Minimag 796

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Johan Petro, la rédemption

Axel Bouteille L’arbitrage de haut niveau Femmes sur tous les terrains

N°796 - novembre2013 - WWW.FFBB.COM


ma carrière PAR Johan petro >

"Le problème en Bleu c’était ma manière de voir les choses" Propos recueillis par Julien Guérineau

Presse Sports / Frad

Après quatre ans d’absence, Johan Petro (2,11 m, 26 ans) a fait son retour en équipe de France cet été et a largement contribué à la conquête du titre de champion d’Europe. Cette saison il va devenir le deuxième français, après Jérôme Moïso, à évoluer dans le championnat chinois. L’ancien grand espoir du basket français revient sur ses débuts, sa carrière en NBA et ses rendez-vous manqués avec les Bleus.

Carnaval Déboulé Bourg de Baie-Mahault

A l'école Louis Andréa, classe de CP 1992

Photos D.R.

A ses débuts avec Baie-Mahault en 1998

10 BASKETBALLMAGAZINE

Novembre 2002, au CFBB

"Je suis né à Paris dans le 14e arrondissement. Et j’y ai vécu pendant six ans avant que mon père soit muté à Saint-Martin, une île qui appartient pour moitié à la France, pour moitié aux Pays-Bas et qui se situe à 45 minutes d’avion de la Guadeloupe. J’y habitais à Marigot. J’y suis retourné il y a quatre ans… même si je n’ai plus d’attaches sur place. Que quelques souvenirs. Nous sommes retournés voir la maison où je vivais et le gros camion EDF de mon père est toujours garé là. Nous sommes restés moins d’un an avant qu’il obtienne une nouvelle mutation en Guadeloupe. Donc pour résumer je dirais que je suis Parisien d’origine antillaise. En région parisienne nous avons bougé : Vitry, Bagneux, Villejuif. Mais je n’ai jamais touché un ballon de basket. Le premier

ballon c’était à 11 ans, en Guadeloupe. J’avais tendance à suivre ce que faisait mon père comme sport : du foot, du basket, du karaté. Il mesure 1,90 m et ma mère fait 1,76 m. Donc je ne me plains pas. J’ai toujours été le plus grand. Sur les photos de classe, il y avait toujours un mec derrière qui dépasse : c’était moi. On m’a un peu saoulé pour que je me mette au basket. Mon père surtout. Il pensait que c’était un sport qui allait m’aider. Moi j’avais plutôt tendance à rester à la maison plutôt que d’aller chercher des activités avec des copains. Mais ça n’a pas trop marché. Il m’a emmené dans le club de Baie-Mahault et ce n’était pas pour moi. Ça ne passait pas. J’ai tenu deux mois mais je me sentais contraint et je n’ai pas aimé. J’ai préféré arrêter. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé mais bizarrement ça m’a manqué. J’ai

Johan Petro repères 1986 Naissance à Paris 2000 Entrée au Centre Fédéral

2005 25e choix de la draft NBA

2006 Première sélection équipe de France

2013

Champion d’Europe

novembre2013

11


ma carrière PAR Johan petro >

"Le problème en Bleu c’était ma manière de voir les choses" Propos recueillis par Julien Guérineau

Presse Sports / Frad

Après quatre ans d’absence, Johan Petro (2,11 m, 26 ans) a fait son retour en équipe de France cet été et a largement contribué à la conquête du titre de champion d’Europe. Cette saison il va devenir le deuxième français, après Jérôme Moïso, à évoluer dans le championnat chinois. L’ancien grand espoir du basket français revient sur ses débuts, sa carrière en NBA et ses rendez-vous manqués avec les Bleus.

Carnaval Déboulé Bourg de Baie-Mahault

A l'école Louis Andréa, classe de CP 1992

Photos D.R.

A ses débuts avec Baie-Mahault en 1998

10 BASKETBALLMAGAZINE

Novembre 2002, au CFBB

"Je suis né à Paris dans le 14e arrondissement. Et j’y ai vécu pendant six ans avant que mon père soit muté à Saint-Martin, une île qui appartient pour moitié à la France, pour moitié aux Pays-Bas et qui se situe à 45 minutes d’avion de la Guadeloupe. J’y habitais à Marigot. J’y suis retourné il y a quatre ans… même si je n’ai plus d’attaches sur place. Que quelques souvenirs. Nous sommes retournés voir la maison où je vivais et le gros camion EDF de mon père est toujours garé là. Nous sommes restés moins d’un an avant qu’il obtienne une nouvelle mutation en Guadeloupe. Donc pour résumer je dirais que je suis Parisien d’origine antillaise. En région parisienne nous avons bougé : Vitry, Bagneux, Villejuif. Mais je n’ai jamais touché un ballon de basket. Le premier

ballon c’était à 11 ans, en Guadeloupe. J’avais tendance à suivre ce que faisait mon père comme sport : du foot, du basket, du karaté. Il mesure 1,90 m et ma mère fait 1,76 m. Donc je ne me plains pas. J’ai toujours été le plus grand. Sur les photos de classe, il y avait toujours un mec derrière qui dépasse : c’était moi. On m’a un peu saoulé pour que je me mette au basket. Mon père surtout. Il pensait que c’était un sport qui allait m’aider. Moi j’avais plutôt tendance à rester à la maison plutôt que d’aller chercher des activités avec des copains. Mais ça n’a pas trop marché. Il m’a emmené dans le club de Baie-Mahault et ce n’était pas pour moi. Ça ne passait pas. J’ai tenu deux mois mais je me sentais contraint et je n’ai pas aimé. J’ai préféré arrêter. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé mais bizarrement ça m’a manqué. J’ai

Johan Petro repères 1986 Naissance à Paris 2000 Entrée au Centre Fédéral

2005 25e choix de la draft NBA

2006 Première sélection équipe de France

2013

Champion d’Europe

novembre2013

11


Les choses sont allées très vite à partir de là. J’avais la chance d’être grand et coordonné. J’ai fait quelques compétitions avec les jeunes du club et on m’a repéré. Je suis

