SANDRINE GRUDA REINE DE RUSSIE
CFBB 2016 HERVÉ DUBUISSON DÉVELOPPEMENT DURABLE
N°819 - DÉCEMBRE2015 - WWW.FFBB.COM
INTERVIEW SANDRINE GRUDA >
SANDRINE GRUDA
“J’AI PRATIQUEMENT ATTEINT TOUS MES OBJECTIFS” Exilée à Ekaterinbourg depuis 2007 où elle est considérée comme un leader incontesté, Sandrine Gruda est de retour chaque été avec l’Equipe de France. L’intérieure tricolore accumule les titres et les médailles, en club et en sélection nationale. À seulement 28 ans, elle figure déjà parmi les joueuses les plus titrées de l’histoire du basket français. Rencontre avec l’une des meilleures joueuses du monde à son poste… si ce n’est la meilleure.
Presse Sports / Mounic
Propos recueillis par Kevin Bosi
10 BASKETBALLMAGAZINE
DÉCEMBRE2015
11
INTERVIEW SANDRINE GRUDA >
SANDRINE GRUDA
“J’AI PRATIQUEMENT ATTEINT TOUS MES OBJECTIFS” Exilée à Ekaterinbourg depuis 2007 où elle est considérée comme un leader incontesté, Sandrine Gruda est de retour chaque été avec l’Equipe de France. L’intérieure tricolore accumule les titres et les médailles, en club et en sélection nationale. À seulement 28 ans, elle figure déjà parmi les joueuses les plus titrées de l’histoire du basket français. Rencontre avec l’une des meilleures joueuses du monde à son poste… si ce n’est la meilleure.
Presse Sports / Mounic
Propos recueillis par Kevin Bosi
10 BASKETBALLMAGAZINE
DÉCEMBRE2015
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INTERVIEW SANDRINE GRUDA >
Avec un tel effectif et une telle puissance financière, comment expliquez-vous alors le fait qu’Ekaterinbourg n’ait gagné qu’à deux reprises l’Euroligue (2003 et 2013) ? Encore une fois, l’effectif ! (rires) Je suis sérieuse. À un moment donné, on prouve qu’avec un panel de joueuses de très haut niveau, on ne réussit pas forcémment. Certes on a des ambitions, certes on a un très fort potentiel financier. Peut-être que tu as envie de rêver d’avoir Penny Taylor, Diana Taurasi dans ton équipe, mais il faut surtout créer une alchimie pour avoir une équipe. Je ne pense pas que c’est la quantité qui aide au résultat. C’est plutôt la qualité. Et donc je préfère encore avoir quatre étrangères seulement, et gagner. On pourrait être meilleures dans cette configuration là (ndlr, il y a aujourd’hui six étrangères pour six russes). Quelles sont les différences entre le basket français et le basket que tu vis au quotidien en Russie ? Déjà ce que j’aime bien en France, c’est qu’il y a peu d’étrangères dans nos équipes.
Presse Sports / Faugère
En octobre 2015, 1ère journée d'Euroligue contre Bourges
12 BASKETBALLMAGAZINE
En 2015, lors de l'Euro féminin contre la République Tchèque
Ce qui permet à nos jeunes joueuses françaises de pouvoir jouer et d’évoluer très jeune, et de pouvoir gagner en expérience. Chose qui n’est pas le cas en LNB d’ailleurs, où ça serait intéressant de laisser nos jeunes tricolores jouer davantage. En Ligue Féminine aussi, le championnat est très homogène. Il n’y a pas de week-end allégé par rapport à l’adversité. Toutes les équipes se valent, et on ne sait pas d’avance qui gagnera. La preuve avec les résultats du début de saison. On a un très fort potentiel en France, et moi j’aime l’homogénéité de ce championnat. En Russie, on a beaucoup de finances, ce qui permet d’avoir de grosses têtes d’affiche pour le basket féminin. Mais derrière, cela rend le championnat hétérogène et un peu moins passionnant. En termes d’ambiance et d’infrastructures, cela est-il également très différent entre la France et la Russie ? Il y a beaucoup de personnes en Russie qui aiment les grandes salles, qui veulent avoir des choses qui brillent, avec un cadre un peu à l’américaine. Mais d’un autre côté, ce que j’aime en France, ce sont ces petites salles avec ce public chaleureux, et qui nous transmet une ferveur qui nous aide à gagner. La petitesse de la salle permet d’avoir un contact plus direct avec le public, qui permet de nous transcender. C’est plus chaud. À Ekaterinbourg, la grandeur de notre salle (5.000 places) fait que les supporters sont plus loin et qu’on les entend un peu moins bien. Mais à l’inverse, à chaque rencontre, il y a un show organisé avec des danseurs, des chanteurs d’opéra qui chantent l’hymne national… Il y a des moyens mis en œuvre dans cette merveilleuse salle afin que chaque match soit un spectacle. Et ça c’est très séduisant.
