Février 2020

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BASKETBALL LE MAGAZINE DE LA

FÉDÉRATION FRANÇAISE DE BASKETBALL

VICTOR WEMBANYAMA

BIENVENUE DANS LE FUTUR ISMAËL KAMAGATE MOUSSA DIABATE N°865 - FÉVRIER 2020


VICTOR WEMBANYAMA

PORTRAIT

L’AVENIR EN GRAND Par Julien Guérineau

20 BASKETBALL MAGAZINE

Bellenger/IS/FFBB

À 16 ans, Victor Wembanyama (2,18 m) est le plus grand espoir du basket français. Dans tous les sens du terme. Ses prestations à l’Euro U16 l’été dernier n’ont fait que nourrir fantasmes et attentes autour d’un joueur au profil unique, couvé par son club de Nanterre 92.

Quand on atteint 1,80 m sous la toise à 10 ans, passer inaperçu est compliqué… Quand six ans plus tard on culmine à 2,18 m et qu’on laisse l’Europe du basket pantois lors de sa première compétition internationale d’envergure, se cacher n’est plus au programme. Sa famille et le club de Nanterre 92 font pourtant tout pour protéger Victor Wembanyama d’une attention qui ne fera que croître dans les années à venir. Inutile de prendre des gants, le basket français n’a jamais élevé en son sein un potentiel comme celui de ce jeune homme de 16 ans. Le jeu des comparaisons est vain. Même en élargissant le spectre au basket mondial. Nombreux sont ceux qui évoqueront le cas Kristaps Porzingis. Le Letton de 2,21 m présente lui aussi une combinaison de taille, d’adresse et de mobilité totalement hors normes. "Mais ce n’est pas le meilleur exemple", glisse dans un sourire le principal intéressé. "Il y a des aspects offensifs qui sont absents de son jeu et que je voudrais atteindre. C’est difficile de trouver un joueur auquel s’identifier. Je me dis que c’est à moi de devenir le point de comparaison des

autres." Une sortie qui pourrait passer pour de la prétention adolescente si elle n’était pas tout simplement le constat implacable d’une réalité incontournable : Victor Wembanyama est un modèle unique.

Claire Macel – Nanterre 92

5x5

ÉDITO • SOMMAIRE • ACTUALITÉS • BRÈVES • INTERVIEW • PORTRAIT • 5x5 • 3x3 • SUPPLÉMENT

PORTRAIT Victor

Wembanyama

Né le 4 janvier 2004 2,18 m Nanterre 92

Une organisation spéciale Son développement requiert donc une mobilisation inédite pour son club. C’est une véritable cellule Wembanyama qui s’est mise en place pour organiser les semaines de la pépite, élève (avec un an d’avance) en première au lycée. "De par son potentiel, son profil, ses caractéristiques, on ne peut pas le traiter comme un espoir lambda. Il y a toute une organisation à mettre en place autour de son développement", admet aisément Pascal Donnadieu. Un entraîneur des pros qui a suivi avec attention l’évolution du joueur dans les catégories de jeunes. Lorsque celui-ci a quitté Le Chesnay Versailles pour les Hauts-de-Seine, c’est son frère, Frédéric, aujourd’hui General Manager, qui a dirigé Wembanyama lors de ses premiers entraînements en U11.

C’est dans cette catégorie que Michael Allard, alors entraîneur à Nanterre, avait découvert celui qu’il avait pris pour un assistant coach avant de le voir s’aligner sur le parquet. Avec l’accord de ses parents, ce gabarit exceptionnel avait rejoint Nanterre pour y poursuivre sa formation. U11, U13, U15, U18, espoirs il continue de grandir, au propre comme au figuré, et est même rentré en jeu en EuroCup, alors qu’il n’avait pas encore fêté son 16e anniversaire. Concilier ambition et patience, développement et efficacité est un exercice délicat pour le club et pour tous les entraîneurs mobilisés autour du phénomène, qui évolue dans un cocon familier et protecteur :

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VICTOR WEMBANYAMA

PORTRAIT

L’AVENIR EN GRAND Par Julien Guérineau

20 BASKETBALL MAGAZINE

Bellenger/IS/FFBB

À 16 ans, Victor Wembanyama (2,18 m) est le plus grand espoir du basket français. Dans tous les sens du terme. Ses prestations à l’Euro U16 l’été dernier n’ont fait que nourrir fantasmes et attentes autour d’un joueur au profil unique, couvé par son club de Nanterre 92.

Quand on atteint 1,80 m sous la toise à 10 ans, passer inaperçu est compliqué… Quand six ans plus tard on culmine à 2,18 m et qu’on laisse l’Europe du basket pantois lors de sa première compétition internationale d’envergure, se cacher n’est plus au programme. Sa famille et le club de Nanterre 92 font pourtant tout pour protéger Victor Wembanyama d’une attention qui ne fera que croître dans les années à venir. Inutile de prendre des gants, le basket français n’a jamais élevé en son sein un potentiel comme celui de ce jeune homme de 16 ans. Le jeu des comparaisons est vain. Même en élargissant le spectre au basket mondial. Nombreux sont ceux qui évoqueront le cas Kristaps Porzingis. Le Letton de 2,21 m présente lui aussi une combinaison de taille, d’adresse et de mobilité totalement hors normes. "Mais ce n’est pas le meilleur exemple", glisse dans un sourire le principal intéressé. "Il y a des aspects offensifs qui sont absents de son jeu et que je voudrais atteindre. C’est difficile de trouver un joueur auquel s’identifier. Je me dis que c’est à moi de devenir le point de comparaison des

autres." Une sortie qui pourrait passer pour de la prétention adolescente si elle n’était pas tout simplement le constat implacable d’une réalité incontournable : Victor Wembanyama est un modèle unique.