J’attendais l’ouverture et Patrick Cham l’a été. On nous avait prévenus qu’un entraîneur d’une école parisienne, l’INSEP, venait à Baie-Mahaut. On m’a fait rentrer au Centre Fédéral en 2000, avec un an d’avance. Richard Billant est venu me chercher à République et direction le Bois de Vincennes. Je n’avais aucune idée de ce qu’était la structure. Ma culture basket était 0. Je connaissais Michael Jordan et Scottie Pippen, c’est tout. La France en finale des Jeux Olympiques ? Je n’étais même pas au courant. Il a fallu créer une structure particulière pour moi puisque la classe commence en seconde au CFBB et moi j’étais en troisième. Madame Mathat, une ancienne professeure de français qui gérait la bibliothèque de l’INSEP, s’est occupée de moi. J’avoue que je n’étais pas franchement ravi de passer mon temps en cours particulier. Il y a des jours où tu n’as pas envie et moi il fallait que je l’ai tous les jours l’envie. Je ne pouvais pas me cacher. Ce n’était pas évident parce que j’étais assez nostalgique de ma famille. Mais je pense que ça m’a beaucoup servi. Je suis resté seul pendant un an. Mon père a suivi, en pré-retraite, un an plus tard. Puis ma mère.

"On m’a un peu saoulé pour que je me mette au basket. Mon père surtout. Mais ça n’a pas trop marché. J’ai préféré arrêter."

12 BASKETBALLMAGAZINE

FIBA Europe

Juillet 2004, Euro U18, élu dans le cinq idéal

Octobre 2004, 2e saison avec Pau-Orthez

Juin 2005, quelques jours avant la draft

4.000 euros par mois pour ses débuts

Julien Guérineau

Avril 2003, signature à Pau-Orthez

Presses Sports / Fevre

Juillet 2002, Euro U18

Presses Sports / Fablet

Le Real et le Barça à 14 ans

parti faire un tournoi à Cholet, un autre à Pacé avec une sélection de Guadeloupe. Des recruteurs commençaient à venir voir mes parents. Et moi j’étais déjà impatient de partir. Il fallait que je fasse quelque chose de ce don que j’avais. Mais mes parents ne m’en parlaient pas pour éviter que je pète un câble. Si des choses se passaient j’étais le dernier au courant. Je sais que des représentants du Real Madrid et du Barça sont venus. Je savais que pour évoluer il fallait partir. Mais ma mère était focalisé sur mon bien être. Il a fallu que je réussisse à la convaincre.

A l’époque il n’y avait pas de championnat de France cadets pour les premières années. C’était directement la Nationale 1. Et moi j’avais un an d’avance ! La raison pour laquelle tu as intégré le CFBB c’est que tu es un potentiel. Que tu fais des choses que d’autres jeunes de ton âge ne font pas. Mais le samedi soir en N1, tout ça je ne le voyais plus. Mentalement c’était dur. Et même à l’entraînement. J’ai 14 ans et devant moi j’ai des joueurs de 1718 ans. C’est comme ça que tu forges un caractère, sinon tu te fais écraser. Ronny Turiaf faisait sa dernière année au CFBB. Jusqu’à aujourd’hui, Ronny a toujours été quelqu’un qui prend les gens sous son aile. C’est ce qu’il a fait avec moi alors que j’étais un peu perdu. Tout ce que j’aurais aimé qu’il fasse, il l’a fait. A l’été 2001 je suis sélectionné en équipe de France cadets avec la génération 1985 (ndlr : Ali Traore, Yannick Bokolo, Rodrigue Mels, Pape-Philippe Amagou…) pour le championnat d’Europe (6,0 pts, 7,0 rbds en 15’). Je n’ai pas trop de souvenirs de cette compétition. C’est amusant parce

Presses Sports / Desprez

2000, entrée au Centre Fédéral avec Olivier Gouez (à g.) et Hugues Janel (à dr.)

Bellenger / IS / FFBB

commencé à regarder un peu de basket à la télévision. De la NBA sur Canal +. Et je me suis dit : allez, j’y retourne. Et en début d’année 1998, pour mes 12 ans, ça repart. Mon oncle, Gilbert Petro, a été mon premier coach.


Les choses sont allées très vite à partir de là. J’avais la chance d’être grand et coordonné. J’ai fait quelques compétitions avec les jeunes du club et on m’a repéré. Je suis

J’attendais l’ouverture et Patrick Cham l’a été. On nous avait prévenus qu’un entraîneur d’une école parisienne, l’INSEP, venait à Baie-Mahaut. On m’a fait rentrer au Centre Fédéral en 2000, avec un an d’avance. Richard Billant est venu me chercher à République et direction le Bois de Vincennes. Je n’avais aucune idée de ce qu’était la structure. Ma culture basket était 0. Je connaissais Michael Jordan et Scottie Pippen, c’est tout. La France en finale des Jeux Olympiques ? Je n’étais même pas au courant. Il a fallu créer une structure particulière pour moi puisque la classe commence en seconde au CFBB et moi j’étais en troisième. Madame Mathat, une ancienne professeure de français qui gérait la bibliothèque de l’INSEP, s’est occupée de moi. J’avoue que je n’étais pas franchement ravi de passer mon temps en cours particulier. Il y a des jours où tu n’as pas envie et moi il fallait que je l’ai tous les jours l’envie. Je ne pouvais pas me cacher. Ce n’était pas évident parce que j’étais assez nostalgique de ma famille. Mais je pense que ça m’a beaucoup servi. Je suis resté seul pendant un an. Mon père a suivi, en pré-retraite, un an plus tard. Puis ma mère.

"On m’a un peu saoulé pour que je me mette au basket. Mon père surtout. Mais ça n’a pas trop marché. J’ai préféré arrêter."

