Retour d'expérience Asie

Page 1

jaipur varanasi

bundi aurgarhmanali

khajuraho

shimla

rishikesh haridwar

new delhi agra

varanasi

khajuraho hampi

coorg

Rapport de cÊsure Louis FOURNIÉ

bangalore mysore

kochi alleppey

chennai

mamallapuram tiruvannamalai pondicherry




INTRODUCTION Voici plus de cinq mois maintenant que nous sommes rentrés et il ne passe pas un seul jour sans repenser au voyage de cette dernière année au coeur du continent asiatique. Ce récit est personnel mais cette histoire s’écrit à trois; partis courant octobre pour l’Inde, nous avons traverser du nord au sud ce pays mystique et bouillonnant durant quatre mois en passant par l’île du Sri Lanka avant de découvrir le sulfureux Bangkok thaïlandais, passerelle asiatique pour se rendre au Vietnam, pays qui vit entre tradition et transition vers le monde moderne où nous passerons un mois avant de finir ce voyage dans la ville-pays de Hong Kong au milieu des plus grands buildings du monde; découvrant des modes de vies et des espaces de vie totalement étrangers à nous autre européens. Il y a tant à raconter quand on revient d’un monde où tout est différent et chaque coin de rue, chaque paysage éveillent le questionnement, la stupeur ou la splendeur; j’ai choisi au cours de ce rapport de voyage de ne revenir que sur notre passage de quatre mois en Inde qui m’a profondément marqué et a remis en cause bien des choses quant à la suite de mes études et de ma vie professionnelle future. Équipés de nos sacs à dos et rien de plus, nous étions lâchés dans un pays totalement étranger, à mille lieux de notre France et même de notre Europe que je n’avais jamais quitté auparavant; et c’est tous les


trois-quatre jours que nous changions de ville, de région; vivant au jour le jour, empreintant train, bus, scooters, taxis ou tuk-tuks en tout genre et ne sachant où dormir qu’un ou deux jours à l’avance . Le sous continent indien s’étend sur six fois la surface du territoire français et même avec ce rythme soutenu seulement ralenti par deux formations dans la construction locale; nous n’avons parcouru qu’un tiers des terres indiennes. Cependant, cela a suffit à marquer mon esprit pour toujours après avoir découvert près de trente villes et sept régions passant par la débordante capitale Delhi; les paysages froids, grandioses, natures et les peuples isolés de l’Himalaya; le désert et les palais d’une beauté infinie du Rajasthan; le mysticisme et la folie de l’Hindouisme sur les bords du Gange; l’explosion démographique des grandes villes du pays; la jungle et les plages paradisiaques du Kerala; les débordements et les fêtes de Goa et pour finir la ville indienne à la française de Pondicherry.



I_RÉCIT DE VOYAGE



NEW DELHI Pris dans un tourbillon bruyant et chaotique, nous avançons dans le trafic de la capitale à bord d’un taxi où l’on aperçoit la route défiler sous nos pieds a cause de la carlingue abîmée et trouée par endroit; nous avons atterri en Inde. Au milieu des voitures, tuktuks, vélos, motos, chiens errants, piétons et quelques vaches tous rassemblés sur les mêmes grandes routes; chacun se fraille un chemin en jouant des coudes, celui qui ira le plus vite, sera le plus gros ou klaxonnera le plus fort; où quatre véhicules roulent sur deux voies et où chacun double dans l’espace le plus infime qu’il aura trouvé. Si toutefois on reste à l’arrêt quelques secondes ce sont des enfants des rues qui viennent mendier et supplier à la portière dans l’indifférence la plus totale. Sans avoir encore posé le pied sur cette terre indienne, les mots n’arrivent plus, comment expliquer ce que je viens de voir? Comment l’accepter venant d’un monde où je l’ignorais totalement?

[ new delhi ]

Nous voilà lâchés sans le temps de comprendre au milieu du quartier le plus pauvre de Delhi où l’on doit retrouver notre auberge à tâtons. La misère est frappante, on s’engage au milieu de ruines où vivent des milliers de personnes qui nous voient arriver d’un regard interrogateur et parfois intéressé qu’on ne peut ignorer. Autant de monde dans un même endroit si insalubre soit t-il, des vaches au milieu des rues, des dizaines de mendiants à peine vêtus par terre, d’autres dormant sur leur charrette, et en même temps des couleurs, des drapés, des senteurs et une vie débordante que l’on ne trouve pas le temps d’apprécier ayant perdu tous nos repères. Une heure à peine que nous sommes en Inde et chacun reste bouche bée à la recherche de quelque chose de rassurant auquel se raccrocher, jamais on aurait pu être prêts à tel choc.



HARIDWAR C’est en arrêtant notre route dans un village à quelques heures de Delhi que l’on va se plonger dans la spiritualité débordante et puissante de ce pays. Arrivés de nuit sur une route de campagne désordonnés, poussiéreuse et difficile de repères, on voit sous nos yeux se lever le soleil le long d’immenses marches menant au fleuve sacré du Ganges. Quel spectacle que ces quais de part et d’autre du fleuve où se pressent des centaines de pélerins et croyants pour se baigner et se purifier avant de commencer la journée. L’air frais et les reflets de lumière sur l’eau donnent à cette place sacrée toute sa beauté; les hommes se déshabillent et plongent tout comme les enfants alors que les femmes toutes habillées se recouvrent d’eau à la main dans la pudeur la plus totale qu’exige cette société. On rencontre un monde de passion et d’adoration pour dorénavant ne plus en sortir.

[ rishikesh haridwar ]

La relation au Ganges est physique pour ces gens qui s’y baignent, qui l’adore, le prie et lui donne des milliers d’offrandes. Une cérémonie de bûcher est organisée matin et soir au ghât principal pour honorer ce divin fleuve et chanter à sa gloire en lui offrant fleurs, bougies et vêtements. Arborant le bindi, toisième oeil ouvert sur le monde spirituel; l’atmosphère est envoûtante, coupe le souffle et laisse admirateur devant une telle ferveur qui nous plonge dans une émotion incompréhensible. Cette même relation fusionelle avec le cours d’eau est malheureusement en train de le tuer. Tout l’amour qui y est spirituellment déversé se transforme en désastre écologique dans le monde matériel. Asséché par endroits, le fleuve regorge et déborde d’offrandes nocives, plastiques qui l’empoisonne alors que certains croyants boivent ses eaux.


