Table des matières Remerciements de l’auteur Témoignage du traducteur Préface 1 Un pour tous 2 De la contre-culture au Nouvel Age 3 La santé holistique 4 L’exploration psychologique du potentiel humain 5 Le nouveau Dieu de la science 6 La politique de la transformation 7 La spiritualité du Nouvel Age 8 Relever le défi du Un pour tous
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1. UN POUR TOUS Essayez de vous représenter un groupe de vingt-cinq élèves de première année d’école primaire sagement allongés sur le sol de leur salle de classe. Loin d’être un exercice d’alerte d’incendie ou d’attaque aérienne, la curieuse position des enfants fait partie d’un élément nouveau du programme scolaire. Il est demandé aux élèves, guidés par une sorte de méditation, de s’imaginer que le soleil les éclaire de ses puissants rayons. On leur suggère ensuite de fixer son éclat, sans crainte d’être blessé par sa lumière. Pour terminer, ils sont invités à essayer d’accueillir le soleil dans leur corps pour en ressentir la chaleur, l’intensité et l’illumination. «Imaginez que vous êtes en train de participer à une action parfaite, étant vous-mêmes parfaits», disait le maître. On faisait croire à ces enfants qu’ils resplendissaient comme le soleil, qu’ils devaient donc se sentir en paix, tout simplement parce qu’ils étaient parfaits. On leur rappelait qu’ils étaient intelligents, magnifiques, et que leur personne renfermait toute la sagesse de l’univers1. 1 Francis Adeney, «Educators Look East», Spiritual Conterfeits Journal 5, N°1 (Winter 1981), p. 28.
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La scène s’est effectivement produite dans un établissement scolaire d’Etat, à Los Angeles. L’instigatrice responsable de cet exercice de méditation est feu Madame Beverly Galyean. Elle cherchait à faire bénéficier les élèves de son «Enseignement convergent», un système éducatif reconnu et financé par le Département Fédéral Américain de l’Education. Elle pensait répondre ainsi à la nécessité «d’étendre le champ des programmes d’enseignement»1 pour tous les élèves. Il ne s’agissait pas d’une séance de prière, car celle-ci est interdite dans tout établissement scolaire public, ni d’une nouvelle approche de l’étude des sujets élémentaires: lecture, écriture, arithmétique. Qu’y avait-il alors en définitive derrière la démarche de Madame Galyean? Ecoutons-la elle-même: Dès le premier éveil de notre conscience au fait que nous sommes tous Dieu et dotés de ses attributs, la conviction naîtra que le but de toute vie humaine est de s’approprier tout à nouveau cette identité divine: l’amour parfait, la sagesse parfaite, la perfection dans la connaissance et l’intelligence. Une fois ce stade atteint, il nous est possible de recréer l’ancienne unité essentielle, c’est-à-dire la conscience absolue2. 1 Idem, p. 29. 2 Idem note.
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En marche
Cet «Enseignement convergent» de Galyean n’est ni un cas isolé, ni un gag tiré de la panoplie des phénomèmes étranges ou extravagants. Il s’agit bien plus d’une manifestation parmi beaucoup d’autres d’une vision du monde révolutionnaire, foudroyante et susceptible d’engouffrer rapidement le monde entier. Les enfants ne sont pas les seuls visés. Toute la société est dans le collimateur. Une confédération animée d’une philosophie unifiée commence à infiltrer ses idées partout dans la culture occidentale. Elle se promet de transformer radicalement la conscience humaine, ainsi que le caractère du monde moderne. Des exemples concrets de cette mutation de la vision du monde, fréquemment décrite comme le «mouvement du Nouvel Age», sont présents dans notre vie de tous les jours. Shirley MacLaine est très populaire aux Etats-Unis d’Amérique. Elle dansait dans le film The Turning Point, se pâmait dans Being There, et elle jouait le rôle de mère capricieuse dans Terms of Endearment. Elle fut également choisie pour faire partie d’une délégation gouvernementale qui s’est rendue en Chine Populaire. 21
Elle s’est vue décerner des prix Emmy. Les deux livres de sa plume, Out on a Limb (édition française: L’Amour foudre) et Dancing in the Light (édition française: Danser dans la lumière), racontent sa conversion à la nouvelle philosophie que prône le Nouvel Age. D’abord adepte indécise, MacLaine a été habilement initiée à la foi en la réincarnation et dans la pensée occulte. Pour y parvenir, on s’est servi d’une série d’événements extraordinaires: des expériences extra-corporelles, comme par exemple des séances de spiritisme au travers de transes avec divers démons qui discouraient sur la nature de Dieu, de l’homme et du monde. L’actrice s’est liée d’amitié avec beaucoup d’adeptes du Nouvel Age. Elle a lu une quantité considérable d’ouvrages traitant de l’occultisme, du mysticisme, de la réincarnation et beaucoup d’autres livres sur des sujets semblables. La quête de son identité l’a conduite à affirmer: «il n’y a rien de plus puissant que la conscience collective de l’humanité»1. Son message central est quadruple: 1/ Vous êtes des dieux (bien que vous pouvez l’ignorer). 2/ Vous existiez déjà avant de venir dans ce monde, et vous vivrez à nouveau. 3/ La mort n’existe pas («croire en la mort est peutêtre la chose la plus irréelle qui soit»)2. 1 Shirley MacLaine, Out on a Limb (Toronto: Bantam, 1983), p. 351. 2 Idem, p. 352.
