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Roeli M. T. Elbers-Heij


Titre du manuscrit original en anglais: On the Waves Copyright © Roeli Elbers-Heij Sauf indication contraire, les textes bibliques sont tirés de la version Louis Segond 21 Traduction: Francine André Couverture: Damien Baslé (Montélier-France) Photo de couverture: © fotolia © et édition: La Maison de la Bible, 2008 BP 151, Chemin de Praz-Roussy 4bis, CH-1032 Romanel-sur-Lausanne E-mail: info@bible.ch Internet: http://www.maisonbible.net ISBN 978-2-8260-3514-5 Imprimé en UE


Table des matières Préface........................................................................................ 7 1. Sur un air de violon à Juneau ............................................ 9 2. Nouvelle orientation . ....................................................... 15 3. De la joie dans une ville fantôme .................................... 21 4. Marcher sur l’eau . ............................................................ 27 5. Le sommelier . ................................................................... 33 6. Rescapée d’un tremblement de terre . ........................... 39 7. Une guitariste sur une échelle de corde ........................ 47 8. Voulez-vous être ma maman? . ........................................ 53 9. Un prix élevé à payer ....................................................... 59 10. Du bateau de croisière au bateau missionnaire ........... 65 11. Concert à la mission . ....................................................... 69 12. Le fils prodigue ................................................................. 73 13. Dans ma langue natale! .................................................... 77 14. Baptême dans les eaux glaciaires ................................... 81 15. Dans la poubelle ............................................................... 85 16. La vidéothèque ................................................................. 89 17. Des biscuits mondialement connus ............................... 95 18. Une solution pour les Alaskiens? . .................................. 99 19. L’oeuvre se poursuit . ..................................................... 105 20. Un sac à dos rempli de trésors ..................................... 113 21. Joe, l’homme volant ....................................................... 119 22. Des aides venues de Corée . .......................................... 123 23. Le dessin inspiré . ........................................................... 129 24. Conseil conjugal . ............................................................ 133 25. Un abri pour l’hiver ........................................................ 137 26. «Adoptez une famille» . ................................................... 145


27. Honolulu, Hawaï . ............................................................ 149 28. Funérailles ....................................................................... 155 29. Une lettre pour vous? . ................................................... 159 30. Des pieds de bébé .......................................................... 163 31. Pêche aux coquilles Saint-Jacques ............................... 165 32. Il était une fois un athée ................................................ 171 33. Coeurs de mères et de grands-mères . ......................... 175 34. Les greniers de Dieu ....................................................... 179 35. Et si l’on passait à table? ............................................... 183 36. Corneille et Cie . .............................................................. 187 37. Incendies, tempêtes et pirates . .................................... 193 38. Histoires d’ours .............................................................. 199 39. SOS et bouées de sauvetage . ........................................ 205 40. Le carton à pizza . ........................................................... 209 41. Libéré de son fardeau .................................................... 217 42. Répercussions du 11 septembre . ................................. 213 43. Ouvriers de la conserverie ............................................ 225 44. Intercepté sur la route ................................................... 229 45. Le sacrifice d’un coeur de père . ................................... 233 46. Wang et Ying .................................................................... 235 47. Femme dans un univers masculin ................................ 239 48. Quand il faut se dire adieu ............................................ 243 49. Un concert imprévisible ................................................ 247 50. La symphonie de Jésus .................................................. 251 51. Partenaires de prière . .................................................... 261 52. Epilogue ........................................................................... 265 Post-scriptum ........................................................................ 269 Informations générales sur la Mission pour les marins .. 271 Notes à propos de l’auteure ................................................ 273


Préface

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es milliers de personnes représentant plus de cent nationalités ont chaque année franchi la porte de la Mission pour les marins. Qu’ils soient matelots, pêcheurs ou membres du personnel du bateau, tous les marins ont une histoire qui leur est propre. Mais à chacun, l’amour de Jésus est exprimé d’une façon particulière et pratique. Les membres de l’équipe et les bénévoles de la mission sont là pour eux, prêts à les servir et à les conseiller. En découvrant les aspects si nombreux de ce ministère, le lecteur aura un aperçu de ce que représente la vie de ces hommes et de ces femmes travaillant en mer. En refermant ce livre, le lecteur gardera une vision bien particulière des situations de travail difficiles de ces personnes, parfois confrontées à des dangers et éloignées de leurs familles pour de longues périodes afin de prodiguer un revenu décent à leurs bien-aimés laissés au pays. Durant ces périodes de solitude, la Mission procure un foyer à ces marins esseulés. L’idée d’écrire ce livre a germé lors d’une fête commémorant un anniversaire de la Mission. Bien d’autres récits auraient pu être écrits par les membres de l’équipe relatant leurs multiples expériences dans cette Mission bénie et dans ce merveilleux endroit nommé The Last Frontier (La dernière frontière).


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Si au cours de ce livre le lecteur est entraîné dans des histoires d’ours et de saumons, il découvrira par-dessus tout des témoignages qui sont le fruit de nombreuses années de rencontres avec des marins venus dans ce merveilleux pays qu’est l’Alaska, que ce soit à Juneau, Whittier ou encore Seward. Qu’à Dieu revienne toute la gloire pour tout ce qu’il a accompli et qu’il continue de développer dans les cœurs des marins! Roeli M.T. Elbers-Heij Au nom de l’équipe de la Mission pour les marins Alaska 2008

Le bâtiment de la Mission pour les marins.


Chapitre 1 Sur un air de violon à Juneau

C

es énormes navires de croisière, qui accostent dans le port de Juneau, sont visibles depuis des kilomètres à la ronde. L’arrivée de ces gigantesques paquebots blancs offre toujours un spectacle saisissant. Nombreux sont ceux qui aiment se promener le long du quai pour contempler la scène et observer la foule des passagers qui débarquent de ces luxueux navires, dans leurs tenues d’été, l’appareil photo à la main. Le temps est souvent couvert, dans cette région du sud-est de l’Alaska, mais lorsque le soleil brille, chacun semble être de bonne humeur. Ces rares journées ensoleillées sont vraiment très spéciales! La saison estivale, en Alaska, ne dure que quatre mois. Même au début du mois de mai, les nombreuses montagnes qui bordent la côte sont encore chargées de neige. Comme la moitié des glaciers du globe se trouvent dans cette région, les touristes ont l’occasion d’en voir beaucoup durant leur voyage, notamment certains des plus connus, tels que le Mendenhall et le Columbia Glacier. Le long du Passage Intérieur1, on peut aussi souvent observer les baleines. On comprend donc aisément pourquoi des milliers de voyageurs apprécient les croisières dans cet 1 Voie maritime côtière du sud-est de l’Alaska et de l’ouest de la Colombie Britannique. (N.d.E.)


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endroit sauvage et préservé de l’Alaska… De majestueuses montagnes au manteau blanc, d’immenses cascades d’eaux tumultueuses, des milliers d’oiseaux perchés sur les rochers des fjords, de magnifiques baies aux vastes plages, et tant d’autres splendeurs s’offrent à leurs sens. Jeannette, cependant, n’aimait pas ces navires. Durant la saison d’été, elle refusait même de se rendre en ville. Et elle ne permettait jamais aux marins d’approcher trop près de sa petite fille, de peur qu’ils ne lui caressent les cheveux. Ils l’appelaient bella bambina. «Ne les laisse pas la toucher!» avait crié un jour Jeannette à son mari. Elle ne comprenait pas combien sa fillette rappelait à ces marins leurs propres enfants, laissés à la maison, qu’ils n’avaient pas vus depuis longtemps. Jeannette était enseignante mais aussi violoniste. Elle accompagnait les cantiques à l’église et donnait des cours de violon. Melissa, une de ses élèves, avait vraiment peur de jouer à l’église, mais depuis qu’elle s’était vraiment convertie, c’était différent: elle désirait vivement le faire. C’est pour cette raison que, durant l’été 1980, à l’occasion du 100e anniversaire de la ville de Juneau, Jeannette a décidé de participer aux festivités célébrées dans le parc. Elle et Melissa, vêtues de leurs costumes coloniaux, ont joué de vieux hymnes et divers airs et mélodies. Cela a permis à la jeune élève de prendre confiance et de s’habituer à se produire en public. «Pourquoi ne venez-vous pas jouer à bord?» leur ont demandé un jour des passagers d’un bateau qui naviguait dans le Passage Intérieur. A ce moment-là, Jeannette était à mille lieues de penser que cette première invitation donnerait naissance à un véritable ministère parmi les marins! C’est ainsi que, durant cet été 1980, les deux violonistes ont commencé à jouer sur les bateaux, à raconter l’histoire de Juneau et à témoigner de leur foi. A la fin de la saison, Jeannette et son élève, accompagnées d’un ami pianiste, avaient donné quarante-six concerts à bord de cinq paquebots qui faisaient régulièrement escale dans le port de la ville. Cette petite troupe de trois personnes est devenue tellement populaire


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qu’ils ont même eu un jour la possibilité, tout en divertissant les passagers, de voyager sur un de ces immenses navires jusqu’au sud de l’Alaska, dans l’Etat de Ketchikan. Lors d’un après-midi passé dans le Glacier Bay2, Jeannette a eu la brillante idée de jouer aussi pour le personnel du bateau. Ne sachant où se trouvait leur réfectoire, elle s’est renseignée auprès d’un membre de l’équipage. Lorsqu’elle se souvient, aujourd’hui, des événements de cette nuit-là, elle en a encore les larmes aux yeux! L’équipage qu’elle a rencontré comptait trente-cinq nationalités différentes, mais ces hommes avaient une chose en commun: les hymnes qu’ils chantaient chacun dans leur église lorsqu’ils étaient de retour au pays. Un Indonésien, membre de l’équipage, avait un souhait particulier: iI désirait entendre les cantiques «Quel ami fidèle et tendre» et «Amazing Grace». Finalement, cette demande a servi de prétexte pour répondre au désir profond de son cœur de chanter des chants de Noël, «Voici Noël, ô douce nuit…». Ces hommes ont expliqué avec une certaine gêne à Jeannette que, même s’ils n’étaient qu’au mois de septembre, ils savaient qu’ils ne seraient pas de retour chez eux pour Noël. Des chants ont résonné ce soir-là, depuis le réfectoire, dans de nombreuses langues. Les mots différaient, mais dans chaque bouche, on entendait la même mélodie et percevait la même émotion. Ce moment de chant a conduit tout naturellement à des conversations d’ordre spirituel. L’un avait des questions au sujet du catholicisme, l’autre déplorait le manque de Bibles dans sa langue maternelle, d’autres encore ont commencé à parler des difficultés spirituelles et morales que les marins pouvaient rencontrer… Un homme a exprimé les combats qui étaient les siens, alors qu’il tentait de rester fidèle à sa femme tout en étant loin de la maison pendant une année entière. Les membres de l’équipage étaient très heureux de pouvoir faire part ainsi librement de leurs difficultés. Mais il était impossible 2 Réserve naturelle d’Alaska, classée au patrimoine mondial de l’humanité, qui enregistre en moyenne 380 000 visiteurs par an. (N.d.E.)


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de répondre à toutes leurs demandes, car l’heure était venue pour eux de retourner à leur travail. Et les musiciens devaient jouer ce soir-là pour les passagers. Mais ils ont décidé de poursuivre les conversations le soir à 23 heures. Ainsi, après avoir enfin terminé leur travail dans la salle à manger des passagers, les hommes sont retournés au réfectoire du personnel pour reprendre la discussion. Jeannette et ses amis portaient encore leurs habits de gala lorsqu’ils les ont rejoints. Les conversations ont repris immédiatement de plus belle, et lorsque Jeannette a fait remarquer qu’il était déjà très tard et qu’ils risquaient d’être fatigués le lendemain, les marins ont répondu: «M’dame, ne vous en faites pas pour ça, nous savons une chose, c’est que vous quitterez le bateau au port de Ketchikan et que nous, nous avons encore besoin de réponses!» A 5 h 30 du matin, ils parlaient toujours, et Jeannette a fini par dire qu’elle ne pouvait rester plus longtemps, car les hommes devaient reprendre le travail à 6 heures. Tous étaient exténués… Lorsque Jeannette a pris congé de l’équipage ce matin-là, elle était convaincue que tous ces marins avaient de grands besoins spirituels, mais que nul n’était là pour y pourvoir. Il n’y avait personne pour les soutenir, personne pour les accompagner. Alors qu’elle s’apprêtait à quitter le bateau à Ketchikan, un Philippin, agent de sécurité, l’a interpellée: «Des hommes viennent vers moi pour recevoir des conseils, et je ne possède même pas une Bible!» Jeannette a alors fouillé dans ses bagages et lui a donné une vieille Bible des Gédéons. Durant son voyage de retour, dans l’avion, Jeannette songeait à ces trois jours inoubliables qu’elle venait de passer. Elle mesurait l’énorme besoin spirituel dont elle avait été témoin, mais elle était absolument convaincue qu’elle n’était pas la personne qu’il fallait pour ce travail… Pourtant, doucement, durant tout l’hiver 1980-1981, Dieu a continué de «frapper à sa porte». La saison des navires de croisière approchant de nouveau, Jeannette était remplie de crainte et d’appréhension, mais


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aussi d’audace. «Seigneur, a-t-elle prié, montre-moi ton chemin d’une manière ou d’une autre!» La réponse n’a pas tardé à venir. En effet, peu après, un directeur de croisières lui a téléphoné pour lui demander de jouer à nouveau pour les passagers, comme elle l’avait fait l’année précédente. Encore hésitante, mais désirant faire la volonté de Dieu, Jeannette a passé une semaine à prier et à discuter de ce projet avec ses amis musiciens. Puis, le directeur l’a rappelée. Ses demandes l’ont convaincue qu’elle devait retourner sur le bateau. C’est ainsi que Jeannette a pu dire: «D’accord Seigneur!» Comme ils n’avaient plus qu’un mois devant eux avant que les navires n’accostent à Juneau, Jeannette et son mari, Joe, se sont empressés de se renseigner pour savoir où trouver des Bibles dans différentes langues. Finalement, ils ont pu en commander quelques-unes. C’est ainsi qu’est né le ministère de distribution des Ecritures auprès des marins. Je suis marin et j’étais assis à votre droite, pendant que vous chantiez et jouiez du violon. J’ai vraiment apprécié que vous partagiez avec nous le message du salut en Jésus-Christ. Merci de ce que vous continuez à jouer pour nous. Etats-Unis



Chapitre 2 Nouvelle orientation

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orsque les navires de croisière sont arrivés au port, cet été 1981, ainsi que les étés suivants, cette aventure a pris une nouvelle orientation. En effet, désormais, Jeannette et ses amis musiciens jouaient non seulement pour les passagers, mais aussi pour les membres de l’équipage, avec lesquels ils prenaient le temps de discuter. Ce changement, conduit par Dieu, est intervenu à la suite de la rencontre de Jeannette avec des marins pakistanais qu’elle avait rencontrés l’année précédente. A partir de ce moment-là, chaque fois qu’elle se rendait sur un bateau, elle apportait un sac rempli de dépliants, traités et Nouveaux Testaments. Durant vingt ans, elle s’est ainsi déplacée, avec son sac rempli, sur ces grands navires, les parcourant de la proue à la poupe, du pont supérieur en passant par tous les niveaux jusqu’à l’étage inférieur, où se trouvait le réfectoire du personnel naviguant. Au début, les enfants de Jeannette, alors en bas âge, étaient avec elle tous les jours. Cette ambiance multiculturelle et multilingue, dans laquelle Dieu leur a permis de grandir, a eu un effet positif sur leur développement personnel. Cela a contribué à leur donner une vision du monde ouverte et sans préjugés, qui leur a été utile tout au long de leur vie. Plusieurs années après, à l’occasion


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d’une visite sur un bateau, Rebecca, alors adolescente, s’est exclamée: «J’ai vraiment ça dans la peau!» Les deux plus jeunes enfants de Jeannette se sont pris d’affection pour ces hommes de la mer. Ils avaient chacun leurs meilleurs amis. Un marin de Haïti, à qui ses propres enfants manquaient beaucoup lorsqu’il naviguait, était vraiment heureux de voir ceux de Jeannette dix-huit semaines d’affilée… Un autre homme, un capitaine originaire de Grèce, appréciait de voir les petits de la famille Seale s’asseoir sur ses genoux, alors qu’il fumait sa pipe… Rebecca aidait le personnel de la blanchisserie à distribuer le linge à différents endroits du bateau. La présence des enfants de Jeannette a ainsi favorisé et renforcé le contact personnel avec les marins. Lorsque les marins avaient du temps libre, Jeannette proposait de les accompagner pour faire leurs courses, que ce soit à la banque ou pour acheter un souvenir à leur femme et à leurs enfants. Parfois, elle allait les chercher pour marcher jusqu’au glacier Mendenhall ou à la station d’alevinage. D’autres fois, elle les recevait simplement dans sa maison. Ils pouvaient alors s’asseoir tranquillement dans le jardin et contempler les fleurs. Sa vie d’épouse et de maman mettait les membres de l’équipage à l’aise et leur rappelait leurs propres familles au Pakistan, aux Philippines, en Turquie ou en Grèce. Ces moments offraient à Jeannette de nombreuses occasions de partager avec ces hommes le message du salut. Lorsqu’on demandait à Jeannette pourquoi elle s’occupait ainsi des marins, elle répondait qu’elle se sentait comme l’apôtre Paul. Comme lui, ayant vécu dans le péché autrefois, puis ayant réalisé, par la grâce de Dieu, que Jésus était mort pour elle et lui offrait son pardon, elle avait reçu ce cadeau et désirait désormais le partager avec d’autres.1 Jeannette était aimée et appréciée, et les marins la connaissaient comme celle qui avait l’habitude de dire: «N’oubliez pas ce que je vous ai dit à propos de Jésus, et 1

1 Timothée 1.12-16.


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rappelez-vous que, non seulement son nom, mais aussi le mien, commencent par un ‘J’». Elle est devenue pour eux une véritable amie, une personne de confiance. Les marins étaient bouleversés de voir quelqu’un se soucier ainsi de leurs besoins. Jeannette a eu aussi l’occasion d’offrir à ces hommes des informations et enseignements utiles dans divers domaines tels que la grossesse, l’accouchement et la vie de famille. Elle les encourageait à être davantage en contact téléphonique avec leur épouse, à parler personnellement avec leurs enfants et à leur écrire régulièrement. Un été, lors de ses visites sur les navires, elle s’est sentie beaucoup moins craintive vis-à-vis des capitaines et du personnel d’encadrement, et surtout beaucoup plus désireuse de les rencontrer eux aussi pour leur parler du salut en Christ. «Au début, les capitaines étaient vraiment très étonnés que quelqu’un se soucie réellement des membres de l’équipage et ne s’intéresse pas uniquement aux passagers», a raconté Jeannette. Elle a continué ainsi à se rendre sur les bateaux de croisière durant huit saisons estivales. Lorsque, durant l’été 1988, les marins ont appris que le mari de Jeannette était muté à Anchorage, où la famille devait emménager en septembre, ils n’ont pas cessé de lui demander: «Mais qui nous aidera si vous partez? Qui priera avec nous et qui prendra soin de nous ? Qui sera notre missionnaire?» Lorsque les Seale se sont installés à Anchorage, ils pensaient que cette étape marquait la fin de leur ministère parmi les marins. Ils ont donc essayé de trouver d’autres personnes susceptibles de prendre le relais, mais en vain. Quelques membres du personnel naviguant ont alors suggéré à Jeannette de commencer une mission parmi les marins dans un logement d’un des immeubles Begich à Whittier, là où les bateaux de croisière accostaient pour embarquer et débarquer les passagers, puisqu’ils ne se rendaient pas à la ville d’Anchorage éloignée d’une soixantaine de kilomètres. Cependant, connaissant bien le mauvais temps fréquent dans cette région très difficile d’accès, Jeannette trouvait que


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cette idée n’était pas réaliste. «En aucun cas je ne passerai mes étés dans ce coin perdu et pluvieux!» s’est-elle exclamée à ce moment-là. Elle n’était alors pas vraiment prête à ce sujet de se laisser guider par Dieu. Toutefois, durant ce premier hiver passé à Anchorage, son fardeau pour les marins a continué à peser lourd sur son cœur. Elle et son mari se sont rendus sur les cargos qui accostaient dans le port d’Anchorage, et ils ont aussi rendu visite à certains membres d’équipages qui se trouvaient hospitalisés dans la ville. Jeannette poursuivait ses réflexions et se demandait qui, désormais, allait bien pouvoir venir en aide à tous les hommes qui arriveraient chaque été sur les grands paquebots. Les marins qui travaillaient sur ces navires transportant des marchandises disposaient, eux, de centres d’accueil partout dans le monde, même si leur équipage ne comptait, en général, pas plus de trente-cinq membres. En revanche, les équipages des bateaux de croisière comptaient toujours entre trois cent et six cent employés, et il n’existait aucun centre d’accueil pour ces hommes. Jeannette a passé un nouvel hiver, se sentant chagrinée et priant au sujet de cette situation qui la préoccupait de plus en plus. Chaque fois qu’elle lisait sa Bible, elle tombait sur des versets qui parlaient d’aller vers la mer, d’aller par le monde, notamment dans le récit de Jonas et dans bien d’autres passages. Ces questions la tracassaient tant, que cela devenait même difficilement supportable pour Joe, son mari. Finalement, en réponse à de nombreuses prières, Dieu leur a montré sa direction et leur a donné sa paix. Tous ceux qui connaissent Whittier peuvent comprendre l’hésitation qu’a pu avoir Jeannette. Car non seulement il y pleut presque constamment, mais le village n’est accessible qu’en train, par un tunnel qui le relie aux routes menant vers Turnagain Arm et Anchorage. Un jour, un avocat de la ville de New York qui défendait le cas d’un marin d’un cargo qui avait été blessé en Alaska, a téléphoné à Jeannette pour lui demander quels étaient ses


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projets d’été. Elle lui a alors parlé de la situation à Whittier et lui a expliqué qu’elle s’était rendue dans ce village une seule fois pour voir s’il était possible de rencontrer les marins sur les bateaux accostant à cet endroit, comme elle le faisait à Juneau. Elle lui a aussi dit qu’elle avait essayé de trouver un lieu pour passer la nuit avec son mari et éviter ainsi de perdre du temps dans des allers-retours. Cependant, elle a vite compris qu’elle ne trouverait rien de tel, et que la seule solution était de louer un appartement. Le gérant des immeubles Begich lui a fait visiter le seul logement disponible, un trois pièces en moins mauvais état que tous les autres. L’immeuble était délabré et n’était vraiment pas attirant. Il fallait donc financer la location mais aussi les travaux de rénovation et d’aménagement. L’appartement devait être repeint et il fallait trouver des tapis et des meubles. A la fin de la conversation, l’avocat lui a dit qu’il allait voir s’il ne pouvait pas leur trouver un soutien financier. Toutefois, Joe et Jeannette pensaient que tout cela était vraiment impensable et ils ont préféré complètement écarter ce projet de leurs pensées. Cependant, quelques jours plus tard, le même avocat a informé Jeannette qu’un donateur anonyme, qui habitait près du siège du Seamen’s Church Institute2 à New York, leur avait envoyé un chèque de 1000 dollars pour payer la location de l’appartement de Whittier. Cette personne a même envoyé plus tard ce montant pour les trois étés suivants. «C’était incroyable, pour moi, de voir que des non-chrétiens de Manhattan désiraient que nous partagions la Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ avec les marins en Alaska!», a raconté Jeannette. Une fois le loyer payé, les Seale ont dû s’occuper d’aménager le logement. Accompagnés du gérant des immeubles de Begich, ils sont allés voir dans les appartements inoccupés s’ils pouvaient trouver des meubles à récupérer. Puis, le chef d’une entreprise de peinture d’Anchorage que connaissait Jeannette, lui a fourni gratuitement la peinture dont ils avaient 2

Organisation religieuse qui travaille parmi les marins. (N.d.E.)