C’est seulement à quelque mètres de ces marches sacrées qu’on observe avec effrois le dépôt dans l’eau où quelques enfants miséreux cherchent de quoi vivre parmis les débris puisque rien ne peut vivre dans de tels eaux. Cet excès de vie et d’amour est remis en question par la réalité et se transforme en excès de pollution dont les gens se soucient bien peu. La réalité plastique et la pollution n’est pas encrée dans la culture indienne est chacun jette dès qu’il a terminé sans se soucier d’où il se trouve ni de l’impact; que l’on soit dans un train au milieu de la montagne, au milieu de la rue ou près d’un cours d’eau tout finit par la fenêtre, au sol ou bien dans l’eau. En soirée, hapés par cette cérémonie et retournants à cette réalité, on observe ce village sacré se transformer en marché lumineux et animé où brillent par milliers bijoux dorés et argentés. Parmis les pélerins, les touristes et quelques estropiés cherchant la générosité des croyants, une atmosphère sereine et enivrante fourmille et la frénésie de tout acheter sur ces étales brillantes et colorées se fait difficile à contrôler. On découvre aussi à cet instant la sensation étrange d’être un animal de foire avec tout le monde qui veut sa photo avec nous rendant la marche parfois longue et désagréable voire impossible par moment, ne pouvant faire deux mètres sans s’arrêter. Sans le comprendre, ce pays ets celui des opposés poussés à l’extrême. Une société très pieuse où la laïcité n’existe pas et dont la vie quotidienne n’est que pratique de sa religion mais pourtant si loin de l’impact destructeur qu’ils laissent sur leur territoire, changeant profondément les paysages indiens; la pleinitude passe par le profond respect des puissance mystiques de la Nature, des fleuves, des arbres; même nature qu’ils abiment et laissent à l’état de décharge. Alors que le végétanisme est la norme par respect pour


l’Animal dans ce pays où des millions de vaches et autres animaux peuplent les rues, ces mêmes animaux sacrés mangent dans la rue les tonnes de plastique jetées par habitude. Toujours dans la ville sainte d’Haridwar on découvre tout l’étendu de la folie hindouiste en se rendant pour la première fois dans l’un de leurs temples que l’on trouve à chaque coin de rue dans tout le pays. Perché en haut de la colline, on grimpe au milieu des singes qui s’empiffrent de plastique pour arriver devant un batiment blanc et orange grouillant, repésentatif de beaucoups de temples indien dédiés au dieu singe Hanuman. Alors que l’on s’enfonce dans une foule pensant être dans une file d’attente avant de pénétrer le temple, l’avancée pieds nus se fait longue; des pieds de toutes parts s’entrecroisent et s’écrasent alors que chacun joue des coudes pour avancer dans cette foule dense sans se soucier de son voisin. File d’attente il n’en est rien, nous sommes dans le temple, surpeuplé et prêt à exploser, pour venir embrasser une idole au fond de celui-ci. L’explosion est proche avec tant de passion et arrivés au comptoir des donations, tout devient incontrôlable, les gens se bousculent pour être les premiers à donner au prêtre leurs quelques roupies, leurs fleurs, leur riz soufflé, on se perd tous les trois de vus, séparés par une foule violente qui nous envoie valser aux quatres coins du temple, impatiente derrière des voyageurs perdus et qui ne connaissent rien aux coutumes locales. L’Inde profonde se montre à nous belle, spirituelle et captivante mais sale, confuse et dure.



AMRITSAR Acclimatés au pays, aux habitudes et au rythme de vie indien, c’est un petit déjeuner à même la rue sur une petite marche devant le comptoir d’un vendeur de chai thé amical et agréable avec le visiteur comme beaucoup d’indiens rencontrés depuis le début.

[ amritsar jodhpur ]

Plus grosse ville de la région Penjab, on traverse les grandes routes pour se rendre au point d’intérêt majeur de la ville. Logés dans un dortoir à la périphéries, on se fraye un chemin à pied entre les voitures et tuktuks, passant sur des rond points habités par des vaches ou sous des ponts au milieu des gravats. La première partie n’est pas très agréable et le piéton se retrouve dans le trafic au même titre que les autres véhicules par manque de trottoirs. Arrivés dans la rue commerciale on remarque une difference dans la coiffe et les turbans des hommes punjabi, et toujours le visiteur blanc est demandé par tous les magasins que ce soit pour une casserole ou le plus beau des cachemires vers lequel on s’attarde. Faciles à trouver dans les précédentes villes, ici les endroits de repos agréables et fait pour les touristes sont introuvables et on doit manger et boire dans la rue ce qui nous vaudra quelques inconforts par le futur. Le chemin se fait et après une heure d’avancée on se retrouve à enlever nos chaussures comme dans tous les lieux sacrés indiens, on entre dans une enceinte fermée où chacun doit se laver les mains et les pieds afin d’être purifié avant de se couvrir la tête d’un turban. Nous sommes au cœur de la religion Sikh, minoritaire en Inde mais en majorité dans la région, nous sommes en terre sainte dès lors qu’on découvre le majestueux Temple d’Or érigé au milieu d’un lac sacré, entouré d’étendues de marbres et de salles


sous des arches sermontées de tours de marbre blanc; le tout d’une pureté inqualifiable. Là les croyants enturbannes viennent par milliers chaque jour et s’assoient des heures durant sur le marbre froid en famille, tantôt à discuter tantôt prier et baiser les mosaïques sur le sol. Au centre trône ce petit temple à l’échelle du complexe mais d’une immense richesse, couvert d’or; dotés de tours elles mêmes en or où se presse une foule de plusieurs heures d’attentes pour avoir la chance de donner une offrande ou s’agenouiller dans le bâtiment saint. C’est toute une ville qui s’organise différemment dans le temple avec des points d’eau pour boire, des marches descendants vers le lac sacrée pour se purifier de ses eaux, le plus incroyable restant l’espace de restauration gratuit et pour tous tenu par les bénévoles sikhs. Chacun attend et fait la queue dans le calme où l’on reçoit vaisselle traditionnelle en aluminium avec une coupe d’eau; les portes de l’immense salle laissent sortir les précédents croyants tandis que les bénévoles lavent à grandes eaux le sol préparant déjà l’arrivée des suivants. On vient s’installer sur des tapis installés en rangés, chacun les uns à cotés des autres et quand la salle est remplis, les mêmes bénévoles viennent remplir nos assiettes de riz et mets épicés en donnant le chapati traditionnel à ceux qui tendent les mains. C’est quand on sort de la salle que l’on vient à l’encontre des derniers bénévole qui récupèrent et lavent notre vaisselle permettant au cycle de continuer tout au long de la journée; servant 300 plats tous les quarts d’heures. La foi et le don de soi sont impressionnant dans l’enceinte du Temple ou des centaines de bénévoles donnent de leur temps pour les autres que ce soit en cuisine ou dans l’entretien du Temple qui est lui même impressionnant. Chaque jours à la même heure sonnent les cloches et chacun doit quitter les


allés et monter les escaliers du Temple alors que des centaines de personnes à nouveaux viennent à grandes eaux arroser le carrelage de marbre du temple pour rejeter les eaux sales dans des grilles d’évacuation. Rares sont les endroits plus propres que nous verrons au cours du voyage. Nous sommes des inconnus dans leur lieu sacré mais traités comme tout un chacun et même au delà avec un nombre impressionnant de photos prises avec tous ces gens là qui nous bénissent d’une main sur la tête ou sont prêt à nous confier leur bébé pour immortaliser leur présence dans ce lieu saint.