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4/ Il y a autant de réalités qu’il y a d’individus, car nous créons notre propre réalité. Pour mieux lancer son livre Out on a Limb, MacLaine s’est rendue omniprésente dans les médias. Elle a participé à d’innombrables émissions télévisées et radiodiffusées, mettant ainsi sa célébrité au service du Nouvel Age. Un courant sous-jacent d’expectative et d’enthousiasme se manifeste dans toutes les disciplines universitaires, et dans le public général. Une anticipation diffuse fait pressentir que le monde moderne est à la veille d’événements extraordinaires, et que nous allons au devant de transformations fondamentales de la société. Il suffit, pour s’en convaincre, de feuilleter les revues à l’étalage dans les magasins de produits diététiques, ou de bouquiner dans les rayons d’ésotérisme et d’occultisme dans les librairies spécialisées. Partout, on découvrira le fil conducteur de cette anticipation. Jetons un coup d’œil dans les périodiques en vogue, tels que: New Age, Yoga Journal, East-West Journal, New Realities, Whole Life Times, sans oublier Science Digest, et nous serons définitivement convaincus1. Faisons attention aussi au grand nombre d’articles qui paraissent dans les magazines de premier plan et qui 1 En langue française, nous trouvons les magazines suivants, vendus dans les kiosques: Médecines douces, Médecines Nouvelles, Psychologies, Médecines Naturelles, Le Monde Inconnu (science - tradition - spiritualité - astrologie), La Recherche (psychologie), Horoscopes, Astral, Quel Avenir, Madame (horoscopes), Astres, Astro Magazine, etc.
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traitent de la perception extrasensorielle, des états de conscience modifiés, de la nouvelle physique et des religions orientales. Pour savoir ce qui se passe vraiment de nos jours, il suffit de questionner des amis qui pratiquent l’astrologie, ou d’éminents physiciens: on recevra des réponses à peu près identiques Feuilletons les ouvrages exposés aux rayons de psychologie, de philosophie et des sciences dans les librairies générales, et nous y constaterons la présence d’un grand nombre d’ouvrages semblables à ceux qui garnissent les rayons consacrés aux religions orientales et à l’occultisme. Qu’ils proviennent des religions orientales, de l’occultisme, des nouvelles psychologies, des théories scientifiques de pointe, de la politique du Nouvel Age ou des versions «chrétiennes» de celui-ci, des courants variés porteurs cependant d’un thème central commun convergent vers notre culture pour inoculer leurs idées au cœur même de la philosophie et de l’idéologie de notre société. Une nouvelle conception du monde est à la porte; une évolution de la conscience s’annonce. Tout est un - le bien et le mal. Tous, nous sommes dieu - et les élèves de première année primaire doivent le savoir aussi. La pensée contrôle tout - pour peu que nous sachions l’utiliser. Ce sont des idées - des idées puissantes - dont les conséquences affecteront la vie tout entière. Elles façonnent déjà l’existence d’un nombre grandissant d’occidentaux. 24
Cette réalité, cette «Nouvelle Conscience», espère engendrer un «Nouvel Age» d’espérance et de grands achèvements humains. Les avocats de ce Nouvel Age soutiennent que l’Occident s’est enfermé dans une banale réalité monodimensionnelle, dénuée de la vitalité mystique d’un univers plein d’énergie vibrante. On dénonce une fausse vision du monde, vouée à une décomposition rapide, et une conception de la vie dépassée, d’être responsables de tous les maux qui obsèdent le monde moderne: la peur de l’holocauste nucléaire, les famines, la dégradation écologique et la dépression psychologique. Il faut réveiller les endormis avant que le sommeil ne les entraîne tout droit à la mort. Les anciens chemins et les vieilles conceptions mènent à l’impasse. Ils ne peuvent pas sauver l’humanité moderne.
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Dressons une carte du monde
Avant de brosser un tableau de la vision du monde propre à cette Nouvelle Conscience, nous devons comprendre les interférences entre une conception du monde donnée et la culture. Le psychanaliste Erich Fromm fait remarquer que dans toute société «le contrat social doit pouvoir satisfaire les besoins religieux inhérents à tout être humain», et que toutes les cultures, sans exception, reposent sur un tissu religieux fondamental, quelle que soit d’ailleurs cette religion1. D’après Fromm, la religion est un système de pensées et d’actions reçu et reconnu par un groupe, et qui donne à l’individu un cadre d’orientation et un objet à sa dévotion. Dans le sens large du mot, il est donc hors de doute qu’aucune culture du passé ou du présent, et à fortiori, aucune culture du futur, ne peut s’abstenir de pratiquer une religion2. 1 Erich Fromm, To Have or to Be? (New York: Harper and Row, 1976), p. 125. 2 Idem, Fromm’s italics.
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Une religion ou une autre gouvernera immanquablement la société. Comme l’explique Fromm, «La question n’est pas une religion ou pas de religion? mais quel genre de religion?» 1 Il ajoute que l’espèce humaine a besoin «d’une carte de notre monde naturel et social, d’une image précise du monde qui y définit notre place»2. Sans une telle carte, nous serions condamnés à une incertitude et à un vertige continuels. Ce «cadre d’orientation» ou cette «religion» implique une conception du monde qui pourrait se définir comme «un ensemble de présuppositions (ou de postulats) que nous tenons (consciemment ou non), pour les fondements mêmes du monde»3. Ayn Rand fait remarquer avec à-propos, que notre conception du monde a un rapport avec tout ce que nous faisons: Consciemment ou inconsciemment, explicitement ou implicitement, l’homme sait qu’il a besoin d’une vision cohérente de l’existence pour y insérer ses valeurs, choisir ses objectifs, prévoir son avenir et maintenir l’unité et la cohérence de sa vie. La valeur qu’il ajoute à ses jugements métaphysiques se fait sentir à chaque moment de sa vie,