Tony Voisisn / FFBB
Quand vous avez fait le choix de rejoindre Ekaterinbourg, vous vous étiez dit que c’était parti pour durer pendant autant de saisons ? Absolument pas. Honnêtement, je ne m’étais pas mis de limite. Je me suis dit : "Allez, vasy. Vis l’expérience à 100%, et après tu aviseras." Et c’est ce qui s’est passé. Année après année, même après avoir essayé différents coaches, j’ai toujours eu un statut qui était super intéressant. J’ai pu rester, je m’y suis plu. Ekaterinbourg est une belle ville. Je n’aime pas forcément les grandes métropoles donc ça me correspond bien (ndlr, 1,5 million d’habitants à Ekaterinbourg). Le club prend très bien soin de nous, donc ça m’a séduit.
Votre club accumule les titres en Russie depuis 2007. 7 en championnat, 6 en Coupe de Russie. Comment expliquer cette suprématie ? Simplement par son effectif pléthorique, un staff très compétent. Lorsqu’on perd en Euroligue, on se doit de se remotiver et de remporter le dernier trophée de la saison, c’est-à-dire le championnat. Bellenger / IS / FFBB
Vous avez rejoint le club d’Ekaterinbourg en 2007, après deux saisons à Valenciennes. Vous souvenez-vous de ce choix fait il y a huit ans ? Je m’en souviens comme si c’était hier. On était en pleine saison, au mois de février, et là, mon coach Laurent Buffard reçoit l’offre de coacher l’équipe d’Ekaterinbourg. En une semaine il fallait que je décide de l’accompagner ou non. C’était vraiment bizarre pour moi je m’en rappelle, ce n’était pas du tout dans mes plans. J’ai appelé mon père, qui m’a toujours conseillé, pour lui expliquer la situation. Il m’a dit : "Sandrine, c’est une très belle opportunité, tu devrais le faire." Et puis j’ai accepté et je suis allée en Russie.
"CERTES ON A DES AMBITIONS, CERTES ON A UN TRÈS FORT POTENTIEL FINANCIER. PEUT-ÊTRE QUE TU AS ENVIE DE RÊVER D’AVOIR PENNY TAYLOR, DIANA TAURASI DANS TON ÉQUIPE, MAIS IL FAUT SURTOUT CRÉER UNE ALCHIMIE POUR AVOIR UNE ÉQUIPE. JE NE PENSE PAS QUE C’EST LA QUANTITÉ QUI AIDE AU RÉSULTAT. C’EST PLUTÔT LA QUALITÉ."
Après huit ans en Russie, le mode de vie russe n’a plus aucun secret pour vous. A-t-il été difficile de s’y adapter à votre arrivée ? J’avais déjà eu une adaptation à faire quand j’ai quitté la Martinique pour la France métropolitaine. Et puis pour la Russie, je m’y suis faite assez facilement. Je suis quelqu’un qui s’adapte assez vite à son environnement. Certes il fait très froid. J’ai déjà connu des -42°C, je ne pensais pas que ça pouvait exister, et bien si ! (rires). Mais j’apprécie tout de même cette vie à la russe. Il y a des pratiques et des mœurs dont on n’a pas forcément l’habitude, comme leur mode alimentaire. Par exemple le kholodetz qui est un plat gélatineux qu’ils mangent avec de la moutarde. Il faut s’y faire, goûter. C’est très enrichissant d’étudier une autre culture. C’est différent,
DÉCEMBRE2015 13
INTERVIEW SANDRINE GRUDA >
Avec un tel effectif et une telle puissance financière, comment expliquez-vous alors le fait qu’Ekaterinbourg n’ait gagné qu’à deux reprises l’Euroligue (2003 et 2013) ? Encore une fois, l’effectif ! (rires) Je suis sérieuse. À un moment donné, on prouve qu’avec un panel de joueuses de très haut niveau, on ne réussit pas forcémment. Certes on a des ambitions, certes on a un très fort potentiel financier. Peut-être que tu as envie de rêver d’avoir Penny Taylor, Diana Taurasi dans ton équipe, mais il faut surtout créer une alchimie pour avoir une équipe. Je ne pense pas que c’est la quantité qui aide au résultat. C’est plutôt la qualité. Et donc je préfère encore avoir quatre étrangères seulement, et gagner. On pourrait être meilleures dans cette configuration là (ndlr, il y a aujourd’hui six étrangères pour six russes). Quelles sont les différences entre le basket français et le basket que tu vis au quotidien en Russie ? Déjà ce que j’aime bien en France, c’est qu’il y a peu d’étrangères dans nos équipes.
