MINIBASKET BILAN NM3 FRANÇAIS DE NBA
CÉLINE DUMERC LE BLEU DANS LE SANG N°824 - MAI2016 - WWW.FFBB.COM
MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
Propos recueillis par Kévin Bosi
En menant les Braqueuses à l’argent aux JO de 2012, Céline Dumerc (1,69 m, 33 ans) a écrit l’une des plus belles pages de l’histoire du basket français. Retour sur l’immense carrière de la meneuse tarbaise. De ses débuts pas évidents chez les Bleues, à ses expériences à l’étranger et son renouveau en 2012, la capitaine tricolore évoque aussi l’année 2016, les Jeux de Rio et sa fin de carrière.
D.R.
En 1994 à Ossun
En 1995 avec la sélection minimes Midi-Pyrénées
D.R.
"J’AI VOLÉ AU-DESSUS DE L’HIMALAYA AUX JEUX DE LONDRES 2012"
"Fille unique, j’ai une grande famille avec pas mal de cousins et de cousines. J’allais souvent chez mes grands-parents le mercredi après-midi, il y avait un fronton et je jouais au tennis. Je m’étais dit qu’au retour des vacances à la rentrée de septembre, je m’inscrirais au club de tennis. Mais pendant l’été, je suis allée au centre aéré, et parmi les animateurs il y avait Sandrine, qui était entraîneur au club de basket de Laloubère à côté de Tarbes. Elle me demande si ça me dit de venir jouer à la rentrée, et comme le gymnase est à trois minutes de chez mes parents, j’y ai donc mis les pieds. J’ai joué deux ans à Laloubère, et ensuite je suis partie à Ossun où ils ont fait une entente en prenant les meilleurs éléments du département, en plus de leurs joueuses qui y étaient déjà. Ils sont venus me chercher avec Amandine Lacram, qui évoluait à Vic en Bigorre, et qui jouera plus tard en Équipe de France jeunes et en Ligue Féminine. J’étais la plus jeune. Cela a été ma première expérience d’équipe un peu structurée. On avait un entraîneur, Pierre Jeannot, qui était un fou furieux, un peu de l’ancienne école. Il avait une certaine rigueur, il était super dur avec nous. Il nous appelait par nos noms de famille, ils nous engueulaient. Je me souviens il nous disait : "Mais enlève la caravane que tu as au cul." Ce mec-là, il m’a appris à jouer au basket. Il voulait tellement nous rendre meilleures. C’était très dur, mais ce sont mes meilleurs souvenirs quand j’étais jeune. En plus de ça, nos parents s’étaient formés un petit groupe et nous suivaient partout. Ils n’étaient pas comme les parents que l’on peut voir aujourd’hui dans certains gymnases, à crier sur tout ce qui bouge. Sur le terrain, j’étais déjà pleine d’énergie, je courais un peu partout. Je n’étais pas du tout axée sur marquer des paniers, tout ça. Ce qui marquait les gens, c’est que j’étais toujours à fond, en défense et en attaque. C’est aussi ça qui a fait qu’on m’a remarqué. Après mes deux ans à Ossun, je suis allée à Tarbes qui était le
Gaëlle Skrela. On avait une bonne équipe et des entraîneurs qui m’ont marquée. Comme Marie-France Chaumeil (5 sélections) qui était une femme à forte personnalité, assez dure. J’ai toujours aimé avoir des entraîneurs qui te rentrent bien dans le lard. J’étais en sélection Midi-Pyrénées en stage à Salbris au mois d’avril 1997. Amandine Lacram, avec qui j’étais déjà à Ossun, partait à l’INSEP l’année suivante. Et moi je me disais que j’aimerais suivre
seul club qui proposait du championnat de France à l’époque. Je n’y suis restée qu’un an, et j’ai fait aussi du basket au collège, où c’était le même entraîneur qu’en club. Il s’agissait de Sylvie Perez, qui avait joué avec Valérie Garnier à Mirande d’ailleurs. Quand tu es une jeune joueuse, face à une ancienne professionnelle, tu es fan, tu écoutes et appliques tout ce qu’elle dit. C’est aussi le moment des sélections départementales et régionales. C’est là que j’ai connu
CÉLINE DUMERC REPÈRES 1982 Naissance à Tarbes 1997 Entrée au Centre Fédéral 2003 Première sélection en bleu 2009 Championne d’Europe Presse Sports / Lahalle
2012 Vice-championne olympique
10 BASKETBALLMAGAZINE
D.R.
D.R.
013 2 Vice-championne d'Europe et 2015
MAI2016
11
MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
Propos recueillis par Kévin Bosi
En menant les Braqueuses à l’argent aux JO de 2012, Céline Dumerc (1,69 m, 33 ans) a écrit l’une des plus belles pages de l’histoire du basket français. Retour sur l’immense carrière de la meneuse tarbaise. De ses débuts pas évidents chez les Bleues, à ses expériences à l’étranger et son renouveau en 2012, la capitaine tricolore évoque aussi l’année 2016, les Jeux de Rio et sa fin de carrière.
D.R.
En 1994 à Ossun
En 1995 avec la sélection minimes Midi-Pyrénées
D.R.
"J’AI VOLÉ AU-DESSUS DE L’HIMALAYA AUX JEUX DE LONDRES 2012"
"Fille unique, j’ai une grande famille avec pas mal de cousins et de cousines. J’allais souvent chez mes grands-parents le mercredi après-midi, il y avait un fronton et je jouais au tennis. Je m’étais dit qu’au retour des vacances à la rentrée de septembre, je m’inscrirais au club de tennis. Mais pendant l’été, je suis allée au centre aéré, et parmi les animateurs il y avait Sandrine, qui était entraîneur au club de basket de Laloubère à côté de Tarbes. Elle me demande si ça me dit de venir jouer à la rentrée, et comme le gymnase est à trois minutes de chez mes parents, j’y ai donc mis les pieds. J’ai joué deux ans à Laloubère, et ensuite je suis partie à Ossun où ils ont fait une entente en prenant les meilleurs éléments du département, en plus de leurs joueuses qui y étaient déjà. Ils sont venus me chercher avec Amandine Lacram, qui évoluait à Vic en Bigorre, et qui jouera plus tard en Équipe de France jeunes et en Ligue Féminine. J’étais la plus jeune. Cela a été ma première expérience d’équipe un peu structurée. On avait un entraîneur, Pierre Jeannot, qui était un fou furieux, un peu de l’ancienne école. Il avait une certaine rigueur, il était super dur avec nous. Il nous appelait par nos noms de famille, ils nous engueulaient. Je me souviens il nous disait : "Mais enlève la caravane que tu as au cul." Ce mec-là, il m’a appris à jouer au basket. Il voulait tellement nous rendre meilleures. C’était très dur, mais ce sont mes meilleurs souvenirs quand j’étais jeune. En plus de ça, nos parents s’étaient formés un petit groupe et nous suivaient partout. Ils n’étaient pas comme les parents que l’on peut voir aujourd’hui dans certains gymnases, à crier sur tout ce qui bouge. Sur le terrain, j’étais déjà pleine d’énergie, je courais un peu partout. Je n’étais pas du tout axée sur marquer des paniers, tout ça. Ce qui marquait les gens, c’est que j’étais toujours à fond, en défense et en attaque. C’est aussi ça qui a fait qu’on m’a remarqué. Après mes deux ans à Ossun, je suis allée à Tarbes qui était le
Gaëlle Skrela. On avait une bonne équipe et des entraîneurs qui m’ont marquée. Comme Marie-France Chaumeil (5 sélections) qui était une femme à forte personnalité, assez dure. J’ai toujours aimé avoir des entraîneurs qui te rentrent bien dans le lard. J’étais en sélection Midi-Pyrénées en stage à Salbris au mois d’avril 1997. Amandine Lacram, avec qui j’étais déjà à Ossun, partait à l’INSEP l’année suivante. Et moi je me disais que j’aimerais suivre
seul club qui proposait du championnat de France à l’époque. Je n’y suis restée qu’un an, et j’ai fait aussi du basket au collège, où c’était le même entraîneur qu’en club. Il s’agissait de Sylvie Perez, qui avait joué avec Valérie Garnier à Mirande d’ailleurs. Quand tu es une jeune joueuse, face à une ancienne professionnelle, tu es fan, tu écoutes et appliques tout ce qu’elle dit. C’est aussi le moment des sélections départementales et régionales. C’est là que j’ai connu
CÉLINE DUMERC REPÈRES 1982 Naissance à Tarbes 1997 Entrée au Centre Fédéral 2003 Première sélection en bleu 2009 Championne d’Europe Presse Sports / Lahalle
2012 Vice-championne olympique
10 BASKETBALLMAGAZINE
D.R.
D.R.
013 2 Vice-championne d'Europe et 2015
MAI2016
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MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
son parcours. Je m’étais mis ça dans la tête. A la fin du tournoi à Salbris, Pascal Pisan, entraîneur à l’INSEP, demande à me voir avec mes parents. Lors du repas final, il se présente, et il annonce qu’il souhaite que j’intègre le Centre Fédéral dès le mois de septembre 1997. Et là je reste sur place, mais dans ma tête j’ai fait trois bonds. Je regarde ma mère qui commence à se décomposer, et je vois dans les yeux de mon père un peu de fierté et un peu de tristesse de laisser partir sa fille à Paris. Je n’avais qu’une seule trouille c’est que mes parents disent non. Mais ils ont bien sûr accepté. Ma mère me l’a déjà dit. Ils savaient que c’était ce que j’avais envie de faire, c’était mon rêve. C’était le début de ma grande aventure.
En 1999-2000 au CFBB
12 BASKETBALLMAGAZINE
D.R.
En 1997 au CFBB avec Claire Tomasewski
SON ENTRÉE À L’INSEP :"JE RESTE SUR PLACE, MAIS DANS MA TÊTE J’AI FAIT TROIS BONDS. JE REGARDE MA MÈRE QUI COMMENCE À SE DÉCOMPOSER, ET JE VOIS DANS LES YEUX DE MON PÈRE UN PEU DE FIERTÉ ET UN PEU DE TRISTESSE DE LAISSER PARTIR SA FILLE À PARIS. JE N’AVAIS QU’UNE SEULE TROUILLE C’EST QUE MES PARENTS DISENT NON." juste envie, il s’est donné les moyens de réussir et je trouve ça génial. Il a vraiment la mentalité à l’américaine, ils croient dur comme fer qu’ils vont y arriver. Et Tony c’était ça. Il voulait aller en NBA. À l’époque au Centre Fédéral, il était tout finot, il faisait déjà des choses extraordinaires. Mais pas de là à imaginer la carrière qu’il allait avoir. Quand j’ai intégré l’INSEP, le monde professionnel c’était pour moi quelque chose d’abstrait. Je pense que j’en avais envie mais ça me paraissait loin. C’est lors de la dernière année que ça approche. J’ai eu la chance d’avoir Tarbes, ma ville natale, qui se manifeste, et qui évoluait en Ligue Féminine. En plus je rentre à la maison, c’était inespéré. J’ai eu une chance folle, je ne pouvais pas avoir mieux. C’était idéal, dans le lieu, dans le poste de jeu, le projet, tout collait.