1 Idem. 2 Idem, p. 127. 3 James Sire, The Universe Next Door (Downers Grove, Ill.: InterVarsity Press, 1976), p. 17.
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dans chacun de ses choix, de ses décisions et de ses actions1. Pour prétendre n’avoir aucune «conception globale de l’existence», il n’en demeure pas moins que beaucoup en adoptent une; la vie les y contraint. Qu’ils le veuillent ou non, leurs valeurs s’insèrent dans ce qu’ils jugent être vrai et réel, même s’ils n’en ont jamais fait un sujet de réflexion systématique. De même, la société dans son ensemble fonctionne d’après des postulats sous-jacents concernant la réalité. Par une sorte d’ironie, le pouvoir et l’importance de la vision du monde d’une société peuvent passer inaperçus et ainsi échapper à tout examen, comme l’a fait remarquer Jeremy Rifkin: «Un des aspects les plus curieux relatif à la vision du monde d’une société, c’est que la plupart de ses adhérents méconnaissent son influence sur leur façon d’agir, et le fait qu’ils perçoivent par elle la réalité qui les entoure»2. Cependant, si la Nouvelle Conscience prétend pourvoir à ce besoin impérieux d’une vision du monde apte à promouvoir un Age Nouveau, nous devons rester très circonspects et examiner les tenants et les aboutissants de ses affirmations, sinon nous obéirions naïvement à
1 Ayn Rand, Romantic Manifesto (New York: New American Library, 1975), p. 19. 2 Jeremy Rifkin, Entropy: A New World View (New York: Viking Press, 1980), p. 5.
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ses mots d’ordre sans même réfléchir à ce que nous faisons. De tous les côtés, le Nouvel Age insinue que nous sommes confrontés à une «transformation». Nos structures conceptuelles, politiques et économiques doivent être reconsidérées et réexpérimentées, selon les propos de Lewis Mumford: «Chaque transformation de l’homme, exceptée peut-être celle qui a produit la culture néolithique, s’est développée à partir d’une nouvelle base métaphysique et idéologique. Ou, plus exactement, à partir d’émotions plus profondes et d’intuitions dont la manifestation rationnelle a pris la forme d’une nouvelle conception de l’univers et de la nature de l’homme»1. Quelle est donc cette «nouvelle image de l’univers et de l’homme» que proposent les adhérents du Nouvel Age? La tâche d’identifier, d’analyser et de critiquer convenablement un sujet aussi vaste et aussi varié que le mouvement du Nouvel Age, est une entreprise considérable pour diverses raisons. Le mouvement du Nouvel Age est d’abord éclectique; il puise à beaucoup de sources. Quoique des thèmes unificateurs émergent, ce mouvement embrasse avant tout une grande diversité. Ensuite, à cause de sa diversité, il arrive que des déclarations faites par certains de ses représentants ne reflètent pas la pensée de l’ensemble des protagonistes. 1 Lewis Mumford, The Transformations of Man (New York: Harper and Row, 1972), p. 179.
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Enfin, la vision du monde propre au Nouvel Age souligne et exalte le changement et l’évolution. C’est pourquoi, beaucoup de ceux qui sont impliqués changent souvent leurs perspectives, d’où parfois la difficulté de cerner leurs idées avec précision. Néanmoins, nous pouvons identifier six lignes de force caractéristiques du Nouvel Age. Je vais en présenter chacune et la comparer avec le point de vue chrétien du monde. Puis, dans le chapitre suivant, nous étudierons l’histoire de ce mouvement. Dans les chapitres ultérieurs, nous explorerons les voies spécifiques par lesquelles ses idées tentent de pénétrer notre société. Ces voies sont l’industrie de la santé, la psychologie, la science, la politique et la nouvelle spiritualité. Finalement, dans le dernier chapitre, nous verrons comment nous, chrétiens, nous pouvons relever le défi que représente le mouvement du Nouvel Age.
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1. Tout est Un
L’idée que «tout est un» est fondamentale pour le Nouvel Age; elle s’insinue dans toutes les manifestations du mouvement - de la santé holistique à la nouvelle physique, de la politique à la psychologie transpersonnelle, des religions orientales à l’occultisme. Elle est aussi désignée par le vocable monisme. Mono signifie «un». Le monisme est donc la doctrine selon laquelle tout ce qui existe, est un. Tout est en corrélation, interdépendant et interpénétrant. En fin de compte, il n’existe aucune différence entre Dieu, un homme, une plante ou une pierre. Ils font tous partie d’une réalité commune qui n’a ni frontières, ni aucune division finale. Toutes différences perceptibles entre des entités distinctes - entre Jules et Judith, ou entre Jules et un arbre, ou entre Dieu et Judith - ne seraient qu’apparentes et non conformes à la réalité. Nous découvrons cette idée exprimée d’une manière pittoresque, dans le film pour enfants The Dark Crystal, mis en scène par Jim Henson, le créateur des Muppetts. C’est tout simplement un conte de fées du monisme. Nous y trouvons deux groupes de créatures, les Mystiques et les Skecsees, représentant les deux factions rivales qui 31