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besoin. Elle lui avait téléphoné pour lui demander: «Ecoutez Tom, auriez-vous des restes de peinture? N’importe quelle couleur fera l’affaire!» Cet homme avait alors tout arrangé pour elle, et lui avait même prêté les brosses, les rouleaux et tout le matériel nécessaire. Ainsi, Joe et Jeannette n’ont eu ni frais d’ameublement ni frais de rénovation! C’est ainsi que le déménagement de la famille Seale pour Anchorage, au lieu de marquer la fin d’un ministère auprès des marins auquel ils s’étaient consacrés durant huit ans à Juneau, a marqué le début d’une nouvelle étape dans ce travail missionnaire, qu’ils ont pu poursuivre durant quatre ans. Ces années leur ont apporté de nombreuses occasions d’annoncer l’Evangile sur ces immenses navires de croisière. Quelles bénédictions le Seigneur avait-il en réserve pour ce nouveau ministère à Whittier? J’ai vu le désespoir sur le visage de nombreux marins, et particulièrement chez ceux qui n’avaient pas la possibilité de quitter le navire. Jeannette

Un bateau de croisière entrant dans le port.


Chapitre 3 De la joie dans une ville fantôme

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réée à l’origine comme port militaire et dépôt de carburant durant la Seconde Guerre mondiale, la petite ville de Whittier est devenue une minuscule bourgade comptant seulement 280 habitants y vivant toute l’année. Il n’existait aucune route pour l’atteindre. L’accès à Valdez, de l’autre côté de la Baie du Prince William, n’était possible que par bateau. Si quelqu’un voulait aller à Anchorage, il devait prendre le train qui passait à travers deux tunnels, qui avaient été creusés à la dynamite dans la montagne de Chugach, pour atteindre Portage de l’autre côté et ainsi retrouver le réseau routier.1 Située au bord de l’eau et entourée de montagnes, de glaciers et de chutes d’eau, Whittier offre un spectacle d’une beauté à couper le souffle qui compense un peu le désagrément lié aux intempéries. En effet, la pluie et la neige de cette région montagneuse semblent ne jamais cesser. La moyenne des précipitations à Whittier se situe autour de sept mètres et demi d’eau par an! Il n’y a pas de maisons individuelles dans cette petite ville, seulement quelques grands immeubles. Un de ces immeubles, d’un brun terne se nomme la Tour Begich et compte quatorze

1 Durant l’été 2000, ce tunnel jusque-là uniquement réservé aux trains, s’est ouvert aussi au trafic de véhicules de petite cylindrée.


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étages. On trouve dans ces immeubles des bureaux, une poste, une librairie et des appartements qui abritent environ 70% des personnes vivant à Whittier toute l’année. Alors que durant l’hiver la ville est quasi à l’arrêt, elle retrouve de la vie en été avec les activités portuaires et du bord de mer. Il a fallu attendre les années 1970 pour que le service routier d’Alaska reconstruise l’accès aux quais ainsi que le port de plaisance. En effet, le tremblement de terre de 1964, le plus puissant en Amérique du Nord, avait détruit une bonne partie du bord de mer, et des maisons de la ville avaient été balayées par une puissante vague de fond. Le système routier dans toute la partie centrale du sud de cet État avait, lui aussi, été endommagé par ce tremblement de terre. Quand les accès ont été remis en état, les paquebots ont pu à nouveau accoster à Whittier comme point de transit des croisières effectuées dans la magnifique baie du Prince William. Whittier n’a jamais été une destination en soi mais uniquement un lieu de transit permettant de rejoindre l’aéroport d’Anchorage par train ou d’autres lieux de destinations en Alaska pour certaines activités comme par exemple un tour en ferry ou une partie de pêche. C’est le seul endroit aux ÉtatsUnis où les cars d’excursion sont chargés sur des wagons plats de trains, ce qui permet aux passagers de vivre une expérience unique, celle d’admirer le paysage durant des heures en étant confortablement assis. C’est au cours de l’été 1989 que Joe et Jeannette ont commencé à louer l’appartement de la Tour Begich. Jeannette a fait de nombreux allers-retours entre Anchorage et Whittier pour rencontrer les membres des équipages des bateaux de croisière qui accostaient à Whittier environ trois jours par semaine durant la saison touristique. Elle a reçu de l’aide d’un groupe de bénévoles venant pour la plupart de différentes églises de la ville d’Anchorage. Une aide supplémentaire lui est arrivée d’un bateau qui transportait des caisses de Bibles envoyées par l’aumônier du port de Vancouver et qui les a fait


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acheminer à Whittier en faveur de la Mission chrétienne pour les marins. Bien que l’appartement soit situé au quatrième étage, la porte de la Mission était libre d’accès et se distinguait par une simple pancarte écrite à la main. Sur le mur d’entrée on pouvait lire le mot «Bienvenue» écrit en espagnol, grec, coréen, indonésien, polonais et d’autres langues encore. Une simple croix était peinte sur la fenêtre du salon. Dans les différentes pièces de l’appartement, on trouvait des vidéos, des livres, de la documentation et un présentoir de Bibles en plusieurs langues. Sur un autre mur, un énorme graphique énumérait les divers tarifs téléphoniques et heures locales pour chaque pays. Lorsqu’un marin désirait appeler sa famille, il devait connaître les différences horaires entre l’Alaska et son pays d’origine ainsi que le tarif par minute. Les cartes téléphoniques étant encore inexistantes à ce moment-là, les numéros de téléphone des familles des marins étaient inscrits sur un simple petit bout de papier qui était remis à la personne chargée de ce service. Celle-ci devait appeler l’opérateur afin d’établir la communication. Et comme il n’y avait qu’un seul téléphone disponible, chaque marin savait qu’il devrait patienter avant d’avoir la ligne. Les appels téléphoniques étaient calculés à l’aide d’un chronomètre. Les opérateurs connaissaient la Mission pour les marins car c’étaient les seuls à recevoir chaque mois une facture de seize mille dollars! Durant la journée, l’argent reçu était gardé dans une boîte (à sucre) métallique. La somme atteignait environ mille deux cents dollars à la fin de la journée et les billets étaient alors placés au réfrigérateur dans un sac en plastique. Ce n’est qu’en fin de semaine que Jeannette mettait dans son sac à dos le montant total hebdomadaire, soit environ quatre mille dollars, et reprenait le train pour Anchorage. Une fois arrivée à Anchorage, les billets de banque devaient être classés en liasses avant d’être déposés à la banque. Comme il est plus


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facile et meilleur marché aujourd’hui de correspondre par courriels ou d’utiliser des cartes téléphoniques! Que ce soit localement ou à l’étranger, la plupart des bénévoles et membres d’équipage entendaient parler de la Mission par le bouche à oreille. Une hôtesse d’origine philippine travaillant à bord d’un bateau avait entendu parler de la Mission de la bouche d’un marin portoricain. La Mission de Whittier est peu à peu devenue un havre et un refuge international pour les membres d’équipage des bateaux de croisière du monde entier. Cet endroit était un lieu sûr et confortable pour les marins qui, durant leur temps d’escale, ne voulaient pas aller traîner dans les bars. La Mission leur était présentée comme le «foyer» loin de leur propre foyer. La simplicité des lieux et de l’ameublement, constitué de chaises dépareillées, de tables et de canapés, faisait de la Mission un lieu convivial où les marins se sentaient à l’aise. Au cours de la dernière croisière de ce premier été à Whittier, Guillermo, un marin parlant espagnol, a annoncé qu’une fête serait organisée sur le bateau où il travaillait pour célébrer la fin de la saison. «Mais les gens vont beaucoup boire et danser et moi je n’aime plus du tout ça!», a-t-il dit en levant les yeux de sa Bible alors qu’il discutait de certains versets avec Jeannette. Un mois auparavant, Guillermo avait été blessé dans un exercice de sauvetage à Skagway. Au moment où le canot de sauvetage allait se retourner, il s’est mis à prier: «S’il te plaît Dieu, laisse-nous en vie!», juste avant que sa tête heurte violemment la surface de l’eau. Guillermo a non seulement perdu dans cet accident une partie de son champ visuel, mais aussi plus de mille trois cent dollars d’épargne qu’il prévoyait pour sa famille. Depuis cet instant où Dieu avait répondu à sa prière en lui épargnant la vie, Guillermo s’était engagé à vivre plus près de lui. C’est ce dont il était en train de discuter avec Jeannette: comment cette expérience avait changé sa vie. Il savait aussi que deux autres marins avaient perdu la vie lors de cet accident. L’un d’eux était un officier grec qui arrivait à l’âge de la retraite


De la joie dans une ville fantôme

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et devait rentrer chez lui quelques jours plus tard. Cet officier avait été un bon ami de Jeannette. C’est durant cet été 1989, que Joe et Jeannette ont réalisé que tout ce travail avait un grand potentiel pour s’agrandir au-delà de ce qu’ils ne pourraient jamais imaginer. Ils se sont rendus compte qu’ils avaient besoin d’une équipe de soutien spirituel pour les encadrer; aussi ont-ils décidé de constituer une organisation à but non lucratif. Tous les membres devaient être des chrétiens nés de nouveau, dévoués et ayant un fort intérêt pour le ministère auprès des marins. Lorsque la Mission a obtenu le statut d’association à but non lucratif, quelqu’un a demandé à Jeannette qui en était le directeur, qui dirigeait cet endroit. Elle n’avait jusque-là jamais pensé à cela; le tout avait évolué avec la Providence divine... Elle a alors répondu à brûle-pourpoint: «Personne ne le dirige, Jésus en est le directeur et moi j’ai seulement les clés de la porte!» Jeannette a visité les bateaux de croisière à Whittier pendant huit ans jusqu’à ce que tous les bateaux quittent ce port et commencent à accoster à Seward. Je prie que Dieu vous donne toujours cette passion et ce courage pour partager cet amour inconditionnel et abondant à chacun. Je crois que Dieu envoie des gens comme vous et utilise cet endroit où nous pouvons tous nous réunir afin d’apprendre à connaître le chemin qui nous mènera au ciel et voir vraiment qu’Il nous aime, qu’Il nous pardonne et qu’Il transforme nos vies. Indonésie



Chapitre 4 Marcher sur l’eau

P

rendre la mer sur des navires, se laisser flotter sur de petites embarcations, naviguer au gré des vents... C’est ce que les hommes ont fait depuis des siècles, non sans dangers. Beaucoup ont perdu leur vie au milieu de vagues en furie et à la suite de violentes intempéries. Lorsqu’un épais brouillard flotte à la surface de la mer, des sirènes de bateaux se font régulièrement entendre ici et là. Lorsque les bateaux s’approchent de la côte ou entrent dans le port, la visibilité demeure quasi nulle. Même si, pour augmenter la sécurité de la navigation, des phares ont été placés depuis des siècles dans ces environnements hostiles et difficilement accessibles, et même si actuellement de nouveaux moyens tels que des ordinateurs et des radars ont été ajoutés, naviguer par un épais brouillard demeure une entreprise dangereuse et inquiétante. Des tempêtes et des mers déchaînées ont déjà fait sombrer bon nombre de bateaux et tué d’innombrables personnes dans le golfe de l’Alaska. L’être humain est bien démuni pour lutter contre cette force de la nature. Certaines personnes travaillent en mer afin de subvenir aux besoins de leur famille; d’autres naviguent pour le plaisir de découvrir le monde et choisissent ce moyen de transport malgré les risques encourus. Certaines personnes utilisent les ferrys par obligation, n’ayant pas


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d’autres possibilités pour se déplacer. Quoi qu’il en soit, que l’on voyage sur de grands bateaux de croisière ou sur de petites embarcations, naviguer n’est pas toujours synonyme de plaisir. Une nuit, un bateau de pécheurs luttait contre des vents violents. Des efforts puissants devaient être déployés pour maintenir à flot l’embarcation qui était heurtée de plein fouet par de fortes vagues. Plus le temps avançait et plus la situation s’aggravait et devenait critique. Soudain, un des membres d’équipage, pris de terreur, a pointé son doigt en direction de quelque chose arrivant sur l’eau dans leur direction et s’est écrié: «Un fantôme!» Alors une voix s’est faite entendre: «Rassurez-vous, c’est moi. N’ayez pas peur!» Alors que les marins supposaient que leur maître était dans le port qu’ils avaient quitté le soir auparavant, tout à coup il était là devant eux, marchant sur l’eau et venant à leur secours... Cette histoire que l’on trouve dans la Bible1 se poursuit et raconte que non seulement Jésus mais également un de ses amis a marché sur l’eau au milieu des grandes vagues! Cet homme, appelé Pierre, voulait rejoindre le plus vite possible son maître, alors il lui a demandé s’il pouvait aller vers lui... Réalisait-il vraiment ce qu’il venait de dire? La réponse de Jésus a été: «Viens!», et alors Pierre a enjambé le rebord du bateau: il fallait qu’il pose son pied sur l’eau en faisant confiance à Jésus. Tout cela n’était-il pas ridicule? Etait-ce vraiment possible ? Etait-ce réel? Ses camarades durent certainement retenir leur souffle lorsqu’ils ont assisté à cette scène! Peut-être que ses amis ont fait des commentaires, mais Pierre est bel et bien sorti du bateau et s’est mis à marcher. Il a marché sur l’eau! Soudain, il a réalisé la grandeur de ces immenses vagues et les difficultés qui l’attendaient pour rejoindre Jésus. La tempête faisait rage et tout-à-coup il a pris peur. Il a crié: «Seigneur, sauve-moi!» Immédiatement, Jésus a saisi Pierre et lui a demandé pourquoi il avait soudain si peu de 1

Matthieu 14.22-33.


Marcher sur l’eau

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foi et commencé à douter. Ils sont alors montés ensemble dans le bateau et aussitôt le vent s’est calmé. Cette histoire pourrait être la même aujourd’hui pour un marin qui commence à croire à ce même Jésus et qui sort de sa «zone de confort», hors de son «bateau» pour se diriger vers l’inconnu. Peut-être est-ce la première fois qu’il entend parler de Jésus? Pour des personnes d’horizons culturels spécifiques, le fait de croire soudain en Jésus comme «le Fils du Dieu vivant» peut signifier le rejet de tout ce à quoi leur famille et leurs amis tiennent le plus. Un jour, alors que Jeannette accompagnée de sa petite fille montait dans un bateau de croisière à Juneau pour assister à une rencontre de prières des membres d’équipage à l’heure du déjeuner, un serveur turc a interpellé Jeannette dans le couloir. La semaine précédente, elle lui avait remis des dépliants qu’il avait lus, et il avait des questions à lui poser à la suite de sa lecture. Il lui a demandé comment Dieu qui affirme être «un» est pourtant formé de trois personnes: le Père, le Fils et le SaintEsprit. Jeannette s’est alors demandée comment expliquer cela à un musulman qui, de plus, ne connaissait qu’un anglais rudimentaire constitué essentiellement des termes entourant la salle à manger, la nourriture ou la vaisselle... Elle a adressé à Dieu une prière éclair2 et immédiatement il lui est venu l’idée d’utiliser l’exemple de la salade... Elle lui a expliqué que la Trinité était comme la salade composée. En effet, une salade peut être composée par exemple de laitue, de tomates et de champignons. Chaque ingrédient a sa propre identité et saveur, mais lorsque les trois composants sont mélangés en salade, ils acquièrent alors une autre identité. Il a alors immédiatement compris et, en souriant, il a dit: «Alors Dieu est comme une salade?» Il aurait souhaité continuer cette conversation mais comme les autres membres d’équipage n’avaient que trente minutes avant qu’ils ne retournent travailler, elle l’a invité à se joindre au groupe de prières vers lequel elle se rendait. 2

Voir Néhémie 2.4.


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Ce marin turc désirait pourtant se brosser les dents avant d’aller prier, selon l’habitude des musulmans qui prennent une douche et se lavent avant la prière. Jeannette lui a expliqué que Dieu était plus sensible à ce qui était à l’intérieur de nous plutôt qu’à l’extérieur. Il s’est tout de même rincé la bouche et les participants du groupe ont prié chacun à tour de rôle. Lorsqu’ils ont eu terminé, Jeannette a demandé à ce marin turc s’il désirait aussi prier; il lui a répondu qu’il l’avait déjà fait. Il avait prié silencieusement en turc et Jeannette lui a demandé ce qu’il avait dit. Il lui a répondu qu’il avait demandé à Dieu de lui pardonner ses péchés et de le purifier à l’intérieur de lui. Il a regardé un chrétien originaire des Caraïbes, membre de l’équipage, et lui a dit: «Je me sens si propre maintenant, je te vois avec des yeux différents!» Il y avait toujours eu beaucoup de préjugés entre les marins sur ce bateau, mais maintenant un de ces aspects venait d’être démoli. Une fois converti, ce musulman a commencé à rassembler les croyants dans les locaux de la blanchisserie après minuit afin de prier. A ce moment-là, il n’y avait pas encore d’étude biblique organisée officiellement à bord du bateau; aussi cette rencontre avait-elle le caractère d’une réunion secrète. Le chef de la blanchisserie était chrétien et de ce fait leur permettait de se réunir dans ses locaux. Lorsque le maître d’hôtel, un marocain musulman, a appris que son serveur de salle s’était converti au christianisme, il a menacé de lui trancher la gorge: «Je vais te tuer!» Ayant enjambé le bord de son bateau pour marcher vers l’inconnu, combien maintenant ce serveur converti devait mettre sa confiance en Jésus pour trouver des issues aux difficultés qui commençaient à le menacer, à l’image des hautes vagues dans l’histoire de Pierre! Il a dû supplier Jésus ainsi: «Seigneur aidemoi et sauve-moi!» Avec foi il a continué ainsi à «marcher sur l’eau» lorsqu’il se joignait aux rencontres de prières dans la blanchisserie... étant assuré que le Seigneur avait le contrôle de la situation entre ses mains.


Marcher sur l’eau

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Au cours des années, Jeannette a perdu de vue ce marin turc, mais il a été le premier à avoir accepté Christ au début de ce ministère auprès des marins. Ces hommes marchant fidèlement, jour après jour, malgré les menaces pesant sur eux, continuent toujours à l’impressionner! Des bateaux luttant contre vents et marées, des vagues et des tempêtes tumultueuses en pleine mer à affronter... Mais quelqu’un est le Maître de tout ceci. L’être humain ne peut pas contrôler la puissance de la nature mais Dieu, le Tout-puissant, le peut! Il contrôle également les tempêtes de nos vies!

Durant le voyage, il y eut une violente tempête. Vous étiez auparavant montée à bord et nous avions eu un moment de prière et de communion chrétienne dans ma cabine. Nous vous serons éternellement reconnaissants pour vos prières, car les trente heures qui suivirent furent un test pour ma foi. Dans toutes mes années de service en mer, cette tempête fut la pire que j’aie jamais eu à affronter. Un capitaine anglais



Chapitre 5 Le sommelier

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e fait de naviguer en mer a toujours été une activité très attirante. Un bateau de croisière voguait dans les eaux du sud-ouest de l’Alaska. Plusieurs passagers vêtus d’habits de soirée étaient en train de déguster avec plaisir leur repas dans la prestigieuse salle à manger d’où flottait une douce musique. «Monsieur, demande le sommelier, puis-je vous recommander ce Bourgogne pour accompagner vos filets mignons?» Le passager appréciait cet homme courtois, vêtu d’un uniforme, dont la qualité de son service augmentait encore le plaisir du voyage. Pourtant, quelqu’un connaissait-il vraiment la personne qui se cachait derrière la façade de ce personnage? Quelqu’un connaissait-il quelque chose de la vie vide de sens de ce sommelier anglais dépendant de l’alcool et des jeux de hasard? David Hawkins avait grandi en Angleterre, à Londres; sa famille n’allait jamais à l’église. Ce jeune homme avait suivi une formation dans une école hôtelière et rêvait d’avoir un jour sa propre affaire. Comme la vie lui avait paru belle lorsqu’il était devenu enfin propriétaire d’un petit hôtel situé dans la campagne écossaise et qu’il avait pu montrer ses talents en tant que chef restaurateur! Mais les ennuis sont arrivés et sa


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vie a changé. C’est alors que David a décidé de partir travailler en mer sur les bateaux... naviguer... et aller son propre chemin. C’est ce qu’il a fait. Un jour, David a gagné une grosse somme d’argent, ce qui lui a permis de ne plus travailler durant un certain temps. Il a alors débarqué dans les Caraïbes afin de prendre un peu de bon temps sur la plage tropicale d’une zone inhabitée, seul au milieu de la création de Dieu. C’est durant cette période que Dieu a commencé son travail dans le cœur de David, mais cela a pris deux ans avant que le marin ne le réalise. Après quelque temps, David a dû à nouveau reprendre son travail de sommelier à bord des bateaux, à nouveau servir le vin aux passagers… Dans ses heures de congé, David aimait toujours aller dans les bars. Une nuit, en août 1985, alors qu’il travaillait sur un bateau se dirigeant vers Juneau en Alaska, il s’est assis dans sa cabine et a commencé à boire. Plus tard, il a décidé d’aller chercher des boissons supplémentaires au bar du personnel. Même s’il était conscient que certains secteurs du bateau étaient interdits aux membres de l’équipage, il a consciemment choisi de faire fi de ces prescriptions et s’est aventuré au travers d’une des plus lourdes portes étanches hydrauliques afin de prendre un raccourci. Il n’était encore jamais passé par là. Soudain, la porte a commencé à se fermer sur David avant qu’il n’ait eu le temps de se dégager. Il a failli être écrasé mortellement par dix tonnes d’énergie hydraulique. «Je me vois encore en train d’essayer d’attraper la poignée de secours juste avant de m’écrouler», a-t-il raconté une fois. Un de ses amis l’avait de justesse tiré hors du passage de cette porte qui se refermait sur lui, une seconde avant qu’elle ne termine sa course. Immédiatement débarqué à Skagway, David a été transporté par avion à l’hôpital de Juneau. Les médecins ont pensé qu’il ne survivrait pas à ses blessures mais le miracle est arrivé! Non seulement il s’en est sorti mais il a récupéré à nouveau rapidement ses forces!