12 BASKETBALLMAGAZINE

FIBA Europe

Juillet 2004, Euro U18, élu dans le cinq idéal

Octobre 2004, 2e saison avec Pau-Orthez

Juin 2005, quelques jours avant la draft

4.000 euros par mois pour ses débuts

Julien Guérineau

Avril 2003, signature à Pau-Orthez

Presses Sports / Fevre

Juillet 2002, Euro U18

Presses Sports / Fablet

Le Real et le Barça à 14 ans

parti faire un tournoi à Cholet, un autre à Pacé avec une sélection de Guadeloupe. Des recruteurs commençaient à venir voir mes parents. Et moi j’étais déjà impatient de partir. Il fallait que je fasse quelque chose de ce don que j’avais. Mais mes parents ne m’en parlaient pas pour éviter que je pète un câble. Si des choses se passaient j’étais le dernier au courant. Je sais que des représentants du Real Madrid et du Barça sont venus. Je savais que pour évoluer il fallait partir. Mais ma mère était focalisé sur mon bien être. Il a fallu que je réussisse à la convaincre.

A l’époque il n’y avait pas de championnat de France cadets pour les premières années. C’était directement la Nationale 1. Et moi j’avais un an d’avance ! La raison pour laquelle tu as intégré le CFBB c’est que tu es un potentiel. Que tu fais des choses que d’autres jeunes de ton âge ne font pas. Mais le samedi soir en N1, tout ça je ne le voyais plus. Mentalement c’était dur. Et même à l’entraînement. J’ai 14 ans et devant moi j’ai des joueurs de 1718 ans. C’est comme ça que tu forges un caractère, sinon tu te fais écraser. Ronny Turiaf faisait sa dernière année au CFBB. Jusqu’à aujourd’hui, Ronny a toujours été quelqu’un qui prend les gens sous son aile. C’est ce qu’il a fait avec moi alors que j’étais un peu perdu. Tout ce que j’aurais aimé qu’il fasse, il l’a fait. A l’été 2001 je suis sélectionné en équipe de France cadets avec la génération 1985 (ndlr : Ali Traore, Yannick Bokolo, Rodrigue Mels, Pape-Philippe Amagou…) pour le championnat d’Europe (6,0 pts, 7,0 rbds en 15’). Je n’ai pas trop de souvenirs de cette compétition. C’est amusant parce

Presses Sports / Desprez

2000, entrée au Centre Fédéral avec Olivier Gouez (à g.) et Hugues Janel (à dr.)

Bellenger / IS / FFBB

commencé à regarder un peu de basket à la télévision. De la NBA sur Canal +. Et je me suis dit : allez, j’y retourne. Et en début d’année 1998, pour mes 12 ans, ça repart. Mon oncle, Gilbert Petro, a été mon premier coach.


Octobre 2005, débuts en NBA avec les Sonics

14 BASKETBALLMAGAZINE

Photos NBAE/Getty Images

en NBA et c’est clair que cela a pesé dans la balance. Quand je suis venu en visite, Florent Pietrus était là. Mickaël Pietrus et Boris Diaw étaient sur le départ pour la NBA. Ce que je voulais c’était une équipe qui faisait jouer les jeunes. Je ne voulais pas passer de 35 minutes en N1 à ne pas jouer en pro. Mais c’est ce qui est arrivé. Pau c’est mon premier chèque comme professionnel. Je touchais 4.000 euros par mois. A 17 ans. Presque le salaire de mon père et ma mère réunis.

Plus jeune titulaire de l’histoire des Sonics Ce qui s’est passé à Pau c’était une preview de ma carrière. J’arrive dans une équipe qui est double championne de France. Frédéric Sarre est en place mais il se fait débarquer et Didier Gadou le remplace. Forcément quand un nouveau coach arrive, avec la pression, il préfère se reposer sur des vétérans. Responsabiliser les jeunes c’était ce que Claude Bergeaud avait su faire. J’ai très peu joué (3,1 pts, 3,3 rbds en 9’, 15 matches joués) et pourtant le plan était de me présenter à la draft dès la première année. Je ne l’ai pas fait. Avant l’Euro juniors 2004 mon agent m’a va i t incité à m’ i n scrire en me disant

"je n’avais pas compris que ce n’était pas à moi de trouver un rythme mais d’aider l’équipe de France à trouver le sien. Ma mentalité n’était pas la bonne." qu’il avait une garantie en 5e position. J’ai pris peur, je n’étais pas convaincu de ce qu’il me disait. Je paniquais. Je n’y ai pas cru alors que des années plus tard des dirigeants NBA m’ont confirmé que c’était vrai. Et après ma deuxième année où mes minutes ont été très inconstantes, ma cote avait baissé. Finalement je suis drafté en 25e position par Seattle. Et c’est long comme attente. Surtout que mon workout avec eux n’avaient pas été exceptionnel alors que les Lakers m’avaient fait venir deux fois à Los Angeles pour faire un workout avec Andrew Bynum. Ils avaient des doutes sur ses genoux (ndlr : finalement choisi en 10e position). Comme rookie je montre des choses. Je crois que j’étais le plus jeune titulaire de l’histoire des Sonics. Ensuite Kevin Durant est arrivé et m’a dégagé (il rigole). J’étais très motivé parce que je voulais prouver que j’aurais dû avoir plus de temps de jeu en France et que j’avais fait le bon choix en partant. A Seattle j’ai vécu les trois meilleures années de ma carrière. Je jouais suffisamment pour pouvoir produire et apprendre. Parce que des fautes, j’en faisais ! Le physique des gars là-bas ! Moi je me cognais Shaq à l’époque. Et le vrai ! Ce n’était pas évident. Mais le temps de jeu était là. Que je sois titulaire ou pas. J’étais serein, surtout avec Bob Hill qui m’a vraiment fait confiance.

