Maureen - La misère pour foyer (MB3469)

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’histoire de Maureen McKenna commence dans un quartier pauvre de Glasgow, où elle grandit, malgré tout, au sein d’une famille unie et équilibrée. Déçue de n’avoir pas pu réaliser son rêve, devenir championne de natation, elle va connaître plusieurs déboires et sombrer peu à peu dans l’alcoolisme. Comment, alors que tout espoir semble perdu, sa vie change et elle crée une association d’aide aux démunis, aux alcooliques, aux drogués et aux personnes aux prises avec la prostitution, c’est ce que vous découvrirez en lisant cet ouvrage.

L

Un livre qui montre que Dieu peut apporter l’espérance aux plus désespérés et transformer leur vie par JésusChrist.

ISBN 978-2-8260-3469-8

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Maureen McKenna avec Irene Howat

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Titre original en anglais: From Whitewashed Stairs to Heaven © 2000 Christian Focus Publications, Geanies House, Fearn, Tain, Ross-shire, IV20 1TW, Scotland, Great Britain

Les textes bibliques sont tirés de la Bible Segond revue, Nouvelle Edition de Genève, 1979

Traduction: Yaël Moyon © et édition: La Maison de la Bible, 2006 Chemin de Praz-Roussy 4bis CH-1032 Romanel-sur-Lausanne E-mail: info@bible.ch Diffusion en France: La Maison de la Bible 255 rue de Vendôme, F-69003 Lyon E-mail: diffusion@maisonbible.net www.bible.ch ISBN 978-2-8260-3469-8 Imprimé en UE


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A Hugh, mon conseiller et mon meilleur ami, et à Paul, notre fils, notre miracle. A la mémoire de John, mon cher frère, et de ceux que nous avons rencontrés et aimés dans le cadre de notre travail parmi les démunis à Glasgow, et qui sont morts dans des circonstances tragiques.


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Table des matières

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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11. Le centre du monde . . . . . . . . . . . . . . 12. Une profonde douleur . . . . . . . . . . . . 13. L’Ami d’un ami . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14. Nouveau départ . . . . . . . . . . . . . . . . . 15. Des biberons aux patrouilles de nuit . 16. Une leçon d’histoire . . . . . . . . . . . . . . 17. La «pierre angulaire» . . . . . . . . . . . . . 18. Des instruments dans Sa main . . . . . 19. L’histoire de Margaret . . . . . . . . . . . . . 10. Changements en vue . . . . . . . . . . . . . 11. Naissance de l’association 11. «Open Door» . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12. Reconstruire des vies brisées . . . . . . 13. Arrivée en haut des marches . . . . . . 14. La vie continue . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Remerciements

Ce livre n’aurait jamais vu le jour sans l’aide précieuse d’un certain nombre de personnes que j’aimerais remercier du fond du cœur. Tout d’abord, merci au président et au conseil d’administration de notre association pour m’avoir soutenue avec amour et sagesse. Merci à nos formidables bénévoles, qui ont généreusement donné de leur temps et mis leurs talents au service des plus démunis. Vous avez enrichi ma vie. Merci aux églises, aux écoles et autres institutions de Glasgow et des environs, qui se sont impliquées dans notre travail durant plus de quinze ans. Merci à nos mères et à toute notre famille. Vous avez toujours été là quand nous en avions besoin. Merci à nos amis, Robert, May et leur famille, qui nous ont suivis pas à pas dans cette aventure. Merci à mon époux bien-aimé, Hugh, qui m’a toujours épaulée avec un amour incondition9


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nel. Merci pour tes encouragements et ta compréhension. Tu es entré dans ma vie alors que j’étais au plus mal et, grâce à toi, j’ai rencontré le Seigneur Jésus, qui a transformé mon existence. Merci à notre très cher fils, Paul, qui a su généreusement partager son papa et sa maman avec d’autres personnes, et qui a mis un comble à notre bonheur. Merci à Irene Howat, qui m’a aidée à écrire ce témoignage, et qui a partagé mes joies, mes peines et mes pensées les plus profondes. Notre temps passé ensemble a été une réelle bénédiction et nous a rendues très complices. Et enfin, j’aimerais remercier Margaret Taylor, dont la vie et l’engagement dans le travail de l’association ont été une source de joie et d’encouragement pour nous tous. A chacun, un grand merci!