DHARMALAYA Arrivés la veille dans une communauté tibétaine au pied de l’Himalaya où l’on découvre une ville qui vit au rythme des moines boudhistes de tous âges; on s’éloigne dès le matin de la civilisation, reculant peu à peu dans la montagne à bord d’un petit taxi. On passe dans les derniers villages, les dernières habitations et derniers commerces avant de s’enfoncer dans une montagne sinueuse et très végétalisée. C’est au bout d’une trentaine de minutes que notre chauffeur nous dépose, ne pouvant aller plus loin avec sa voiture; on endosse alors nos sacs de voyages avant d’entamer vingts minutes de montée à pic sur un chemin rocailleux où l’avancée se fait pénible. On découvre au sommet un regroupement de maisons entièrements en terre, certaines encore en travaux avec une grande maison principale, des propriété plus modestes regroupants plusieurs chambres et des ateliers; le tout aménagé au milieu de fleurs, potagers et petits chemins en terre reliants le tout.

[ dharmalaya ] bir

On rencontre aussi tout un groupe de quinze personnes venues des quartes coins du monde et d’Inde pour ces dix jours de retraite au milieu des montagnes prenant part à un mode de vie alternatif. C’est chaque jours ensemble qu’on va vivre au rythme du soleil en se levant à 5h30 pour se coucher à 21h00; travaillant tantôt à l’extérieur dans les plantations, dans la préparation de la terre servant à continuer la construction du site ou pour remonter des sacs de sable depuis le bas de la colline; tantôt dans les ateliers à travailler le bois ou que dans les maisons existantes pour se charger des travaux de finitions de façades; ou même dans la maison pour préparer les repas uniquement vegans, condition essentielle au bon fonctionnement du cycle fermé dans lequel fonctionne le site.



On apprend à construire mais aussi à vivre durablement avec une agriculture directe sur le site et un réseau d’eau grise fermé attenant au site qui ne doit pas se retrouver pollué par des aliments modifiés ou des savons industriels. Au niveau de la construction on passe beaucoup de temps chaque jours à tamiser puis piétiner la terre fine mélangée à de l’eau et des liants tels que de la paille afin de la préparer à être mise dans un moule pour former des adobes, après plusieurs jours, qui par milliers servent à bâtir le site. En dehors de cet apprentissage des techniques locales redéveloppées par l’institut de Dharmalaya; on passe beaucoup de temps à méditer dans ce paysage paisible, que ce soit le matin durant une heure au levé du soleil ou le soir avant de se coucher; ce temps de retraite nous fait partager et échanger avec des inconnus qui ont les mêmes intérêts que nous par cet apprentissage et cette façon de vivre et de réfléchir sur notre monde actuel.

[ shimla rishikesh ]

Plus que cela, au sein de Dharmalaya, beaucoup de villageois sont mis à contribution et on vit avec eux jours après jours apprenant à les connaître et pouvant observer leur vie de tous les jours, leur village et les échanges entre eux. Sans langues communes ce sont les gestes qui dominent et chacun du maçon à la cuisinière a beaucoup à nous apprendre sur la façon de faire et de vivre dans ce pays. Au bout de ces dix jours, d’abord difficiles mais fort d’apprentissages, c’est au moment des adieux que ces femmes indiennes si réservées ont entonnés des chants locaux avant de danser nous invitant à rejoindre leurs pas traditionnels; on a vu ici chaque jours des indiens forts et travailleurs dans des conditions difficiles en pleine montagne et on découvre au moment de partir des femmes d’une beauté incroyable et différente. On quitte cet endroit pleins de questionnements en tête, de remises en questions sur notre mode de vie mais aussi pleins de magnifiques images de partages.



JAIPUR Sortis de dix jours de calme et de partage; le retour à la vie indienne est une nouvelle fois éprouvant, redescendre dans les villages pollués, sales de plastiques, bruyants et surpeuplés nous laisse de nouveau sans voix. C’est au bout de deux jours de voyages tantôt en tuktuks, tantôt en bus de nuit que nous atteignons notre nouvelle destination; le majestueux Rajasthan, terre des maharajahs, des rois, en commençant par la ville rose de Jaipur.

[ jaipur bundi ]

Installés dans un dortoir débordant d’une quinzaine de personnes avec des lits superposés à trois étages; on se dirige le premier jour vers la ville historique de Jaipur où l’on découvre des palais des plus incroyables, riches et vegetalisés prenant places au milieu d’un centre ville pauvre, sec où les enfants des rues vivent dans les déchets avec les chèvres partageant le même puits d’eau. Une telle beauté et richesse au pays des rois indiens nous met face à un contraste effrayant de pauvreté extrême au cœurs des rues de la ville et ce retour à la réalité est un premier moment difficile dans notre périple commencé il y a plus d’un mois. On rentre le soir dans le noir le long des grandes routes de la ville après avoir rencontré le tourisme aisé et luxueux de cet endroit si pauvre, décontenancé de cette première journée au Rajasthan. Le lendemain à la première heure on retrouve deux frères chauffeurs de tuktuk pour payer leurs études, rencontrés la veille et qui nous amènent faire le tour des palais avoisinants contre 500 roupies. La première de ces merveilles est le palais d’Ajmer, majestueux, d’un jaune vif et couvert de vitraux colorés; immense et trônant au pied de la colline, des milliers d’oiseaux volent en continu au


dessus de nos têtes alors que certains visiteurs se laissent amener dans le palais à dos d’éléphants dont la tristesse est dessinée sur leur visage, sans défense devant l’exploitation qu’en font les hommes. Remplis de jardins fleuris en tout genre au milieu d’une région désertique le palais reste l’un des plus beau du territoire indien. En suivant on poursuit notre montée sur la même colline pour atteindre un palais bien moins touristique et flamboyant, à moitié à l’abandon mais dont les couleurs roses abîmés par le temps se fondent dans le paysage au sommet de cette montagne, nous offrant une vue imprenable sur la métropole de Jaipur. C’est véritablement le dernier palais de la journée qui s’inscrit comme l’une des expériences les plus dingues de ce voyage. Tandis que le tuktuk nous dépose au pied d’une nouvelle colline, nous indiquant de passer de l’autre côté pour apercevoir le temple du dieu singe; on s’avance le long du sentier qui monte en haut de celle ci. Je n’ai pas connu avancée plus pénible au cours de ces quatre mois; au milieu des singes et de quelques brebis ce sont des dizaines d’enfants et leurs mères miséreuses qui habitent ici, le long de ce chemin. La peau abîmée et sale, le cheveux crasseux et emmêlé, on croise des bébés à même le sol, des enfants rassemblés pour mendier et survivre; certaines femmes suppliants allongées sur les pavés; voilà une vision intenable alors que l’envie de fuir ou d’accélérer le pas devient obsession mais que le cerveau et les jambes ne répondent plus. C’est ainsi qu’on vient à croiser Siddarth et son ami en moto, le même âge que nous environ, qui viennent à notre encontre inquiets. Le chemin ne serait pas sûr, étant l’endroit de squat de voyous du coin; ils nous escortent ainsi jusqu’à la fin du chemin où l’on croise ces supposées personnes mals intentionnées et toujours beaucoup de très pauvres regroupés sur cette colline.