Malaise au Mondial

Steenkeste/FFBB

En 2006 je suis appelé en équipe de France pour la préparation au Mondial. Une fois la préparation bien entamée,

Claude Bergeaud nous convoque, Cyril Julian et moi, pour nous dire qu’il ne sait pas qui sélectionner et qu’il fallait que nous allions tous les deux en Chine pour les derniers matches avant le Mondial, afin qu’il prenne sa décision. Aller jusqu’en Chine alors que je pensais que c’était moi qui allait sauter… Pffouuu… C’était Cyril Julian quand même ! Donc je n’étais pas forcément enchanté à l’idée de faire 16 heures d’avion pour me faire couper. Ça fait un mois et demi qu’on est ensemble, le coach doit quand même avoir sa petite idée. D’un autre côté j’étais surmotivé en pensant que si son idée était déjà faite, j’allais la changer. Si je sautais, je voulais qu’on ne comprenne pas pourquoi. C’était mon état d’esprit. Il y avait trois matches en Chine. Je joue le premier. Cyril le deuxième. Puis nous sommes alignés pour le troisième. Quand Claude Bergeaud m’appelle, je suis prêt à aller au combat. Ce que j’ai montré a dû lui plaire et il m’a gardé. Sans doute a-t-il aussi pensé que je n’avais que 20 ans et que j’allais être là pour longtemps. Mais moi je ne les voyais pas les 20 ans. Ce que je voyais c’était 40 matches comme titulaire en NBA. Donc être mis dans une situation comme cellelà, de concurrence, l’ego en prend un coup. Et je pense que mon problème en équipe de France vient de là. J’estimais que la sélection m’était due. Mais ce n’était pas le cas. Pas plus qu’en 2009. Et ça n’était pas le cas en 2013. Après autant d’échecs alors que tu estimes que tu dois être en équipe de France, c’est qu’il y a un problème. Et le problème c’était ma manière de voir les choses.

Steenkeste/FFBB

28 juin 2005, 25e choix de la draft NBA

que c’est la même chose pour l’Euro juniors 2002 (8,3 pts, 6,0 rbds en 21’) avec la génération 1984 (ndlr : Terence Parker, Pierre-Yves Guillard, Maxime Renaud, Olivier Gouez…). En fait je crois que je prenais la température pour la compétition avec ma génération, l’Euro juniors 2004. Celle-là je voulais la dominer. Quand on me parle d’équipe de France jeunes, je n’ai que celle de la génération 1986 en tête. Le basket était fluide, pensé pour chaque joueur. Je prends le rebond, passe pour Mickaël Mokongo, Souarata Cissé dans l’aile pour finir la contreattaque. On avait commencé la phase de qualification à l’été 2003 avec Pierre Vincent (17,8 pts, 10,8 rbds, 2,4 cts en cinq matches) qui nous abandonne ensuite lâchement pour Bourges (il rigole). Richard Billant lui succède et en avril 2004 on dispute la deuxième phase de qualification. Je m’en rappelle bien parce que je l’avais mal vécue. Et c’est depuis que je n’écoute plus rien. Le premier match contre la Lettonie, beaucoup de monde en avait parlé puisque c’était face à Andris Biedrins (ndlr : aujourd’hui aux Golden State Warriors). Je n’ai pas fait ce que j’aurais voulu (8 pts à 3/11, 5 rbds contre 21 pts, 16 rbds, 7 ints, 4 cts pour Biedrins) et cela ne se serait pas passé comme ça si je n’avais pas autant fait attention à ce qui se disait autour de ce match. A l’Euro, on termine sur le podium, médaille de bronze. Des hauts et des bas ? J’ai surtout eu un bas contre la Turquie en demi-finale. Je fais deux fautes rapidement mais j’aurais voulu jouer plus longtemps (6 pts en 22’). J’étais frustré, en colère. J’étais persuadé qu’on serait champions d’Europe. Et je savais qu’on allait me dire que c’était ma faute. Ça m’a fait particulièrement chier de ne pas pouvoir jouer, de ne pas suffisamment jouer. C’est vraiment un mauvais souvenir. Heureusement qu’on va chercher le bronze contre les Italiens (24 points et 22 rebonds). Lors ma dernière année au CFBB en 2002/03 j’avais été plus posé, relax, sûr de mon jeu même s’il n’était pas encore très affiné. Je sentais que j’étais un pilier de l’équipe. Je signe à Pau-Orthez à l’été 2003. J’avais fait des visites à Pau, l’ASVEL et Cholet. J’avais déjà un agent. Au CFBB on va dire que ce n’était pas "non autorisé" à l’époque. Les règlements ont changé après mon départ. Ce qui n’est pas plus mal d’ailleurs. Pau, ça s’est décidé au feeling. J’ai toujours fonctionné comme ça. Le club avait déjà envoyé des joueurs

FFBB/Canet

ma carrière PAR Johan petro >

Juillet 2006, 1ère sélection en bleu

Mondial 2006, au Japon

Cela se ressentait sur le terrain. Au Mondial, être dans un rôle de soutien, je ne savais pas comment le gérer. En quart de finale contre la Grèce par exemple, je prends des shoots que je ne suis pas censé prendre, tout simplement parce que je ne suis pas dans le rythme. Mais encore une fois je n’avais pas compris que ce n’était

novembre2013 15


Octobre 2005, débuts en NBA avec les Sonics

14 BASKETBALLMAGAZINE

Photos NBAE/Getty Images

en NBA et c’est clair que cela a pesé dans la balance. Quand je suis venu en visite, Florent Pietrus était là. Mickaël Pietrus et Boris Diaw étaient sur le départ pour la NBA. Ce que je voulais c’était une équipe qui faisait jouer les jeunes. Je ne voulais pas passer de 35 minutes en N1 à ne pas jouer en pro. Mais c’est ce qui est arrivé. Pau c’est mon premier chèque comme professionnel. Je touchais 4.000 euros par mois. A 17 ans. Presque le salaire de mon père et ma mère réunis.

