Mai 2020

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BASKETBALL LE MAGAZINE DE LA

FÉDÉRATION FRANÇAISE DE BASKETBALL

RETOUR AU JEU

MARINE FAUTHOUX LE SOURIRE DU FUTUR ANA MARIA FILIP LE POINT DU DTN

N°868 - MAI 2020


3x3

ÉDITO • SOMMAIRE • ACTUALITÉS • BRÈVES • INTERVIEW • VxE • 3x3 • 5x5 • SUPPLÉMENT

FIBA

ÉQUIPE DE FRANCE

ANA MARIA FILIP Par Clément Daniou, Photos FIBA

L’ODYSSÉE DE FILIP Internationale française de 5x5 puis de 3x3, Ana Maria Filip (1,94 m, 30 ans) a presque tout connu en Équipe de France. Redoutable dès ses premiers pas dans la nouvelle discipline olympique, elle est vite devenue une véritable leader. Nous sommes en 2015, Ana Maria Filip dispute le Championnat d’Europe avec l’Équipe de France féminine 5x5 sous le nom d’Ana Maria Cata-Chitiga. À l’époque, elle porte encore celui de son père Marius, ancien volleyeur roumain de renom vainqueur d’une médaille olympique en 1980. Dernière rotation sur les postes 4 et 5, elle est peu responsabilisée par Valérie Garnier qui préfère associer Helena Ciak ou Diandra Tchatchouang aux indéboulonnables Sandrine Gruda, Endy Miyem et Isabelle Yacoubou. Avec moins de 10 minutes en moyenne passées sur les parquets, la Franco-Roumaine n’est pas aussi impactante durant cette quinzaine que lors de la Coupe du Monde en Turquie un an plus tôt où elle avait excellé, apportant en moyenne 8 points et 6 rebonds par match. Dominées en finale par une irrésistible Serbie, les Bleues ne parviennent pas à mettre la main sur la médaille d’or. Jamais rappelée pour une

18 BASKETBALL MAGAZINE

compétition de cette envergure, la carrière internationale d’Ana Maria Filip avec l’Équipe de France 5x5 touche à sa fin après 35 sélections, notamment du fait de la vive concurrence et l’arrivée de jeunes joueuses à fort potentiel comme Alexia Chartereau, Marième Badiane ou plus récemment Iliana Rupert précipitant son départ du groupe France. Un départ vécu comme une chance de découvrir de nouveaux horizons. Le besoin de voir autre chose En 2017, Ana Maria Filip décide alors de prendre le taureau par les cornes. "Je connaissais déjà très bien le 5x5 et je ressentais le besoin de sortir de ma zone de confort et d’expérimenter une autre pratique. J’ai appelé Richard Billant pour lui demander si je pouvais essayer le 3x3 et voir ce que ça donnait. Je savais