HOME SWEET HOME À Tarbes à la mène, il y avait Christelle Mijoule, et Laure Savasta qui avaient fait des supers Jeux Olympiques de Sydney avec les Bleues
en 2000. Damien Leyrolles, qui était l’entraîneur, n’a pas hésité et m’a fait confiance. Il me faisait jouer environ 10-15 minutes. Tout de suite, au bout de la deuxième année, il y a eu un changement de projet où le TGB veut me faire confiance. Ils écartent Christelle Mijoule et ils m’ouvrent un peu plus de place avec Laure Savasta. Et au final, petit à petit, j’ai grappillé plus de temps de jeu. Je n’étais pas meneuse titulaire au début mais je le suis devenue au fur et à mesure. Je dis toujours que j’ai eu la chance d’avoir des coachs qui avaient confiance en moi, à commencer par Damien Leyrolles à Tarbes. Il y en a combien qui ont peur de mettre des jeunes… Lui, il a tenté, peut-être que je lui ai bien rendu, mais peutêtre pas toujours. Car quand tu es jeune, surtout à ce poste de jeu, tu fais toujours des petites merdouilles. En 2002, on dispute la finale de la Coupe Ronchetti, seulement deux ans après ma sortie de l’INSEP. Une finale européenne à 20 ans, c’est incroyable. Moi je l’avais vécu à Tarbes quand elles l’ont gagné en 1996,
j’étais au bord du terrain, j’étais minimes à cette époque. On avait fait une fête incroyable. Malheureusement, on perd de quelques points (69-73) à la maison et de trois points à l’extérieur (74-77). C’était une expérience de fou tout de même. L’été 2002, juste après, je remporte une deuxième médaille de bronze en jeunes, à l’Euro U20. Cette troisième place nous qualifie pour le Mondial U21 l’été suivant. Les compétitions étaient différentes auparavant. Il y avait un Euro par catégorie seulement tous les deux ans, c’est pour ça que j’ai moins de médailles que les dernières générations (rires). Le Mondial U21 est légèrement faussé, dans le sens où les meilleures des équipes adverses partent déjà avec les seniors. On termine avec la médaille de bronze, mais c’est tout de même fort. En plus j’ai été élue dans le meilleur cinq de la compétition. Même si je n’ai jamais couru après les distinctions individuelles, ça fait toujours plaisir. Après tu sais aussi que tu es citée car toute l’équipe a brillé, car si tu termines 12e tu n’es pas dans le meilleur cinq. Quelques semaines avant, on a disputé avec Tarbes la finale du championnat contre Valenciennes. Elles gagnent sans souci. Et à la fin, on était comme des dingues, à sauter partout. On pouvait même se demander qui avait vraiment gagné. Nous on avait un trophée magnifique offert par la ville de Tarbes. Pour l’USVO, c’était normal de gagner. Pour nous c’était totalement inespéré d’être en finale.
LES DÉBUTS COMPLIQUÉS EN BLEU A l’été 2003, je suis appelée pour la première fois chez les A. Lors de la première réunion, Alain Jardel, qui entraînait les Bleues, nous dit que les résultats en jeunes n’ont rien à voir, et qu’il n’en n’a rien à faire des récompenses individuelles. C’était super mal venu, je n’y étais pour rien et je ne venais pas non plus du tout avec cet état d’esprit. Il te montre déjà où tu débarques. Tu as juste envie de te faire toute petite. Il y a Audrey Sauret, Cathy Melain, Sandra Le Dréan, Nicole Antibe, des filles que tu as vues et applaudies avant. J’ai eu la chance en 2001 d’être au Mans quand elles ont été championnes d’Europe. J’étais là, dans
D.R.
En 2003 la première fois en Bleu Bellenger /IS / FFBB
En 2003 dans le cinq du Mondial U21
D.R.
L’INSEP, L’ÉCOLE DE LA VIE La même année, à l’été 1997, je découvre et porte mon premier maillot bleu lors de l’Euro U16 où nous décrochons le bronze. C’était la génération 1981 et j’étais la seule 1982 retenue. Ils étaient en manque de meneuse de jeu à ce moment. Ma carrière je l’ai fait parce que je suis quelqu’un qui travaille et qui a des bonnes valeurs, mais j’ai aussi eu de la chance qu’à ce poste, ça soit pauvre à ce moment donné. Je l’ai encore mon premier maillot tricolore. Un petit maillot bleu, Spalding, avec le numéro 4. Je n’aimais pas du tout ce numéro, mais je n’avais pas le choix, j’étais la plus jeune. J’ai des K7 de mes premiers matches en bleu avec les jeunes, que je regarde de temps en temps. Et là je me dis : quelle horreur ! Ça court partout, c’est n’importe quoi. Mais c’est de là que tout commence, le haut niveau, le début de ma vie en bleu. Ensuite j’enchaîne avec mes trois saisons au Centre Fédéral. C’était le pied. Aujourd’hui, quand je retourne à l’INSEP, quand je vois l’encadrement qu’ils ont, le matériel, les infrastructures. Nous on n’avait pas autant. Qu’est-ce que j’aimerais y retourner... J’ai toujours joué avec des joueuses plus anciennes, la première année j’ai adoré. Et lors de la deuxième, toutes celles avec qui je m’entendais bien quittent de l’INSEP. Là j’ai eu un petit coup de moins bien. Ça devenait plus compliqué pour moi au lycée, j’étais en 1ère S et en maths j’étais à la ramasse. Je me souviens que j’avais appelé ma mère un jour en pleurant. Le soir mon père m’appelle, et il me demande ce qui ne va pas, et me dit que ma mère était à deux doigts de prendre l’avion pour venir me chercher. J’avais un petit coup de blues sur le coup, mais c’est passé ensuite. Pendant trois ans tu grandis, tu deviens de plus en plus autonome. L’INSEP, c’est l’école de la vie. Tu rencontres des amis, comme Tony Parker et Boris Diaw qui sont de ma génération. Tony, je l’ai côtoyé, ce mec disait déjà qu’il voulait aller en NBA. Il était venu dans ma chambre avec son press book et tous les articles où il paraissait. Et moi je me disais : Mais c’est qui lui ? C’est qui ce malade mental ? Il a le melon comme pas possible. Et en fait, il avait
En 2001 à Tarbes
Musée du Basket
les tribunes. Je savais ce que c’était l’Équipe de France, j’avais vu les Jeux de Sydney à la télévision. J’ai eu la chance qu’Alain Jardel me sélectionne chaque année, me mette sur le terrain, peut-être pas beaucoup mais suffisamment pour me montrer plus. Ma première sélection, c’était contre la Slovaquie à Lorient. C’était le 2e match de l’été pour l’Équipe de France, j’avais marqué cinq points. J’étais un peu flippée, je ne voulais pas faire de connerie. Au poste de meneur de jeu, on te demande de diriger ton équipe. Je l’ai fait en club, avec des joueuses plus âgées et étrangères, mais là en Équipe de France c’est plus impressionnant. Tu ne te focalises pas seulement sur ta performance, tu te concentres sur ce que le coach te demande. Alain Jardel était très carré, il te disait exactement ce qu’il fallait faire. Et j’ai correspondu aux attentes, donc j’ai gratté un petit peu plus et je me suis battu pour chaque été faire partie de l’Équipe de France. Je participe à l’Euro en Grèce en 2003 avec Emmeline Ndongue, on finit 5e. Il y avait Edwige Lawson et Audrey Sauret devant moi, donc logiquement j’ai peu joué. Mais par contre, je mange autant que les autres, j’ai marqué trois points en tout, et je prends cinq kilos. Cela m’a permis d’être là, de vivre dans le groupe, de m’entraîner et d’emmagasiner de l’expérience. C’est grâce à Alain Jardel. Certes, c’était un entraîneur dur, j’avais l’impression qu’il était
tout le temps sur mon dos. Il y a même un entraînement où j’ai compté le nombre de fois où il arrêtait le jeu pour me reprendre. Mais en même temps, ça m’a fait avancer, dans le sens où je voulais lui montrer que la prochaine fois, j’aurais compris et qu’il n’aurait rien à me dire. Du coup, ce n’est pas évident. Et quand tu es faible mentalement, tu craques. Il y a des jours où j’ai pleuré, d’autres où j’ai voulu partir. Une fois, en rentrant dans ma chambre, j’avais dû dire à Cathy Melain que j’allais me barrer. Et elle me dit : Tiens, va-t-en, va jouer en Nationale 14 au Luxembourg, vas-y abandonne. Bien sûr j’ai eu envie d’abandonner, mais finalement je suis restée avec l’envie de lui montrer que j’allais tout faire pour correspondre à ce qu’il attendait de moi. Il le dit aujourd’hui, c’est pour me faire avancer qu’il a fait tout ça. Ce n’est pas un méchant bonhomme, mais c’était dur. Il n’a pas la pédagogie que tu attends à cet âge, mais je m’en suis sortie. Finalement il n’avait pas tort. En 2005, il y avait déjà Valérie Garnier en adjointe. C’est dingue qu’elle soit aujourd’hui mon entraineur en club et en bleu. Ça fait un moment qu’on ne se lâche plus. Je me souviens que je discutais beaucoup avec elle, de par son poste de jeu qui était le même que le mien, et je me souviens qu’elle me faisait des leçons, elle m’apprenait le basket. C’était intéressant d’avoir une femme dans le staff, qui a joué à haut-niveau, en Équipe de France. Tu
MAI2016 13
MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
son parcours. Je m’étais mis ça dans la tête. A la fin du tournoi à Salbris, Pascal Pisan, entraîneur à l’INSEP, demande à me voir avec mes parents. Lors du repas final, il se présente, et il annonce qu’il souhaite que j’intègre le Centre Fédéral dès le mois de septembre 1997. Et là je reste sur place, mais dans ma tête j’ai fait trois bonds. Je regarde ma mère qui commence à se décomposer, et je vois dans les yeux de mon père un peu de fierté et un peu de tristesse de laisser partir sa fille à Paris. Je n’avais qu’une seule trouille c’est que mes parents disent non. Mais ils ont bien sûr accepté. Ma mère me l’a déjà dit. Ils savaient que c’était ce que j’avais envie de faire, c’était mon rêve. C’était le début de ma grande aventure.
En 1999-2000 au CFBB
12 BASKETBALLMAGAZINE
D.R.
En 1997 au CFBB avec Claire Tomasewski
SON ENTRÉE À L’INSEP :"JE RESTE SUR PLACE, MAIS DANS MA TÊTE J’AI FAIT TROIS BONDS. JE REGARDE MA MÈRE QUI COMMENCE À SE DÉCOMPOSER, ET JE VOIS DANS LES YEUX DE MON PÈRE UN PEU DE FIERTÉ ET UN PEU DE TRISTESSE DE LAISSER PARTIR SA FILLE À PARIS. JE N’AVAIS QU’UNE SEULE TROUILLE C’EST QUE MES PARENTS DISENT NON." juste envie, il s’est donné les moyens de réussir et je trouve ça génial. Il a vraiment la mentalité à l’américaine, ils croient dur comme fer qu’ils vont y arriver. Et Tony c’était ça. Il voulait aller en NBA. À l’époque au Centre Fédéral, il était tout finot, il faisait déjà des choses extraordinaires. Mais pas de là à imaginer la carrière qu’il allait avoir. Quand j’ai intégré l’INSEP, le monde professionnel c’était pour moi quelque chose d’abstrait. Je pense que j’en avais envie mais ça me paraissait loin. C’est lors de la dernière année que ça approche. J’ai eu la chance d’avoir Tarbes, ma ville natale, qui se manifeste, et qui évoluait en Ligue Féminine. En plus je rentre à la maison, c’était inespéré. J’ai eu une chance folle, je ne pouvais pas avoir mieux. C’était idéal, dans le lieu, dans le poste de jeu, le projet, tout collait.
