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Pour les grands et les petits

Je vous assure que j’ai cherché! Je suis restée assise à regarder dans le vide pendant de longues minutes pour tenter de percer le secret du bonbon. Cette réflexion intense ne m’a menée nulle part. Le bonbon restait inaccessible et hautain pendant que j’essayais de lui faire endosser un rôle, de le faire devenir ce qu’il n’est pas. C’est de cette manière que j’en suis venue à penser que son rôle à lui c’est de ne servir à rien.

Ce ne serait pas si grave, il y a beaucoup de choses qui ne servent à rien, un peu comme vous et moi. Mais soyons gentils et aidons-le à trouver sa voie. Les bonbons servent sûrement à faire brailler les enfants devant les boulangeries, à colorer les rayons des supermarchés et à vous péter le foie. Le bonbon est une chose insaisissable dont la durée de vie, une fois le paquet ouvert, est assez limitée. C’est pourquoi il est difficile d’essayer de le définir. C’est une chose qui peut sembler mignonne et anodine, inutile même. Mais les bonbons ne monopoliseraient pas des rayons entiers dans les supermarchés s’ils étaient inutiles. Ils ont conquis le monde. Nous avons définitivement besoin d’eux. Mais que nous apportent-ils ? Un plaisir de l’instant, intense, rapide, éphémère. Il nous en faut toujours plus. Les bonbons vivent en communauté car ce n’est pas l’individu que nous convoitons, mais le régiment complet. Il y a manipulation par le manque, un besoin d’aligner les petits plaisirs pour tenter de conserver la sensation sur la durée. Mais le bonbon ne fait pas de promesses, sa communauté diminue et très vite il ne peut plus rien pour nous. C’est une extinction rapide et massive d’une espèce sans cesse en danger. La tragédie de la fin du paquet n’est plus très loin.

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Ces manipulateurs se rendent indispensables à nos yeux, ils nous montrent une version sucrée et acidulée de la vie avant de nous la reprendre la minute d’après. Comme toute chose, le bonbon ne dure pas*, il joue sur les contrastes, il sait parfaitement doser. Voilà que le paquet est vide, il va falloir l’accepter. Il va falloir gérer ce vif sentiment de manque, faire le deuil du bonbon ou en racheter. *exception pour la couille de mammouth !

Anouk Hubert

Sucrissime : jusqu’où notre gourmandise nous mènera-t-elle ?

‘‘ Pétillant ! Haut en couleur, doux comme un nuage… ou aussi collant que la confiture de votre tartine du matin, tombée fatalement du mauvais côté : le sucre prend de multiples formes, et il est partout. ’’ Certains compétiteurs, possédant visiblement une haute teneur en sucre dans le sang, ont voulu retranscrire leur passion pour cette molécule incroyable (constituée d’atomes de carbone, d’hydrogène et d’oxygène rappelons-le) à travers des records. Cependant, il est impossible d’en dresser le portrait exhaustif, car le monde du sucré est très vaste et polysémique. Ainsi, voici une petite sélection de records plus ou moins loufoques, qui, j’espère, égayeront votre journée !

Le sucre, c’est la vie. La preuve ! Grâce à lui, le Brésil exporte près de trente millions de tonnes de sucre chaque année. Il représente environ 50 % des exportations mondiales (chiffres datant de 2018 : l’Inde est en train de prendre la première place dans ce domaine actuellement). Ce géant de la production du sucre assure donc la subsistance de milliers de familles brésiliennes. Des familles, qui, cependant, ne peuvent rivaliser avec les Mexicains, premiers consommateurs de boissons sucrées. En effet, chaque habitant en boirait en moyenne 146,5 litres par an, soit trente-trois kilogrammes de sucre à boire annuellement ! Quant aux Européens, ils ne sont pas en reste : le français Nicolas Rieffel a créé un pain d’épice illustré de dix mètres de long et de cinq mètres de large en 2020, lors du festival du sucre d’Erstein. Pendant cet événement, plusieurs activités sont proposées autour du monde du sucre (Erstein possède une fabrique de sucre de betterave depuis 1894), dont des défilés de chars en sucre !