que c’était un sport très différent mais que ça m’irait très bien." Et pour cause, son profil d’intérieure dynamique et mobile, capable aussi bien de tirer à mi-distance que de prendre la position préférentielle dos au cercle lui permet de dominer dans la nouvelle discipline olympique. Une force dont la joueuse de 30 ans n’avait pas pleinement conscience lors de sa première discussion à ce sujet avec le sélectionneur des Équipes de France 3x3 en 2012. "Richard nous avait dit qu’une joueuse devait être capable de shooter d’à peu près partout, poster, dribbler, défendre. Je me souviens lui avoir répondu qu’il lui fallait LeBron James. C’est pour ça que je n’ai pas vraiment osé mettre un pied dedans à ce moment-là, même si je pense qu’il n’y a pas vraiment de profil type. Il faut avoir certaines qualités que j’ai la chance d’avoir, indispensables pour être performante." Au 3x3, la réussite est fulgurante pour Ana Maria Filip. Sélectionnée pour la Coupe d’Europe à Amsterdam aux côtés de Caroline Hériaud, Alice Nayo et Perrine Le Leuch pour sa première année, elle participe grandement au bon parcours des Bleues qui échouent malgré tout au pied du podium. Mais l’essentiel est ailleurs. Ses premiers pas au 3x3 lui permettent de continuer à porter le maillot Bleu et participer à des compétitions internationales, chose indispensable pour elle. "J’avais besoin de jouer l’été parce que j’aime le basket. L’effet de groupe, voyager dans d’autres pays, gagner des titres. Je suis passée par le Pôle France et toutes les Équipes de France de jeunes et je suis habituée à ça, c’est comme une drogue." Aujourd’hui troisième meilleure joueuse du Monde au ranking FIBA derrière ses coéquipières Migna Touré et Laëtitia Guapo, médaillée d’or au Championnat d’Europe 2018 et 2019, de bronze à la Coupe du Monde 2019, vainqueur récemment des Women’s Series, elle ne semble pas prête à laisser sa place. "Il y a de la concurrence partout, même dans le 3x3 mais tant que mon corps me permet de faire du basket à haut niveau je vais continuer." Une expérience à revendre Seule joueuse de l’Équipe de France 3x3 féminine à compter plusieurs sélections avec les A en 5x5, Ana Maria Filip n’est décidément pas une joueuse comme les autres. Forte de son expérience personnelle, elle partage avec bienveillance son vécu à ses coéquipières et fait désormais office de leader

dans le vestiaire. "C’est vrai que d’avoir joué dans les deux Équipes de France est original. Je suis contente d’avoir eu ce parcours et de pouvoir apporter aux filles ce regard différent. Certaines sont encore jeunes et ne savent pas toujours ce qu’il faut faire. Quand j’avais leurs âges, il n’y avait que le 5x5 et j’aurais tellement aimé avoir autre chose à faire les étés plutôt que de couper. C’est ce que je leur répète en boucle. Il faut qu’elles se rendent compte de la chance qu’elles ont de pouvoir jouer à ce niveau l’été parce qu’il y a très peu de camps organisés pour les filles, malgré le fait que l’on soit des joueuses professionnelles." Un constat accablant mais pourtant bien d’actualité que livre une joueuse qui vit à 100 à l’heure. Après ses saisons de 5x5 passés à disputer un championnat national et une Coupe d’Europe, Ana Maria Filip enchaîne avec l’Équipe de France 3x3 et voit ses temps de repos grandement impactés. Alors qu’elle fêtera ses 31 ans en juin prochain et qu’elle vient d’effectuer son retour à Lattes-Montpellier et par la même occasion en LFB après une saison passée en Pologne, Filip est consciente que cette charge de travail ne pourra pas durer dans le temps. "L’été dernier a été très intense. On a tenu bon en repoussant nos limites. Je ne sais pas si je pourrais refaire ça une deuxième fois, surtout en enchaînant après avec une saison de 5x5." Alors que tous les championnats sont à l’arrêt et les Jeux Olympiques de Tokyo repoussés en 2021 dû à la pandémie de coronavirus, la question ne se posera pas cet été pour Ana Maria Filip. Compétitrice, elle prépare déjà la saison prochaine mais reste dans l’incertitude dans l’attente de jours meilleurs.

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FIBA

ÉQUIPE DE FRANCE

ANA MARIA FILIP Par Clément Daniou, Photos FIBA

L’ODYSSÉE DE FILIP Internationale française de 5x5 puis de 3x3, Ana Maria Filip (1,94 m, 30 ans) a presque tout connu en Équipe de France. Redoutable dès ses premiers pas dans la nouvelle discipline olympique, elle est vite devenue une véritable leader. Nous sommes en 2015, Ana Maria Filip dispute le Championnat d’Europe avec l’Équipe de France féminine 5x5 sous le nom d’Ana Maria Cata-Chitiga. À l’époque, elle porte encore celui de son père Marius, ancien volleyeur roumain de renom vainqueur d’une médaille olympique en 1980. Dernière rotation sur les postes 4 et 5, elle est peu responsabilisée par Valérie Garnier qui préfère associer Helena Ciak ou Diandra Tchatchouang aux indéboulonnables Sandrine Gruda, Endy Miyem et Isabelle Yacoubou. Avec moins de 10 minutes en moyenne passées sur les parquets, la Franco-Roumaine n’est pas aussi impactante durant cette quinzaine que lors de la Coupe du Monde en Turquie un an plus tôt où elle avait excellé, apportant en moyenne 8 points et 6 rebonds par match. Dominées en finale par une irrésistible Serbie, les Bleues ne parviennent pas à mettre la main sur la médaille d’or. Jamais rappelée pour une