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Préface

L’histoire de Maureen McKenna est un récit palpitant qui, en quelque sorte, nous invite au voyage. Il ne nous décrit pas des mondes et des îles lointains, mais nous fait entrer dans cet univers inconnu qui se cache derrière le luxe et les paillettes de nos quartiers chics, un univers où Maureen a vécu et travaillé. C’est au centre de ce qu’un écrivain a récemment appelé le «cœur sombre» de nos cités, qu’elle a découvert pour elle-même la puissance transformatrice de Jésus-Christ. C’est aussi là qu’elle et son mari, Hugh, ont apporté la vraie lumière dans les ténèbres de ces prostituées, de ces alcooliques, de ces drogués, de ces malheureuses victimes d’abus et autres désespérés qu’ils ont rencontrés. Pour beaucoup d’entre nous, ce livre ressemblera à un voyage au cœur d’un monde totalement inconnu. Il défiera les idées toutes faites et les jugements accablants que l’on a si facilement à l’égard des citoyens de cet univers-là. Et il en encouragera certainement beaucoup à imi11


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ter le travail des McKenna dans d’autres villes à travers le monde. Mais surtout, ce récit est la preuve émouvante que, aussi sombre et caché que ce monde nous apparaisse, l’amour et la puissance de Dieu peuvent y resplendir malgré tout. Les mesures gouvernementales et les projets d’aménagement urbain peuvent améliorer le cadre de vie, créer des associations, donner des chances aux plus défavorisés, mais seul Dieu peut transformer des vies. Et il le fait. Si vous en doutez, lisez la suite! John Nicholls Directeur du recrutement et de la formation London City Mission (Mission de Londres Centre)

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Introduction

Mon plus grand désir, en partageant avec vous ce qu’ont été ma vie et le travail que Dieu m’a confié, est de redonner espoir à ceux qui, brisés par les circonstances de la vie, ne voient plus de chemin ni d’avenir pour leur existence. Je prie que ce livre contribue à faire tomber les barrières et préjugés que l’on peut avoir envers les marginaux de la société, dont les besoins sociaux et spirituels sont immenses. Que, par la grâce de Dieu, mes expériences soient un encouragement pour ceux qui se sentent appelés, mais qui pensent que la tâche est trop grande et trop difficile. Dieu est puissant et fidèle, je peux vous l’assurer. En regardant en arrière, j’ai été, d’une manière nouvelle, stimulée à être sel et lumière dans ce monde perdu. Je souhaite qu’il en soit de même pour tous ceux qui liront cet ouvrage.

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Chapitre 12

Reconstruire des vies brisées

Glasgow est entrée dans le nouveau millénaire avec la réputation peu enviable d’être une des six villes les plus pauvres d’Europe. Et les choses ne vont pas en s’améliorant. Les sans-abri, la précarité et la consommation de stupéfiants ne font qu’augmenter, et cette situation projette une ombre toujours plus oppressante sur la cité. En 1999, on a enregistré le plus grand nombre de décès liés à la drogue pour la région de Glasgow: 148 morts. Et ce n’est que la pointe de l’iceberg. Derrière chaque décès, il y a une famille brisée, des parents qui perdent un enfant, ou des enfants qui perdent un de leurs parents. Le plus tragique, peut-être, ce sont ceux qui meurent sans personne pour porter leur deuil. Ils ont perdu tout contact avec leur famille depuis longtemps, et on les a pleurés bien avant qu’ils ne meurent réellement… La plupart de nos collaborateurs ont entre dix à vingt ans d’expérience avec les sans-abri. A travers toutes ces années, ils ont gagné le respect des gens qu’ils servent, et des amitiés sont 211


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nées. Mais ce qui est tout aussi important, si ce n’est plus important encore, c’est que nous respections à notre tour ceux dont nous nous occupons. Ces personnes, et tout particulièrement les jeunes mères, mènent un combat souvent héroïque contre les circonstances qui sont les leurs. Un des problèmes avec la précarité, c’est que celui qui y est confronté n’a pas d’autre perspective d’avenir que celle de tomber plus bas encore et de voir ses dettes augmenter toujours plus. Un des objectifs de l’association «Open Door» est de leur redonner espoir. Posséder certaines choses que nous considérons comme tout à fait normales est absolument inimaginable pour les plus pauvres de la ville. Ainsi, en 1999, nous avons loué un bus et emmené environ trente-cinq enfants visiter une ferme. C’était un plaisir de les voir au milieu des chevaux, des poneys, des vaches, des moutons, des agneaux et des lapins. Mais ce qui me touchait le plus, c’était l’expression du visage des mamans. Libérées de la ville, de leurs responsabilités et du souci du coût de la journée, elles semblaient elles-mêmes redevenues comme des enfants! De la ferme, nous nous sommes rendus à Largs, sur la côte de l’Ayrshire1, où nous avons déjeuné. Sept des enfants devaient commencer l’école, et ils n’avaient pas de véritables chaussures. Grâce à un don généreux, nous avons pu 1

Comté situé à l’ouest de Glasgow. (N.d.E.)