gouvernent le pays. Les Mystiques, sont des contemplatifs paisibles et attachants qui passent leur temps à psalmodier des incantations et à donner des conseils avisés. Les Skecsees sont méchants et dépravés: des gloutons dégoûtants et des monstres avides de pouvoir. Ici, toutefois, l’affaire se complique. Au cours du déroulement ultérieur de l’histoire, nous voyons un gimling retrouver un éclat de cristal disparu, qui auparavant avait été détaché du cristal magique de la planète. Après beaucoup d’aventures périlleuses, il parvient à rapporter le morceau perdu. Avec l’unité du cristal rétablie, nous assistons à une importante transformation: les Mystiques et les Skecsees fusionnent en un groupe unifié. Les bons et les mauvais sont transcendés et l’unité cosmique est rétablie. On nous dit sans l’ombre d’un doute que le bien ne l’emporte pas sur le mal, comme dans beaucoup de contes de fées; le bien et le mal sont véritablement une seule et même chose. Les Skecsees, malgré toute leur dépravation apparente, n’étaient pas réellement mauvais, ils appartenaient seulement au côté obscur des Mystiques. De même, les Mystiques n’étaient pas bons par eux-mêmes; ils devaient être unis à nouveau aux Skecsees. Tout est un; la réalité ultime se trouve au-delà du bien et du mal. Nous avons là l’essentiel de l’enseignement de la plupart des religions orientales et de l’occultisme, enseignement auquel s’attachent beaucoup de scientifiques, adeptes du Nouvel Age. Le physicien et philosophe Fritjof Capra affirme dans son livre 32
The Turning Point (Le Temps du Changement), que l’état ultime de la conscience est celui, «où toute frontière et tout dualisme seront dépassés et l’individualité dissoute dans l’unité universelle indifférenciée»1. Il n’existe pas de nombreux individus mais un seul Moi, le Un. Le monisme, prémisse fondamentale du Nouvel Age, s’oppose carrément au point de vue chrétien sur la réalité. La vision chrétienne d’un monde créé par Dieu stipule que la création n’est pas un tout indivisible: elle se constitue, au contraire, d’une diversité d’objets, d’événements et de personnes créés séparément. Le premier chapitre de la Genèse rapporte que Dieu a créé des objets particuliers. Dieu a séparé la lumière des ténèbres, le jour de la nuit, la terre du ciel et la terre sèche d’avec la mer. Ensuite, il créa des plantes et des animaux selon leurs espèces particulières. Finalement, il créa l’homme à son image. La création n’est donc pas une mixture homogène dont l’unité serait indifférenciée, mais une création hétérogène. La création n’est pas unifiée en ellemême, mais dans le plan et le but de Dieu, car en Christ «toutes choses subsistent ensemble» (Colossiens 1:17). Notre monde est, selon un mot de C.S. Lewis, «incorrigiblement diversifié»2. Dieu lui-même, d’après la Bible, n’est pas une unité indifférenciée, mais une tri-unité, Père, Fils et Saint-Esprit - la Trinité. 1 Fritjof Capra, The Turning Point (New York: Simon and Schuster, 1982), p. 371. 2 C.S. Lewis, Miracles (New York: Macmillan, 1947), p. 169.
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2. Tout est Dieu
Une fois l’idée admise que tout, même Dieu, est un, un seul pas suffira pour admettre que «tout est dieu» et d’adopter ainsi le panthéisme. Toutes choses - les plantes, les escargots, les livres et ainsi de suite - participeraient, comme il est dit, à une seule essence divine. Rappelons-nous ces élèves qui devaient se voir euxmêmes comme des êtres parfaits. Comment en serait-il autrement? Tout est un; tout est dieu. Tout ce qui existe est dieu, donc parfait. Au pas suivant, après avoir affirmé que toutes choses sont Un et toutes les dualités dans la réalité dissoutes dans l’unité cosmique, l’idée de la personnalité subira le même sort. La personnalité existe par sa différenciation des autres choses ou des autres êtres et elle se définit par rapport à eux. De même la conscience réclame une certaine forme de relation. Mais si tout est un, il ne reste qu’un seul être - le Un. Cet Un n’a pas de personnalité; il se situe au-delà de la personnalité. Dieu est davantage un simple «objet» plutôt qu’une «personne». On abandonne donc l’idée d’un Dieu personnel en faveur d’une énergie, d’une force ou d’une 34
conscience impersonnelles. Ainsi, la réalité ultime est dieu, le «Un», qui est en toutes choses et partout; de fait, dieu est tout. La Bible affirme cependant que tout n’est pas dieu. Dieu, le Créateur, se tient transcendentalement distinct de sa création. Bien que Dieu soit présent dans sa création - il n’est pas un Seigneur absent - il ne doit pas être confondu avec la création. Il ne fait pas non plus partie de la création. L’apôtre Paul a dénoncé ceux qui «ont changé la vérité de Dieu en mensonge, et qui ont adoré et servi la créature au lieu du Créateur» (Romains 1:25). L’Ecclésiaste nous dit que «Dieu est au ciel et toi sur la terre» (Ecclésiaste 5:2). Attribuer une qualité divine aux choses de la terre est, selon la Bible, un acte d’idolâtrie. C.S. Lewis explique parfaitement cet aspect du problème: «Je ne reproche pas avant tout au panthéisme d’être une croyance fausse, mais d’être désespérément dépassé. Une fois, avant la création, on aurait pu dire que toutes choses étaient Dieu. Mais Dieu a créé: Il a voulu que les choses soient différentes de lui-même» 1. La création provient de son Créateur, elle dépend de lui pour son origine et son fonctionnement; elle n’a aucune existence indépendante. Le Créateur n’est pas une force, une énergie ou une conscience impersonnelles, mais un Etre personnel vivant, d’une intelligence, d’une puissance et d’une 1 C.S. Lewis, The Problem of Pain (New York: Macmillan, 1962), pp. 150-51.
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sainteté infinies. Dieu n’est pas une entité amorale, mais une autorité morale qui dit: «Tu ne feras pas», et qui appelle les hommes à la repentance et à la foi.