Presse Sports / Faugère
En octobre 2015, 1ère journée d'Euroligue contre Bourges
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En 2015, lors de l'Euro féminin contre la République Tchèque
Ce qui permet à nos jeunes joueuses françaises de pouvoir jouer et d’évoluer très jeune, et de pouvoir gagner en expérience. Chose qui n’est pas le cas en LNB d’ailleurs, où ça serait intéressant de laisser nos jeunes tricolores jouer davantage. En Ligue Féminine aussi, le championnat est très homogène. Il n’y a pas de week-end allégé par rapport à l’adversité. Toutes les équipes se valent, et on ne sait pas d’avance qui gagnera. La preuve avec les résultats du début de saison. On a un très fort potentiel en France, et moi j’aime l’homogénéité de ce championnat. En Russie, on a beaucoup de finances, ce qui permet d’avoir de grosses têtes d’affiche pour le basket féminin. Mais derrière, cela rend le championnat hétérogène et un peu moins passionnant. En termes d’ambiance et d’infrastructures, cela est-il également très différent entre la France et la Russie ? Il y a beaucoup de personnes en Russie qui aiment les grandes salles, qui veulent avoir des choses qui brillent, avec un cadre un peu à l’américaine. Mais d’un autre côté, ce que j’aime en France, ce sont ces petites salles avec ce public chaleureux, et qui nous transmet une ferveur qui nous aide à gagner. La petitesse de la salle permet d’avoir un contact plus direct avec le public, qui permet de nous transcender. C’est plus chaud. À Ekaterinbourg, la grandeur de notre salle (5.000 places) fait que les supporters sont plus loin et qu’on les entend un peu moins bien. Mais à l’inverse, à chaque rencontre, il y a un show organisé avec des danseurs, des chanteurs d’opéra qui chantent l’hymne national… Il y a des moyens mis en œuvre dans cette merveilleuse salle afin que chaque match soit un spectacle. Et ça c’est très séduisant.
Tony Voisisn / FFBB
Quand vous avez fait le choix de rejoindre Ekaterinbourg, vous vous étiez dit que c’était parti pour durer pendant autant de saisons ? Absolument pas. Honnêtement, je ne m’étais pas mis de limite. Je me suis dit : "Allez, vasy. Vis l’expérience à 100%, et après tu aviseras." Et c’est ce qui s’est passé. Année après année, même après avoir essayé différents coaches, j’ai toujours eu un statut qui était super intéressant. J’ai pu rester, je m’y suis plu. Ekaterinbourg est une belle ville. Je n’aime pas forcément les grandes métropoles donc ça me correspond bien (ndlr, 1,5 million d’habitants à Ekaterinbourg). Le club prend très bien soin de nous, donc ça m’a séduit.
Votre club accumule les titres en Russie depuis 2007. 7 en championnat, 6 en Coupe de Russie. Comment expliquer cette suprématie ? Simplement par son effectif pléthorique, un staff très compétent. Lorsqu’on perd en Euroligue, on se doit de se remotiver et de remporter le dernier trophée de la saison, c’est-à-dire le championnat. Bellenger / IS / FFBB
Vous avez rejoint le club d’Ekaterinbourg en 2007, après deux saisons à Valenciennes. Vous souvenez-vous de ce choix fait il y a huit ans ? Je m’en souviens comme si c’était hier. On était en pleine saison, au mois de février, et là, mon coach Laurent Buffard reçoit l’offre de coacher l’équipe d’Ekaterinbourg. En une semaine il fallait que je décide de l’accompagner ou non. C’était vraiment bizarre pour moi je m’en rappelle, ce n’était pas du tout dans mes plans. J’ai appelé mon père, qui m’a toujours conseillé, pour lui expliquer la situation. Il m’a dit : "Sandrine, c’est une très belle opportunité, tu devrais le faire." Et puis j’ai accepté et je suis allée en Russie.
"CERTES ON A DES AMBITIONS, CERTES ON A UN TRÈS FORT POTENTIEL FINANCIER. PEUT-ÊTRE QUE TU AS ENVIE DE RÊVER D’AVOIR PENNY TAYLOR, DIANA TAURASI DANS TON ÉQUIPE, MAIS IL FAUT SURTOUT CRÉER UNE ALCHIMIE POUR AVOIR UNE ÉQUIPE. JE NE PENSE PAS QUE C’EST LA QUANTITÉ QUI AIDE AU RÉSULTAT. C’EST PLUTÔT LA QUALITÉ."
Après huit ans en Russie, le mode de vie russe n’a plus aucun secret pour vous. A-t-il été difficile de s’y adapter à votre arrivée ? J’avais déjà eu une adaptation à faire quand j’ai quitté la Martinique pour la France métropolitaine. Et puis pour la Russie, je m’y suis faite assez facilement. Je suis quelqu’un qui s’adapte assez vite à son environnement. Certes il fait très froid. J’ai déjà connu des -42°C, je ne pensais pas que ça pouvait exister, et bien si ! (rires). Mais j’apprécie tout de même cette vie à la russe. Il y a des pratiques et des mœurs dont on n’a pas forcément l’habitude, comme leur mode alimentaire. Par exemple le kholodetz qui est un plat gélatineux qu’ils mangent avec de la moutarde. Il faut s’y faire, goûter. C’est très enrichissant d’étudier une autre culture. C’est différent,
DÉCEMBRE2015 13
et édifiant. Ça a son charme. Leurs méthodes de soin sont différentes également. Ils soignent beaucoup à l’injection, chose qui se fait peu en France.