Enfin arrivés au pied de l’autre côté c’est une tout autre sensation qui s’empare de nous; une cité abandonnée telle qu’on l’imaginerait dans les films les plus fous, réinvestie par des centaines de singes. Ce sont des palais abîmés et des bassins au eaux vertes et aux fontaines rouillés qui prennent place au creux de la montagne qui s’offrent à nous. Nous qui nous attendions comme on en a vu pleins à un petit temple pour prier le dieu singe Hanuman, on est face à une cité de prestige tombée dans l’oubli où seuls les gens du coin, les singes et quelques touristes continuent d’explorer les lieux. Jaipur a été un passage très difficile dans ce voyage par son infinie pauvreté mais nous a marqué également par la beauté de ses anciennes bâtisses royales.



JAISALMER Avançant dans le Rajasthan avec notre ami de Delhi, Abhishek, rencontré le tout premier jour de notre voyage; on poursuit notre découverte à l’extrême ouest du pays dans la ville forteresse de Jaisalmer. Ville jaune à la frontière du désert on se balade entourés de grands remparts dans des rues aux accents de Maghreb; colorées de commerces textiles, souvenirs en tout genre et cachés au bout de la cité emmurées de femmes faisants discrètement leur linge qu’elles laissent pendre à chaque recoin.

[

jaisalmer pushkar udaipur

]

Le désert de Thar et tout proche et une expédition s’y prépare; à bord d’une jeep nous partons, à quatre, à l’écart de toute civilisation passant par un village abandonné aux portes du désert. On rejoint ainsi, le dernier village passé, nos quatre dromadaires ainsi que notre guide lui même sur sa monture avec son petit fils qui nous tiendront compagnie pour cette traversée. Quelques affaires préalablement préparées et nous voilà parti à dos de dromadaire vers les dunes de ce désert pour y passer la nuit. S’enfonçant dans un paysage de moins en moins arboré nous atteignons avant la nuit un espace totalement dépourvu de verdure avec des dunes lisses et parfaites où nous attendent quatre couchettes et un petit campement au milieu des quelques scarabés de sable qui semblent être les seuls habitants de ces lieux. Abu, notre guide d’une soixantaine d’année, a passé sa vie dans le désert, y dormant toute l’année exceptée en période chaude et c’est fier qu’il nous présente son frère, nomade du désert avant de tous ensemble, avec son petit fils, préparer le repas du soir et le partager autour d’un feu. L’Inde a de ça de beau que l’anglais permet à chacun de partager et c’est des heures durants que l’on discute avec Abu sur ce mode de vie



si spécial et que celui ci nous berce au son de sa voix et de ses chants. Quelle soirée hors du temps où aucune pollution lumineuse n’existe, rien d’autre que le sable et les arbustes les plus robustes à perte de vue accompagnées par une lune lumineuse et un ciel des plus étoilé. Les filles couchées, il ne reste qu’Abhishek et moi au bord du feu avec un petit peu de rhum à se refaire le monde alors que l’on entame une petite promenade dans ce paysage incensé sans perdre de vue notre campement. Sur notre matelas de fortune sous la couette on voudrait arrêter le temps, ne pas s’endormir et contempler ce ciel infiniment; si loin de chez nous, on se sent bien petit au fin fond du désert indien et si paisible loin de cette vie indienne explosive.

[ agra kajuraho ]



TIRUVANNAMALAI Arrivés au sud du pays dans la méga ville de Bangalore où l’on découvre un peuple indien plus petit et bronzé ainsi que des vaches différentes, musclées et avec de grandes cornes peintes de bleu; il nous faut rejoindre le Tamil Nadu et la ville de Tiruvannamalai pour prendre part à une nouvelle formation le lendemain. Devant rester dix jours dans la ville nous cherchons un hôtel sûr et confortable où loger, sans succès dans un centre ville très populaire et très peu touristiques sans le confort que cela amène. La nuit tombe et l’on déhambule fatigués dans les rue peu rassurantes où les chiens n’ont de cesse de nous aboyer. On s’embarque alors dans un petit hôtel miteux on l’on trouve deux places où dormir étant alors trois à devoir se loger et c’est donc au bout d’un couloir étroit où il ne faudrait pas cinq centimètres de plus d’épaules et dans une chambre minuscule avec un lit et demi et un tapis de sol que nous entamons déboussolés ce séjour dans le sud et pour l’instant ces dix jours dans la ville.

[ ] goa thannal mysore

Bien sûr chaque jour il y a cette formation qui chacun nous passionne et me donne l’envie d’explorer de telle voies de construction. C’est également un lieu de rencontre et de partage avec essentiellemnts de indiens qui se rendent ici dans le cadre d’études d’architecture, pour commencer une nouvelle vie plus responsable ou encore simplement pour se cultiver et apprendre sur de tels sujets. On y croise ainsi des familles, des étudiants, des retraités et quelques artiste mais j’aurai le temps de revenir sur ce temps d’apprentissage car la vie à Tiruvannamalai et la routine qui s’y est installé est un moment particulier qui marque ce voyage. Ayant trouvé le deuxième soir un meilleur hôtel avec une chambre de trois


lits simples et « salle de bain », ce qui revient à un trou de toilettes turques et un robinet d’eau froide à dix centimètres du sol accompagné de son seau d’eau pour se laver; nous avançons le fait de rester neufs nuits pour négocier un prix qui nous convient tous et enfin on peut se reposer après deux jours à cent à l’heure. Chaque matin c’est ainsi que l’on descend chez la même dame acheter trois bananes et des biscuits puis que l’on vient s’asseoir sur les escaliers en face où l’on prend chez un autre homme un chai thé en regardant les écoliers partir à l’école en train avant de chercher un tuktuk que l’on partagera souvent avec d’autres personnes de Thannal pour nous amener à 30 minutes de là au milieu de la campagne sur notre chantier. Le soir venu on part à la découverte de cette ville contenant l’un des plus grands temples du sud de l’Inde et ainsi son immense réserve de pèlerin et fervents croyants. Sans infrastructure un minimum touristiques, on cherche à manger dans tous les bouibouis au bord de la route principale avec leurs lots de fritures et plats épicés, nous réservant parfois de mauvaise surprise, que l’on vient consommer sur place dans la tradition indienne d’une restauration de rue quotidienne ou que l’on amène dans notre chambre quand la journée a été fatiguante. C’est ainsi qu’une fois familiarisés avec ce centre ville tamul désordonné, on découvre alors l’autre aspect de Tiruvannamalai où a quelques kilomètres du centre un mini village de touriste prend place avec ses homestay des plus colorées, ses restaurants occidentaux et ses touristes venus pour la même raison, le grand ashram de la ville. Lieux de méditation et de retraites, les ashrams sont fréquent mais celui ci est reconnu et a pris une envergure énorme avec aussi bien des européens que des indiens qui s’y


réfugient pour sortir du quotidien. C’est un lieu mystique où chacun médite au cœur de temples et on aucun bruit ne se fait entendre, privés de tout, le vœux du silence y est omniprésent et les gourous, maîtres à penser indiens, qui ne sont pas désignés péjorativements comme chez nous, mènent la danse. Éprouvante et ancestrale, nous préférerons le temps passé au milieu des tamouls du centre ville, allant au temple, au marché, aux commerces de textiles, malgré tout l’inconfort que cela entraîne; nous laissant le temps d’installer une routine dans un environnement si hostile pour nous autres européens.



