6e édition du festival Printemps d’Europe aura lieu du 22 mai au 1er juin 2013 à Lyon, sous le parrainage de Robin Renucci. Ce festival pluridisciplinaire à dominante théâtrale crée la rencontre entre différentes langues, langages, cultures et le public lyonnais. Le festival accueille des troupes venues de toute l'Europe et par-delà ses frontières pour faire découvrir des aventures inconnues artistiques en France. Les spectacles sont joués dans leur langue originelle et surtitrés en français. Un grand débat sera organisé, des moments festifs et des échanges de pratiques pendant ces dix jours de festival. europeetcies.eu

Entre-temps… Brusquement, et ensuite. La 12e biennale de Lyon se déroulera du 12 septembre 2013 au 05 janvier 2014. Programme et infos sur labiennaledelyon.com

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LES NOUVELLES DU MONDE LIBRE

Installé au 19, Rue Romarin dans le 1er, Le Cabinet des curieuses est une boutique de lingerie et de prêt à porter féminin rétro neuf d'inspiration vintage. C’est aussi un lieu insolite offrant de découvrir des expositions temporaires et surtout un carré créateurs visant à promouvoir de jeunes stylistes. À découvrir !

Les Intergalactiques sont le rendez vous SF de la rentrée. Un festival 100% dédié à la science-fiction à Lyon qui se déroulera du 25 au 31 octobre. L’Incontournable Magazine s’associe à l’événement et sera partenaire du Prix Barjavel, remis durant le festival. Toutes les infos concernant le festival et le prix Barjavel sur intergalactiques.net

En collaboration avec les mémoriaux de la prison Montluc et de Caluire, le CHRD ( Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation ) élabore un programme d’activité à l’occasion du 70e anniversaire l’arrestation de Jean Moulin. Un programme apportant un éclairage sur le parcours du résistant au travers de visites commentées, parcours de ville, projections, conférences… Plus d’infos sur chrd.lyon.fr

Le Sylak Open Air se déroulera pour sa 3e édition les 9, 10 et 11 août 2013 à Saint-Maurice de Gourdans. Depuis sa création en 2011, cet événement en musiques actuelles est devenu un incontournable de la région Rhône-Alpes. Deux éditions se sont déjà déroulées et la recette fonctionne à merveille. Cette année on notera la présence d’Agnostic Front, Downset, Elmer Food Beat, Eyehategod ou encore des Lyonnais Cult of Occult dont le 1er album absolument fascinant de lourdeur, de fureur et sans compromis a défrayé la chronique. Âmes sensibles s’abstenir. Toute la programmation sur sylakopenair.com

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La Compagnie Propos propose des bals chorégraphiés animés par Denis Plassard les 14, 15 et 16 juin à l’Espace Citoyen de la Mairie du 8e, autour du thème des Années Folles. Cette initiative s’inscrit dans le programme Vive le Confort Moderne ! du Musée Urbain Tony Garnier pour les 80 ans du quartier des États-Unis. Plus d’infos sur compagnie-propos.com

La galerie Tattoo Shop ( Lyon 7e) accueille du 17 mai au 27 juin Biopunk Mother Phoque. Une exposition présentée par l’artiste alternatif Wiktor Plitz rassemblant des artistes aux médias variés autour du thème : le Biopunk, néologisme né de la contraction entre biotechnologie et cyberpunk. Infos sur professeur-wp.com


Sur les chemins de Transylvanie. Dans les pas de Kodaly et Bartók est présenté par la compagnie Le Piano Ambulant et par le conservatoire de musique de Saint-Priest, vendredi 17 mai à 20h30. Le spectacle rassemble musique classique, mise en scène et en image dans une ambiance enthousiaste et dynamique. Plus d’infos sur theatretheoargence-saint-priest.fr

Le Musée des Tissus et le Musée des Arts Décoratifs de Lyon propose des visites de ses collections en nocturne, éclairées à la chandelle. Une manière originale et intéressante de découvrir le musée. Prochain rendez-vous : le 18 mai pour la Nuit des Musées. Nous vous incitons fortement à visiter ce lieu composé de deux musées distincts : le musée des tissus et le musée des arts décoratifs. Ce sont près de deux millions cinq cent mille œuvres qui dessinent une histoire de la création artistique appliquée à l’ameublement, l’habillement et la mode. Infos sur musee-des-tissus.com

PA R P. D E S C H E M I N E T L . G A R N I E R

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M A R C H É D E L' A R T

LES G▲LERIES INCONTOURNABL S

Marc Dailly expose à la galerie Souchaud. Véritable pont entre le " savoir-peindre " préraphaélite, le surréalisme et le Néo-romantisme, le travail de Marc Dailly est absolument remarquable. Une fois encore la galerie Souchaud nous propose en authentique galeriste une exposition incontournable. Galerie Françoise Souchaud 35, Rue Burdeau, 69001 Lyon T. 06 87 95 17 98 galerie-souchaud.fr

Désir de collection, du 17 mai au 27 juillet à la Galerie Réverbère. Une exposition qui engage un dialogue entre les photographies des artistes de la galerie, représentés par des œuvres singulières et inédites, avec un choix de photographes invités. Une sélection d’images anonymes

soulignera que la magie et la fascination de photographies non attribuées, si fortement chargées d’une fulgurante beauté, a tout à fait sa place aux côtés de la beauté signée. Vernissage jeudi 16 mai 2013 de 18H – 21H. ( Du mercredi au samedi de 14H – 19H et sur rendez-vous. ) galerielereverbere.com

Géométries croisées, du 21 mars au 29 juin à l’Atelier 28. L'exposition réunit sept artistes de la mouvance géométrique. Chacun développe une facette particulière de cet art dont les origines remontent au premier tiers du XXe siècle. Carmelo Arden-Quin ➊ ( Rivera, Uruguay, 1913-2010 ) fut le fondateur et l’animateur infatigable du mouvement MADI. Luis Tomasello ( La Plata, Argentine, 1915 ) poursuit gaillardement une carrière brillante de découvreur dans le domaine du plan et de la lumière. Vera Molnar ( Budapest, 1924 ) ose introduire

l’informatique dans sa partition. Jean Branchet ( Lons-le-Saulnier, 1934 ) poursuit le flambeau du mouvement MADI et pratique un art du relief attentif au rythme et à la musique de l’espace. Michel Jouët ( Cholet, 1943 ) allie rigueur et humour dans ses compositions Contre l’attente. Judith Nem’s ( Budapest, 1948 ) mêle à la fantaisie la chaleur des couleurs et l’indéfini des transparences. Alberte Garibbo ( Monaco, 1946 ) travaille lignes et frontières plastiques dans un style plus directement poétique. galerie-atelier 28.fr

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La librairie-galerie Datta, rue Griffon à Lyon, accueille jusqu’au 26 mai le photographe parisien Julien Lachaussée. Datta présente une sélection de photos principalement en noir et blanc chargées d’honnêteté, de surprise et de découverte. Plus d’infos sur datta.fr

Du 28 Mai au 21 Juin, exposition De l’impression aux sensations. Sylvie Garrigue / Racont’Arts accueille cinq artistes. Florence Catrin ( peintre ), Gérard Coquelin ➋ ( créateur de mobilier ), Isabelle De Joantho ( peintre sculpteur ), Florence Racine ( céramiste ), Michela Sorrentino ( peintre ), Olivier Verneau ( céramiste ). Toutes les infos sont sur racont-arts.com

L'IESA, la grande école des métiers de la culture et du marché de l'art s'installe à Lyon. Elle proposera dès septembre des parcours de un à trois ans sur le métier d’administration de production dans le spectacle vivant et dans la commercialisation et la diffusion des arts visuels et sonores contemporains. iesa.fr PA R P. D E S C H E M I N

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DANSE

CCNR

DANS TOUT T RR AIN Bonjour Yuval Pick. Vous avec pris les rênes du CCNR il y a un an et demi environ, comment cela se passe-t-il et pouvez-vous présenter le CCNR ?

Le Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape, c’est d’abord un lieu de fabrique artistique. Au cœur du CCNR se trouve la compagnie permanente de cinq danseurs avec qui je travaille quotidiennement à la création de mes spectacles et au développement de ma propre matière artistique. Ils sont interprètes mais aussi acteurs essentiels de la transmission de cette matière ( ateliers, cours, rencontres… ). Il y a également les résidences de création des artistes invités, nous soutenons et accueillons une dizaine de compagnies par an, la résidence se termine systématiquement par une ouverture publique. Il s’agit donc aussi du travail proposé au public autour du regard qui peut ici se fabriquer, s’aiguiser et se développer. Le CCNR est un lieu de ressources pour les professionnels mais aussi pour les amateurs de la danse. Ici, ils peuvent découvrir différentes approches de la scène et du corps et ainsi questionner la danse et s’y frotter en tant que spectateur ou participant actif. Pour être plus précis, le public peut venir découvrir ce qui se fabrique dans nos murs : le travail de la compagnie du CCNR lors de spectacles

Nous avons réellement la liberté d’inventer des projets dans les missions qui nous sont données, ce qui nous permet de travailler à une diversité de propositions et à créer des dynamiques en lien avec le contexte local et la réalité de notre territoire.

ou répétitions publiques ou le travail des artistes invités lors de démos et d’avant-premières. Nous proposons aussi ponctuellement des spectacles ou temps forts en partenariat avec l’Espace Baudelaire ( le service culturel de Rillieux ) ou d’autres structures du Grand Lyon comme la Biennale de la Danse ou le Grame, avec l’idée de montrer des artistes et des formes très peu présents sur l’agglo. Tous les mardis, les ateliers " sentir la fibre " permettent au public amateur un temps de pratique avec les danseurs de la compagnie ou les artistes invités. Nous allons dès la saison prochaine décliner ces ateliers pour les enfants et les ados. En étroite collaboration avec le secteur éducatif, nous montons tout au long de l’année à Rillieux des projets artistiques et culturels, de l’école primaire au lycée, qui proposent aux élèves des parcours artistiques leur permettant de visiter le CCNR, de découvrir des spectacles, d’assister à des répétitions publiques, et de traverser des expériences par la pratique de la danse.

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" Danse tout terrain " se définit comme projet artistique et militant, pouvezvous en dire plus ? Notamment concernant la philosophie du projet ?

La philosophie du projet à l’origine est de toucher les publics éloignés géographiquement de lieux culturels. L’idée est de créer spécialement un spectacle pour cette démarche et non pas de réduire une pièce déjà existante. Il s’agit donc ici de créer pour un espace réduit à 7m sur 7m, sans technique et sans décor pour pouvoir jouer dans un maximum de lieux de taille réduite peu ou non équipés. Pour cette 1ère édition, j’ai souhaité proposer un thème qui faciliterait l’accès du public, créer un pont, un passage par la musique, celle de JeanSébastien Bach. Cette musique est pour moi comme une mythologie commune qui peut toucher directement un maximum de personnes. C’est donc autour de cette musique que vont se répondre deux pièces aux univers différents : PlayBach, un trio que j’ai chorégraphié et BWV 245 du chorégraphe québécois


Vous dites : " Dans notre société marquée par l’individualisme, la vraie liberté réside dans notre capacité à tendre la main à l’autre ". Exprimer sa liberté en allant vers l’autre sousentend que nous sommes contraints à l’individualisme. Car pour exprimer une liberté il faut s’émanciper d’une contrainte. Selon vous de quelle manière s’exerce cette contrainte qui nous pousse à l'individualisme ?

J’ai l’étrange sensation que nous évoluons aujourd’hui dans une dynamique particulière où être libre signifie se développer individuellement. C’est pour moi quelque chose qui crée une sorte de détachement et d’éloignement vis-à vis-des choses qui nous entourent. Nous vivons dans une société très informée où développer sa propre connaissance est de plus en plus facile, cela nous donne la sensation de pouvoir tout acquérir très vite sans passer par le long chemin de l’expérience, de l’expérimentation mais aussi et tout simplement du rapport à l’autre. Quand je dis " tendre la main vers l’autre ", j’entends aller chercher ce rapport car c’est cet autre qui va nous donner des sensations différentes, une

compréhension nouvelle… Je crois réellement que l’on peut améliorer le rapport qu’on a à soi-même par l’autre. La vraie liberté pour moi est d’aller connaître celui qui n’est pas comme moi et d’améliorer ce précieux rapport ; c’est aussi oser aller vers l’inconnu. J’aime qualifier ce geste d’écologique, une respiration positive qui fait du bien au monde et qui, de mon point de vue, est nécessaire et primordiale dans un monde où la situation s’aggrave sans cesse.

Pouvez-vous Pour revisiter nous présenter la l’œuvre de Bach, pièce PlayBach ? mes danseurs et moi-même avons monté une playlist à partir des grands classiques du compositeur. Avec un Ipod, les danseurs zappent d’un morceau à l’autre, créant leur propre espace sonore en temps réel. À partir de cet univers musical, j'ai composé une partition chorégraphique, née d’une exploration autour de la notion de poids : accompagner le poids de l’autre, c’est l’accueillir avec toute son histoire, négocier sans cesse, être transformé à son contact. La pièce tend à rendre visible ce mode de communication. Les signes d’une écoute sensible de l’autre, l’empreinte d’un langage commun qui émerge du rapport entre les interprètes. Chorégraphie | Yuval Pick Musique | Jean-Sébastien Bach Interprétation | Lazare Huet, Anna Massoni, Antoine Roux-Briffaud Durée | 30 minutes environ Production : Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape Pièce créée en 2010 pour le CCN de Roubaix — Dispositif départemental DanseWindows.