Claire Macel – Nanterre 92

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ÉDITO • SOMMAIRE • ACTUALITÉS • BRÈVES • INTERVIEW • PORTRAIT • 5x5 • 3x3 • SUPPLÉMENT

PORTRAIT Victor

Wembanyama

Né le 4 janvier 2004 2,18 m Nanterre 92

Une organisation spéciale Son développement requiert donc une mobilisation inédite pour son club. C’est une véritable cellule Wembanyama qui s’est mise en place pour organiser les semaines de la pépite, élève (avec un an d’avance) en première au lycée. "De par son potentiel, son profil, ses caractéristiques, on ne peut pas le traiter comme un espoir lambda. Il y a toute une organisation à mettre en place autour de son développement", admet aisément Pascal Donnadieu. Un entraîneur des pros qui a suivi avec attention l’évolution du joueur dans les catégories de jeunes. Lorsque celui-ci a quitté Le Chesnay Versailles pour les Hauts-de-Seine, c’est son frère, Frédéric, aujourd’hui General Manager, qui a dirigé Wembanyama lors de ses premiers entraînements en U11.

C’est dans cette catégorie que Michael Allard, alors entraîneur à Nanterre, avait découvert celui qu’il avait pris pour un assistant coach avant de le voir s’aligner sur le parquet. Avec l’accord de ses parents, ce gabarit exceptionnel avait rejoint Nanterre pour y poursuivre sa formation. U11, U13, U15, U18, espoirs il continue de grandir, au propre comme au figuré, et est même rentré en jeu en EuroCup, alors qu’il n’avait pas encore fêté son 16e anniversaire. Concilier ambition et patience, développement et efficacité est un exercice délicat pour le club et pour tous les entraîneurs mobilisés autour du phénomène, qui évolue dans un cocon familier et protecteur :

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Alfredo De Lise

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ÉDITO • SOMMAIRE • ACTUALITÉS • BRÈVES • INTERVIEW • PORTRAIT • 5x5 • 3x3 • SUPPLÉMENT

Alfredo De Lise

AU-DELÀ DE SON POTENTIEL IMMENSE, VICTOR A LE PLAISIR DE JOUER.

Un profil unique En 2018/19, Wembanyama, né en 2004 et donc U15, a évolué avec les U18 du club qui ont atteint le Final Four. Cette saison, s’il a participé à deux rencontres U18 lors de la première phase, c’est avec les espoirs qu’il s’exprime. Face à des éléments parfois plus âgés de 5 ans ! Il y bénéficie de 20 minutes de temps de jeu par match pour 10,2 points, 4,5 rebonds et 3,3 contres de moyenne. Meilleur contreur du championnat il a également tenté sa chance à 27 reprises à trois-points lors des 11 premières rencontres, un rappel de son profil totalement inédit. "C’est un phénomène du fait de sa taille, de son envergure et de sa technique", relève Pascal Donnadieu. "Je n’ai jamais vu un joueur avec un profil physique pareil avoir des mains et une dextérité aussi au-dessus de la moyenne. Il a cette faculté à s’écarter du panier et il ne faut pas le faire jouer contre nature. Il faut trouver le bon alliage entre le fait qu’il se retrouve près du panier offensivement comme défensivement, sans lui interdire d’aller jouer à l’extérieur." L’été dernier, à Udine en Italie, c’est sur le plan défensif que Wembanyama avait marqué l’Euro U16 de son empreinte. La

22 BASKETBALL MAGAZINE

France avait atteint la finale de la compétition dans le sillage de son sémaphore, élu dans le cinq idéal. 7 contres face à la Serbie, 21 rebonds et 8 contres face à la Croatie, sa vitesse de déplacement, son agilité et son timing constituaient une combinaison mortelle pour les adversaires des Bleuets. Un impact de ce côté du terrain loin d’être attendu par le staff comme par le joueur lui-même. "J’ai toujours fait des contres parce que j’étais grand et coordonnée", analyse-t-il. "Mais jamais par la lecture du jeu comme avec l’Équipe de France. C’est devenu un plaisir." Un plaisir résultat d’une prise de conscience, alors que ses premiers pas avec les U16, lors du tournoi de Bellegarde quatre mois avant l’Euro, avaient été plus que compliqués. Au point que Bernard Faure envisageait un instant de ne pas emmener son géant en Italie. "C’est vrai que cette idée m’a traversé l’esprit une seconde", rappelait-il à son retour d’Udine. "Il était là pour apporter sa taille et on le voyait vraiment souffrir face à des adversaires qui avaient un physique complètement différent. À partir de ce moment, on a essayé de le mettre dans des conditions optimales pour avancer. Il est revenu au mois de juin avec une toute autre approche qui montre que c’est un garçon intelligent, qui sait s’adapter. Au fur et à mesure de la préparation, vu ses progrès il n’y avait plus de questions à se poser, sa présence était une évidence. Maintenant avec quel statut ? On était tous loin de penser qu’il allait nous changer l’équipe et bousculer la hiérarchie comme il l’a fait."