HOME SWEET HOME À Tarbes à la mène, il y avait Christelle Mijoule, et Laure Savasta qui avaient fait des supers Jeux Olympiques de Sydney avec les Bleues
en 2000. Damien Leyrolles, qui était l’entraîneur, n’a pas hésité et m’a fait confiance. Il me faisait jouer environ 10-15 minutes. Tout de suite, au bout de la deuxième année, il y a eu un changement de projet où le TGB veut me faire confiance. Ils écartent Christelle Mijoule et ils m’ouvrent un peu plus de place avec Laure Savasta. Et au final, petit à petit, j’ai grappillé plus de temps de jeu. Je n’étais pas meneuse titulaire au début mais je le suis devenue au fur et à mesure. Je dis toujours que j’ai eu la chance d’avoir des coachs qui avaient confiance en moi, à commencer par Damien Leyrolles à Tarbes. Il y en a combien qui ont peur de mettre des jeunes… Lui, il a tenté, peut-être que je lui ai bien rendu, mais peutêtre pas toujours. Car quand tu es jeune, surtout à ce poste de jeu, tu fais toujours des petites merdouilles. En 2002, on dispute la finale de la Coupe Ronchetti, seulement deux ans après ma sortie de l’INSEP. Une finale européenne à 20 ans, c’est incroyable. Moi je l’avais vécu à Tarbes quand elles l’ont gagné en 1996,
j’étais au bord du terrain, j’étais minimes à cette époque. On avait fait une fête incroyable. Malheureusement, on perd de quelques points (69-73) à la maison et de trois points à l’extérieur (74-77). C’était une expérience de fou tout de même. L’été 2002, juste après, je remporte une deuxième médaille de bronze en jeunes, à l’Euro U20. Cette troisième place nous qualifie pour le Mondial U21 l’été suivant. Les compétitions étaient différentes auparavant. Il y avait un Euro par catégorie seulement tous les deux ans, c’est pour ça que j’ai moins de médailles que les dernières générations (rires). Le Mondial U21 est légèrement faussé, dans le sens où les meilleures des équipes adverses partent déjà avec les seniors. On termine avec la médaille de bronze, mais c’est tout de même fort. En plus j’ai été élue dans le meilleur cinq de la compétition. Même si je n’ai jamais couru après les distinctions individuelles, ça fait toujours plaisir. Après tu sais aussi que tu es citée car toute l’équipe a brillé, car si tu termines 12e tu n’es pas dans le meilleur cinq. Quelques semaines avant, on a disputé avec Tarbes la finale du championnat contre Valenciennes. Elles gagnent sans souci. Et à la fin, on était comme des dingues, à sauter partout. On pouvait même se demander qui avait vraiment gagné. Nous on avait un trophée magnifique offert par la ville de Tarbes. Pour l’USVO, c’était normal de gagner. Pour nous c’était totalement inespéré d’être en finale.
LES DÉBUTS COMPLIQUÉS EN BLEU A l’été 2003, je suis appelée pour la première fois chez les A. Lors de la première réunion, Alain Jardel, qui entraînait les Bleues, nous dit que les résultats en jeunes n’ont rien à voir, et qu’il n’en n’a rien à faire des récompenses individuelles. C’était super mal venu, je n’y étais pour rien et je ne venais pas non plus du tout avec cet état d’esprit. Il te montre déjà où tu débarques. Tu as juste envie de te faire toute petite. Il y a Audrey Sauret, Cathy Melain, Sandra Le Dréan, Nicole Antibe, des filles que tu as vues et applaudies avant. J’ai eu la chance en 2001 d’être au Mans quand elles ont été championnes d’Europe. J’étais là, dans
D.R.
En 2003 la première fois en Bleu Bellenger /IS / FFBB
En 2003 dans le cinq du Mondial U21
D.R.
L’INSEP, L’ÉCOLE DE LA VIE La même année, à l’été 1997, je découvre et porte mon premier maillot bleu lors de l’Euro U16 où nous décrochons le bronze. C’était la génération 1981 et j’étais la seule 1982 retenue. Ils étaient en manque de meneuse de jeu à ce moment. Ma carrière je l’ai fait parce que je suis quelqu’un qui travaille et qui a des bonnes valeurs, mais j’ai aussi eu de la chance qu’à ce poste, ça soit pauvre à ce moment donné. Je l’ai encore mon premier maillot tricolore. Un petit maillot bleu, Spalding, avec le numéro 4. Je n’aimais pas du tout ce numéro, mais je n’avais pas le choix, j’étais la plus jeune. J’ai des K7 de mes premiers matches en bleu avec les jeunes, que je regarde de temps en temps. Et là je me dis : quelle horreur ! Ça court partout, c’est n’importe quoi. Mais c’est de là que tout commence, le haut niveau, le début de ma vie en bleu. Ensuite j’enchaîne avec mes trois saisons au Centre Fédéral. C’était le pied. Aujourd’hui, quand je retourne à l’INSEP, quand je vois l’encadrement qu’ils ont, le matériel, les infrastructures. Nous on n’avait pas autant. Qu’est-ce que j’aimerais y retourner... J’ai toujours joué avec des joueuses plus anciennes, la première année j’ai adoré. Et lors de la deuxième, toutes celles avec qui je m’entendais bien quittent de l’INSEP. Là j’ai eu un petit coup de moins bien. Ça devenait plus compliqué pour moi au lycée, j’étais en 1ère S et en maths j’étais à la ramasse. Je me souviens que j’avais appelé ma mère un jour en pleurant. Le soir mon père m’appelle, et il me demande ce qui ne va pas, et me dit que ma mère était à deux doigts de prendre l’avion pour venir me chercher. J’avais un petit coup de blues sur le coup, mais c’est passé ensuite. Pendant trois ans tu grandis, tu deviens de plus en plus autonome. L’INSEP, c’est l’école de la vie. Tu rencontres des amis, comme Tony Parker et Boris Diaw qui sont de ma génération. Tony, je l’ai côtoyé, ce mec disait déjà qu’il voulait aller en NBA. Il était venu dans ma chambre avec son press book et tous les articles où il paraissait. Et moi je me disais : Mais c’est qui lui ? C’est qui ce malade mental ? Il a le melon comme pas possible. Et en fait, il avait
En 2001 à Tarbes
Musée du Basket
les tribunes. Je savais ce que c’était l’Équipe de France, j’avais vu les Jeux de Sydney à la télévision. J’ai eu la chance qu’Alain Jardel me sélectionne chaque année, me mette sur le terrain, peut-être pas beaucoup mais suffisamment pour me montrer plus. Ma première sélection, c’était contre la Slovaquie à Lorient. C’était le 2e match de l’été pour l’Équipe de France, j’avais marqué cinq points. J’étais un peu flippée, je ne voulais pas faire de connerie. Au poste de meneur de jeu, on te demande de diriger ton équipe. Je l’ai fait en club, avec des joueuses plus âgées et étrangères, mais là en Équipe de France c’est plus impressionnant. Tu ne te focalises pas seulement sur ta performance, tu te concentres sur ce que le coach te demande. Alain Jardel était très carré, il te disait exactement ce qu’il fallait faire. Et j’ai correspondu aux attentes, donc j’ai gratté un petit peu plus et je me suis battu pour chaque été faire partie de l’Équipe de France. Je participe à l’Euro en Grèce en 2003 avec Emmeline Ndongue, on finit 5e. Il y avait Edwige Lawson et Audrey Sauret devant moi, donc logiquement j’ai peu joué. Mais par contre, je mange autant que les autres, j’ai marqué trois points en tout, et je prends cinq kilos. Cela m’a permis d’être là, de vivre dans le groupe, de m’entraîner et d’emmagasiner de l’expérience. C’est grâce à Alain Jardel. Certes, c’était un entraîneur dur, j’avais l’impression qu’il était
tout le temps sur mon dos. Il y a même un entraînement où j’ai compté le nombre de fois où il arrêtait le jeu pour me reprendre. Mais en même temps, ça m’a fait avancer, dans le sens où je voulais lui montrer que la prochaine fois, j’aurais compris et qu’il n’aurait rien à me dire. Du coup, ce n’est pas évident. Et quand tu es faible mentalement, tu craques. Il y a des jours où j’ai pleuré, d’autres où j’ai voulu partir. Une fois, en rentrant dans ma chambre, j’avais dû dire à Cathy Melain que j’allais me barrer. Et elle me dit : Tiens, va-t-en, va jouer en Nationale 14 au Luxembourg, vas-y abandonne. Bien sûr j’ai eu envie d’abandonner, mais finalement je suis restée avec l’envie de lui montrer que j’allais tout faire pour correspondre à ce qu’il attendait de moi. Il le dit aujourd’hui, c’est pour me faire avancer qu’il a fait tout ça. Ce n’est pas un méchant bonhomme, mais c’était dur. Il n’a pas la pédagogie que tu attends à cet âge, mais je m’en suis sortie. Finalement il n’avait pas tort. En 2005, il y avait déjà Valérie Garnier en adjointe. C’est dingue qu’elle soit aujourd’hui mon entraineur en club et en bleu. Ça fait un moment qu’on ne se lâche plus. Je me souviens que je discutais beaucoup avec elle, de par son poste de jeu qui était le même que le mien, et je me souviens qu’elle me faisait des leçons, elle m’apprenait le basket. C’était intéressant d’avoir une femme dans le staff, qui a joué à haut-niveau, en Équipe de France. Tu
MAI2016 13
D.R. Bellenger / IS / FFBB
En 2003 à Bourges
14 BASKETBALLMAGAZINE
SUR LE TOIT DE L’EUROPE Pour ma dernière saison à Bourges en 2009, on réalise un nouveau doublé Championnat/ Coupe de France. J’avais décidé de partir, j’ai sentis que c’était le bon moment, et ça coïncidait avec l’arrêt de Cathy Melain à Bourges. Il y avait comme une fin de cycle, donc je me dis qu’à 27 ans, quand Ekaterinbourg me refait de l’œil, il faut y aller. Avant d’aller en Russie, il y a un Euro avec l’Équipe de France très tôt dans l’été, où Cathy Melain est rappelée en Bleu. Pierre Vincent lui demande dans la saison si elle voulait bien réintégrer l’Équipe de France, la préparation était très courte
et il avait besoin d’éléments comme Cathy qui s’adapte facilement. Elle m’en parle, je lui conseille plutôt de ne pas revenir. On était une équipe toute jeune, je pensais qu’elle n’allait pas pouvoir sauver le monde. Et je me suis totalement trompé, on termine championne d’Europe. La dernière journée de l’Euro je l’ai remercié, car sans elle on n’aurait pas été titré. Elle a joué le rôle de pansement là où ça saignait. Elle a terminé à 2,4 points de moyenne, je me suis foutu de sa gueule à la fin. C’est ce qui est fort pour quelqu’un qui a eu une carrière incroyable et plein de titres, de venir servir l’équipe ainsi. C’est grâce à elle qu’on est championne d’Europe. Je me souviens qu’en 2005 à l’Euro, je suis dans les tribunes, et je vois la République Tchèque monter sur le podium et être sacrée. Et je me dis que ça doit être le pied d’être championne d’Europe. Et en 2009, j’ai pensé à ça. Quand je suis sur le podium, je regarde les joueuses qui sont dans les tribunes, et je me dis qu’elles pensent comme moi en 2005, et ça m’a fait encore plus plaisir. C’est aussi de là qu’est né le surnom des Braqueuses, parce qu’on a fait des matches un peu volés, tendus, avec des prolongations. Le groupe était né depuis 2008, mais en un an, on a déjà su créer un état d’esprit. Ce titre a été presque inespéré, c’était plus fort que mon premier titre en LFB. J’ai appris à apprécier les matches gagnés et les titres. Celui-ci était fou. L’or autour du cou, je décolle donc pour Ekaterinbourg. En début de saison, j’ai dû rentrer en France pour soigner des petits problèmes de santé. Je fais mon premier match d’Euroligue en décembre du coup, ce qui complique sans doute mon intégration. Et puis, je joue avec des joueuses de très grande qualité, mais qui n’ont pas du tout le même état d’esprit
Presse Sports / Pochat
gros désastre. C’est la pire campagne dont j’ai fait partie. On était en regroupement à Anglet et je me souviens d’une des premières réunions où on se dit en interne qu’on vise le titre. Et moi je trouve ça précipité : on a un nouveau staff, il y a beaucoup d’anciennes qui ont arrêté, beaucoup de nouvelles joueuses. On ne sait pas ce qu’on vaut. Je nous trouvais un peu prétentieuses. Et ça n’a pas manqué, on s’est complètement cassé la gueule. En interne, ce n’était pas joli. Il y avait une ambiance à chier. Il y a eu des tensions entre les plus anciennes et les plus jeunes. Il y a eu une incompréhension dans tout ça. Au retour de l’Euro 2007, je refuse une offre pour aller à Ekaterinbourg en Russie. Je n’étais pas prête, je ne sais pas pourquoi, j’avais la sensation de ne pas avoir bouclé la boucle à Bourges. Cette saison 2007-08, on remporte le championnat et la Coupe de France. C’est le moment où Bourges redevient le grand Bourges de l’époque de Souvré. On dispute un nouveau Final Four en Euroligue. Mais celuici est douloureux car on doit aller en finale, on perd après prolongations contre Brno (République Tchèque) en demi. Et la 3e place on la perd au buzzer contre Ekaterinbourg. Je me retourne vers Pierre Vincent et je lui dis que finalement ce n’était pas notre année. Il arrive d’ailleurs à la tête des Bleues juste après à l’été 2008 pour les qualifications à l’Euro. C’est un renouveau complet. Moi, j’adhère complètement à sa philosophie, son basket depuis 2003 à Bourges. Il fait le point, il élargit le groupe, il prend des jeunes et met de côté des anciennes. Je me souviens de ses premiers discours, il parlait de servir l’Équipe de France, mais de ne pas s’en servir. C’est-à-dire que tu ne décides pas quand tu viens ou pas et que l’équipe nationale n’appartient à personne. Ça c’était un discours qu’on n’avait pas encore entendu. On repartait de zéro, il fallait remettre des principes. Et c’est ce qu’on cultive depuis 2008, et ce qui fait que chaque année, peu importe qui fait partie de l’Équipe de France, on a gardé cet d’esprit. Moi la première j’y suis, je me bats pour avoir ma place, et je veux montrer que je suis légitime à être prise dans l’équipe, et que je n’arrive pas la fleur au fusil.
