Minimag 793

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Les Braqueuses Battues mais magnifiques N째793 -JUIllet2013 - WWW.FFBB.COM


LucIen legrand centre fédéral >

Par Julien Guérineau

A 65 ans, après 25 ans passés au sein de la structure du Centre Fédéral, à l’INSEP, Lucien Legrand a tiré sa révérence.

Je savais que ce poste, c’était la chance de ma vie et j’ai donné du 24 sur 24 au basket. Autour de Michel Rat et Lucien Legrand, de g à dr : Mopsus, Martin, Aubert, Bouzat, Zaegel, Risacher, Danné, Talbot, Halin, Moustin et Onnillon

46 BASKETBALLMAGAZINE

JF Molliere/FFBB

Septembre 1988

Musée du Basket

lulu, le grand départ

Novembre 1992 Sa vie n’a pas commencé en septembre 1988 sur le parquet de la salle Marie-Thérèse Eyquem de l’INSEP. Mais son nom est intimement attaché au lieu. Pendant 25 ans, Lucien Legrand aura vu défiler des dizaines de potentiels, d’abord comme entraîneur des cadets (1988-1999) puis comme directeur du Centre Fédéral. Mais le 1er juin dernier, le rideau est tombé sur son aventure au cœur du Bois de Vincennes. "J’ai essayé de m’y préparer", sourit-il. "Quand je voyais des collègues partir à la retraite je me disais : putain, je suis le prochain sur la liste ! Je me revois cadre technique en 83 et je me dis que tout est passé très vite. J’ai mis du temps à me dire que c’était fini." Mais depuis son jardin du Puy-enVelay, son nouveau pied à terre, il ne fait aucun doute que le Lot-et-Garonnais continuera à suivre avec attention les parcours de ses anciens protégés. Un objectif compliqué tant ils sont nombreux. Lulu a parfois la mémoire qui flanche mais il n’oublie pas ses tous premiers pas dans la structure fédérale. En mai 1988, Pierre Dao, le Directeur Technique National, prend la décision de réunir, à l’INSEP, 13 éléments nés en 1972 (à l’exception de Sébastien Gomez, un an plus jeune). Les centres de formation de l’élite (N1) ont été priés de prêter leurs meilleurs éléments pour un an seulement, en prévision du Championnat d’Europe cadets de l’été 89. La grande nouveauté tient au fait que ces jeunes gens disputeront sous le même maillot 20 matches de Nationale 3. Cherbourg, Rueil, Fécamp, Charenton ou encore Le Vésinet d’un certain George Eddy sont les premiers adversaires de la génération emmenée par Stéphane Risacher et Frédéric Fauthoux. L’entraîneur choisi pour les guider ? Lucien Legrand, 40 ans, en charge d’une section sports études à Castres, du club local qui évolue en N3 et déjà familier des staffs des équipes de France jeunes. "J’étais au bon endroit au bon moment",

Avec Francis Jordane (à g) et Jean-Pierre de Vincenzi (à dr)

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LucIen legrand centre fédéral >

Par Julien Guérineau

A 65 ans, après 25 ans passés au sein de la structure du Centre Fédéral, à l’INSEP, Lucien Legrand a tiré sa révérence.

Je savais que ce poste, c’était la chance de ma vie et j’ai donné du 24 sur 24 au basket. Autour de Michel Rat et Lucien Legrand, de g à dr : Mopsus, Martin, Aubert, Bouzat, Zaegel, Risacher, Danné, Talbot, Halin, Moustin et Onnillon