Être francophone constitue peut-être un enclin à la gourmandise, puisque l’on doit en outre à des Suisses la plus grande meringue du monde, en 1985 à Meiringen. Coïncidence ? Peut-être pas : l’origine de la meringue est assez controversée. Mesurant près d’un mètre de haut, la gourmandise géante avait été séchée dans une cabine de sauna, construite autour pour l’occasion. Néanmoins, question hauteur, on peut trouver encore mieux : l’œuf de Pâques le plus gros mesure plus de dix mètres de haut, en 2011, à Milan (désolée, je dévoile ainsi que les cloches de Pâques n’existent pas : cet œuf serait difficile à cacher). Pour celles et ceux qui lisent ce journal dans le froid, j’espère que savoir que la tour de gaufres la plus haute qui ait jamais existée mesure soixante-sept centimètres vous réchauffera le cœur (2018, Etats-Unis, et 2019, Liège). <3 La plus grande sucette au monde, elle, est californienne, et mesure environ cinq mètres de haut (2012). Je parle bien ici de sucette comestible, sinon elle mesurerait plutôt quarante-huit centimètres (chiffre très controversé d’ailleurs, mais nous n’entrerons pas dans les détails dans cet article). Si on veut arrêter de prendre trois kilogrammes à chaque ligne lue, et pour éviter de se faire arracher une dent aussi longue (3,9 cm) qu’un homme indien de 20 ans, en 2017, il conviendra de citer maintenant la plus grosse fraise au monde. Elle pèse presque 300 grammes et elle a été cultivée en Israël (2021). Enfin, l’ingénieur de 23 ans Will Cutbill détient le record du nombre de M&M’s empilés les uns sur les autres : cinq. Quelqu’un prêt à relever le défi ? Tous ces records, finalement, apparaissent un peu absurdes : pourquoi s’échiner à faire toujours plus grand, plus gros, plus rapide, plus haut ? Les personnes d’accord avec Épicure diraient peut-être que c’est dans la nature humaine parce que l’homme sans désir, ça n’existe pas. Quand cela concerne le sucre, on peut avoir l’impression que notre société actuelle est prise d’une sugar mania et qu’établir des records sert une sorte d’apologie à notre chère bonne vieille société de consommation. En effet, dans la plupart des cas, on ne sait pas ce que deviennent ces monstrueux amoncellements de sucre ! Mais il n’y a heureusement pas que ça. Certains de ces recordmen vous di16

Mais il n’y a heureusement pas que ça. Certains de ces recordmen vous diront que c’est pour la gloire, pour l’honneur d’avoir son nom inscrit dans le prestigieux Livre Guinness des records.

D’autres, comme Nicolas Rieffel cité précédemment, le font dans le cadre de la valorisation d’un patrimoine historique (le sucre comme symbole d’un monde industriel ayant marqué la mémoire des habitants) et d’un patrimoine immatériel, puisque le pain d’épice est une spécialité alsacienne depuis le Moyen-Âge. En plus de valoriser le patrimoine local, le pain d’épice géant est revendu deux euros la part tout au long du festival d’Erstein. En sachant que tout l’argent récolté est reversé à une association, l’image du record dans le domaine de la nourriture paraît redorée.

Maintenant, il n’y a plus qu’à aller acheter des M&M’s pour commencer à s’entraîner.

Solène

Sources pour les records principalement cités : * Agence de presse APEI. Il bat un record du monde en empilant 5 M&M’s. 9 juillet 2021, lavoixdunord.fr [en ligne] * RINCKEL, Céline. Un record du monde au Festival du sucre d’Erstein. 23 août 2019. topmusic.fr [en ligne]. * Collectif (Statista Research Departement), Exportation de sucre en volume dans le monde. 7 octobre 2019. fr.statista.com [en ligne]

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