En 2015, lors de l'Euro féminin en Hongrie
Bellenger / IS / FFBB
Le monde du basket russe est également différent, notamment par sa manne financière… Au début, j’étais vraiment surprise par le pouvoir financier de mon club. On a des conditions luxueuses, que j’ai eu du mal à intégrer à mon arrivée à Ekaterinbourg. Avoir un chauffeur qui vous conduit, voyager en jet privé pour les déplacements, au début on avait même de "l’argent de poche" lorsqu’on jouait à l’extérieur. C’est un train de vie que je n’imaginais pas, surtout quand je suis arrivée à l’âge de 20 ans. Clairement ça m’avait choqué par rapport à ma culture du basket français.
En 2015, lors de la finale France/Serbie de l'Euro 2015
Tu es la plus ancienne de l’équipe d’Ekaterinbourg avec Deanna Nolan arrivée aussi en 2007. Comment expliquez-vous votre réussite dans le club, quand on voit que certaines joueuses ne parviennent pas à percer ? Je suis très reconnaissante et chanceuse, j’ai rencontré les bonnes personnes au bon moment et j’ai pu saisir l’opportunité de jouer dans ce club prestigieux. Je réalise la chance que j’ai eue de m’intégrer dans un environnement qui m’était inconnu à la base et où j’ai pu m’imposer petit à petit. Ce n’était pas facile au début. Mais je pense que mon jeune âge à mon arrivée m’a permis d’accepter certaines choses, que d’autres arrivant plus vieilles n’ont pas accepté, ce qui explique leur départ précoce.
Bellenger / IS / FFBB
Dans votre carrière professionnelle, vous avez connu deux clubs seulement (Valenciennes et Ekaterinbourg). Envisagez-vous votre avenir dans une troisième équipe ?
14 BASKETBALLMAGAZINE
C’est difficile d’y répondre, parce que j’aime beaucoup le basket et je compte encore jouer bien sûr, mais pas forcémment pour longtemps. Pour l’instant je suis à Ekaterinbourg, je m’y plais, je compte y rester encore peut-être un an et après je verrai. Au niveau basket, je prends année après année. Et puis je juge un petit peu sur ce que moi j’ai envie de faire. J’arrive dans un volet de ma carrière où j’écoute beaucoup plus mes envies en tant qu’individu que mes projets sportifs. J’ai eu beaucoup d’objectifs et je les ai pratiquement tous atteints. J’ai voulu aller aux Etats-Unis, je l’ai fait. J’ai voulu jouer et gagner l’Euroligue, je l’ai fait. Aujourd’hui, je n’ai plus vraiment des objectifs sportifs mais plutôt des objectifs personnels. Et un retour en France, est-ce que le public français peut l’espérer ? Pourquoi pas, moi je ne ferme pas les portes (rires). C’est vrai que quand je reviens jouer avec l’Équipe de France, je sens l’engouement et la ferveur autour de l’équipe, autour de moi. C’est vrai que ça fait plaisir de côtoyer mon public qui me soutient via les réseaux sociaux que je consulte depuis la Russie. Depuis ton départ en Russie en 2007, comment as-tu vu évoluer le basket féminin français d’un regard extérieur ? De l’extérieur, j’ai senti qu’il y avait une grosse perte financière dans le championnat de Ligue Féminine. Ce qui explique le départ de certaines joueuses de renom vers l’étranger. Mais ça n’a pas empêché de garder un niveau homogène entre les équipes, et ça c’est le plus important. Je compte la France comme l’un des championnats les plus durs de tout l’Europe, avec celui de Turquie. La LFB est bien plus homogène que le championnat russe.
"CE QUE J’AIME EN FRANCE, CE SONT CES PETITES SALLES AVEC CE PUBLIC CHALEUREUX, ET QUI NOUS TRANSMET UNE FERVEUR QUI NOUS AIDE À GAGNER. CE PERMET D’AVOIR UN CONTACT PLUS DIRECT AVEC LE PUBLIC, DE NOUS TRANSCENDER. C’EST PLUS CHAUD." DÉCEMBRE2015 15
et édifiant. Ça a son charme. Leurs méthodes de soin sont différentes également. Ils soignent beaucoup à l’injection, chose qui se fait peu en France.
En 2015, lors de l'Euro féminin en Hongrie
Bellenger / IS / FFBB
Le monde du basket russe est également différent, notamment par sa manne financière… Au début, j’étais vraiment surprise par le pouvoir financier de mon club. On a des conditions luxueuses, que j’ai eu du mal à intégrer à mon arrivée à Ekaterinbourg. Avoir un chauffeur qui vous conduit, voyager en jet privé pour les déplacements, au début on avait même de "l’argent de poche" lorsqu’on jouait à l’extérieur. C’est un train de vie que je n’imaginais pas, surtout quand je suis arrivée à l’âge de 20 ans. Clairement ça m’avait choqué par rapport à ma culture du basket français.