Plus jeune titulaire de l’histoire des Sonics Ce qui s’est passé à Pau c’était une preview de ma carrière. J’arrive dans une équipe qui est double championne de France. Frédéric Sarre est en place mais il se fait débarquer et Didier Gadou le remplace. Forcément quand un nouveau coach arrive, avec la pression, il préfère se reposer sur des vétérans. Responsabiliser les jeunes c’était ce que Claude Bergeaud avait su faire. J’ai très peu joué (3,1 pts, 3,3 rbds en 9’, 15 matches joués) et pourtant le plan était de me présenter à la draft dès la première année. Je ne l’ai pas fait. Avant l’Euro juniors 2004 mon agent m’a va i t incité à m’ i n scrire en me disant

"je n’avais pas compris que ce n’était pas à moi de trouver un rythme mais d’aider l’équipe de France à trouver le sien. Ma mentalité n’était pas la bonne." qu’il avait une garantie en 5e position. J’ai pris peur, je n’étais pas convaincu de ce qu’il me disait. Je paniquais. Je n’y ai pas cru alors que des années plus tard des dirigeants NBA m’ont confirmé que c’était vrai. Et après ma deuxième année où mes minutes ont été très inconstantes, ma cote avait baissé. Finalement je suis drafté en 25e position par Seattle. Et c’est long comme attente. Surtout que mon workout avec eux n’avaient pas été exceptionnel alors que les Lakers m’avaient fait venir deux fois à Los Angeles pour faire un workout avec Andrew Bynum. Ils avaient des doutes sur ses genoux (ndlr : finalement choisi en 10e position). Comme rookie je montre des choses. Je crois que j’étais le plus jeune titulaire de l’histoire des Sonics. Ensuite Kevin Durant est arrivé et m’a dégagé (il rigole). J’étais très motivé parce que je voulais prouver que j’aurais dû avoir plus de temps de jeu en France et que j’avais fait le bon choix en partant. A Seattle j’ai vécu les trois meilleures années de ma carrière. Je jouais suffisamment pour pouvoir produire et apprendre. Parce que des fautes, j’en faisais ! Le physique des gars là-bas ! Moi je me cognais Shaq à l’époque. Et le vrai ! Ce n’était pas évident. Mais le temps de jeu était là. Que je sois titulaire ou pas. J’étais serein, surtout avec Bob Hill qui m’a vraiment fait confiance.

Malaise au Mondial

Steenkeste/FFBB

En 2006 je suis appelé en équipe de France pour la préparation au Mondial. Une fois la préparation bien entamée,

Claude Bergeaud nous convoque, Cyril Julian et moi, pour nous dire qu’il ne sait pas qui sélectionner et qu’il fallait que nous allions tous les deux en Chine pour les derniers matches avant le Mondial, afin qu’il prenne sa décision. Aller jusqu’en Chine alors que je pensais que c’était moi qui allait sauter… Pffouuu… C’était Cyril Julian quand même ! Donc je n’étais pas forcément enchanté à l’idée de faire 16 heures d’avion pour me faire couper. Ça fait un mois et demi qu’on est ensemble, le coach doit quand même avoir sa petite idée. D’un autre côté j’étais surmotivé en pensant que si son idée était déjà faite, j’allais la changer. Si je sautais, je voulais qu’on ne comprenne pas pourquoi. C’était mon état d’esprit. Il y avait trois matches en Chine. Je joue le premier. Cyril le deuxième. Puis nous sommes alignés pour le troisième. Quand Claude Bergeaud m’appelle, je suis prêt à aller au combat. Ce que j’ai montré a dû lui plaire et il m’a gardé. Sans doute a-t-il aussi pensé que je n’avais que 20 ans et que j’allais être là pour longtemps. Mais moi je ne les voyais pas les 20 ans. Ce que je voyais c’était 40 matches comme titulaire en NBA. Donc être mis dans une situation comme cellelà, de concurrence, l’ego en prend un coup. Et je pense que mon problème en équipe de France vient de là. J’estimais que la sélection m’était due. Mais ce n’était pas le cas. Pas plus qu’en 2009. Et ça n’était pas le cas en 2013. Après autant d’échecs alors que tu estimes que tu dois être en équipe de France, c’est qu’il y a un problème. Et le problème c’était ma manière de voir les choses.

Steenkeste/FFBB

28 juin 2005, 25e choix de la draft NBA

que c’est la même chose pour l’Euro juniors 2002 (8,3 pts, 6,0 rbds en 21’) avec la génération 1984 (ndlr : Terence Parker, Pierre-Yves Guillard, Maxime Renaud, Olivier Gouez…). En fait je crois que je prenais la température pour la compétition avec ma génération, l’Euro juniors 2004. Celle-là je voulais la dominer. Quand on me parle d’équipe de France jeunes, je n’ai que celle de la génération 1986 en tête. Le basket était fluide, pensé pour chaque joueur. Je prends le rebond, passe pour Mickaël Mokongo, Souarata Cissé dans l’aile pour finir la contreattaque. On avait commencé la phase de qualification à l’été 2003 avec Pierre Vincent (17,8 pts, 10,8 rbds, 2,4 cts en cinq matches) qui nous abandonne ensuite lâchement pour Bourges (il rigole). Richard Billant lui succède et en avril 2004 on dispute la deuxième phase de qualification. Je m’en rappelle bien parce que je l’avais mal vécue. Et c’est depuis que je n’écoute plus rien. Le premier match contre la Lettonie, beaucoup de monde en avait parlé puisque c’était face à Andris Biedrins (ndlr : aujourd’hui aux Golden State Warriors). Je n’ai pas fait ce que j’aurais voulu (8 pts à 3/11, 5 rbds contre 21 pts, 16 rbds, 7 ints, 4 cts pour Biedrins) et cela ne se serait pas passé comme ça si je n’avais pas autant fait attention à ce qui se disait autour de ce match. A l’Euro, on termine sur le podium, médaille de bronze. Des hauts et des bas ? J’ai surtout eu un bas contre la Turquie en demi-finale. Je fais deux fautes rapidement mais j’aurais voulu jouer plus longtemps (6 pts en 22’). J’étais frustré, en colère. J’étais persuadé qu’on serait champions d’Europe. Et je savais qu’on allait me dire que c’était ma faute. Ça m’a fait particulièrement chier de ne pas pouvoir jouer, de ne pas suffisamment jouer. C’est vraiment un mauvais souvenir. Heureusement qu’on va chercher le bronze contre les Italiens (24 points et 22 rebonds). Lors ma dernière année au CFBB en 2002/03 j’avais été plus posé, relax, sûr de mon jeu même s’il n’était pas encore très affiné. Je sentais que j’étais un pilier de l’équipe. Je signe à Pau-Orthez à l’été 2003. J’avais fait des visites à Pau, l’ASVEL et Cholet. J’avais déjà un agent. Au CFBB on va dire que ce n’était pas "non autorisé" à l’époque. Les règlements ont changé après mon départ. Ce qui n’est pas plus mal d’ailleurs. Pau, ça s’est décidé au feeling. J’ai toujours fonctionné comme ça. Le club avait déjà envoyé des joueurs