Les Jeux dès 2024 ? Liberté et cadrage Une performance qui ne fait qu’amplifier les attentes pour un joueur déjà courtisé par le FC Barcelone (il avait participé à la Mini Copa Endesa en février 2018 sous les couleurs catalanes), mis en avant sur le géant des médias américains ESPN et suivi par les scouts NBA en prévision de la draft. Et pourtant, avec un naturel désarmant, Victor Wembanyama estime que ceux qui l’ont découvert l’été dernier "n’ont vu que 50% de mon jeu". Une analyse partagée par Michael Bur. "A l’Euro U16 j’ai beaucoup aimé la dimension dissuasion. On a découvert un Victor avec de la gnaque, de l’énergie, de l’intensité. Mais offensivement on n’a pas vu son potentiel." Une perspective effrayante sur laquelle il travaille avec application, continuant de développer des savoir-

Autour de lui, tout un club est mobilisé. Le Palais des Sports Maurice Thorez lui est ouvert quand son emploi du temps le permet, le secteur médical est concerné pour éviter les blessures et une attention toute particulière est portée à la nutrition. Une individualisation du suivi qui pourrait susciter quelques tensions auprès des autres pensionnaires du centre de formation. "Je suis toujours dans la communication et l’explication", désamorce Michael Bur. "Aujourd’hui Victor a prouvé des choses, lors de l’Euro U16 notamment. Mais si je dois le suspendre pour l’école je le ferai. Il n’y a pas de jalousie à Nanterre. Notre cri c’est Nanterre tous des frères. Le club se mobilise et c’est normal. Il le mérite. C’est une bonne personne au-delà de son talent. Les autres joueurs le comprennent d’autant plus que certains ont été

Bellenger/IS/FFBB

"Mon frère Frédéric a un lien très fort avec lui et une proximité avec ses parents", explique Pascal Donnadieu. "Il fait régulièrement des points avec eux pour gérer toutes les sollicitations qui l’entourent. Vincent Dziagwa, notre préparateur physique, s’en occupe tout le temps. Il a des entraînements personnalisés avec Michael Bur, coach des espoirs, Jessy Valet coach des U18 et Philippe Da Silva, assistant coach avec les pros." Avec l’élimination en Coupe d’Europe, Wembanyama devrait commencer à participer à quelques entraînements avec le groupe de Jeep®Élite même si plusieurs obstacles demeurent. "La priorité numéro un c’est l’école", prévient ainsi Michael Bur. "Ensuite l’objectif c’est de le développer physiquement. En fonction de ses cours on place trois séances de musculation par semaine." En dépit de sa taille, le joueur demeure un adolescent encore frêle. Pas question de risquer une blessure en le jetant trop tôt en pâtures à des hommes aguerris aux combats dans la raquette. "Il est forcément hors normes. Ce qui rend les choses complexes c’est sa technicité avec les jeunes et son physique lorsqu’il évolue avec les professionnels", note Pascal Donnadieu.

faire habituellement étrangers à des joueurs de sa taille. "On ne m’a jamais bridé", précise-t-il. "J’ai eu la chance de toujours avoir des entraîneurs bienveillants qui ne me fermaient aucune voie." Celle qui doit l’amener à devenir un joueur qui n’existe pas. "Il peut réaliser des choses dignes d’un poste 1 ou 2. Ça me sidère", souffle Pascal Donnadieu. "Il réalise des prouesses techniques avec une facilité... Après on essaye de temps en temps de le freiner parce qu’il s’enflamme un peu." "Victor tente des passes venues d’un autre monde parfois", sourit Michael Bur. "Des trucs que personne n’a vu. Parfois ça passe, parfois non. C’est un joueur à part à qui il faut laisser une certaine liberté. Il faut jongler entre la liberté et le cadrage." En dépit de ses interminables segments, Victor Wembanyama possède une aisance balle en main, une vista et une stabilité sur son tir extérieur que ses formateurs ne peuvent ignorer. "Ce n’est pas un intérieur, ce n’est pas un extérieur", avance Michael Bur. "Avec Victor tout va plus vite. Il faut constamment s’adapter, trouver des exercices. C’est une éponge et il faut se creuser la tête. Il fonctionne à base de challenges. Quand on lui en fixe un et qu’il l’atteint, il faut passer à autre chose." Au-delà d’un physique à renforcer pour tenir le choc chez les professionnels, le Nanterrien doit également se concentrer sur son niveau d’intensité et d’investissement. Une détermination qui lui avait permis de briller à l’Euro U16 et qu’il doit afficher quotidiennement à Nanterre. "Il demande à ce que l’on soit plus exigeant. Et quand on le pique au vif, il réagit", positive Michael Bur. "Ce qui est impressionnant c’est que Victor adore le basket. Pour lui c’est un plaisir avant tout. Il a toujours la banane quand il vient aux entraînements. Mais il sait se faire mal, demande des conseils et veut toujours en faire plus."

ses coéquipiers depuis U11 ou U13. Et ils réalisent que si nous sommes par exemple invités au tournoi juniors de l’Euroleague, c’est grâce à lui." Du 7 au 9 février, les U18 de Nanterre étaient à Kaunas en compagnie du Zalgiris, de la Joventut Badalone ou du Fenerbahçe Istanbul. Une nouvelle occasion pour les scouts d’évaluer le potentiel d’un joueur qui suscite convoitises et curiosités. Mais qui reste pour le moment à l’écart de toute forme d’agitation : "On me protège et ça me va très bien. C’est ce que je préfère", sourit-il. "Nanterre dit non à beaucoup de choses… à tout en fait. En temps voulu, et avec les personnes que l’on souhaite, on acceptera." En attendant, Wembanyama se projette vers sa fin de saison et la Coupe du Monde U17 qui se déroulera à Sofia du 4 au 12 juillet. Avec l’envie de poursuivre son entreprise de démolition débutée en U16 : "J’avais l’envie de dominer l’adversaire. Et je suis toujours comme ça aujourd’hui." Un état d’esprit conquérant qui doit le mener loin. Très loin. Car un tel potentiel suscite bien évidemment des attentes immenses. Le joueur en a conscience et semble gérer plutôt bien l’étiquette de licorne qui lui colle désormais à la peau. "Il est resté le même et ses parents lui gardent les pieds sur terre", estime Pascal Donnadieu. "Au-delà de son potentiel immense, Victor a le plaisir de jouer. Et pour un garçon de 16 ans c’est capital de garder cette joie, cet enthousiasme." Si Nanterre a servi de tremplin à des internationaux comme Edwin Jackson, Adrien Moerman ou Evan Fournier par le passé, la réussite d’un enfant du club aurait une saveur encore plus particulière. "Son avenir ? Une grande carrière NBA bien évidemment", se lance Donnadieu qui n’oublie pas sa casquette d’assistant coach de l’équipe nationale. "S’il pouvait être le leader de l’Équipe de France à moyen ou long terme… Paris 2024 ? On ne peut rien s’interdire. Même s’il est jeune et que ça paraît fou…" Avec Victor Wembanyama tout est forcément géant.