En 2005, avec Bourges en Euroleague
En 2006 au Mondial avec Valérie Garnier
SES DÉBUTS EN BLEU : "QUAND TU ES FAIBLE MENTALEMENT, TU CRAQUES. IL Y A DES JOURS OÙ J’AI PLEURÉ, D’AUTRES OÙ J’AI VOULU PARTIR. UNE FOIS, EN RENTRANT DANS MA CHAMBRE, J’AVAIS DÛ DIRE À CATHY MELAIN QUE J’ALLAIS ME BARRER. ET ELLE ME DIT : TIENS, VA-T-EN, VA JOUER EN NATIONALE 14 AU LUXEMBOURG, VAS-Y ABANDONNE." et de travail que celles que j’ai pu connaître. Je pensais qu’en allant en Russie, on allait travailler comme des dingues à l’entraînement, que le niveau allait être élevé, et en fait pas du tout.
Un jour je me suis pris la tête avec Candace Parker, parce qu’elle prenait le ballon au rebond, traversait le terrain et allait marquer. Et je lui ai dit que ça, c’était mon boulot. Que je lui
Bellenger/IS/FFBB
En 2003 Finaliste LFB avec Tarbes
as forcément plus tendance à l’écouter et à accepter ce qu’elle te dit. Au retour de l’été 2003, je rejoins Bourges. C’est un moment important pour le club : l’arrêt de Yannick Souvré, le départ de Cathy Melain à Venise et d’Ilona Korstine à Samara, l’arrivée de Pierre Vincent. Ils sont en reconstruction, alors je me dis qu’on peut peut-être écrire une nouvelle histoire. C’est bien d’être au début du livre, c’est un sacré challenge. Pouvoir évoluer dans un cadre et un club comme Bourges, c’est super excitant. J’arrive en même temps que Pierre Vincent, qui a énormément compté dans ma carrière. On peut le qualifier de mentor. C’est celui qui m’a peaufiné. J’ai eu des entraîneurs formidables dans ma carrière, ils m’ont tous apporté quelque chose. C’est lui qui m’a sculpté, qui m’a donné les derniers filons qu’on peut apprendre à une meneuse de jeu. Il m’a fait comprendre le jeu, grandir individuellement, mentalement. Tout de suite il m’a lancé dans le bain, il a eu confiance en moi. On était reparti sur un cycle de trois ans dans l’idée au bout de tout remporter. Ça commence par la Coupe de France en 2005, puis le triplé Championnat/Coupe de France et Tournoi de la Fédération en 2006. On enchaîne après avec le Mondial au Brésil avec les Bleues, et on termine 5e. C’était vraiment une bonne performance. Maintenant je me souviens d’être un peu frustrée. Certes il y avait des anciennes qui allaient arrêter, mais contre les Lituaniennes dans le dernier match, les petits jeunes que nous étions Emmeline Ndongue, Emmanuelle Hermouet et moi, Alain Jardel ne nous fait pratiquement pas jouer pour laisser ces cadres qui ont neuf matches dans les pattes, alors qu’on a 20 points d’avance. On aurait pu célébrer ça toutes ensemble sur la fin. Mais bon, c’est sa gestion. À ce moment, on ne sait pas qu’il va arrêter ensuite et terminer son histoire en Équipe de France. De toute manière, ma période avec Alain Jardel n’était vraiment pas simple, mais ça m’a fait avancer, grandir. J’ai eu la chance de participer aux compétitions. Je ne me plains pas. En 2007, je dispute avec Bourges mon premier Final Four en Euroligue. Enfin ! On butait chaque année en quarts de finale. On se demandait quand on allait le passer. Je me souviens que j’avais été catastrophique lors ce Final Four. Comme si pour moi ma finalité c’était déjà d’y être. Mais pas de le jouer. Contre Valence, j’avais été nulle. C’est pour ça que c’est important de ne pas se donner de limite, d’objectif précis. Je n’ai jamais eu de plan de carrière, car pour moi c’est se mettre dans une boîte qui n’a pas lieu d’être. À 18 ans comme aujourd’hui à 33 ans, ma mentalité a toujours été de vouloir progresser. L’été juste après a été compliqué avec les Bleues. C’est Jacky Commères qui reprend l’équipe, et on termine à la 8e place à l’Euro 2007 en Italie, on ne se qualifie pas pour le Tournoi de Qualification Olympique, c’est le
Bellenger/IS/FFBB
En 2003 première sélection en EDF
Bellenger / IS / FFBB
MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
En 2007 à l'Euro redonnerais le ballon à la fin pour shooter. Ces filles savent tout faire donc c’est compliqué. Et c’est pour ça que j’ai décidé de rester une deuxième année, pour faire une année complète et voir comment ça allait se passer. Au bout de deux mois, j’ai compris que ça serait identique. En plus de ça on s’est planté, on n’a pas gagné l’Euroligue. J’allais là-bas pour gagner de l’argent et aussi être championne d’Europe. Et on échoue deux fois en demi-finale. On n’y arrive pas parce qu’on n’avait pas assez travaillé. Après, le cadre de vie est incroyable. Tu deviens un peu princesse, tu as un chauffeur, un appartement génial, on voyage en avion privé. J’étais comme une gamine moi. Quand tu y es ce n’est pas simple, tu es un peu triste, mais maintenant aujourd’hui je me dis que mes années à Ekaterinbourg étaient géniales. C’est une expérience de vie et de basket, tu côtoies d’autres gens, d’autres mentalités. Tu sors de ta zone de confort, tu apprends sur toi et sur les autres. Pour rien au monde je ne changerais mon expérience en Russie. Avec du recul, je me dis que c’était bien. En 2011, je quitte
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En 2003 à Bourges
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SUR LE TOIT DE L’EUROPE Pour ma dernière saison à Bourges en 2009, on réalise un nouveau doublé Championnat/ Coupe de France. J’avais décidé de partir, j’ai sentis que c’était le bon moment, et ça coïncidait avec l’arrêt de Cathy Melain à Bourges. Il y avait comme une fin de cycle, donc je me dis qu’à 27 ans, quand Ekaterinbourg me refait de l’œil, il faut y aller. Avant d’aller en Russie, il y a un Euro avec l’Équipe de France très tôt dans l’été, où Cathy Melain est rappelée en Bleu. Pierre Vincent lui demande dans la saison si elle voulait bien réintégrer l’Équipe de France, la préparation était très courte
et il avait besoin d’éléments comme Cathy qui s’adapte facilement. Elle m’en parle, je lui conseille plutôt de ne pas revenir. On était une équipe toute jeune, je pensais qu’elle n’allait pas pouvoir sauver le monde. Et je me suis totalement trompé, on termine championne d’Europe. La dernière journée de l’Euro je l’ai remercié, car sans elle on n’aurait pas été titré. Elle a joué le rôle de pansement là où ça saignait. Elle a terminé à 2,4 points de moyenne, je me suis foutu de sa gueule à la fin. C’est ce qui est fort pour quelqu’un qui a eu une carrière incroyable et plein de titres, de venir servir l’équipe ainsi. C’est grâce à elle qu’on est championne d’Europe. Je me souviens qu’en 2005 à l’Euro, je suis dans les tribunes, et je vois la République Tchèque monter sur le podium et être sacrée. Et je me dis que ça doit être le pied d’être championne d’Europe. Et en 2009, j’ai pensé à ça. Quand je suis sur le podium, je regarde les joueuses qui sont dans les tribunes, et je me dis qu’elles pensent comme moi en 2005, et ça m’a fait encore plus plaisir. C’est aussi de là qu’est né le surnom des Braqueuses, parce qu’on a fait des matches un peu volés, tendus, avec des prolongations. Le groupe était né depuis 2008, mais en un an, on a déjà su créer un état d’esprit. Ce titre a été presque inespéré, c’était plus fort que mon premier titre en LFB. J’ai appris à apprécier les matches gagnés et les titres. Celui-ci était fou. L’or autour du cou, je décolle donc pour Ekaterinbourg. En début de saison, j’ai dû rentrer en France pour soigner des petits problèmes de santé. Je fais mon premier match d’Euroligue en décembre du coup, ce qui complique sans doute mon intégration. Et puis, je joue avec des joueuses de très grande qualité, mais qui n’ont pas du tout le même état d’esprit
Presse Sports / Pochat
gros désastre. C’est la pire campagne dont j’ai fait partie. On était en regroupement à Anglet et je me souviens d’une des premières réunions où on se dit en interne qu’on vise le titre. Et moi je trouve ça précipité : on a un nouveau staff, il y a beaucoup d’anciennes qui ont arrêté, beaucoup de nouvelles joueuses. On ne sait pas ce qu’on vaut. Je nous trouvais un peu prétentieuses. Et ça n’a pas manqué, on s’est complètement cassé la gueule. En interne, ce n’était pas joli. Il y avait une ambiance à chier. Il y a eu des tensions entre les plus anciennes et les plus jeunes. Il y a eu une incompréhension dans tout ça. Au retour de l’Euro 2007, je refuse une offre pour aller à Ekaterinbourg en Russie. Je n’étais pas prête, je ne sais pas pourquoi, j’avais la sensation de ne pas avoir bouclé la boucle à Bourges. Cette saison 2007-08, on remporte le championnat et la Coupe de France. C’est le moment où Bourges redevient le grand Bourges de l’époque de Souvré. On dispute un nouveau Final Four en Euroligue. Mais celuici est douloureux car on doit aller en finale, on perd après prolongations contre Brno (République Tchèque) en demi. Et la 3e place on la perd au buzzer contre Ekaterinbourg. Je me retourne vers Pierre Vincent et je lui dis que finalement ce n’était pas notre année. Il arrive d’ailleurs à la tête des Bleues juste après à l’été 2008 pour les qualifications à l’Euro. C’est un renouveau complet. Moi, j’adhère complètement à sa philosophie, son basket depuis 2003 à Bourges. Il fait le point, il élargit le groupe, il prend des jeunes et met de côté des anciennes. Je me souviens de ses premiers discours, il parlait de servir l’Équipe de France, mais de ne pas s’en servir. C’est-à-dire que tu ne décides pas quand tu viens ou pas et que l’équipe nationale n’appartient à personne. Ça c’était un discours qu’on n’avait pas encore entendu. On repartait de zéro, il fallait remettre des principes. Et c’est ce qu’on cultive depuis 2008, et ce qui fait que chaque année, peu importe qui fait partie de l’Équipe de France, on a gardé cet d’esprit. Moi la première j’y suis, je me bats pour avoir ma place, et je veux montrer que je suis légitime à être prise dans l’équipe, et que je n’arrive pas la fleur au fusil.