46 BASKETBALLMAGAZINE

JF Molliere/FFBB

Septembre 1988

Musée du Basket

lulu, le grand départ

Novembre 1992 Sa vie n’a pas commencé en septembre 1988 sur le parquet de la salle Marie-Thérèse Eyquem de l’INSEP. Mais son nom est intimement attaché au lieu. Pendant 25 ans, Lucien Legrand aura vu défiler des dizaines de potentiels, d’abord comme entraîneur des cadets (1988-1999) puis comme directeur du Centre Fédéral. Mais le 1er juin dernier, le rideau est tombé sur son aventure au cœur du Bois de Vincennes. "J’ai essayé de m’y préparer", sourit-il. "Quand je voyais des collègues partir à la retraite je me disais : putain, je suis le prochain sur la liste ! Je me revois cadre technique en 83 et je me dis que tout est passé très vite. J’ai mis du temps à me dire que c’était fini." Mais depuis son jardin du Puy-enVelay, son nouveau pied à terre, il ne fait aucun doute que le Lot-et-Garonnais continuera à suivre avec attention les parcours de ses anciens protégés. Un objectif compliqué tant ils sont nombreux. Lulu a parfois la mémoire qui flanche mais il n’oublie pas ses tous premiers pas dans la structure fédérale. En mai 1988, Pierre Dao, le Directeur Technique National, prend la décision de réunir, à l’INSEP, 13 éléments nés en 1972 (à l’exception de Sébastien Gomez, un an plus jeune). Les centres de formation de l’élite (N1) ont été priés de prêter leurs meilleurs éléments pour un an seulement, en prévision du Championnat d’Europe cadets de l’été 89. La grande nouveauté tient au fait que ces jeunes gens disputeront sous le même maillot 20 matches de Nationale 3. Cherbourg, Rueil, Fécamp, Charenton ou encore Le Vésinet d’un certain George Eddy sont les premiers adversaires de la génération emmenée par Stéphane Risacher et Frédéric Fauthoux. L’entraîneur choisi pour les guider ? Lucien Legrand, 40 ans, en charge d’une section sports études à Castres, du club local qui évolue en N3 et déjà familier des staffs des équipes de France jeunes. "J’étais au bon endroit au bon moment",

Avec Francis Jordane (à g) et Jean-Pierre de Vincenzi (à dr)

JUIllet2013 47


Avec Tony Parker

Bellenger/IS/FFBB

Camp TGG 2012

48 BASKETBALLMAGAZINE

Pour obtenir cette confiance il faut être respectable et exemplaire. Ensuite, chaque joueur fonctionne différemment. Certains, Tony Parker par exemple, appliquent immédiatement ce qu’on demande. Boris Diaw, lui, te questionne en permanence : pourquoi ce choix, pourquoi celui-là ? D’autres c’était à la limite du bourre-pif." Legrand n’en viendra jamais jusque là et s’éloignera des bancs de touche du Centre Fédéral en 1999 et de celui de l’équipe de France U16 en 2004. Un départ en forme d’apothéose avec un titre européen (le premier) gagné grâce aux premiers pas d’une génération dorée : Nicolas Batum, Ludovic Vaty, Antoine Diot, Alexis Ajinça, Adrien Moerman, Abdoulaye M’Baye et consorts. Au CFBB, l’entraîneur est devenu Directeur d’un pôle France qui compte désormais quatre équipes. "C’est une succession de petits problèmes à gérer : un n’a pas été au petit-déjeuner, l’autre est arrivé en retard en études, un troisième s’est blessé à l’entraînement. Une somme de détails. Mais le fait de ne plus être leur coach, j’ai également pu en prendre certains entre quatre yeux : tu triches et pendant ce temps, un autre moins doué que toi va te passer devant. Le don seul ne peut te permettre de réussir. J’étais dur… mais paternellement. Je m’en fous que tu ne m’aimes pas aujourd’hui mais j’espère que ça te servira plus tard." Ses paroles n’auront pas toujours été entendues. Les conseils du directeur, "pas très intéressé par l’école dans ma jeunesse", concernant le double-projet sportif et scolaire, ont parfois été ignorés. Mais malgré les regrets liés à ces potentiels jamais exploités, Lucien Legrand n’aura, pendant un quart de siècle, jamais dévié du mandat qui lui avait été confié : préparer le renouvellement de l’équipe de France. Et à l’heure de franchir une dernière fois les grilles de l’INSEP, il s’est retourné sur le chemin parcouru. Lui qui avait débuté sa mission avec le soutien de Michel Rat et Willy Balestero a quitté une structure forte de onze entraîneurs, d’un Directeur, d’une secrétaire et d’un préparateur physique : "Que c’est agréable d’avoir participé à ça !"