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aller au magasin et leur en acheter à chacun une paire. La plupart n’avaient jamais eu de souliers corrects, et encore moins des neufs. La joie sur leur visage m’a rappelé mon enfance à la rue McAslin lorsque, le premier dimanche du mois de mai, je portais mes jolies chaussures vernies. Je savais ce qu’ils ressentaient, je me souvenais très bien de ce sentiment. Juste avant la rentrée scolaire, l’association s’est aussi chargée de leur procurer des uniformes. Et au cours de l’année 2000, trente paires de chaussures ont pu être achetées pour les enfants qui débutaient leur scolarité. En une année seulement, cet aspect de notre travail s’était développé et avait été multiplié par quatre.

L’histoire de Rosie Rosie était l’aînée d’une famille de six enfants, mais elle était très petite. La première fois que je l’ai rencontrée, elle attendait sa mère, Liz, à la sortie d’un supermarché. Quand celle-ci est arrivée, peu après, son chariot était pratiquement vide, et son visage reflétait tristesse et épuisement. La vie était loin d’être facile pour elle. Elle avait des problèmes avec son mari, n’arrivait pas à joindre les deux bouts et était obligée de s’endetter pour nourrir ses enfants. Elle est venue à notre lunch-club dès que nous l’y avons invitée, et c’est ainsi que nous avons fait sa connaissance et celle de ses enfants. Lorsque nos sept petits devaient commencer l’école primaire, Rosie rentrait au secondaire. 213


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Malgré tous les efforts de sa mère, et elle faisait de son mieux, ses vêtements étaient dans un triste état, et ses chaussures ne valaient pas mieux. Ce jour-là, à Largs, nous avons pu lui acheter des chaussures convenables, et une gentille bénévole lui a procuré des sousvêtements et des habits pour l’école. Si elle s’était présentée à l’école dans sa tenue habituelle, elle se serait fait plus que mal voir. A présent, elle était aussi bien habillée que les autres. C’était par de petites choses comme celles-ci que l’association tentait de soulager le fardeau des mères de famille. A l’école, on apprend aux enfants ce qu’est Noël, on organise pour eux de petites fêtes, on les fait fabriquer des cartes de vœux, et l’excitation est générale. Dès le début du mois d’octobre, ils découvrent dans les magasins guirlandes, papier cadeau, pochettes-surprises et jouets coûteux. De plus, la télévision les bombarde de publicités qui leur présentent ce qu’ils pourraient «demander au Père Noël». Il est difficile d’imaginer ce que signifie vivre dans notre société de consommation pour des garçons et des filles qui, après toute cette attente fébrile, ne font rien de spécial le jour de Noël… Pour eux, c’est un jour ordinaire. Nous faisons donc de notre mieux pour que les enfants que nous connaissons puissent vivre autre chose. Des églises, des écoles et des particuliers de tous les coins de la ville nous donnent des jouets et des cadeaux. Ceux qui préparent des 214


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colis alimentaires y mettent des friandises tout comme des produits de base. Nous recevons aussi des sacs format «familial» remplis de jouets. Tout cela est destiné à nos amis! En 1999, grâce à des dons, nous avons pu emmener les enfants à un spectacle de Noël; c’était émouvant. Les comédiens, qui avaient été avertis de notre présence, ont souhaité la bienvenue à tous les enfants de l’association «Open Door»! Ces petits visages étaient rayonnants: ils étaient célèbres pour un soir! L’église libre de la rue St-Vincent a organisé un repas de Noël pour les mères et leurs enfants. L’église de St George’s Tron, qui nous prête ses locaux pour le lunch-club tous les mercredis, auquel participent cent trente personnes, hommes, femmes et enfants, a elle aussi organisé un repas de Noël pour nos amis. Au cours de ce festin, nous leur avons distribué des colis alimentaires et des cadeaux, qui avaient été préparés avec soin par les aînés du collège Jordanhill. A cette époque de l’année, nous aimions rappeler que Dieu avait donné son propre fils, le Seigneur Jésus-Christ, pour nous sauver. C’était là la raison de notre joie, et nous désirions la communiquer à d’autres. L’association a eu la possibilité d’envoyer certains des enfants les plus âgés dans des camps de la Ligue pour la Lecture de la Bible. Ils y ont passé les vacances de leur vie: escalade, canoë, festins de minuit, jeux d’équipe… Là, ils pouvaient librement vivre comme des enfants. Une des tristes facettes de la pauvreté, 215