© Xavier Boyer

Frédérick Gravel que nous avons spécialement invité pour l’occasion et dont l’exercice était de créer un duo avec deux danseurs de ma compagnie. Ce projet se veut militant car il faut aller chercher et toucher les endroits où la danse contemporaine n’existe pas ou n’est presque jamais montrée, en partie à cause de l’idée élitiste que l’on peut s’en faire. Je peux comprendre cette crainte mais je crois qu’il est important de prendre des risques en allant à la découverte de formes nouvelles et inconnues. La danse est un langage sensoriel qui réveille l’imagination ; chacun, avec son histoire, crée ses propres images. C’est pour moi un mode de communication et un vecteur universel de sensations. Conscient des barrières et des craintes qui existent, nous proposons en amont et également après les représentations des rencontres, des ateliers pour aller plus loin dans la rencontre et dans l’échange et dialoguer vraiment avec le public. Je dis " dialoguer " car il est important de préciser que pour nous, artistes, ces moments de retours et d’échanges avec le public sont très riches et précieux.

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québécois Frédérick Gravel à composer une seconde pièce autour de la musique de Bach. Il crée une trame autour de six courtes études, les danseurs s’amusent ensuite à déborder de celle-ci, ou au contraire ils s’y accrochent à la pulsation près. On ne peut faire autrement que de voir un couple sur scène, un couple de danseurs qui joueraient les stades d’une relation dans un ordre plus rythmique que narratif. Chaque étude vit indépendamment des autres, les danseurs restent qui ils sont, mais laissent les images et la musique faire travailler l’imagination des spectateurs. Leur jeu non affecté rend les poses et les mouvements plus faciles à interpréter à notre façon. La musique la plus utilisée dans ces études est la Passion selon Saint-Jean.Le décalage entre la musique sacrée et les scènes triviales qui sont jouées placent les danseurs dans un espace particulier, on ne sait plus trop si on célèbre ou si on dénigre les comportements affichés. Chorégraphie | Frédérick Gravel ( Montréal / Québec / Canada ) Musique | Jean-Sébastien Bach Interprétation | Madoka Kobayashi, Killian Madeleine Durée | 30’ environ Production : Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape Commande du CCNR pour le programme Danse Tout Terrain 2013 Avec le soutien de Format.

Quel avenir souhaitez-vous et quelles sont les ambitions autour du CCNR ?

J’ai profondément envie de soutenir encore plus les artistes et la création artistique. Pour rebondir sur la situation du monde dont je parlais préalablement, je voudrais que l’on prenne plus de risques à inventer ou réinventer l’espace qui nous entoure, je crois que l’art peut servir à ça, en tout cas, j’aime qualifier ainsi le travail d’un artiste. Nous avons, je crois, une vraie responsabilité dans le champ du bouleversement et de l’ouverture. Les regards sont de plus en plus conditionnés, j’aime à croire que nous pouvons les chambouler, les réinventer grâce à ce champ très ouvert qu’est la création artistique. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

Danse Tout Terrain Du 28 mai au 1er juin 2013 à 19H30 Rencontre avec l’équipe artistique le 29 mai à l’issue des spectacles Gymnase Maria Casarès de Rillieux-la-Pape. Entrée au 35, Avenue Maurice Ravel 69140 Rillieux-la-Pape Accès direct depuis Lyon : Bus C2 et C5 Représentations organisées en coréalisation avec l’Espace Baudelaire – service culturel de la ville de Rillieux-la-Pape Tarifs : 6/10 Euros Billetterie : Espace Baudelaire T. 04 37 85 01 50 Vente en ligne : ville-rillieux-la-pape.fr ( rubrique : culture/spectacles )

Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape T. 04 72 01 12 30 CCNR.FR

© Helmo

Pouvez-vous Pour Danse Tout nous présenter la Terrain, j'ai invité pièce BWV 245 ? le chorégraphe

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DANSE

CIE LILY K▲MIK▲Z CHAIR T ÂM

Pouvez-vous Lily Kamikaz est nous présenter principalement la compagnie ? composée d'Élia Dujardin ( moi-même ), Sandrine Roldan et Célia Lefèvre. Depuis nos débuts en 2009, nous axons notre travail sur l’exploration d’univers coloriés où la danse se veut toujours au service moins d’un concept abstrait que d’histoires, vécues ou imaginées, à raconter, à signifier, auxquelles on aime donner chair et âme pour aller vibrer au-delà de nos propres corps, peut-être dans celui de spectateurs. J’aime le spectacle parce qu’il me raconte des histoires, réalistes ou non, ça se retrouve donc dans le travail de la Cie. Créer des espaces de corps poreux nous importe, créer des drôles de choses dans l'air par une gestuelle hors de tout code formel nous enthousiasme. Nous faisons donc appel à différents outils de travail comme le jeu théâtral burlesque, l’improvisation pluridisciplinaire, pour être avant tout dans une musicalité de l’expression corporelle. Pour moi, c’est par la musique de la danse, qu’on se parle le plus " également " entre humains. Il y a peut-être quelque chose comme un espace de démocratie virtuelle qu’on cherche dans Lily Kamikaz, et ce de plus en plus consciemment.

© Sam Veysseyre

Quelles sont les motivations qui poussent à créer une compagnie ?

Pour Lily Kamikaz, ça a moins été une motivation pour ma part, ou même une décision de stratégie professionnelle, qu’une espèce de double évidence : la première étant que dans un certain contexte, avec certaines personnes, en l’occurrence Sandrine et Célia, une certaine forme d’expression sort de nous, ou un style chorégraphique émerge, et nous est propre. Du coup, on a envie logiquement de donner un nom à ce faire-ensemble particulier, qui semble plus qu’un projet, et qui a priori n’est pas une sous-identité ou une déclinaison d’un autre travail chorégraphique. La deuxième évidence est qu’à la base de

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tout ça il y a une certaine confiance qu’avec ces personnes-là, autour d’un certain cheminement artistique, on voudra s’organiser pour réaliser plusieurs projets ensemble, développer notre idée commune de la danse, pérenniser notre collaboration. C’est aussi parce qu’à un moment donné, simplement, on ne se reconnaît pas complètement dans les projets alentours et on a envie de parler de manière intègre, en son nom… du coup créer une compagnie était avant tout pour moi nommer une entité artistique naissante, amenée souvent à muter, se fondre ou justement s’intégrer à d’autres, au fil des rencontres, mais qu’on a trouvé judicieux et évident à un moment donné d’identifier clairement, pour la développer petit à petit à notre sauce.

Quelles sont les principales difficultés rencontrées ?

Le manque d’espace de travail ( tout le monde n’a pas chez soi un studio de danse ) même si à Lyon il y a beaucoup d’endroits ressources. La recherche de salle est souvent une des premières galères et des plus récurrentes quand on démarre un projet. Puis la difficulté à entretenir son niveau en tant que danseur pro en sortant de formation.


Et par-dessus tout, la polyvalence artistique et technico-administrative. Pour les danseurs, il faut être aussi si possible un peu acrobate, chanteur, comédien, animateur, mais aussi administrateur, technicien, chargé de prod, chargé de diff, médiateur socioculturel : tout un tas de cordes à mettre à son arc qui sont à la base un par un des métiers à part entière !

De manière plus générale, près de 90% des danseurs sont soumis au régime de l'intermittence ( les 10% restants sont pour la plupart permanents dans des ballets classiques ). Que pensez-vous de ce statut ?

Dans la compagnie, Sandrine et Célia sont intermittentes, et la difficulté, la frustration qu’elles rencontrent et qui est commune à beaucoup d’autres, est d’arriver à faire leur statut avec des cachets de danse, et pas plein d’autres choses, pas toujours ce pourquoi elles ont choisi de faire ce métier. Dans certains cas, la majorité des plans qui paient pour faire son statut ne sont pas ceux en tant que danseuse… De mon côté, je n’ai pas essayé de monter mon intermittence par choix, parce qu’avec une petite fille de deux ans, cela me semblait trop risqué. Je pense que ce statut est toujours adapté à une réalité du métier ( alternance de périodes fastes, de travail intense où on ne compte plus ses heures, avec des périodes creuses de recherche d’emploi, de recherches personnelles, de formations, de montage de projets… ). Au-delà de l’intermittence, je me pose beaucoup de questions sur le statut de l’artiste. Sur ce que tous ces gens ( dont je fais partie et qui ne savent que danser ou chanter, ou jouer… ) apportent à la vie locale ou carrément à la société. L’artiste ne me semble visible et reconnu qu’à la télé, ou dans les grandes institutions qui nourrissent une certaine tradition comme les ballets, ou encore à l’école qui est le dernier milieu

où l’artiste est le plus approchable et inséré, reconnu par la société. De mon humble point de vue, la plupart des artistes qui créent et récréent des petits mondes avec acuité et persévérance, avec un impact modeste mais réel, sont dans une autre dimension. C’est-à-dire ni sur les petits écrans ( de la télé à l’IPhone ), ni à l’Opéra, ni à l’école, mais dans un no man’s land chamarré de bricolages économiques, de petites associations bien vivantes, mais plus précaires ou éphémères. Il y a maintenant beaucoup de projets artistiques qui arrivent à se développer par des interventions artistiques en milieu

© Sam Veysseyre

scolaire, des sensibilisations en direction de " publics défavorisés " de " la " culture. C’est évidemment gratifiant pour les artistes de se croire en mission dans l'Éducation Nationale ou dans des quartiers difficiles. Mais je m’interroge beaucoup car tous les artistes ne sont pas des pédagogues, tous les enfants n’ont pas besoin de sentir " l’Aaart " au quotidien, tout le monde n’a pas besoin d’être sensibilisé tout un trimestre à la danse contemporaine. On fait souvent de nombreux raccourcis dans les objectifs très politico-corrects de ces expériences. Mais j’ai complètement dévié du sujet. Vous pouvez couper !

Dans un livre paru en 2010 " Danser, enquête dans les coulisses d’une vocation ", écrit par le sociologue Pierre-Emmanuel Sorignet, il est brossé un portrait parfois dur du milieu. Notamment pour les mères. Comment voyez-vous la chose, en tant que femme, mère ?

Dur oui, mais pas plus qu’un autre, je pense, c’est peutêtre bateau comme réponse, mais tout dépend du point de vue. Si on ne rentre pas dans le délire d’autres personnes qui déclarent que grossesse = maladie, on peut déjouer beaucoup d’a priori des employeurs et selon les possibilités, travailler du coup jusqu’à assez tard dans l’avancement de la grossesse, et reprendre assez rapidement après l’accouchement. Tout dépend de sa grossesse, de ses relations de travail.

La danse est l'une des plus vieilles formes d’expression artistique et chaque société ( ou civilisation ) en a développé ses propres formes. Mais… à quoi ça sert ?

J’ai plusieurs réponses… La première, spontanée mais un peu gonflée, c’est : " demandez à vos parents ". La deuxième un peu plus réfléchie, c’est que ça sert peutêtre à ce qu’il reste au monde des choses qui ne servent a priori à rien, qui soient improductives, inutiles, qui ne rapportent rien, et ne restent même pas dans les annales, et qui pourtant nous marquent et nous font profondément du bien. Plus poétique mais plus ambitieux enfin : à ce que l’on se parle et se comprenne sans mots, intuitivement. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

Compagnie Lily Kamikaz LILYKAMIKAZ.ORG

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PHOTOGRAPHIE

SN▲PSH●T

COLL C TIF PHOTOG NIQU L'Incontournable Magazine est partenaire de Snapshot, une association qui a eu l'excellente idée de lancer un concours à destination des jeunes photographes. Dans le cadre de notre partenariat nous publions les photos des trois lauréats de cette première édition. Entretien avec les membres de cette toute jeune et ultra-dynamique association.

Pouvez-vous Snapshot était à présenter l'origine un projet l'association ? de Susie. Elle avait en tête l'idée d'une association qui puisse permettre de valoriser le travail des artistes et de le placer à la portée de tous. Puis elle a rencontré Camille et Justine il y a un an, qui étaient dans la même optique. Toutes trois motivées par ce projet, l'association a été créée en mars 2012. En septembre, nous sommes passées à six, avec Capucine, Sarah et Juliette que nous avons recrutées durant l'été. Une fois l'équipe formée, nous avons mis des mots et des projets sur les idées initiales de l'association. Chacune a pu exposer sa vision des choses, ses affects en la matière. C'est ainsi que nous sommes tombées sur une association à plusieurs volets, qui regroupe tant que possible les goûts et les motivations de chacune. Nos ambitions sont maintenant bien plus claires : d'une part nous œuvrons

pour promouvoir les arts visuels, permettre aux artistes de se faire connaître et d'être reconnus. D'autre part, il s'agit pour nous de créer un réel lien entre le travail des artistes et les lieux, institutions, un public pour leur assurer une retombée certaine. Nous voici donc six membres, une bande de nanas toutes plus passionnées les unes que les autres. C'est " Girls power " chez Snapshot !

Comment est née L'idée était d'abord l'idée de créer ce d'attiser les troupes. concours photo ? Il nous fallait alors développer notre activité de blogging pour intéresser, traduire nos ambitions et notre ouverture. C'est dans ce contexte que nous avons lancé notre premier projet, les fameux articles Carnets de voyages. Chacune y présente son périple, son aventure en photos, bons et mauvais plans. Puis se sont ajoutés les articles et interviews sur des dessinateurs, photographes, graphistes, ou peintres qui nous tiennent à cœur. Ces articles nous ont permis de nous ouvrir aux artistes, de les rencontrer et de les inciter à venir à nous.

Quelles ont été les principales difficultés rencontrées ?