Bellenger/IS/FFBB

▼ En 2011

Bellenger/IS/FFBB

Juillet 1995 ▲

JF Molliere

Avec l'équipe de France Juniors

admet le principal intéressé. "La seule condition que j’ai posée c’est que je sois logé à l’INSEP en permanence. Interne, comme les joueurs." Direction le Bois de Vincennes donc où le maître des lieux, Michel Rat, le prend sous son aile. Pendant onze ans, Legrand va donc coacher ceux qu’on appelle à l’époque "les cadets de l’INSEP" et voit défiler les futurs internationaux : Fabien Dubos, Frédéric Weis, Jérôme Moïso, Joseph Gomis, Mamoutou Diarra, Tony Parker, Boris Diaw, Ronny Turiaf. Un véritable sacerdoce qui n’est pas sans conséquence sur sa vie familiale. "Chaque dimanche je quittais ma chambre à l’INSEP et je prenais le bus pour Orly, prendre le premier avion à destination de Toulouse. Je retrouvais ma voiture sur le parking et j’arrivais chez moi vers 12h30 pour passer à table avec les enfants. Le mardi matin, 4h00, je quittais mon domicile pour rentrer sur Paris avec le vol de 6h00 pour faire l’entraînement du matin. Et je l’ai fait jusqu’en 1999." En parallèle, Lucien Legrand dirige également l’équipe nationale U16 (8 championnats d’Europe), fait un détour par les U18 (Championnat du Monde 1995) et officie sur le banc des Bleus en compagnie de Jean-Pierre de Vincenzi, en tant qu’assistant de Francis Jordane. Pour l’ancien joueur du Toulouse Université Club puis de Castres, dont le premier amour à Aiguillon était l’athlétisme, c’est l’aboutissement d’un rêve. "Je savais que ce poste, c’était la chance de ma vie et j’ai donné du 24 sur 24 au basket." Sur le terrain, le joueur Legrand n’a jamais fait dans la dentelle. "Je n’étais pas un casseur mais je dois reconnaître que j’étais assez dur", rigole-t-il. "J’avais une énergie terrible. J’avais du cœur." Pas question donc qu’une fois devenu coach, ses ouailles trahissent certains principes sous son autorité. "J’ai toujours voulu être exemplaire vis-à-vis des jeunes que j’entraînais. J’étais avec eux pour la prépa physique : les footings, les pompes. C’est vrai que j’étais un peu fêlé. Mais quoi de mieux pour réussir que d’être fort dans sa tête, bien physiquement et dans une relation de confiance avec un coach ?

Lui qui avait débuté sa mission avec le soutien de Michel Rat et Willy Balestero a quitté une structure forte de onze entraîneurs, d’un Directeur, d’une secrétaire et d’un préparateur physique.

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Avec Tony Parker

Bellenger/IS/FFBB

Camp TGG 2012

48 BASKETBALLMAGAZINE

Pour obtenir cette confiance il faut être respectable et exemplaire. Ensuite, chaque joueur fonctionne différemment. Certains, Tony Parker par exemple, appliquent immédiatement ce qu’on demande. Boris Diaw, lui, te questionne en permanence : pourquoi ce choix, pourquoi celui-là ? D’autres c’était à la limite du bourre-pif." Legrand n’en viendra jamais jusque là et s’éloignera des bancs de touche du Centre Fédéral en 1999 et de celui de l’équipe de France U16 en 2004. Un départ en forme d’apothéose avec un titre européen (le premier) gagné grâce aux premiers pas d’une génération dorée : Nicolas Batum, Ludovic Vaty, Antoine Diot, Alexis Ajinça, Adrien Moerman, Abdoulaye M’Baye et consorts. Au CFBB, l’entraîneur est devenu Directeur d’un pôle France qui compte désormais quatre équipes. "C’est une succession de petits problèmes à gérer : un n’a pas été au petit-déjeuner, l’autre est arrivé en retard en études, un troisième s’est blessé à l’entraînement. Une somme de détails. Mais le fait de ne plus être leur coach, j’ai également pu en prendre certains entre quatre yeux : tu triches et pendant ce temps, un autre moins doué que toi va te passer devant. Le don seul ne peut te permettre de réussir. J’étais dur… mais paternellement. Je m’en fous que tu ne m’aimes pas aujourd’hui mais j’espère que ça te servira plus tard." Ses paroles n’auront pas toujours été entendues. Les conseils du directeur, "pas très intéressé par l’école dans ma jeunesse", concernant le double-projet sportif et scolaire, ont parfois été ignorés. Mais malgré les regrets liés à ces potentiels jamais exploités, Lucien Legrand n’aura, pendant un quart de siècle, jamais dévié du mandat qui lui avait été confié : préparer le renouvellement de l’équipe de France. Et à l’heure de franchir une dernière fois les grilles de l’INSEP, il s’est retourné sur le chemin parcouru. Lui qui avait débuté sa mission avec le soutien de Michel Rat et Willy Balestero a quitté une structure forte de onze entraîneurs, d’un Directeur, d’une secrétaire et d’un préparateur physique : "Que c’est agréable d’avoir participé à ça !"