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c’est qu’elle propulse les garçons et les filles dans le monde adulte bien avant qu’ils en aient l’âge. Par conséquent, les seuls souvenirs d’enfance qu’ils ont sont des soucis et des problèmes d’adultes. Tant de gens vivant dans la rue ont si peu de bons souvenirs de leurs jeunes années. Ainsi, nous essayons de donner aux plus jeunes des moments de bonheur qu’ils pourront garder en mémoire. Bien sûr, pendant ces camps, ils recevaient un enseignement biblique. On leur parlait de l’amour du Seigneur Jésus, de son salut. Notre association peut leur permettre de connaître des instants heureux, mais seul Dieu peut transformer leur vie. Notre désir et notre prière, c’est qu’ils trouvent en lui le chemin de leur avenir, en sécurité dans les bras de Jésus. Sans cesse, nous constatons combien il est important de leur donner des sujets de joie, qui pourront rester gravés dans leur mémoire. Quand je repense à la rue McAslin, je remercie Dieu pour les bons souvenirs qui m’en restent. Evidemment, il s’y passait aussi des choses terribles, comme dans les rues de Glasgow aujourd’hui, mais il y avait quand même des jours heureux. Malgré certaines longues périodes de profonde dépression traversées par mon père, qui projetaient une ombre sur notre foyer, je me rappelle de bons moments passés avec lui. Je me souviens de ces dimanches où il se mettait au piano (c’était probablement le seul de la rue) pour jouer des airs écossais et un peu de musique classique. Il avait une 216


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belle voix, et nous chantions tous deux nos chansons écossaises préférées. C’étaient des moments très précieux. Je me rappelle aussi combien ma mère était fière de mes frères et moi, et comme elle travaillait dur pour que nous soyons présentables et bien nourris. Je me souviens de l’excitation qui me remplissait, lorsque, chaque année, elle m’emmenait acheter mes belles chaussures en cuir verni. Comme j’étais fière quand je rapportais la boîte à la maison! C’étaient vraiment des heures merveilleuses. Ce que l’association peut faire pour ces enfants est, bien sûr, différent, mais j’espère que cela les réjouira autant. C’est ce que je demande à Dieu. Nous croyons que l’association «Open Door» est unique quant aux services qu’elle propose. Cela va des chaussures aux spectacles pour enfants, en passant par les colis alimentaires, au lunch-club, aux visites à la ferme, aux patrouilles de nuit dans Glasgow vers le West Highland Way, des visites dans des foyers défavorisés aux groupes de réadaptation en prison, etc. Le «grand bus blanc» sert souvent de premier maillon de la chaîne. C’est là que nous rencontrons les sans-abri, les femmes et les filles qui travaillent sur le trottoir, les drogués et les alcooliques qui ont tous besoin de nourriture et d’être acceptés comme ils sont. A notre plus grande tristesse, nous accueillons aujourd’hui les enfants de personnes que nous croisions lors de nos patrouilles de nuit, il y a plus de dix 217


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ans. Certains enfants de prostituées se retrouvent eux-mêmes à la rue, comme c’était le cas pour les premiers toxicomanes et sdf que nous avons connus. Cela nous afflige beaucoup, mais nous stimule aussi à faire tout notre possible pour briser ce cercle infernal. Il nous arrive souvent de rencontrer un drogué dans la rue, puis en prison, puis à nouveau dans la rue. La prison a des portes qui s’ouvrent dans les deux sens pour ces gens-là; à peine sont-ils dehors que les voilà à nouveau dedans, pour des larcins commis en vue d’obtenir leur dose. Nous faisons des visites dans les prisons de Barlinnie et Low Moss, où nous organisons des groupes de réadaptation pour toxicomanes, en collaboration avec le service social et le service des dépendances du département de la santé publique. Nous privilégions une approche systémique des problèmes que nous rencontrons, et en considérons les aspects physique, émotionnel et spirituel. Viser moins haut revient à apporter à des gens en détresse une aide insuffisante. Notre programme d’activités sportives s’intéresse au côté physique des personnes et provoque bien des rires. Cela va des matchs de football aux randonnées, en passant par toutes sortes d’autres activités. Une fois, nous avons pu organiser une marche de plus de 150 km par le West Highland Way2, une rude excursion à 2

Chemin de randonnée qui traverse les Highlands, région montagneuse du nord de l’Ecosse. (N.d.E.)

