SCREENPAPER N°1
LUNDI 29 DÉCEMBRE 2014
€ 2.00
EDITO
SOMMAIRE 1 SCREENPAPER
Si vous lisez ces lignes, c’est que à priori, vous n’habitez ni dans un igloo, ni dans une communauté amish. Il y a donc de fortes chances (on estime la probabilité à environ 100%) que vous ayez déjà entendu parler du 7ème art, le cinéma. Si le vampire apparaît au cinéma dès le début du XXème siècle (dans le film de Louis Feuillade, par exemple), ce n'est que le mot « vampire » qui est utilisé mais il ne s'agit pas encore de la créature fantastique. Le premier film exploitant Dracula à travers le célèbre roman de Bram Stoker est Nosferatu de Murnau, en 1922. Ce film est, encore de nos jours, considéré comme un chef d'œuvre de l'expressionnisme allemand. Mais le mythe du vampire est surtout popularisé dans les années 30 après qu'Universal ait acquis les droits d'exploitation au cinéma du roman Dracula. C'est ainsi qu'est tourné le premier film de Dracula parlant : Dracula, en 1931, avec Bela Lugosi qui interprétera le rôle à 3 autres reprises. Le vampire difforme devient à cette époque un être à l'apparence humaine mais toujours inquiétante. Les films se succèdent tel que La Marque du vampire ou encore la version féminine du suceur de sang : La fille de Dracula. Une nouvelle étape est marquée dans les années 50 avec des films anglais osant plus de violence, plus d'érotisme. C'est durant cette période que Christopher Lee interprétera plus d'une dizaine de fois le rôle du comte Dracula (Le Cauchemard de Dracula ou sa suite Dracula, Prince des ténèbres, par exemples) tandis que Peter Crushing le suivra souvent, interprétant Docteur Van Helsing. Les années 80 voient arriver des films qui parviennent à se détacher complétement de l'image du comte Dracula avec des films de vampires modernes comme Génération perdue ou Aux frontières de l'aube ou encore le film d'horreur Vampire, vous avez dit vampire ? Néanmoins, c'est vers le Dracula classique et fidèle au roman de B. Stoker que F. F. Coppola se tourne, au début des années 90, pour tourner son Dracula.
Édito
Le réalisateur de la semaine
2-3 PANORAMIQUE
Les vampires au cinéma
On stage
Le petit +
4-5 CHAMPS/CONTRE CHAMPS
Nosferatu de F.W. Murnau
Focus
Dracula Untold de G. Shore
Close Up
6-7 BACK LIGHT
Spoiler dans la bonne humeur : Dracula pas dit, Dracula pas prit
À propos de l'auteur
Critiques 8 NEWSFEED
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Exodus interdit en Egypte et au Maroc
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Sorties de la semaine
Key-light The Legend of the 7 Golden Vampires de Roy Ward Baker, 1974
LES VAMPIRES AU CINÉMA Le vampire est une créature légendaire. Suivant différents folklores et selon la superstition la plus courante, ce mort-vivant se nourrit du sang des vivants afin d’en tirer sa force vitale. La légende du vampire puise ses origines dans des traditions mythologiques anciennes et diverses, elle se retrouve dans toutes sortes de cultures à travers le monde. Le personnage du vampire est popularisé en Europe au début du XVIIIe siècle. Vers 1725, le mot « vampire » apparaît dans les légendes d’Arnold Paole et de Peter Plogojowitz, deux soldats autrichiens qui, lors d’une guerre entre l’Empire d’Autriche et l’Empire ottoman, seraient revenus après leur
mort sous forme de vampires, pour hanter les villages de Medvegia et Kisiljevo. Selon ces légendes, les vampires sont dépeints comme des revenants en linceul qui, visitant leurs aimées ou leurs proches, causent mort et désolation. Michael Ranft écrit un ouvrage, le De masticatione mortuorum in tumulis (1728) dans lequel il examine la croyance dans les vampires. Le revenant y est complètement, et pour la première fois, assimilé à un vampire, puisque Ranft utilise le terme slave de vampyri. Par la suite, le bénédictin lorrain Augustin Calmet décrit, dans son Traité sur les apparitions (1751), le vampire comme un « revenant en corps », le distinguant ainsi des revenants immatériels tels que les stryges, fantômes et esprits.