HAMPI Passant par le centre sud du pays, notre voyage nous amène dans la ville rocheuse et aride de Hampi; fameuse pour ses temples d’un ancien temps, en ruines, qui se comptent par dizaines. Pourtant ce n’est pas ce dont j’ai envie de parler et ce n’est pas non plus ce qui a rendu le séjour dans cette ville exceptionnel.

[ hampi bangalore ]

En effet après avoir pris la première journée pour explorer ces vieux temples au milieu des roches, on nous conseille de nous élever pour le coucher de soleil et de rejoindre le haut de la montagne à l’entrée de la ville. En rien cela n’est réellement une montagne mais plutôt un empilement de roches immenses tenues en équilibre par leur poids, un coup plates et longues puis sinueuse et édentées. À flan de falaise sur la roche on monte à côté d’un paysage uni, orangé et avec l’altitude la peur de tomber arrive. Quelques cordes par ci par là mais toujours le vide a un mètre qui nous guette. Pratiquement en haut on découvre un énième petit temple où toujours on vient à se demander comment il a pu être construit dans de telles conditions mais c’est seulement arrivés au sommet que l’on sait pourquoi on est venu jusqu’ici. Sous un soleil couchant, des rochers de toutes tailles à perte de vue, de tous côtés, entre lesquels quelques arbustes survivent et quelques cours d’eau passent. On se croit au centre du monde, au milieu d’un paysage d’une grandeur qui nous laisse tout petit; et ainsi une heure passe jusqu’à ce que le soleil colore le ciel de rose, de bleu et d’orangé avant de finir sa course, donnant à voir un spectacle incomparable de beauté, coupant le souffle. Et pourtant il faut redescendre avant que le noir n’arrive et que le chemin devienne dangereux pour regagner notre hôtel.



Notre chemin passe alors par le temple d’Hampi où l’on a entendu que loge un éléphant sacré que l’on trouve dans l’enceinte du temple, machinalement bénir de sa trompe tout ceux qui passe par là et lui donne un billet qu’il s’empressera de donner au prêtre des lieux. On se couche ainsi sans savoir encore le spectacle qui nous attendait le lendemain. Levé aux aurores ce matin pour retourner voir cet éléphant qui chaque matin vient prendre son bain dans le cours d’eau de la ville. Et alors que celui ci se fait désirer et que l’on entame un petit déjeuner épicé au bord de l’eau; le voilà qui arrive et commence a se baigner au milieu des habitants de la ville qui se baignent à leur tour et font leur linge. Le temps à nouveau s’arrête, hommes et enfants jouent dans l’eau tout prêt de l’animal qui se fait frotter par le prêtre alors que les femmes, qui ne se permettent pas de se dévêtir ni de jouer avec les hommes lavent le linge et le mettent à sécher sur les rochers chauds. Ce moment réunit toute la ville qui vient faire ses nécessitées dans le cours d’eau ou l’éléphant sacré se fait laver; se lavant eux mêmes par la même occasion ainsi que les habits de toute la famille.

[ varanasi ]

Les femmes entièrements habillées se lavent elles aussi en petit groupe dans les eaux de la rivière et on voit certaine ancienne du village s’exhiber torse nu à la vue de chacun dans cet endroit de partage et de rendez vous, nous redonnant le sourire et la conviction que ces femmes, immergées et mises à l’écart dans une société masculine et patriarcale sont des femmes fortes jouants un rôle capitale dans l’équilibre de ce monde hindouiste. Ce sont des étoiles pleins les yeux et la parole coupée que l’on suit l’éléphant fédérateur et protecteur de la ville avant de continuer notre chemin vers d’autres destinations.



ALLEPPEY L’une des pires nuits de transports en Inde nous amène dans l’un des endroits les plus reposant qu’on y ait trouvé. C’est sans réservation que nous décidons de prendre le train à la dernière minute reliant la région de Coorg à la ville du sud d’Alleppey, tout cela pour un trajet de nuit. D’abord installés dans les wagons à réservation on demande aux contrôleurs s’il ne reste vraiment aucune couchette de libre quitte à mettre le prix s’il ne reste que les wagons les plus chers car on ne sait pas où l’on va dormir, mais rien. Une famille avec deux enfants voyant notre détresse propose alors de nous prêter un lit où l’on devra se serrer tandis que leurs deux enfants devront alors aussi se serrer sur une seule couchette mais à nouveau le contrôleur s’y oppose fermement. C’est la mort dans l’âme que l’on quitte nos places pour avancer munis de nos gros sacs vers les wagons du fond, les moins chers qui ne demandent pas de réservation, il est 23h00.

[ kochi alleppey ]

C’est l’incompréhension; on peut à peine y entrer tandis que le wagon déborde et que les personnes s’entassent sur les banquettes voire même les portes bagages alors que debout il ne reste pas un centimètre carré de tranquille. On se retrouve bloqué avec nos sacs, impossible d’avancer et déranger autant de monde surtout qu’enfants, femmes et hommes s’entassent indifféremment habitués à si peu de confort. Après quelques longues minutes on trouve un espace sous les banquettes où l’on réussit avec l’aide de quelques hommes à glisser nos sacs pour nous sentir plus légers alors qu’il nous reste la nuit à tenir là dedans. Commence alors un jeu de chaises musicales, chacun cherche à rester proche des banquettes pour s’asseoir dès qu’une personne descend


du train et à force de se placer nous réussissons à saisir une place assise; nous sommes deux sur ce voyage. Avec Prune on se partage ainsi une place qui vaut cher dans le wagon se relayant debout au milieu de la foule à se tenir à ce que l’on peut et assis au milieu de cinq hommes qui se serrent et essayent de communiquer avec nous étonnés de nous voir ici. La nuit est longue et c’est vers 5h00 du matin que l’on atteint enfin notre gare quittant ce train surpeuplé sans oublier que cela n’est même pas exceptionnel pour toutes ces personnes mais que c’est leur quotidien. Après quelques minutes de tuktuks où nous sommes tous les deux épuisés, le bruit des vagues sur le sable se fait entendre, le vent dans les palmiers; nous sommes arrivés à la mer et nous nous endormons dans notre auberge en se disant que cela valait la peine ayant hâte de découvrir cet endroit le lendemain et de s’y reposer pleinement. Quel superbe réveil de savoir que l’on est arrivé et qu’il ne nous reste plus qu’à profiter; un petit déjeuner face à la mer, l’auberge est à l’entrée de la plage et depuis sa terrasse on se sent à même le sable, il y a tout ce que l’on pouvait espérer; le premier bain indien dans la mer et du temps devant nous pour vaquer à d’autres activités. L’auberge nous rend autonome, on cuisine chaque jours tout ce que l’on souhaite pour peu qu’on prenne le scooter du proprio afin de se freiller un chemin dans le trafic dense de la ville jusqu’au supermarché et au comptoir de vente d’alcool dont on profite chaque soirs sur la plage. Shana partie chercher son ami nous rejoint dans ce petit coin de paradis et l’on partage une vie tranquille près de l’eau. C’est donc à quatre que l’on part faire l’escapade pour laquelle Alleppey est vraiment connue, pas sa plage mais ses terres immergées et ses réseaux de rivières dans les terres.