Suite à cela, nous avons ressenti le besoin de concrétiser nos activités, de donner de la matière à notre association. Aux vues de nos intentions ( promouvoir

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les artistes, créer un lien ) nous avons immédiatement pensé qu'un concours photo répondait aux lignes directrices de Snapshot. Nous avons passé beaucoup de temps à déterminer le thème du concours. Nous voulions avant tout souligner l'esprit de notre association, sortir un peu du lot et intriguer. Sans compter que nous avions envie que les participants se creusent la tête sur le thème, qu'ils se demandent comment mettre une image sur cette citation, comment l'exploiter. Le thème du concours était donc tiré du film J'ai tué ma mère de Xavier Dolan : "  Ma mère me dit souvent que je suis quelqu'un de spécial mais moi je pense que les gens qui disent cela n'ont pas compris la différence. " Et nous n'avons pas été déçues ! Nous avons reçu un peu plus de quatre-vingt photos, toutes plus différentes les unes que les autres. Le jury a sélectionné les quinze meilleures photos selon des critères prédéfinis. Le lot à la clé de ce concours est l'exposition des quinze clichés, ainsi qu'un appareil lomographique pour le premier prix, un livre de Mark Cohen True Colors pour le second et un abonnement à Polka Magazine pour le troisième. Tout cela, sans compter la publication dans l'Incontournable Magazine ! E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

Le blog Snapshot SNAPSHOTASSO.BLOGSPOT.FR


N° 1 —

ALEXANDRE LAILLE 19


N° 2 —

MARIE DABBADIE 20


N° 3 —

WENDY VECTOR 21


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L I T T É R AT U R E & B D

▲RBITR▲IRE MAISON D' DITION " Qui procède d'un libre choix de principes et des conventions ". Ou encore " caractère de ce qui est soumis à la fantaisie de quelqu'un ". Voila ce que je lis en page 128 du Robert à propos de l'adjectif arbitraire. Depuis sept années, la petite maison d'édition qui a élu domicile dans le 3e arrondissement de Lyon distille des ouvrages et une revue particulièrement singulière, sobrement intitulée

Arbitraire. La dernière livraison, le 11e tome, nous propose cent cinquante pages de BD à l'esthétique raffinée et dont la qualité est absolument remarquable. Tout y est soigné à la perfection, un véritable travail d'orfèvrerie. Entretien avec le collectif dont les prises de décisions semblent être tout aussi arbitraires que BHL est philosophe.

Arbitraire au fond, Arbitraire est une qu'est-ce donc ? structure éditoriale fondée en 2005 par un groupe d'amis. On publie une revue une fois l'an, regroupant tous les auteurs Arbitraire et des invités de passage. En parallèle, de nombreux livres d'auteurs ont été publiés sous forme de microéditions, et depuis peu on a décidé de faire des livres moins confidentiels avec des tirages plus conséquents et une meilleure visibilité. Depuis 2008 Arbitraire est aussi un atelier de travail ainsi qu'un point de vente pour nos productions, situé à Lyon.

Vous en êtes à votre 11e édition, quelles ont été les évolutions majeures depuis la création ?

On a commencé la revue pendant nos études, on a donc appris sur le tas. Les premiers numéros étaient photocopiés, on ne se posait pas trop de questions autres que celle de reproduire rapidement nos planches fraîchement encrées. On a petit à petit fait plus attention à la

eux aussi beaucoup évolué dans leurs travail d'écriture en général ( dessins, scénarios, etc. ). En 2011, suite à des divergences, le collectif a connu un gros changement  : nous sommes passés d'un collectif de quatorze auteurs à une structure plus réduite tournant autour d'un comité éditorial de huit personnes. qualité du papier et de manière générale aux aspects techniques de l'impression. En 2007, Renaud et Vincent ont fait un stage au Dernier cri , éditeur marseillais spécialisé dans le livre en sérigraphie. Depuis nous sérigraphions les couvertures de la revue, et de la plupart de nos livres. Arbitraire 9 ( 2010 ) marque notre passage de l'impression numérique reliée à la main à une impression offset avec un façonnage en usine. C'est d'ailleurs avec ce numéro que nous avons remporté le prix de la bande dessinée alternative à Angoulême. Depuis, la forme de la revue s'est à peu près stabilisée, même si nous aimons apporter à chaque numéro un petit plus à la forme de l'ouvrage. Les auteurs ont

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Lorsqu'on est illustrateur ou auteur, comment intégrer le projet Arbitraire ?

La revue est ouverte aux propositions des auteurs hors collectif, il est possible d'envoyer des projets par mail ou par courrier. On les regarde ensemble et on répond. Mais la plupart du temps les projets qu'on intègre à la revue sont ceux d'auteurs rencontrés en festival, avec lesquels on a échangé, ou des auteurs que l'on apprécie à qui l'on a demandé des planches.

Quel est le mode Actuellement, on de distribution gère nous-même de la revue ? tous les aspects de la diffusion/


L I T T É R AT U R E & B D   distribution. On est en contact avec des librairies en France et dans le monde, spécialisées en bande dessinée ou non. On étudie en ce moment les possibilités d'une diffusion confiée à des professionnels, car ce travail nous dépasse un peu. Il y a aussi les commandes directes via notre site internet www.arbitraire.fr, on fait des colis avec plein de cadeaux.

Vu de l'extérieur votre fonctionnement semble être fortement et authentiquement démocratique, pouvez-vous en dire plus ?

Les huit personnes qui s'occupent actuellement de la revue se connaissent depuis longtemps et ont des goûts communs. La plupart du temps il y a consensus. On se rassemble tous les vendredis en vrai ou en pixel ( certains n'habitent plus sur Lyon ) pour transmettre les infos, approuver et valider les décisions.

Où en est le N° 12 Après la sortie de la revue ? d'un numéro, chacun bosse sur ses projets personnels, on fait une pause. On commence à penser à des invités mais on se penchera dessus sérieusement vers le début de l'été. On en profite pour partager nos dernières et futures sorties. À la rentrée 2012 on a sorti les comix de Géraud et Charles Papier dans la collection Atome. Le Codex Comique de Dan Rhett ➊, auteur américain au style naïf et à l'humour aiguisé, ainsi que le Magic Art Digital ➋, recueil de dessins d'Antoine Marchalot ont été publiés dans la foulée. On bosse actuellement sur La danse des Morts, long projet de Pierre Ferrero prévu pour fin 2013, et plein d'autres petites choses.

Éditions Arbitraire ➋

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ARBITRAIRE.FR


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L I T T É R AT U R E & B D

GILLES R●CHIER R SID NT !

Prix révélation du Festival de la Bande Dessinée d'Angoulême 2012. Gilles Rochier est actuellement en résidence au RIZE. Nous avions rédigé un article sur ce lieu dans notre précédent numéro, il était donc important pour nous d'aller à la rencontre de ce grand personnage de la BD hexagonale.

Après plusieurs mois de résidence au RIZE, comment te sens-tu ?

Bien… très bien ! Chacune de mes venues à Villeurbanne est enrichissante, je commence à comprendre comment marche le RIZE. L'idée globale de l'endroit, nous travaillons sur plusieurs idées en même temps : programmation, médiation, exposition. Je vais bientôt avoir fait le tour des saisons à Villeurbanne.

Pour revenir sur ton parcours, peux-tu nous raconter comment tu es venu à la BD ?

Je suis venu à la BD par le fanzine. J'ai créé En vrac en 1996. J'ai trouvé le moyen de raconter mes histoires à ma façon et à mon rythme, sans éditeurs. Depuis, malgré le fait d'être édité, je continue à faire des fanzines. La BD j'en lis presque plus je préfère en faire et puis des fois… je préfère en lire que d'en faire… plus j'avance et moins j'ai de vérité sur la bande dessinée, et ça m'arrange bien.

Le rap semble prendre une place importante dans ta vie. Comment expliques-tu cet amour pour ce style de musique ?

Au quartier on écoutait tous la même musique, du funk, du reggae… mais le soir chez moi en douce j'écoutais du rock, du hard rock du rock français. Et puis on a vu arriver les premiers titres de rap américain, on a tous pris une claque. En fait je crois que c'est l'énergie que ce truc dégageait qui nous a plu, c'était un peu un truc d'énervé quand même, alors quand NTM se pointe avec Authentique ça a été foudroyant, je retrouvais la puissance du rock avec un son contemporain et des textes compréhensibles et bien virulents.

Un livre publié dernièrement a fait sensation dans le monde hip-hop : L'effroyable Imposture du rap. En as-tu entendu parler ?

Tu n'as pas besoin de lire ce bouquin pour voir que le rap français est devenu une escroquerie sur patte, t'écoutes Skyrock dix minutes ça te suffit pour voir l'état du bordel…et puis je ne vois pas pourquoi le rap aurait pu s'en sortir mieux que d'autres styles musicaux ou art en général à partir du moment où le commercial te dit " Hé gamin c'est bien ce que tu fais , viens me voir… " c'est foutu.

Tu évoquais un âge d'or de la BD, une époque où les dessinateurs n'étaient pas dans la même précarisation. Selon toi qu'est ce qui a évolué ?

Je ne sais pas où ça a merdé, je ne suis pas la bonne personne pour l'expliquer. C'est vrai que nous avons le cul dans les ronces ( les auteurs, les libraires ) je suis très pessimiste en fait, il est tout à fait possible que je ne puisse continuer à être seulement auteur et qu'il soit envisageable que je retourne à l'usine… si il en reste.

Un album qui s'intitule Ta mère la pute ➊, ça attire les censeurs ou tout le monde s'en fiche ?

Je n'ai jamais eu une personne virulente qui est venu me voir, brandissant un discours construit sur l'importance de censurer mon livre, mais par contre j'ai vu un maximum de gens, des professionnels du livre, des bibliothécaires, des ados, mettre le bouquin en avant afin de le défendre, et de l'expliquer. Je sais qu'il y a des personnes qui l'ont bloqué mais jamais ils me le disent quand je suis dans la même pièce qu'eux.

L'avenir de Du dessin et des Gilles Rochier ? livres bordel… Plein de livres. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

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Le blog de Gilles Rochier ENVRACCITY.WORDPRESS.COM

En ce moment au Rize LERIZE.VILLEURBANNE.FR

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L I T T É R AT U R E

LES INDÉS DE L'IM▲GIN▲IRE Les Indés de l'Imaginaire viennent de voir le jour. Vous avez pu les apercevoir lors de la première édition des Oniriques de Meyzieu… mais qui sont-ils ? Et bien ce sont trois maisons d'édition spécialisées dans les littératures de l'imaginaire ( Sf, fantasy, fantastique… ) qui ont décidé d'unir

leurs forces. Ici, à l'Incontournable Magazine nous croyons dur comme fer aux vertus de la mutualisation, et ce n'est pas ce vieux Proudhon qui nous fera dire le contraire. Coup de projecteur sur cette nouvelle entité composée des Moutons électriques, des éditions Mnémos et des éditions Actu Sf.

Pouvez-vous nous présenter les trois structures formant le collectif ?

Trois éditeurs de Rhône-Alpes se sont associés : les éditions Mnémos, qui existent depuis dix-sept ans et sont installées dans le Beaujolais ; ActuSF, qui en plus du site d'actualité est également une maison d'édition, installée à Chambéry ; et les Moutons électriques, créés à Lyon il y a bientôt dix ans. Nous travaillons tous les trois dans les domaines de la littérature de genre, plus particulièrement les littératures de l'imaginaire. C'est-à-dire la science-fiction, la fantasy, le fantastique… Et nous avons au total déjà plus de cinq-cent livres dans nos catalogues.

Comment définiriez-vous les Indés de l'imaginaire ? Groupement, collectif, association…

Pour le moment, c'est un collectif, avec pour but de mutualiser une partie de nos moyens, notamment au niveau de la promotion et de la communication. Parmi les premières pistes explorées, nous tenons ensemble des stands sur des salons, nous organisons

satisfaisant, il y a une émulation formidable, les idées ne cessent de jaillir, nous ne craignons pas d'être ambitieux.

des petits déjeuners d'information pour les libraires dans différentes régions, avec aussi à la clef des opérations destinées à aider les librairies, et nous avons publié un catalogue commun.

De quelle manière est apparue pour vous la nécessité de se regrouper ? Est-ce selon vous nécessaire pour survivre ?

Nous partons du principe qu'ensemble nous serons plus visibles : notre regroupement au sein d'un collectif est une manière d'essayer de répondre aux problématiques de l'édition et de la librairie aujourd'hui. Nous serons aussi plus forts, l'union faisant réellement la force. Travailler seul dans son coin, c'est bien, mais travailler ensemble c'est encore plus

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Quelles sont les principales difficultés rencontrées lorsqu'on est une maison d'édition ?

Pour des éditeurs de notre petite taille, l'un des principaux défis c'est la visibilité : comment être remarqués ? Nous nous efforçons donc d'être remarquables, tous les trois ensemble.

Envisagez-vous l'intégration de nouvelles structures ?