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compétition de cette envergure, la carrière internationale d’Ana Maria Filip avec l’Équipe de France 5x5 touche à sa fin après 35 sélections, notamment du fait de la vive concurrence et l’arrivée de jeunes joueuses à fort potentiel comme Alexia Chartereau, Marième Badiane ou plus récemment Iliana Rupert précipitant son départ du groupe France. Un départ vécu comme une chance de découvrir de nouveaux horizons. Le besoin de voir autre chose En 2017, Ana Maria Filip décide alors de prendre le taureau par les cornes. "Je connaissais déjà très bien le 5x5 et je ressentais le besoin de sortir de ma zone de confort et d’expérimenter une autre pratique. J’ai appelé Richard Billant pour lui demander si je pouvais essayer le 3x3 et voir ce que ça donnait. Je savais

que c’était un sport très différent mais que ça m’irait très bien." Et pour cause, son profil d’intérieure dynamique et mobile, capable aussi bien de tirer à mi-distance que de prendre la position préférentielle dos au cercle lui permet de dominer dans la nouvelle discipline olympique. Une force dont la joueuse de 30 ans n’avait pas pleinement conscience lors de sa première discussion à ce sujet avec le sélectionneur des Équipes de France 3x3 en 2012. "Richard nous avait dit qu’une joueuse devait être capable de shooter d’à peu près partout, poster, dribbler, défendre. Je me souviens lui avoir répondu qu’il lui fallait LeBron James. C’est pour ça que je n’ai pas vraiment osé mettre un pied dedans à ce moment-là, même si je pense qu’il n’y a pas vraiment de profil type. Il faut avoir certaines qualités que j’ai la chance d’avoir, indispensables pour être performante." Au 3x3, la réussite est fulgurante pour Ana Maria Filip. Sélectionnée pour la Coupe d’Europe à Amsterdam aux côtés de Caroline Hériaud, Alice Nayo et Perrine Le Leuch pour sa première année, elle participe grandement au bon parcours des Bleues qui échouent malgré tout au pied du podium. Mais l’essentiel est ailleurs. Ses premiers pas au 3x3 lui permettent de continuer à porter le maillot Bleu et participer à des compétitions internationales, chose indispensable pour elle. "J’avais besoin de jouer l’été parce que j’aime le basket. L’effet de groupe, voyager dans d’autres pays, gagner des titres. Je suis passée par le Pôle France et toutes les Équipes de France de jeunes et je suis habituée à ça, c’est comme une drogue." Aujourd’hui troisième meilleure joueuse du Monde au ranking FIBA derrière ses coéquipières Migna Touré et Laëtitia Guapo, médaillée d’or au Championnat d’Europe 2018 et 2019, de bronze à la Coupe du Monde 2019, vainqueur récemment des Women’s Series, elle ne semble pas prête à laisser sa place. "Il y a de la concurrence partout, même dans le 3x3 mais tant que mon corps me permet de faire du basket à haut niveau je vais continuer." Une expérience à revendre Seule joueuse de l’Équipe de France 3x3 féminine à compter plusieurs sélections avec les A en 5x5, Ana Maria Filip n’est décidément pas une joueuse comme les autres. Forte de son expérience personnelle, elle partage avec bienveillance son vécu à ses coéquipières et fait désormais office de leader