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Alfredo De Lise

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Alfredo De Lise

AU-DELÀ DE SON POTENTIEL IMMENSE, VICTOR A LE PLAISIR DE JOUER.

Un profil unique En 2018/19, Wembanyama, né en 2004 et donc U15, a évolué avec les U18 du club qui ont atteint le Final Four. Cette saison, s’il a participé à deux rencontres U18 lors de la première phase, c’est avec les espoirs qu’il s’exprime. Face à des éléments parfois plus âgés de 5 ans ! Il y bénéficie de 20 minutes de temps de jeu par match pour 10,2 points, 4,5 rebonds et 3,3 contres de moyenne. Meilleur contreur du championnat il a également tenté sa chance à 27 reprises à trois-points lors des 11 premières rencontres, un rappel de son profil totalement inédit. "C’est un phénomène du fait de sa taille, de son envergure et de sa technique", relève Pascal Donnadieu. "Je n’ai jamais vu un joueur avec un profil physique pareil avoir des mains et une dextérité aussi au-dessus de la moyenne. Il a cette faculté à s’écarter du panier et il ne faut pas le faire jouer contre nature. Il faut trouver le bon alliage entre le fait qu’il se retrouve près du panier offensivement comme défensivement, sans lui interdire d’aller jouer à l’extérieur." L’été dernier, à Udine en Italie, c’est sur le plan défensif que Wembanyama avait marqué l’Euro U16 de son empreinte. La

22 BASKETBALL MAGAZINE

France avait atteint la finale de la compétition dans le sillage de son sémaphore, élu dans le cinq idéal. 7 contres face à la Serbie, 21 rebonds et 8 contres face à la Croatie, sa vitesse de déplacement, son agilité et son timing constituaient une combinaison mortelle pour les adversaires des Bleuets. Un impact de ce côté du terrain loin d’être attendu par le staff comme par le joueur lui-même. "J’ai toujours fait des contres parce que j’étais grand et coordonnée", analyse-t-il. "Mais jamais par la lecture du jeu comme avec l’Équipe de France. C’est devenu un plaisir." Un plaisir résultat d’une prise de conscience, alors que ses premiers pas avec les U16, lors du tournoi de Bellegarde quatre mois avant l’Euro, avaient été plus que compliqués. Au point que Bernard Faure envisageait un instant de ne pas emmener son géant en Italie. "C’est vrai que cette idée m’a traversé l’esprit une seconde", rappelait-il à son retour d’Udine. "Il était là pour apporter sa taille et on le voyait vraiment souffrir face à des adversaires qui avaient un physique complètement différent. À partir de ce moment, on a essayé de le mettre dans des conditions optimales pour avancer. Il est revenu au mois de juin avec une toute autre approche qui montre que c’est un garçon intelligent, qui sait s’adapter. Au fur et à mesure de la préparation, vu ses progrès il n’y avait plus de questions à se poser, sa présence était une évidence. Maintenant avec quel statut ? On était tous loin de penser qu’il allait nous changer l’équipe et bousculer la hiérarchie comme il l’a fait."

Les Jeux dès 2024 ? Liberté et cadrage Une performance qui ne fait qu’amplifier les attentes pour un joueur déjà courtisé par le FC Barcelone (il avait participé à la Mini Copa Endesa en février 2018 sous les couleurs catalanes), mis en avant sur le géant des médias américains ESPN et suivi par les scouts NBA en prévision de la draft. Et pourtant, avec un naturel désarmant, Victor Wembanyama estime que ceux qui l’ont découvert l’été dernier "n’ont vu que 50% de mon jeu". Une analyse partagée par Michael Bur. "A l’Euro U16 j’ai beaucoup aimé la dimension dissuasion. On a découvert un Victor avec de la gnaque, de l’énergie, de l’intensité. Mais offensivement on n’a pas vu son potentiel." Une perspective effrayante sur laquelle il travaille avec application, continuant de développer des savoir-

Autour de lui, tout un club est mobilisé. Le Palais des Sports Maurice Thorez lui est ouvert quand son emploi du temps le permet, le secteur médical est concerné pour éviter les blessures et une attention toute particulière est portée à la nutrition. Une individualisation du suivi qui pourrait susciter quelques tensions auprès des autres pensionnaires du centre de formation. "Je suis toujours dans la communication et l’explication", désamorce Michael Bur. "Aujourd’hui Victor a prouvé des choses, lors de l’Euro U16 notamment. Mais si je dois le suspendre pour l’école je le ferai. Il n’y a pas de jalousie à Nanterre. Notre cri c’est Nanterre tous des frères. Le club se mobilise et c’est normal. Il le mérite. C’est une bonne personne au-delà de son talent. Les autres joueurs le comprennent d’autant plus que certains ont été

Bellenger/IS/FFBB

"Mon frère Frédéric a un lien très fort avec lui et une proximité avec ses parents", explique Pascal Donnadieu. "Il fait régulièrement des points avec eux pour gérer toutes les sollicitations qui l’entourent. Vincent Dziagwa, notre préparateur physique, s’en occupe tout le temps. Il a des entraînements personnalisés avec Michael Bur, coach des espoirs, Jessy Valet coach des U18 et Philippe Da Silva, assistant coach avec les pros." Avec l’élimination en Coupe d’Europe, Wembanyama devrait commencer à participer à quelques entraînements avec le groupe de Jeep®Élite même si plusieurs obstacles demeurent. "La priorité numéro un c’est l’école", prévient ainsi Michael Bur. "Ensuite l’objectif c’est de le développer physiquement. En fonction de ses cours on place trois séances de musculation par semaine." En dépit de sa taille, le joueur demeure un adolescent encore frêle. Pas question de risquer une blessure en le jetant trop tôt en pâtures à des hommes aguerris aux combats dans la raquette. "Il est forcément hors normes. Ce qui rend les choses complexes c’est sa technicité avec les jeunes et son physique lorsqu’il évolue avec les professionnels", note Pascal Donnadieu.