Disons qu'être trois constitue pour nous une première étape, pendant laquelle nous apprenons à travailler ensemble. Nous construisons les choses étage après étage. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

MOUTONS-ELECTRIQUES.FR EDITIONS-ACTUSF.FR MNEMOS.COM


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NOUVELLE LITTÉRAIRE

L▲ N●UVELLE

DONT VOUS T S L H ROS Par H. Degossen

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Vous vous réveillez dans une pièce blanche. La lumière est forte et vous clignez des yeux pour trouver vos repères. Vous n'avez aucun souvenir de votre arrivée. Alors que vous vous asseyez sur le bord de la couche rudimentaire, vous distinguez une porte. Une voix sèche et puissante vous intime alors l'ordre de vous lever et de l'ouvrir. Émergeant d'un profond sommeil, vous obéissez à la voix, ne pouvant résister à la force qu'elle exerce sur vous. Derrière la porte vous découvrez une pièce faiblement éclairée, ainsi que trois miroirs. En inspectant la pièce, vous réalisez que l'entrée que vous venez de franchir a disparu. Vous vous giflez pour vérifier que vous êtes bien réveillé. De nombreuses questions fusent dans votre esprit et vous réalisez que votre mémoire est défaillante. Dans votre dernier souvenir, vous étiez assis à votre bureau, en train de lire vos mails. Puis l'instant d'après vous vous réveillez ici. Impossible de vous rappeler ce qui s'est produit dans cet intervalle. Votre attention se porte sur les reflets que votre silhouette dessine dans les miroirs. Vos traits sont plus marqués, comme si plusieurs années s'étaient écoulées. Soudain, le reflet à votre gauche s'anime. Dans un réflexe de surprise, vous sursautez et reculez au fond de la pièce. Puis vous vous rapprochez avec précaution et touchez le miroir pour vérifier sa consistance. Vous sentez le froid de cette matière sous vos doigts. C'est bien du verre. Vous l'inspectez, persuadé d'avoir été victime d'une hallucination. Votre respiration forme de la condensation à sa surface. Alors, vous prenez conscience d'un changement brutal de température. Vous frissonnez alors que le reflet s'anime à nouveau et parle : " Je me doute que tu es surpris, mais tu n'as pas le temps de te poser des questions, il faut agir vite. Il te faut choisir une porte pour sortir d'ici, et la mienne te

conduira directement à la sortie. " Puis le reflet au centre s'anime à son tour et rétorque : " Ne l'écoute pas, c'est un piège. Ouvre la mienne et tu arriveras dans une autre pièce qui sera la prochaine étape vers la sortie. Mais d'ici, aucune porte ne te mène directement dehors. " Puis le troisième reflet réplique : " Il a raison, mais je t'offre quelque chose de mieux. Dis moi ton vœu le plus cher et il s'exaucera quand tu ouvriras ma porte. " Tout vous semble irrationnel, mais comme l'a dit le premier reflet, vous n'aurez pas les réponses à vos questions maintenant, il faut aller de l'avant. Vous réfléchissez aux différents choix qui vous sont offerts. ➊ Vous ouvrez la porte de gauche. Rendez-vous au 6. ➋ Vous ouvrez la porte du centre. Rendez-vous au 8. ➌ Vous regardez le troisième reflet et dîtes souhaiter revenir à votre quotidien et vous ouvrez la porte. Rendez-vous au 13. ➍ Vous regardez le troisième reflet et dîtes souhaiter revenir dans un monde où la guerre et la haine n'existe plus. Rendez-vous au 7.

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Vous avancez prudemment, puis une voix d'outretombe envahit la caverne. " Pauvre de toi… Il n'y a aucune échappatoire. Retourne donc à ton supplice. " Vous perdez connaissance. Retournez au 6. Une voix grave et énergique vous répond dès la première sonnerie : " Ah vous tombez bien, je me demandais si vous alliez appeler. Je connais bien votre situation, vous n'êtes pas le premier. Mais on n'a pas le temps pour les questions. Enfin bref, je peux vous sortir de là, mais il faut m'aider avant toute chose. Inspectez le mur à votre droite, vous trouverez une porte. Derrière celle-ci, il y a Cerbère. Vous en avez entendu parler je suppose. Et bien Eurysthée n'en veut plus et veut que je le ramène aux Enfers. Le type m'envoie faire ses courses

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NOUVELLE LITTÉRAIRE  et après il change d'avis. Enfin je vous passe les détails. Mais bon, là je n'ai matériellement pas le temps. Si vous pouviez le faire pour moi, je vous ferai sortir d'ici. Et ne vous inquiétez pas, Cerbère n'est dangereux que pour ceux tentant de sortir des Enfers. Là, il sera doux comme un agneau. " Puis il raccroche, vous laissant sans voix. ➊ Vous acceptez la quête et ouvrez la porte à droite. Rendez-vous au 12. ➋ Vous abandonnez la quête et vous focalisez sur les symboles sur le mur. Rendez-vous au 11.

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Vous entrez dans la pièce qui n'est pas éclairée. Alors que vos yeux s'habituent à l'obscurité, la porte se referme derrière vous en silence. Vous retournant vers cette dernière, vous essayez de l'ouvrir mais sans succès. Vous apercevez alors que le miroir de la porte est sans teint et pouvez voir la pièce d'où vous venez. Ce miroir est votre unique source de lumière. La pièce est vide mis à part des bouteilles d'eau entreposées dans un des coins. Au bout de quatre jours d'ennuis et rongé par la faim, vous voyez arriver quelqu'un dans la pièce. Et cette personne n'est autre que vous. Alors que vous voyez votre double se regarder dans le miroir, vous approchez de la porte et la lumière remplit votre pièce vous rendant visible à votre alter ego. Vous le suppliez alors de vous libérer. Mais son attention est attirée par les autres miroirs, et vous ne pouvez entendre ce que les autres reflets peuvent dire. Puis votre alter ego emprunte une des deux autres portes, vous laissant avec pour seul compagnon, votre ventre qui crie famine. Trois autres jours s'écoulent avant qu'un autre alter ego ne vienne. Cette fois-ci, animé par le désespoir et la faim, vous dîtes alors la phrase que vous avez eu le temps de répéter en ces jours de solitude. Et vous réussissez à convaincre votre double d'entrer dans votre pièce. Alors que la porte s'ouvre, vous perdez immédiatement connaissance. Retournez au 1.

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Vous voilà chez vous. Vous avez du mal à savoir si c'est la réalité et regardez alors votre portable. Vos contacts ont repris place dans le répertoire. Pour vous rassurer et retrouver vos repères, vous appelez un ami et sortez boire un verre dans le vieux Lyon. Vous vous enivrez pour oublier, puis rentrez complètement saoul. Le lendemain matin, vous vous levez avec une gueule de bois, vous demandant si votre aventure était réelle ou le cauchemar le plus réaliste que vous ayez eu. Vous regardez l'heure et vous empressez de prendre une douche. En vous rendant au travail ( que vous rêviez de quitter la veille ), vous êtes heureux de subir le bain de foule du métro A et vous languissez de retrouver vos collègues agglutinés à la machine à café, en train d'échanger leur impression sur le " Top Chef  " de la veille. Puis au cours de l'après-midi, vous faîtes malheureusement un accident vasculaire cérébral, certainement dû à votre consommation de cigarettes. Vous êtes hospitalisé rapidement et êtes sauvé mais non sans séquelles. Vous souffrez maintenant d'apraxie idéomotrice accompagnée d'une aphasie. Vous comprenez que votre supplice n'a aucune échappatoire et en venez à regretter de ne pas vous réveiller dans cette chambre blanche pour tout recommencer tel Sisyphe.

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Alors que vous entrez dans la caverne, Cerbère grossit à vue d'œil, devenant un monstre impressionnant correspondant à l'image que vous vous faisiez du Gardien des Enfers. Puis Cerbère vous empêche de sortir, grognant et vous montrant les crocs alors que vous faîtes demi-tour. La bave coule le long de ses babines. Vous êtes maintenant prisonnier des Enfers. ➊ Vous trouvez un bâton et le lancez à l'extérieur de la caverne, espérant que Cerbère sorte. Rendez-vous au 10. ➋ Après tout ce que vous venez de vivre, vous décidez d'entrer un peu plus dans la caverne, vous disant que cela ne pourra pas être pire. Rendez-vous au 2.

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Le reflet du centre souffle de lassitude, alors que celui de gauche fait non de la tête par dépit. Vous vous réveillez dans le vide en apesanteur, dans la plus totale obscurité. Le monde a disparu et vous êtes seul pour toujours. Seul le concept de temps semble avoir subsisté, comme une ultime punition, vous laissant réfléchir durant l'éternité à votre choix absurde.

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Vous ouvrez la porte du centre et vous ne voyez rien, la pièce suivante étant trop sombre. Vous vous décidez et entrez dans la pénombre. Alors que vos yeux s'habituent à l'obscurité, vous avancez prudemment jusqu'à un mur où vous semblez distinguer des symboles. Par habitude, vous cherchez dans votre poche et sortez votre smartphone pour utiliser sa lumière. Puis vous vous rendez compte du ridicule de la situation. Vous n'avez même pas pensé à vérifier que vous aviez votre portable. Par miracle, il y a du réseau. L'espoir renaissant, vous tentez d'appeler la police, mais l'appel n'aboutit pas. Vous consultez alors votre répertoire mais tous vos contacts ont disparu. Il n'y a qu'un seul nom qui vous est inconnu : Héraclès. ➊ Vous appelez Héraclès. Rendez-vous au 3. ➋ Vous êtes persuadé que ce n'est qu'un autre piège et ne passez aucun coup de fil. Vous inspectez alors les symboles sur le mur. Rendez-vous au 11.

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Vous répondez au téléphone et votre interlocuteur vous dit : " Bien joué. Bon, chose promise, chose due. Et à ces mots, vous vous retrouvez chez vous ". Rendez-vous au 13.

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Vous vous retrouvez chez vous à Lyon. Vous soufflez, vous remémorant votre épopée. Vous réfugiant dans le cocon protecteur de vos habitudes, vous allumez la télévision pour retrouver des voix et des images qui vous sont familières. La voix du présentateur annonçant des morts lors d'un raid en Syrie vous rassure. Et vous retrouvez même le sourire, vous voilà enfin de retour. Puis la soirée se passe tranquillement tout en essayant d'oublier ce cauchemar et en mettant de côté vos questions. Vous veillez tard comme pour éviter de dormir, de peur de vous réveiller à nouveau dans cette pièce. Mais la fatigue vous entraîne inexorablement dans les limbes du sommeil alors que la télévision continue de diffuser son flot incessant d'images. Retournez au 1.

Vous lancez le bâton et Cerbère le saisit au vol et n'en fait qu'une bouchée. Votre portable sonne enfin, vous voyez le nom d'Héraclès apparaitre. Rendez-vous au 9. Vous scrutez alors les symboles à l'aide de la lumière de votre smartphone. Vous en distinguez trois qui semblent être des boutons poussoirs. Les trois symboles sont :

➊ Vous appuyez sur le symbole infini : rendez-vous au 14. ➋ Vous appuyez sur le symbole de l'eau : rendez-vous au 15. ➌ Vous appuyez sur le symbole du lion : rendez-vous au 4.

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Vous ouvrez la porte à votre droite et vous retrouvez à l'orée d'une forêt. Le chien tricéphale est assis près d'un poteau où sont fixés trois laisses, une pour chaque cou. La créature a la taille d'un berger allemand alors que vous vous attendiez à un animal beaucoup plus imposant. Vous apercevez aussi un sentier et un panneau indiquant : " Erèbe - Royaume d'Hadés : 2 km ". Vous vous approchez prudemment de Cerbère et voyez les trois têtes japper, les langues toutes dehors. La créature tire sur les laisses, Cerbère semble vous faire la fête. Vous armant de courage, vous approchez votre main, puis finalement le caressez. Vous réalisez alors qu'il est bien inoffensif et vous surprenez même à jouer avec lui. Puis vous saisissez les laisses et empruntez le sentier, bien déterminé à achever cette quête absurde. Après une demi-heure de marche le sentier débouche sur une caverne, vous comprenez que c'est l'entrée des Enfers. Vous détachez alors les laisses et faites signe à Cerbère d'entrer dans la caverne mais il n'obéit pas. Il s'assoit à vos côtés et vous regarde, vous léchant la main. ➊ Vous cherchez un bâton au sol et le lancez dans la caverne en espérant que Cerbère y entre. Rendez-vous au 16. ➋ Vous entrez avec Cerbère dans la caverne. Rendez-vous au 5.

14 15

Vous perdez alors connaissance. Retournez au 1.

Vous entendez alors de l'eau qui ruisselle. En cherchant l'origine de ce bruit, vous entendez le clapotis de vos chaussures. La pièce se remplit très rapidement d'eau. Vous paniquez et cherchez un moyen de sortir. Touchant toutes les parois à la recherche d'une porte. Vous en trouvez une sur votre droite, mais elle est bloquée, tout comme la porte par laquelle vous êtes arrivé. Vous fouillez tous les recoins de la pièce, et appuyez sur tous les boutons par désespoir. Mais rien n'y fait. Dommage…

16

Vous lancez alors le bâton et contre toute attente, Cerbère entre dans la caverne. Vous soufflez espérant que cela suffira pour terminer cette quête. Puis votre portable sonne. Le nom d'Héraclès apparait à l'écran. Rendez-vous au 9.

Pour être publié dans L'Incontournable Magazine, envoyez vos textes à contact@lincontournable-lyon.fr. Tous les genres littéraires sont acceptés, les textes audacieux et subversifs sont préférés. ( Maximum 2600 mots. )

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QUIZZ INCONTOURNABLE

R = R●M▲N

➋ QUI EST L'AUTEUR DU ROMAN CHAOS CALME, DONT ANTONELLO GRIMALDI A TIRÉ LE FILM DU MÊME NOM EN 2008 ? A Sandro Veronesi B Claudio Magris C Rosetta Loy D Giancarlo de Cataldo ➌ LE PRIX FEMINA A POUR PENDANT : A Le Prix Goncourt B Le Prix Virilo C Le Prix Renaudot D Le Prix Médicis

➍ QUEL MÉDIA VA DÉCERNER UN PRIX LITTÉRAIRE POUR LA PREMIÈRE FOIS EN 2013 ? A L'Express B France Inter C Le Monde D Femme Actuelle ➎ AUX ASSISES INTERNATIONALES DU ROMAN, ON PEUT : A Voir des documentaires en avant-première B Écouter des lectures en V.O. C Faire dédicacer son roman préféré D Assister à des émissions de radio ➏ SUR QUEL RÉSEAU SOCIAL PEUT-ON DÉSORMAIS ÉCRIRE DES ROMANS ? A Facebook B Linkedin C Twitter D Pinterest

Les Assises Internationales du Roman sont organisées par Le Monde et la Villa Gillet, en coréalisation avec les Subsistances et en partenariat avec France Inter.