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travers la montagne écossaise. Cette randonnée a fait des miracles dans la vie des garçons et des filles que l’association avait emmenés. Sur trois des cinq jours qu’elle a duré, le soleil a brillé de tous ses feux, et le paysage était magnifique. C’était un vrai plaisir pour les participants, qui étaient heureux de relever ce défi ensemble. Les deux derniers jours, le temps a changé; il pleuvait des cordes. Toutefois, comme ces jeunes s’étaient liés d’amitié pendant les jours de beau temps, ils se sont tenus les coudes sous la pluie. Quand l’un glissait dans la boue, les autres l’aidaient à se relever. Et lorsque l’humidité et la pluie rendaient le sommeil difficile, ils passaient la nuit à discuter pour se tenir compagnie. Au début de la marche, ils étaient des individus face à un défi, mais à la fin, ils étaient un groupe soudé qui avait atteint le but et surmonté les difficultés. Cette randonnée est une image de notre travail. La grande joie qu’avaient nos amis durant ces jours est la nôtre lorsque nous les voyons sortir de la drogue, trouver un toit, ou quitter la prostitution et la précarité. Nous espérons être là pour eux, et souhaitons aussi qu’ils s’aident les uns les autres, même quand le soleil ne brille plus, quand des obstacles apparaissent sur leur chemin, quand ils ont besoin de secours. Ils sont profondément encouragés lorsqu’ils s’engagent au service des autres, et dans ce but, nous leur proposons toutes sortes de travaux bénévoles. Certains aident à rassembler les vêtements et autres dons matériels pro219


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venant des églises, d’autres donnent un coup de main dans les magasins ou pour la distribution de nourriture aux sans-abri. Beaucoup avaient perdu toute estime de soi lorsque nous les avons rencontrés pour la première fois, mais ils la retrouvent petit à petit, en nous aidant à aider les autres. Et ils commencent à retrouver une identité. Nous tenons beaucoup à les soutenir dans ce processus. Beaucoup de ces jeunes portent la pauvreté et les abus comme un fardeau, qui remonte aussi loin que leur petite enfance. Régler leurs problèmes de façon superficielle, c’est les faire disparaître aujourd’hui pour les retrouver demain. Dans nos groupes de soutien, qui ont lieu dans un environnement sécurisé, nous les aidons à aller au fond de ces problèmes afin de pouvoir trouver la liberté. C’est un travail sur le long terme, et c’est ce qui nous semblait manquer à notre activité avant la création de l’association «Open Door». Nous étions aux premières lignes et essayions de régler les crises, mais ne pas s’occuper du fond du problème, ce n’est que préparer le terrain pour la crise suivante. On dépense tant d’argent pour sortir des situations extrêmes, mais si peu pour les prévenir. Les uns après les autres, les gouvernements et les Conseils municipaux débloquent de grosses sommes pour gérer les crises, mais c’est souvent une fois que des drogués retrouvés morts dans la rue ou des jeunes des bas-fonds ont fait la une des journaux. 220


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Notre ancien pasteur, Eric Alexander, disait: «On ne devrait jamais répondre à une situation de désespoir par des mesures qui sont prises sans réfléchir.» Comme c’est juste! L’association est à présent bien établie, et nous remercions Dieu pour cela, ainsi que pour nos trois collaborateurs à plein temps, Vic Walker, Margaret Taylor et Hugh. Cependant, nous avons constaté quelque chose d’important: il faudrait que nous consolidions notre travail et regroupions les différentes activités sur un seul site. Actuellement, nous utilisons des locaux qui sont dispersés dans le centre de Glasgow. Nous sommes très reconnaissants envers les personnes qui nous les prêtent, et envers le Seigneur qui leur a mis cela à cœur. Sans eux, nous n’aurions jamais pu commencer. Mais nous avons une vision pour le futur, et nous pensons que c’est Dieu qui nous l’a donnée. Nous voyons notre œuvre établie dans un seul bâtiment, quelque part dans le même quartier. Cela nous permettrait d’offrir une gamme complète de services, que nous sommes déjà en train de mettre au point et pour laquelle nous prions beaucoup. Les problèmes de Glasgow ne sont pas concentrés uniquement dans le centre-ville. Chaque quartier a ses besoins, mais aussi son église. Un autre de nos objectifs est donc de proposer une formation dont les différentes assemblées pourraient bénéficier, afin de s’occuper ensuite des problèmes spécifiques à leur 221