dans le vestiaire. "C’est vrai que d’avoir joué dans les deux Équipes de France est original. Je suis contente d’avoir eu ce parcours et de pouvoir apporter aux filles ce regard différent. Certaines sont encore jeunes et ne savent pas toujours ce qu’il faut faire. Quand j’avais leurs âges, il n’y avait que le 5x5 et j’aurais tellement aimé avoir autre chose à faire les étés plutôt que de couper. C’est ce que je leur répète en boucle. Il faut qu’elles se rendent compte de la chance qu’elles ont de pouvoir jouer à ce niveau l’été parce qu’il y a très peu de camps organisés pour les filles, malgré le fait que l’on soit des joueuses professionnelles." Un constat accablant mais pourtant bien d’actualité que livre une joueuse qui vit à 100 à l’heure. Après ses saisons de 5x5 passés à disputer un championnat national et une Coupe d’Europe, Ana Maria Filip enchaîne avec l’Équipe de France 3x3 et voit ses temps de repos grandement impactés. Alors qu’elle fêtera ses 31 ans en juin prochain et qu’elle vient d’effectuer son retour à Lattes-Montpellier et par la même occasion en LFB après une saison passée en Pologne, Filip est consciente que cette charge de travail ne pourra pas durer dans le temps. "L’été dernier a été très intense. On a tenu bon en repoussant nos limites. Je ne sais pas si je pourrais refaire ça une deuxième fois, surtout en enchaînant après avec une saison de 5x5." Alors que tous les championnats sont à l’arrêt et les Jeux Olympiques de Tokyo repoussés en 2021 dû à la pandémie de coronavirus, la question ne se posera pas cet été pour Ana Maria Filip. Compétitrice, elle prépare déjà la saison prochaine mais reste dans l’incertitude dans l’attente de jours meilleurs.

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MARINE FAUTHOUX

INTERVIEW

“C’ÉTAIT DUR DE RÉALISER QUE J’ÉTAIS EN ÉQUIPE DE FRANCE A” Propos recueillis par Kevin Bosi

28 BASKETBALL MAGAZINE

Julien Bacot / FFBB

Phénomène de précocité, Marine Fauthoux (1,73 m, 19 ans) a participé l’été dernier à sa première compétition avec l’Équipe de France féminine. La meneuse tricolore, à nouveau retenue par Valérie Garnier pour le TQO en février dernier, évoque sa deuxième année LFB avec Tarbes et les Jeux Olympiques de Tokyo.

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MARINE FAUTHOUX

INTERVIEW

“C’ÉTAIT DUR DE RÉALISER QUE J’ÉTAIS EN ÉQUIPE DE FRANCE A” Propos recueillis par Kevin Bosi

28 BASKETBALL MAGAZINE

Julien Bacot / FFBB

Phénomène de précocité, Marine Fauthoux (1,73 m, 19 ans) a participé l’été dernier à sa première compétition avec l’Équipe de France féminine. La meneuse tricolore, à nouveau retenue par Valérie Garnier pour le TQO en février dernier, évoque sa deuxième année LFB avec Tarbes et les Jeux Olympiques de Tokyo.

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À Bourges, vous avez évolué dans une salle comble, un public qui vous poussé vers le billet olympique. Cela devait être une expérience formidable pour vous… C’était unique. Même si c’est incomparable, en 2017 on avait déjà joué dans un Prado presque plein pour l’Euro U16, en gagnant un titre. Et là, avoir la chance d’y rejouer et de se qualifier devant notre public pour les J.O. c’est complètement fou ! Le public chantait en permanence. C’est le genre d’émotions qu’on ressent rarement dans une vie de sportive. Vous avez disputé votre deuxième saison professionnelle à Tarbes. Comment vous sentiez-vous dans cette année compliquée pour le TGB, qui lutte pour le maintien ? D’un point de vue collectif, c’est très difficile car on visait les playoffs et on se retrouve dans la fin de classement. On comptait sur le retour d’Adja Konteh après sa grossesse, qui n’est jamais revenue. Laure Resimont s’est blessée à la cheville. On s’est séparé de Valeriya Berejynska qui est partie à l’ASVEL… Ça faisait beaucoup. On a laissé passer quelques matches qu’on a perdu de quelques points ou après prolongations, qui nous ont ramené en bas du tableau. Ce n’est pas ce qu’on imaginait donc c’est vraiment dur à vivre, surtout en n’ayant qu’un match par semaine, on a le temps de ruminer. On a quand même atteint la demi-finale de la Coupe de France, ce n’est pas rien. Il faut tirer du positif. Et d’un point de vue personnel, comment jugez-vous votre évolution ? Je suis un peu mitigée. Je suis assez satisfaite de ce que je produis en fonction du rôle qu’on m’a donné, car je ne pensais pas qu’au bout de ma deuxième année en LFB, j’arriverais si vite à avoir une équipe en main. Après, comme les résultats ne suivent pas, j’ai du mal à me regarder individuellement. Passer