3. L’Humanité est Dieu.
Une des assertions séduisantes du Nouvel Age veut que nous soyons non seulement parfaits, mais que nous soyons des dieux. Le philosophe et précurseur du Nouvel Age, L.L. Whyte l’exprime franchement quand il dit sans ambages: «Depuis fort longtemps, on dit que quiconque nie Dieu (le Dieu transcendant) proclame sa propre divinité. En rejetant Dieu, l’homme se retrouve lui-même. Il est temps de remettre Dieu à sa place, c’est-à-dire dans l’homme. Je le dis sans plaisanter»1. L’écrivain Paul Williams nous gratifie d’une pointe frappante: «Rappelez-vous, sans la grâce de Dieu, nous ne serions pas Dieu. Souvenez-vous bien de cela»2. 1 Lancelot Law Whyte, The Universe of Experience (New York: Harper and Row, 1974), p. 6. 2 Paul Williams, Das Energy (New York: Warner, 1973), p. 129.
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Nous sommes dieu sans le savoir. Notre ignorance seule nous empêche d’appréhender notre réalité divine. D’après Theodor Roszak, connu pour son analyse du Nouvel Age, notre but serait «de prendre enfin conscience du dieu qui sommeille au fond de l’être humain»1. Swami Muktananda - qui a beaucoup influencé Werner Erhard, le fondateur de EST et de Forum - déclare sans ménagement: «Agenouillez-vous devant votre propre moi. Honorez et adorez votre propre personne. Dieu habite en vous et vous êtes Dieu!» 2 Qu’il vienne des religions orientales, tel l’hindouisme - «Atman est Brahman» (le moi individuel est véritablement un Moi universel) - ou de l’occultisme classique - «tel en haut, tel en bas», (Dieu et l’humanité sont un) ou des nouvelles psychologies de l’actualisation du moi - toute connaissance, tout pouvoir et toute vérité se trouvent en nous et attendent d’être libérés - le Nouvel Age sublimise le postulat panthéiste: vous êtes dieu! Stewart Brand, dans un éditorial du populaire The Next Whole Earth Catalogue (Catalogue d’un monde à venir), écrivait: «Nous sommes comme des dieux, autant l’être de manière efficace!» 3 «Voici la «bonne nouvelle», à charge du Nouvel Age de la prêcher!». Pour George 1 Theodore Roszak, Unfinished Animal (New York: Harper and Row, p. 225. 2 Extrait du livre de Dave Hunt, The Cult Explosion (Irvine, Calif.: Harvest House, 1980), p. 106. 3 Extrait du livre de Dave Hunt, Peace, Prosperity, and the Coming Holocaust (Eugene, Oregon: Harvest House, 1983), p. 82.
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Leonard, écrivain connu et de longue date un adepte fervent du Nouvel Age, chacun de nous «est l’univers entier» et, «comme Dieu, nous sommes tout-puissants et omniscients»1. Mais en vérité, l’humanité n’est pas Dieu. Le Christianisme affirme que les hommes, pour être créés à l’image de Dieu (Genèse 1:26) ne sont pas d’essence divine. Nous reflétons notre Créateur dans le sens que nous sommes des êtres personnels. Comme lui, en effet, nous pensons, nous sentons et nous agissons. Mais nous ne sommes pas infinis, tout-puissants, omniscients ou omniprésents. Nous sommes limités et personnels, alors que Dieu est infini et personnel. Nous sommes des créatures; il est le Créateur. On ne doit pas confondre la divinité avec l’humanité. La Bible condamne à maintes reprises ceux qui ont la prétention de s’asseoir sur le trône de Dieu (Esaïe 14:13-15; Ezéchiel 28:1-2; Actes 12:21-23).
1 George Leonard, The Silent Pulse (New York: Bantam, 1981), p. 105.
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4. Une conscience transformée. Tout est un; tout est dieu; nous sommes dieu. C’est clair, non? D’où alors notre incapacité de nous reconnaître comme des dieux? Où réside le problème? La réponse est simple: c’est l’ignorance. La culture occidentale a façonné notre conscience, elle a diminué notre expérience et elle a domestiqué notre métaphysique. Nous nous contentons des illusions courantes et restons assujettis aux limites de la finitude humaine. Nous avons besoin d’être éclairés. Nous avons oublié notre véritable identité. Mais voici l’espérance. Cette amnésie métaphysique peut être brisée par des techniques appropriées pour modifier la conscience ordinaire. Ces techniques ouvrent «les portes de la perception» et nous permettent de voir la vraie réalité. La transformation de la conscience - par quelque moyen que ce soit - aboutit à une prise de conscience d’unité et de puissance spirituelles. Nous pouvons emprunter beaucoup de chemins pour parvenir à cette illumination. Le sport lui-même, véritable manie des Américains pour les muscles et l’adresse, est devenu un domaine ouvert 39
aux expériences de changement dans la conscience. Michael Murphy, le fondateur de l’Institut Esalen, en Californie, a étudié les expériences des athlètes et en a conclu qu’à l’extrême limite des exploits physiques, tant au base-ball, au football, au golf, au ski ou dans n’importe quelle autre discipline, on peut provoquer un état de conscience mystique, semblable à ce que suggèrent les religions orientales. Il l’explique dans son livre The Psychic Side of Sports(L’élément psychique dans le sport): «Les nombreux récits que nous avons rassemblés, démontrent combien le sport a la capacité de nous propulser au-delà de la conscience que nous avons ordinairement du moi. Le sport met en jeu des aptitudes habituellement considérées comme mystiques, occultes ou religieuses»1. Murphy parle du «spirituel sous-jacent aux sports», par lequel les états de la conscience sont modifiés, et où des prouesses surnaturelles peuvent se produire. Il note que John Brodie, l’ex-champion du quart arrière du San Francisco Forty-Niners, avait fait l’expérience d’un profond changement dans sa conscience pendant le match. Murphy compare ces expériences extraordinaires à celles du yoga oriental. Il y découvre de grandes similitudes2. Il dit: «L’Orient rencontre l’Occident sur des terrains tout à fait communs: ici, directe1 Michael Murphy and Rhea A. White, The Psychic side of Sports (Reading, Mass.: Addison Wesley, 1978), pp. 5-6. 2 Idem, pp. 142-50.