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secteur. Nous avons déjà été invités à donner des cours ici ou là, mais le travail serait plus rationnel s’il était possible de les centraliser. Nous pourrions profiter de l’expérience de ceux qui ont pu quitter la rue, la drogue, l’alcool et la prostitution, pour former d’autres à apporter amour et secours aux personnes en détresse. Depuis que la fille d’Anne Kelly a effectué un stage parmi nous, nous avons souvent eu des étudiants. Si nous possédions un bâtiment adapté, nous pourrions proposer davantage de stages. Evidemment, si nous avons des demandes provenant d’endroits plus éloignés, c’est avec plaisir que nous acceptons de faire le déplacement. Cela nous est déjà arrivé, d’ailleurs. Le pasteur Iain McAskill, de l’église libre du sud d’Uist3, a un ministère parmi les alcooliques. Il nous a invités, Hugh, Laspic Stewart, Margaret Taylor et moi-même, à venir le voir. Le Seigneur nous a permis de passer des moments chaleureux et bénis avec ces chrétiens. Nous leur avons parlé de notre travail et de ce que Dieu a fait dans notre vie. Margaret a été très touchée par l’accueil des insulaires, et ceux-ci ont été particulièrement réceptifs à son témoignage. Il a fait très beau pendant les quatre jours qu’a duré notre séjour, même si nous étions au mois de janvier, mais le jour de notre départ, alors que nous étions assis au soleil à attendre notre avion, on nous a informé que le décollage serait 3

Ile des Hébrides extérieures. (N.d.E.)

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différé à cause du brouillard qu’il y avait à Glasgow. Ce contretemps a été profitable aux jeunes dont nous nous occupions, car Iain nous a fait découvrir les délicieux «curry pies»4, spécialité de l’île. Nous les avons tant appréciés que nous en avons ramené deux douzaines! Un immeuble dans le centre nous permettrait d’avoir un lieu où mères et enfants pourraient se rendre chaque jour. Nous pourrions aussi organiser une crèche, pour que les mamans aient la liberté de faire ce qu’elles ne peuvent jamais arriver à faire autrement. Il y aurait aussi un endroit prévu pour les petits. Beaucoup, parmi les enfants défavorisés, sont en échec scolaire. Non pas parce qu’ils sont moins capables que les autres, mais peut-être n’ont-ils pas de chaussures et ne peuvent-ils pas se rendre à l’école. Ou encore, peut-être leurs parents sontils toxicomanes et ces petits restent à la traîne parce qu’ils ont trop de sommeil en retard. Et s’ils sont victimes d’abus, peut-être leurs peurs les empêchent-elles de se concentrer sur le travail scolaire. Un petit job tôt le matin ou tard le soir est aussi un obstacle à l’école. L’association espère donc pouvoir accueillir ces jeunes dans un tel bâtiment, et les aider, par des cours, à rattraper le retard qu’ils ont pris. Le but est qu’ils soient en mesure de suivre à nouveau le programme de leur niveau. Mais ce ne sont là que des projets, et ils ne verront le jour que si telle est la volonté de 4

Tartes au curry. (N.d.E.) 223


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Dieu. Hugh me rappelle sans cesse que notre œuvre ne dépend pas de l’existence ou non d’un bâtiment, que c’est le travail lui-même qui est important. Et effectivement, il me suffit, pour en être convaincue, de regarder les vies transformées autour de moi. L’association «Open Door Glasgow» ne peut fonctionner que grâce à ses nombreux volontaires. Ces gens formidables donnent de leur temps, de leur énergie et de leur argent. Un tel travail est épuisant physiquement, émotionnellement et spirituellement, et tout cela doit être pris en compte. Au printemps 2000, avec quelques-uns, nous avons fait une retraite dans un endroit magnifique à la montagne. Nous nous sommes reposés, détendus, nous avons pris le temps de discuter et de prier. Ce temps de répit nous est apparu comme essentiel, et l’expérience sera renouvelée. Nous sommes très reconnaissants à nos amis Donald et Christine de l’avoir rendu possible, et les remercions pour l’amour et le soutien qu’ils manifestent à notre équipe.