En 2005, avec Bourges en Euroleague
En 2006 au Mondial avec Valérie Garnier
SES DÉBUTS EN BLEU : "QUAND TU ES FAIBLE MENTALEMENT, TU CRAQUES. IL Y A DES JOURS OÙ J’AI PLEURÉ, D’AUTRES OÙ J’AI VOULU PARTIR. UNE FOIS, EN RENTRANT DANS MA CHAMBRE, J’AVAIS DÛ DIRE À CATHY MELAIN QUE J’ALLAIS ME BARRER. ET ELLE ME DIT : TIENS, VA-T-EN, VA JOUER EN NATIONALE 14 AU LUXEMBOURG, VAS-Y ABANDONNE." et de travail que celles que j’ai pu connaître. Je pensais qu’en allant en Russie, on allait travailler comme des dingues à l’entraînement, que le niveau allait être élevé, et en fait pas du tout.
Un jour je me suis pris la tête avec Candace Parker, parce qu’elle prenait le ballon au rebond, traversait le terrain et allait marquer. Et je lui ai dit que ça, c’était mon boulot. Que je lui
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En 2003 Finaliste LFB avec Tarbes
as forcément plus tendance à l’écouter et à accepter ce qu’elle te dit. Au retour de l’été 2003, je rejoins Bourges. C’est un moment important pour le club : l’arrêt de Yannick Souvré, le départ de Cathy Melain à Venise et d’Ilona Korstine à Samara, l’arrivée de Pierre Vincent. Ils sont en reconstruction, alors je me dis qu’on peut peut-être écrire une nouvelle histoire. C’est bien d’être au début du livre, c’est un sacré challenge. Pouvoir évoluer dans un cadre et un club comme Bourges, c’est super excitant. J’arrive en même temps que Pierre Vincent, qui a énormément compté dans ma carrière. On peut le qualifier de mentor. C’est celui qui m’a peaufiné. J’ai eu des entraîneurs formidables dans ma carrière, ils m’ont tous apporté quelque chose. C’est lui qui m’a sculpté, qui m’a donné les derniers filons qu’on peut apprendre à une meneuse de jeu. Il m’a fait comprendre le jeu, grandir individuellement, mentalement. Tout de suite il m’a lancé dans le bain, il a eu confiance en moi. On était reparti sur un cycle de trois ans dans l’idée au bout de tout remporter. Ça commence par la Coupe de France en 2005, puis le triplé Championnat/Coupe de France et Tournoi de la Fédération en 2006. On enchaîne après avec le Mondial au Brésil avec les Bleues, et on termine 5e. C’était vraiment une bonne performance. Maintenant je me souviens d’être un peu frustrée. Certes il y avait des anciennes qui allaient arrêter, mais contre les Lituaniennes dans le dernier match, les petits jeunes que nous étions Emmeline Ndongue, Emmanuelle Hermouet et moi, Alain Jardel ne nous fait pratiquement pas jouer pour laisser ces cadres qui ont neuf matches dans les pattes, alors qu’on a 20 points d’avance. On aurait pu célébrer ça toutes ensemble sur la fin. Mais bon, c’est sa gestion. À ce moment, on ne sait pas qu’il va arrêter ensuite et terminer son histoire en Équipe de France. De toute manière, ma période avec Alain Jardel n’était vraiment pas simple, mais ça m’a fait avancer, grandir. J’ai eu la chance de participer aux compétitions. Je ne me plains pas. En 2007, je dispute avec Bourges mon premier Final Four en Euroligue. Enfin ! On butait chaque année en quarts de finale. On se demandait quand on allait le passer. Je me souviens que j’avais été catastrophique lors ce Final Four. Comme si pour moi ma finalité c’était déjà d’y être. Mais pas de le jouer. Contre Valence, j’avais été nulle. C’est pour ça que c’est important de ne pas se donner de limite, d’objectif précis. Je n’ai jamais eu de plan de carrière, car pour moi c’est se mettre dans une boîte qui n’a pas lieu d’être. À 18 ans comme aujourd’hui à 33 ans, ma mentalité a toujours été de vouloir progresser. L’été juste après a été compliqué avec les Bleues. C’est Jacky Commères qui reprend l’équipe, et on termine à la 8e place à l’Euro 2007 en Italie, on ne se qualifie pas pour le Tournoi de Qualification Olympique, c’est le
Bellenger/IS/FFBB
En 2003 première sélection en EDF
Bellenger / IS / FFBB
MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
En 2007 à l'Euro redonnerais le ballon à la fin pour shooter. Ces filles savent tout faire donc c’est compliqué. Et c’est pour ça que j’ai décidé de rester une deuxième année, pour faire une année complète et voir comment ça allait se passer. Au bout de deux mois, j’ai compris que ça serait identique. En plus de ça on s’est planté, on n’a pas gagné l’Euroligue. J’allais là-bas pour gagner de l’argent et aussi être championne d’Europe. Et on échoue deux fois en demi-finale. On n’y arrive pas parce qu’on n’avait pas assez travaillé. Après, le cadre de vie est incroyable. Tu deviens un peu princesse, tu as un chauffeur, un appartement génial, on voyage en avion privé. J’étais comme une gamine moi. Quand tu y es ce n’est pas simple, tu es un peu triste, mais maintenant aujourd’hui je me dis que mes années à Ekaterinbourg étaient géniales. C’est une expérience de vie et de basket, tu côtoies d’autres gens, d’autres mentalités. Tu sors de ta zone de confort, tu apprends sur toi et sur les autres. Pour rien au monde je ne changerais mon expérience en Russie. Avec du recul, je me dis que c’était bien. En 2011, je quitte
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K-Reine / FFBB
En 2009 au retour de l'Euro
En 2011 à l'Euro
Bellenger / IS / FFBB
L’APOTHÉOSE
Presse Sports / Molliere
En 2012 au TQO avec Pierre Vincent
donc la Russie. Je ne voulais pas gâcher mes dernières années de basketteuse. Certes mon compte en banque allait être plein, mais je ne veux pas perdre du temps à traîner la patte. Comme une évidence, j’ai envie de retourner à la maison, à Bourges. Je sais qu’il y a tout ce que je recherche. Avant de retourner à Bourges, on dispute l’Euro 2011 en Pologne avec les Bleues. Ce n’est pas un bon souvenir pour moi, je n’avais pas été bonne. J’avais perdu un peu de ma légitimité du fait de mes performances. Je considère que je veux être toujours bonne pour apporter à l’équipe. Et là je n’y arrivais. Du coup j’étais un peu décriée en interne. Inconsciemment je le ressentais, et je n’ai pas passé un bel été. Maintenant on termine avec une médaille de bronze, c’est bien. Ça enchaînait après 2009, à un an des Jeux de Londres. C’est un peu le début de l’Équipe de France qui s’installe dans le top européen. On pouvait dire que 2009 était un coup d’éclat, en 2011 on confirme avec le bronze. Deux podiums de suite, on n’en a pas fait souvent dans l’histoire.
Au début de la saison 2011-12, je reviens donc à Bourges. Dans mon idée, il y avait Pierre Vincent à sa tête. Et au mois de mars 2011, Pierre m’appelle pour m’annoncer lui-même qu’il ne sera pas à Bourges l’an prochain. Je le sentais venir. Mais ça n’a pas remis en question ma venue. Surtout quand j’ai appris que ce serait Valérie Garnier, que j’avais déjà côtoyée en Équipe de France, que je respectais et avec qui j’avais vraiment bien accroché. La première saison, on remporte le championnat et on perd en finale de la Coupe contre Arras à Bercy. C’est une catastrophe ce match. Je ne fais pas une saison extraordinaire. 2009 c’était l’apothéose de ma carrière, et là tout doucement je suis un peu en fin de carrière. Très vite derrière, arrive le Tournoi de Qualification Olympique à Ankara en Turquie avec les Bleues. C’était totalement nouveau on ne savait pas trop où on mettait les pieds. Pour l’anecdote, mon père est venu avec un ami à Ankara. On ne connaissait pas ce mode de fonctionnement. Ils avaient pris des matches pour toute la semaine, demi-finales et finale comprises. Et on s’est qualifié pour les J.O. lors du quart de finale en battant la Corée du Sud. Et comme ils avaient acheté les billets en avance, ils sont restés en demi-finale et finale pour voir des matches qui ne les intéressaient pas. On était déjà rentré en France et eux étaient encore en Turquie. On savait que de toute manière, nos Jeux commençaient au TQO. Maintenant, une fois qu’on s’est qualifiées, je m’en souviendrais toujours, le nombre de réunions qu’on a fait avec Pierre Vincent où il nous demandait quel était notre objectif aux Jeux Olympiques de Londres. Moi je n’en n’avais
pas, juste aller aux Jeux, au village olympique, être avec les autres athlètes, participer à la cérémonie d’ouverture, c’est tout ce qui me parlait. La compétition de basket en elle-même me parlait très peu. Pierre Vincent était fou, il avait les cheveux qui se hérissaient sur la tête. Il nous avait dit qu’on allait exister uniquement si on gagnait. Mais cela nous importait peu. On était déjà tellement heureuse d’être aux Jeux. Je pense que finalement cette insouciance a été une de nos qualités et ce qui a fait notre réussite, et qui nous a permis de remporter cette médaille d’argent olympique. Les Jeux j’en ai parlé, reparlé encore et encore, c’est la meilleure compétition de toute ma vie. C’est un peu l’aboutissement individuel et collectif pour moi. En 2009, c’était le sommet de ma montagne. Sauf que là, les Jeux, j’ai volé au-dessus de l’Himalaya. C’était improbable. Je ne m’attendais pas du tout à performer comme cela. J’étais sur une pente descendante. Et jouer un basket comme ça, qui n’est pas vraiment dans mes caractéristiques, c’est-à-dire marquer des points pendant toute une compétition avec 15 points de moyenne, en plus quelques paniers un peu fous qui marquent les esprits, ça a été inattendu. Je pense que jamais je ne vivrais d’aussi forts moments que cet été 2012. C’était de la folie pure. Je pense que l’état de transe ne s’explique pas. Je reviens à ce moment, comment j’étais dans ma vie, comment j’ai appréhendé la compétition et c’est tout l’inverse de la manière dont je m’étais formatée. Je suis super studieuse, tous les systèmes je les connais par cœur, je sais quoi faire, mes adversaires je les connais, je révise avant. Là j’y allais en regardant tout juste ce que Pierre Vincent avait marqué au tableau. Une certaine légèreté et un certain recul avec mon mode de fonctionnement habituel. Et à partir de ce moment, je me suis dit que le fait de jouer libérée ça me permet d’être performante aussi. Comme quoi je me parasite un peu le cerveau avec trop d’infos. Depuis j’en suis revenu, il faut que je sois un minimum concentrée, ce n’est pas tous les jours Londres 2012 (rires). Je n’ai pas la recette magique, c’est ballot car sinon je me la préparerais avec tous les ingrédients pour Rio. 2012 a été le basculement de ma carrière. Les retombées derrière ça a été un truc de fou. Tout bêtement, quand on descend les ChampsElysées, les gens t’appellent par ton prénom. J’étais étonnée, ils le connaissent ! Après les J.O., je pensais que le soufflé allait retomber. Mais j’ai été vraiment surprise car c’est retombé un petit peu, mais pas aussi bas que ça l’était avant. Maintenant, le basket féminin on en parle, on est connu. Les Braqueuses ça marque les esprits. Et mon nom aussi est pas mal cité également. Je n’ai jamais voulu attirer l’œil sur moi car je fais un sport collectif et je considère que sans mes copines je ne gagne pas. Je sais que je n’ai pas perdu pied, je ne me
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En 2009 à l'Euro avec Cathy Melain
Presse Sports / Montigny
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16 BASKETBALLMAGAZINE
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06/07/15 14:47
En 2012 au retour des JO
Bellenger / IS / FFBB
En 2012 aux JO avec Pierre Vincent
Bellenger / IS / FFBB
En 2012 au TQO
Presse Sports / Molliere
MA CARRIÈRE PAR CÉLINE DUMERC >
© Christophe Elise / FFBB
En 2012 avec sa médaille d'argent
18 BASKETBALLMAGAZINE
suis pas dit que j’étais devenu la star du basket féminin. Ce sont les gens qui m’ont étiqueté, mais moi je suis restée la même. On a fait cette médaille d’argent, elle est à nous. Mais ça fait un truc en plus quand tu sais que tu as plein de petites filles qui vont s’inscrire à faire du basket derrière à la rentrée, parce qu’elles t’ont vu à la télévision. Ça te rend encore plus fier que ce petit métal que tu as décroché. Ça fait vraiment plaisir, ça nous rend encore plus fier de ce qu’on a fait. La saison en Ligue Féminine reprend ensuite dans l’euphorie. Dès qu’on se déplaçait en championnat de France, c’était l’émeute. Salle pleine sur salle pleine. À la fin des matches, je ressors des vestiaires pour aller signer des autographes. Tu vois les yeux des gamins, et nous ça ne nous coûte rien hormis dix minutes de notre temps. C’est leur rendre aussi tout le soutien qu’ils peuvent t’amener. Et à chaque fois il me fallait presque des gardes du corps, tout le monde se jetait sur moi. Je m’attendais à ce que ça se calme au fil de la saison, et en fait pas du tout. C’est bien, ça fait grandir le basket féminin. Juste ensuite, on enchaîne avec l’Euro 2013 organisé en France. On se dit c’est génial, on va encore faire le buzz car on est dans la continuité des Jeux. Ce championnat d’Europe a été génial, tout a été magique car le public a été présent comme jamais. On a joué dans des salles extraordinaires, des marseillaises a capella. J’ai des souvenirs incroyables. Tout a été parfait, et puis le jour de la finale on perd d’un point. Cette finale, ça reste un goût d’inachevé. Ce qui me marque dans ce match, c’est le public. Je me souviens rentrer dans cette arène et voir tous les drapeaux. J’avais des frissons. Je me disais que si on gagnait, ça allait être incroyable. Et à la fin, on perd, et s’installe un silence de mort. Tout le monde se regarde et se demande si c’est vraiment terminé. Moi aussi sur le terrain. J’avais envie de me pincer pour me réveiller. C’est ça qui m’a fait le plus de mal. L’Espagne a fait un très bon match, elles nous ont faites déjouer, je n’enlève en rien leur victoire. Mais moi ça m’a fait du mal de ne pas offrir cette victoire à tous ces gens qui étaient venus, à tout l’engouement qu’on avait vécu cet été 2013, à l’arrêt d’Edwige Lawson-Wade et Emmeline Ndongue. Tous ces détails font que ça te déchire le cœur. C’est le partage qu’on aurait eu de ce moment qui a été difficile à laisser partir. J’avais mal au cœur. Derrière on aurait fait encore un pas de géant avec le titre, pour le basket féminin, pour la médiatisation, tout ça. Si on avait eu le trophée dans les mains, il y aurait eu une explosion bien plus grande.