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Il y a un an et demi, vous sortiez du Pôle France pour rejoindre Tarbes en LFB, vous aviez à peine 18 ans. Pouvez-vous revenir sur ce choix d’aller au TGB et sur vos débuts dans le monde professionnel ? Quand je suis arrivée à Tarbes, j’avais aussi le BAC à passer. Du coup j’ai enchaîné presque le même rythme qu’à l’INSEP entre les cours et les entraînements avec Tarbes, avec la Coupe d’Europe à jouer en semaine et les matches de LFB le week-end. C’était assez rythmé, je n’avais pas trop le temps de cogiter, je repartais vite en cours sans trop faire attention à ce que je faisais. Et comme moi je prends du plaisir à jouer, à m’amuser, j’allais à l’entraînement, j’étais contente et je repartais. Donc je n’avais pas trop l’impression d’être dans le monde professionnel. Dans mon esprit, je prends du plaisir à faire mon métier. Après c’est évident que le niveau de jeu change considérablement et l’intensité aussi, ça n’a rien à voir avec ce qu’on a pu vivre à l’INSEP, tout le monde est passé par ce petit temps d’adaptation.

”À la fin de la première semaine d’entraînement, je n’en pouvais plus, j’étais K.O. !” Marine Fauthoux

Venir à Tarbes, c’était également vous rapprocher de vos racines… À la fin de saison au Pôle France, on reçoit les propositions des clubs. Moi j’en ai reçu trois différentes. Parmi elles, il y avait l’ASVEL Féminin mais qui me proposait d’être la troisième meneuse derrière Julie Allemand et Ingrid Tanqueray, donc ça ne m’intéressait pas. Ce que je cherchais en premier lieu, c’était d’avoir du temps de jeu. Il me restait à choisir entre Basket Landes et Tarbes, donc dans les deux cas, un club qui me rapprochait de mes origines. À la fin de votre première saison, vous êtes appelée en Équipe de France féminine pour la préparation à l’Euro 2019. Quelle a été votre réaction ? C’était hallucinant. En fait tout au long de la saison avec la génération 2001 (ndlr, championne d’Europe U16 en 2017 et vice-championne du Monde U17 en 2018), on échangeait pas mal et on se concentrait sur l’Euro U18 qui arrivait, avec la volonté de gagner l’or. À un moment, des rumeurs ont circulé autour de notre convocation pour la préparation avec les A avec Iliana Rupert, mais on n’y croyait pas trop… Et au moment où on a vu la liste sortir avec nos noms, c’était de la folie, tellement c’était improbable à mes yeux… Pendant la préparation avec les A, on nous avait dit que si on était coupées, on serait basculé avec les U18. Petit à petit, on a vu qu’on pouvait jouer, qu’on pouvait peut-être rester après nos premières sélections. C’est

Julien Bacot / FFBB

Il y a quelques semaines, vous faisiez partie de l’Équipe de France féminine qui a validé à Bourges, son ticket pour les Jeux Olympiques. Quelques mois après l’Euro 2019, comment avez-vous vécu cette deuxième compétition avec les A ? Après l’Euro 2019, c’était forcément un objectif d’être retenue pour le Tournoi de Qualification Olympique. Maintenant qu’on est qualifié pour Tokyo, c’est aussi devenu un objectif d’être sélectionnée pour les Jeux. Après je sais que les places sont chères, mais je vais tout faire pour pouvoir y participer.