En 2015, lors de la finale France/Serbie de l'Euro 2015
Tu es la plus ancienne de l’équipe d’Ekaterinbourg avec Deanna Nolan arrivée aussi en 2007. Comment expliquez-vous votre réussite dans le club, quand on voit que certaines joueuses ne parviennent pas à percer ? Je suis très reconnaissante et chanceuse, j’ai rencontré les bonnes personnes au bon moment et j’ai pu saisir l’opportunité de jouer dans ce club prestigieux. Je réalise la chance que j’ai eue de m’intégrer dans un environnement qui m’était inconnu à la base et où j’ai pu m’imposer petit à petit. Ce n’était pas facile au début. Mais je pense que mon jeune âge à mon arrivée m’a permis d’accepter certaines choses, que d’autres arrivant plus vieilles n’ont pas accepté, ce qui explique leur départ précoce.
Bellenger / IS / FFBB
Dans votre carrière professionnelle, vous avez connu deux clubs seulement (Valenciennes et Ekaterinbourg). Envisagez-vous votre avenir dans une troisième équipe ?
14 BASKETBALLMAGAZINE
C’est difficile d’y répondre, parce que j’aime beaucoup le basket et je compte encore jouer bien sûr, mais pas forcémment pour longtemps. Pour l’instant je suis à Ekaterinbourg, je m’y plais, je compte y rester encore peut-être un an et après je verrai. Au niveau basket, je prends année après année. Et puis je juge un petit peu sur ce que moi j’ai envie de faire. J’arrive dans un volet de ma carrière où j’écoute beaucoup plus mes envies en tant qu’individu que mes projets sportifs. J’ai eu beaucoup d’objectifs et je les ai pratiquement tous atteints. J’ai voulu aller aux Etats-Unis, je l’ai fait. J’ai voulu jouer et gagner l’Euroligue, je l’ai fait. Aujourd’hui, je n’ai plus vraiment des objectifs sportifs mais plutôt des objectifs personnels. Et un retour en France, est-ce que le public français peut l’espérer ? Pourquoi pas, moi je ne ferme pas les portes (rires). C’est vrai que quand je reviens jouer avec l’Équipe de France, je sens l’engouement et la ferveur autour de l’équipe, autour de moi. C’est vrai que ça fait plaisir de côtoyer mon public qui me soutient via les réseaux sociaux que je consulte depuis la Russie. Depuis ton départ en Russie en 2007, comment as-tu vu évoluer le basket féminin français d’un regard extérieur ? De l’extérieur, j’ai senti qu’il y avait une grosse perte financière dans le championnat de Ligue Féminine. Ce qui explique le départ de certaines joueuses de renom vers l’étranger. Mais ça n’a pas empêché de garder un niveau homogène entre les équipes, et ça c’est le plus important. Je compte la France comme l’un des championnats les plus durs de tout l’Europe, avec celui de Turquie. La LFB est bien plus homogène que le championnat russe.
"CE QUE J’AIME EN FRANCE, CE SONT CES PETITES SALLES AVEC CE PUBLIC CHALEUREUX, ET QUI NOUS TRANSMET UNE FERVEUR QUI NOUS AIDE À GAGNER. CE PERMET D’AVOIR UN CONTACT PLUS DIRECT AVEC LE PUBLIC, DE NOUS TRANSCENDER. C’EST PLUS CHAUD." DÉCEMBRE2015 15
INTERVIEW SANDRINE GRUDA >
Tu as évolué quatre étés en WNBA (avec Connecticut Sun puis les Los Angeles Sparks). C’est un championnat particulier, à cheval entre la saison de clubs en Europe et les compétitions en sélection nationale. Est-ce difficile de s’y fixer des objectifs ? Ce n’est pas simple car cela fait des saisons très complètes quand j’enchaîne Ekaterinbourg, puis la WNBA puis l’Équipe de France. Cela demande beaucoup de motivation et d’engagement physique, car il faut que le corps suive. La WNBA, c’est quelque chose à voir, à découvrir, vraiment. On peut y avoir des objectifs : évoluer dans ce championnat, côtoyer des joueuses différentes. Physiquement, je pense franchement que c’est le championnat le plus exigeant au monde. Il faut courir plus vite, sauter plus haut, les dimensions physiques sont vraiment supérieures à ce qu’on voit en Europe. Le basket est beaucoup plus individualisé que le jeu européen où il est collectif. Une athlète qui a des qualités individuelles d’uncontre-un se retrouve très facilement aux Etats-Unis. Mais une joueuse qui se mêle davantage à un collectif ne va peut-être pas se retrouver là-bas, elle risque de ne pas apprécier le jeu qui est développé.
La réussite de l’Équipe de France passe notamment par vos performances individuelles. Comment assumez-vous ce rôle de leader ? Il n’y a rien à assumer vraiment. Je suis qui je suis, avec mes qualités et mes défauts. Je prends vraiment plaisir à jouer au sein de cette équipe, donc je performe de la manière que je connais. Je joue mon jeu simplement. Et je sais que ce que je vais présenter va pouvoir aider l’équipe à arriver à son objectif. En tant que cadre de l’équipe, quel est votre rôle dans l’intégration des nouvelles joueuses au sein du groupe France ?