FFBB/Canet

ma carrière PAR Johan petro >

Juillet 2006, 1ère sélection en bleu

Mondial 2006, au Japon

Cela se ressentait sur le terrain. Au Mondial, être dans un rôle de soutien, je ne savais pas comment le gérer. En quart de finale contre la Grèce par exemple, je prends des shoots que je ne suis pas censé prendre, tout simplement parce que je ne suis pas dans le rythme. Mais encore une fois je n’avais pas compris que ce n’était

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Un retour triomphal Cet été j’ai profité du fait que l’équipe de France était dans une situation particulière pour refaire un appel du pied : je suis là si vous avez besoin de moi. Après si vous n’aimez pas ce que vous voyez, chacun son truc. Mais je suis là, je ne demande pas de

temps de jeu comme en 2006, je ne demande pas d’explications comme en 2009, je ne fais pas ma vedette, je fais ce qu’on me dit. Première rotation, deuxième, troisième peu m’importait. J’ai essayé d’être parfait, même si c’était juste pour

applaudir sur le banc (il sourit). Le basket c’est le plus individuel des sports collectifs. Et aujourd’hui, je sais qu’en étant champion d’Europe, mon nom restera, même si je n’ai pas l’occasion de revenir en équipe de France. J’ai vu le film de Boris Diaw sur

les Jeux Olympiques de Londres et je me dis que c’est vraiment quelque chose à vivre. C’est une grosse motivation pour Rio 2016. Mais ça se décidera sur le terrain. Il faut avoir des projets long terme, sinon tu es dans la merde. J’ai connu cinq équipes dans ma carrière NBA. Ce qui est décevant ce sont les résultats de l’équipe qui entraînent le départ du coach. Et quand il part, ce qui est prévu pour toi n’est plus à l’ordre du jour. Ça a toujours été ça pour moi (ndlr : 7 coaches en 8 saisons NBA). Le coach qui m’a drafté, Nate McMillan, a même été viré avant que j’arrive. La frustration vient de là. Le confort, la stabilité. C’est ce qui m’a manqué. Cependant certains de ces changements étaient vraiment nécessaires. En début de saison 2008/09, je suis titulaire avec le Thunder qui vient de déménager de Seattle à Oklahoma City. Mais après 12 matches, PJ Carlesimo est coupé. Et là je ne joue plus du tout. Net. Je ne rentre plus en jeu. Scott Brooks, le nouveau coach, appelle mon agent : je suis vraiment désolé mais on va dans une autre direction. Au moins c’est clair. Il fallait changer d’équipe surtout que j’étais dans ma dernière année de contrat. Denver s’est positionné et j’y ai terminé l’année. Cet été 2009 a été compliqué puisque je suis arrivé sans contrat NBA en équipe de France. Et que je me fais couper avant l’Euro. Mentalement j’ai pris un coup. Surtout que me sachant fautif par rapport au passé, j’étais dans un état d’esprit où je voulais faire exactement ce qu’on me demandait. Mais le résultat a été le même et cela m’a fait encore plus mal. J’étais un peu perdu. Et je me mettais à la place des équipes NBA : le type se fait couper de son équipe nationale, pourquoi le signer ? J’ai douté. La question de mon retour en Europe s’est vraiment posée. Mais par orgueil, je ne voulais pas le faire. Quand Denver m’a proposé un an de contrat pour le salaire minimum, je ne me suis pas posé deux fois la question.

"l'image que j'ai laissée, la manière dont j'exprimais mon mécontentement ou mon envie était mal vue."

Presses Sports / Hahn / ABACA USA

Décembre 2007, à Seattle

16 BASKETBALLMAGAZINE

Juillet 2009, préparation qualifications Euro Masculin

Titulaire chaque année en NBA Je sais que les gens s’interrogent sur le bon moment pour partir en NBA, l’intérêt d’y rester sans beaucoup jouer. Mais pour moi il n’y a pas 36.000 questions à se poser. Quand une franchise te veut, tu y vas. Mais je respecte le choix de ceux qui prennent le risque de rester en Europe polir leur

Presses Sports / Fel

pas à moi de trouver un rythme mais d’aider l’équipe de France à trouver le sien. Ma mentalité n’était pas la bonne. J’étais encore en phase de sélection. J’avais fait les 12 mais il fallait encore prouver que j’avais ma place. Et au contraire, malheureusement, je pense que ça m’a coûté ma place. 2007 je ne suis pas appelé. 2008 non plus. L’image que j’ai laissée, la manière dont j’exprimais mon mécontentement ou mon envie était mal vue. Et cette perception était bien ancrée dans les esprits. Quand les gens ont jugé, rattraper ça derrière… il faut des années.

Bellenger

ma carrière PAR Johan petro >

Juillet 2009, avec Joakim Noah à l'aéroport de Pau

novembre2013 17


Un retour triomphal Cet été j’ai profité du fait que l’équipe de France était dans une situation particulière pour refaire un appel du pied : je suis là si vous avez besoin de moi. Après si vous n’aimez pas ce que vous voyez, chacun son truc. Mais je suis là, je ne demande pas de

temps de jeu comme en 2006, je ne demande pas d’explications comme en 2009, je ne fais pas ma vedette, je fais ce qu’on me dit. Première rotation, deuxième, troisième peu m’importait. J’ai essayé d’être parfait, même si c’était juste pour

applaudir sur le banc (il sourit). Le basket c’est le plus individuel des sports collectifs. Et aujourd’hui, je sais qu’en étant champion d’Europe, mon nom restera, même si je n’ai pas l’occasion de revenir en équipe de France. J’ai vu le film de Boris Diaw sur