LE RÊVE AMÉRICAIN Au milieu de la saison 2013-14, je fais le choix d’aller en WNBA à Atlanta. Je n’avais jamais vraiment rêvé d’aller aux Etats-Unis, ce n’est pas du tout quelque chose qui m’animait,
et puis j’ai cette proposition qui arrive. Je regarde mon emploi du temps, il y avait le Championnat du Monde avec l’Équipe de France en fin d’été, et je me dis, pourquoi pas ? Un peu comme pour Ekaterinbourg, je me dis que c’est le moment. J’ai fait trois mois, c’était le pied total dans ma vie. J’ai profité, j’y allais un peu en touriste. Je ne l’ai pas trop dit aux dirigeants du Dream d’Atlanta, mais je n’attendais rien, je n’attendais pas de performer, de briller et de me faire un nom. J’y allais juste pour vivre une expérience, à la fois de jeu et voir une nouvelle mentalité, un nouveau mode de fonctionnement. Des fois je jouais, d’autre fois non. Rien n’est très logique, il ne faut pas chercher à comprendre. Un jour, le coach me dit qu’il va me mettre dans le cinq de départ. Je ne sais toujours pas pourquoi. Le lendemain, il me sort à la mi-temps et il m’engueule alors que j’avais à peine joué une minute... J’ai adoré car tu ne joues qu’avec des joueuses qui ont une mentalité différente de la mienne. C’est-à-dire qu’elles pensent qu’elles sont les meilleures, qu’elles savent tout faire. Ça a une limite car des fois elles font n’importe quoi car elles pensent qu’elles sont toutes Michael Jordan et ça part en sucette (rires). Si j’ai une leçon à retenir de mon expérience, c’est que nous petites françaises on a tendance à se tirer vers le bas, alors qu’il suffit de croire en nos capacités. Ça ne veut pas dire que tu te la pètes, ce n’est pas que tu as un égo surdimensionné, juste que tu crois en tes chances. Au final, on se plante avec Atlanta, on se fait sortir au premier tour des playoffs. C’était à l’image d’Ekaterinbourg où on ne s’entraînait pas bien, où on pensait qu’il fallait appuyer sur un bouton. Un peu comme en NBA où ils attendent les playoffs pour s’entraîner comme des dingues. Ça m’a fait rentrer plus tôt, retrouver les Bleues plus tôt pour ma préparation pour le Mondial 2014. C’était la première campagne dirigée par Valérie Garnier, et on termine à la 7e place. C’était un nouveau cycle, tout en sachant qu’au Mondial la meilleure place qu’on est fait c’était la 5e position en 2006 avec Alain Jardel. Juste avant la compétition, on joue les Américaines en préparation à Paris Coubertin. C’était magique. Les Etats-Unis, je me souviens les premières fois où je les ai jouées, Alain Jardel se moquait un peu de nous en nous disant de rentrer nos appareils photos, car on était tellement fans de ces joueuses qu’on les regardait un peu jouer. Et en septembre 2014 à Coubertin, non seulement on les joue les yeux dans les yeux et en plus on gagne. C’est jouissif comme moment. Je me souviens à la fin avec Endy (Miyem) on se regarde et on rigole. Tellement c’est inimaginable. On sait que c’est un match de préparation, les gens dans les tribunes ou devant leur télévision un peu moins. Sauf que nous on sait que ce n’est pas la même équipe qu’on va jouer au Mondial. Et
MAI2016 19
En 2013 lors de l'Euro Bellenger / IS / FFBB
En 2014 lors du Mondial Bellenger / IS / FFBB
En 2015 lors de l'Euro
il se trouve qu’on les recroise au Mondial en quarts de finale et qu’on prend une branlée. Entre temps, elles ont rappelé Britney Griner après avoir perdu contre nous, elles ont eu un peu peur. Et quand il faut vraiment gagner, ces filles elles répondent présentes. Mais c’était un moment sympa. Ce n’est pas tous les jours que tu peux écrire que tu as battu les Etats-Unis. Au moment où je l’écrirais sur mon CV, plus personne ne se souviendra qu’il s’agissait d’un match de préparation (rires).
OBJECTIF RIO À l’été 2015, on termine à nouveau avec la médaille d’argent à l’Euro en Hongrie et en Roumanie. C’est une deuxième place totalement différente de celle acquise deux ans auparavant. Deux histoires différentes car il y a eu un remaniement entre temps avec un nouveau staff, on n’est pas à la maison, le
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Bellenger / IS / FFBB
Bellenger / IS / FFBB
En 2015 lors de l'Euro
soufflé des J.O. est retombé. En demi-finale on élimine l’Espagne, qui est un peu le chat noir. Moi ça date de mon époque d’Alain Jardel. Jamais on ne les rencontrait à l’époque, et elles étaient toujours sur le podium. Et je me souviens qu’il disait qu’il en avait marre car il voulait les jouer, il pensait qu’on pouvait les battre. On gagne donc contre l’Espagne en demi-finale mais on perd contre la Serbie en finale. Comme nous en 2009 on a eu notre heure, et bien en 2015 c’était au tour de la Serbie. Effectivement, en 2013 on ne fait pas un bon match contre l’Espagne, autant en 2015, les Serbes ont fait un très beau match, elles ont imposé leur jeu. Elles ont été royales. Mais on gagne encore une médaille d’argent, encore une. Ce qui nous fait quatre podiums en cinq étés, de 2011 à 2015. Maintenant, il ne faut plus se cacher derrière cette étiquette que l’on a. C’est pour cela qu’on va au TQO en étant favorites. Il ne faut pas se cacher, Dieu sait que je n’aime pas ça, mais on est favorites. Si on ne se dit pas favoris sur un Tournoi de Qualification Olympique à la maison avec les équipes de Cuba et la Nouvelle-Zélande que l’on a dans notre groupe, on mentirait. On a tout de même évolué entre 2008 où j’avais à peine entendu parler du TQO, et aujourd’hui en 2016 où c’est le strict minimum. Maintenant qu’on sait que c’est en France à Nantes Métropole du 13 au 19 juin prochain, on ne peut que dire merci la Fédération. On va retourner dans un endroit où on a joué l’Euro en 2013, dans cette région qui aime le basket et le basket féminin et qui nous l’a déjà montré. Moi j’ai hâte d’y participer, ça va être le début d’une aventure qui j’espère sera longue. Je trouve que c’est un sacré cadeau de nous l’organiser en France, on ne se rend pas compte la chance que c’est de participer à une compétition à la maison, et même si elle va être courte. Le plus court possible j’espère pour ensuite aller à Rio. Revivre aux Jeux de 2016 ce qu’on a vécu en 2012 ? Ça ne me semble pas impossible mais ça sera compliqué. Ce qu’on a vécu on ne pourra jamais le revivre exactement. Il y avait une ambiance, un environnement, à Londres à une heure de France seulement. En 2016, on va vivre au Brésil dans un pays qui va amener son lot de surprises, de fêtes, de festivités et
© Chris Elise
de décalage horaire. Les matches vont être diffusés en pleine nuit en France, est-ce que les gens vont se lever pour nous voir ? Une médaille olympique c’est difficile. Déjà il faut pouvoir se qualifier et participer aux Jeux. Il ne faut pas être trop gourmand. Entre 2000 et 2012, j’ai attendu quatre olympiades. Si déjà on a la chance d’en faire deux coups sur coups, on se battra pour faire le meilleur résultat possible, c’est certain. Ça sera différent, on aura un autre statut. Les gens vont attendre les basketteuses de Londres. Toute ma carrière, j’ai annoncé très tôt dans la saison mes choix de départ, à Tarbes, Bourges ou même Ekaterinbourg. Et cette année, je ne déroge pas à ma ligne de conduite. J’arrivais au bout de mes cinq ans de contrat à Bourges. Quand j’avais négocié avec le club berruyer en 2011, on avait mis une clause pour de la reconversion pour notamment intégrer le Centre de Droit et d’Economie du Sport à Limoges. Sauf que je voyais le temps qui passait, et je ne me sentais pas emballé par ce projet. Au fil des cinq ans à Bourges, et même onze en tout en cumulant avec mon passage entre 2003 et 2009, j’ai vécu des moments merveilleux, j’ai acheté une maison là-bas, mais dans mon futur lointain je ne me voyais pas vivre à Bourges. Cet été j’ai eu des vacances, j’étais pas mal de temps dans le Sud-Ouest. Et ça m’a fait réfléchir, ça me manque tout de même. Le destin fait que Basket Landes est intéressé, je me pose la question et l’idée fait son petit bonhomme de chemin. Pourquoi ne pas essayer aussi de faire grandir avec l’expérience que j’ai le club de Basket Landes qui a beaucoup d’ambition, qui a envie depuis des années et qui est sur une montée en puissance. J’ai aussi eu l’opportunité d’aller à l’étranger mais je l’ai mise de côté assez rapidement. Qu’est-ce que j’allais avoir à l’étranger à part un peu plus d’argent ? J’ai écouté mon cœur, j’ai vu une vision un peu plus lointaine et l’envie de retourner dans le Sud-Ouest a pris le pas. Quand je l’ai officialisé, ça a été un vrai cataclysme dans le bon sens du terme. J’ai vécu des sacrés moments à Bourges. En y retournant en 2011, je pensais que ce serait mon dernier club. Mais les Jeux de Londres ont fait basculer les choses et la vision que je m’étais faite de ma carrière. J’ai vu
UNE DÉCISION À PRENDRE AU BON MOMENT Concernant l’Équipe de France, c’est un peu le point d’interrogation. Je n’ai pas dit que j’arrêtais après Rio, ça a été sorti mais je n’ai jamais dit concrètement que j’arrêtais après
Presse Sports / Argueyrolles
En 2015 championne LFB
vais vivre de plus ? Une médaille de plus dans une compétition… J’ai vécu tout ce que j’avais à vivre, même au-delà de mes espérances. Je ne vais pas me sous-estimer et passer pour une fausse modeste, je sais que j’ai des qualités et que j’ai un statut en bleu, mais je sais aussi que j’ai eu de la chance qu’on me donne les clés de la maison. On verra après Rio. Il y aura très vite une nouvelle fenêtre de qualification à l’Euro 2017 en novembre prochain à Chalon-sur-Saône et Clermont-Ferrand. Ça ne va pas être une décision facile et comme je l’ai toujours fait, je la prendrais quand je la sentirais. J’en ai parlé avec Cathy Melain, qui a arrêté en 2009 sur un titre de championne d’Europe. Et je lui demande comment elle a
SUR LES JEUX DE LONDRES : "MOI JE N’AVAIS PAS D’OBJECTIFS, JUSTE ALLER AUX JEUX, AU VILLAGE OLYMPIQUE, ÊTRE AVEC LES AUTRES ATHLÈTES, PARTICIPER À LA CÉRÉMONIE D’OUVERTURE, C’EST TOUT CE QUI ME PARLAIT. LA COMPÉTITION DE BASKET EN ELLE-MÊME ME PARLAIT TRÈS PEU. PIERRE VINCENT ÉTAIT FOU, IL AVAIT LES CHEVEUX QUI SE HÉRISSAIENT SUR LA TÊTE." les Jeux. À part si on est championne olympique, et là j’ai dit que j’arrêtais (rires). J’ai une réflexion qui me fait dire que moi, j’ai eu la chance d’intégrer l’Équipe de France car il y avait de la place à ce moment. Il y avait des joueuses qui arrêtaient, il y avait une place de meneuse de jeu à prendre. J’ai retroussé mes manches, j’ai pris cette place, mais elle existait. Sauf que je considère que tant que je suis là, je bloque le passage à certaines et elles n’auront pas l’occasion de vivre tous les moments que j’ai eu la chance de vivre. Et je me dis que c’est égoïste de rester. C’est ça qui me fait hésiter à continuer ou non. L’envie je l’aurais je pense, j’aime tellement ça. J’ai vécu tellement de choses, j’ai eu la chance de vivre des moments incroyables. Qu’est-ce que je