Diverses explications sont avancées au fil du temps pour expliquer l’universalité du mythe du vampire, entre autres les phénomènes de décomposition des cadavres, les enfouissements vivants, des maladies telles que la tuberculose, la rage et la porphyrie, ou encore le vampirisme clinique affectant les tueurs en série qui consomment du sang humain. Des explications scientifiques, psychanalytiques ou encore sociologiques tentent de cerner la raison qui fait que le mythe du vampire perdure à travers les siècles et les civilisations. Le personnage charismatique et sophistiqué du vampire des fictions modernes apparaît avec la publication en 1819 du livre The Vampyre de John Polidori, dont le héros mort-vivant est inspiré par
Lord Byron, Polidori étant son médecin personnel. Le livre remporte un grand succès mais c’est surtout l’ouvrage de Bram Stoker paru en 1897, Dracula, qui reste la quintessence du genre, établissant une image du vampire toujours populaire de nos jours dans les ouvrages de fiction, même s’il est assez éloigné de ses ancêtres folkloriques avec lesquels il ne conserve que peu de points communs. Avec le cinéma, le vampire moderne est devenu une figure incontournable, aussi bien dans le domaine de la littérature que de celui des jeux vidéo, des jeux de rôle, de l’animation ou encore de la bande dessinée. La croyance en ces créatures perdure et se poursuit dans les sous-cultures.
LE RÉALISATEUR DE LA SEMAINE - FRANCIS FORD COPPOLA Francis Ford Coppola est un réalisateur, producteur et scénariste américain né le 7 avril 1939 à Détroit dans le Michigan (États-Unis). Il a été récompensé cinq fois aux Oscars et a remporté deux fois la Palme d'or au Festival de Cannes. Il est titulaire d'un diplôme de l'Université Hofstra où il a étudié le théâtre et a obtenu un MFA en réalisation cinématographique à l'UCLA Film School. Grande figure du Nouvel Hollywood, il est surtout connu pour la trilogie du Parrain et Apocalypse Now, qui dépeint la guerre du Viêt Nam avec un lyrisme abouti. Si les thèmes explorés sont vastes, on retrouve, chez Coppola, certains motifs répétés d'un film à l'autre : l'homme confronté à la perversion du pouvoir politique ou mafieux, la violence,
l'expiation, la rédemption, la catharsis, la désagrégation de la cellule familiale, la jeunesse désœuvrée, la mort et la folie. On remarque également une certaine obsession pour le temps, montré sous de multiples travestissements : retrouvailles avec une adolescence révolue afin d'évincer les erreurs futures (Peggy Sue s'est mariée), éternité douloureuse d'une âme en quête de l'amour perdu (Dracula), thème littéraire de la jeunesse éternelle (L'Homme sans âge) ou encore transcription scénarisée de la propre vie du metteur en scène, passée et présente (Tetro). Coppola est de plus très influencé par l'opéra dont s'inspirent largement ses scénarios et ses mises en scène. La scène finale du Parrain 3, qui se déroule à l'opéra de Palerme, en est un exemple notable.
Personnage fantasque, mégalomane et démesuré, on le surnomme parfois à juste titre « le Napoléon du cinéma ». D'ailleurs, Coppola revendique ce rapprochement : il n'a jamais caché sa fascination pour le Napoléon d'Abel Gance. Doté d'un orgueil monstrueux que n'ont pas atténué les échecs, Coppola ne laisse jamais indifférent, il se montre volubile, arrogant, extraverti, doté d'une remarquable capacité à enfoncer les portes qu'on ferme devant lui. Il est typique des « auteurs-tyrans » qui considèrent les autres comme des pions pour mener à bien leur propre ambition démiurgique. Apocalypse Now est certainement le film qui a transcendé cette nature pour devenir un chef-d'œuvre cinématographique sur la folie, la guerre, la nature sauvage et l'impérialisme.
Francis Ford Coppola by Eddy Briere, 2009