les Jeux Olympiques de Londres et je me dis que c’est vraiment quelque chose à vivre. C’est une grosse motivation pour Rio 2016. Mais ça se décidera sur le terrain. Il faut avoir des projets long terme, sinon tu es dans la merde. J’ai connu cinq équipes dans ma carrière NBA. Ce qui est décevant ce sont les résultats de l’équipe qui entraînent le départ du coach. Et quand il part, ce qui est prévu pour toi n’est plus à l’ordre du jour. Ça a toujours été ça pour moi (ndlr : 7 coaches en 8 saisons NBA). Le coach qui m’a drafté, Nate McMillan, a même été viré avant que j’arrive. La frustration vient de là. Le confort, la stabilité. C’est ce qui m’a manqué. Cependant certains de ces changements étaient vraiment nécessaires. En début de saison 2008/09, je suis titulaire avec le Thunder qui vient de déménager de Seattle à Oklahoma City. Mais après 12 matches, PJ Carlesimo est coupé. Et là je ne joue plus du tout. Net. Je ne rentre plus en jeu. Scott Brooks, le nouveau coach, appelle mon agent : je suis vraiment désolé mais on va dans une autre direction. Au moins c’est clair. Il fallait changer d’équipe surtout que j’étais dans ma dernière année de contrat. Denver s’est positionné et j’y ai terminé l’année. Cet été 2009 a été compliqué puisque je suis arrivé sans contrat NBA en équipe de France. Et que je me fais couper avant l’Euro. Mentalement j’ai pris un coup. Surtout que me sachant fautif par rapport au passé, j’étais dans un état d’esprit où je voulais faire exactement ce qu’on me demandait. Mais le résultat a été le même et cela m’a fait encore plus mal. J’étais un peu perdu. Et je me mettais à la place des équipes NBA : le type se fait couper de son équipe nationale, pourquoi le signer ? J’ai douté. La question de mon retour en Europe s’est vraiment posée. Mais par orgueil, je ne voulais pas le faire. Quand Denver m’a proposé un an de contrat pour le salaire minimum, je ne me suis pas posé deux fois la question.

"l'image que j'ai laissée, la manière dont j'exprimais mon mécontentement ou mon envie était mal vue."

Presses Sports / Hahn / ABACA USA

Décembre 2007, à Seattle

16 BASKETBALLMAGAZINE

Juillet 2009, préparation qualifications Euro Masculin

Titulaire chaque année en NBA Je sais que les gens s’interrogent sur le bon moment pour partir en NBA, l’intérêt d’y rester sans beaucoup jouer. Mais pour moi il n’y a pas 36.000 questions à se poser. Quand une franchise te veut, tu y vas. Mais je respecte le choix de ceux qui prennent le risque de rester en Europe polir leur

Presses Sports / Fel

pas à moi de trouver un rythme mais d’aider l’équipe de France à trouver le sien. Ma mentalité n’était pas la bonne. J’étais encore en phase de sélection. J’avais fait les 12 mais il fallait encore prouver que j’avais ma place. Et au contraire, malheureusement, je pense que ça m’a coûté ma place. 2007 je ne suis pas appelé. 2008 non plus. L’image que j’ai laissée, la manière dont j’exprimais mon mécontentement ou mon envie était mal vue. Et cette perception était bien ancrée dans les esprits. Quand les gens ont jugé, rattraper ça derrière… il faut des années.

Bellenger

ma carrière PAR Johan petro >

Juillet 2009, avec Joakim Noah à l'aéroport de Pau

novembre2013 17


Bellenger / IS / FFBB

attendre un contrat NBA j’ai fait le choix d’être dans une équipe à jouer. J’avais dit à mon agent d’être attentif à toutes les opportunités. Quand le téléphone sonne et qu’il te parle de la Chine, dans un premier temps il y a une petite déception de savoir que ce n’est pas la NBA qui t’a appelé. Mais je comprends le business et c’est un challenge pour moi : montrer ce que je n’ai plus montré depuis mes années jeunes. Le championnat dure 5 mois et j’aurais donc l’occasion de signer dans une franchise NBA qui cherche éventuellement à se renforcer pour les playoffs. Le seul coup de fil que j’ai passé avant de dire oui c’est à ma femme. Je voulais savoir ce qu’elle en pensait et si elle allait m’accompagner. Le basket c’est la même chose partout donc la seule interrogation venait du choc culturel. Ce qui est drôle c’est que Bob Hill, mon entraîneur aux Sonics, a signé là-bas. Je l’ai revu à l’EuroBasket où il était assistant de Mike Fratello avec l’Ukraine. On discute et il m’annonce qu’il va en Chine. Je lui réponds que je ne suis pas capable de prononcer le nom de l’équipe où j’ai signée. Il me rappelle l’après-midi pour me dire qu’il rejoint la même que moi !

Bellenger / IS / FFBB

Mars 2013, dernière saison NBA avec les Hawks

jeu. Mais moi je ne jouais pas à Pau. C’est comme ça que je le vivais : pourquoi être drafté, rester et ne pas jouer ? L’argent ? J’ai gagné 16 millions de dollars en NBA. Il faut toujours savoir combien d’argent est passé dans tes poches pour relativiser ce qui se passe et se dit autour de toi. Personne ne peut savoir ce qui se serait passé si j’étais resté en France plus longtemps. J’ai fait un choix, il faut l’assumer. A Denver, George Karl m’avait clairement expliqué les choses. Il avait une rotation arrêtée : Nene, Kenyon Martin, Chris Andersen. Moi j’étais le quatrième sur la liste mais les Nuggets avaient toujours connu de nombreuses blessures. J’ai ensuite été échangé à Denver où je suis resté un an et demi avant de signer trois ans à New Jersey. Puis j’ai été échangé à Atlanta. Ce n’était pas mon intention de bouger mais les circonstances sont ainsi. Mon potentiel et ma carrière NBA ? Me suis-je voilé la face par rapport à ce que je pouvais faire ? Je me suis souvent posé la question. Et ma réflexion est celle-ci : il n’y a pas une seule saison en NBA où je n’ai pas été titulaire. Huit ans ! Même si c’est une fois, en 2010-11 ! Tu te rattaches à certains chiffres mais pour moi ce chiffre là vaut quelque chose. Tenir aussi longtemps c’est quand même quelque chose. Cette saison je vais jouer en Chine avec les Zhejiang Guangsha Lions. Au lieu de rester à