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➐ LORS DES 7E ASSISES INTERNATIONALES DU ROMAN, QUI LIRA DES EXTRAITS DE VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE, POUR LE PLAISIR DES PETITS ET DES GRANDS ? A André Wilms B Denis Podalydès C Arielle Dombasle D Pierre Arditi ➑ QUEL ÉCRIVAIN A INVENTÉ LE NOM D'AUTOFICTION POUR QUALIFIER SON TRAVAIL ? A Colette B Serge Doubrovsky C Marguerite Duras D Christine Angot ➒ CHERCHEZ L'INTRUS : AUTREFOIS, LES SUBSISTANCES ÉTAIENT : A Un couvent B Un haut lieu de la Résistance pendant la Seconde Guerre Mondiale C Un atelier de céramique D Une boulangerie pour l'Armée française Du 27 mai au 2 juin aux Subsistances VILLAGILLET.NET 1B / 2A / 3B / 4C / 5ABCD / 6C / 7D / 8B / 9B

➊ D'OÙ VIENT LE NOM DE " ROMAN " ? A De Romans-sur-Isère B Du Roman, la langue parlée au Moyen Âge C Du mouvement romantique dans les arts D C'est une déformation issue de l'adjectif " romain "


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HISTOIRE

LES C▲NUTS Même si leurs cervelles ont été déclinées en dessert à Lyon, les Canuts, ces fameux tisserands, sont surtout connus pour avoir marqué l’histoire de France, et plus particulièrement celle de l’émancipation des hommes. Leur épopée constitue un exemple universel de la marche inexorable vers l’équité et la justice que l’homme a entamé au début de la révolution industrielle. Une époque où cet essor combiné à un exode rural de plus en plus massif précipita dans les villes grandissantes un nombre croissant de personnes pauvres en quête de travail. C’est tout un monde rêvant d’une vie meilleure qui s’entasse alors dans les quartiers miséreux et les bidonvilles.

Dans les années 1811-1812, menés par John Ludd, les luddistes, des artisans tondeurs et tricoteurs sur métier à bras, entrent en conflit avec des employeurs et manufacturiers qui favorisaient l'emploi de machines dans le travail de la laine et du coton. La lutte des membres de ce mouvement clandestin s'était caractérisée par le " bris de machines " ou sabotage, responsables selon eux de leur paupérisation. À Lyon, dès les années 1830 le sort des ouvriers se dégrade peu à peu suivant le destin des ouvriers anglais. On pourrait facilement penser que les échos de la révolte des luddistes étaient arrivés jusqu'à la Croix-Rousse. Si ce fut le cas, les nouvelles ne furent pas très bonnes car en 1812, une loi instaurant la peine capitale pour le bris de machine fut entérinée en Angleterre. Treize luddistes furent pendus. Face à la répression, certains choisissent le chemin de la révolte " légale " en recourant à des avocats chargés de faire du lobbying auprès du gouvernement afin que ce dernier entérine des textes de loi en leur faveur : l’échec est total. Le mouvement se radicalise, les actes de destruction deviennent de plus en plus désespérés. Les luddistes disparaitront dans les années 1820 avec la disparition de leurs professions. Le paupérisme, terme importé d’Angleterre, s’installe donc en France. Les plus riches s’enrichissent et les plus pauvres s’appauvrissent. Ce qui pose problème aux tisserands lyonnais, c’est que les riches, les fameux soyeux, patrons négociants s’enrichissent sur le fruit de leur travail. Le revenu des canuts, dix-huit sous environ pour quinze heures de travail par jour, ne permet qu'une vie de misère. Les canuts décident de faire appel au préfet du département, Louis Bouvier-Dumolart, et obtiennent qu'une commission paritaire fixe un tarif minimum. Le préfet fera afficher dans la ville la déclaration : " Si par exception quelques ouvriers honnêtes ont encore des griefs à faire redresser, les voies légitimes leur sont ouvertes, et ils sont assurés d'y trouver une bienveillante justice ". Certains soyeux refusent d'appliquer le tarif minimum en prétextant de la concurrence internationale et des contraintes du marché, ah… le marché ! Les canuts se mettent immédiatement en grève le 20 novembre 1831. Quelques jours plus tard, au cœur de la Croix-Rousse, ils font face à la garde

Bien avant la révolte des canuts, la révolution industrielle transforma l'Angleterre. Les avancées technologiques y bouleversent l’organisation du travail. C’est une époque où l’homme se libère de certaines contraintes physiques, où la machine permet des prouesses en termes de productivité, mais c’est aussi une époque où le progrès technique menace les emplois. Ainsi, trois professions du milieu textile sont particulièrement menacées par l'apparition de métiers mécaniques : les tondeurs de drap, les tisserands sur coton et les tricoteurs sur métier. Ceux qui pratiquent ces professions sont des artisans relativement puissants, et malgré les lois de 1799 interdisant toute association en Angleterre ( Combination Act ), ils sont bien organisés et mieux lotis que les ouvriers des usines. Ces métiers à tisser mécaniques permettaient d’atteindre une qualité remarquable dans la confection des draps et des tissus pour un coup de revient relativement faible. Dès les années 1811-1812 les rancœurs des couches populaires anglaises et des artisans se cristallisent. La crise économique, les mauvaises récoltes et la famine sont présentes et ces années marquent la fin des politiques paternalistes qui protégeaient les artisans. L’Angleterre rentre progressivement dans l’ère de la politique du " laissez-faire ", qui s’apparente aujourd'hui au libéralisme économique jetant les ouvriers à la merci des impératifs du marché.

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nationale. Des coups de feu claquent et la révolte gronde. Les canuts descendront de leur colline, drapeau noir en tête, et occuperont le centre de Lyon. On dénombrera une centaine de morts après quelques altercations avec les forces de l’ordre. Ne sachant que faire de leur victoire, les canuts et la garde nationale, qui s'est finalement ralliée à eux, constituent un comité insurrectionnel. Ils s'abstiennent soigneusement et intelligemment de tout pillage. Le Président du Conseil Casimir Perier en profite pour envoyer vingt mille soldats sous les ordres du maréchal Soult aux portes de Lyon. Ils attendent patiemment que les insurgés se lassent. Le 5 décembre 1831, les troupes peuvent entrer dans la ville sans effusion de sang. La garde nationale est désarmée et dissoute, le tarif minimum abrogé et le préfet, jugé trop conciliant, révoqué. Une dizaine de canuts seulement sont traduits en justice… et bientôt acquittés. La terreur gagne les salons bourgeois et le mépris de la classe laborieuse s’affiche ouvertement. Dans le Journal des débats, le 8 décembre 1831, Saint Marc Girardin, conseiller d'État, dira : " La sédition de Lyon de 1831 a révélé un grave secret, celui de la lutte intestine qui a lieu dans la société entre la classe qui possède et celle qui ne possède pas. Notre société commerciale et industrielle a sa plaie comme toutes les autres

sociétés ; cette plaie, ce sont les ouvriers. Point de fabrique sans ouvriers, et avec une population d'ouvriers toujours croissante et toujours nécessiteuse, point de repos pour la société […]. Les barbares qui menacent la Société ne sont point au Caucase ; ils sont dans les faubourgs de nos villes manufacturières ". Malgré tout floués, les Canuts se soulèvent à nouveau en 1834 ➊, après que des meneurs aient été traduits en justice pour avoir dénoncé des baisses de salaires et fait grève. Cette fois, ils trouvent en face d'eux le ministre de l'Intérieur Adolphe Thiers, beaucoup moins accommodant que Casimir Perier. Il laisse les manifestants ériger des barricades puis fait donner l’assaut. Il va méthodiquement reconquérir la ville et massacrer les lyonnais tisserands. On compte environ six cent morts et dix mille arrestations au cours de la " Sanglante semaine " du 9 au 15 avril 1834. La répression a pour effet de rassurer les possédants sur la détermination du gouvernement à les protéger contre les " barbares " des faubourgs. Cet épisode est un prélude à la " Semaine sanglante " de 1871 par laquelle le même Thiers mettra un terme à la Commune de Paris. PA R P. D E S C H E M I N

➊ Horrible massacre à Lyon, J-P Clerc, lithographie, Belfort, 19e siècle. Révolte des Canuts de 1834. Inv (9)54.458 © Musées Gadagne.

VIVRE EN TRAVAILLANT OU MOURIR EN COMBATTANT 39


DOSSIER

LES LIEUX INC●NT●UR N▲BLES DE L▲ SCÈNE R●CK LY●NN▲ISE

Après avoir donné la parole aux groupes incontournables de la scène régionale, il nous est paru opportun d'aller voir du côté des salles de spectacles si l'herbe est plus verte. Nous sommes allés frapper aux portes de salles qui ne sont plus à présenter, comme le Marché Gare, mais aussi de lieux plus confidentiels comme le Clacson à Oullins ( dont les entretiens ont été publiés dans le numéro précédent ). Nous avons souhaité mettre en avant la pluralité de ses lieux de vie culturelle, leur complémentarité également car

chacun de ces établissements possède une identité propre et une programmation singulière. De la même manière que dans notre précédent dossier, les questions posées sont quasiment identiques. Là où précédemment, on observait des réponses très différentes, ici il règne une relative homogénéité. Suite et fin de ce dossier avec deux nouveaux entretiens. Glissons-nous derrière le rideau. PAR PHILIPPE DESCHEMIN

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DOSSIER

TR▲NSB●RDEUR Peux-tu te Cyrille Bonin, présenter ? directeur du

le reste s'équilibrant entre artistes français et internationaux. En accord avec la Ville de Lyon, propriétaire du bâtiment nous donnant la possibilité d'exploiter le lieu dans le cadre d'une Délégation de Service Public, il existe une convention de 70 000 euros permettant de diminuer les coûts de production d'un concert ou d'une soirée au Transbo, dédiée à l'accueil d'artistes ou de structures locales.

Transbordeur, mais aussi petit chef d'entreprise de la société Transmission qui gère le lieu. Autrement dit, à la tête d'une institution culturelle et d'une toute petite entreprise, qui accueille 190 dates par saison et 130 000 spectateurs.

Selon vous, quelle Le Transbordeur est la raison de qui a ouvert ses votre succès ? portes en 1989 a su acquérir une grande notoriété, notamment dans les années 90 où les salles de cette capacité n'étaient pas aussi nombreuses. Quasiment toutes les tournées européennes de gros artistes passaient par le Transbo. Les musiciens aiment la configuration qui donne un contact privilégié avec le public, et l'acoustique de la salle est souvent citée en référence. Depuis qu'on a reprit le Transbo, on fait des efforts sur l'accueil du public et on essaye de proposer des afters thématiques.

Comment Comme les artistes vivez-vous la vendent moins de crise du disque ? disques, ils ont encore plus besoin de tourner, donc on est toujours très sollicité. L'effet pervers est que les cachets des artistes ont augmenté et que les producteurs ont du mal à proposer des spectacles sans que ça se ressente sur le prix du ticket d'entrée. Malgré une bonne affluence, l'équilibre reste fragile car le Transbordeur est l'un des seuls

lieux lyonnais avec une gestion privée, et donc à ne pas recevoir d'argent public.

Un magazine désormais habitué aux unes racoleuses titrait : " La France des enfants gâtés ", en citant les Intermittents du spectacle. Sont-ils si gâtés ?

Sans ce statut, je ne vois pas comment nous pourrions fonctionner, d'autant que l'activité de notre salle n'est pas totalement annualisée. Si l'on prend les cas particuliers des intermittents présents au Transbo, je ne crois pas qu'on puisse parler de privilégiés, car rien n'est garanti en termes de calendrier d'emplois, et que les salaires proposés reposent sur des grilles tarifaires négociées.

Quelle est la proportion de la formation locale dans votre programmation ?

25% d'artistes régionaux ( sur des premières parties, des sorties d'albums, les nuits au Club Transbo… ),

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Avez-vous des Je suis effectiveinquiétudes, des ment assez inquiet préoccupations ? de l'avenir. Les symptômes de la crise économique sont présents, dans le mode de consommation des spectateurs, avec une offre de concerts et de soirées particulièrement conséquente sur l'agglomération lyonnaise. La concurrence est réelle et violente, entre la surenchère autour des cachets proposés par des festivals d'été, l'ouverture et l'activité intense de lieux à jauge comparable ( la nôtre est de 1800 personnes ). Plus question d'avoir une activité sereine sans être créatif, sans prendre des risques, à la fois en terme de programmation, de format et bien sûr d'économie. Notre valeur ajoutée tient à la salle en elle-même et au rapport passionné que notre équipe entretient avec l'effervescence musicale de notre époque. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

TRANSBORDEUR.FR


DOSSIER

© Vincent Rochas / Axiome asso

T●Ï T●Ï, LE ZINC

En dehors du circuit des salles plus institutionnelles, nous sommes allés à la rencontre du Toï Toï, le zinc, un café concert atypique supra-actif. La vie culturelle du grand Lyon ne s'arrêtant pas à Lyon, c'était donc l'occasion d'aller à la rencontre de ce lieu villeurbannais, situé prés du campus de la Doua et du CCO, tout à la fois convivial et débordant de vie. Entretien avec David qui, entre autre chose, s'occupe de la programmation.

Toï Toï le Zinc ? Toï Toï est une Qu'est ce que cela parole, un cadeau, veut-il bien dire ? un baiser, une accolade pour se souhaiter bonne chance avant de monter sur scène. C'est ainsi que

comédiens, danseurs, finalement tous ensemble nous nous encourageons. Le Zinc… car nous sommes aussi un zinc !

Le Toï Toï semble être un lieu protéiforme. Comment vous définiriez-vous ?

Merci Protée pour ce beau qualificatif ! Effectivement, suivant l'instant vous êtes dans une salle de concert, un cinéma, un restaurant, un lieu de création artistique, un bar, une aire de pique-nique, un salon de thé, un théâtre, une discothèque… Bref un lieu pour se retrouver, rire, pleurer, danser, se draguer, s'embrasser, se toucher, s'allonger…

Pouvez-vous nous C'est la p'tite sœur de parler de l'asso- Toï Toï qu'il héberge ciation Tatatoom ? durablement. Elle

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le lui rend bien en y organisant des concerts de tout style, des spectacles de danse et du théâtre " très corps ".