Le sommelier

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Puisque le responsable du groupe des chrétiens avait appris que Jeannette et son mari visitaient régulièrement les marins hospitalisés, il les a prévenus par téléphone à six heures du matin, le jour où David a été transféré. L’infirmière leur a déclaré: «Nous avons ici un type transféré d’un bateau qui est en train de mourir, il faut venir très rapidement et lui parler de Jésus. Il se peut que vous l’ayez déjà rencontré une fois!» A partir de ce jour-là, Jeannette a rendu visite à David chaque jour durant son hospitalisation à Juneau. Il était content d’être dans un pays où les gens parlaient sa langue maternelle. Trop souvent, lorsqu’un marin devait être hospitalisé, il ne pouvait ni comprendre ni parler à personne; il ne pouvait même pas expliquer qu’il désirait téléphoner à sa famille. Mais ici se trouvait Jeannette, une femme qui parlait sa langue... «Je rends toujours visite aux marins qui sont hospitalisés car je sais très bien qu’ils n’auront probablement pas de visites à cause de la distance qui les sépare des leurs et des collègues qui sont en train de naviguer vers un autre port», dit-elle. Fidèlement, jour après jour, cette femme retournait à l’hôpital. Elle a dit à David que c’était en fait incroyable qu’il ait survécu à cet accident. Elle a commencé à le questionner: «Vos parents en Angleterre ne vous manquent-ils pas, avez-vous le mal du pays?... Savez-vous quelque chose de ce Dieu qui vous a sauvé la vie? Il avait certainement une raison de le faire!... Avez-vous déjà prié?» Pendant qu’ils discutaient de différents sujets, spécialement des questions spirituelles, David a avoué à Jeannette qu’il était un rationaliste et qu’il avait besoin qu’on lui prouve les choses avant de les croire. Il avait de grandes difficultés à répondre aux questions d’ordre spirituel que Jeannette lui posait. Durant tout ce temps il n’a même pas remarqué que toutes les heures qu’elle passait avec lui étaient des actes qui démontraient de façon vivante et pratique l’amour de Christ. Enfin, après plusieurs mois de convalescence en Angleterre, David a eu la permission de retourner naviguer. Etant attiré par les questions environnementales et spirituelles, il a commencé


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à lire des livres traitant aussi bien de la nature que de la vie spirituelle des indiens d’Amérique. Durant cette période, il est devenu membre de l’association Greenpeace. Il savait qu’il y avait «quelque chose de plus». Lorsqu’il a repris la mer, il a pu s’émerveiller devant les glaciers majestueux et les paysages magnifiques. Il a réalisé qu’il aurait pu être tué et qu’une nouvelle chance de vivre lui était donnée. Vivre une nouvelle vie? Jeannette avait-elle raison? Il a alors écrit à cette gentille femme pour la remercier de ce qu’elle avait fait pour lui et, à partir de ce moment-là, une correspondance entre eux a commencé. Il lui posait un tas de questions qui le tenaillaient au sujet de la vie et de la foi. Une fois, il a reçu une longue lettre dans laquelle figuraient les réponses à ses questions avec pour chaque question posée, la référence biblique avec le livre, le chapitre et le verset correspondants appropriés. «Comme je n’étais jamais allé à l’église auparavant, je ne savais même pas en ce temps-là comment trouver un verset dans la Bible», a-t-il dit en souriant. Il a alors fourré la lettre dans la poche arrière de son pantalon... «Mais cette lettre a commencé à me tracasser, alors j’ai pensé qu’il fallait que je déniche une Bible.» Aussitôt qu’il a eu cette pensée, il trouva «comme par enchantement» une Bible sur le bateau. Il a commencé à la lire et à l’étudier, et plus il la lisait, plus il constatait sa condition de pécheur devant Dieu. David a réalisé que c’était lui le problème et que Dieu désirait lui offrir le Salut. David a accepté le cadeau de la grâce et sa vie a alors commencé à changer. Le Seigneur ne lui a pas seulement donné une nouvelle vie spirituelle, sa vie elle-même a commencé à changer du tout au tout. Il a écrit à Jeannette pour lui demander si elle connaissait un endroit où il pourrait étudier la Bible. Elle lui a alors envoyé des informations concernant plusieurs endroits dont le Collège Biblique de l’Alaska à Glennallen. C’est ainsi qu’en août 1986, il a décidé d’aller dans ce Collège Biblique situé au centre de l’Alaska. Durant les vacances d’été, David travaillait dans un camp biblique près de Juneau. Cela lui a permis de visiter les


Le sommelier

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bateaux de croisière qui accostaient à cet endroit, et c’est ainsi qu’il a commencé un travail de missionnaire auprès des marins. Durant ses études à Glennallen, David a rencontré une charmante infirmière canadienne nommée Ina qui travaillait à l’Hôpital de la Foi de Send International Mission. Au printemps 1990, ils se sont mariés et David a terminé ses études au Collège où il a obtenu un diplôme avec une spécialisation dans le domaine de la mission. Après avoir été promu, David et Ina se sont rendus à Whittier pour rejoindre Jeannette en tant que bénévoles durant la saison d’été, se mettant ainsi au service des membres d’équipage des bateaux de croisière. Ils ont fait la même chose l’été suivant. Lorsque la compagnie de navigation a décidé de transférer le port de débarquement de Whittier au port de Seward, la Mission chrétienne auprès des marins de l’Alaska nouvellement constituée a demandé à David qu’il en devienne le chef à plein temps. Lui et sa femme ont accepté ce poste en s’engageant à vie dans ce travail auprès des marins et de la communauté locale de Seward. Aujourd’hui, David est toujours très heureux dans ce travail que le Seigneur lui a donné à accomplir au sein de ce ministère. Grâce à sa connaissance personnelle et son expérience du terrain concernant entre autres les tentations et la solitude qui existent parmi les membres d’équipage sur les bateaux, David offre des encouragements précieux et des enseignements sur l’amour de Dieu, durant les services à la Mission. Lorsqu’il est devenu chrétien, personne n’était là avec lui sur le bateau pour l’aider; il n’y avait pas encore de rencontres chrétiennes. Il explique à présent aux nouveaux convertis combien il est important de se joindre aux groupes de chrétiens à bord! Implanter des églises sur les bateaux de croisière est aussi un de ses buts dans ce ministère. Un engagement à vie: servir les marins. «Où est David?»... Cette question est posée maintes et maintes fois. Il est sollicité de bien des manières: un jour pour parler au


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garde de sécurité sur le quai; un autre pour réapprovisionner le stock de cartes téléphoniques; ou pour acheter du café, ou pour créer des affiches à placarder dans les bateaux afin d’inviter les équipages à participer aux rencontres chrétiennes, ou encore pour commander des Bibles dans diverses langues. Ses tâches ne s’arrêtent pas là: il doit aussi préparer des sermons, servir de conducteur pour accompagner une équipe au terrain de football, donner des conseils particuliers à un marin qui traverse des problèmes personnels... Et la liste des tâches et responsabilités pourrait encore s’allonger pour ce pasteur/directeur/administrateur. Eté comme hiver, David et sa famille restent dans le bâtiment de la mission de la Baie de la Résurrection à Seward, toujours prêts à servir leur Seigneur. L’apôtre Paul qui a été autrefois un persécuteur et un meurtrier auprès des premiers chrétiens de son époque, est par la suite devenu un missionnaire actif, voyageant pour parler du Seigneur Jésus à des personnes de différents pays. David Hawkins, cet homme venu d’Angleterre et qui, à une période de sa vie a été un buveur et un joueur invétéré, est devenu plus tard un missionnaire actif. Il parlait du même Seigneur Jésus aux marins de différents pays qui venaient vers lui. Combien il est merveilleux de voir le Seigneur agir et changer des âmes perdues en des instruments de service et de justice dans ses mains! Gloire à Dieu! Un des chants souvent chanté à la Mission pour les marins à Seward est ce chœur: Dieu va ouvrir un chemin Lorsqu’aucun chemin ne paraît possible Il travaille dans des chemins encore invisibles Il va ouvrir un chemin pour moi...1

1

Don Moen, God Will Make a Way, CD, Integrity’s Hosanna! Music, c1990.


Chapitre 6 Rescapée d’un tremblement de terre

«

R

eposez-vous un instant». Cette inscription placée à l’arrière d’une balancelle disposée devant une maison de Seward, a frappé le regard de l’équipe de la Mission qui passait devant. Le fait que les compagnies de navigation décident que leurs bateaux n’accosteraient plus dans le port de Whittier mais plutôt à Seward a amené les membres de la Mission à prendre une décision: chercher un nouvel endroit pour la Mission pour les marins. Ce n’était pas une tâche facile. D’une part il n’y avait pas de maison à louer dans les environs et d’autre part l’équipe de la Mission désirait un endroit assez grand, suffisamment spacieux pour offrir aux marins différents services. Lorsqu’ils ont pensé avoir enfin trouvé le lieu correspondant à leurs besoins, ils ont appris que la maison n’était pas à louer mais... à vendre! Des prières se sont alors élevées vers Dieu. Qu’avait-il en réserve dans cette situation? Nous étions au printemps 1993 et les bateaux de croisière commenceraient à arriver à Seward dans quelques semaines seulement. Les marins viendraient bientôt et nous devions impérativement trouver une maison! Depuis le début de ce ministère, la prière avait été le fondement sur lequel la Mission pour les marins de Seward avait fonctionné. Parfois le Seigneur répond aux prières avant même


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que nous les lui ayons exposées, tout comme dans l’histoire de Daniel dans la Bible1. N’était-ce pas ce même Dieu dans lequel les membres de la Mission se confiaient pour leurs besoins, pour recevoir la sagesse et les bénédictions? N’était-ce pas ce même Dieu dans lequel ils mettaient leur confiance pour le salut de ces hommes et de ces femmes qui franchissaient les portes de leur bâtiment? Ce même Dieu qui avait déjà depuis longtemps prévu un endroit pour eux avant même que les bateaux de croisière n’arrivent à Seward? Vendredi Saint 1964 Les gens se préparaient pour le week-end de Pâques et la journée s’annonçait belle et tranquille... Mais soudain à 17 h 30 le plus violent tremblement de terre atteignant 9,2 sur l’échelle de Richter a commencé à secouer toute la partie centrale du sud de l’Alaska. «Notre maison se déplaçait comme un bateau dans la tempête, les arbres se pliaient d’avant en arrière jusqu’au sol… c’était terrifiant. Tout avait été projeté par terre... J’ai couru vers le bébé et l’ai tenu serré dans mes bras tout en essayant de rester debout...», a raconté une femme de la Péninsule de Kenai. Si la grande ville d’Anchorage, la plus grande de tout l’Etat, a subi de sérieux dommages, les petites villes telles que Portage, Whittier et Valdez, situées dans la Baie du Prince William, ont été, elles, littéralement emportées par les tsunamis qui ont suivi le tremblement de terre. D’autres petits villages longeant le bras de mer ont aussi été balayés. Tandis que la principale rue commerçante d’Anchorage s’est enfoncée de près de huit mètres dans le sol, Valdez a complètement disparu et la région environnante s’est surélevée d’un peu plus de quatre mètres. A Seward, le front de mer s’est effondré dans l’eau sur une distance d’un kilomètre et demi. En l’espace d’une minute quelques maisons ont été emportées. Rien n’a pu être retrouvé 1

Daniel 9.20-23.


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de ces maisons car les vagues ont tout emporté dans l’océan. L’autoroute longeant la baie a également disparu et les grandes citernes de carburant ont pris feu. Il n’existait plus aucun petit port, tous avaient été emportés. Des photos de ce désastre sont maintenant exposées au musée de Seward. Sur l’une de ces photos, on remarque un petit bâtiment blanc situé au coin de la 3e Avenue. L’histoire raconte qu’il a été épargné grâce au grand immeuble de la compagnie Bay City Motors qui se trouvait juste en face et qui a fait écran au tsunami qui dévastait tout sur son passage. C’est ainsi que le numéro 1001 de la 3e Avenue a été préservé. Peutêtre était-ce Dieu lui-même qui, trente ans auparavant, avait déjà préparé un projet pour cette maison? L’eau a atteint les habitations au point de monter jusqu’à quarante-cinq centimètres au-dessous du bord des toits. La plupart des maisons en bois ont été balayées mais le bâtiment en ciment blanc a résisté. Le niveau de la boue laissée après l’inondation est encore visible sur les murs extérieurs du bâtiment en béton. Dans le courant du printemps 1993, cette même maison blanche était en vente. Un membre du comité de la Mission a appris qu’elle appartenait aux parents d’un de ses collègues. Etait-ce une coïncidence? Le membre du comité a alors expliqué que la Mission s’intéressait à cette maison mais que, ne possédant pas les fonds pour l’acheter, elle pourrait éventuellement la louer. Les propriétaires ont ainsi été sollicités pour une demande de location car ce logement était le seul disponible à ce moment-là à Seward. Une entente a ainsi été signée pour un bail d’une année! Les préparations et le nettoyage de la maison ont immédiatement commencé, avant que les premiers bateaux de croisière n’arrivent. Des bénévoles de Whittier et de plusieurs églises d’Anchorage ont offert leur aide pour le réagencement, les travaux de peinture et l’ameublement. Le garage a même été transformé en salle de musique!


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Le 17 mai 1993, environ quarante-cinq personnes étaient dans le recueillement pour présenter et dédier à Dieu la Mission pour les marins de Seward. Six pasteurs locaux ainsi que des habitants de Seward, de Soldotna et d’Anchorage ont participé à cet événement. Le Maire de la ville et son adjoint ont donné une allocution de bienvenue en précisant que leur ville avait vraiment besoin de cette mission. L’Association ministérielle locale a offert plus de mille dollars, somme que la population locale avait récoltée dans le passé afin de commencer un centre laïque en faveur des marins. Une maquette d’un bateau de croisière en bois de balsa fabriqué dans les îles San Blas a été suspendu à la fenêtre de devant, rendant ainsi visible la présence de cette mission aux passants. Après un temps de prière pour la dédicace de la Mission, plusieurs cantiques ont été chantés dont celui qui dit «Quel ami fidèle et tendre nous avons en Jésus Christ...» Cet été-là, à Seward, David Hawkins et sa petite famille vivaient dans une autre maison de la ville, mais ils avaient décidé qu’à partir de l’hiver, ils viendraient s’installer dans le bâtiment de la Mission et utiliseraient les salles pour la vidéo et le téléphone comme chambres à coucher. Dieu avait fourni ce bâtiment pour la Mission juste au bon moment! A présent les marins avaient un endroit où ils pouvaient téléphoner à leurs familles, déguster un café et des biscuits faits maison ainsi que discuter dans une ambiance de détente. Maintenant ils avaient un «chez soi» tout en étant loin de leurs maisons. A la fin de l’année, le propriétaire a réitéré sa proposition de vendre la maison, mais la Mission n’avait toujours pas les fonds pour l’acquérir. Nombreuses ont alors été les prières au sujet de cette situation. Durant cet été à Seward, le ministère auprès des marins avait été richement béni, mais qu’en seraitil du futur? La famille Hawkins, qui venait d’Angleterre, avait toujours gardé des contacts dans leur pays d’origine. C’est ainsi que le Trust des marins anglais (English Seafarers’ Trust ITF) s’est un jour enquis auprès de David pour avoir des renseignements


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concernant la Mission qu’il dirigeait. Ses responsables en Angleterre lui ont demandé quelles étaient les priorités et les besoins financiers de la Mission. Celle-ci vivant par la foi, elle ne fait pas de collectes de fonds; toutefois elle ne cache pas ses besoins lorsque quelqu’un désire lui apporter une aide financière. A l’exemple de Néhémie2, les équipiers de la Mission se tournent toujours vers le Seigneur pour savoir que répondre dans telle ou telle situation, car Dieu leur a mis à cœur ce récit de la Bible comme ligne directrice. Sans que personne n’en soit informé, un matin à 6 h 30, en plein milieu d’une violente tempête, une enveloppe contenant un chèque de 89.000 $ a été livrée par courrier express et déposée sur le paillasson de l’entrée à moitié recouvert d’un amas de neige… Les membres de la Mission n’ont découvert le courrier que quelques heures plus tard! Tous étaient sous le choc en découvrant le montant de ce don et saisis d’étonnement que le vent n’ait pas emporté le chèque! L’enveloppe avait été gardée bien en place dans la neige... et bel et bien trouvée! Le Seigneur n’était-il pas en contrôle de la situation? Au temps convenu par Dieu, ce chèque est arrivé et a permis l’achat du bâtiment de la Mission; de plus, au même moment, la maison voisine a été disponible pour loger la famille Hawkins. Loué soit Dieu pour ses réponses aux nombreuses prières! Les alentours de la maison de la Mission avaient encore besoin de beaucoup d’aménagements car ils étaient en terre battue et remplis de mauvaises herbes. Un groupe d’entrepreneurs chrétiens est arrivé de Pennsylvanie pour construire une terrasse ainsi qu’une passerelle en bois autour de la Mission. Non seulement ils ont construit tout cela, mais ils l’ont aussi financé! De surcroit, ils ont aussi rénové une partie de la maison des Hawkins située juste à côté. Les hommes ont travaillé dur sous une pluie battante, et sont parvenus à finir le tout en dix jours... Du gazon a été semé et un jardin avec des arbustes et des plantes a été conçu. On trouve encore aujourd’hui de magnifiques fleurs 2

Néhémie 2.4.


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à côté du bâtiment et cet espace vert est même admiré par les habitants de la ville. Une aide financière apportée par une compagnie de la ville de Seward a permis à la Mission de construire un terrain de basket. Ainsi, durant les jours ensoleillés, on peut voir des hommes jouer ou être attablés à la terrasse pour déguster du poisson cuit sur le barbecue. C’est ainsi que le petit bâtiment blanc au coin de la 3e Avenue à Seward en Alaska est devenu un «chez soi» pour de nombreux marins, alors qu’ils se trouvent loin de leurs maisons. A l’entrée du bâtiment, la balancelle est toujours là ainsi que la pancarte qui s’y trouvait dix ans auparavant; mais maintenant on peut y lire les mots suivants: Jésus dit: «Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et courbés sous un fardeau, et je vous donnerai du repos.» (Matthieu 11.28) Tous ceux qui entrent dans cette maison, de quelque nationalité ou milieu social qu’ils soient, devraient connaître ce cadeau que Jésus offre encore aujourd’hui à chacun, le même cadeau qu’à l’époque des temps bibliques. Au cours des nombreuses années, des visiteurs ont trouvé ici le repos et la paix en recevant Jésus-Christ dans leurs cœurs. L’impact qu’a laissé ce petit bâtiment blanc est seulement connu dans les cieux car des marins d’à peu près cent nationalités y viennent et repartent avec de la littérature chrétienne qu’ils partagent ensuite avec leurs familles habitant aux quatre coins de la terre! A Dieu soit la gloire, car il a fait de grandes choses!


Un marin sur la balancelle où est inscrit: Jésus dit: «Venez à moi vous tous qui êtes fatigués et courbés sous un fardeau, et je vous donnerai du repos.» (Matthieu 11.28)

Un bateau de croisière dans la baie.



Chapitre 7 Une guitariste sur une échelle de corde

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ans la salle de musique de la Mission pour les marins à Seward, on trouve souvent Betsy pinçant les cordes de sa guitare. Tôt dans la tranquillité du matin, afin de se préparer pour le service de culte journalier, elle joue sur sa guitare fabriquée par un membre de sa famille et chante de sa voix claire et agréable. Souvent, un marin se joint à elle et joue sur une des nombreuses guitares disponibles à la Mission. Ensemble, ils essaient de trouver un chant en espagnol, en indonésien ou en tagalog, une langue parlée aux Philippines. Parfois ils écrivent les paroles d’un nouveau chant que Betsy apprend de l’un ou de l’autre. C’est incroyable de l’entendre prononcer ces mots, de l’écouter chanter dans une langue qu’elle ne connaît même pas! Mais Betsy de répondre: «Je ne suis en fait qu’un bon perroquet!» Les marins sont si contents de pouvoir chanter dans leur langue maternelle, non seulement pendant le temps de culte mais également dans les moments de chants spontanés qui ont souvent lieu durant la journée lorsque les bateaux de croisière sont à Seward. Près de la moitié des membres d’équipage sont originaires des Philippines et d’Indonésie, un quart venant de pays où l’on parle espagnol et l’autre quart d’autres nations. De plus en plus de marins viennent d’Inde et d’Europe de l’Est. Cependant, chaque été, plus de cent nationalités différentes peuvent


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passer la porte de la Mission. Lors d’un culte à la Mission, il est même arrivé que sur les dix-huit membres d’équipage qui y assistaient, neuf pays différents y étaient représentés! Betsy est devenue peu à peu si proche des Philippins et habituée à leurs chants qu’elle a commencé à assister avec son mari aux services de l’église philippine à Anchorage. Durant l’été, elle dirige l’équipe de musique à la Mission pour les marins et l’hiver, elle s’engage dans le ministère musical de leur église à Anchorage. Elle a même visité les Philippines à une occasion pour mieux connaître le style de vie et les gens de là-bas! Quoique la musique soit un de ses dons, Betsy était à l’origine une artiste graphique, venant d’une famille d’artistes également. Il n’est pas toujours facile pour elle d’être éloignée de sa maison et engagée dans le service auprès des marins, alors qu’elle pourrait passer du temps à peindre et à dessiner pour son plaisir. Dans la plupart des magasins de souvenirs aux Etats-Unis, on trouve un de ses livres à colorier présentant des animaux vivant en Alaska. De plus en plus de très grands bateaux de croisière s’arrêtent à Seward. De nombreux musiciens professionnels travaillent à bord de ces immenses vaisseaux; ils y jouent du piano, de la guitare, de la trompette et de bien d’autres instruments encore, chacun déployant son talent. Certains de ces musiciens visitent parfois la Mission, et c’est un ravissement que d’entendre alors de talentueux pianistes professionnels jouer des chants chrétiens ou de la musique classique sur le vieux piano de la salle de musique. Un des pianistes a même confessé que le vieux piano de la Mission avait une meilleure sonorité que les pianos modernes sur lesquels il avait l’habitude de jouer à bord du bateau! Betsy est toujours très contente lorsque des professionnels contribuent par leurs talents à enrichir les moments de culte à la Mission. Parfois, certains plus petits bateaux de croisière visitent également Seward. L’un d’eux est un bateau d’expédition appelé le Clipper Odyssey et compte seulement deux cent passagers plus les membres d’équipage. Un autre est un bateau-université