© Chris Elise

Septembre 2011, avec Florent Pietrus pour fêter la médaille d'argent des Bleus

Bellenger

ma carrière PAR Johan petro >

Septembre 2013, quart de finale de l'EuroBasket

22 Septembre 2013, Champion d'Europe

Steenkeste/FFBB

18 BASKETBALLMAGAZINE

novembre2013 19


Bellenger / IS / FFBB

attendre un contrat NBA j’ai fait le choix d’être dans une équipe à jouer. J’avais dit à mon agent d’être attentif à toutes les opportunités. Quand le téléphone sonne et qu’il te parle de la Chine, dans un premier temps il y a une petite déception de savoir que ce n’est pas la NBA qui t’a appelé. Mais je comprends le business et c’est un challenge pour moi : montrer ce que je n’ai plus montré depuis mes années jeunes. Le championnat dure 5 mois et j’aurais donc l’occasion de signer dans une franchise NBA qui cherche éventuellement à se renforcer pour les playoffs. Le seul coup de fil que j’ai passé avant de dire oui c’est à ma femme. Je voulais savoir ce qu’elle en pensait et si elle allait m’accompagner. Le basket c’est la même chose partout donc la seule interrogation venait du choc culturel. Ce qui est drôle c’est que Bob Hill, mon entraîneur aux Sonics, a signé là-bas. Je l’ai revu à l’EuroBasket où il était assistant de Mike Fratello avec l’Ukraine. On discute et il m’annonce qu’il va en Chine. Je lui réponds que je ne suis pas capable de prononcer le nom de l’équipe où j’ai signée. Il me rappelle l’après-midi pour me dire qu’il rejoint la même que moi !

Bellenger / IS / FFBB

Mars 2013, dernière saison NBA avec les Hawks

jeu. Mais moi je ne jouais pas à Pau. C’est comme ça que je le vivais : pourquoi être drafté, rester et ne pas jouer ? L’argent ? J’ai gagné 16 millions de dollars en NBA. Il faut toujours savoir combien d’argent est passé dans tes poches pour relativiser ce qui se passe et se dit autour de toi. Personne ne peut savoir ce qui se serait passé si j’étais resté en France plus longtemps. J’ai fait un choix, il faut l’assumer. A Denver, George Karl m’avait clairement expliqué les choses. Il avait une rotation arrêtée : Nene, Kenyon Martin, Chris Andersen. Moi j’étais le quatrième sur la liste mais les Nuggets avaient toujours connu de nombreuses blessures. J’ai ensuite été échangé à Denver où je suis resté un an et demi avant de signer trois ans à New Jersey. Puis j’ai été échangé à Atlanta. Ce n’était pas mon intention de bouger mais les circonstances sont ainsi. Mon potentiel et ma carrière NBA ? Me suis-je voilé la face par rapport à ce que je pouvais faire ? Je me suis souvent posé la question. Et ma réflexion est celle-ci : il n’y a pas une seule saison en NBA où je n’ai pas été titulaire. Huit ans ! Même si c’est une fois, en 2010-11 ! Tu te rattaches à certains chiffres mais pour moi ce chiffre là vaut quelque chose. Tenir aussi longtemps c’est quand même quelque chose. Cette saison je vais jouer en Chine avec les Zhejiang Guangsha Lions. Au lieu de rester à

© Chris Elise

Septembre 2011, avec Florent Pietrus pour fêter la médaille d'argent des Bleus

Bellenger

ma carrière PAR Johan petro >

Septembre 2013, quart de finale de l'EuroBasket

22 Septembre 2013, Champion d'Europe

Steenkeste/FFBB

18 BASKETBALLMAGAZINE

novembre2013 19


CAHIERS DE L’ENTRAÎNEUR LA PRISE DE DÉCISION - 1ère partie

Pour suivre l’actualité des clubs et des équipes de France, revivre les moments historiques du basket ou encore retrouver des conseils techniques et pratiques.

Former à la prise de décision sur le pick and roll

et avoir la lucidité de considérer qu’avoir un pourcentage d’environ 33% est une bonne opération. En effet en extrapolant à dix possessions cela amène une dizaine de points (3 tirs réussis x 3 points = 9 points ou encore 4 tirs réussis x 3 points = 12 points) ce qui se rapproche d’une efficacité de 50% à deux points. (5 tirs réussis à 2 points = 10 points).

D3

5

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Schéma 4

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Schéma 5 28 BASKETBALLMAGAZINE

Le fait d’entraîner la défense simultanément à reproduire une option qui pourrait être celle de l’adversaire est intéressant. Elle donne l’opportunité aux jeunes joueurs de découvrir des stratégies offensives pour punir une exécution défensive systématique ou imparfaite. Ils comprendront qu’il peut être intéressant de redoubler le pick sur la balle quand le défenseur est passé en dessous SCHéMA 4 pour repartir à l’opposé en dribble. SCHéMA 5.

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Ils pourront aussi s’apercevoir que la pénétration reste possible, si le défenseur qui est passé sous l’écran, n’a pas réorienté ses appuis pour interdire l’accès à l’anneau. SCHéMA 6.

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3 Schéma 6 Pour que les jeunes joueurs soient en mesure de prendre la bonne décision il sera donc déterminant de les éduquer très tôt à prendre les bonnes infos. S’il n’est pas possible de "tout voir" en revanche, il est possible de regarder attentivement ce qui induira un comportement offensif plutôt qu’un autre. Dans le cas présent le dribbleur et le poseur d’écran devront être attentifs au fait que le défenseur du porteur de balle passe sous l’écran. Savoir si le défenseur est passé dessous ou au-dessus de l’écran sera donc la première chose que les deux attaquants devront avoir observé et enregistré pour agir. 74,20 83,50


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