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ment dans le corps humain». Plus loin, il ajoute que «les avances les plus marquées des nouvelles religions se manifestent sur le plan du mysticisme corporel, et non par des formes de croyance abstraites comme celles qui, dans le passé, ont provoqué des réveils religieux. Dieu n’est pas mort, il est dans les tripes»1. Murphy devient presque messianique en parlant du potentiel que le sport a libéré; il pense que ce pourrait bien être «le début d’un épanouissement humain qui, en fin de compte, étendra ses frontières à tous les domaines de la vie»2. Mais ce changement dans la conscience n’est pas limité au domaine du sport seulement. Il peut se produire aussi dans un laboratoire scientifique. A la suite d’une expérience qui a modifié sa compréhension de l’univers, Fritjof Capra décrit comment des hypothèses scientifiques, d’abord considérées comme de pures théories, sont ensuite devenues pour lui une réalité mystique: j’ai «vu» les atomes des éléments et ceux de mon corps se mêler à la danse universelle des particules d’énergie; j’ai ressenti son rythme et j’en ai «entendu» le bruit. A ce moment précis j’ai «su» qu’il s’agissait de la danse de Shiva, le seigneur des danseurs que les hindous vénèrent»3. Cette expérience de l’unité («la Danse de Shiva»), a contraint Capra à tenter une réconciliation 1 Idem, pp. XX. 2 Idem, p. 109. 3 Fritjof Capra, The Tao of Physics (Boulder, Colo.: Shambhala, 1975), p. 11.
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et un mariage entre la physique moderne de la haute énergie et le mysticisme oriental. De même une rencontre avec des objets volants non identifiés ou supposés extra-terrestres (OVNIS) peut provoquer une conversion à la philosophie du Nouvel Age. Ainsi, selon Shirley MacLaine, c’est un extra-terrestre appelé «the Mayan» qui lui a indirectement inspiré le livre Out on a Limb (L’Amour foudre). Pour expérimenter ce type de transformation à partir des trois formules: «tout est un», «tout est dieu» et «nous sommes dieu», de simples propositions intellectuelles ne suffisent pas; la transformation doit surgir du cœur même de l’être humain. Une telle expérience peut être spontanée et imprévue. Elle peut aussi être l’aboutissement d’un exercice discipliné de méditation, de yoga ou encore d’une quelconque technique pour l’éveil de la conscience. Les sessions d’animation de masse telles que EST (Erhard Seminars Training), ont été utilisées comme méthodes populaires pour déclencher ce changement dans la conscience (signalons que Werner Erhard a remplacé EST par un nouveau programme appelé Forum). Dans l’expérience EST, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées pendant deux weekends successifs pour participer à des sessions marathons mises en place pour aider chacun à obtenir cette «expérience». Durant ces sessions, les participants demeurent sur leurs chaises pendant de longues heures 42
sans prendre de notes, sans parler, sans fumer, sans regarder l’heure ou sans même pouvoir s’asseoir à côté d’un ami. En plus de cela, ils doivent se conformer à un règlement strict qui n’autorise que de brèves interruptions pour les repas et les nécessités. Chacune des sessions, d’une durée de seize heures, est conduite par un moniteur qui réprimande les participants, leur adresse des reproches et les humilie en affirmant que rien ne va plus dans leur vie. Avec un tel programme poussé à l’extrême, certaines personnes tombent malades, d’autres pleurent ou craquent d’une autre manière. C’est le but recherché. Au cours de ces heures de torture intolérable, les larmes se transforment en révélation, et le malaise en illumination. Ensuite, les participants s’entendent dire: «Vous faites partie de chaque atome de ce monde et chaque atome fait partie de vous. Nous sommes tous des dieux qui avons créé nos propres univers»1. Finalement les participants - du moins quelques-uns d’entre eux - affirment «l’avoir reçu»; ils font l’expérience de l’illumination et de l’unité. De 1971 à 1981, 325’000 personnes des Etats-Unis d’Amérique, de l’Europe, du Moyen-Orient et de l’Asie ont passé par EST, y compris des célébrités comme Yoko Ono, Carly Simon, Diana Ross et John Denver qui s’est lui-même désigné comme l’évangéliste de la cause2. 1 John Weldon, «Est», in A Guide to Cults an New Religions, ed. Ronald Enroth (Downers Grove, Ill.: InterVarsity Press, 1983), p. 81. 2 Idem, p. 76.
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Les séances EST ne sont cependant qu’un des nombreux moyens pour provoquer une transformation de conscience. De nombreuses personnes s’exposent à voir leur conscience modifiée par le chant, la danse ou par des voyages. Elles peuvent pratiquer l’auto-hypnose, la visualisation intérieure, le biofeedback ou l’acte sexuel1. On désigne cette expérience qui modifie la conscience par différents noms: la conscience cosmique, la réalisation divine, l’auto-réalisation, l’éclairage, l’illumination, le Nirvana (bouddhistes), le satori (zen), la réconciliation ou satchitananada (hindoue). Mais quelque soit son nom, ce nouveau niveau de conscience est présenté comme élément vital pour le renouvellement de la civilisation occidentale et pour le monde. L’ancien champ de conscience propre au rationalisme occidental aurait privé le monde de son sens mystique. Seul un renouveau de la conscience pourra arracher le monde à son marasme bourbeux. Comme l’annonce le programme radiophonique populaire du Nouvel Age «New Dimensions» (Nouvelles Dimensions): «Le monde ne peut être changé que par une transformation de la conscience. C’est notre responsabilité». Et que faudrait-il faire pour cela? Nous devons regarder en nous-mêmes. Comme un adepte du Nouvel Age l’a dit: «La seule porte de sortie se trouve en nousmêmes». Selon Werner Erhard, tout est parfait; le malheur est que nous ne le voyons pas. Les hommes ne sont 1 George Leonard, «The End of Sex», Esquire, December 1982, p. 80.