A bord du bateau où s’enfonce dans la jungle sur des cours d’eaux de plus en plus petits, bordés de palmiers et d’habitations; tout un village s’organise dans cette zone marécageuse et chacun vit à même le bord de l’eau, faisant sont linge et pêchant à la perche devant son habitation. C’est ici que l’on prend un petit déjeuner, sur un quai au milieu de la végétation où un habitant est venu installer son café, tout le monde ici se déplace en bateau, c’est un autre monde que la ville terrestre d’Alleppey. On découvre aussi l’impact touristique d’un tel paysage avec des dizaines de houseboat des plus imposants qui voguent et descendent l’ancre au milieu de la jungle; d’immenses bateaux maisons climatisés, avec personnel que les riches indiens ou les européens louent. Certains des bras les plus larges de la rivières se transforment alors en parking géant pour toutes ces embarcations. Malgré cela les villageois vivent leur vie de la plus simple de manière et l’on s’amuse à voir des arrêts de « bus » prenants place sur des quais afin de rejoindre la terre ferme. Au fil du temps passé près de l’auberge se faisant ami avec le propriétaire, on passe du temps avec biens des personnes venues elles aussi profiter de cet endroit. C’est donc avec ce petit groupe que va se terminer notre année, nous approchons le 25 décembre sous les tropiques et même si Noël n’est pas une fête pour les hindous, sa popularité à l’autre bout du monde rend quand même cette date importante et tout le monde se met au travail le jour venu, cuisinant ses meilleurs plats, mijotant ses meilleurs cocktails pour venir s’installer sur le toit de l’auberge où l’on partage à une petite dizaine ces mets sous le soleil avant de rejoindre la plage pour la nuit pour continuer la fête. Premier Noël loin de ma famille et me voilà propulsé à l’autre bout du monde a le fêter sur la plage sous 30 degrés avec des inconnus qui nous accueillent toujours de la plus belle des manières.



CHENNAI La mégalopole de Chennai qui rayonne sur tout le sud de l’Inde n’était pas une des destinations rêvées où l’on voulait absolument se rendre mais chaque chemin semble y mener lorsque l’on voyage sur la côte est. Ma première expérience est ainsi que venant récupérer ma copine à l’aéroport arrivant de France; je réserve deux nuits dans la ville afin de la visiter un minimum. Arrivée dans l’après midi, dans la stupeur qu’entraîne une arrivée en Inde nous ne bougerons pas de l’hôtel au cadre enchanteur où nous séjournons, hormis pour chercher à manger le soir et je me rend ainsi compte à travers elle de la folie de telles rues; tout déborde, tout est sale, les voitures et scooters passent à toute vitesse à quelque centimètre de tout le monde, chose que je ne remarquais même plus mais qui complique l’avancée de Louisiane. N’étant pas dans un des quartiers les plus riches et touristiques de la ville; la rue se fait hostile la nuit et l’on récupère à manger dans la rue avant de rentrer manger à l’hôtel.

[ chennai ]

Chennai n’a pas un intérêt touristique majeur et le second jour on se balade au milieu de rues sales, bruyantes et où les gens viennent s’entasser, faisant de la ville la quatrième plus peuplée du pays. Passant par un temple où l’agitation s’arrête pour quelques instants on reprend la route en tuktuks, la traversée à pied devenue trop fatiguante, pour se rendre à la plage mais à nouveau elle ne ressemble en rien à ce que l’on connaît, une mini fête foraine à l’abandon y prend place, les gens sont tous habillés et personne n’est à l’eau. Le temps nuageux ne rend pas alors la perception de ce paysage plus agréable et décidant de se balader le long de l’eau, on marche au milieu de plastique et de poissons morts


échoués sur le sable alors que des petits enfants de pêcheurs viennent chercher notre attention. Décidément rien n’est agréable à voir ou à vivre dans cette ville sans charme. C’est donc le lendemain très tôt que l’on quitte cet endroit pour se rendre de l’autre côté de l’Inde dans la région de Goa pour rejoindre le reste du groupe afin de fêter le nouvel an là bas. Mais l’histoire avec Chennai ne s’arrête pas là et contraints d’y retourner lorsque ma copine reprend son avion vers la France, on se retrouve à devoir attendre toute la journée l’avion du soir portants sur nous nos deux sacs. Après avoir passer au moins une heure dans le tuktuk, les bouchons et l’odeur de mort qui règne dans cette pollution sans trouver un endroit tranquille où l’on va pouvoir passer la journée sans bouger; le chauffeur agacé nous dit qu’il y a pas loin un immense centre commercial où l’on trouvera de quoi manger et passer le temps. Ce n’est plus un choc du à la pauvreté la bas mais bien le contraire, ce centre flambant neuf et décidément bien trop riche pour ce qui l’entoure et vient en effet prendre place au milieu des rues misérables et poussiéreuses. Des portiers, des détecteurs de métaux, des portes automatiques, des sculptures monumentales et un espace climatisé immense où les escalators se chevauchent; on croit rêver. Comment cet endroit peut il exister alors que personne n’a les moyens de venir ici? Des boutiques de luxe, des restaurations rapides internationales, des marques de fringues européennes au même prix que chez nous. Cela ne manque pas, c’est un centre quasi vide où l’on arrive alors que seuls les plus riches peuvent se permettre de venir; on trouve même, à force d’errer dedans, un immense cinéma brillant de milles feux avec du marbre, de l’or, des pierres de couleurs partout; que ce soit dans la pauvreté ou la richesse à outrance; tout est démesuré dans ce pays.


Les heures passent et l’admiration mêlée au dégoût du début se transforme en sentiment d’enfermement, quel endroit horrible pour passer la journée; l’appréhension du départ de l’autre n’arrange rien et on s’ennuie fermement quoi qu’on fasse. Oppressés dans cet espace et fatigués des voyages incessants sans repos ce centre commercial se transforme en enfer au milieu d’une ville qui ne nous a laissé aucun réconfort. C’est presque soulagés qu’on se fait mettre à la porte quand l’heure du vol approche, après plus de dix heures enfermés dans ce centre luxueux à la limite de l’indécent. Bien sûr les adieux à l’aéroport n’égayent pas la situation mais le moment tant redouté enfin passé il faut se sécher les yeux et continuer ce voyage incroyable. C’est seul pour la première fois depuis le départ que je dois me rendre en tuktuk au centre de Chennai pour dormir dans une chambre minimaliste alors que j’ai perdu plus tôt mon portable et que je n’ai même plus internet pour repère et pour communiquer avec les filles que je dois retrouver plus tard dans la semaine. C’est donc à l’aveugle le lendemain que je prendrais mon bus et ses correspondances pour partir loin de cet endroit et trouver un peu de paix dans une ville bien plus relaxante a Mamallapuram.