faire habituellement étrangers à des joueurs de sa taille. "On ne m’a jamais bridé", précise-t-il. "J’ai eu la chance de toujours avoir des entraîneurs bienveillants qui ne me fermaient aucune voie." Celle qui doit l’amener à devenir un joueur qui n’existe pas. "Il peut réaliser des choses dignes d’un poste 1 ou 2. Ça me sidère", souffle Pascal Donnadieu. "Il réalise des prouesses techniques avec une facilité... Après on essaye de temps en temps de le freiner parce qu’il s’enflamme un peu." "Victor tente des passes venues d’un autre monde parfois", sourit Michael Bur. "Des trucs que personne n’a vu. Parfois ça passe, parfois non. C’est un joueur à part à qui il faut laisser une certaine liberté. Il faut jongler entre la liberté et le cadrage." En dépit de ses interminables segments, Victor Wembanyama possède une aisance balle en main, une vista et une stabilité sur son tir extérieur que ses formateurs ne peuvent ignorer. "Ce n’est pas un intérieur, ce n’est pas un extérieur", avance Michael Bur. "Avec Victor tout va plus vite. Il faut constamment s’adapter, trouver des exercices. C’est une éponge et il faut se creuser la tête. Il fonctionne à base de challenges. Quand on lui en fixe un et qu’il l’atteint, il faut passer à autre chose." Au-delà d’un physique à renforcer pour tenir le choc chez les professionnels, le Nanterrien doit également se concentrer sur son niveau d’intensité et d’investissement. Une détermination qui lui avait permis de briller à l’Euro U16 et qu’il doit afficher quotidiennement à Nanterre. "Il demande à ce que l’on soit plus exigeant. Et quand on le pique au vif, il réagit", positive Michael Bur. "Ce qui est impressionnant c’est que Victor adore le basket. Pour lui c’est un plaisir avant tout. Il a toujours la banane quand il vient aux entraînements. Mais il sait se faire mal, demande des conseils et veut toujours en faire plus."

ses coéquipiers depuis U11 ou U13. Et ils réalisent que si nous sommes par exemple invités au tournoi juniors de l’Euroleague, c’est grâce à lui." Du 7 au 9 février, les U18 de Nanterre étaient à Kaunas en compagnie du Zalgiris, de la Joventut Badalone ou du Fenerbahçe Istanbul. Une nouvelle occasion pour les scouts d’évaluer le potentiel d’un joueur qui suscite convoitises et curiosités. Mais qui reste pour le moment à l’écart de toute forme d’agitation : "On me protège et ça me va très bien. C’est ce que je préfère", sourit-il. "Nanterre dit non à beaucoup de choses… à tout en fait. En temps voulu, et avec les personnes que l’on souhaite, on acceptera." En attendant, Wembanyama se projette vers sa fin de saison et la Coupe du Monde U17 qui se déroulera à Sofia du 4 au 12 juillet. Avec l’envie de poursuivre son entreprise de démolition débutée en U16 : "J’avais l’envie de dominer l’adversaire. Et je suis toujours comme ça aujourd’hui." Un état d’esprit conquérant qui doit le mener loin. Très loin. Car un tel potentiel suscite bien évidemment des attentes immenses. Le joueur en a conscience et semble gérer plutôt bien l’étiquette de licorne qui lui colle désormais à la peau. "Il est resté le même et ses parents lui gardent les pieds sur terre", estime Pascal Donnadieu. "Au-delà de son potentiel immense, Victor a le plaisir de jouer. Et pour un garçon de 16 ans c’est capital de garder cette joie, cet enthousiasme." Si Nanterre a servi de tremplin à des internationaux comme Edwin Jackson, Adrien Moerman ou Evan Fournier par le passé, la réussite d’un enfant du club aurait une saveur encore plus particulière. "Son avenir ? Une grande carrière NBA bien évidemment", se lance Donnadieu qui n’oublie pas sa casquette d’assistant coach de l’équipe nationale. "S’il pouvait être le leader de l’Équipe de France à moyen ou long terme… Paris 2024 ? On ne peut rien s’interdire. Même s’il est jeune et que ça paraît fou…" Avec Victor Wembanyama tout est forcément géant.

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PROSPECT

MOUSSA DIABATE

Par Julien Guérineau

MOUSSA D’AMÉRIQUE À l’été 2018, Bernard Faure, l’entraîneur de l’Équipe de France U16, attendait avec curiosité le retour sur nos rivages de Moussa Diabate, exilé depuis deux ans aux Etats-Unis, pour l’Euro U16. Avec les Bleuets, le jeune homme marque les esprits : 11,1 points et 10,3 rebonds de moyenne dont une partition monumentale en quarts de finale face à la Serbie avec 16 points et 17 rebonds. A l’été 2019, Lamine Kébé, l’entraîneur de l’Équipe de France U18, attendait avec curiosité le retour sur nos rivages de Moussa Diabate exilé depuis trois ans aux Etats-Unis, pour l’Euro U18. Avec les Bleuets, le jeune homme marque les esprits : 13,1 points, 11,1 rebonds de moyenne et un découpage en règle de la Grèce en phase de poule avec 14 points et 20 rebonds.