Bellenger/IS/FFBB

▼ En 2011

Bellenger/IS/FFBB

Juillet 1995 ▲

JF Molliere

Avec l'équipe de France Juniors

admet le principal intéressé. "La seule condition que j’ai posée c’est que je sois logé à l’INSEP en permanence. Interne, comme les joueurs." Direction le Bois de Vincennes donc où le maître des lieux, Michel Rat, le prend sous son aile. Pendant onze ans, Legrand va donc coacher ceux qu’on appelle à l’époque "les cadets de l’INSEP" et voit défiler les futurs internationaux : Fabien Dubos, Frédéric Weis, Jérôme Moïso, Joseph Gomis, Mamoutou Diarra, Tony Parker, Boris Diaw, Ronny Turiaf. Un véritable sacerdoce qui n’est pas sans conséquence sur sa vie familiale. "Chaque dimanche je quittais ma chambre à l’INSEP et je prenais le bus pour Orly, prendre le premier avion à destination de Toulouse. Je retrouvais ma voiture sur le parking et j’arrivais chez moi vers 12h30 pour passer à table avec les enfants. Le mardi matin, 4h00, je quittais mon domicile pour rentrer sur Paris avec le vol de 6h00 pour faire l’entraînement du matin. Et je l’ai fait jusqu’en 1999." En parallèle, Lucien Legrand dirige également l’équipe nationale U16 (8 championnats d’Europe), fait un détour par les U18 (Championnat du Monde 1995) et officie sur le banc des Bleus en compagnie de Jean-Pierre de Vincenzi, en tant qu’assistant de Francis Jordane. Pour l’ancien joueur du Toulouse Université Club puis de Castres, dont le premier amour à Aiguillon était l’athlétisme, c’est l’aboutissement d’un rêve. "Je savais que ce poste, c’était la chance de ma vie et j’ai donné du 24 sur 24 au basket." Sur le terrain, le joueur Legrand n’a jamais fait dans la dentelle. "Je n’étais pas un casseur mais je dois reconnaître que j’étais assez dur", rigole-t-il. "J’avais une énergie terrible. J’avais du cœur." Pas question donc qu’une fois devenu coach, ses ouailles trahissent certains principes sous son autorité. "J’ai toujours voulu être exemplaire vis-à-vis des jeunes que j’entraînais. J’étais avec eux pour la prépa physique : les footings, les pompes. C’est vrai que j’étais un peu fêlé. Mais quoi de mieux pour réussir que d’être fort dans sa tête, bien physiquement et dans une relation de confiance avec un coach ?

Lui qui avait débuté sa mission avec le soutien de Michel Rat et Willy Balestero a quitté une structure forte de onze entraîneurs, d’un Directeur, d’une secrétaire et d’un préparateur physique.

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sommaire >

Pour suivre l’actualité des clubs et des équipes de France, revivre les moments historiques du basket ou encore retrouver des conseils techniques et pratiques.

SOMMAIRE N°793 JUILLET2013

06

06 L’EURO AU JOUR LE JOUR Du 12 juin au 1er juillet suivez les Bleues pas à pas

26 LES PORTRAITS DES BRAQUEUSES

32 JOKER NOUVEAU PARTENAIRE DE LA FFBB

34 PRéPARATION EUROBASKET Vincent Collet a choisi 17 joueurs candidats à la Slovénie

42

40

LES CHAMPIONS DE France 2013

46 LUCIEN LEGRAND Le légendaire directeur du CFBB prend sa retraite

32

74,20 83,50

34

46 JUIllet2013

5


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