16 BASKETBALLMAGAZINE
© Christophe Elise / FFBB
142 sélections chez les Bleues, 1908 points ce qui fait de vous la 7e marqueuse de tous les temps, à seulement 28 ans. Qu’est-ce que ces chiffres évoquent pour vous ? Ça ne me parle pas trop, car je n’ai jamais joué pour les statistiques. C’est clair qu’il y a des facettes de mon jeu qui me procurent du plaisir à jouer au basket, notamment le fait de scorer en attaque. Mais ça s’arrête à la fin du match, je ne le fais pas pour avoir une position dans un classement. C’est flatteur, je suis très contente d’entendre ces chiffres, mais je ne joue pas pour les performances individuelles. Ce que je veux, c’est rapporter des médailles et des titres en équipe.
On les intègre assez facilement. Même si elles rejoignent l’Équipe de France, cela reste des joueuses professionnelles et qui ont toute une expérience, en championnat ou chez les jeunes. On intègre même des joueuses sur le tard, comme Paoline Salagnac ou Gaëlle Skrela qui ont disputé leur première compétition internationale à 30 ans. Donc on ne va pas leur apprendre le basket. On a simplement besoin de trouver une alchimie, et leur inculquer l’esprit Equipe de France.
Que vous manque-t-il individuellement pour progresser encore, et pouvoir faire rayonner encore plus votre club et l’Équipe de France ? Ce qui me reste à apporter, c’est une dimension mentale supérieure. C’est-à-dire que parfois, je peux me retrouver stressée par des situations, ce qui n’a pas lieu d’être. Il ne faut pas que je me prenne la tête sur des situations qui ne le méritent pas, afin de pouvoir jouer de façon relâchée pendant toute la rencontre.
En juin 2013, à Orchies lors de la finale perdue contre l'Espagne
Lors de la préparation de l'Euro féminin 2015 contre la Lituanie
"C’EST TRÈS ENRICHISSANT D’ÉTUDIER UNE AUTRE CULTURE. C’EST DIFFÉRENT, ET ÉDIFIANT. ÇA A SON CHARME. LEURS MÉTHODES DE SOIN SONT DIFFÉRENTES ÉGALEMENT. ILS SOIGNENT BEAUCOUP À L’INJECTION, CHOSE QUI SE FAIT PEU EN FRANCE."
Les Bleues ont terminé les deux derniers Euro, en 2013 et en 2015, sur la 2e marche du podium. Que vous manque-t-il pour passer ce pallier et remporter ce titre ? Pour ces deux médailles d’argent, il en ressort de l’amertume. Que ce soit en 2013 ou en 2015, ce sont deux matches que l’on aurait pu gagner. On en avait les moyens de ne pas passer à côté de cette victoire, de ce titre. Sur les deux rencontres, ce qui nous manque globalement c’est la constance, et en l’occurrence l’inconstance. On n’a pas été assez hargneuses, adroites, agressives, assidues. C’est d’autant plus rageant l’été dernier en finale contre la Serbie, que la défaite
nous prive de la qualification directe pour les Jeux Olympiques de Rio 2016. Du 13 au 19 juin prochain, le Tournoi de Qualification Olympique délivrera cinq billets pour les JO. Douze équipes sont sur la ligne de départ dont la France. Le TQO de 2012 vous avait souri et vous avait envoyé à Londres. Le fait d’avoir déjà participé à un TQO est forcément un avantage… Bien sûr, même si des JO de Londres 2012, il ne reste en Équipe de France que quatre joueuses : Céline Dumerc, Endy Miyem, Isabelle Yacoubou et moi. C’est vrai c’est un atout de connaître le mode de compétition,
Bacot/FFBB
Bellenger /Panoramic
En 2012, avec la médaille d'argent Olympique
DÉCEMBRE2015 17
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Tu as évolué quatre étés en WNBA (avec Connecticut Sun puis les Los Angeles Sparks). C’est un championnat particulier, à cheval entre la saison de clubs en Europe et les compétitions en sélection nationale. Est-ce difficile de s’y fixer des objectifs ? Ce n’est pas simple car cela fait des saisons très complètes quand j’enchaîne Ekaterinbourg, puis la WNBA puis l’Équipe de France. Cela demande beaucoup de motivation et d’engagement physique, car il faut que le corps suive. La WNBA, c’est quelque chose à voir, à découvrir, vraiment. On peut y avoir des objectifs : évoluer dans ce championnat, côtoyer des joueuses différentes. Physiquement, je pense franchement que c’est le championnat le plus exigeant au monde. Il faut courir plus vite, sauter plus haut, les dimensions physiques sont vraiment supérieures à ce qu’on voit en Europe. Le basket est beaucoup plus individualisé que le jeu européen où il est collectif. Une athlète qui a des qualités individuelles d’uncontre-un se retrouve très facilement aux Etats-Unis. Mais une joueuse qui se mêle davantage à un collectif ne va peut-être pas se retrouver là-bas, elle risque de ne pas apprécier le jeu qui est développé.