su à quel moment arrêter. Et elle le sentait simplement. Sauf que moi je n’arrive pas à le sentir, à le décider. J’avais en quelque sorte un peu décidé que j’allais arrêter après Rio. Mais plus le temps passe, moins j’ai l’impression que c’est ce dont j’ai envie. Et puis, on me parle de plus en plus du record de sélections qui approche (ndlr, 237 sélections avant de débuter la campagne estivale, contre 254 pour Paoline Ekambi, actuelle détentrice du record). Je m’en rends compte avec les joueuses qui m’entourent, il y a beaucoup de jeunes qui ont à peine 50 sélections, alors moi avec mes 237 sélections elles sont impressionnées. Au final, si je peux le dépasser ce record, ça me fera plaisir. J’espère juste avoir un été surchargé, où je n’aurais pas de
Presse Sports / Réau
En 2014 lors des matches de préparation au En Mondial 2014 en WNBA
que je pouvais encore être performante. J’ai dit à Basket Landes que je n’étais plus toute jeune. Dans deux ans, je ne sais pas ce qu’il se passera. Si ça va encore, je résignerais encore et encore, et ça ne finira jamais cette histoire ! (rires) J’arrive dans un moment dans ma carrière où c’est plutôt mon corps qui décide. J’ai 33 ans, mais je dis toujours que j’ai 15 ans dans ma tête et 18 ans d’expérience. Je suis encore une vraie gamine, j’ai encore envie de m’amuser, de jouer au basket avec des copines. Tant que physiquement je peux me lever, marcher, c’est une chance inouïe de faire de ta passion ton métier.
En 2016 vainqueur en Eurocoupe avec Valérie Garnier vacances. Ça voudra dire qu’on aura réussi le Tournoi de Qualification Olympique et les Jeux à Rio ensuite, et c’est ce qui m’importe aujourd’hui. Avoir autant de sélections, de titres et de succès, quand on connaît mes débuts compliqués en Équipe de France, c’est énorme. Je me sens tellement chanceuse. Quand je vois les nouvelles générations, le côté médiatique du basket féminin on en parle un peu plus, on en voit à la télé, ça fausse un petit peu l’image que les jeunes peuvent avoir. Elles ont des paillettes dans les yeux un peu trop vite. Moi je n’avais pas de paillette dans les yeux parce que je ne voyais rien. Maintenant, avec ce côté médiatique, les gens pensent que c’est facile de gagner. Qu’on peut gagner de l’argent et être reconnu. Mais non ce n’est pas ça. Ces jeunes, il ne faut pas qu’elles se trompent. Je pense que j’ai évolué dans un moment de la société qui a fait que je n’ai pas été parasitée par tout cela. Tu peux te permettre de rêver, mais il ne faut pas qu’il y ait juste les paillettes qui t’attirent. Il faut que tu saches que sur ton chemin, il y aura des embûches, qu’il n’y aura pas de tapis rouge. Je me dis que je suis tellement heureuse d’avoir survécu, de ne pas avoir été blasée, de ne pas avoir trébuché. Les titres ont commencé à venir, l’argent aussi, notamment quand je suis partie à Ekaterinbourg, j’aurais pu perdre les pédales. Après Londres, j’aurais pu péter les plombs. Mais je n’ai pas eu la grosse tête, je n’ai pas perdu pied. J’ai toujours gardé à l’esprit que ce qui importe c’est le travail, le plaisir, et me rendre compte de la chance que j’ai. Il y a combien de personnes qui voudraient être à ma place ? Pour rien au monde je ne changerais ma vie. Ma plus grande fierté, ce ne sont pas les médailles, les titres, ces petites breloques que je pourrais regarder plus tard. C’est d’être restée fidèle à moi-même, à la petite basketteuse à Laloubère qui voulait faire plaisir à ses parents, le bonheur que j’offre à mes proches. Il n’y a pas de grand sportif, je suis la star de la famille. J’ai gardé une certaine simplicité, et je suis exactement la même. Après on ne fait que du basket féminin. Il y a des gens qui veulent devenir des stars. Mais star du basket féminin, c’est quoi dans sur planète ? Tu es un microbe. C’est pour ça qu’il faut rester les pieds sur terre, soit la meilleure basketteuse possible, mais tu ne seras pas une star interplanétaire.
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En 2013 lors de l'Euro Bellenger / IS / FFBB
En 2014 lors du Mondial Bellenger / IS / FFBB
En 2015 lors de l'Euro
il se trouve qu’on les recroise au Mondial en quarts de finale et qu’on prend une branlée. Entre temps, elles ont rappelé Britney Griner après avoir perdu contre nous, elles ont eu un peu peur. Et quand il faut vraiment gagner, ces filles elles répondent présentes. Mais c’était un moment sympa. Ce n’est pas tous les jours que tu peux écrire que tu as battu les Etats-Unis. Au moment où je l’écrirais sur mon CV, plus personne ne se souviendra qu’il s’agissait d’un match de préparation (rires).
OBJECTIF RIO À l’été 2015, on termine à nouveau avec la médaille d’argent à l’Euro en Hongrie et en Roumanie. C’est une deuxième place totalement différente de celle acquise deux ans auparavant. Deux histoires différentes car il y a eu un remaniement entre temps avec un nouveau staff, on n’est pas à la maison, le
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En 2015 lors de l'Euro
soufflé des J.O. est retombé. En demi-finale on élimine l’Espagne, qui est un peu le chat noir. Moi ça date de mon époque d’Alain Jardel. Jamais on ne les rencontrait à l’époque, et elles étaient toujours sur le podium. Et je me souviens qu’il disait qu’il en avait marre car il voulait les jouer, il pensait qu’on pouvait les battre. On gagne donc contre l’Espagne en demi-finale mais on perd contre la Serbie en finale. Comme nous en 2009 on a eu notre heure, et bien en 2015 c’était au tour de la Serbie. Effectivement, en 2013 on ne fait pas un bon match contre l’Espagne, autant en 2015, les Serbes ont fait un très beau match, elles ont imposé leur jeu. Elles ont été royales. Mais on gagne encore une médaille d’argent, encore une. Ce qui nous fait quatre podiums en cinq étés, de 2011 à 2015. Maintenant, il ne faut plus se cacher derrière cette étiquette que l’on a. C’est pour cela qu’on va au TQO en étant favorites. Il ne faut pas se cacher, Dieu sait que je n’aime pas ça, mais on est favorites. Si on ne se dit pas favoris sur un Tournoi de Qualification Olympique à la maison avec les équipes de Cuba et la Nouvelle-Zélande que l’on a dans notre groupe, on mentirait. On a tout de même évolué entre 2008 où j’avais à peine entendu parler du TQO, et aujourd’hui en 2016 où c’est le strict minimum. Maintenant qu’on sait que c’est en France à Nantes Métropole du 13 au 19 juin prochain, on ne peut que dire merci la Fédération. On va retourner dans un endroit où on a joué l’Euro en 2013, dans cette région qui aime le basket et le basket féminin et qui nous l’a déjà montré. Moi j’ai hâte d’y participer, ça va être le début d’une aventure qui j’espère sera longue. Je trouve que c’est un sacré cadeau de nous l’organiser en France, on ne se rend pas compte la chance que c’est de participer à une compétition à la maison, et même si elle va être courte. Le plus court possible j’espère pour ensuite aller à Rio. Revivre aux Jeux de 2016 ce qu’on a vécu en 2012 ? Ça ne me semble pas impossible mais ça sera compliqué. Ce qu’on a vécu on ne pourra jamais le revivre exactement. Il y avait une ambiance, un environnement, à Londres à une heure de France seulement. En 2016, on va vivre au Brésil dans un pays qui va amener son lot de surprises, de fêtes, de festivités et
© Chris Elise
de décalage horaire. Les matches vont être diffusés en pleine nuit en France, est-ce que les gens vont se lever pour nous voir ? Une médaille olympique c’est difficile. Déjà il faut pouvoir se qualifier et participer aux Jeux. Il ne faut pas être trop gourmand. Entre 2000 et 2012, j’ai attendu quatre olympiades. Si déjà on a la chance d’en faire deux coups sur coups, on se battra pour faire le meilleur résultat possible, c’est certain. Ça sera différent, on aura un autre statut. Les gens vont attendre les basketteuses de Londres. Toute ma carrière, j’ai annoncé très tôt dans la saison mes choix de départ, à Tarbes, Bourges ou même Ekaterinbourg. Et cette année, je ne déroge pas à ma ligne de conduite. J’arrivais au bout de mes cinq ans de contrat à Bourges. Quand j’avais négocié avec le club berruyer en 2011, on avait mis une clause pour de la reconversion pour notamment intégrer le Centre de Droit et d’Economie du Sport à Limoges. Sauf que je voyais le temps qui passait, et je ne me sentais pas emballé par ce projet. Au fil des cinq ans à Bourges, et même onze en tout en cumulant avec mon passage entre 2003 et 2009, j’ai vécu des moments merveilleux, j’ai acheté une maison là-bas, mais dans mon futur lointain je ne me voyais pas vivre à Bourges. Cet été j’ai eu des vacances, j’étais pas mal de temps dans le Sud-Ouest. Et ça m’a fait réfléchir, ça me manque tout de même. Le destin fait que Basket Landes est intéressé, je me pose la question et l’idée fait son petit bonhomme de chemin. Pourquoi ne pas essayer aussi de faire grandir avec l’expérience que j’ai le club de Basket Landes qui a beaucoup d’ambition, qui a envie depuis des années et qui est sur une montée en puissance. J’ai aussi eu l’opportunité d’aller à l’étranger mais je l’ai mise de côté assez rapidement. Qu’est-ce que j’allais avoir à l’étranger à part un peu plus d’argent ? J’ai écouté mon cœur, j’ai vu une vision un peu plus lointaine et l’envie de retourner dans le Sud-Ouest a pris le pas. Quand je l’ai officialisé, ça a été un vrai cataclysme dans le bon sens du terme. J’ai vécu des sacrés moments à Bourges. En y retournant en 2011, je pensais que ce serait mon dernier club. Mais les Jeux de Londres ont fait basculer les choses et la vision que je m’étais faite de ma carrière. J’ai vu
UNE DÉCISION À PRENDRE AU BON MOMENT Concernant l’Équipe de France, c’est un peu le point d’interrogation. Je n’ai pas dit que j’arrêtais après Rio, ça a été sorti mais je n’ai jamais dit concrètement que j’arrêtais après
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En 2015 championne LFB