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qui navigue autour du monde et qui transporte des étudiants en sciences. Ce bateau-explorateur est revenu à Seward pendant de nombreuses années. Contrairement aux équipages des plus grands paquebots, le personnel naviguant de ce bateau change rarement. Comme son équipage est restreint, tous les membres ne peuvent pas débarquer car Seward est leur port de départ et non un port d’escale. Un jour, il a été demandé à David de présider un culte à bord de ce bateau, en faveur des membres d’équipage. Le service a duré plus de trois heures à cause des multiples questions d’ordre théologique posées à la fin. Dès lors, tous les quinze jours, lorsque ce bateau accoste à Seward, un service de culte est planifié. La plupart du temps, des passerelles entre les bateaux et le quai sont installées. Mais parfois, dans certaines circonstances, un bateau peut être amarré un peu plus loin dans la baie. Lorsque cela arrive, les personnes qui désirent monter à bord des bateaux doivent emprunter une échelle de corde. Grimper par ce moyen n’est pas une tâche facile mais y monter avec une guitare l’est encore moins et vraiment plus risqué! Cependant, Betsy la musicienne n’a pas été effrayée de le faire! C’était vraiment formidable que non seulement le pasteur soit présent pour le moment de recueillement mais que la guitariste avec sa belle voix l’ait rejoint. Betsy n’était vraiment pas effrayée à l’idée de grimper à cette échelle de corde, par contre elle se faisait plus de souci pour la fatigue chronique qu’elle ressentait. En effet, différents groupes de marins débarquent à la Mission à n’importe quelle heure et, certains jours, Betsy joue de la guitare et dirige les chants durant trois heures d’affilée. La fatigue croissante qu’elle éprouvait faisait qu’elle se sentait parfois trop abattue pour louer Dieu et guider les autres à le glorifier. De ce fait, sa santé est devenue un sujet de prière pour que le Seigneur lui redonne de la force et de la joie à chanter et chanter encore... Elle a été dans l’obligation de prendre un temps pour se reposer et être en compagnie de son mari à Anchorage. Durant


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ce temps de pause nécessaire, ses talents musicaux ont alors grandement manqué. Il n’est pas toujours facile pour les membres bénévoles de l’équipe de la Mission de trouver un juste équilibre dans leurs activités. Ils désirent être disponibles pour les marins durant les quatorze heures d’ouverture de la Mission lorsque les bateaux de croisières sont à quai. Ils commencent le matin avec un moment de recueillement, d’enseignement, de discussions et de prière et terminent la journée en nettoyant les lieux seulement au moment où les équipages sont à nouveau prêts à embarquer et naviguer vers un autre port. Quelle bénédiction pour les bénévoles de rencontrer chaque jour tous ces hommes et ces femmes venant du monde entier, de les voir se sentir comme à la maison… de parler et de chanter avec eux pour l’honneur et la gloire du Seigneur. C’est un vrai privilège! Un des chants préférés de Betsy, composé aux Philippines, est le suivant: Et il dit: Rejette tes fardeaux sur moi, Ceux qui sont trop lourds à porter Venez à moi vous tous Qui êtes fatigués de porter de lourds fardeaux Car le joug que je veux vous donner est facile à porter Et mon fardeau est léger Venez à moi et Je vous donnerai du repos. Ce chant fait référence au verset écrit sur la balancelle se trouvant à l’entrée du bâtiment de la Mission. Il rappelle à chaque personne – marins, personnes sans-abri, bénévoles, passants – que Jésus offre le repos à tous ceux qui en ont besoin. Un jour, alors que Betsy n’était pas à la Mission, deux hommes sont entrés tranquillement dans la pièce à musique avec l’air de savoir ce qu’ils y trouveraient. Alors que l’un des deux s’est emparé de la guitare, l’autre aussitôt s’est assis au piano et a commencé à chanter. Les harmonies étaient incroyables, les


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mélodies inoubliables et la présence du Christ indubitable. Ils ont chanté, remplis de joie, des chants les uns après les autres en espagnol. Ils n’ont parlé à personne et aucun bénévole au sein de l’équipe de la Mission n’a eu le temps de s’enquérir de leur identité. Et les deux hommes sont repartis comme ils étaient venus, sans bruit... Deux semaines plus tard, ils sont réapparus et se sont installés à nouveau pour chanter, toujours sans que personne ne les connaissent. On a demandé à un marin espagnol qui étaient les deux musiciens. Il a répondu qu’ils étaient des marins originaires du Guatemala et que durant l’hiver, alors qu’ils naviguaient dans les Caraïbes, ils se réjouissaient déjà d’arriver à la Mission pour les marins. Leur musique était vraiment magnifique; personne ne les a interrompus afin que cette atmosphère spirituelle ne soit pas perturbée. Quelques bénévoles se sont assis simplement là, ont écouté et se sont abreuvés de leurs louanges. En regardant le guitariste chanter, chacun pouvait voir comment son visage marqué par un certain stress et le surmenage était transformé en un visage contemplant la merveilleuse personne de Jésus... Dieu habite les louanges de Son peuple, et Dieu était présent. Des non-chrétiens auraient-ils ressenti également cette présence au même moment? Dans un verset de la Bible, il est mentionné: «Lorsqu’ils virent l’assurance de Pierre et de Jean, ils furent étonnés, car ils savaient que c’étaient des hommes du peuple sans instruction et ils les reconnaissaient pour avoir été avec Jésus.»1 Les chanteurs et les auditeurs n’avaient pas le même langage mais ils possédaient le même Seigneur! Je recherche Dieu afin d’être mieux utilisée par lui pour aider les gens dans la louange. Mes prières sont pour l’accroissement de la louange à la Mission et sur les bateaux en pensant au Psaume 57 verset 10: «Je te louerai parmi les peuples, Seigneur, je te chanterai parmi les nations». Betsy

1

Actes 4.13.



Chapitre 8 Voulez-vous être ma maman?

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urant l’été, il est très agréable de camper le long de la baie de Seward lorsque les camping-cars s’alignent sur la côte et que les tentes remplissent chaque espace libre dans les campings. La ville a fait un grand effort pour s’adapter aux touristes. Durant les soirées d’été, beaucoup de gens aiment allumer des feux de camp le long du front de mer, grillant hotdogs et guimauve ou appréciant simplement de se réchauffer dans l’air frais du soir. Rires et conversations s’élèvent autour de chaque feu de camp alors que les touristes admirent les majestueux paysages des montagnes et des glaciers encadrant la baie de la Résurrection. Durant l’été 1997, George et Cheryl ont décidé de passer leurs vacances à Seward et d’y rencontrer les Hawkins. Les deux couples avaient fait connaissance lors de leur séjour commun à Glennallen où ils étaient en service à la Mission internationale de l’Alaska1. George travaillait à la station de radio chrétienne. Lui et sa femme étaient également missionnaires et avaient leur pied à terre à Lower 48. Pendant que George préparait les programmes de radio durant les froids hivers au centre de l’Alaska, David étudiait au collège biblique alaskien et Ina travaillait en tant qu’infirmière à l’Hôpital de la Foi. Mais après que David et Ina aient déménagé à Seward afin de travailler 1

Base de Send International en Alaska.


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avec les marins, ces deux couples amis ne se sont plus vus pendant un certain temps. Un jour, George et Cheryl ont garé leur véhicule le long du front de mer et, voyant qu’un paquebot était à quai, ils ont décidé de passer à la Mission pour les marins pour rencontrer leurs amis. Leur visite a eu pour heureux résultat qu’ils ont décidé d’offrir leur aide pendant dix jours comme bénévoles à la Mission, là où les besoins se feraient sentir. George a mentionné plus tard: «Lorsque nous avons vu ce que nos amis faisaient, nous avons été tout à fait enthousiasmés et nous avons fini par les aider durant presque tout notre séjour à Seward.» Les vacances de George et Cheryl ont pris encore une autre dimension lorsque le capitaine taïwanais d’un bateau transportant du charbon leur a offert une invitation pour un repas. Dans un premier temps, l’officier et l’ingénieur en chef de ce navire avaient invité seulement le couple Hawkins, mais lorsque David a demandé si ses amis visiteurs du centre de l’Alaska pouvaient se joindre à eux ils ont accepté volontiers. Bien que David soit normalement assez réfractaire aux dîners luxueux, c’était une occasion spéciale et les deux couples ont accepté avec joie l’offre du capitaine. Se trouver à bord d’un bateau pour la première fois, monter par la passerelle, marcher le long du pont extérieur, a été pour George et Cheryl toute une expérience. Dans le mess des officiers, une table ronde spacieuse était dressée de manière très officielle. Les deux couples ont alors passé des moments formidables avec le capitaine et ses deux officiers qui tous trois parlaient très bien anglais; la nourriture était des plus excellentes. «C’est le plus succulent repas que j’aie jamais eu sur un bateau», a dit David plus tard. «C’était un dîner vraiment très très spécial!» A ce moment-là, personne ne devinait le plan divin que Dieu était en train de leur préparer. Cependant, David était convaincu que Dieu avait sûrement préparé cette occasion spéciale à la table du capitaine, comme une sorte d’entrée en matière de


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George et Cheryl dans le ministère auprès des marins. Au cours de la même semaine, un jeune marin indonésien est entré dans le bâtiment de la Mission. Il était encore un adolescent et parlait très peu anglais. Il travaillait sur un paquebot depuis seulement trois mois. Rien d’étonnant qu’à ce moment-là il commençait à s’ennuyer des siens. Cheryl était assise à table dans la pièce principale lorsque ce jeune Eddy est entré. Ils ont alors commencé à discuter. En l’écoutant raconter ses histoires, elle s’est rendue compte de sa solitude. Elle a été tout étonnée lorsqu’au moment de partir, elle l’a entendu lui poser cette question: «Voulez-vous être ma maman?» Cheryl a ressenti un réel fardeau sur son cœur et elle a commencé à prier chaque jour pour Eddy. Lorsqu’elle et son mari sont retournés chez eux à Glennallen, elle a continué fidèlement son intercession. Deux semaines plus tard, lorsque le bateau sur lequel travaillait Eddy est revenu à Seward, il est retourné à la Mission et a demandé: «Savez-vous où est ma maman?» Ce jeune homme avait vraiment besoin d’une mère! La Mission a téléphoné à Cheryl à Glennallen et elle a alors commencé à parler avec lui au téléphone. Deux autres semaines se sont écoulées et une fois de plus Eddy, de retour, a posé la même question: «Où est ma maman?» A nouveau, la Mission les a mis en relation par téléphone. Cheryl ne pouvait supporter plus longtemps de voir ce jeune homme souffrir ainsi. Son mari George devant travailler à la station de radio, ils ont décidé d’un commun accord que Cheryl retournerait à Seward pour travailler à la Mission durant les six dernières semaines de la saison. En fait, elle n’est revenue à la Mission qu’à cause d’Eddy. Ce jeune marin a vraiment été heureux lorsqu’il a pu revoir Cheryl lors de son escale suivante à Seward et toutes les semaines qui ont suivi. Il attendait toujours avec impatience ces petits moments où il voyait sa «maman». Malheureusement, au mois de septembre, le bateau de croisière a dû quitter l’Alaska pour naviguer vers des eaux plus chaudes. Cela a été terriblement difficile pour Eddy de dire au revoir à Cheryl.


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«Maman, pourras-tu m’écrire?» lui a-t-il alors demandé. Cheryl avait tellement d’affection pour Eddy qu’elle lui a écrit une lettre par semaine durant sept mois. Elle lui demandait s’il avait assez à manger car à chaque fois qu’il venait à la Mission il était affamé! Sur le bateau il n’y avait pas de nourriture indonésienne et il n’aimait aucune autre nourriture. Après un certain temps, un nouveau cuisinier est arrivé sur le bateau et les repas sont devenus bien meilleurs. Cet homme donnait même à Eddy du steak et du poulet! C’était bien autre chose que tous ces mois passés! Mais à un certain moment, Eddy s’est senti mal à l’aise... quelque chose n’allait pas; il a téléphoné à Cheryl et lui a raconté: «Maman, merci pour tous les conseils que tu me donnes pour ma vie chrétienne, mais tu sais j’ai un problème; ce cuisinier m’aime en tant qu’homme. Que dois-je faire?» Eddy avait grandi dans une famille musulmane conservatrice et il était sérieux dans sa foi. Il avait besoin d’aide pour savoir comment réagir face à cette situation qui était nouvelle pour lui mais qui était courante sur les bateaux. Cheryl et Eddy ont continué à s’écrire. Une fois, Eddy lui a dit: «Je veux que tu sois ma mère pour toujours!» Lorsqu’à la saison suivante, les bateaux de croisière sont revenus, Cheryl est retournée à Seward pour tout l’été. Toutes les deux semaines, lorsque George n’était pas de service à la station de radio, il faisait au moins sept heures de route (aller simple) pour retrouver sa chère épouse. Durant ces week-ends de visite, les deux travaillaient bénévolement à la Mission. George servait souvent de chauffeur pendant que Cheryl parlait avec les hommes dans les locaux de la Mission. Eddy est aussi retourné à Seward et a été tellement content de revoir sa maman! Toutes les deux semaines, lorsque son bateau revenait, il passait toujours beaucoup de temps à parler avec Cheryl. Cependant, à la fin de l’été, Eddy a voulu faire part de quelque chose à Cheryl. Y avait-il un problème? Ne voulait-il plus qu’elle soit sa maman? Il lui dit: «Maman, j’aimerais que tu continues de m’écrire mais s’il te plaît ne me


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donne plus autant de conseils dans chacune de tes lettres... » Les mères et les adolescents ne sont-ils pas les mêmes dans le monde entier? Cheryl et Eddy ont continué à correspondre tout au long de l’année mais les recommandations et les conseils de Cheryl avaient diminué. Cheryl a découvert par la suite que la plupart des membres d’équipage indonésiens avaient lu ses lettres. Ainsi, durant cinq ans, elle a partagé petit à petit l’Evangile avec Eddy et il a continué de lui demander d’être sa maman. Un été, alors qu’Eddy ne pouvait pas descendre du bateau, ses amis se sont rendus à la Mission et, en pointant Cheryl, ont dit: «C’est sa mère!» Ils lui ont demandé de venir à bord du bateau pour voir Eddy et c’est ce qu’elle a fait. Un des amis d’Eddy s’est alors présenté et a dit à Cheryl qu’il avait lu toutes les lettres qu’elle avait écrites à Eddy, son «enfant spirituel». Cet homme désirait avoir une Bible et il a demandé à Cheryl qu’elle lui parle du christianisme. C’était grâce à toutes les lettres qu’elle avait envoyées durant cinq ans qu’une telle question lui était, en cet instant, posée! Ainsi, un nouveau contact était établi. Cheryl devenait à nouveau une «mère spirituelle». De la même façon qu’un accouchement peut prendre parfois des heures, la même chose se passait entre Cheryl et un marin. Souvent on la retrouve en train de discuter avec quelqu’un, lui expliquant tout ce qui concerne la Bible et la feuilletant durant des heures... Petit à petit un bébé naît, renaît en Christ pendant que les autres membres de l’équipe sont en train de prier. Parfois, lorsque Cheryl écrit à des marins nouvellement convertis, elle prend conscience que cela peut être difficile pour eux de tenir ferme. Alors elle les encourage à continuer dans leur vie chrétienne pendant qu’elle s’engage à prier chaque jour pour eux. Est-ce que ce ne sont pas également les douleurs qui surviennent après un accouchement? Paul décrit cela dans la Bible: «Mes enfants, j’éprouve de nouveau les douleurs de l’accouchement pour vous, jusqu’à ce que Christ soit formé en vous.»2 2

Galates 4.19.


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J’ai été changée pour toujours! – Car Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné... – a pris une nouvelle dimension depuis le jour où pour la première fois je suis arrivée à la Mission pour les marins à Seward. Cheryl

La Mission par beau temps.


Chapitre 9 Un prix élevé à payer

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orge baillait et baillait lorsqu’il est rentré dans la fourgonnette de la Mission. Il était originaire du Honduras et membre d’équipage d’un des bateaux de croisière ayant jeté l’ancre à Seward. «Vous devez être vraiment fatigué», lui dit le chauffeur de la fourgonnette. Le marin a acquiescé: «Oui, j’ai travaillé quatorze heures de suite mais plutôt que d’aller me coucher, je préfère me rendre à la Mission pour téléphoner à ma famille. De plus, j’ai besoin de sortir de ce bateau pour un moment.» Il devait travailler selon l’horaire prévu, soit sept jours sur sept, et son contrat annuel venait d’être prolongé à quinze mois. «Plus que deux mois encore et je pourrai revoir ma famille», dit-il alors qu’ils arrivaient devant le bâtiment de la Mission. Les marins travaillent généralement de longues heures sept jours par semaine. C’est la vie en mer! Les hommes affectés au service de la cuisine, des chambres, du nettoyage, et tous les autres membres d’équipage travaillent chaque jour sans fin à bord de ces imposants paquebots. Tout le clinquant qui entoure le service des passagers ne se retrouve que sur les ponts supérieurs! A partir de l’endroit où s’arrêtent les tapis recouvrant les escaliers, les conditions de vie sont bien différentes.


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«Pourquoi restes-tu là à discuter? Ne sois pas en retard pour ton travail», hurlait un homme blanc à un jeune Philippin dans la cantine de l’équipage! Le comportement de ce supérieur était inutilement dur envers ce jeune homme nommé Sonny qui n’avait rien fait de mal. Il était juste en train de parler à des compatriotes durant le reste de son temps de pause, après son repas. Le ton et la réaction de son chef étaient-ils motivés par un trop grand stress? Ou bien sa façon de réagir est-elle une résurgence indirecte d’une forme de (néo)colonialisme des blancs envers les personnes de couleur? Pourquoi donc ces marins acceptent-ils de travailler si durement, dans de telles conditions et éloignés de leurs familles pour de si longues périodes? Pourquoi acceptent-ils ce qu’on pourrait appeler un esclavage moderne? Beaucoup de marins viennent d’endroits où la seule opportunité pour améliorer le niveau de vie de leur famille est de travailler en mer. «J’ai grandi dans une famille très pauvre», a déclaré Sonny. «Je veux dire, nous étions vraiment pauvres. Je ne désire pas que cela se reproduise pour mes propres enfants alors je suis parti travailler en mer pour leur venir en aide. Je n’ai pas trouvé de travail dans mon pays. Mais ne pas voir grandir mes enfants n’est pas facile non plus.» La femme de Sonny était à nouveau enceinte et le père ne verrait son bébé qu’après les premiers mois suivant sa naissance... Dans de telles conditions, ces marins sont avides de partager leurs souffrances avec les membres de l’équipe de la Mission. Ainsi, une importante part du ministère consiste à prendre du temps pour les écouter, parler avec eux de leur vie privée et prier ensemble. Cela fait alors tellement de bien de voir ces hommes reprendre courage durant les moments de chant dans la salle de musique! C’est comme si leur solitude et leur fatigue s’en allaient après une heure de «rafraîchissement spirituel». «Il donne de la force à celui qui est fatigué et il multiplie les ressources de celui qui est à bout.»1 Ce passage de la Bible semble particulièrement bien s’appliquer à ces travailleurs 1

Esaïe 40.29.


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qui s’attendent à Dieu pour renouveler leur force. Ils préfèrent participer aux rencontres d’église plutôt que d’aller se coucher durant les quelques heures libres qu’ils ont à Seward. A la Mission, tous sont considérés de la même façon. Ici, chacun fait effectivement partie d’une même famille. Par exemple, l’un peut dire au sujet d’un autre: «C’est mon chef», mais chacun doit attendre son tour de la même façon, à partir de la même liste d’attente, avant de pouvoir utiliser le téléphone. Ils se retrouvent tous dans la même situation: ils sont loin de chez eux et ils peuvent recevoir à la Mission pour les marins un peu de soulagement. De retour à la maison, le marin est confronté à un autre problème: le dilemme de savoir à quel endroit il appartient... à son bateau ou à sa famille dans laquelle, souvent, il se sent seulement comme un invité dans sa propre maison. En effet, vivant dix mois par année sur son bateau, le marin ne vit avec sa famille que durant deux petits mois. Quand il arrive après son long périple en mer, que retrouve-t-il derrière la porte de son foyer? Où en est sa famille pour laquelle il a travaillé dur et pour laquelle il se sacrifie? Durant les premiers jours, chacun sera très heureux d’avoir à nouveau à la maison le papa, le mari, le fils ou le frère, et ce marin ne sera pas mécontent d’être traité comme un invité, spécialement après ces nombreux mois de dur travail. Il s’affairera alors avec sa famille et ses amis, en essayant aussi de rattraper son manque de sommeil et de se réadapter au décalage horaire. Cependant, cela ne durera pas longtemps avant qu’il ne réalise qu’il est effectivement un invité dans sa propre maison. A mesure que le temps passera, sa famille et ses amis ne s’intéresseront plus beaucoup à sa vie en mer et penseront qu’il exagère un peu lorsqu’il parle de tous les endroits qu’il a vus. Dans sa propre maison, le marin ne pourra même pas parler de tout le stress qu’il a enduré dans son travail car personne ne peut vraiment comprendre ses expériences. Et puis, le temps arrive où de longues heures d’inactivité remplissent


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ses journées car sa famille est impliquée dans les tâches de la vie de tous les jours ainsi que dans les activités scolaires dans lesquelles il ne joue qu’un rôle symbolique. Ce marin va découvrir que sa femme ou sa fiancée a sa propre vie sociale dont il ne fait pas partie et qu’elle désire continuer cette façon de vivre même lorsqu’il est de retour à la maison. Comment pourrait-elle essayer de changer son mode de vie personnel pour le concilier avec cet aspect du couple que son mari désire pour être satisfait, lui qui ne sera là que quelques semaines ou quelques mois? A cette consternation s’ajoute le fait qu’il se sente un peu comme un étranger vis-à-vis de ses propres enfants. Les plus jeunes ne s’approchent pas facilement de lui. Ils se cachent même parfois derrière leur mère en pleurant. Et pour encore compliquer les choses, les autres enfants qui, ne connaissant leur père que par la voix qu’ils entendent au téléphone, continuent à considérer leur mère comme étant le chef de la maison. Quand ce «visiteur» désire passer un peu de temps avec sa femme ou lorsqu’il essaie de discipliner ses enfants, il se sent contrarié. Par nécessité, la maman a assumé le rôle de chef de famille, prenant seule les décisions, les grandes comme les petites. Elle trouve alors très difficile de déléguer soudain les responsabilités à son mari qui peut rentrer en conflit à propos de décisions dans lesquelles il aurait aimé être consulté. L’intense désir qu’il avait, lorsqu’il était sur mer, de retrouver un travail dans son pays pour rester avec sa famille, s’évanouit rapidement. Sa vie en mer lui apparaît soudain meilleure et il se réjouit maintenant de repartir! Lorsqu’il prend conscience de ce qui est en train de se passer, ses sentiments provoquent en lui une tension. Il se rend à l’évidence qu’il se sent davantage à la maison lors de sa vie à bord du bateau que dans sa propre maison qui n’est qu’un lieu de vacances. Il retourne alors sur mer avec le cœur lourd, ce qu’il n’avait pas prévu... et cette expérience ne cessera de se répéter au fil des ans!