La réussite de l’Équipe de France passe notamment par vos performances individuelles. Comment assumez-vous ce rôle de leader ? Il n’y a rien à assumer vraiment. Je suis qui je suis, avec mes qualités et mes défauts. Je prends vraiment plaisir à jouer au sein de cette équipe, donc je performe de la manière que je connais. Je joue mon jeu simplement. Et je sais que ce que je vais présenter va pouvoir aider l’équipe à arriver à son objectif. En tant que cadre de l’équipe, quel est votre rôle dans l’intégration des nouvelles joueuses au sein du groupe France ?
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© Christophe Elise / FFBB
142 sélections chez les Bleues, 1908 points ce qui fait de vous la 7e marqueuse de tous les temps, à seulement 28 ans. Qu’est-ce que ces chiffres évoquent pour vous ? Ça ne me parle pas trop, car je n’ai jamais joué pour les statistiques. C’est clair qu’il y a des facettes de mon jeu qui me procurent du plaisir à jouer au basket, notamment le fait de scorer en attaque. Mais ça s’arrête à la fin du match, je ne le fais pas pour avoir une position dans un classement. C’est flatteur, je suis très contente d’entendre ces chiffres, mais je ne joue pas pour les performances individuelles. Ce que je veux, c’est rapporter des médailles et des titres en équipe.
On les intègre assez facilement. Même si elles rejoignent l’Équipe de France, cela reste des joueuses professionnelles et qui ont toute une expérience, en championnat ou chez les jeunes. On intègre même des joueuses sur le tard, comme Paoline Salagnac ou Gaëlle Skrela qui ont disputé leur première compétition internationale à 30 ans. Donc on ne va pas leur apprendre le basket. On a simplement besoin de trouver une alchimie, et leur inculquer l’esprit Equipe de France.
Que vous manque-t-il individuellement pour progresser encore, et pouvoir faire rayonner encore plus votre club et l’Équipe de France ? Ce qui me reste à apporter, c’est une dimension mentale supérieure. C’est-à-dire que parfois, je peux me retrouver stressée par des situations, ce qui n’a pas lieu d’être. Il ne faut pas que je me prenne la tête sur des situations qui ne le méritent pas, afin de pouvoir jouer de façon relâchée pendant toute la rencontre.
En juin 2013, à Orchies lors de la finale perdue contre l'Espagne
Lors de la préparation de l'Euro féminin 2015 contre la Lituanie
"C’EST TRÈS ENRICHISSANT D’ÉTUDIER UNE AUTRE CULTURE. C’EST DIFFÉRENT, ET ÉDIFIANT. ÇA A SON CHARME. LEURS MÉTHODES DE SOIN SONT DIFFÉRENTES ÉGALEMENT. ILS SOIGNENT BEAUCOUP À L’INJECTION, CHOSE QUI SE FAIT PEU EN FRANCE."
Les Bleues ont terminé les deux derniers Euro, en 2013 et en 2015, sur la 2e marche du podium. Que vous manque-t-il pour passer ce pallier et remporter ce titre ? Pour ces deux médailles d’argent, il en ressort de l’amertume. Que ce soit en 2013 ou en 2015, ce sont deux matches que l’on aurait pu gagner. On en avait les moyens de ne pas passer à côté de cette victoire, de ce titre. Sur les deux rencontres, ce qui nous manque globalement c’est la constance, et en l’occurrence l’inconstance. On n’a pas été assez hargneuses, adroites, agressives, assidues. C’est d’autant plus rageant l’été dernier en finale contre la Serbie, que la défaite
nous prive de la qualification directe pour les Jeux Olympiques de Rio 2016. Du 13 au 19 juin prochain, le Tournoi de Qualification Olympique délivrera cinq billets pour les JO. Douze équipes sont sur la ligne de départ dont la France. Le TQO de 2012 vous avait souri et vous avait envoyé à Londres. Le fait d’avoir déjà participé à un TQO est forcément un avantage… Bien sûr, même si des JO de Londres 2012, il ne reste en Équipe de France que quatre joueuses : Céline Dumerc, Endy Miyem, Isabelle Yacoubou et moi. C’est vrai c’est un atout de connaître le mode de compétition,
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En 2012, avec la médaille d'argent Olympique
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INTERVIEW SANDRINE GRUDA >
BREAK N E V E R*
ILS ONT DIT QU’IL ÉTAIT FINI. D ROSE VA LEUR PROUVER QU’ILS AVAIENT TORT.