Être à Villeurbanne, Une force car force ou faiblesse ? notre projet a été accueilli avec chaleur par la mairie de Villeurbanne et qu'il aurait été totalement impossible d'avoir un tel espace avec un jardin dans Lyon. Par contre, force est de constater qu'encore beaucoup de ses habitants continuent à projeter leurs soirées sur Lyon voire à rester chez eux. Un problème en partie lié au manque de sensibilisation au spectacle vivant. À nous de changer cela ! E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

TOITOILEZINC.FR


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MUSIQUE

W▲R ▲NYW▲Y Qu'est ce que War Anyway est War Anyway ? juste en train de naître. L'EP est là pour faire découvrir le groupe au public et n'est que le prélude à un album qui arrivera dans quelques mois. WA appartient à un ensemble de projets artistiques qui s'apparentent à des formes de relations publiques, visant à assainir les pensées de nos concitoyens qui sont abreuvés par une propagande agressive de " contestataires " et autres " complotistes ". Tout comme nos collègues s'évertuant à rétablir les vérités et promouvoir la démocratie et la liberté quitte à user de la force ( opex principalement ), nous participons à notre niveau à cet effort commun. Les relations publiques via le domaine artistique est une composante qui est maintenant intégrée par les hautes sphères. Cela nous facilite le travail, un travail qui a commencé avec le plan Marshall.

Pourquoi ce nom ? C'est un nom fort qui indique que la guerre est inexorable et omniprésente. Elle peut revêtir de nombreuses formes, aussi bien idéologique que militaire. Nous devons soutenir le système en place, qui est, rappelons-le, la meilleure solution pour offrir le bonheur aux masses. Nous préservons la paix.

La crise Merci pour la ( du disque ) question, mais dans tout ça ? nous ne ressentons

Comment êtesvous structurés au sein du projet en matière d'organisation, est-ce que c'est super cadré ?

Nous sommes plutôt autonomes, mais nous faisons des rapports réguliers à notre encadrement. Nous avons la chance d'appartenir à la Nomenklatura des temps modernes. Nos dirigeants ont très tôt compris l'intérêt d'investir dans des domaines comme celui de la musique. Il y a un gros budget dédié aux différents médias, dont la musique, qui servent de vecteurs pour véhiculer les idées saines. Nos concitoyens dans leurs naïves bontés, se laissent facilement embrigader par des discours fallacieux de " contestataires ". Heureusement nous nous attelons à corriger ces pensées déviantes. Les pensées sont toujours manufacturées, et notre travail consiste à faire passer les bonnes idées dans les canaux médiatiques que vous mettez à notre service.

pas les effets de cette crise qui entre nous n'existe pas. Car il faut comprendre qu'elle est structurelle. Cependant elle nous permet de vous effrayer toujours un peu plus en vous laissant croire que demain vous pourriez revenir à l'âge de pierre. Ainsi vous ne pouvez qu'adorer notre magnifique système d'exploitation de l'homme par l'homme.

Le mot de la fin ? Pour illustrer le système que nous souhaitons préserver, nous dirons ceci : L'Art est aux démocraties ce que la violence est aux dictatures. N'oubliez pas que le libéralisme c'est la liberté et que la guerre c'est la paix. Nous allons citer notre collègue et éminent porteparole : BHL. " L'art de la philosophie ne vaut que s'il est un art de la guerre. " E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

EP Dissenssus disponible en mai ( Rubicon records ) FACEBOOK/WARANYWAY

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MUSIQUE

TÉHESSÉ Tout d'abord petite Nous sommes présentation ? Téhessé, un jeune

l'évolution progressive de nos inspirations. Et beaucoup de dates à venir. Nous sommes en pleine réflexion sur la priorité de la musique dans nos vies, pour ma part si l'occasion se présente je sais déjà que je n'hésiterais pas à saisir cette belle opportunité.

groupe originaire de Grenoble. Camille aux percussions, Théo à la guitare et aux synthétiseurs et moi ( Selia ) au chant et à la basse.

Vous venez de sortir un premier EP, enregistré par Xavier Desprat. Comment s'est passée la collaboration ?

Nous avions participé au tremplin Artist'Up, en partenariat avec Honey Pie Records où travaille Xavier, à la suite de ce concours que l'on a remporté nous ont été offerts deux jours de studio, on en a prit finalement cinq. On a eu vraiment de la chance de travailler avec Xavier, il est ouvert, patient, très compétent et doté d'un bel humour britannique! On est toujours étroitement en contact avec lui.

Vous citez en influence à la fois des groupes comme The Cure ou encore l'excellent Breton. Si vous deviez vous définir en citant des peintures, quels peintres choisiriez-vous ?

Personnellement la peinture n'est pas l'art auquel je m'intéresse le plus. Néanmoins j'ai vu récemment l'exposition d'Eileen Gray ( designer ) au Centre Pompidou et son travail était brillant de simplicité, je pourrais faire une non-modeste comparaison avec notre travail, ou du moins ce qu'on cherche à renvoyer.

Est-ce facile de se faire une place sur la scène artistique lyonnaise ?

Lyon est une belle ville qui est relativement accessible aux jeunes groupes, il faut juste savoir démarcher je pense. Je regrette juste qu'il n'y ait que trop peu de salles de concert de jauge moyenne.

Où pouvons nous Toumrakata est trouver votre EP en écoute libre Toumrakata ? sur Soundcloud, je crois qu'on est les seuls sur internet à avoir un nom pareil, c'est donc très simple de nous trouver. L'EP est en vente sur Bandcamp également, tous les liens se trouvent sur notre page Facebook.

Les projets ? Un deuxième clip ! Un passage en studio pour la rentrée prochaine éventuellement, on aimerait sortir un petit EP de 2-3 titres afin de dévoiler

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Pour revenir sur le premier clip que vous avez tourné dernièrement, comment s'est déroulé le tournage ?

Le tournage s'est déroulé avec très peu de moyens et nous n'avions pas écrit de storyboard au préalable. Cela nous a donné une bonne idée de ce qui était à faire et ne pas faire ! Nous avions choisi ce titre car c'était certainement celui qui avait le plus la forme d'un single, et sur lequel on avait le plus de possibilités grâce aux deux parties très différentes qui composent le morceau. C'est Élodie Gaud, qui s'occupe de l'ensemble des visuels du groupe, qui a réalisé cette première vidéo.

Des idées pour ce Pour le second nouveau clip ? clip vidéo, nous avons des tas d'idées qui fusent. On aimerait que ce soit un morceau exclusif et nous aimerions le tourner lorsque les beaux jours reviendront. Nous ne pouvons être plus précis pour le moment. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

TEHESSE.COM


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MUSIQUE

LES CH EURS ET S●LISTES DE LY●N BERN▲RD TÉTU Les Chœurs et Solistes de Lyon-Bernard Tétu existent depuis plus de 30 ans, quels ont été les événements marquants de ces trois décennies ?

Je ne peux m’empêcher d’évoquer une tournée avec Pierre Boulez et l’ensemble Intercontemporain, il y a déjà quelques années. Nous avions interprété Varèse, Bartók et les Trois Poèmes de Michaux de Lutoslawski que j’ai eu le plaisir et l’honneur de codiriger avec Pierre Boulez. Il y a aussi ces trois semaines de tournée en Afrique où Philippe Cassard, un grand pianiste et ami, a dû jouer sur un piano droit qu’il a fini de réaccorder lui-même. Un soir, les chanteurs ont chanté Debussy pour les guerriers Maasaï, et eux ont dansé pour nous : un pur moment d’échange au-delà des mots. Enfin, la participation des Chœurs à des concerts qui sortent des sentiers battus m’enthousiasme toujours autant : que ce soit en septembre dernier à Calvi ou cet été au Bourget-du-Lac aux côtés de musiciens afghans. Ces concerts reflètent mon envie de ne pas mettre la musique dans des boîtes étanches : pouvoir lier la recherche à la création musicale avec des techniques d’électro-acoustique, passer de la musique classique à la musique tradi-

© Ghislain Mirat

tionnelle… c’est une liberté à laquelle je tiens beaucoup. Depuis trente ans, j’essaie de rencontrer des artistes de tous horizons, d’autres publics, en étant le plus juste possible. Selon moi, une grande partie des musiciens n’est pas consciente qu’on n’écoute pas qu’avec les oreilles. Tout concert doit être ressenti comme un spectacle. Une salle est un instrument : à nous de la faire sonner.

Vous bénéficiez d’un rayonnement international, comment cela s’est-il construit concrètement et qu’est-ce que cela apporte aujourd’hui ?

Nos concerts et spectacles se répartissent à 60% en Rhône-Alpes, le reste en France et à l’étranger. Nous avons la chance d’avoir un ensemble à

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géométrie variable, un ensemble de solistes, un chœur de chambre et un chœur d’oratorio, qui nous permet de répondre à la demande, aussi bien en terme de nombre de concerts que de formats. Cette saison, nous avons tourné West Side Story au Canada avec les Percussions Claviers de Lyon, nous avons donné le Via Crucis de Liszt en Toscane, au milieu des vignobles… Actuellement, nous travaillons à développer les échanges avec l’Asie : en septembre 2013, Bernard Tétu est invité dans le cadre du Daejeon International Choral Festival pour des masterclasses et des conférences. Nous allons profiter de ce déplacement pour prendre des contacts sur place : une première collaboration qui je l’espère, débouchera sur une tournée en 2014 ou en 2015. Ce rayonnement international rejaillit inévitablement sur sa région d’origine, d’autant plus dans notre cas où la Ville de Lyon est inhérente à notre nom. Cependant, l’étranger n’est pas qu’un débouché de plus, c’est aussi un territoire riche de rencontres et d’échanges, où nous portons le répertoire de la musique française et de la musique romantique pour lequel Bernard Tétu est plus particulièrement reconnu.


De quelle manière se déroule le recrutement des chanteurs? Quels sont les liens qui se créent entre les chanteurs, la structure et les chefs d’orchestre ?

Les chanteurs de l’ensemble sont essentiellement des intermittents du spectacle. Même s’il y a un noyau dur que l’on retrouve souvent, nous organisons régulièrement des auditions, car un même chanteur ne pourra pas nécessairement exceller en musique française, en musique contemporaine et dans un spectacle mis en scène. Cette structure d’ensemble qui réunit une équipe administrative fixe et des chanteurs intermittents permet d’adapter notre distribution au répertoire abordé tout en empêchant la lassitude et la routine de s’installer. De manière générale, j’entretiens avec les chanteurs une grande complicité, complicité qui s’est construite au fil des années. Il faut dire que j’ai suivi certains chanteurs depuis leurs débuts dans notre Chœur d’Oratorio jusqu’à leur carrière de soliste au rayonnement parfois international. Avec nombre de nos solistes, j’ai vraiment l’impression de faire de la musique de chambre, dans la mesure où je peux m’appuyer sur leurs compétences et leurs idées artistiques pour construire une interprétation musicale. Nous travaillons ainsi dans un climat de confiance et de respect mutuel. Enfin, ayant eu la chance d’avoir une double formation ( chef de chœur et chef d’orchestre ), je suis à même, lorsque nous travaillons avec un chef d’orchestre invité, de mieux devancer ses attentes et de savoir les retranscrire dans un vocabulaire de chanteur. Tous ces facteurs réunis expliquent sans doute pourquoi les Chœurs et Solistes de Lyon-Bernard Tétu sont un des chœurs français qui ont le plus collaboré avec des chefs d’orchestre différents et d’envergure internationale ( Boulez, Gardiner, Krivine, Janowski, Slatkin, etc. )

Votre répertoire est très large, comment s’effectuent les choix ? Comment y intégrer des œuvres de la culture populaire ( comme Le Seigneur des Anneaux ) ?

Une grande partie de mon travail en tant que directeur artistique a été d’élargir le répertoire de l’ensemble à des œuvres qu’on a moins l’habitude d’entendre. Un organisateur va plus facilement nous demander un Requiem de Mozart qu’un Requiem de Duruflé ou des partitions méconnues du 19e siècle français. Cela tient évidemment pour l’organisateur, à la peur de ne pas rencontrer de public mais aussi parfois à la méconnaissance de ces pages musicales. C’est pourquoi j’ai toujours œuvré à la ( re )découverte du répertoire vocal, en suscitant des créations, des premiers enregistrements mondiaux et en créant des spectacles musicaux accessibles à un public très large. La participation à la trilogie du Seigneur des Anneaux rejoint cette même volonté. Ces films sont des vecteurs parfaits pour ouvrir le plaisir du spectacle vivant à tous. Et puis j’ai moi-même fait, encore étudiant, du cabaret, de la chanson de variété… Je souhaite donc une ouverture à des genres musicaux très différents.

Cette saison est sur le point de s’achever, comment s’est-elle déroulée ? Que pouvez-vous nous dire au sujet de la prochaine saison ?

À la fin de la saison, les Chœurs et Solistes de Lyon auront donné 57 représentations. Le Requiem de Berlioz présenté lors du Festival Berlioz a ouvert la saison dans le cadre exceptionnel du Château Louis XI, il y a eu aussi cet exceptionnel Via Crucis de Liszt à l’Auditorium de Lyon : de nombreux moments forts ont jalonné cette saison. Côté spectacle, West Side Story a tourné dans toute la France et à l’étranger, avec pas moins de 25 dates en 2013.