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La femme d’un marin d’Asie se débat avec ce même sentiment et écrit: «Son retour est comme à nouveau une lune de miel, plein d’exaltation et de joie. Tu es prête à pardonner et oublier les blessures du passé... mais lorsque la lune de miel est passée et que chacun s’affaire à nouveau à ses occupations journalières, là commencent les peines et les conflits. La désillusion s’empare alors de lui et il devient exigeant. Les enfants ne comprennent plus les sautes d’humeur de leur papa qui change sans arrêt, de doux une minute à querelleur la minute suivante.» Après avoir été marié plus de vingt-cinq ans et ayant eu des enfants qui ont grandi pendant que leur papa travaillait en mer, elle a connu le dilemme propre à une femme de marin. Son mari se débattait aussi avec ce problème. Après être devenus chrétiens, ils ont appris que chaque peine qu’ils rencontraient sur leur chemin était suivie d’un renouveau. Ils ont réalisé le secret merveilleux de l’amour vrai et de la joie qui s’ensuit. Chaque retour est devenu plus facile grâce à la mise en pratique de ce qu’ils avaient appris. C’est elle premièrement qui, dans cette épreuve douloureuse sur le plan affectif, a trouvé la guérison. Après avoir suivi un séminaire chrétien, elle a déclaré: «J’ai expérimenté une nouvelle prise de conscience et un réveil par rapport à moimême et à ma foi, un renouvellement dans ma vie relationnelle avec le Seigneur qui me fait vivre d’une façon différente.» Petit à petit, une transformation a pris place dans sa vie personnelle et son point de vue sur sa vie de couple a également changé. Quelque temps plus tard son mari est revenu à la maison et il a également désiré prendre part à ce séminaire. C’était Dieu lui-même qui l’invitait et il a répondu à son appel. Dès lors, ils ont participé à une rencontre de prière chaque dimanche aprèsmidi dans la ville où ils habitaient. La plupart des participants à ce groupe étaient des femmes de marins, des mères et des marins eux-mêmes. C’est au sein de cet environnement qu’ils peuvent partager leurs joies et leurs déboires, leurs expériences, qu’elles soient bonnes ou mauvaises et la façon


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dont Dieu manifeste sa présence d’amour et sa providence dans leurs vies. Les retours de son mari pour ses vacances ont alors totalement changé. Le couple a commencé à prendre du temps ensemble pour renouveler leur foi et se «recharger» de l’amour de Dieu. A tour de rôle, ils ont pu partager cet amour entre eux et avec leurs enfants. Devenant ainsi des canaux de cet amour, ils essaient maintenant d’atteindre d’autres personnes, afin qu’elles puissent elles aussi expérimenter le pouvoir de Dieu et sa compassion... «Personne d’autre que Dieu n’a le pouvoir de nous rafraîchir, personne d’autre ne peut pourvoir à tous nos besoins matériels ou spirituels, en dépit du temps et de la distance, spécialement lorsque la lune de miel est terminée.» Jésus fait toute la différence!

J’ai pris une décision difficile afin de ne pas retourner sur les bateaux pour un temps en dépit de nos problèmes financiers. Je pense que c’est un privilège de rester avec ma femme et de ne pas la quitter tout le temps. Je pense que j’ai fait le bon choix. Je prie sans cesse Dieu pour que tout aille bien. Philippines


Chapitre 10 Du bateau de croisière au bateau missionnaire

«

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uah! Tu es enfin en Alaska!» Avec beaucoup d’émotion, le marin Philippin et Debbie, la jeune Brésilienne, se sont salués en se serrant dans les bras. «Combien de temps cela fait-il depuis que nous avons navigué ensemble sur le M.V. Rotterdam? Il doit y avoir cinq ou six ans... Qu’est-ce que tu fais à Seward maintenant?» Pour ces deux voyageurs loin de chez eux, il était évident que de rencontrer des amis, des collègues et des chrétiens, membres de la famille de Dieu, était important. Debbie s’est dépêchée de répondre aux questions de son ami avant qu’il ne retourne sur son bateau. Elle lui a expliqué qu’elle travaillait comme bénévole à court terme à la Mission pour les marins de Seward, comme elle l’avait déjà fait une fois auparavant. C’était pour elle une façon gratifiante de passer l’été pendant que son mari travaillait à l’étranger à bord d’un des bateaux de croisière de la Ligne Hollande-Amérique1. Le lendemain, alors que Debbie avait congé, elle est allée avec quelques femmes au Canyon de la crique aux ours pour profiter de son temps libre. Pendant qu’elles marchaient, une des femmes a demandé à Debbie comment, elle qui était brésilienne, avait appris à connaître la Mission pour les 1 HAL: Holland America Line (compagnie de bateaux de croisière assurant les liaisons entre les Pays-Bas et les Amériques). www.meretmarine.com


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marins. Alors que Debbie commençait à répondre, elle a été subitement interrompue en voyant le groupe de marcheuses enjamber la carcasse d’un animal qui semblait avoir été tué tout récemment par un ours. La réaction de ces femmes lui a paru insensée! Elles ont pris des photos de l’animal mort puis elles se sont assises un peu plus loin vers la crique pour continuer tranquillement leurs conversations. Dans l’excitation du moment, chacune avait oublié que l’ours pouvait encore se trouver dans les environs... mais heureusement, il n’a pas réapparu et Debbie a continué son histoire en racontant à ses compagnes les événements qui l’avaient amenée depuis le Brésil jusqu’en Alaska... Tout a commencé lorsque Debbie et Bill se sont rencontrés alors que celui-ci passait ses vacances au Brésil. Il est tombé immédiatement amoureux de cette charmante femme, même si elle était chrétienne et lui plutôt sceptique quant au christianisme. Comme beaucoup de Hollandais, il ne pouvait pas accepter que Jésus soit le seul chemin pour être sauvé. Debbie a prié et prié pour que Bill accepte Christ dans sa vie, sachant qu’un miracle de Dieu lui-même était nécessaire pour convaincre cet homme. Il était rempli de doutes et d’objections. Malgré leurs différences, Debbie est tombée également amoureuse de Bill mais son amour pour Jésus était beaucoup plus fort et elle n’envisageait vraiment pas d’épouser un incroyant. Alors que Bill naviguait une fois dans le golfe d’Alaska, il est arrivé à Vancouver. Lors de cet arrêt, il a visité une Mission pour marins où quelqu’un lui a remis un petit dépliant sur la foi chrétienne. Il l’a lu mais il est resté sceptique; et pourtant, durant des années, il a repensé à ce qu’il avait lu. Enfin, lors d’un nouveau séjour au Brésil, il a accepté Christ comme son Sauveur et peu de temps après Debbie et Bill se sont mariés. Juste avant le jour du mariage, Bill a déclaré qu’il aimerait bien s’investir dans la mission, et même peut-être à plein temps. Avant ces propos, Debbie ignorait cet intérêt de Bill


Du bateau de croisière au bateau missionnaire

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pour la mission, toutefois elle savait qu’elle-même n’était pas du tout prête à franchir ce pas. Après leur mariage, le couple a continué de travailler sur les bateaux de croisière et un jour, leur bateau a accosté à Seward. C’était leur première visite à la Mission pour les marins et c’est là qu’ils ont appris à connaître pour la première fois également l’existence des bateaux d’Opération Mobilisation (OM)2 transportant de la littérature chrétienne dans le monde entier. Le premier bateau d’OM était baptisé Logos, qui signifie Verbe en grec. Lors d’une nuit de tempête dans le sud du Chili, ce bateau a fait naufrage sur des rochers. Par la grâce de Dieu, après une année de prières des chrétiens du monde entier, ils ont pu remplacer le bateau naufragé par un nouveau, baptisé cette fois Logos 2. Cette Mission qui a pour but de diffuser de la littérature chrétienne s’est équipée par la suite d’un second bateau, le Doulos, mot grec qui signifie Serviteur. Selon le Guiness Book (Livre des records), le Doulos est le plus vieux bateau de croisière du monde naviguant encore aujourd’hui. Il a été construit deux ans avant le très connu Titanic qui a coulé après avoir heurté un iceberg, il y a près de cent ans. Lorsque Bill a entendu parler du travail de cette Mission, il a été enthousiaste et a commencé à entrevoir une possibilité de servir sur un de ces bateaux. Sa chère femme, elle, n’avait pas le même enthousiasme! Chacun d’eux a commencé à prier au sujet de ce projet missionnaire. En 1998, durant le mois de mars, Opération Mobilisation leur a demandé si Bill, en tant que serviteur de Christ, ne voudrait pas travailler bénévolement comme ingénieur à bord du Doulos. Bill et Debbie se sont alors joints au travail de ce bateau au Moyen-Orient durant leurs trois mois de congé à la compagnie HAL. Bien qu’il y ait eu des «luttes», cette période a été richement bénie. Ils ont pu éprouver un sentiment irrésistible «d’être à la bonne place au bon moment», le sentiment qu’ils se trouvaient à l’endroit que Dieu désirait pour eux, en étant remplis de cette paix que Dieu seul peut donner. 2

OM: Opération Mobilisation (bateaux missionnaires). www.fr.om.org/fr


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Une année plus tard, le Logos 2 est arrivé au Brésil. A cette période, Debbie et Bill avaient rejoint ce bateau d’OM pour presque deux mois alors qu’il naviguait le long des côtes brésiliennes. Ils ont dit: «A deux reprises nous avons quitté la maison afin d’être en bénédiction pour d’autres mais en ayant le sentiment, au retour, d’avoir plus reçu que ce que nous avions donné!» Depuis ce moment, durant leurs vacances, au lieu de rester à la maison au Brésil, ils se sont joints au travail d’OM sur ces bateaux dans plusieurs pays. En l’an 2000, ils ont travaillé à nouveau bénévolement sur le Doulos durant leurs vacances. Cette année-là, alors qu’ils étaient en Extrême Orient, ils ont rencontré une jeune femme qui était la fille d’une autre bénévole travaillant à la Mission pour les marins à Seward. Les voies de Dieu ne sont-elles pas incroyables? La terre semble bien petite entre les mains de Dieu! Bill et Debbie travaillent toujours pour la HAL. Entre-temps, ils prient pour connaître la direction de Dieu et se préparent à servir à plein temps afin de mobiliser d’autres personnes à s’investir dans la mission. Dieu a agi de cette façon-là dans leur vie. Il les a amenés jusqu’en Alaska afin qu’ils s’engagent sur les bateaux missionnaires Doulos et Logos, leur fournissant ainsi une meilleure compréhension de ce qu’est la mission. Bill dit aux gens: «J’ai déjà vu beaucoup de missions autour du monde mais la Mission de Seward est pour moi un exemple de ce qu’une mission pour les marins devrait être!» Merci à Dieu de ce que l’engagement de personnes dans ce petit bâtiment de la Baie de la Résurrection a un tel impact sur autant de vies. Dieu l’utilise de façons si diverses, y compris celle d’appeler des chrétiens à devenir missionnaires! A Dieu seul soit la Gloire! J’ai visité beaucoup de missions dans le monde mais il n’y en a point d’autres comme celle de Seward. J’apprécie vraiment la camaraderie. C’est un super endroit où l’on peut déposer tous nos problèmes et se sentir libéré! Colombie


Chapitre 11 Concert à la Mission

L

es voilà qui arrivent avec leurs instruments de musique comme promis il y a deux semaines! Vic, un musicien hongrois d’un des bateaux de croisière avait dit: «La prochaine fois que nous viendrons, nous amènerons nos instruments avec nous et nous donnerons un concert pour vous tous!» Vic avait été très content de recevoir une brochure dans sa langue maternelle et avait été très touché par la constante cordialité des membres de l’équipe de la Mission. Il désirait leur exprimer sa reconnaissance et, à cette fin, mettre à profit ses talents de musicien. Il a donc invité ses collègues du bateau à rejoindre la Mission et ils étaient à présent arrivés! Les musiciens s’installaient pendant que Vic a annoncé à l’équipe de la Mission: «Asseyez-vous s’il vous plaît, nous allons jouer pour vous!» Dès que Vic a commencé à jouer du violon, chacun a été impressionné par son incroyable habileté. Il était visiblement un homme doué et un virtuose. Il jouait avec une telle dévotion que Yolanda, une bénévole hollandaise, en a été émue jusqu’aux larmes alors que le musicien caressait les cordes de son violon, le tenant tout près de son visage. Vic jouait également à merveille lorsqu’il était à bord du bateau. Il a raconté aussi ses expériences passées lorsqu’il jouait de la musique tzigane avec son groupe dans des


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restaurants. Il s’est même produit une fois dans un restaurant en Hollande. Alors que Vic et Yolanda parlaient des évènements du passé, ils ont réalisé qu’il avait joué dans la grande ville de Rotterdam dans le restaurant même où Yolanda et son fiancé s’étaient rendus quarante ans auparavant. Ils avaient choisi ce restaurant justement pour aller écouter cette musique hongroise. N’était-ce pas formidable? Il avait fallu qu’ils se rendent jusqu’en Alaska pour se rencontrer à nouveau! Vic et son groupe hongrois ont même joué spécialement pour Yolanda «Les tulipes d’Amsterdam». Les chants gospels qu’ils entonnaient étaient généralement du genre de ceux qui étaient chantés dans la salle de musique de la Mission. Ces musiciens jouaient de façon aisée toute sorte de musique. Mais une question se posait: «Saisissaientils vraiment la signification des paroles de ces chants?» La troupe des musiciens philippins qui étaient venus l’année précédente comprenaient bien, eux, les paroles et la portée de ces chants. Ils prenaient ces chants au sérieux et croyaient à leur véracité. Ces chrétiens philippins ne redoutaient pas de jouer pour les passagers de leur paquebot un hymne tel que «Dieu Tout-Puissant que tu es grand!» Ils jouaient aussi ce même hymne et beaucoup d’autres chants de tout leur cœur lors des moments de culte à la Mission. Un de ces marins a souhaité raconter une histoire qu’il avait vécue. Avant qu’il ne devienne chrétien, il avait la funeste intention de tuer sa famille. Cet homme, nommé Ricky, était un musicien merveilleux jouant dans un quatuor à bord d’un bateau. Il aimait vivre entouré de femmes et il dépensait tellement d’argent en menant ce style de vie qu’il ne pouvait pas mettre d’argent de côté pour subvenir aux besoins de sa famille. Il s’est alors mis à penser: «Tout serait tellement plus facile si je n’avais ni femme ni enfants!» Nuit après nuit, il réfléchissait sur la façon dont il pourrait mettre fin à leurs jours lorsqu’il serait de retour à la maison, afin de pouvoir enfin vivre sa propre vie.


Concert à la Mission

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Pendant tout ce temps, un co-équipier qui était philippin et responsable du groupe de chrétiens à bord a invité Ricky semaine après semaine pour qu’il se joigne à leurs études bibliques. Durant plusieurs mois, Ricky a refusé d’y aller. Mais un mois avant qu’il ne rentre à la maison et lassé par l’insistance de cet homme, il a décidé de se rendre à leur étude. Il s’est dit en lui-même: «Juste une fois et j’en aurai fini avec cela, je serai débarrassé!» Durant cette même nuit, le Seigneur Jésus a touché son cœur et Ricky a accepté Christ comme son Sauveur et son Seigneur! A la suite de cette décision, la vie de Ricky a commencé à changer radicalement. Plus de femmes... car il avait maintenant trouvé un autre sens à sa vie. Lorsqu’il est arrivé à la maison, il a raconté à son épouse toute son histoire. Voyant son changement de conduite durant les semaines qui ont suivi, sa femme a tellement été touchée qu’elle a accepté elle aussi Christ dans sa vie et ses enfants également. Leur nouvel engagement pour le Seigneur les a tous amenés à s’investir dans les activités d’une église, dans l’école du dimanche, le travail parmi la jeunesse et dans d’autres ministères ouverts sur l’extérieur. Quelques années plus tard, le bateau de Ricky a accosté à Seward et il s’est alors rendu à la Mission avec un grand groupe de chrétiens. Jeannette ne l’avait pas revu depuis qu’ils s’étaient rencontrés à Juneau plusieurs années auparavant. Elle lui a alors demandé de lui raconter ce qui s’était passé durant tout ce temps... Ricky était très heureux de pouvoir lui expliquer ce que Dieu avait fait dans sa vie. Maintenant, le chant qu’il préfère chanter et jouer à la Mission est: N’est-Il pas magnifique? Magnifique n’est-ce pas? Prince de Paix, Fils de Dieu Ne l’est-il pas? Ne l’est-il pas?


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N’est-il pas merveilleux? Merveilleux, n’est-ce pas? Conseiller, Dieu Tout-Puissant Ne l’est-il pas? Ne l’est-il pas? Dieu a fait resplendir sa beauté dans la vie de Ricky en changeant le tueur potentiel qu’il était pour sa famille en un homme qui partage maintenant la vie éternelle avec eux... N’est-ce pas merveilleux?

Un moment de louange à la Mission.


Chapitre 12 Le fils prodigue

«

H

ablas Español? Hablas Ingles?» «Quieres tu café con o sin crema y azucar?» La bénévole qui venait d’étudier l’espagnol durant les mois précédents essayait maintenant de mettre en pratique cette langue avec les équipages du Pérou et du Mexique. «Préfèrentils parler espagnol ou anglais?» «Désirent-ils leur café avec ou sans sucre, avec ou sans crème?» Elle avait également suivi un cours biblique par correspondance en espagnol, le même qui est donné aux marins qui désirent apprendre à mieux connaître la Bible. Salvador, un Péruvien, curieux de voir ce que cette femme était en train d’étudier, lui a demandé une copie de son cours. Cette demande a eu par la suite un fort impact dans sa vie et dans celle de sa famille! Durant ses temps libres, Salvador a étudié et étudie encore le contenu du cours et a lu et relu la Bible, en cherchant les réponses aux questions posées dans chacune des leçons... Qui est Jésus? Est-il le Sauveur? A-t-il le même prénom que lui, «Salvador»? Qu’en était-il du paradis? Qu’était-ce que le péché et le pardon? Dans sa cabine, il a lu minutieusement tous les documents qui lui avaient été donnés. Il désirait tellement terminer les dix leçons avant que la fin de la saison n’arrive à son terme! Après


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quelques semaines, il est revenu à la Mission pour rendre les feuillets avec les questions. Il a alors expliqué ce qui lui était arrivé. Lorsqu’il a commencé à lire la Bible, Salvador a pris conscience de ce qui lui avait manqué durant ces dix dernières années passées à travailler en mer. Pendant des années, il avait été à l’église avec sa famille, mais lorsqu’il a commencé à travailler sur les bateaux de croisière, il a oublié tout ce qui concernait la foi. Sa femme avait remarqué ce changement dans la vie de son mari et durant toutes ces années, lorsqu’ils s’écrivaient ou se téléphonaient, elle se demandait s’il était réellement honnête et franc avec elle, s’il n’y avait pas eu une autre femme dans sa vie durant tout ce temps en mer. En effet, il a avoué aux équipiers de la Mission que durant dix ans il avait vécu le style de vie de l’enfant prodigue1 qui nous est relaté dans la Bible. Alors qu’il lisait la Bible et qu’il répondait aux questions du cours par correspondance, y compris celles concernant le péché et le pardon, Salvador a pris conscience qu’il devait retourner à Dieu son Père. «J’étais comme l’enfant prodigue, exactement comme dans l’histoire que Jésus raconte», a poursuivi Salvador. «Je suis revenu à sa maison et j’ai trouvé le pardon et la paix.» Salvador a raconté sa repentance en présence de tous ses compagnons espagnols. Ils ont entendu son témoignage et ont déclaré qu’ils avaient vraiment vu un changement dans sa vie. Un des marins du Honduras qui avait écouté toute l’histoire, a lui aussi été curieux d’en savoir plus et a demandé le même cours biblique ainsi qu’un Nouveau Testament en espagnol. Et dire que tout cela a commencé par: «Quieres una taza de café?» («Voulez-vous une tasse de café?») La Mission fait un effort continuel pour avoir de plus en plus de cours bibliques dans de nombreuses langues telles que le tagalog, le coréen, le bulgare et bien d’autres encore. 1

Luc 15.11-32.


Le fils prodigue

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Lorsque les bateaux quittent les eaux de l’Alaska et que les équipages sont sur le chemin du retour vers leurs foyers, ils emportent avec eux des cours bibliques. Bien que ces durs travailleurs aient peu de temps libre, ils désirent vraiment étudier la Bible. Que ce soit dans les Caraïbes ou à Hawaï, dans tous les endroits où ces bateaux naviguent, on peut trouver ces cours bibliques. Aux Philippines, en Équateur et tout autour du monde, les marins rapportent ces cours chez eux. A leur retour, ces hommes font découvrir tout ce contenu d’étude à leurs églises et racontent comment ils ont aussi reçu une Bible dans leur propre langue à la Mission pour les marins en Alaska. Un jour, un marin venant du Honduras a demandé à la Mission si des Bibles pouvaient être envoyées à son église dans son pays natal, car les gens là-bas étaient trop pauvres pour s’en procurer une; seul le pasteur en détenait un exemplaire. Afin d’encourager ces gens à lire la Bible, des Nouveaux Testaments leur ont été envoyés ainsi que le cours biblique par correspondance. La Mission a promis aux villageois que s’ils retournaient les feuillets contenant les questions dûment complétées pour correction, ils recevraient gratuitement une Bible par courrier postal.

J’aimerais recevoir plus de matériel concernant Jésus parce que je veux apprendre à mieux le connaître. Turquie



Chapitre 13 Dans ma langue natale!