PONDICHERRY Forts d’un cours passage à Pondicherry où l’on rencontre dans un café un guide indien pour français avec qui l’on garde contact et ayant chacun un intérêt à rester plusieurs jours au même endroit avant de quitter le pays, on décide de retourner sur place sans savoir pour combien de temps on y restera. Ainsi grâce à des contacts que Shana a retrouvé à Pondicherry, dès le deuxième jour dans la ville; une grande maison nous est prêtée dans le centre ville et l’on profite de ces instants pour faire un point sur ces quatre mois passés en Inde. Un soir par hasard en cherchant à sortir danser ou boire un coup, on recroise notre ami guide de la première fois en se promettant de se revoir.

[

]

mamallapuram auroville pondicherry

C’est ainsi que de fil en aiguille, après avoir mis une date sur notre départ et ayant rencontrer l’entourage de ce guide que l’on se retrouve à nous proposer une chambre dans la collocation de trois guides pour français au milieu de Pondicherry pour la semaine qu’il nous reste à passer. Chaque jour on se balade dans la ville que l’on commence à connaître; une frontière invisible délimite cette ville avec l’ancienne cité française nous ramenants directement chez nous, avec des couleurs plus grises, des églises, une chrétienté très présente et de l’autre côté du canal la ville tamoul avec ses marchés à perte de vue, ses rues agitées et désordonnées où les scooters et les chiens errants vivent en maître. Je consacre alors beaucoup de temps à m’installer dans des lieux français qui me rappelle un peu le pays pour écrire et dessiner sur notre aventure ayant ici un confort incroyable et


un rythme de vie que l’on peut facilement gérer. On retrouve également certains soirs des connaissances faites grâce à nos trois amis ou rencontrées à Auroville. Mais ce qui a rendu cette période incroyable et qui me donne envie d’écrire ce sont tous les soirs où l’on se retrouve à la collocation avec Vishnu et Nirmal pour discuter et partager sur tous les sujets possibles, ayant tant à se dire; on en apprend chaque jour plus sur la religion, les rapports familiaux et le train de vie indien, le tout raconté par des indiens. On concocte des plats français leur faisant découvrir selon leur dire une nourriture fade tandis qu’eux nous apprennent à cuisiner à l’indienne, très épicé et uniquement végétal en nous apprenant aussi à réaliser leurs fameux pains chapati qui constituent la majorité de leur consommation quotidienne. Passionnants ces échanges s’éternisent dans la nuit chaque soirs et une fois de plus dans ce pays si accueillant on se fait des amis, sur qui on peut compter sans hésitation en cas de retour dans le pays ou pour eux d’une venue en France. Chacun de nous trois quitte se pays en étant sûr d’y revenir; laissant derrière nous beaucoup d’images folles et fortes de sens ainsi que beaucoup d’amis rencontrés sur les routes du pays avec qui nous avons partagé si loin de chez nous.




II_RETROSPECTIVE


Mes attentes professionnelles à la veille d’un tel voyage étaient très peu concrètes et il ne m’importait que de pouvoir voyager, découvrir de nouvelle culture, de nouvelles terres étrangères et vivre au jour le jour ainsi que d’apprendre de nouvelles façon de construire avec du matériau renouvelable et local sans pour autant savoir ce que je pourrai faire de cet enseignement une fois rentrée. Je continue de me poser ces questions de comment mettre en application ce que j’ai appris puisque je l’ai appris dans un contexte très particulier, au cœur de l’Himalaya avec des ressources de l’Himalaya ou au milieu du Tamil Nadu avec des techniques mises au point après des années de recherches nécessitants également de la matière première locale. Mais plus que de simples techniques de construction ce sont des manières de penser l’architecture de demain qui travaille mon esprit quand je repense à ce voyage; réussir une architecture respectueuse de l’environnement, une architecture locale et une architecture de nécessité. Le premier séjour à Dharmalaya nous a éclairé sur la marche à suivre et a constitué un grand changement dans la façon de réfléchir à mes actions de chaque jour dans ce monde qui s’endette de carbone et qui ne semble pas ralentir. J’ai vu là bas une immense maison sur deux étages faites d’adobes de terre, liées par de la terre et recouvertes d’un enduit de terre sur des fondations de pierre recouverte au sol d’ardoise et en toiture d’une charpente de bois local et de bambous. Cette maison fonctionne à merveille, respire, isole et toute cette terre prend place à l’endroit même où elle a retiré du sol; même si impact il y a sur la biodiversité qui régnait plus tôt sur ce sol, l’impact est minimal en vue des tours et des barres qui se font maintenant sur ces terrains laissés vaquants. Voilà le rôle d’architecte que je voudrais avoir, réfléchir à comment limiter au maximum l’impact de la construction et


du futur habitant sur l’écosystème en place, se faire oublier plutôt que se montrer excessivement. Ne plus être partie du problème mais de la solution; il n’est pas seulement question d’architecture avec de tels propos mais puisque j’ai choisi que l’architecture serait dans ma vie elle doit elle aussi faire partie de cette solution. Comme je l’ai évoqué Dharmalaya nous a également fait réfléchir sur la place du futur habitant au cœur de cette architecture. Parce que ces bâtiments de terre sont certes expérimentaux mais sont également habités toute l’année avec un bon fonctionnement sur la durée, accueillant un salon, une cuisine, des toilettes, une salle de bain, des chambres, une grande salle commune, des escaliers; nous ne sommes pas dans la privation mais bien le confort que chacun connaît en Europe. Et pourtant la façon d’y vivre reste d’une simplicité et d’une efficacité toute autre que la nôtre; un réseau d’eau pluviale chauffé par des panneaux solaires et récupéré une fois utilisé pour arroser les plantations qui serviront à nourrir les habitants ainsi qu’à améliorer le compost suivi d’un mode de vie sans plastique et sans produits transformés n’engendrant aucun déchet et permettant un tel cycle au sein du village Dharmalaya. L’architecte ne peut pas influer directement sur la façon de vivre de ses futurs occupants mais peut faciliter cette transition en créant des espaces et des installations adéquates aussi confortables que celles connues aujourd’hui donnant envie à l’utilisateur de s’impliquer dans une habitation autonome, autosuffisante. Bien sûr que c’est une vision fantasmée et utopique sur la construction du futur dont nous avons eu un aperçu à Dharmalaya même si elle porte à réflexion; car ici en Inde, une fois sortie de notre bulle d’apprentissage et de communion avec ce qui nous entoure, on retrouve la folie de la surpopulation indienne, de la pollution plastique et de