"S’il n’a pas de pépins, il sera drafté, j’en suis persuadé". Lamine Kébé

FIBA

La fuite

26 BASKETBALL MAGAZINE

En deux compétitions internationales, Moussa Diabate a balayé les doutes concernant son évolution loin des structures de formation du basket français. L’ancien joueur de la Saint-Charles Charenton fait partie des tous meilleurs prospects mondiaux de sa classe d’âge. Ses qualités athlétiques sont époustouflantes, son niveau d’intensité spectaculaire et sa marge de progression encore bien réelle, lui qui compte à peine plus de six ans de basket dans les jambes. "S’il n’a pas de pépins, il sera drafté, j’en suis persuadé", tranche sans hésitation Lamine Kébé. Son départ en novembre 2016 avait beaucoup fait parler dans le tout petit monde des formateurs du basket francilien. Diabate a alors 14 ans et débute sa deuxième saison en U15 France avec la Saint-Charles Charenton. Son duo avec Daniel Batcho fait saliver les spécialistes. L’équipe du Val-de-Marne enchaîne les victoires mais après cinq journées et alors qu’il est attendu avec l’Ile-de-France au Camp Inter Zones au Temple-sur-Lot, le Parisien disparaît. Les dirigeants de Charenton n’auront plus de nouvelles de leur pépite, orientée par un intermédiaire vers le lycée de Montverde en Floride. Un dépaysement total pour un joueur aussi jeune. Et si la destination est prestigieuse, l’établissement ayant vu passer des stars comme Ben Simmons ou D’Angelo Russell, l’adaptation s’avère particulièrement ardue. "J’ai eu des moments de prise de conscience qui ont été très importants dans ce que je fais aujourd’hui", estime

FIBA

Après avoir quitté la France à 14 ans, Moussa Diabate (2,08 m, 18 ans) est devenu un des meilleurs joueurs de high-school aux Etats-Unis. Courtisé par les plus prestigieuses universités américaines, l’ancien de la Saint-Charles Charenton ne devrait pas attendre longtemps avant de se présenter à la draft.

Moussa Diabate. "A Montverde, après deux mois c’était terriblement difficile. Je devais m’habituer à un nouveau jeu. Je ne comprenais rien, je ne parlais pas anglais. Je n’étais même pas dans l’équipe 1. J’étais loin. Je me demandais ce que je faisais là." Malgré l’envie de trouver rapidement un billet retour, Diabate s’appuie sur sa foi et son talent pour s’accrocher et gravir les échelons. Depuis, il a changé chaque année d’institution et figure désormais dans le top 10 des joueurs de high school du pays. Michigan, Kentucky ou Florida sont sur les rangs pour l’accueillir. Théoriquement en 2021. Mais le prospect pourrait choisir de "reclassifier" pour débuter sa carrière universitaire dès la rentrée prochaine plutôt que de faire une ultime année de high school, où le niveau d’opposition et d’exigence collective est à géométrie variable. "Lors de ma deuxième saison je tombais parfois contre des petits qui ne savaient pas sauter et à peine jouer. C’est pour cela que j’ai changé." A DME Academy puis IMG Academy, Diabate s’impose et en impose, intégrant tous les codes d’un basket centré sur l’individu. "C’est un vrai business. Les qualités individuelles priment sur le basket d’équipe. Surtout en AAU (ndlr : circuit parallèle au championnat disputé l’été). C’est du cirque parfois. En France si tu es le plus fort de ton équipe et que tu perds tous les matches, personne ne te regardera. Les Européens ont une meilleure approche. Ce qui compte c’est ce que tu montres sur le terrain, pas les vidéos sur Youtube." Un sentiment de revanche Pour Diabate, la question ne se pose plus. Tous les regards des scouts sont portés sur son physique longiligne de 4/3. Et ses prestations lors des deux Euros jeunes qu’il a disputés ont confirmé son immense talent dans un contexte très éloigné de sa réalité américaine. "Les compétitions internationales m’ont vraiment aidé sur mon jeu", estime-t-il. "Mais si j’étais resté aux Etats-Unis j’aurais aussi développé mon basket. C’était surtout une question personnelle. J’aime la compétition. Quand on

me parlait d’Ousmane Garuba (ndlr : pivot de l’Espagne U18 déjà vu en Euroleague avec le Real Madrid), je voulais voir par moi-même. Et puis faire la préparation à l’INSEP ça voulait dire vraiment quelque chose. Je trouve qu’on m’a regardé de haut. On m’a sous-estimé." Celui qui n’avait pu intégrer le pôle espoirs d’Ile-de-France en a gardé un souvenir amer qui a sans doute guidé ses envies d’ailleurs. "Au début je ne voulais plus revenir en France. Je voulais couper les ponts. Pour grandir… et par vengeance." Désormais apaisé et remarquablement lucide sur son environnement, Diabate a puisé dans deux univers pour devenir un monstre de polyvalence. "J’étais très curieux quand il est arrivé au stage. Et sans a priori", note Lamine Kébé. "Au bout de 15 minutes d’entraînement on a su qu’il serait dans l’équipe et avec un rôle important. Il dégageait un énorme enthousiasme et une grande motivation. Il est vite devenu un leader vocal malgré le fait qu’il avait un an de moins et qu’il évoluait avec des joueurs qu’il ne connaissait pas forcément. Il a eu des difficultés pour se mettre à niveau tactiquement. Mais il a fait beaucoup d’efforts, il posait énormément de questions et était en demande régulièrement de l’évaluation de ses performances. Je n’ai pas ressenti cette idée de revanche chez lui mais une détermination constante. L’envie de montrer qu’il est le plus fort. Mais pas contre les autres, une motivation très positive." Leader naturel, Diabate, qui vient de fêter ses 18 ans, s’est vu fixer deux axes de développement par son entraîneur en Équipe de France. Son tir extérieur tout d’abord, avec la volonté de développer un tir à trois-points indispensable dans le basket moderne. Son sens du jeu ensuite avec une attention particulière portée au spacing et aux placements sur le terrain. Parti sur un coup de tête, le jeune homme a eu la volonté et la chance de ne pas sombrer loin de chez lui, alors que de nombreux autres succombent aux sirènes américaines pour revenir en manque de repères et de débouchés. Les siens sont plus clairs et se résument en trois lettres : NBA.