C

e jour-là, la salle réservée aux appels téléphoniques était bondée. Dix marins étaient inscrits sur la liste d’attente pour téléphoner mais comme il n’y avait que trois téléphones disponibles, chacun était prié de ne pas dépasser quinze minutes de conversation. Pourtant, la plupart des appels duraient bien plus longtemps car chaque membre d’équipage désirait parler le plus longtemps possible avec ses bien-aimés. Pendant que les marins attendent leur tour et flânent dans cet endroit, les possibilités pour parler avec eux sont nombreuses. Pendant qu’il attendait son tour, un homme était en train de regarder le présentoir des Bibles, mais il semblait ne rien trouver dans sa propre langue. Voyant le problème, une des bénévoles lui a offert une petite brochure publiée en macédonien et intitulée Questions fondamentales. «Ouah, c’est vraiment quelque chose que je dois dire à mes parents, que même ici en Alaska, j’ai trouvé de la lecture dans ma langue natale!» Il était tellement heureux de recevoir cette brochure! Mais il y avait ce jour-là aussi le timide et poli Dindhal qui a déclaré venir de Thaïlande. Une fois son appel téléphonique terminé, il s’est dirigé vers la sortie. Alors la même bénévole l’a interpellé et lui a dit: «S’il vous plaît, ne partez pas, j’aimerais vous remettre quelque chose à lire dans votre langue!» «Dans ma propre langue?» a-t-il demandé, curieux. Cette femme lui a


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alors offert la même petite brochure Questions fondamentales mais cette fois-ci en langue thaï. Non seulement il en était reconnaissant mais il était tout enthousiaste; il a commencé immédiatement sa lecture au milieu de la pièce principale remplie de monde. On aurait dit que Dindhal ne voyait absolument personne autour de lui; ce petit livre retenait toute son attention. Un sourire est apparu sur son visage... Apercevant cela, une personne de l’équipe de la mission a commencé à parler avec lui. Elle lui a également offert un Nouveau Testament en langue thaï, et une conversation s’est engagée. Dindhal a alors raconté son histoire. Lorsqu’il était encore enfant, vers l’âge de dix ans, il vivait en Thaïlande. Un jour, un voyageur visitait le village de Dindhal et a donné un petit dépliant parlant de la foi aux différents enfants qu’il rencontrait jouant en chemin. Ce dépliant parlait d’un personnage nommé Jésus. Dindhal l’a lu avec intérêt et a eu la conviction que ce qu’il avait lu était vrai. Comme il était encore très jeune il n’a cependant pas compris tout ce qui y était écrit; alors il s’est renseigné auprès de ses parents. Comme ces derniers étaient bouddhistes, ils lui ont dit d’oublier toutes ces choses et cela a mis fin à cette histoire. Les années ont passé. Dindhal est devenu un homme de vingt-cinq ans désirant travailler en mer. Maintenant il était à bord d’un bateau en Alaska. Alors qu’il visitait Seward, il a eu envie de téléphoner à ses parents et il s’est inscrit sur la liste d’attente pour utiliser un téléphone de la Mission pour les marins. Et à présent Dindhal était tellement surpris de trouver ce même nom de Jésus qu’il avait vu quinze ans auparavant sur le petit dépliant! Il était si heureux de découvrir qui était cette personne; il ne s’arrêtait pas de lire et lire encore tout ce qui concernait Jésus! Après avoir découvert dans la Bible qui était réellement Jésus, Dindhal l’a accepté dans son cœur le jour même!


Dans ma langue natale!

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Ses horaires de travail ne lui ont plus permis de visiter la Mission cet été-là, mais durant ce temps-là Dindhal s’est joint à un groupe de chrétiens à bord de son bateau et il a pu grandir dans sa foi. Lorsque son navire est revenu à Seward l’année suivante, quelques compagnons de travail ont fait part du témoignage de Dindhal. La graine de la foi avait été semée dans son cœur alors qu’il n’était qu’un garçon de dix ans en Thaïlande... Maintenant, plusieurs années après, la graine est devenue une plante, lorsqu’au cours de son périple en Alaska, il a reçu, dans sa propre langue, ce petit livre qui expliquait qui était Jésus le Christ. «Il en va de même pour ma parole, celle qui sort de ma bouche: elle ne revient pas à moi sans effet, sans avoir fait ce que je désire et rempli la mission que je lui ai confiée.» (Esaïe 55.11) Que cette parole puisse aussi se réaliser au sujet d’un autre jeune homme thaïlandais travaillant sur un autre bateau de croisière! Il désirait devenir moine bouddhiste après les quatre mois qui lui restaient à accomplir à bord de son bateau. Une partie de sa formation pour la suite consistait à connaître le christianisme. Il a donc reçu une Bible en langue thaï lors de sa visite à la Mission, la dernière fois que son bateau a accosté au port de Seward. Ses yeux se sont ouverts tout grands lorsqu’il a lu le récit de la Création et les explications de l’origine du péché dans le monde. Mais il a aussi lu quels étaient les plans de Dieu pour sauver les humains, juste à l’opposé du bouddhisme. C’est ce que cet homme a appris lorsqu’il a lu la Bible. Il était tellement reconnaissant d’avoir reçu ce cadeau! Il a quitté la Mission en tenant sa Bible bien serrée contre lui... Une Bible dans sa langue natale!

J’ai été très reconnaissante d’avoir pris part à ce ministère béni dans votre beau pays, sachant que le Seigneur continue à grandir dans les vies des marins qui emportent des centaines et des centaines de littératures chez eux. Pays-Bas



Chapitre 14 Baptême dans les eaux glaciaires

A

vant qu’une nouvelle saison pour les bateaux de croisière ne reprenne, la neige sur les montagnes commence à fondre. Le gris-bleu du ruissellement glaciaire irise alors lacs et rivières. Même le petit lac tout près de la Mission pour les marins se pare de cette couleur magnifique des profondeurs glaciales. Lorsqu’ils ont un peu de temps libre, les membres d’équipage des bateaux aiment flâner dans le parc situé près de la Mission. Parfois, certains aiment s’y rendre accompagnés de Rosie, la chienne de la Mission. D’autres fois, ils y vont accompagnés d’un bénévole de la Mission; c’est ainsi l’occasion pour eux de parler librement de sujets privés dans un magnifique environnement et dans un climat de détente. Certaines fois encore, un groupe d’hommes se rend au lac, munis de serviettes de bains. Ils n’y vont pas pour nager, mais pour un baptême! C’est ce qui s’est passé pour Edmundo, un marin originaire du Pérou. Un jour, alors qu’il se trouvait à la Mission, il a accepté Jésus comme son Sauveur. Peu de temps après, en lisant sa Bible dans sa cabine ainsi que le contenu de l’étude biblique qu’on venait de lui remettre, il a compris que conversion et baptême allaient de pair. Il a lu l’histoire de Philippe expliquant la bonne nouvelle de Jésus à un homme éthiopien. «Comme ils continuaient leur chemin, ils arrivèrent à un point d’eau. L’eunuque dit: ‘Voici de l’eau. Qu’est-ce qui empêche que je


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sois baptisé?’»1 Edmundo voulait aussi obéir à Dieu au sujet du baptême. Il a alors envoyé un courriel à la Mission lorsqu’il est arrivé au prochain port et il les a informés qu’il désirait se faire baptiser lorsqu’il serait de retour à Seward. Quelques semaines plus tard il est revenu à la Mission le cœur tout joyeux. Comme Edmundo n’avait pas eu beaucoup de contacts avec d’autres croyants après sa conversion, on lui a demandé s’il comprenait bien la signification du baptême selon la Bible. Il a alors effectivement bien expliqué et de façon tout à fait correcte ce que le baptême signifiait pour lui. Tout impatient, il a invité ses amis du groupe de partage biblique de son bateau à l’accompagner au lac. C’était une journée froide et pluvieuse mais Edmundo se réjouissait tellement de se faire baptiser! Le cadre était grandiose... Le petit lac était entouré de ces magnifiques épicéas disséminés sur les montagnes enneigées tout autour de la baie. La température glaciale du lac n’a pas retenu Edmundo qui s’est avancé dans l’eau accompagné de David qui était là pour le baptiser. Tout grelottant, il a réapparu hors de l’eau et s’est écrié: «Loué soit Dieu, la Création en est témoin!» Son visage resplendissait de la joie du Sauveur ressuscité. On l’a revêtu de vêtements chauds puis le groupe s’est dirigé vers la Mission. Après avoir pris une douche chaude, Edmundo a rejoint le groupe et une courte rencontre de prières a suivi. On lui a ensuite offert une pierre de l’Alaska sur laquelle était inscrite la date de sa nouvelle naissance ainsi qu’un verset biblique. De nombreux marins ont reçu de telles pierres au cours des années qui ont précédé. Ces hommes les rapportent chez eux et les gardent en souvenir d’une journée de bonheur et de joie passée à Seward en Alaska.

1

Actes 8.26-40.


Expression de joie d’un nouveau baptisé.



Chapitre 15 Dans la poubelle

U

n marin mexicain est venu un jour à la Mission. Immédiatement il a demandé: «Est-ce que pasteur David est encore ici? J’ai besoin de parler au pasteur David!» Une fois David trouvé, l’homme lui a demandé: «Je suis Felix. Vous souvenez-vous de moi? Vous étiez à bord de mon bateau il y a trois ans et vous m’aviez remis une Bible!» David s’est mis à réfléchir, essayant de se remémorer les circonstances dans lesquelles il avait rencontré cet homme. Soudain, élevant les sourcils, il lui a répliqué: «Felix? Oh Felix, oui! Comment allez-vous?» Sur ces entrefaites, Felix lui a raconté tout ce qui s’était passé dans sa vie depuis leur première rencontre. Alors que Felix travaillait dans son unité, sur un paquebot, à laver la vaisselle, David s’était arrêté un moment vers lui pour lui parler du Seigneur. Avant de le quitter, David lui avait donné à lire un Nouveau Testament en espagnol, mais une fois David parti, Felix avait jeté le livre à la poubelle en marmonnant: «Allez, loin de moi ce machin, ce n’est pas quelque chose pour moi!» Cependant, un peu plus tard, il a commencé à avoir des remords à propos de sa réaction; alors, quelques heures


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après, une fois son service terminé, il a quand même décidé de jeter un coup d’œil à ce livre que David lui avait si gentiment donné. Felix a fouillé dans la poubelle et a ressorti le livre, puis il a commencé à le lire. Il a lu, lu et lu encore. C’était vraiment quelque chose qu’il n’avait jamais entendu auparavant. Il s’est senti soudain très heureux d’avoir en sa possession ce petit livre. Mais comprenait-il vraiment ce qu’il lisait? Dans la Bible, il est parlé d’un homme éthiopien qui disait à Philippe l’évangéliste: «Comment pourrais-je [comprendre] si personne ne me l’explique?»1 A cette époque, durant les premières années de la Mission, il n’y avait pas encore beaucoup de contenus d’études bibliques disponibles pour les marins. C’est le Saint-Esprit qui a guidé et enseigné Felix lorsqu’il lisait la Parole de Dieu; le Seigneur luimême a ouvert les yeux de son intelligence et de son cœur! Felix a alors compris qu’il avait besoin de se repentir, de confesser ses péchés et d’accepter le cadeau du pardon de Christ offert par son sacrifice à la Croix. Felix a cru à ce message et a reçu le salut éternel! Une fois son contrat à bord du bateau terminé, Felix est retourné chez lui au Mexique et a expliqué à sa femme tout ce qu’il lui était arrivé. Cela a avivé la curiosité de sa femme et elle aussi a commencé à lire la Bible, puis plus tard, a accepté Jésus dans sa vie comme Sauveur et Seigneur. Le couple a alors fondé une église dans leur région et ils ont été baptisés à Acapulco. C’est merveilleux de voir la façon dont Dieu a œuvré dans la vie et le cœur de cet homme au travers de toutes ces années! Felix a grandi étape après étape dans sa foi. «On peut voir un parallèle entre la vie de Felix et le passage dans le livre des Actes au chapitre 16, verset 31», a expliqué David, lorsque le gardien de la prison a été sauvé «lui et sa famille...» 1

Actes 8.30-31.


Dans la poubelle

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De la même façon, des années auparavant, David avait lu la Bible dans la cabine de son bateau, et exactement comme Felix, il avait trouvé le Christ. Il s’en était suivi aussi la conversion de toute sa proche famille! Lorsque David et Felix se sont rendus compte de tout ce que le Seigneur avait fait depuis que le Nouveau Testament en espagnol avait été jeté dans la poubelle des années auparavant, leurs cœurs se sont remplis de joie. De nos jours, la Mission pour les marins essaie de maintenir un réseau de contacts tout autour du monde afin de donner aux nouveaux chrétiens une possibilité de suivi lorsqu’ils sont de retour chez eux dans leur pays. Par exemple, un maître de cabine d’un paquebot a trouvé un missionnaire dans sa province au Portugal. Celui-ci lui a envoyé de la documentation biblique et l’adresse d’une église chrétienne dans sa région. Il a pu aussi découvrir l’existence d’une librairie chrétienne dans son pays. Ainsi lorsqu’il s’est retrouvé chez lui, cet homme nommé Jose ne s’est plus senti comme un chrétien isolé. Jose était d’un tempérament tranquille et prenait son temps pour faire les choses. Après avoir lu la Bible et d’autres brochures chrétiennes que la Mission lui avait remises à diverses occasions au fil des années, il a accepté Christ dans sa vie alors qu’il était seul dans sa cabine. Chaque fois qu’il arrivait à Seward, il demandait toujours à voir David pour parler de Jésus et prier avec lui. Un été, Jose a demandé à être baptisé dans le lac situé dans le parc derrière la Mission. Quel bonheur alors pour David d’apprendre que cet homme, qui deux ans auparavant était encore en recherche, avait accepté Christ! A présent, David encourage Jose à se joindre au groupe de chrétiens à bord de son bateau afin qu’il grandisse dans sa foi. Ainsi, aussi bien à bord que chez lui, Jose n’est plus seul en tant que chrétien. Maintenant il peut se réunir avec des frères et sœurs en Christ faisant partie de la famille de Dieu.


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Pour moi, Seward est un endroit plein de bons souvenirs, particulièrement avec le peuple de Dieu qui a apporté la lumière dans ma vie alors en ruines. Que Dieu soit avec vous durant tout le temps où vous continuerez à le servir et à servir également les marins comme moi pour les guider dans le bon sentier du Royaume de Dieu. Je suis très reconnaissant envers tous les serviteurs de Dieu de la Mission de Seward. Philippines

Un bateau de croisière dans le port.


Chapitre 16 La vidéothèque

J

ohn, un chrétien travaillant à bord d’un des paquebots, est revenu un jour à la Mission pour les marins, les bras chargés de cassettes vidéo. «C’était génial», dit-il. «Plusieurs membres d’équipage ont également pu les visionner!» L’année auparavant, alors que John commençait à naviguer vers l’Alaska, il s’était rendu pour la première fois à la Mission de Seward. Alors qu’il visitait les lieux, il avait appris qu’il pouvait emprunter de bonnes bandes vidéo. En effet, la Mission pour les marins fournit de nombreux films chrétiens ou laïques dans diverses langues, ainsi que des documentaires sur l’Alaska. Le film battant tous les records est celui de la vie de Jésus, disponible dans une centaine de langues officielles et dialectes. Ces films sont fournis à des prix très raisonnables par Campus pour Christ en Californie. La Mission dispose également de Bibles, dépliants et cassettes audio dans de très nombreuses traductions. Lorsqu’un marin demande une langue qui n’est pas en stock, la Mission déploie tous ses efforts pour la lui trouver. Le film Jésus est traduit dans plus de 800 langues et les cassettes d’évangélisation de Gospel Recording1 sont disponibles dans à peu près 400 traductions.

1 Gospel Recording est un ministère d’évangélisation par le biais de cassettes audio disponibles dans plus de 5600 langues. Ces cassettes sont enregistrées dans le monde entier, parfois dans des endroits reculés, afin d’offrir l’occasion à chacun d’entendre le message de l’Evangile dans sa langue natale. www.globalrecordings.net et www.audiogospel.ch (N.d.E.).


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Lorsque John, originaire des Philippines, a visionné pour la première fois à la Mission le film Jésus dans sa langue maternelle, il était tout à fait enthousiaste. Il a dit à ses amis: «Venez regarder ce que j’ai trouvé en tagalog!» Plus tard, il a appris qu’il pouvait également emprunter des vidéos pour les regarder tranquillement dans sa cabine lorsqu’il aurait quelques heures de libre. «Combien est-ce que je peux en prendre à la fois?» a-t-il demandé à un des bénévoles. «Eh bien... autant que tu le désires, pourvu que tu ne les prennes pas toutes en même temps...!» Des éclats de rire se sont alors fait entendre dans la salle des vidéos et ont favorisé ainsi certains contacts. John apprécie particulièrement les vidéos qui traitent des temps de la fin dont la Bible parle: des films sur l’apocalypse, les révélations, les tribulations ou les autres thèmes traitant d’eschatologie, même si ces films ne sont disponibles qu’en anglais. Y a-t-il des raisons particulières qui expliqueraient que ces vidéos soient les plus empruntées durant la saison des croisières? Est-ce dû au fait que les marins soient particulièrement soucieux de la tournure des événements mondiaux? Peut-être se demandent-ils si Jésus va revenir bientôt? Un jour, alors que John naviguait et était en train de prendre son repas dans le réfectoire avec l’équipage, il avait de la peine à entendre ce que lui disait son camarade tellement le volume sonore du téléviseur installé dans la pièce était élevé. Tout le monde avait les yeux rivés sur cet écran qui envahissait tout l’espace. John supportait difficilement le vacarme et la cruauté véhiculés dans les films projetés tous les jours sur l’écran. Lui qui était maintenant chrétien trouvait important d’éloigner son regard de ces images de violences et de tueries! Il s’est mis alors à penser: «Ce serait tellement merveilleux si les bons films que j’ai empruntés à la Mission pour les marins pouvaient être visionnés dans ce réfectoire!» L’idée lui est alors venue de présenter ses films dans un petit coin à une certaine distance du réfectoire. D’autres marins, devant rester à bord pendant les escales à Seward, pourraient ainsi regarder ses vidéos.


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C’est ainsi qu’après son travail, John a pu visionner presque chaque soir des films pour ses collègues. Alors que souvent la nuit était bien avancée, plusieurs se joignaient régulièrement à lui. John est ainsi devenu une sorte d’évangéliste silencieux, même une fois de retour chez lui auprès de ses compatriotes. Comme beaucoup d’autres marins, John a également envoyé le film Jésus à sa famille. De nombreuses personnes de son village l’ont également regardé. Pour la majorité d’entre eux, c’était la première fois qu’ils voyaient quelque chose à propos de la vie de Jésus et ils étaient très impressionnés. John n’a pas été le seul marin à avoir été touché par le film Jésus présenté à la Mission. Un jour, un marin africain est entré dans la salle vidéo et lorsqu’on lui a expliqué qu’il en existait dans de très nombreuses langues, il s’est aussitôt enquis de savoir s’il en existait dans sa propre langue. Sa langue maternelle était le dinka, un dialecte parlé au sud du Soudan; il se demandait bien si quelqu’un en avait même entendu parler. Comme aucun film dans ce dialecte n’a pu être trouvé, l’équipe de la Mission a cherché dans le coin réservé à la documentation imprimée pour voir s’il n’existerait pas au moins un dépliant ou un Nouveau Testament disponible dans cette langue. Malheureusement, rien n’a pu être trouvé en dinka, même pas dans la caisse contenant de la documentation dans des langues africaines rares. Alors que cet homme commençait à être découragé, une autre piste a été proposée. Un bénévole se souvenait qu’il y avait dans le stock une cinquantaine de cassettes d’évangélisation différentes de la collection Gospel Recording. Mais là encore, rien n’a pu être trouvé dans sa langue. Le bénévole a alors promis à ce marin soudanais qui durant les semaines suivantes qu’il essaierait par tous les moyens de lui trouver quelque chose en dinka. La Mission se demandait si quelque chose avait même été édité dans ce dialecte, elle s’interrogeait de la même manière au sujet d’un autre dialecte, le hakka, parlé par un marin vivant dans une île reculée d’Indonésie et qui avait été en contact avec un bénévole de la Mission.


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Et puis, après d’intensives recherches, le film Jésus a enfin pu être commandé non seulement en dinka mais aussi en hakka. La joie de ces deux hommes était indescriptible lorsqu’ils ont reçu le film. Cette expérience rappelle à quel point il est important d’entendre «quelque chose» dans sa langue natale. C’est la langue maternelle qui touche le mieux les gens, qui les interpelle. Parce que c’est la langue qu’ils ont apprise lorsqu’ils étaient enfants; c’est la langue que leur famille parle et, qui plus est, c’est la langue de leur patrie qui, lorsqu’ils sont en pleine mer, est parfois si loin... Un jour, un musulman d’origine turque qui avait emprunté le film Jésus pour le regarder dans sa cabine, nous a dit que c’était la première fois depuis dix mois qu’il entendait parler quelqu’un dans sa langue... La plupart des membres d’équipage visitant la Mission de Seward parlent au moins deux langues: leur langue maternelle et l’anglais qui est la langue utilisée sur les paquebots. Par contre, le degré de compréhension de l’anglais varie en fonction du temps qu’ils ont passé sur le bateau et de l’unité dans laquelle ils travaillent. Selon le cas, ils peuvent travailler parmi des compatriotes et communiquer ainsi uniquement dans leur langue natale, ou bien ils peuvent être en contact quotidiennement avec les passagers, ce qui les oblige alors à parler en anglais. John, quant à lui, continuera de visionner avec ses amis des vidéos en tagalog et en anglais durant les heures tardives de la nuit dans un coin du bateau, pendant qu’il vogue le long des côtes de l’Alaska. Entre-temps, le film Jésus a eu un fort impact sur de nombreuses vies jusqu’à l’autre bout de la terre. Un jour, la Mission a reçu gracieusement de l’organisation Campus Crusade2 des copies du film Jésus en arménien. Quelques heures plus tard, des amis d’Anchorage sont venus pour nous rendre visite et, en voyant une copie du film en arménien, ils 2 Campus Crusade (Campus pour Christ) est un mouvement interdénominationnel et missionnaire, actif entre autres parmi les étudiants, les femmes et les hommes d’affaires. www.campuspourchrist.ch (N.d.E.).


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se sont exclamés: «Oh, nous avons justement dans notre église des amis arméniens qui s’inquiètent au sujet de leur famille en Arménie car les portes se sont à nouveau fermées là-bas pour annoncer l’Evangile!» Etant donné qu’aucun marin arménien ne s’était rendu à la Mission, c’était une belle occasion pour la Mission de remettre à nos amis d’Anchorage une copie du film pour qu’il la transmette à cette famille arménienne. Quelle joie cela a été pour tout le monde! Il en a été de même pour une famille vietnamienne qui vivait temporairement aux Pays-Bas. Lorsque les membres de cette famille ont appris par l’intermédiaire d’un bénévole hollandais ayant travaillé à la Mission que celle-ci pouvait fournir le film Jésus dans de nombreuses langues, ils en ont commandé une copie en vietnamien. Sur les étagères de la Mission, une copie couverte de poussière, que personne n’avait jamais demandée, a été alors trouvée. Dieu lui-même l’avait conservée là pour être utilisée en son temps...