par cette difficulté, ça peut nous apporter des choses positives pour le futur. On aura vécu des choses dures, on sait ce que c’est d’être dans le pétrin, ce qui peut nous permettre de trouver des solutions pour la fin de saison, ou même pour mon futur dans ma carrière. C’est intéressant et formateur de vivre cela, mais si j’aurais préféré que ça se passe différemment…

à ce moment-là que je me suis dit que j’avais une place à jouer. Tout s’est enchaîné tellement vite que c’était dur de réaliser que j’étais en Équipe de France A. Comment avez-vous vécu cette première compétition avec les A ? Vous avez peu joué (5,2 minutes en moyenne) mais beaucoup appris malgré tout… Je retiens le niveau d’exigence que le haut-niveau impose quotidiennement. À la fin de la première semaine d’entraînement, je n’en pouvais plus, j’étais K.O. ! Je n’avais jamais mis autant d’intensité sur une semaine entière comme celle-ci. C’est ce niveau d’intensité et d’exigence qui m’ont le plus marqué. Après mon temps de jeu, ça m’est totalement égal. J’étais déjà très heureuse d’être dans les 12 joueuses retenues pour l’Euro, et prête à aider l’équipe à n’importe quel moment. Participer à un EuroBasket Women à 18 ans, c’est énorme. J’ai profité, j’ai vu des matches de très près, j’ai pu même y participer des fois, ça restera à vie tout cela.

Votre papa Frédéric Fauthoux a été international (47 sélections, 203 points, bronze à l’Euro 2005). À un moment donné, est-ce que cela vous agace qu’on vous parle sans cesse de lui ? Au début ça me faisait un peu rire et plaisir de parler de lui, du passé, etc… Mais à force qu’est-ce que ça m’énerve ! (rires) Chaque fois on me demande : ton père il te dit ça ? Il en pense quoi ton père… Ça devient un peu agaçant aussi qu’on essaie de me comparer à lui. Forcément je suis obligée d’en passer par là, on est dans le même sport, sur le même poste de jeu… On essaie de m’accrocher à son passé de joueur, j’ai juste envie de dire que c’est moi qui écris mon histoire, pas mon père. L’histoire que j’ai envie d’écrire ? Peu importe quel chemin elle prendra. Tant que je suis heureuse, que je réussis ce que je suis en train de faire, c’est l’essentiel. Je n’ai pas de chemin tout tracé. Je joue, je prends du plaisir à jouer au basket, et on verra.

En 2021 les Jeux Olympiques devraient se tenir à Tokyo. Que cela vous évoque-t-il ? C’est la compétition rêvée ! Ça n’arrive que tous les quatre ans, et quand on écoute tous les athlètes de tous les sports en parler, on sent que c’est quelque chose d’unique. Quand on les voit à la TV depuis qu’on est jeune, forcément on a envie d’y participer. Et puis, je suis persuadé que l’Équipe de France féminine peut ramener une médaille olympique de Tokyo. Je ne serai pas surprise que l’équipe aille en finale, elle en a les capacités et le potentiel. Et puis aussi, il faut rêver d’une médaille d’or. Si on n’y croit pas, c’est sûr qu’on ne l’aura jamais. On peut en rêver et y croire.