FÉVRIER 2020

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PROSPECT

MOUSSA DIABATE

Par Julien Guérineau

MOUSSA D’AMÉRIQUE À l’été 2018, Bernard Faure, l’entraîneur de l’Équipe de France U16, attendait avec curiosité le retour sur nos rivages de Moussa Diabate, exilé depuis deux ans aux Etats-Unis, pour l’Euro U16. Avec les Bleuets, le jeune homme marque les esprits : 11,1 points et 10,3 rebonds de moyenne dont une partition monumentale en quarts de finale face à la Serbie avec 16 points et 17 rebonds. A l’été 2019, Lamine Kébé, l’entraîneur de l’Équipe de France U18, attendait avec curiosité le retour sur nos rivages de Moussa Diabate exilé depuis trois ans aux Etats-Unis, pour l’Euro U18. Avec les Bleuets, le jeune homme marque les esprits : 13,1 points, 11,1 rebonds de moyenne et un découpage en règle de la Grèce en phase de poule avec 14 points et 20 rebonds.

"S’il n’a pas de pépins, il sera drafté, j’en suis persuadé". Lamine Kébé

FIBA

La fuite

26 BASKETBALL MAGAZINE

En deux compétitions internationales, Moussa Diabate a balayé les doutes concernant son évolution loin des structures de formation du basket français. L’ancien joueur de la Saint-Charles Charenton fait partie des tous meilleurs prospects mondiaux de sa classe d’âge. Ses qualités athlétiques sont époustouflantes, son niveau d’intensité spectaculaire et sa marge de progression encore bien réelle, lui qui compte à peine plus de six ans de basket dans les jambes. "S’il n’a pas de pépins, il sera drafté, j’en suis persuadé", tranche sans hésitation Lamine Kébé. Son départ en novembre 2016 avait beaucoup fait parler dans le tout petit monde des formateurs du basket francilien. Diabate a alors 14 ans et débute sa deuxième saison en U15 France avec la Saint-Charles Charenton. Son duo avec Daniel Batcho fait saliver les spécialistes. L’équipe du Val-de-Marne enchaîne les victoires mais après cinq journées et alors qu’il est attendu avec l’Ile-de-France au Camp Inter Zones au Temple-sur-Lot, le Parisien disparaît. Les dirigeants de Charenton n’auront plus de nouvelles de leur pépite, orientée par un intermédiaire vers le lycée de Montverde en Floride. Un dépaysement total pour un joueur aussi jeune. Et si la destination est prestigieuse, l’établissement ayant vu passer des stars comme Ben Simmons ou D’Angelo Russell, l’adaptation s’avère particulièrement ardue. "J’ai eu des moments de prise de conscience qui ont été très importants dans ce que je fais aujourd’hui", estime

FIBA

Après avoir quitté la France à 14 ans, Moussa Diabate (2,08 m, 18 ans) est devenu un des meilleurs joueurs de high-school aux Etats-Unis. Courtisé par les plus prestigieuses universités américaines, l’ancien de la Saint-Charles Charenton ne devrait pas attendre longtemps avant de se présenter à la draft.

Moussa Diabate. "A Montverde, après deux mois c’était terriblement difficile. Je devais m’habituer à un nouveau jeu. Je ne comprenais rien, je ne parlais pas anglais. Je n’étais même pas dans l’équipe 1. J’étais loin. Je me demandais ce que je faisais là." Malgré l’envie de trouver rapidement un billet retour, Diabate s’appuie sur sa foi et son talent pour s’accrocher et gravir les échelons. Depuis, il a changé chaque année d’institution et figure désormais dans le top 10 des joueurs de high school du pays. Michigan, Kentucky ou Florida sont sur les rangs pour l’accueillir. Théoriquement en 2021. Mais le prospect pourrait choisir de "reclassifier" pour débuter sa carrière universitaire dès la rentrée prochaine plutôt que de faire une ultime année de high school, où le niveau d’opposition et d’exigence collective est à géométrie variable. "Lors de ma deuxième saison je tombais parfois contre des petits qui ne savaient pas sauter et à peine jouer. C’est pour cela que j’ai changé." A DME Academy puis IMG Academy, Diabate s’impose et en impose, intégrant tous les codes d’un basket centré sur l’individu. "C’est un vrai business. Les qualités individuelles priment sur le basket d’équipe. Surtout en AAU (ndlr : circuit parallèle au championnat disputé l’été). C’est du cirque parfois. En France si tu es le plus fort de ton équipe et que tu perds tous les matches, personne ne te regardera. Les Européens ont une meilleure approche. Ce qui compte c’est ce que tu montres sur le terrain, pas les vidéos sur Youtube." Un sentiment de revanche Pour Diabate, la question ne se pose plus. Tous les regards des scouts sont portés sur son physique longiligne de 4/3. Et ses prestations lors des deux Euros jeunes qu’il a disputés ont confirmé son immense talent dans un contexte très éloigné de sa réalité américaine. "Les compétitions internationales m’ont vraiment aidé sur mon jeu", estime-t-il. "Mais si j’étais resté aux Etats-Unis j’aurais aussi développé mon basket. C’était surtout une question personnelle. J’aime la compétition. Quand on