Erica devait être reconduite à son bateau juste après avoir emprunté la vidéo du film Jésus. Elle la tenait sur ses genoux. Le conducteur lui a demandé: «Avez-vous déjà vu ce film?» «Oui, plusieurs fois.» Le chauffeur, surpris, a continué: «Combien de fois?» Elle a répondu: «A peu près vingt fois!» A sa réponse, il était si surpris qu’il lui a dit: «Que pensez-vous alors de ce film?» Elle a répondu: «Il me fait pleurer.» Le chauffeur a senti qu’il devait profiter de cette conversation et lui a demandé pourquoi ce film la rendait triste. «Parce que nous sommes tous si mauvais», a-t-elle répondu. Durant le court trajet de la Mission jusqu’au bateau, le chauffeur a saisi l’occasion de partager l’Evangile avec Erica. Sur le quai, ils ont continué de parler et le chauffeur lui a demandé si elle avait bien compris ce qu’il venait de lui expliquer. Elle a répondu par l’affirmative. Ce chauffeur n’a jamais plus revu Erica, mais il était heureux d’avoir partagé la Bonne nouvelle de Jésus avec elle. Seward, Alaska



Chapitre 17 Des biscuits mondialement connus

«

Q

ui peut m’aider aujourd’hui à faire la pâte à biscuits?» demande Gail dans sa charmante maison, à Anchorage. C’est toujours une partie de plaisir lorsque Gail Thomas et ses enfants préparent la pâte des fameux biscuits aux pépites de chocolat à la réputation internationale! Lorsque la Mission a commencé son ministère à Whittier, Gail aurait bien aimé y travailler comme bénévole mais elle ne le pouvait pas car à cette époque ses enfants étaient encore trop jeunes pour qu’elle s’investisse dans une telle œuvre. Mais elle a eu soudain une autre idée qu’elle a partagée avec son mari. «Que penserais-tu que je prépare de la pâte à biscuits et que je l’envoie ensuite à la Mission à Whittier? Ce serait un gain de temps pour les bénévoles qui n’auraient plus qu’à cuire les biscuits.» C’est ainsi que Gail s’est investie dans ce projet. Après toutes ces années, elle continue fidèlement ce service même si la Mission a déménagé depuis à Seward et que sa famille compte maintenant huit enfants! Après avoir préparé la pâte, toute la famille prie en demandant à Dieu de bénir tous les marins qui mangeront ces biscuits. Parfois, une caisse contenant 4,5kg de pâte à biscuits est expédiée lors des allers-retours vers la Mission que font des bénévoles dans un petit avion.


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Un jour, une jeune femme venant d’un des bateaux de croisière est entrée à la Mission et a déclaré qu’elle n’y était plus revenue depuis trois ans. Elle a dit: «Pour être honnête, je dois vous avouer que lorsque j’ai entendu dire que l’itinéraire de cette année nous mènerait en Alaska, j’ai encouragé mes amis à venir avec moi vous rendre visite afin qu’ils goûtent au moins aux délicieux biscuits qui m’ont laissé un souvenir inoubliable!» Arturo, originaire du Portugal aimait aussi tellement ces biscuits qu’il en a parlé à sa femme. Il a demandé à la Mission: «Pourriez-vous me donner la recette de vos biscuits? J’aimerais que ma femme en fasse et qu’elle constate combien ils sont délicieux!» La recette n’était pas disponible sur le moment mais l’idée est venue de lui envoyer quelques-uns de ces biscuits fraîchement cuits. Le jour-même, un joli paquet a été emballé avec précaution et Arturo l’a envoyé à son épouse au Portugal, en y joignant un gentil mot sur une carte postale montrant les somptueuses montagnes enneigées. Nul doute que sa chère femme ait été très surprise de recevoir des biscuits aux pépites de chocolat en provenance directe d’Alaska! Une autre fois, un membre d’équipage hongrois est entré pour la première fois à la Mission et a déclaré chaleureusement: «Hum... ça sent comme à la maison ici... ça me rappelle les odeurs de la cuisine de ma mère lorsqu’elle nous faisait des biscuits. On dirait que je suis à la maison... loin de chez moi!» Anka, une femme allemande, a demandé un jour si elle pouvait elle-même cuire les biscuits de la Mission car ce parfum de biscuit lui rappelait aussi les odeurs de cuisine de sa mère. Une autre fois, elle a offert de préparer une spécialité de petits fours allemands et, ce jour-là, on trouvait sur les assiettes non seulement des biscuits au chocolat mais également des plätzchen1. Anka ne connaît pas l’Evangile, cependant elle est toujours heureuse de revenir à la Mission grâce à cette chaude 1 Plätzchen: sortes de petits fours secs que l’on consomme en Allemagne et en Autriche, en famille ou avec des amis pendant la période de l’Avent et la veille de Noël. (N.d.E.)


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atmosphère entourant l’odeur des biscuits fraîchement cuits. Durant ces moments passés à la cuisine, elle a certainement dû entendre de nombreux témoignages concernant l’Evangile dans les conversations autour d’elle. Comme il est merveilleux de voir qu’une simple recette de biscuit est aussi une partie du ministère de Dieu! Un goût qui touche les papilles et le cœur des gens qui s’en rappellent même de nombreuses années plus tard! Merci à cette famille d’Anchorage! Ode à la famille Thomas Un flot de remerciements Parfois, lorsque je me maintiens à flot, Que la pluie et le vent heurtent mon bateau, Comme un enfant, j’ai très envie du réconfort d’une barre chocolatée Ou mieux encore, d’un seul biscuit de la boîte renfermant Les biscuits aux pépites de chocolat préparés par le clan Thomas, Dont le goût apporte un autre doux réconfort. Le clan hélas ne me connaît pas encore Car à Seward nous ne nous sommes pas rencontrés. Mais le révérend Hawkins, marin et diplomate, Partagea vos biscuits faits maison alors qu’à table nous prenions place Et nous confia: «Il y a une prière spéciale Qui accompagne ces biscuits exceptionnels.» La pâte des biscuits du commerce peut être bonne aussi Mais aucune prière n’accompagne cette dernière. Comme la pointe effilée d’une lance Je peux sentir la différence. Dans le monde entier, les biscuits réjouissent les peuples Leurs couleurs, leurs formes, leur goût subtil font monter en nous


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Une gerbe de sensations semblables au plaisir Que procure la mélodie d’un coucher de soleil ou un air joyeux. Mais les biscuits des Thomas, saupoudrés d’une prière familiale, Sont plus riches que les mines d’or et que les plus rares trésors. Theresa Martin, une jeune croyante française que vous aimeriez, Avait la simplicité enfantine d’une colombe Et savait que les plus petits actes d’amour sous Son regard Lui donnent en fait un plaisir sans pareil. Alors, n’allez pas penser que Jésus ne connait pas La bonté de vos pensées pétries dans la pâte... Benedicamus Domino!2

D’un amateur grignoteur de biscuits. John

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Béni soit le Seigneur!


Chapitre 18 Une solution pour les Alaskiens?

C

ertains enfants d’Alaska commencent déjà à boire de l’alcool à l’âge de huit ans, ce qui engendre de sérieux problèmes de dépendance avant même d’entrer à l’école secondaire. On peut se demander comment ils arrivent à étudier dans de telles dispositions! Beaucoup de jeunes filles et de femmes continuent à boire en étant enceinte! Ces choix engendrent un taux anormalement élevé d’enfants naissant avec un syndrome d’alcoolisation fœtale. Ces enfants atteints de troubles causés par l’alcoolisation fœtale (ETCAF)1 souffrent souvent de déficits d’attention, de troubles de l’apprentissage et aussi parfois de retard mental. Bien que l’alcoolisme continue son ravage grandissant dans la plupart des villages alaskiens, ce problème se multiplie également dans d’autres parties de la planète, comme en Amérique du sud et dans les pays du Tiers-monde. C’est au fil des années que l’alcool a été introduit dans ces régions par les hommes blancs; mais aujourd’hui le problème lié à l’alcool n’est qu’un problème parmi d’autres. Dans la plupart des villages l’alcool est fabriqué par les habitants eux-mêmes en utilisant des racines de manioc, des herbes et d’autres 1 Ensemble des Troubles Causés par l’Alcoolisation Fœtale (ETCAF), est un terme employé pour décrire la gamme de déficiences qui peuvent survenir chez un individu dont la mère a consommé de l’alcool pendant la grossesse. (N.d.E.)


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substances naturelles. La débrouillardise dans ce domaine semble illimitée. L’alcoolisme engendre plusieurs conséquences fâcheuses comme l’immoralité, les abus et des formes de désespoir et de détresse. Dans certaines régions, l’alcoolisme entraîne une telle détresse chez certains jeunes que le suicide leur apparaît comme la seule solution au regard de l’avenir. Parfois, certains adolescents se rassemblent pour former de petits groupes appelés Suicide-packs2 où ils prennent ensemble une overdose de médicaments pour en finir... N’y a-t-il aucun espoir de voir un quelconque changement concernant ces dépendances? Si, il y en a un! Mais ce n’est pas un chemin facile... En fait c’est très dur, mais c’est possible. Il y a une solution! Certains changements apparaissent lorsque ces personnes prennent contact avec le Centre Technique d’Orientation en Alaska (AVTEC)3, localisé à Seward, afin d’évaluer leurs compétences et suivre une formation. Les étudiants venant de tous les coins d’Alaska, et parfois accompagnés de leur famille, peuvent loger dans les dortoirs de cet organisme. Parfois ces familles viennent à la Mission pour les marins afin d’obtenir des vivres fournis par la Banque alimentaire. Là, les familles récemment arrivées reçoivent de la nourriture pour quelques jours en attendant d’être installées. Les résidents ainsi que les commerces de Seward offrent aussi des vivres à la Mission comme geste de soutien envers les marins et les étudiants de l’AVTEC qui viennent parfois d’endroits retirés et de familles démunies. Quelquefois, la nourriture provient aussi de personnes ayant campé le long de la baie et également d’une boulangerie qui offre régulièrement de délicieuses soupes et des beignets. En plus des vivres, la Mission pour les marins reçoit des couvertures et des vêtements d’occasion provenant de différentes églises localisées à Anchorage ou ailleurs. Ce 2

Bandes de jeunes se groupant en vue d’un suicide collectif. (N.d.E.)

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Alaska Vocational Technical Center (AVTEC).


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service de la Mission envers les populations défavorisées est bien connu dans les environs. Un jour, un gendarme a téléphoné à la Mission. Une femme avait des problèmes de santé et était impliquée dans un accident de voiture causé par un conducteur en état d’ébriété; elle avait besoin d’aide et d’un lieu pour passer la nuit. Le conducteur était maintenant en prison mais cette femme avait besoin d’être aidée avant d’être reconduite auprès de sa parenté située dans un autre village. «Est-ce que la Mission pourrait nous aider pour une ou deux nuits?» a demandé l’agent. Bien que chacun à la Mission était fort occupé à cause des équipages de marins qui arrivaient de tous côtés, le directeur de la Mission a accepté d’aider cette femme pour cette nuit-là. Les personnes en état d’ébriété ont l’interdiction d’entrer dans la Mission, mais cette femme n’avait pas bu d’alcool depuis quatre jours, depuis l’accident. Lorsque Liliane a franchi pour la première fois la porte de la Mission, elle n’avait pas mangé non plus depuis quatre jours. Après avoir arrêté de boire, elle était devenue très malade et, de plus, elle avait subi de la chimiothérapie à cause d’un cancer, peu de temps avant l’accident. Mais maintenant elle se sentait mieux et désirait manger quelque chose. Au sein de la Mission, l’amour de Dieu a pu être manifesté à Liliane, mais à la suite des nombreux malheurs qu’elle avait connus dans sa vie, elle avait décidé d’endurcir son cœur visà-vis de Dieu. Ses parents étant chrétiens, elle connaissait beaucoup de choses concernant Dieu mais elle ne voulait absolument plus rien savoir de lui. Une fois tout le monde parti, Liliane est restée seule avec une bénévole qui lui a préparé un lit, lui a offert de prendre une douche, l’a aidée à faire sa lessive et lui a montré simplement un peu d’amour. Au cours de leur conversation, la bénévole lui a raconté la vie difficile qu’elle-même avait traversée, et comment en se tenant tout près de Dieu, elle avait expérimenté son soutien et sa consolation.


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Durant cette conversation, la bénévole a ouvert la Bible et a lu à Liliane les Psaumes qui avaient été pour elle un encouragement durant ses épreuves. «Liliane, désirerais-tu aussi cette même paix après toutes ces souffrances? Est-ce que l’alcool t’aide vraiment à oublier tes malheurs et la peur que tu as par rapport au traitement de ton cancer?» Soudain, quelque chose s’est brisé dans le cœur endurci de Liliane... Lentement elle a commencé à pleurer... N’était-ce pas le Seigneur lui-même qui l’avait emmenée dans cet endroit? Il l’avait vue dans sa situation désespérée, si seule et sans aucun espoir pour le futur. Alors, tard dans la nuit, Liliane a prié et a dit: «Seigneur, adoucis mon cœur!» Ainsi, elle a reçu le Salut et la paix. Ses problèmes n’étaient pas encore résolus mais elle avait trouvé un Consolateur qui allait l’aider à rester ferme dans ses décisions d’arrêter de boire et... miraculeusement... c’est ce qu’il a fait pour elle! Liliane est ensuite retournée dans son village, heureuse de suivre Jésus et de se joindre à une église. Environ deux ans plus tard, sa maladie est réapparue et Liliane est décédée. Ses funérailles ont alors été un réel témoignage de ce que Dieu avait fait dans les dernières années de sa vie. Quelques années après, un dimanche, un vieil ami alaskien de David est venu de l’intérieur du pays pour lui rendre visite à Seward et voir comment les choses allaient. Sa femme était une chrétienne, et Ben avait eu des problèmes avec l’alcool. Il avait maintenant environ quatre-vingts ans et cela ne faisait que trois ans qu’il avait arrêté de boire. A la Mission, un dimanche, lors du culte, Ben a chanté des chants chrétiens en s’accompagnant de sa guitare: «Quel changement! Quel témoignage! Il n’est jamais trop tard pour accepter Christ, Et son pouvoir pour arrêter de boire!» Plusieurs marins ont également témoigné des changements que Dieu avait produits dans leurs vies, et la façon dont il les avait aidés à abandonner l’alcool! Le changement qu’ils ont vécu a également été perçu par leurs familles, si bien que plusieurs ont accepté Christ dans leur vie, grâce à ce puissant impact.


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A la Mission, une petite brochure, intitulée Victoire sur l’alcool et publiée par les Editions Moody, est donnée à chaque personne intéressée. A la fin de ce livret, des directives sont données afin d’aider les personnes aux prises avec l’alcool à arrêter de boire et à ne pas retomber dans ce travers. Voici quelques-uns de ces conseils: - Je réalise que par moi-même je ne peux pas arrêter de boire. Je crois que Jésus a le pouvoir de m’aider. Je crois que si je le reçois dans ma vie et que j’accepte qu’il soit mon Sauveur personnel, je deviens une nouvelle créature. - Je ne prendrai plus aucune boisson contenant de l’alcool. Je reconnais que c’est le premier verre qui fait du tort et provoque la rechute. Je resterai éloigné des endroits où la tentation de boire serait présente et également à distance des personnes qui essaieraient de me tenter. Je peux être vainqueur car je sais que la force de Christ est suffisante pour suppléer à tous mes besoins. Parfois certains chrétiens retournent à leur ancienne dépendance car ils n’arrivent pas à surmonter la tentation qui provient du fait d’être entouré d’amis qui boivent de l’alcool. Je me souviendrai de l’importance de me tenir tout près du Seigneur lors de ces batailles spirituelles pour avoir la victoire. Ces batailles sont une réalité du monde invisible mais le Seigneur est le plus fort! «Au contraire dans tout cela nous sommes plus que vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés.» (Romains 8.37) Notre Seigneur Jésus Christ m’a beaucoup aidé. Je peux le constater, je peux le sentir, je sais qu’il m’aime et qu’il veut me sauver. Cela fait maintenant presque une année et demie que j’ai arrêté de boire. Chaque jour quand je le peux, je prie avec ma famille. Pologne



Chapitre 19 L’œuvre se poursuit

L

a Mission pour les marins de Seward fête ses dix ans! Les navires de croisière ont accosté pour la première fois à Seward en 1993 et, le 18 juillet 2003, le nombre d’entrées de ces vaisseaux dans le port avoisinait les 1000. Cela fait une moyenne de cent navires par été! La palme d’honneur du millième bateau aurait pu être remise à un navire inaugurant son premier voyage, parti de Vancouver directement pour Seward, mais malheureusement il est arrivé avec un jour de retard dans le port! Des questions se posaient à son sujet. Allait-on revoir parmi les membres d’équipage des marins déjà venus à Seward? Y aurait-il des chrétiens parmi le personnel de bord? Pourraiton commencer directement un groupe d’étude biblique pour l’équipage? Toutes ces questions occupaient l’esprit du pasteur David lorsqu’un bateau arrivait pour la première fois à Seward. La réponse à ces questions a été synonyme de joie puisque non seulement quelques marins étaient connus à bord de ce nouveau bateau mais aussi des chrétiens engagés et responsables d’autres groupes bibliques et qui avaient déjà commencé des rencontres. Dès la première semaine de travail à bord, ces leaders chrétiens avaient décidé de se retrouver régulièrement pour former un groupe de prières et de louange


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comme ils en avaient l’habitude sur les autres bateaux. Ils ont invité Freddy, un marin indien, à se joindre à eux. Tous les membres de l’équipe de cuisine de ce bateau étaient originaires de la même province en Inde et plusieurs d’entre eux provenaient d’églises catholiques romaines. La plupart de ces marins vivaient leur foi avec sérieux, et s’attelaient à leurs tâches avec beaucoup d’énergie et le mieux possible même s’ils savaient qu’ils n’étaient pas parfaits. Cette même nuit, Freddy a appris la raison pour laquelle Dieu avait envoyé Jésus et que ce n’est qu’à travers lui que nous pouvons être considérés justifiés et parfaits aux yeux de Dieu! Lors de cette réunion de prières, il a pris conscience que, par Jésus-Christ, on pouvait directement s’adresser à Dieu! Le premier soir où ces chrétiens se sont assemblés sur ce bateau flambant neuf, Freddy a compris le message de la Croix et a accepté Christ dans sa vie. Lors de sa première visite à la Mission, Freddy était tout heureux de trouver le film «Jésus» dans son dialecte, et les semaines suivantes, en regardant cette vidéo dans sa cabine, il a pu apprendre encore beaucoup de choses à propos de l’Evangile. Pour l’équipe de la Mission, c’était une joie et un réel encouragement de constater que Dieu avait travaillé dans le cœur de ces responsables chrétiens en organisant tout de suite des rencontres! Ainsi, dès le premier jour de leur arrivée à Seward, ils avaient pu emporter avec eux beaucoup de documentation chrétienne en vue de leurs études bibliques. Lors de la saison d’été, lorsqu’un marin se convertit, il est très rapidement mis en contact avec d’autres chrétiens. Cela lui offre des conditions favorables pour affermir sa foi et pour tenir ferme dans les périodes de tentation. Des efforts sont aussi faits pour encourager les membres de la famille de Dieu à bord d’un bateau à rester unis, leur permettant ainsi de prendre soin les uns des autres. Lorsque des marins naviguent, ils éprouvent souvent solitude, mal du pays, peurs et appréhensions diverses. Pour les chrétiens, cela signifie laisser derrière eux leur famille


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et leurs amis, leur sécurité sur le plan émotionnel ou autre. S’ils se trouvent confrontés à des épreuves ou des tentations particulièrement fortes, les éléments de stabilité leur font alors défaut! La force que constitue le cadre familial n’est plus là pour les aider au cœur d’épreuves où ils se sentent spécialement vulnérables. C’est alors pour eux une véritable surprise et une joie immense lorsqu’ils se voient accueillis à bord de leur bateau par un groupe organisé de chrétiens...! Chaque arrivée d’équipage à la Mission donne l’occasion d’un moment de recueillement. Pour beaucoup de marins chrétiens, ces moments de partage sont de véritables temps de ressourcement durant lesquels ils se nourrissent des paroles de la Bible et expriment leurs louanges dans un climat de communion fraternelle. Dans la pièce réservée à la musique, lorsque les chrétiens réunis chantent ensemble, c’est comme s’ils avaient un avantgoût de ce qui est mentionné dans le livre de l’Apocalypse: «...des hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple et de toute nation...» 1 Lors d’un culte, il est même arrivé une fois que parmi un groupe de dix-huit marins, neuf nationalités différentes aient été représentées: Philippines, Indonésie, Thaïlande, Inde, Mexique, Roumanie, Angleterre, Pays-Bas et Alaska! En plus des musiciens ­– dont Betsy notre guitariste ­– qui guident la louange, c’est toujours une joie de voir plusieurs de ces personnes exercer leurs dons musicaux à la guitare, au piano, au bongo ou au tambourin. Pour ces marins fatigués par un travail souvent exigeant, ces moments sont vécus par eux comme des temps de détente où ils font en quelque sorte le plein de leur cœur en paix et en joie comme le reflètent leurs visages. Ces hommes et parfois quelques femmes sont aussi toujours heureux d’entendre les prédications du pasteur David. La plupart du temps, ses sermons mettent l’accent sur les aspects pratiques de la vie chrétienne dans ses différents domaines. Il est conscient que ces marins n’ont pas tous 1

Apocalypse 5.9.


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l’occasion d’assister au culte à bord des bateaux, ni même le temps de participer aux groupes de partage, leurs horaires de travail et leurs heures de sommeil décalées ne le leur permettant pas. Toutefois, la Mission encourage régulièrement les chrétiens à faire malgré tout leur possible pour se joindre, ne serait-ce que de temps en temps, à un groupe afin de rester fervents spirituellement et de ne pas se refroidir en étant isolés des autres. L’exemple de la braise qui, éloignée du brasier, perd de son intensité et de sa chaleur par manque de contact avec les autres, est souvent mentionné durant les moments d’encouragement. De sa propre expérience, David sait bien qu’il est essentiel pour la vie chrétienne d’être en communion avec d’autres chrétiens. Lorsqu’il s’est converti, il n’y avait à cette époque personne à bord de son bateau pour l’aider, personne pour le guider, personne avec qui partager sa foi naissante. De mémoire de missionnaires ici en Alaska, c’est en 1979 qu’une infirmière travaillant sur un bateau de croisière de la HAL2 a constaté que les membres d’équipage chrétiens à bord de ce bateau passaient une année entière sans avoir l’occasion de participer à un culte. Elle a alors pris la décision d’inviter les chrétiens indonésiens à se joindre à elle dans les locaux de l’infirmerie pour chanter tandis qu’elle jouerait de la guitare. Ils ne pouvaient le faire qu’après minuit, après leur travail. Ces rencontres ont constitué le point de départ des réunions chrétiennes organisées parmi les Indonésiens à bord des bateaux. Durant cette période, beaucoup «d’églises de nuit» ont commencé à se constituer sur différents navires. Même si le travail des marins est très exigeant, leur participation à ces rencontres est grande et, en dépit de leur fatigue, ils sont souvent fidèles pour se rassembler. Sur un de ces bateaux, les marins se rencontrent même jusqu’à trois fois par semaine pour prier, étudier la Bible et chanter! Sur un autre bateau de la HAL, un groupe d’étude biblique réunissant des Philippins a commencé ses rencontres en 1988. 2

Holland America Line.