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Nous avons également créé une petite forme lyrique pleine d’humour et de profondeur autour de Stendhal et du répertoire italien : les Péchés d’Italie. C’est aussi une saison qui a vu se renouveler les partenariats artistiques comme avec le Musée d’Art Contemporain ou encore le Musée des Beaux Arts. Cela marque, pour l’ensemble, l’envie toujours présente de provoquer les points de rencontre entre la musique et d’autres moyens d’expression. Le Labo #1 Mirage de l’Ailleurs résume bien cette volonté de jouer sur la transversalité de notre approche. Mêlant découverte d’un répertoire inédit avec la création chorégraphique et musicale, ce nouveau partenariat avec les Subsistances nous fera voyager dans l’Orient fantasmé. Enfin, cet été, les Chœurs et Solistes de Lyon-Bernard Tétu affichent une forte présence dans les festivals d’été : Festival International de Sylvanès, Voix du Prieuré, Estival de la Bâtie, Festival Berlioz… La saison prochaine s’annonce plutôt bien, avec en filigrane, le Requiem de Fauré que l’on retrouvera dans différentes versions : pour chœur, orgue et quintette de cuivres au Victoria Hall de Genève, mais aussi dans sa version " plus rare " ( de J.M. Nectoux ) pour chœur et orchestre à l’Auditorium de Lyon. Ce seront aussi de grands rendez-vous symphoniques aux côtés de l’Orchestre National de Lyon, dont Roméo et Juliette ou les Carmina Burana : des moments à ne pas manquer ! ENTRETIEN PAR L. GARNIER

Ont répondu à cet entretien : Bernard Tétu, directeur artistique. Katia Lerouge, directrice générale.

Infos & programme SOLISTESLYONTETU.COM


MUSIQUE

J▲RRING EFFECTS Vingt années d'activisme, deux décennies dédiées aux musiques dites indie et électro. Créé en 1993 sur la base d'un collectif, ce label discographique qui est devenu une référence en produisant des disques à consonances électroniques compte près de cent références et accompagne à ce jour une quinzaine d'artistes. Un temps adulé, la mesure d'après dans le caniveau, tel est habituellement le sort réservé aux artistes et labels " dans le vent " . Ce ne fut pas le cas de JFX qui pourtant connut

un engouement certain dans les années 2000 en devenant le fer de lance d'un mouvement. On pourrait aisément se demander si les Nuits Sonores existeraient sans le travail de préparation qu'a fait Jarring Effects dans le cadre de son activité discographique et de la création du festival Riddim Collision qui en est à sa 14e édition. L'occasion pour l'Incontournable Magazine d'aller à la rencontre de Guillaume Jallut, responsable de la communication au sein de la structure.

2013 sera l'année de vos 20 ans. Quel est le secret de cette longévité ?

Cela peut paraître banal, mais le premier moteur c'est bien sûr la passion ! Toute l'équipe est constituée de professionnels doublés d'amoureux de la musique. C'est cet amour qui fait que nous parvenons à mettre autant de force et d'implication dans chacun des projets que défend Jarring depuis 1993. Mais le café très fort et la nicotine doivent aussi être crédités.

Dans les années 2000 il était impossible de passer à côté de Jarring Effects. Ces dernières années votre présence s'est faite plus discrète, quelles en sont les raisons ?

Il y en a plusieurs sans doute. Même s'il a une existence propre, un label vit et est exposé majoritairement via les artistes qu'il propose, eux-mêmes exposés en grande partie par les médias. De fait, au début des

années 2000, l'explosion d'une french touch du dub, portée notamment par High Tone, Ez3kiel, Brain Damage ou Le Peuple de l'Herbe – des groupes soutenus par Jarring Effects – a permis de mettre en lumière le label. Mais la mode musicale fonctionne comme les autres : elle cesse au bout d'un moment d'exciter les relais informationnels, et si la qualité des groupes ou du travail de la maison n'a pas diminué par la suite, on peut penser qu'une fois la tendance passée, JFX est revenu à un statut " normal " de bon label indépendant.

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Comme on a tendance à penser qu'une entité culturelle qui n'est que peu visible médiatiquement n'existe plus, nous avons peut-être souffert de ce manque de visibilité auprès du grand public, même si les amateurs de musique ont continué bien sûr à suivre nos actualités. Parallèlement il faut bien le dire, la crise du disque et les déconvenues que nous avons pu connaître il y a quelques années ( comme la faillite de notre distributeur ) ont porté de sérieux coups à la santé financière toujours sur le fil du label. Avec pour effet logique de diminuer le nombre de nos productions par an. Une politique de rigueur qui nous a permis de ne pas péricliter, mais qui nous a aussi parallèlement forcé à nous faire rare dans les bacs ou les médias. Heureusement c'est terminé ! Nous avons sorti sept albums, deux maxis et une compilation en 2012, et nous sommes bien partis pour avoir la même cadence cette année !


Nous allons nous faire l'avocat du diable. Vous présentez la structure comme produisant des musiques indie et anticonformistes. En quoi l'électro, le hip-hop ou le Dub sont anticonformistes ?

Les étiquettes musicales ramassent sous un terme un spectre infini de variations de styles. Tous les genres musicaux de niche, souvent indie et à contre-courant de la culture musicale de leur époque, finissent par s'établir, intégrer d'autres acteurs que les purs et durs du milieu, et ainsi produire aussi des dérivatifs plus mainstream. Ce fut le cas du rock, de la soul, du punk, du rap, de la techno… Dans l'électro et le hip-hop actuel, il y a des choses parfaitement dans l'air du temps, et d'autres en total contre-pied : David Guetta fait de l'electro, Filastine aussi. La Fouine fait du rap, Ben Sharpa aussi. Pour nous, ce n'est donc pas telle ou telle musique qui est anticonformiste, mais les structures qui la produisent et les artistes qui la font. La quasi totalité des membres de Jarring vient des mouvements do it yourself, techno, punk ou hip-hop. Par ailleurs – et comme de nombreux autres labels – nous sommes indépendants des poids lourds du milieu que sont les majors. Même si les équipes ont changé depuis vingt ans, un certain esprit demeure au sein de la structure, qui nous amène à avoir d'autres critères que les seuls effets de mode ou les standards commerciaux comme direction artistique. Nous évitons de frayer avec les " recettes " ou les " dans le style de ". Cela ne fait pas de nous des ayatollah de l'underground ou de la musique de niche qui décrient tout ce qui marche ou qui est dans la tendance : nous essayons simplement de conserver une lucidité qui nous permet de faire la part des choses.

Quels conseils donneriez-vous à des personnes qui souhaiteraient se lancer dans la production et l'accompagnement d'artistes ?

De s'armer de patience et de lucidité justement. La conception manichéenne avec des très méchants d'un coté ( les poids lourds, souvent : majors, politiques, festivals et médias de renoms, etc. ) et des très gentils de l'autre ( artistes, indés… ) est parfaitement fausse, et pourtant trop souvent colportée. Croire à ces légendes provoque souvent de tristes désillusions. Par ailleurs, l'exception culturelle à la française fait qu'il y a énormément d'offres. Le public, les médias, les financiers, les acteurs du milieu sont déjà souvent submergés de propositions. Parvenir à exister et à être pérenne n'est pas impossible, mais sans opiniâtreté ni pragmatisme ce sera bien compliqué.

Quelles sont Notre actualité les prochaines très récente c'est sorties Jarring ? toujours l'album de Mat3r Dolorosa ➊ qui est sorti ce début d'année, et ce mois d'avril particulièrement chargé : le premier EP tant attendu d'Erotic Market ➋, la compilation gratuite JFX Bits 6 ( toujours téléchargeable ), et le EP vinyle de Ni. Cape Town Effects, notre projet franco-sud-africain, verra enfin le jour en mai avec un album : un documentaire, une expo et une tournée qui passera entre autres par les Nuits Sonores ( comme Erotic Market ou Squeaky Lobster soit dit en passant ! ). Sibot ➌ – un autre sud-africain – sortira un EP en juin, et le rappeur US Oddateee un album en août. Et si nous avons encore un peu de temps, toutes ces informations devraient se retrouver sur un tout nouveau site…

E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

JARRINGEFFECTS.NET

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MUSIQUE

▲UDIT●RIUM DE LY●N Comme chaque année à l’arrivée du mois de mai l’Auditorium se prépare à dévoiler sa nouvelle saison. Pour Jean-Marc Bador, nouveau directeur général ce sera la première. Arrivé à Lyon en janvier dernier, il a su collaborer et construire une relation fructueuse avec le chef d’orchestre Léonard Slatkin dans le but de nous concocter une saison à la fois riche, étonnante avec une certaine

forme de continuité dans le changement. Parisien d’origine, il fut exilé à Nantes pour les trois saisons du festival de musique classique — La Folle journée de Nantes — dont il était l’attaché de presse. Son expérience y fut tellement riche d’enseignements que l’une de ses premières initiatives, lors de sa prise de fonction, fut d’y emmener l’orchestre pour l’imprégner de l’ambiance qui y règne.

Ainsi, fraîchement débarqué à Lyon et habité par l’expérience unique de La Folle journée de Nantes, J-M Bador nous confie que l’un de ses désirs est de changer les perspectives de l’orchestre tout en respectant, bien évidemment, " la musique et le répertoire ". C’est ici que l’on pourrait parler de continuité dans le changement et c’est là que réside la difficulté, car finalement qu’y a-t-il de plus difficile que de faire évoluer et de proposer du neuf avec un art chargé d’une culture séculaire et codifié par des règles centenaires. Il nous révèle alors son souhait de faire évoluer les mentalités et de " changer de perspective pour éviter de mettre l’Auditorium et la musique classique dans une case : l’élitisme ". De nouvelles espérances sont alors au cœur de son discours avec l’envie d’ouvrir les portes à de nouveaux visages et éviter que ce lieu soit seulement réservé à des mélomanes accomplis : " Un lieu que je souhaite ancrer dans un nouveau rapport au public, que l’Auditorium ne soit pas réservé aux seuls mélomanes ". La proximité avec le public est alors le maître mot et plusieurs projets sont en cours, il nous révèle même une nouvelle approche des concerts : " On va proposer au public de

venir avec son instrument et de jouer avec l’orchestre, de chanter aussi ". Par ailleurs, et comme chaque saison, l’Auditorium offre un concert symphonique à tous les étudiants quel que soit leur âge ou leur lieu d’études. J-M Bador parle de l’Auditorium comme d’une maison de création historique toujours en train de recréer la musique grâce aux apports de chacun. Mais l’Auditorium, cette année, c’est aussi d’importantes rénovations qui ont poussé l’orchestre à se déplacer à la Bourse du Travail située place Guichard jusqu’au 15 octobre 2013. Le lieu va être totalement réaménagé pour faciliter l’accès des personnes à mobilité réduite aux balcons de la salle. Les centrales d’aires vont aussi être rénovées, ce qui a une importance majeure dans un espace où l’air porte la musique. Enfin, l’impressionnant orgue de l’Auditorium vieux de plus de 130 ans et comportant 7 000 tuyaux va être totalement rénové. Ce qui représente un travail de titan sur cet instrument à vent historique anciennement installé au Trocadéro. PA R L . G A R N I E R E T P. D E S C H E M I N

AUDITORIUM-LYON.COM

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FESTIVAL

J▲ZZ ▲ VIENNE Du 28 juin au 13 juillet 2013 aura lieu la 33e édition de Jazz à Vienne, le festival consacré à tous les artistes qui écrivent l'histoire du jazz et qui contribuent à sa notoriété. Le Théâtre Antique, lieu mythique de l'événement, sera l'épicentre de cette nouvelle édition. Édifié au 1er siècle, ce théâtre pouvait accueillir jusqu'à 13 000 personnes. Aujourd'hui, ce sont 7 500 amoureux de jazz qui peuvent venir découvrir ou

redécouvrir leurs artistes préférés. Depuis les années 1980, le festival permet au Théâtre Antique de retrouver son effervescence d'antan durant 15 jours. Mais Jazz à Vienne ce n'est pas seulement le Théâtre Antique, ce sont également des circuits alternatifs au cœur de la ville où l'on peut découvrir et profiter différemment du jazz, de ses univers et des musiciens qui lui donnent vie.

Avec plus de cent concerts et de nombreux projets à destination de la population, le premier événement culturel rhônalpin s'articule cette année autour de quatre scènes dont trois facilement accessibles et gratuites.

LA SCÈNE DE CYBÈLE Où l'on retrouvera les musiciens de l'Académie, les orchestres et les conservatoires régionaux. Les jardins de Cybèle constituent le cœur du festival où se produisent les groupes du tremplin national Rezzo Focal Jazz à Vienne, les big bands internationaux et les étudiants de l'Académie du festival.

© Xavier Rauffet

Petit coup de projecteur sur les trois scènes du circuit alternatif :

LE CLUB DE MINUIT Ouvert le soir, on pourra y découvrir une programmation intimiste dans le cadre convivial du théâtre à l'italienne de Vienne. Le club de Minuit présente l'actualité de tous les jazz en associant débutants et talents confirmés dans une ambiance des plus swingantes.

LE JAZZ MIX On retrouve ici les nouvelles tendances du jazz et des musiques actuelles mises en lumière par les éclairages du Magic Mirror. Cette scène est un endroit incontournable pour les noctambules amateurs de nouveautés. PAR L. GARNIER

JAZZAVIENNE.COM

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FESTIVAL

DÉM●N D'●R

Huit années d’acti- Petit bilan, pas visme démoniaque, évident parce qu’il petit bilan ? y aurait tellement de choses à dire et qu’on a la tête à fond dans l’organisation de la 9e édition. Le festival a pris de l’ampleur et a beaucoup gagné en qualité sans perdre son âme et son grain de folie. On est passé de 1 500 festivaliers à plus de 8 000, d’une poignée d’artistes locaux à une trentaine d’artistes dont certains sont mondialement connus. C’est génial de pouvoir programmer des artistes qui nous faisaient rêver étant gamins. On a fait ça en douceur, l’idée et l’envie du collectif c’est de ne pas dénaturer l’ambiance de base en voulant faire toujours plus gros. La jauge n’a pas changé depuis le début. On pense évidemment à des évolutions pour la

suite mais plus dans le nombre de jours du festival. On a déjà commencé cette année puisque pour la première fois, on rouvre le festival le dimanche.

Démon d’Or se présente comme un collectif, qu'est-ce que cela veut-il dire ?