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À Bourges, vous avez évolué dans une salle comble, un public qui vous poussé vers le billet olympique. Cela devait être une expérience formidable pour vous… C’était unique. Même si c’est incomparable, en 2017 on avait déjà joué dans un Prado presque plein pour l’Euro U16, en gagnant un titre. Et là, avoir la chance d’y rejouer et de se qualifier devant notre public pour les J.O. c’est complètement fou ! Le public chantait en permanence. C’est le genre d’émotions qu’on ressent rarement dans une vie de sportive. Vous avez disputé votre deuxième saison professionnelle à Tarbes. Comment vous sentiez-vous dans cette année compliquée pour le TGB, qui lutte pour le maintien ? D’un point de vue collectif, c’est très difficile car on visait les playoffs et on se retrouve dans la fin de classement. On comptait sur le retour d’Adja Konteh après sa grossesse, qui n’est jamais revenue. Laure Resimont s’est blessée à la cheville. On s’est séparé de Valeriya Berejynska qui est partie à l’ASVEL… Ça faisait beaucoup. On a laissé passer quelques matches qu’on a perdu de quelques points ou après prolongations, qui nous ont ramené en bas du tableau. Ce n’est pas ce qu’on imaginait donc c’est vraiment dur à vivre, surtout en n’ayant qu’un match par semaine, on a le temps de ruminer. On a quand même atteint la demi-finale de la Coupe de France, ce n’est pas rien. Il faut tirer du positif. Et d’un point de vue personnel, comment jugez-vous votre évolution ? Je suis un peu mitigée. Je suis assez satisfaite de ce que je produis en fonction du rôle qu’on m’a donné, car je ne pensais pas qu’au bout de ma deuxième année en LFB, j’arriverais si vite à avoir une équipe en main. Après, comme les résultats ne suivent pas, j’ai du mal à me regarder individuellement. Passer

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Il y a un an et demi, vous sortiez du Pôle France pour rejoindre Tarbes en LFB, vous aviez à peine 18 ans. Pouvez-vous revenir sur ce choix d’aller au TGB et sur vos débuts dans le monde professionnel ? Quand je suis arrivée à Tarbes, j’avais aussi le BAC à passer. Du coup j’ai enchaîné presque le même rythme qu’à l’INSEP entre les cours et les entraînements avec Tarbes, avec la Coupe d’Europe à jouer en semaine et les matches de LFB le week-end. C’était assez rythmé, je n’avais pas trop le temps de cogiter, je repartais vite en cours sans trop faire attention à ce que je faisais. Et comme moi je prends du plaisir à jouer, à m’amuser, j’allais à l’entraînement, j’étais contente et je repartais. Donc je n’avais pas trop l’impression d’être dans le monde professionnel. Dans mon esprit, je prends du plaisir à faire mon métier. Après c’est évident que le niveau de jeu change considérablement et l’intensité aussi, ça n’a rien à voir avec ce qu’on a pu vivre à l’INSEP, tout le monde est passé par ce petit temps d’adaptation.

”À la fin de la première semaine d’entraînement, je n’en pouvais plus, j’étais K.O. !” Marine Fauthoux

Venir à Tarbes, c’était également vous rapprocher de vos racines… À la fin de saison au Pôle France, on reçoit les propositions des clubs. Moi j’en ai reçu trois différentes. Parmi elles, il y avait l’ASVEL Féminin mais qui me proposait d’être la troisième meneuse derrière Julie Allemand et Ingrid Tanqueray, donc ça ne m’intéressait pas. Ce que je cherchais en premier lieu, c’était d’avoir du temps de jeu. Il me restait à choisir entre Basket Landes et Tarbes, donc dans les deux cas, un club qui me rapprochait de mes origines. À la fin de votre première saison, vous êtes appelée en Équipe de France féminine pour la préparation à l’Euro 2019. Quelle a été votre réaction ? C’était hallucinant. En fait tout au long de la saison avec la génération 2001 (ndlr, championne d’Europe U16 en 2017 et vice-championne du Monde U17 en 2018), on échangeait pas mal et on se concentrait sur l’Euro U18 qui arrivait, avec la volonté de gagner l’or. À un moment, des rumeurs ont circulé autour de notre convocation pour la préparation avec les A avec Iliana Rupert, mais on n’y croyait pas trop… Et au moment où on a vu la liste sortir avec nos noms, c’était de la folie, tellement c’était improbable à mes yeux… Pendant la préparation avec les A, on nous avait dit que si on était coupées, on serait basculé avec les U18. Petit à petit, on a vu qu’on pouvait jouer, qu’on pouvait peut-être rester après nos premières sélections. C’est