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les exigences. C’est rassurant, il n’y a pas la moindre inquiétude comme on a pu connaître par exemple lors du TQO de 2012, où c’était notre premier TQO à toutes donc c’était une grande découverte. La France est candidate pour organiser le TQO de 2016 en juin prochain, au même titre que l’Espagne. Qu’est-ce que cela évoque pour vous de peut-être évoluer devant votre public pour aller chercher votre billet pour Rio ? Ce serait fantastique. Ça permettrait aussi à ma famille de me voir jouer. Je suis une des rares joueuses tricolores qui depuis neuf ans n’évolue pas sur le territoire français, et donc loin de mes proches qui sont éloignés de mon quotidien. Et puis ça nous rappelle forcément l’Euro 2013 qui avait été incroyable de ferveur et d’engouement populaire. Aujourd’hui, on a un excellent public, et je ne doute pas qu’ils seront derrière nous. Il y a un peu moins de quatre ans, vous étiez à Londres, sur le podium olympique, une médaille d’argent autour du cou. Que reste-t-il de ce parcours incroyable ? Il s’agissait de nos premiers Jeux Olympiques à toutes, sauf à Edwige Lawson-Wade qui avait déjà connu ceux de 2000 à Sydney. C’était donc une grande découverte. J’avais les yeux écarquillés du début jusqu’à la fin. On était dans un environnement olympique qu’on ne connaissait pas, et on vivait sur le terrain des moments magnifiques. Alors
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"J’ARRIVE DANS UN VOLET DE MA CARRIÈRE OÙ J’ÉCOUTE BEAUCOUP PLUS MES ENVIES EN TANT QU’INDIVIDU QUE MES PROJETS SPORTIFS. J’AI EU BEAUCOUP D’OBJECTIFS ET JE LES AI PRATIQUEMENT TOUS ATTEINTS. AUJOURD’HUI, JE N’AI PLUS VRAIMENT DES OBJECTIFS SPORTIFS MAIS PLUTÔT DES OBJECTIFS PERSONNELS." forcément aujourd’hui, maintenant qu’on y a goûté, on a qu’une seule envie c’est d’y retourner et d’aller le plus loin possible. Et le fait que nous les cadres de l’équipe ayons déjà vécu les JO de 2012 permettra de mieux appréhender la compétition. L’expérience de Londres nous aidera à surmonter les difficultés si jamais il devait y en avoir. Même si l’objectif de la France est évidemment de se qualifier pour Rio, vous restez sur l’argent olympique en 2012, et deux podiums européens en 2013 et 2015.
Quatrième au ranking FIBA, peut-on rêver d’une nouvelle médaille aux JO ? Une médaille aux JO, ça paraissait quelque chose d’irréalisable et on l’a fait. Les gens s’attendent à ce que l’on recommence. C’est un comportement que je trouve assez marrant. Les deux histoires entre 2012 et 2016 sont différentes. L’Équipe de France a évolué, les joueuses ne sont plus les mêmes, la staff a aussi changé. Le plus important, c’est que cette équipe marque sa page dans l’histoire.
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UN INTÉRIM GAGNANT Par Jérémy Barbier
Sur la touche pendant l’intersaison après deux années passées dans de grosses cylindrées de Pro B, c’est dans un rôle inattendu de pigiste que le meneur Charly Pontens (1,90 m, 20 ans) crève l’écran. A la fin de l’été, Charly Pontens était loin d’imaginer qu’il deviendrait l’un des nouveaux leaders du GET Vosges. Faute de propositions fermes malgré un exercice honnête sur le banc de Hyères-Toulon en Pro B (2,7 points en 13 minutes), l’intéressé s’était même fait à l’idée d’une saison blanche. "Après une année pendant laquelle j’ai eu un rôle dans une équipe de haut de tableau, je ne m’attendais pas à cela et c’était plutôt angoissant", avoue-t-il. "J’ai d’abord voulu retrouver une équipe en Pro B et quand je me suis dirigé vers la N1, c’était un peu tard." Persuadé qu’il passerait la saison à travailler de son côté, le meneur de seulement 20 ans n’a pas gambergé lorsque Laurent Mathis l’appela deux semaines avant le coup d’envoi de la saison pour suppléer Arnaud Imhoff, blessé. "J’ai eu le coach au téléphone en fin d’après-midi et j’ai donné ma réponse le soir-même. Ça ne servait à rien d’attendre, c’était une bonne opportunité de se relancer en N1, même si ce n’était que pour deux mois à la base." Titulaire à la mène dès la première sortie des Vosgiens, le pigiste a su se rendre indispensable au sein d’un collectif encore en construction. "Je savais que j’allais avoir du temps de jeu mais pas autant", savoure celui qui passe en moyenne 26 minutes par match sur le parquet. "Le groupe m’a beaucoup facilité la tâche en m’intégrant très vite." Résultat de cette confiance retrouvée, l’ancien du Centre Fédéral expose une palette offensive muselée à l’étage supérieur. "Le coach me laisse des responsabilités, c’est à moi de les prendre et de les convertir", estime simplement le pigiste. "Sur le plan individuel, il était certainement indispensable de redescendre d’un niveau pour pouvoir un peu marquer les
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56 esprits offensivement." Deuxième marqueur du groupe (10,3 points), Charly Pontens assure tout autant à la distribution (5,0) passes) et prouve ainsi à chaque match que sa place est davantage chez les pros qu’au chômage technique. "Quand je vois comment a commencé ma saison, je savoure et profite de chaque entraînement", expliquait-il à l’heure de prolonger
sa pige, certain que cet intérim lui offrira un nouveau crédit. "Il fallait changer de rôle afin de progresser et pouvoir ainsi retourner un jour en Pro B avec un autre statut. Pour l’instant, je vais continuer à me donner à fond jusqu’à Noël en espérant que le club pourra me conserver." Dans le cas contraire, nul doute que ce passage dans les Vosges aura été remarqué...
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