me parlait d’Ousmane Garuba (ndlr : pivot de l’Espagne U18 déjà vu en Euroleague avec le Real Madrid), je voulais voir par moi-même. Et puis faire la préparation à l’INSEP ça voulait dire vraiment quelque chose. Je trouve qu’on m’a regardé de haut. On m’a sous-estimé." Celui qui n’avait pu intégrer le pôle espoirs d’Ile-de-France en a gardé un souvenir amer qui a sans doute guidé ses envies d’ailleurs. "Au début je ne voulais plus revenir en France. Je voulais couper les ponts. Pour grandir… et par vengeance." Désormais apaisé et remarquablement lucide sur son environnement, Diabate a puisé dans deux univers pour devenir un monstre de polyvalence. "J’étais très curieux quand il est arrivé au stage. Et sans a priori", note Lamine Kébé. "Au bout de 15 minutes d’entraînement on a su qu’il serait dans l’équipe et avec un rôle important. Il dégageait un énorme enthousiasme et une grande motivation. Il est vite devenu un leader vocal malgré le fait qu’il avait un an de moins et qu’il évoluait avec des joueurs qu’il ne connaissait pas forcément. Il a eu des difficultés pour se mettre à niveau tactiquement. Mais il a fait beaucoup d’efforts, il posait énormément de questions et était en demande régulièrement de l’évaluation de ses performances. Je n’ai pas ressenti cette idée de revanche chez lui mais une détermination constante. L’envie de montrer qu’il est le plus fort. Mais pas contre les autres, une motivation très positive." Leader naturel, Diabate, qui vient de fêter ses 18 ans, s’est vu fixer deux axes de développement par son entraîneur en Équipe de France. Son tir extérieur tout d’abord, avec la volonté de développer un tir à trois-points indispensable dans le basket moderne. Son sens du jeu ensuite avec une attention particulière portée au spacing et aux placements sur le terrain. Parti sur un coup de tête, le jeune homme a eu la volonté et la chance de ne pas sombrer loin de chez lui, alors que de nombreux autres succombent aux sirènes américaines pour revenir en manque de repères et de débouchés. Les siens sont plus clairs et se résument en trois lettres : NBA.

FÉVRIER 2020

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NATIONALE MASCULINE 2

WILLIAM HERVÉ OUEST LYONNAIS BASKET

Par Antoine Lessard

“JE SUIS ATTIRÉ PAR LE HAUT NIVEAU”

ABONNEMENT

Leader de l’OLB depuis huit ans, le fils de Philippe Hervé (2,02 m, 29 ans) a entamé sa reconversion dans le coaching.

transition s’est faite assez naturellement. Je me suis senti assez rapidement dans mon élément. Je prends beaucoup de plaisir au quotidien à entraîner les jeunes.

Vous avez stoppé votre carrière professionnelle en 2012, à seulement 22 ans, pour revenir dans la région lyonnaise jouer en Nationale 2. Pourquoi ce choix à l’époque ? À ce moment-là, la raison est simple. Je n’ai pas réussi à faire mon bonhomme de chemin dans le monde pro. Je sors d’une saison très compliquée à Quimper sur le plan collectif et individuel. Ma priorité était de retrouver du plaisir, mes sensations et surtout penser à l’après carrière sportive. Le choix s’est fait assez naturellement de retourner sur Lyon, pour retrouver mes racines. Et puis c’était aussi une opportunité pour ma femme de trouver un poste dans l’immobilier. À l’époque, descendant en Nationale 2, je me disais pourquoi ne pas remonter plus tard. Mais les années ont passé et ma situation familiale et professionnelle a évolué.

Racontez-nous votre expérience lors du dernier Camp National ? C’était vraiment une belle opportunité. Au préalable du Camp National, j’avais dirigé la sélection de la zone Est sur le camp Inter-zones au Temple-sur-Lot. De l’équipe que j’avais sur la sélection de zone, sept joueurs sur neuf ont été convoqués au Camp National. Parmi eux, quatre sont au Pôle Espoirs. Et j’avais déjà eue cette génération 2005 sur le tournoi Inter-zones quand ils étaient en U13, donc c’est intéressant dans le suivi et l’accompagnement. Je me suis senti bien impliqué, concerné et à l’aise pendant les quatre-cinq jours qu’on a passé là-bas. Une superbe expérience.

De fait, vous avez passé vos diplômes d’entraîneur et trouvé un emploi ? Oui, je suis rentré directement sur la formation pour passer le DEJEPS puis le DEFB avec la Fédération à Paris. En parallèle, on m’a aussi sollicité pour entraîner au Pôle Espoirs garçons de Lyon pendant ma deuxième année de formation. La

Ouest Lyonnais Basket

Vous jouez depuis huit ans à l’OLB (17 points par match cette saison). Est-ce que vous envisagez de coacher à haut niveau ? Je suis attiré par le haut niveau. Après, il y a le haut niveau professionnel mais aussi le haut niveau dans la formation des jeunes que je commence un peu à toucher du doigt. Je n’ai pas de plan de carrière bien précis. On sait que c’est fait d’opportunité. À l’heure actuelle, je suis salarié à la Ligue Auvergne-Rhône-Alpes. J’accompagne de plus en plus les jeunes sur ces parcours de performances qui les mènent jusqu’au haut niveau. Après, pourquoi ne pas intégrer un staff d’une Équipe de France jeunes. Je veux continuer d’évoluer. Mon objectif est de passer le DES, le diplôme d’entraîneur professionnel, cette année ou l’année prochaine. En tant que fils de coach, vous avez as vu l’envers du décor dans le milieu pro. Cela donne envie ou ça rebute ? C’est très personnel. Pour l’avoir vécu au quotidien, c’est un métier passionnant mais il coûte beaucoup en termes d’investissement moral. Il y a beaucoup de pression de l’environnement, surtout quand les résultats sont moins bons. Certains coaches arrivent à décompresser mais pour la majorité, cela t’anime à longueur de journée et à longueur d’année. Mais c’est quelque chose qui m’intrigue. On verra si j’ai des opportunités.

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