Julien Bacot / FFBB

Il y a quelques semaines, vous faisiez partie de l’Équipe de France féminine qui a validé à Bourges, son ticket pour les Jeux Olympiques. Quelques mois après l’Euro 2019, comment avez-vous vécu cette deuxième compétition avec les A ? Après l’Euro 2019, c’était forcément un objectif d’être retenue pour le Tournoi de Qualification Olympique. Maintenant qu’on est qualifié pour Tokyo, c’est aussi devenu un objectif d’être sélectionnée pour les Jeux. Après je sais que les places sont chères, mais je vais tout faire pour pouvoir y participer.

par cette difficulté, ça peut nous apporter des choses positives pour le futur. On aura vécu des choses dures, on sait ce que c’est d’être dans le pétrin, ce qui peut nous permettre de trouver des solutions pour la fin de saison, ou même pour mon futur dans ma carrière. C’est intéressant et formateur de vivre cela, mais si j’aurais préféré que ça se passe différemment…

à ce moment-là que je me suis dit que j’avais une place à jouer. Tout s’est enchaîné tellement vite que c’était dur de réaliser que j’étais en Équipe de France A. Comment avez-vous vécu cette première compétition avec les A ? Vous avez peu joué (5,2 minutes en moyenne) mais beaucoup appris malgré tout… Je retiens le niveau d’exigence que le haut-niveau impose quotidiennement. À la fin de la première semaine d’entraînement, je n’en pouvais plus, j’étais K.O. ! Je n’avais jamais mis autant d’intensité sur une semaine entière comme celle-ci. C’est ce niveau d’intensité et d’exigence qui m’ont le plus marqué. Après mon temps de jeu, ça m’est totalement égal. J’étais déjà très heureuse d’être dans les 12 joueuses retenues pour l’Euro, et prête à aider l’équipe à n’importe quel moment. Participer à un EuroBasket Women à 18 ans, c’est énorme. J’ai profité, j’ai vu des matches de très près, j’ai pu même y participer des fois, ça restera à vie tout cela.

Votre papa Frédéric Fauthoux a été international (47 sélections, 203 points, bronze à l’Euro 2005). À un moment donné, est-ce que cela vous agace qu’on vous parle sans cesse de lui ? Au début ça me faisait un peu rire et plaisir de parler de lui, du passé, etc… Mais à force qu’est-ce que ça m’énerve ! (rires) Chaque fois on me demande : ton père il te dit ça ? Il en pense quoi ton père… Ça devient un peu agaçant aussi qu’on essaie de me comparer à lui. Forcément je suis obligée d’en passer par là, on est dans le même sport, sur le même poste de jeu… On essaie de m’accrocher à son passé de joueur, j’ai juste envie de dire que c’est moi qui écris mon histoire, pas mon père. L’histoire que j’ai envie d’écrire ? Peu importe quel chemin elle prendra. Tant que je suis heureuse, que je réussis ce que je suis en train de faire, c’est l’essentiel. Je n’ai pas de chemin tout tracé. Je joue, je prends du plaisir à jouer au basket, et on verra.

En 2021 les Jeux Olympiques devraient se tenir à Tokyo. Que cela vous évoque-t-il ? C’est la compétition rêvée ! Ça n’arrive que tous les quatre ans, et quand on écoute tous les athlètes de tous les sports en parler, on sent que c’est quelque chose d’unique. Quand on les voit à la TV depuis qu’on est jeune, forcément on a envie d’y participer. Et puis, je suis persuadé que l’Équipe de France féminine peut ramener une médaille olympique de Tokyo. Je ne serai pas surprise que l’équipe aille en finale, elle en a les capacités et le potentiel. Et puis aussi, il faut rêver d’une médaille d’or. Si on n’y croit pas, c’est sûr qu’on ne l’aura jamais. On peut en rêver et y croire.

Julien Bacot / FFBB

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