L’histoire de Gregor Gregor est originaire d’un milieu très difficile, il n’a pas vraiment eu d’enfance. C’était un jeune homme brisé quand nous l’avons rencontré. Il n’y avait plus en lui aucune étincelle d’espoir ni aucune ambition. Peu après l’acquisition du «Cornerstone», par la grâce et la miséricorde de Dieu, Gregor a pu être délivré de l’esclavage de 224


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la drogue. A ce stade-là, il avait besoin d’occuper son esprit et son temps le plus possible, pour être à l’abri de toute tentation éventuelle et éviter de retourner à son passé. Avec Margaret et d’autres bénévoles, il a participé pendant des semaines à la rénovation du «Cornerstone». Il nous a montré quel travailleur il était, et nous n’avons pas hésité à le recommander, quand il nous a dit qu’il avait un entretien d’embauche. Nous connaissons son employeur, et il ne regrette pas de l’avoir engagé. Il avait discerné le potentiel de cet homme et avait eu le courage et le bon sens de lui donner sa chance. Son employé en est la preuve vivante. A cause de toutes les difficultés qu’il a connues dans son enfance, il lui fallait repartir complètement à zéro et reconstruire sa vie sur des bases solides. Il a déjà fait bien du chemin et il lui en reste encore beaucoup à parcourir. Ces années d’expérience auprès des drogués ou des alcooliques nous ont montré une chose: lorsqu’ils s’en sortent, ils deviennent des travailleurs acharnés, très désireux de bien faire. Malgré tout, nous sommes bien conscients que tous les employeurs ne sont pas comme celui de Gregor, et qu’ils ne sont pas toujours prêts à engager des gens au passé chargé. C’est pourquoi nous aimerions trouver des emplois pour nos jeunes ou, au moins, la possibilité d’acquérir une expérience professionnelle, sur la base de laquelle un patron pourra éventuellement les embaucher. Mais avant qu’ils ne se jettent à 225


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l’eau et ne prennent un emploi hors du cadre protégé de l’association, nous pensons les employer nous-mêmes et les faire participer, pour un temps, à ce travail auprès des personnes en difficulté. C’est là ce qu’ils étaient eux aussi. Les mots nous manquent pour remercier Dieu de tout ce qu’il a fait pour nous, mais nous ne cessons de lui rendre grâces tous les jours de notre vie. Nous sommes bouleversés de voir comment il a utilisé notre propre vécu chargé pour aider ceux qui se trouvent encore dans la détresse que nous avons connue. Beaucoup ont été comme un défi à relever, beaucoup nous ont causé du souci, mais beaucoup aussi ont été pour nous un sujet de grande joie…

L’histoire de Karen La première fois que nous avons rencontré Karen, cela fait quatorze ans, elle refusait de nous adresser la parole. Après cinq longues années, le mur entre nous a commencé à présenter quelques failles, et nous avons pu entamer un dialogue. Et finalement, elle est venue au «Cornerstone» et s’est donnée à Christ. Quelle émotion me saisissait lorsque je la voyais avec Margaret! Leurs vies avaient changé de direction et, maintenant, elles avaient un avenir. Après sa conversion, elle a demandé à se faire baptiser et a voulu que je sois à ses côtés lors de la cérémonie. Elle avait écrit son témoignage pour le lire à toute 226


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l’Eglise. Elle n’a pu prononcer que quatre mots, puis sa voix s’est brisée. Elle m’a alors tendu sa feuille pour que je la lise à sa place. Mais ces quatre mots auraient suffi. Elle avait dit: «J’aime simplement Jésus.» Quelque temps plus tard, Hugh et moi avons été invités à une soirée dans le jardin d’amis, et Karen nous a accompagnés. Nous devions présenter le travail de l’association. C’était une fête splendide et c’est là que je me suis découvert un certain goût pour le saumon fumé! Alors que nous étions en train de saluer les uns et les autres, une chère amie a pris Karen sous son aile. Son amour et sa compassion ont tout de suite mis Karen à l’aise, et plus tard, elle m’a dit: «Cette femme ne me connaissait pas, mais dans son regard, j’ai vu que j’avais de l’importance pour elle.» Celui qui prenait soin d’elle mieux que tous, c’était le Seigneur Jésus lui-même, et aujourd’hui, elle est auprès de lui pour toujours. Karen nous a quittés durant l’été 2000. Je suppose que c’est parce que je suis une femme que j’ai tendance à décrire notre travail par des termes empruntés au vocabulaire ménager. Pour moi, l’association ressemble à une machine à laver aux divers cycles de lavage. Il y a d’abord le prélavage, puis le lavage, le rinçage, l’essorage, et enfin le «linge» est propre, séché et prêt à l’emploi. C’est une image de ce que nous demandons à Dieu pour ceux que nous rencontrons: qu’il les prépare à être libérés de leurs dépendances et de leurs 227