Le Collectif Démon d’Or est né en 2005. Nous étions trois associations de jeunes des villages de Poleymieux, Curis et St-Germain au Mont-d’Or et on organisait chacun des petites soirées reggae et électro dans les salles des fêtes de nos communes respectives. Un jour pendant l’une d’elles, on s’est dit que ça serait chouette de tous se regrouper pour créer un grand événement sur deux jours en plein air… Le 1er festival Démon d’Or est né

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comme ça, et le collectif aussi. Le terme " collectif " marquait notre envie d’unir nos motivations et compétences pour faire bouger une région qui dormait un peu trop à notre goût. Il faut savoir qu’à la base on était une quarantaine et on venait quasiment tous du même collège et ensuite du même lycée. C’est une histoire de potes avant tout.

Quoi de prévu dans Une belle programl’édition 2013 ? mation éclectique et ouverte sur les découvertes. Il y a toujours trois scènes, donc ça nous permet vraiment de faire un large balayage de tous les styles qu’on aime : reggae, électro, musiques du monde, hip-hop… Cette année pour la 1ère fois le festival s’ouvre aussi un peu plus au rock-electro avec


la venue de la magnifique Ebony Bones le samedi soir. On est aussi très fier d’accueillir Lee Scratch Perry et son fils Omar Perry, pour ce qui semble être la dernière tournée de l’" Upsetter ", une des dernières légendes vivantes du reggae jamaïcain. On a aussi beaucoup de monde qui vient pour vibrer sur des bonnes grosses basses, et on pense qu’avec Brain Damage, Bar9, Schockone ou Benny Page… les amateurs ne seront pas déçus. Pour la première fois on s’ouvre aussi à l’électro plus large avec la venue de Popof qui devrait embraser le grand chapiteau du samedi soir. Après on aime aussi présenter d’autres choses, et on aime donner à notre programmation des notes plus colorées : Nadara Gypsy Band, Dj Click et Imperial Kikiristan pour le côté musique de l’Est ou Hawa, They Call me Rico et Charlie and The Soap Opera pour le soul, blues, funk à l’américaine. Je ne pourrais pas tous les citer car il y en a beaucoup et tous méritent d’être découverts. Je citerais quand même Chill Bump en hip-hop, parce que c’est mon petit coup de cœur du moment. La grosse nouveauté de cette 9e édition est le dimanche aprèsmidi. L’année dernière on s’est pris dix tonnes de flotte, on était trempé jusqu’aux os pour le démontage. Là on prend notre revanche, on rouvre le site du festival et on propose un grand sound system avec Dubinvaders.

Votre festival a lieu tôt dans la saison, quelle influence cela a-t-il dans la programmation et la fréquentation ?

Dans nos choix de programmation pas grand-chose puisque du coup nous ne sommes pas au courant des programmations des autres festivals. Notre marque de fabrique est la diversité plutôt que l'enchaînement de têtes d’affiche. Avec plus d’une trentaine d’artistes il est impossible que nous ayons la même programmation qu’un autre

festival et ça nous convient bien. On ne crache évidemment pas sur les artistes connus, déjà s’ils le sont c’est qu’ils ont beaucoup de talent, et puis ça nous permet d’accrocher la curiosité, de donner envie aux festivaliers de venir et ensuite de pouvoir leur faire découvrir de nouvelles choses. Pour la fréquentation c’est aussi un plus je crois. C’est le début des beaux jours, les gens ont envie de retrouver l’ambiance des festivals de l’été après un hiver un peu déprimant. Avant nous il y a le 6e Continent, les 24h de l’Insa et Les Invites de Villeurbanne, qui sont de très bons festivals, mais ce sont des festivals de ville, donc sans camping. Nous proposons vraiment aux gens de passer trois jours dans la nature, déconnectés. À la fin de l’été, quand tu as enchaîné plusieurs festivals tu as un petit ras le bol et plus trop de budget. Enfin ça n’empêche pas au Woodstower d’être fin août et d’être un super festival… Le seul hic de cette fin de mois de juin c’est le risque pour le temps. On prévoit chaque année des chapiteaux pour chacune des scènes donc même en cas de pluie on peut maintenir le festival. Fin juin c’est le bac aussi, donc certains lycéens sont déçus de ne pas pouvoir venir… ou certains viennent quand même et ratent leur bac, puis leur vie. C’est un choix.

Pouvez-vous Avec grand plaisir nous parler du puisque c’est un festival off ? côté du festival dont on est assez fiers. C’est sûr que la première chose que l’on voit sur l’affiche ou le flyer d’un festival ce sont les têtes d’affiche et la programmation des scènes en général, mais le Démon d’Or c’est aussi et de plus en plus, tout ce qu’il y a autour. On propose le samedi aprèsmidi un beau village festif. Festif, et non pas associatif, car l’idée c’est de ne pas simplement proposer un

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enchaînement de stands d’association que l’on ne connaît pas vraiment. On a donc une véritable programmation d’après-midi, avec aussi du cirque, du théâtre… Des associations sont présentes mais plutôt que de tenir simplement un stand, elles participent à l’animation. C’est un véritable petit festival d’après-midi, et c’est gratuit ! On a rajouté l’année dernière un espace " Boom bus " le vendredi et le samedi après-midi. Plein de DJs de la scène locale viennent s’y produire (hip-hop, reggae, électro, techno… ). Pendant les deux soirs, la programmation ne se cantonne pas non plus aux trois scènes. On a créé, il y a quelques années, avec les copains du collectif Cirkadelik, un espace vraiment à part : Le Psychadelik Garden. C’est devenu avec le temps quasiment une 4e scène, des DJs et artistes s’y produisent de 20h à 03h du matin. Je pense qu’il y a encore des gens qui n’ont pas trouvé où c’était, c’est un endroit assez mystérieux, et quand tu y poses les pieds tu te prends vraiment une claque. Une " cabine dj " trône sur une énorme structure en bois au milieu d’une clairière entourée de huttes colorées et d’une déco fluo… Psychadélik Garden, quoi ! Il y a des festivaliers qui sont tombés amoureux de cet endroit et qui y restent pendant toute la soirée… L’idée c’est vraiment que les gens en prennent plein les yeux, et aient l’impression d’être en dehors de la réalité le temps d’un weekend. Au Démon d’Or, tu peux croiser des éléphants géants, ou tranquillement boire un coup installé sur des bottes de pailles au milieu de cages à oiseaux. E N T R E T I E N PA R P. D E S C H E M I N

Festival Démon d'Or 28, 29, 30 juin 2013 Poleymieux-au-Mont-d'Or ( 69 ). Programme & infos sur DEMONDOR.COM


L E B O N P L A N C U LT U R E

6 MUSÉES D▲NS 1 C▲RTE Chers lecteurs, vous avez pu lire dans les deux derniers numéros les histoires incroyables de trois phénomènes : la carte Tip Top, les nouvelles formules d'abonnement réunissant le Marché Gare, le Clacson et l'Épicerie Moderne ainsi que le Pass Découverte des sept salles du réseau Scènes découvertes. Aujourd'hui venez à la rencontre d'œuvres et de collections avec la carte musées de la ville de Lyon qui vous ouvrira les portes d'un

monde plein de couleurs et d'évasion. Les musées sont différents et chacun possède sa particularité. Ils sont des lieux indispensables à notre société qui en permettent le développement. Une citation de Cyprien Gaillard, artiste contemporain, résume parfaitement notre position : " Penser le musée, fût-il d'art contemporain, comme un musée d'histoire naturelle, un lieu où l'on montre des fragments du monde extérieur ".

L'ENFANCE DU MONSTRE

MODUS OPERANDI

Deux hommes passionnés d'art mais aussi un peu fous ne rêvaient que de découvertes. Ils souhaitaient plus que tout pouvoir aller où ils désiraient sans dépenser un sou. Ils se lancèrent alors dans une expérience scientifique délicate dont nous ne connaissons pas les détails. Ceci a donné naissance à ce qui se nomme aujourd‘hui la Carte Musées de la ville de Lyon. Sévissant depuis un an, cette bête propose l'entrée à six musées municipaux en accès illimité pour 20 Euros par an. Elle permet alors de visiter pendant un an l'ensemble des collections permanentes et des expositions temporaires, aux jours et horaires d'ouverture.

Deux tarifications sont appliqués : le plein tarif ( 20 Euros ) et le tarif réduit ( 18 Euros pour les groupes constitués de dix personnes minimum ). La carte est cependant gratuite pour les chômeurs, les personnes touchant le RSA, les personnes non imposables, les personnes handicapées, leur accompagnateur et les jeunes de moins de 18 ans. Malheureusement, elle s'attaque aussi aux non lyonnais sans justificatif particulier. Munissez-vous simplement d'une photo et elle sera à vous. Pour l'acquérir, il suffit de se présenter à la billetterie d'un des musées dépendant de la ville de Lyon muni d'une photo d'identité. Elle est présente partout et tout le temps…

LES LIEUX COMPLICES

LES SYMPTÔMES

Musée des Beaux-Arts de Lyon Musée d'Art Contemporain Musée Gadagne Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation Musée de l'imprimerie Musée de l'automobile Henri Malartre

La Carte Musées de la Ville de Lyon donne accès aux collections, aux nouveaux accrochages, aux expositions, aux nocturnes et à leurs animations.

PA R L . G A R N I E R E T P. D E S C H E M I N

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OFFRANDES

C▲D● ! L'Incontournable Magazine et ses partenaires sont heureux de vous offrir des cadeaux culturels ! Pour en profiter, il suffit de répondre aux questions avant le 26 mai 2013. La priorité sera donnée aux abonnés, alors n'attendez pas, abonnez-vous ! Envoyez vos réponses par email à contact@lincontournablelyon.fr, avec comme objet " concours ".

10

( soit 5 x 2 places ) pour le spectacle de votre choix durant le festival Danse Tout Terrain du 28 mai au 1er juin 2013. Programme et infos en page 15. De qui la salsepareille est le mets favori ?

6

entrées pour le Musée Miniature et Cinéma installé en plein cœur du Vieux-Lyon dans la Maison des Avocats. D'où provient le Gros Caillou, l'un des symboles du quartier de la Croix-Rousse ?

5

exemplaires de Toumrakata, 1er EP du groupe Téhessé. Ambiances blues, mélodies pop et expérimentations électroniques assurées ! Que doit la Ville de Lyon à Lucius Munatius Plancus ?

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PROSPECTIVE

H●R●SC●PE 100% GARANTI

BÉLIER En avril 1878 décède Pierre Gay

SCORPION Saviez-vous que Martin

( créateur du passage Gay à Fourvière ). Cher bélier nous ne vous annonçons, rassurez-vous, rien de dramatique mais nous vous conseillons de prendre du temps pour vous, de vous reposer.

Luther, père du protestantisme, naquit un 10 novembre 1483 ? Suivez cet exemple et imposez ce en quoi vous croyez. Si vous en êtes convaincu vos idées seront comprises et acceptées.

TAUREAU Le roi Philippe le Bel prit

SAGITTAIRE Le 17 décembre 1600

les citoyens de Lyon sous sa garde le 4 mai 1292. Comme ce roi apportant son soutien à la ville, un ami proche va vous prendre sous son aile et vous aider à accomplir vos projets.

s'est déroulée la célébration du mariage ( en la cathédrale Saint-Jean ) d'Henri IV et Marie de Médicis. Un événement majeur s'annonce et va changer votre vie, alors gardez les yeux grands ouverts.

GÉMEAUX Le 26 mai 1897 a eu

CAPRICORNE À l'image de l'ouverture

lieu, à Lyon le premier match international de tir au fusil. Cher gémeaux vous êtes sur les nerfs et ça se voit. Allez donc à un stage de tir, cela vous détendra peut-être…

CANCER Un dicton de Provence disait " Pluie de juin n'est que fumée ". N'écoutez pas les soi-disant bons conseils des autres, suivez votre instinct. Ignorez leurs reproches et allez de l'avant.

LION Une montgolfière La Géante des airs partit de l'hippodrome de Perrache un 15 août 1871. Hélas elle tomba presque instantanément dans le Rhône. Vous allez connaître une promotion, mais attention, ne lâchez pas prise ou vous risquez de vous retrouver noyé sous une masse de travail.

du Bureau d'hygiène, au 21 rue du Bât d'argent en janvier 1891, vous décidez de prendre soin de vous et de vous ressourcer à la mer.

VIERGE Ami vierge, savez-vous qu'en septembre 1886 la décoration de l'escalier du Palais des Arts a été complétée ? Il est temps pour vous de réorganiser votre intérieur ou tout simplement de le ranger.

BALANCE La course automobile Paris-Marseille passa par Lyon le 26 septembre 1896. Nous vous suggérons, chère balance, de peser le pour et le contre avant de vous lancer à toute vitesse dans une aventure.

VERSEAU Ami verseau, vous entrez dans un décan propice à la réussite et à la satisfaction. Tout comme les frères Lumière ayant déposé leur brevet d'invention du cinématographe un 13 février 1895, allez de l'avant.

POISSON Le 8 mars 1468 le roi Louis XI écrivit une lettre au sénéchal de Lyon lui ordonnant de saisir le château de PierreScize, qui restera désormais au Roi. Ne cédez rien à personne où vous pourriez bien vite vous retrouver démuni. PAR L. GARNIER

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D'après Stephan Wul De Olivier Vatine ankama-editions.com

D'après Stephan Wul De Jean-David Morvan et Mike Hawthorne ankama-editions.com

accomplissement grâce à un song-writing qui retient l'attention, une personnalité artistique affirmée et une maturité d'écriture imposant le respect. "

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SMALL SOLDIERS — ACTION / COMÉDIE De Joe Dante

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LE CAUCHEMAR LES ORIGINES DE DARWIN DU SIDA — — DOCUMENTAIRE

DOCUMENTAIRE

De Hubert Sauper

De Peter Chappell et Catherine Peix

LA STRATÉGIE DU CHOC — DOCUMENTAIRE

De Michael Winterbottom et Mat Whitecross

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