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pas corrompus, ils ne dépendent pas d’une force extérieure de libération ou de puissance. Il ne s’agit pas de nous réconcilier avec un Dieu différent de nous-mêmes, mais de réaliser que nous sommes nous-mêmes Dieu. Le moi est le trésor universel de la sagesse, du pouvoir et des délices. Notre puissance et notre bien-être sont la conséquence logique de la réalisation de l’unité et de la divinité. La méditation transcendantale affirme que toute tension disparaît lorsqu’on médite deux fois par jour. Le vrai dieu-moi balaie les difficultés quotidiennes. Mais le plus souvent, les prétentions du Nouvel Age embrassent bien plus que le seul bien-être naturel. Ainsi en 1977, la méditation transcendantale a offert un programme Sidhi qui promettait aux étudiants les plus avancés le pouvoir de lévitation, de se déplacer en vol et celui de se rendre invisible. De telles prétentions ne sont pas des cas isolés. Une fois la véritable connaissance (ou gnose) sur la réalité atteinte, des pouvoirs plus grands sont activés à l’intérieur de l’être humain. Les soi-disant limites et les imperfections de l’homme s’estompent pour faire place au potentiel sans bornes de la personne véritable illuminée. Les développements cauchemardesques de la parapsychologie se découvrent à nos yeux: la télépathie, la perception extra-sensorielle, la connaissance antérieure, la télékinésie et bien d’autres choses encore. Alan Vaughan dans un article publié par Futurist, 45
affirme au sujet de la clairvoyance (la capacité de prédire l’avenir), «une fois qu’elle aura émergé du domaine mystérieux de l’étrange et se mêlera au monde quotidien des affaires, du gouvernement, de l’éducation et de la science, nous serons prêts à passer à l’étape suivante et décisive: une société éclairée possédera la sagesse pour prévoir et accomplir le meilleur avenir»1. Shirley MacLaine a bien saisi cette pensée: «Nous connaissons déjà toutes choses. La connaissance profonde de notre divinité est le sommet de l’intelligence, être ce que nous savons ainsi, c’est le libre arbitre. Le libre arbitre c’est tout simplement le décret qui vous déclare divin; vous prenez conscience d’être Dieu: la liberté met tout à votre portée»2. Toutes choses et n’importe quoi nous sont potentiellement accessibles. Nous créons tous notre propre vérité. Pour utiliser une expression plus ancienne, nous dirons que c’est la victoire de l’esprit sur la matière. Si la transformation de la conscience dépend de notre faculté à saisir une vérité et à l’expérimenter, nous devrions alors nous demander quel rôle peut jouer notre pensée ou notre raison? Certaines théories du Nouvel Age semblent contradictoires. Par exemple: il y a beaucoup de réalités, mais tout est un. Certains 1 Alan Vaughan, «Intuition, Precognition, and the Art of Prediction», The Futurist, June 1982. 2 William Goldstein, «Life on the Astral Place», Publishers Weekly, 18 March 1983, p. 46.
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répliquent que la logique ordinaire ne s’applique pas aux états de conscience supérieurs. Le très influent gourou Bhagwan Shree Rajneesh l’exprime avec force: «Il est inadéquat de dire que l’intellect a parfois du mal à comprendre. Il faut, au contraire, affirmer qu’il ne comprend jamais. Non seulement l’intellect s’égare quelquefois, mais il est lui-même l’égarement, car il s’égare toujours! 1 Certains atténueraient cette affirmation, mais les penseurs du Nouvel Age s’accordent pour dire que l’UNIQUE est hors de portée de l’intellect ordinaire. Il faut l’expérimenter, et non le discuter. Le Christianisme affirme aussi la nécessité d’un changement de notre conscience, cependant, les mêmes termes n’impliquent pas la même chose. D’après la Bible, le dilemme de l’humanité ne provient pas de l’ignorance sur notre véritable divinité, mais bien de la réalité de notre péché; nous nous sommes rebellés contre le Dieu saint, et contre sa loi morale. Le problème, et non la réponse, se trouve à l’intérieur de nous-mêmes. Selon les paroles de Jésus, c’est du dedans, de nos cœurs que proviennent tous les maux (Marc 7:22-23). La chute de l’humanité rapportée par Genèse 3 révèle le motif de la rébellion humaine contre l’autorité légitime de Dieu - l’indépendance a été décrétée vis-à-vis de Dieu et de sa loi en faveur d’une loi qui nous est propre. Depuis lors, selon l’apôtre Paul: 1 Bhagwan Shree Rajneesh, I Am the Gate (New York: Harper and Row, 1977), p. 18.