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problèmes, qu’ils soient lavés par le sang de Jésus-Christ, puis accompagnés et soutenus par l’association, avant d’être prêts à servir Dieu là où il les veut. C’est peut-être aussi parce que je suis mère, mais lorsque je croise des jeunes dans la rue, je ne peux pas m’empêcher de penser à notre fils Paul. Il a toujours vécu dans le confort et la sécurité d’un foyer, choses qu’eux n’ont jamais connues. Mais à cause de notre travail, il est tout à fait conscient de la face sombre de Glasgow. Je suis contente, car ainsi, il ne dira jamais des personnes en détresse qu’elles ne peuvent s’en prendre qu’à elles-mêmes. Je pense aussi que, par l’intermédiaire de Paul, des bribes de ce message ont été transmises aux élèves de son école. Et c’est seulement quand les gens cesseront de dire que si l’on vit dans la rue, c’est parce qu’on le mérite, que nous pourrons agir tous ensemble, et traiter à la racine les problèmes de la précarité, de la drogue, de l’alcool et de la prostitution. En attendant, l’association «Open Door», ainsi que d’autres organisations chrétiennes de ce type, iront apporter l’amour de Christ à ceux qui sont dans le besoin. Beaucoup d’autres le feront par pure solidarité humaine. Lorsque j’étais jeune fille et que je nettoyais les cages d’escalier de la rue McAslin, je commençais toujours par le rez-de-chaussée, puis je montais progressivement. Pour que cela soit bien propre, je devais d’abord balayer la saleté et la poussière, ensuite récurer, et finalement, 228


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passer le tout au blanc de chaux. Quand j’avais fait tout ça, les marches reluisaient. Je me tenais tout en haut, sous l’immense lucarne, pour contempler avec fierté les escaliers. Quelquefois, mais c’était exceptionnel, je ne faisais pas les coins ou je sautais l’étape de la serpillère… On voyait alors des traînées sous le blanc de chaux, et je ne retirais aucune satisfaction de mon travail. En moi-même, je me dis que c’est exactement ce que je suis en train de faire, «blanchir des escaliers», et toute l’association avec moi. Nous commençons par le «rez», avec les filles et les garçons, les hommes et les femmes, et nous les regardons, nous les encourageons, nous les soutenons à mesure qu’ils gravissent les marches. Nous en voyons qui abandonnent, car la montée et le travail de nettoyage sont difficiles. Mais certains persévèrent. Nous voyons leurs luttes, quand ils trébuchent sur une marche, et nous essayons de nous tenir derrière eux, mais certains tombent quand même. D’autres continuent toujours. Plus on monte, plus l’effort est exigeant. Il y en a qui fatiguent, mais nous essayons d’être là pour les rassurer et leur apporter un soutien concret. Plus ils grimpent haut, mieux nous les distinguons à la lumière de la grande lucarne. Mais ce que nous voyons surtout toujours plus clairement, c’est la main du Seigneur dans tout cela. Ceux qui sont arrivés tout en haut sont entrés dans la lumière, la Lumière du monde. Ils sont auprès de notre merveilleux Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. 229


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Nous travaillons encore à l’établissement de cette œuvre. Nous n’en sommes qu’au début, il reste beaucoup à faire. On m’a demandé un jour quel était notre «taux de réussite». J’ai répondu que cela dépendait de ce qu’on entendait par «réussite». Pour nous, le succès, c’est de voir quelqu’un sourire à nouveau, quelqu’un qui se réjouit du lendemain. C’est quand la peur et le chagrin disparaissent des visages et que la confiance commence à reprendre le dessus. Le succès, c’est quand un jeune défavorisé a des rêves et des ambitions pour l’avenir et qu’il trouve de l’aide pour les réaliser. Et comment en arrive-t-on là? C’est toujours et uniquement par la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, par son amour et sa compassion, répandus dans les cœurs et les vies de ceux qui en avaient faim et soif.

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