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Miët
Avec la basse comme source inépuisable d’expérimentations sonores et les mots de Walt Whitman comme source d’inspiration poétique, le rock hypnotique et ardent de Miët invite à un voyage passionnant dans les méandres de l’identité.
Autodidacte, Suzy Le Void, alias Miët, a su dès l’adolescence que la musique jouerait un rôle majeur dans sa vie, mais c’est seulement lorsqu’elle eut une basse entre les mains qu’elle osa se lancer. Parallèlement à de multiples collaborations (avec Olivier Mellano pour MellaNoisEscape et avec Leah Gracie pour Planète Felix), elle réalise seule ses albums : « Ma manière de créer de la musique pour Miët est très intime et, jusque là, je l’ai pensée comme un ensemble : les sons, les mélodies, les textes, les rythmes, le mix, etc. Je serais donc frustrée si je ne faisais pas tout moi-même. »
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Le montage qui orne la pochette, superposition de photographies d’un buste en argile, telle une tête possédant tant de visages qu’elle en devient non identifiable, est « la parfaite représentation visuelle de [son] propos », estime Miët. « Face à la
je est un autre
JESSICA BOUCHER-RÉTIF REBECCA VAUGHAN COSQUÉRIC
complexité et à l’étendue de nos émotions, comment définir une personne en quelques mots ? Il existe tant de niveaux de lecture entre ce qu’on dit, ce qu’on laisse paraître, ce qu’on imagine... que l’on ne peut avoir qu’une interprétation floue de l’autre et parfois de soi. » Les questions de l’identité et du rapport à l’autre lient tous les morceaux de l’album : « J’y aborde différents points de vue par le biais d’un personnage. C’est la multiplicité des interprétations, des ressentis et des expériences qui m’intéresse. » Le titre Ausländer (“étranger” en allemand) renvoie à « notre rapport à autrui, mais aussi à notre condition d’étranger pour l’autre », explique la musicienne. « Je voulais parler de ce va-et-vient constant entre notre identité et celle de l’autre et m’interroger sur les multiples facettes d’une même entité qui, selon son environnement et ses émotions, peut elle-même se transformer. »
La musique de Miët, partagée entre rage et douceur, revêt, elle aussi, diverses facettes : « Elle est portée par une énergie cathartique, un mouvement, qui sont aussi importants que les moments d’introspection, souvent traduits par des titres plus dépouillés. » Ausländer rompt avec le minimalisme instrumental de son prédécesseur et la bassiste a fait évoluer l’utilisation de son instrument favori : « J’avais envie d’une batterie acoustique, de synthés, de nouvelles pédales d’effets et d’expérimentations à la voix. Au début, je faisais tout à la basse. Mes compositions étaient donc pour la plupart des enchaînements de riffs ou des lignes de basse avec de la voix, accompagnés par des rythmes également frappés sur cet instrument. Les synthés m’ont permis de composer à partir d’accords. J’ai aussi prêté plus d’attention à la rythmique. Sur le premier album, les percussions et machines accompagnaient la musique ; sur Ausländer, des titres ont été composés à partir des parties de batterie. » L’apport de sons électroniques a été inspiré à Miët par son travail avec Lucie Antunes pour Sergeï Ensemble : « Elle marie avec brio les instruments acoustiques et électroniques. J’écoute peu de musique électro mais j’adore quand ces sons se mêlent à d’autres musiques. »
Par ses répétitions de motifs et ses boucles, la musique de Miët semble propice à la transe : « C’est le lâcher prise qui m’intéresse. Créer un espace où perdre le contrôle est possible. Il est très compliqué d’y accéder dans la vie quotidienne, dans cette société très codifiée. La musique est un moyen d’y parvenir, sur scène ou en tant qu’auditrice. » Cet effet hypnotique rejoint celui créé par la poésie de l’Américain Walt Whitman : « Je me sens très proche de son écriture, surtout sur le plan de la forme. Dans l’interprétation des textes en revanche, certains poèmes me touchent plus que d’autres. Il est un parfait exemple de cet autre que je ne connais pas, qui a vécu à une tout autre époque que la mienne, dans un autre pays, et avec qui pourtant j’ai instantanément senti un lien, une identité commune, comme si sa poésie captait quelque chose de moi. » i
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