l’extrême vétusté des constructions et habitations. On fait aujourd’hui face à une crise démographique sans précédent et même si en France cela ne se fait pas tant sentir, l’Inde est en passe de devenir le pays le plus peuplé du monde et on se marche littéralement dessus dans les rues indiennes comme dans les campagnes qui sont elles mêmes extrêmement habitées. J’ai parlé plus tôt d’être architecte de la nécessité et il me semble évident que notre devoir et à la fois d’établir l’architecture responsable comme seule architecture mais aussi d’être architecte qui répondra en partie à ce besoin toujours croissant de loger le monde entier en réussissant à suivre de tels principes. Comme il y a énormément de recherches et d’expérimentations à faire dans l’architecture durable, il y en a à faire pour réussir à loger tout un chacun et ce sont de tels sujets qui m’intéressent à présent; l’architecture d’urgence est un cas que j’aimerai explorer dans les deux années qu’il me reste ici; de plus en plus de monde et de plus en plus de problèmes climatiques, l’architecture d’urgence même éphémère va devenir une nécessité pour beaucoup et permet de soulager ces besoins exponentiels d’avoir un toit. C’est à Thannal que nous poursuivons notre apprentissage et devons réapprendre de nouvelles techniques propres au sud du pays avec une terre différente et des matières premières différentes ainsi qu’un autre savoir faire. Ici nous apprenons chaque jour directement sur le chantier à bâtir de zéro tout un espace habitable commençant par traité le sol de terre battu avec de la chaux et des herbes éloignant les insectes. On creuse alors des fondations peu profondes remplies avec des pierres de différerntes tailles qui seront lier par une mixture de terre; chaque mélange de terre a sa propre recette et l’on utilise un différent pour chaque usage mais je ne vais pas détailler les dizaines que l’on a travaillé; faites à partir


de chaux, d’eau, de mélange plante-eau ayant macéré, de pailles et pleins d’autres ressources présentes localement. Sur ces fondations, s’élevant pour créer un soubassement, sont posés des poteaux bambous qui font l’ossature du mur et une charpente bambou pour fermer la construction. Le mur étant une expérimentation à chaque nouvelle construction, on le fait tantôt en torchis tressant des branches souples que l’on recouvre d’un mélange terre, tantôt en un mélange terre peu humide accompagné de paille que l’on entasse et modèle avec le mur relevant plus de la sculpture, tantôt en adobe liées d’un mélange terre. Ces ensembles porteur sont mis en place autour des ouvertures et des aménagements à l’intérieur du mur prévues au préalables puis sont recouverts une fois secs de plusieurs couches d’enduit terre colorés naturellements donnant une forme unique au mur. Concernant le toit ce sont plusieurs couches de bambous puis petites branches qui sont nécessaires, que l’on recouvre de feuilles avant d’y appliquer un mélange terre et continuer à recouvrir de plusieurs couches feuiles/branchages rendant le tout imperméable. C’est ainsi qu’en l’espace de dix jours, partis de rien; on a construit toute une extension à la salle de classe de Thannal et que l’on la laisse pleinement fonctionnelle en si peu de temps. Certes la réalité du métier ne m’a pas encore rattrapé et ces manières de faire sont marginales mais je ne veux pas voir l’architecture comme un objet esthétique résultant des fantasmes de l’architecte ni comme le simple respect de lois et de normes innombrables sans expression d’une idée. Je ne veux pas non plus être architecte de la démesure mais celui qui permet le confort et la considération de tout un chacun; on voit ici en Inde des riches qui vivent dans de belles et grandes maisons en périphéries des villes, qui sont accompagnés de chauffeurs privés dans de grosses voitures climatisées, on voit aussi des familles modestes vivre


aisément comme chez nous bien évidemment, mais l’on voit surtout des familles pauvres où trois à quarre générations s’entassent dans des bouibouis de tôles et de tout ce qui passe, logeant dans les ruines d’anciens bâtiments à moitié détruits où des logements de première nécessité complètement insalubres sans eau courante, sans électricité, sans voitures, se déplaçant à toute la famille sur une moto, en tuktuk à dix ou surtout à pied, et l’on voit finalement trop de très pauvres qui vivent sur la route, sur leurs charrette, cachés dans les recoins des villes avec femmes et enfants, on voit des bébés en bas âge nus jouer à même le sol dans la rue, on voit beaucoup d’infirmes mis à l’écart de la société ne pouvant que mendier pour le reste de leur vie, on voit des gens sombrer dans la folie allongés sur le bitume à supplier jours et nuits. Comment ne pas remettre en question le modèle existant à la vue de telles disparités? Ces gens ont besoin d’un toit et l’architecte par son expérience, son ouverture sur le monde et sa culture doit trouver des réponses à ces logements de fortune. Il faut répondre à beaucoup et en peu de temps. A Thannal, les propriétaires des lieux et maîtres à penser à présent de la formation nous ont fait part d’une de leur situation compliqué au départ du projet et de comment il l’on réglé grâce à leur connaissances dans la construction dans un besoin de faire vite et bien. Ayant lâché leur logement indiens de ciment conventionnel; ils ont deux semaines pour s’implanter sur le nouveau terrain vierge qui deviendra Thannal avec pour ressource la terre du coin. Avec un chantier propre; ce sont des centaines de sacs biodégradables qu’ils remplissent de terre jusqu’à le tasser et le rendre dur comme une brique. Ces sacs sont entassés, compactés et liés par un mortier de terre puis, s’élevant à quatre mètres sont transpercés d’un pieu tous les mètres pour finaliser les liaisons. Une fois séchés un chaînage de


mélange terre est appliqué sur le dessus avant de mettre en place une charpente bambou recouverte d’un toit de feuille de cocotier à changer tous les deux ans. Cet ensemble monté en quelques semaines tient encore aujourd’hui et ils y ont installé d’abord salon, cuisine et deux chambres pour avec le temps rajouter une salle de bain avec toilettes, et multiples couches d’enduits terre pour isoler cette maison de première nécessité. Chaque jour les sacs se dégradent laissant toute la terre fusionner pour donner un mur de plus en plus solide prenant place sur un terrassement terre battue recouvert de carreaux de terre cuite. Mon expérience du métier d’architecte est très brève et je n’ai pas encore été confronté aux réalité d’un tel métier mais j’ai espoir que la façon de penser qui s’est imposée à moi au cours de ce voyage si naïve soit elle, se démocratise dans le milieu et en chaque personne. Chaque génération doit traiter de nouveau problème et a de nouvelles réponses à apporter ; le nôtre n’est plus un secret et l’architecte a pour moi un rôle immense à jouer dans la crise écologique, des matériaux, des ressources et une crise démographique mondiale qu’il ne peut plus nier.






jodhpur

udaipur

bir chitta

amritsar

jaisalmer

pushkar

jaipur

jodhpur

udaipur

bundi chittaurgarh goa


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.