vais vivre de plus ? Une médaille de plus dans une compétition… J’ai vécu tout ce que j’avais à vivre, même au-delà de mes espérances. Je ne vais pas me sous-estimer et passer pour une fausse modeste, je sais que j’ai des qualités et que j’ai un statut en bleu, mais je sais aussi que j’ai eu de la chance qu’on me donne les clés de la maison. On verra après Rio. Il y aura très vite une nouvelle fenêtre de qualification à l’Euro 2017 en novembre prochain à Chalon-sur-Saône et Clermont-Ferrand. Ça ne va pas être une décision facile et comme je l’ai toujours fait, je la prendrais quand je la sentirais. J’en ai parlé avec Cathy Melain, qui a arrêté en 2009 sur un titre de championne d’Europe. Et je lui demande comment elle a
SUR LES JEUX DE LONDRES : "MOI JE N’AVAIS PAS D’OBJECTIFS, JUSTE ALLER AUX JEUX, AU VILLAGE OLYMPIQUE, ÊTRE AVEC LES AUTRES ATHLÈTES, PARTICIPER À LA CÉRÉMONIE D’OUVERTURE, C’EST TOUT CE QUI ME PARLAIT. LA COMPÉTITION DE BASKET EN ELLE-MÊME ME PARLAIT TRÈS PEU. PIERRE VINCENT ÉTAIT FOU, IL AVAIT LES CHEVEUX QUI SE HÉRISSAIENT SUR LA TÊTE." les Jeux. À part si on est championne olympique, et là j’ai dit que j’arrêtais (rires). J’ai une réflexion qui me fait dire que moi, j’ai eu la chance d’intégrer l’Équipe de France car il y avait de la place à ce moment. Il y avait des joueuses qui arrêtaient, il y avait une place de meneuse de jeu à prendre. J’ai retroussé mes manches, j’ai pris cette place, mais elle existait. Sauf que je considère que tant que je suis là, je bloque le passage à certaines et elles n’auront pas l’occasion de vivre tous les moments que j’ai eu la chance de vivre. Et je me dis que c’est égoïste de rester. C’est ça qui me fait hésiter à continuer ou non. L’envie je l’aurais je pense, j’aime tellement ça. J’ai vécu tellement de choses, j’ai eu la chance de vivre des moments incroyables. Qu’est-ce que je
su à quel moment arrêter. Et elle le sentait simplement. Sauf que moi je n’arrive pas à le sentir, à le décider. J’avais en quelque sorte un peu décidé que j’allais arrêter après Rio. Mais plus le temps passe, moins j’ai l’impression que c’est ce dont j’ai envie. Et puis, on me parle de plus en plus du record de sélections qui approche (ndlr, 237 sélections avant de débuter la campagne estivale, contre 254 pour Paoline Ekambi, actuelle détentrice du record). Je m’en rends compte avec les joueuses qui m’entourent, il y a beaucoup de jeunes qui ont à peine 50 sélections, alors moi avec mes 237 sélections elles sont impressionnées. Au final, si je peux le dépasser ce record, ça me fera plaisir. J’espère juste avoir un été surchargé, où je n’aurais pas de
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En 2014 lors des matches de préparation au En Mondial 2014 en WNBA
que je pouvais encore être performante. J’ai dit à Basket Landes que je n’étais plus toute jeune. Dans deux ans, je ne sais pas ce qu’il se passera. Si ça va encore, je résignerais encore et encore, et ça ne finira jamais cette histoire ! (rires) J’arrive dans un moment dans ma carrière où c’est plutôt mon corps qui décide. J’ai 33 ans, mais je dis toujours que j’ai 15 ans dans ma tête et 18 ans d’expérience. Je suis encore une vraie gamine, j’ai encore envie de m’amuser, de jouer au basket avec des copines. Tant que physiquement je peux me lever, marcher, c’est une chance inouïe de faire de ta passion ton métier.
En 2016 vainqueur en Eurocoupe avec Valérie Garnier vacances. Ça voudra dire qu’on aura réussi le Tournoi de Qualification Olympique et les Jeux à Rio ensuite, et c’est ce qui m’importe aujourd’hui. Avoir autant de sélections, de titres et de succès, quand on connaît mes débuts compliqués en Équipe de France, c’est énorme. Je me sens tellement chanceuse. Quand je vois les nouvelles générations, le côté médiatique du basket féminin on en parle un peu plus, on en voit à la télé, ça fausse un petit peu l’image que les jeunes peuvent avoir. Elles ont des paillettes dans les yeux un peu trop vite. Moi je n’avais pas de paillette dans les yeux parce que je ne voyais rien. Maintenant, avec ce côté médiatique, les gens pensent que c’est facile de gagner. Qu’on peut gagner de l’argent et être reconnu. Mais non ce n’est pas ça. Ces jeunes, il ne faut pas qu’elles se trompent. Je pense que j’ai évolué dans un moment de la société qui a fait que je n’ai pas été parasitée par tout cela. Tu peux te permettre de rêver, mais il ne faut pas qu’il y ait juste les paillettes qui t’attirent. Il faut que tu saches que sur ton chemin, il y aura des embûches, qu’il n’y aura pas de tapis rouge. Je me dis que je suis tellement heureuse d’avoir survécu, de ne pas avoir été blasée, de ne pas avoir trébuché. Les titres ont commencé à venir, l’argent aussi, notamment quand je suis partie à Ekaterinbourg, j’aurais pu perdre les pédales. Après Londres, j’aurais pu péter les plombs. Mais je n’ai pas eu la grosse tête, je n’ai pas perdu pied. J’ai toujours gardé à l’esprit que ce qui importe c’est le travail, le plaisir, et me rendre compte de la chance que j’ai. Il y a combien de personnes qui voudraient être à ma place ? Pour rien au monde je ne changerais ma vie. Ma plus grande fierté, ce ne sont pas les médailles, les titres, ces petites breloques que je pourrais regarder plus tard. C’est d’être restée fidèle à moi-même, à la petite basketteuse à Laloubère qui voulait faire plaisir à ses parents, le bonheur que j’offre à mes proches. Il n’y a pas de grand sportif, je suis la star de la famille. J’ai gardé une certaine simplicité, et je suis exactement la même. Après on ne fait que du basket féminin. Il y a des gens qui veulent devenir des stars. Mais star du basket féminin, c’est quoi dans sur planète ? Tu es un microbe. C’est pour ça qu’il faut rester les pieds sur terre, soit la meilleure basketteuse possible, mais tu ne seras pas une star interplanétaire.
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Bosi / FFBB
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s’appuie sur un programme de routines que les joueurs doivent exécuter de façon régulière, sur la base d’exercices de gainage, de proprioception et de corde à sauter. Il est également construit de façon personnalisée, en fonction des caractéristiques (forces et faiblesses) physiques de chacun, de façon à combler les éventuels manques qui pourraient, à plus ou moins long terme, aboutir à des blessures. Il a pour objectif d’habituer les "apprentis joueurs professionnels" à prendre soin de leur corps quotidiennement et à leur faire comprendre l’importance de l’exécution de ces procédures pour leur carrière future.
LE PROTOCOLE D’ÉVALUATION PHYSIQUE DES JOUEURS DES PÔLES ESPOIRS Mais la gestion quotidienne, bien que primordiale, n’est qu’un des aspects du problème complexe de l’apparition des blessures au Centre Fédéral. En effet, il est maintenant admis que les charges de travail importantes, appliquées à des organismes encore en développement ou juste sortis de la puberté, nécessite une préparation en amont qui puisse assurer un "niveau physique plancher" en dessous duquel il serait dangereux de se lancer dans ce type de programme. C’est la raison pour laquelle, conjointement au protocole de prévention des blessures, il a été construit une batterie de tests à destination de tous les pôles espoirs du territoire. Ces tests, qui sont actuellement proposés à tous les collègues, et qui seront définitivement validés lors du rassemblement de fin de saison des CTS à Anglet, ont plusieurs objectifs :
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éfinir un protocole uniforme et validé D par tous, qui pourra être diffusé à terme à toutes les structures Renforcer la collaboration entre le Centre Fédéral et les pôles espoirs, sous forme d’échanges de données objectives et repérables Obtenir une photographie nationale des jeunes espoirs (13-15 ans puis 15-18ans) du territoire à un instant donné Créer un suivi longitudinal des jeunes athlètes, depuis leur entrée au pôle jusqu’à leur sortie du Centre Fédéral Fournir à tous les acteurs (parents, joueurs, entraîneurs) des points de repères validés concernant les valeurs physiques minimum, indispensables à l’entraînement quotidien de haute intensité Ces tests se regroupent autour de cinq grands thèmes : érobie A Puissance (haut et bas du corps) Vitesse (explosivité et agilité) Souplesse Mesures anthropométriques Sabine Juras est actuellement en contact avec tous les responsables de pôle espoirs, afin de recueillir, à la fois les données des différents tests, mais aussi les retours des collègues sur la mise en œuvre (difficultés) ou les propositions d’amélioration. La volonté est bien de créer une collaboration encore plus étroite entre les différentes structures et le Centre Fédéral, aussi bien grâce aux moyens de communication modernes (plateforme informatique d’échanges de données), mais aussi par des visites régulières sur le terrain, qui permettent de mieux appréhender les problématiques locales de chacun.
Il sera possible, grâce à cette organisation d’avoir : es informations montantes et régulières D sur l’évolution et la forme physique de jeunes joueurs Une action ponctuelle ou régulière d’accompagnement des collègues La possibilité de constituer une "banque de données" nationale que chacun pourra consulter et enrichir, et qui favorisera bien sûr les échanges d’informations Ces projets sont ambitieux, mais aujourd’hui absolument nécessaires si on veut rester compétitifs dans le secteur de la formation du jeune joueur. Ils s’articulent autour de trois grands axes :
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inimiser les risques de blessures M Anticiper les effets de l’augmentation des charges de travail à l’entrée du pôle espoir ou du Centre Fédéral, en informant les différents acteurs des nécessités incontournables liées à ce type d’entraînement Permettre de détecter au plus tôt des éventuelles déficiences physiques afin de les combler au plus vite par un programme adapté Bien entendu la réussite de ce type de procédures repose beaucoup sur la capacité des différents acteurs à échanger et à communiquer dans un esprit de collaboration. Le monde professionnel pourrait être inclus dans cette démarche : à plus long terme, on pourrait imaginer qu’un joueur puisse disposer d’une "carte d’identité physique" qui comprendrait toutes les informations (performances aux tests, blessures, périodes de repos ou d’inactivité, etc…) sur son profil physique et qui le suivrait tout au long de sa carrière professionnelle.
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