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«Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu» (Romains 3:23). Le Nouvel Age voit la seule réponse à ce dilemme dans la libération du potentiel humain, c’est-à-dire la divinité intérieure. Mais le Christianisme soutient que la seule voie de salut passe par la repentance et par la foi en Jésus-Christ - Dieu fait chair. La nouvelle conscience que nous acquérons en Christ est réalisée par le moyen du salut - «Voici, je fais toutes choses nouvelles» (Apocalypse 21:5). Pour être sans péché, Christ a néanmoins porté les péchés du monde sur la croix et a ainsi tracé la route pour réconcilier l’humanité pécheresse avec le Dieu saint. Il s’est offert lui-même par amour pour ceux qui ne pouvaient à tout jamais satisfaire Dieu au moyen de leurs œuvres corrompues par le péché (2 Corinthiens 5:21). Jésus a enseigné que quiconque croit en lui peut recevoir le pardon des péchés et avoir la vie éternelle, cette vie qu’il a lui-même inaugurée par sa propre résurrection (Jean 3:16). Jésus n’a pas accompli la «réunification» avec l’Un (en perdant son individualité), mais la réconciliation avec Dieu, par sa mort expiatoire sur la croix. Nul besoin dès lors de se débarrasser de la réflexion logique pour s’approcher de Dieu. Dieu, être personnel et rationnel, se révèle dans la Bible par des propositions compréhensibles. Il se laisse découvrir par quiconque s’approche de lui avec humilité, car «Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles» (Jacques 4:6). 48
La Bible nous met en garde de toute approche de la dimension spirituelle en dehors de Christ (voir Actes 19:13-16). Le Nouvel Age, par le recours au potentiel psychique, ouvre la boîte de Pandore des poisons paranormaux, que la Bible interdit (Lévitique 19:26,31; Deutéronome 18:10-12). Le chercheur attiré par l’expérience psychique, mais démuni de toute protection, est alors exposé au monde des esprits démoniaques. Ceux-ci lui offrent un grand nombre de contrefaçons séduisantes, condamnées pourtant par un Créateur plein d’amour.
5. Toutes les religions sont Un
Les gourous du Nouvel Age annoncent à qui veut l’entendre, que toutes les religions sont Un, quoique leur message central proclame: l’Un pour tous. C’est du syncrétisme. Si tout est un, le tout est dieu, et nous sommes donc nous aussi dieu. On pourrait s’attendre 49
dès lors à voir les illuminés de toutes les grandes religions, tels que: Jésus, Bouddha, Lao-Tse, Krishna, Mahomet et d’autres, enseigner et pratiquer la même unité. Les formes extérieures des pratiques religieuses pourraient être diverses, mais elles auraient une essence commune. De nombreux chemins mèneraient à la vérité, et de nombreuses méthodes permettraient de s’identifier à l’Unique; mais toutes ces différences seraient superficielles et extérieures. Les dogmes passent, mais l’expérience vitale du «dieu intérieur» serait la même dans le monde entier. Cette «philosophie éternelle» comme l’a appelée Aldous Huxley, sous-tendrait tout au long de l’histoire l’expérience religieuse des hindous, des bouddhistes, des hébreux, des taoïstes, des chrétiens et des musulmans. Par conséquent, le christianisme n’est plus une religion à part. Ses prérogatives de distinction et d’unicité sont dissoutes dans l’unité cosmique. Le philosophe Jacob Needleman et le gourou Da Free John parlent d’un «christianisme méconnu» qui se confondrait à peu de choses près avec le mysticisme et l’occultisme orientaux. Ils prétendent ainsi avoir retrouvé la réalité vivante de Jésus, passée longtemps sous silence. Un livre récent, The Gnostic Gospels (Les Evangiles gnostiques) de Elaine Pagels, se fait le champion du gnosticisme, une hérésie du temps de l’Eglise primitive. Il serait le vrai modèle de la foi et de l’expérience religieuse. Le Jésus des gnostiques se différenciait à peine du sage 50
hindou. L’évangile de Thomas prête à Jésus ces paroles: «Je suis la lumière qui est au-dessus de tous. Je suis Tout. Tous sont issus de moi. De moi tout a pris forme. Coupez un morceau de bois en deux, et vous me trouverez au milieu. Levez une pierre, et vous me découvrirez dessous»1. Jésus de Nazareth n’est donc plus le Fils unique que Dieu aurait engendré, le Dieu-homme, le Seigneur et Sauveur de l’univers. Il serait réduit à l’une des multiples apparitions de Dieu au cours des millénaires. Sa mission aurait été de révéler leur identité innée aux masses endormies. De cette façon, Jésus est cérémonieusement enchâssé dans le panthéon panthéiste où le chœur des illuminés proclame: Tout est Un! On redéfinit le Christ de la Bible et en fait une marionnette de ventriloque pour le Nouvel Age. On remplace le Christ comme médiateur entre Dieu et les hommes par l’idée du «Christ-conscience», un nouveau terme pour définir la «conscience cosmique». En conséquence aussi, le message biblique du jugement éternel (ciel ou enfer) cède la place à celui de la réincarnation, avancée par de nombreux propos du Nouvel Age. Le Christ de la Bible n’est pas seulement une des multiples révélations de Dieu. De fait, Christ est l’unique révélation de Dieu selon la chair. Il proclame qu’il est «le chemin, la vérité et la vie» et qu’en dehors de lui 1 James M. Robinson, ed., The Nag Hammadi Library (San Francisco: Harper and Row, 1981), p. 52.
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«nul ne vient au Père» (Jean 14:6). L’apôtre Pierre déclarait «il n’y a de salut en aucun autre, car il n’y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés» (Actes 4:12). Le Christ ne va pas rejoindre le panthéon panthéiste. Au contraire, il se tient au-dessus de ce monument pour le juger. Son exclusivité est notre libération parce qu’il attire tous les hommes à lui.
6. Optimisme cosmique évolutif
Il y a vingt-cinq ans, Julian Huxley, humaniste séculier convaincu et défenseur de la science appliquée et interprète de tout le fondement de la vie, avait posé les considérants du fondement du Nouvel Age. Il disait: «L’homme est cette partie de la réalité par qui et à travers qui le processus cosmique s’est manifesté et a commencé à se faire comprendre lui-même. Son but suprême est d’augmenter la compréhension consciente 52