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Pendant plusieurs années, un membre d’équipage chrétien avait pris l’habitude de se joindre à l’église locale de Juneau lorsque son bateau y faisait escale. Durant l’été de cette même année, cet homme, nommé Rocky, avait invité Jeannette un mardi après-midi à se joindre au groupe d’étude biblique à bord du bateau. Rocky n’avait jusqu’à présent jamais fait d’effort pour partager sa foi et Jeannette était soudain surprise par cette invitation. Il lui a alors raconté qu’au cours de sa dernière permission de congé passée aux Philippines, il avait suivi des études bibliques dans un collège durant six mois. Après avoir été extrêmement impressionné par Jeannette qui, fidèlement, visitait les bateaux pour parler de Jésus à tous les marins, Rocky avait à présent comme but de commencer un groupe de rencontres chrétiennes sur son bateau. A l’écoute de ce qu’il lui disait, Jeannette était comme éblouie. Pendant des années, quelqu’un l’avait observée en train d’accomplir sa tâche jour après jour, année après année, et finalement était sur le point de mettre en œuvre sa propre responsabilité. Rocky a été très encouragé dans sa nouvelle tâche et confirmé dans cette voie alors qu’un de ses compatriotes, vivant dans l’immoralité, s’est converti la toute première fois qu’il s’est joint au groupe! Quel magnifique encouragement! Une année plus tard, en 1989, Jeannette a rencontré Smiling Dan, un trompettiste américain jouant à bord d’un des bateaux de la compagnie Princess3. Lorsqu’elle s’est rendu compte qu’il était chrétien, elle a été très enthousiaste: «Loué soit Dieu, car maintenant nous pourrons aussi organiser une étude biblique sur votre bateau!» «Qu’entendez-vous par là?» a demandé le musicien qui était devenu chrétien tout récemment. «Moi, commencer un groupe d’étude biblique? Je ne pense pas que cela puisse marcher!» Il a poursuivi en lui faisant part des difficultés qu’il pourrait rencontrer par rapport aux horaires ou au petit nombre de personnes que cela pourrait intéresser. Faisant fi de ses remarques et en gardant sa même ligne de 3

Compagnie de navigation offrant des croisières. (N.d.E.)


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pensée, Jeannette lui a répondu: «La prochaine fois que je vous verrai, je vous demanderai comment cela a marché!» Bien que n’ayant pas une très grande expectative, Dan a tout de même affiché une note mentionnant la date et l’heure d’une première étude biblique et... l’équipage a répondu présent! Cette rencontre a été la première étude biblique organisée sur les bateaux de la compagnie Princess. Des années après, Dan enseigne toujours la Bible à bord des bateaux de cette compagnie. Lorsqu’il s’absente pour ses vacances, c’est une autre personne qui prend la relève. Ce principe de la relève et de la conduite des groupes est un sujet que le pasteur David a très à cœur. Il fait en sorte d’avoir toujours une plus large palette de responsables chrétiens pour maintenir la continuité des groupes bibliques sur les paquebots. L’alternance liée aux périodes de vacances associée au nombre toujours plus élargi de responsables permet d’éviter la focalisation d’une dénomination particulière au profit d’une autre et d’apporter ainsi un bon équilibre au sein des groupes. La formation au leadership se fait de façon naturelle au sein des groupes bibliques sur les bateaux, en particulier lorsque les groupes deviennent plus grands. Certains sont alors déjà préparés pour assumer la fonction de responsable. Un été, un bateau de croisière de moins grande dimension a accosté à Seward pour la première fois. Lorsque les marins sont arrivés à la Mission, David a été heureux de constater que plusieurs étaient chrétiens, mais cependant aucun groupe d’étude biblique n’était offert à bord de leur bateau. Il les a encouragés à en commencer un car il savait combien il était important pour eux qui étaient en proie à beaucoup de luttes de maintenir leur foi en se fortifiant mutuellement. David leur a alors donné tout un ensemble de documentation et supports chrétiens. Un des points forts pour David, cet été-là, a sans aucun doute été de voir les visages radieux et la joie qui se dégageait de tous ces marins, et particulièrement du responsable potentiel de futures études bibliques, au moment où il quittait la Mission avec dans les bras une «église dans


L’œuvre se poursuit

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une grande boîte». Toutes ces Bibles, ces cours bibliques par correspondance et cet ensemble d’études allaient à présent voguer au fil de l’eau à travers le monde...Tout ce matériel chrétien n’est utile que dans la mesure où une personne le partage et en fait bon usage; alors seulement l’œuvre se poursuit... L’objectif et la responsabilité de la Mission ne sont pas seulement d’aider les marins à commencer des groupes en leur fournissant du matériel mais également de prier pour eux durant la saison d’hiver. Dieu utilise la foi des gens, il n’a guère besoin d’une autre force que celle de la foi. Notre foi est le canal par lequel Dieu agit. On entend souvent dire que la «bonne odeur de Christ» ne circule pas depuis le haut du bateau vers le bas. En effet, elle monte depuis l’intérieur du bateau. La propagation de la «bonne odeur de Christ» peut aussi bien venir d’un technicien travaillant dans la salle des machines que d’un marin œuvrant sur le pont, d’un garçon d’étage, d’un aide-serveur ou d’un valet de chambre. Lorsqu’un groupe de chrétiens se réunit, non seulement cela leur permet de se reconnaître facilement entre eux mais leur présence stabilisatrice est aussi ressentie par les officiers et leurs supérieurs. Il est même arrivé que l’on demande à un valet de chambre de prêcher lors d’un service religieux pour les passagers, qu’un garçon d’étage soit demandé pour lire des portions de la Bible et que des membres d’équipage soient sollicités pour chanter. Juste après le grand désarroi qui a suivi le désastre du 11 septembre 2001, un capitaine de grand navire a été dépêché pour organiser un service spécial commémoratif pour les passagers, le dimanche suivant la catastrophe. Comme aucun responsable religieux n’était présent à bord, Georges, le plus âgé des responsables des groupes chrétiens, a été choisi pour conduire le service. Il était philippin et le typographe du bateau. Georges était connu de la Mission depuis des années, c’était un frère en Christ fidèle. Il a été extrêmement touché


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par cette demande, qu’il a acceptée avec fierté et humilité. La cérémonie s’est déroulée dans l’amphithéâtre principal du bateau et chaque siège était occupé. Au dire de chacun, tous les auditeurs ont été profondément émus. Chacun a pu apprécier le réconfort que cet homme, qui avait été choisi durant cette période tragique, leur a apporté. Georges a pris sa retraite un mois plus tard mais il n’a jamais oublié ces moments forts où le Seigneur l’a conduit à apporter l’amour, la compassion et la consolation du Christ à tous ces passagers et membres d’équipage...

Après avoir vogué de nombreuses années, un chrétien anglais, chef photographe et responsable de groupes chrétiens à bord des bateaux durant de nombreuses années, en avait assez de cette vie en mer. Il s’est engagé alors comme missionnaire au Japon. Bien qu’il ait désiré venir une fois en tant que bénévole à la Mission pour les marins, cela ne s’est pas concrétisé. Plus tard, il a fait savoir qu’il avait envoyé un don à la Mission. Ainsi, l’œuvre avait pu se poursuivre… David


Chapitre 20 Un sac à dos rempli de trésors

U

n autre jour avec un autre bateau... Il est neuf heures du matin. Jeannette, toujours aussi énergique, emballe ses affaires. Après le moment de recueillement et de prière à huit heures, les conversations vont bon train au sujet des contacts particuliers que l’équipe prévoit avec les membres d’équipage des bateaux arrivant ce jour-là. Il est aussi question des expériences vécues, généralement deux semaines auparavant, lors de la précédente visite de ce même équipage. Bien qu’on ne sache pas ce qui va se passer à l’avance, une chose est sûre, Dieu a le contrôle de toute la situation! «Jeannette, as-tu les affiches?» lui demande David alors qu’il est en train de se diriger à la hâte vers son fourgon. Une virée rapide jusqu’au quai lui permettra de savoir si l’équipage a déjà débarqué. Chaque jour, des affiches sont préparées pour être placées sur un mur de la cantine des équipages afin d’informer les marins de l’heure du culte ou des horaires des autres activités de la Mission comme par exemple l’organisation d’un match de football. Pendant qu’un bénévole met en route le four pour faire cuire des biscuits, Jeannette s’affaire du rez-de-chaussée au sous-sol pour y chercher des brochures et des Nouveaux Testaments dans diverses langues, dans l’espace réservé à la documentation. Parfois elle est amenée à effectuer des


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recherches particulières afin de procurer à un membre d’équipage une traduction spécifique de la Bible ou des cours bibliques par correspondance. Lorsque son sac à dos est rempli de tout ce matériel, elle est fin prête pour se rendre sur le bateau, s’attendant à une nouvelle journée richement bénie par les différents contacts qu’elle aura avec les marins. Les plus grands navires comptent jusqu’à quinze ponts et sont plus longs que trois terrains de football. De la proue à la poupe, ces bateaux mesurent environ 275 mètres. Jeannette sait fort bien que durant cette journée elle va encore marcher des kilomètres. Elle additionnera de multiples allers-retours sur les ponts des passagers et montera et descendra un grand nombre d’escaliers. Alors seulement, elle retournera à la Mission, le soir venu, juste avant que le portail du port ne se ferme, c’est-à-dire une demi-heure avant le départ du bateau. Jeannette est engagée dans ce travail parmi les marins depuis 1981 et, de ce fait, elle semble connaître chaque recoin de ces immenses navires. Durant la saison d’été, elle monte à bord presque chaque jour. La plupart des compagnies lui accordent cette autorisation, à quelques exceptions près. Lorsqu’elle n’obtient pas cette permission, elle se rend alors au terminal pour attendre l’équipage débarquant et leur distribuer des dépliants d’information sur les différents services qu’offre la Mission, ainsi que des brochures chrétiennes. Comme la plupart de ces bateaux de croisière comptent environ mille membres d’équipage, il n’est pas rare de voir régulièrement de nouveaux arrivants ayant embarqué à Vancouver au Canada rejoindre l’équipage. A leur arrivée à Seward, ils sont alors accueillis chaleureusement par Jeannette. «Bonjour, comment allez-vous? Arrivez-vous ici pour la première fois? Si vous désirez téléphoner, nous pouvons vous conduire à la Mission pour les marins où vous trouverez une cabine téléphonique disponible, ainsi que du café et des biscuits faits maison. Nous avons toutes sortes de cartes téléphoniques et nous pouvons voir laquelle est la plus adaptée pour vous. Le service de navette est gratuit!...» Après toutes ces années,


Un sac à dos rempli de trésors

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Jeannette est tout à fait à l’aise pour entrer en contact avec ces hommes et, au fil du temps, elle est connue de beaucoup d’entre eux. Chaque jour, le service de sécurité du terminal lui pose la même question: «Bonjour, Jeannette! Avez-vous votre carte d’identité?» Ensuite, son sac à dos passe aux rayons-X. Lorsque Jeannette monte à bord, un autre agent de sécurité lui demande de lui présenter une autre pièce d’identité. Elle montre alors son permis de conduire et appose sa signature dans un registre. Elle est ensuite prise en photo et un laissez-passer de visiteur lui est remis. Jeannette rencontre parfois quelques difficultés lorsqu’elle a affaire à un nouvel agent de sécurité ou à un nouveau capitaine, jusqu’à ce qu’il la laisse finalement monter à bord. Il est très rare qu’on lui refuse l’accès. Jeannette aime se rendre sur le pont pour discuter avec le capitaine. Elle trouve que ce type de contact est très important car elle sait que les hommes ayant de grandes responsabilités à bord peuvent aussi connaître des moments de solitude. Il lui arrive parfois de rester en relation avec ces capitaines pendant de nombreuses années. «Tu sais quoi! Un officier de marine vient de m’écrire pour me dire qu’il désire venir à Seward avec son épouse et visiter la Mission», dit un jour Jeannette. Après dix années d’existence, la Mission pour les marins de Seward allait être visitée par un invité de haut rang: le capitaine des capitaines! Ce contact avait débuté vingt ans auparavant, dans la cabine du capitaine, et une correspondance s’en était suivie durant treize années. Ce jour-là, après la visite de cet officier de marine, le message est passé rapidement parmi l’équipe de la Mission: les réactions de cet homme avaient été très positives envers les membres de la Mission. Il avait soutenu leur démarche et allait à présent encourager les membres d’équipage à y aller dès son retour à bord. Panique à bord! «Jeannette vient d’appeler, complètement paniquée, pour dire qu’elle a perdu tous ses laissez-passer de sécurité pour les jours suivants! C’est la panique. Il faut prier!»


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Comment cela était-il possible? Habituellement Jeannette garde ses permissions attachées à un cordon autour de son cou. Ce jour-là, comme d’habitude, elle avait passé tous les contrôles de sécurité et était montée à bord sans aucun problème. Plus tard, alors qu’elle était en train de parler sur le pont avec l’officier, elle s’est soudain rendu compte qu’elle avait perdu tous ses autres laissez-passer. Une vague de panique l’a alors traversée! Où était-elle allée ce matin-là? Elle a rapidement récapitulé dans sa tête son itinéraire: le pont, la cantine des officiers de sécurité, le bureau du capitaine, les escaliers et les couloirs et en dernier lieu l’ascenseur... Elle a alors appelé la Mission: «S’il vous plaît, priez! Où doisje chercher pour les retrouver? J’ai déjà refait deux fois mon itinéraire de ce matin, mais rien...» Elle avait averti l’agent de sécurité et était encore une fois retournée sur ses pas, montant et descendant les escaliers. Pour finir, elle est encore retournée vers l’agent et, ne sachant plus quoi faire, elle lui a demandé si par hasard quelqu’un les lui aurait rapportés... Et oui! C’est en effet ce qui était arrivé! Elle n’a pu que louer Dieu pour ce miracle! Sans ses permissions, elle aurait été interdite d’accès à bord des bateaux durant les trois derniers jours de la saison... Le Seigneur avait bel et bien le contrôle de toute la situation! Durant la pause de midi, Jeannette mange habituellement à la cantine avec les marins. Elle va d’une table à l’autre, s’assied, discute, partage ce qu’elle vit et lorsque l’occasion se présente lors d’une conversation, elle distribue de la littérature chrétienne qu’elle transporte avec elle dans son sac à dos! Jeannette n’a pas de «bureau» à bord des bateaux et les conversations ou entretiens qu’elle a avec les équipages peuvent se faire dans des endroits bien différents suivant les circonstances. Cela peut être parfois sur le pont près des amarres où, dans le calme et la fraîcheur du matin, elle discute avec un marin. Cela peut être dans n’importe quel autre endroit du bateau; on la trouve parfois assise sur le sol au milieu d’un couloir ou dans un escalier de service, parlant avec quelqu’un qui ne peut pas quitter le bateau pour des raisons d’horaire de


Un sac à dos rempli de trésors

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travail. Il arrive que des marins ne puissent débarquer qu’une seule fois par mois à Seward ou même pas du tout. Ces marins aiment alors parler avec une personne de l’extérieur, cela change de leurs conversations habituelles entre collègues de travail. Les échanges avec Jeannette aboutissent très souvent sur des sujets de nature relationnelle ou spirituelle. Ruby faisait partie de ces hommes; il n’avait jamais débarqué à Seward durant tout l’été à cause du fait qu’il devait assurer la permanence à bord du bateau. Jeannette lui a demandé pourquoi il n’avait pas été à terre depuis de longs mois alors qu’il en avait tellement envie et qu’il en aurait eu terriblement besoin. Il lui a expliqué qu’il devait toujours remplacer quelqu’un lors des heures libres qui lui étaient planifiées. Jeannette, à la fois étonnée et chagrinée de ce qu’elle venait d’entendre, s’est alors rendue vers le responsable du personnel du capitaine afin d’exposer cette situation. Grâce à son intervention, une vérification des horaires de ce marin a été faite et il s’est avéré que des erreurs avaient été commises lors de la planification de son emploi du temps. Ruby ignorait que Jeannette était intervenue et il s’est demandé ce qu’on lui voulait lorsqu’il a été convoqué au bureau de l’administrateur. Quelle n’a pas été sa surprise lorsqu’il a reçu des excuses de la part de l’état-major du capitaine concernant les erreurs commises et qu’on lui a offert une journée entière de congé à la prochaine et toute dernière escale de l’été, à Seward! Non seulement il ne serait pas de service lorsque leur bateau ferait escale la prochaine fois dans ce port, mais il aurait droit à une journée complète de temps libre. Ruby n’en croyait pas ses oreilles. Lorsque son jour de congé est arrivé, il a été le premier à arriver à la Mission. Jeannette, toute surprise en le voyant entrer, lui a demandé ce qui s’était passé. Ruby le lui a alors expliqué. Il était tellement content d’être là que, le soir, il a été le dernier à quitter les lieux; tous les autres étaient déjà retournés à bord. Il a profité de chaque instant de cette journée; il a pu flâner ici ou là en toute tranquillité, il s’est assis un moment dans la salle


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de musique en toute quiétude et plus tard il s’est joint tout heureux au groupe pour un moment de culte et de chants à la gloire de Dieu. Combien c’était bon, pour une fois, d’être loin du bateau! Je sais que vous êtes très gentil, vous m’avez enseigné, vous m’avez conseillé puis vous m’avez consacré du temps avec les autres. Pourriez-vous m’apprendre plus de choses sur Jésus? Je ne connaissais rien de lui avant de venir ici. Indonésie


Chapitre 21 Joe, l’homme volant

D

es nuages et encore des nuages, des nuages de tous les côtés! On ne voit aucune montagne tout autour de Seward! Joe avait prévu ce jour-là de venir d’Anchorage avec son avion pour offrir son aide à la Mission. Deux paquebots allaient accoster dans la Baie de la Résurrection et l’équipe sur place aurait certainement beaucoup de travail. Lorsqu’il fait beau, les marins aiment aller à pied de leur bateau jusqu’à la Mission en profitant de l’air frais et de la vue époustouflante qu’offrent les montagnes qui encerclent la baie. Mais ce jour-là, la vue était complètement bouchée; la pluie était tombée toute la journée. Les marins allaient donc être véhiculés avec la camionnette qui ferait la navette entre le quai et la Mission. Joe était le conducteur et il savait qu’on aurait spécialement besoin de lui, mais la visibilité était si mauvaise ce jour-là qu’il ne pouvait pas envisager de prendre son avion pour se rendre à Seward. Durant l’été, Joe fait de fréquents allers-retours d’Anchorage à Seward en survolant les montagnes à bord de son petit Cessna; le vol dure à peine une heure. Avant de décoller d’Anchorage, il passe toujours un appel téléphonique au service automatique de la météo de Seward afin de se renseigner sur le temps qu’il fait sur place. Généralement, les conditions climatiques de Seward diffèrent totalement de celles de l’autre côté de la chaîne montagneuse de Chugach.


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Lors d’un de ces vols, Joe dit parfois à un passager: «Regardez là-bas! Vous voyez ces petits points blancs à flanc de coteau? Ce sont des mouflons de Dall1.» Après avoir survolé le bras de mer Turnagain Arm2, le paysage est fait d’innombrables lacs et rivières et d’impressionnants glaciers. A chaque trajet, Joe demeure émerveillé par la beauté majestueuse de ces paysages. Les pilotes savent qu’il faut rester éloigné des nuages qui surplombent le sommet des montagnes. Joe les connaît bien et peut les désigner par leur nom: «On appelle ceux-là cumulus granite, ce qui signifie ‘nuages remplis de cailloux’.» Chaque fois qu’il fait face à un nuage, il doit rapidement décider de son itinéraire: le contourner à gauche, à droite ou juste au-dessus! L’aéroport de Seward ne possédant pas de radar, les pilotes qui survolent cette région avec de petits avions sont toujours confrontés aux problèmes posés par les nuages. Ne pouvant se fier à aucun instrument, il est primordial pour eux de compter uniquement sur une bonne visibilité. Joe raconte parfois que, du premier au dernier livre de la Bible, il est fait mention de nuages ou de nuée. Il explique que souvent ces nuages font référence à la présence de Dieu. Lorsque les Israélites ont quitté l’Egypte, Dieu les a protégés et aidés avec un nuage3. De même, à la fin des temps, le Seigneur Jésus reviendra sur un nuage4. Lorsqu’il apparaissait dans un nuage, Dieu, qui est le début et la fin de toutes choses, montrait souvent sa présence merveilleuse et réconfortante. Pour se rendre en avion à Seward, il faut survoler de nombreux sommets tels que le Mont Ascension (la plus haute montagne visible) ainsi que le Mont Résurrection, le dernier sommet que Joe survole avant d’appeler la Mission pour 1

Le mouflon de Dall est une espèce que l’on ne trouve que dans le nord-ouest du Canada et en Alaska. (N.d.E.) 2 Turnagain Arm est un des deux bras de mer de chaque côté de la ville d’Anchorage, faisant partie d’un large estuaire, nommé le Golfe de Cook. (N.d.E.) 3

Exode 14.

4

Apocalypse 1.7.


Joe, l’homme volant

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les avertir de son arrivée imminente. L’équipe peut alors se préparer pour venir le chercher au petit aérodrome de Seward. Pour Joe, les noms de tous ces sommets lui donnent souvent des occasions de partager l’Evangile5. De nombreuses missions utilisent souvent de petits avions dans différentes régions du monde comme les pays africains, la Papouasie ou la Nouvelle Guinée... Le petit avion de Joe entre dans cette catégorie des appareils missionnaires! Joe est un employé bénévole qui a le titre de «responsable technique» de la Mission pour les marins. Avec son Cessna, il peut transporter sa femme Jeannette et de nombreux passagers, mais aussi du matériel d’approvisionnement. Il transporte parfois dans son avion des choses aussi variées que des boîtes de pâte à biscuits, des guitares, des ordinateurs ou tout matériel utile à la Mission; et tout cela dans le but ultime de partager l’amour de Dieu. Joe est également un expert en informatique. La Mission a commencé son premier cybercafé à Seward grâce à Joe qui a trouvé des ordinateurs d’occasion qu’il a connectés ensemble et placés dans une petite salle réservée pour envoyer et recevoir des courriels. Lorsque des problèmes d’ordre informatique apparaissent et que Joe n’est pas à la Mission, on lui téléphone pour recevoir son aide, et cela peu importe où il se trouve, à son bureau d’Anchorage ou à Seattle. Chaque fois il nous conseille avec gentillesse sans compter son temps! Etant également engagé dans le Ministère International des Gédéons6, Joe prend parfois une ligne régulière vers Seattle pour participer à une rencontre ou un comité de ce ministère.

5 6

Job 37.16.

L’association internationale des Gédéons a été fondée en 1899 aux Etats Unis. Elle constitue la plus ancienne organisation d’hommes d’affaires et de professionnels chrétiens. La distribution gratuite de Bibles se fait dans les hôpitaux, dans les écoles, les universités, les prisons, les hôtels, les établissements pour personnes âgées et même dans les postes de police. Les Gédéons approvisionnent également la Mission de Seward en Bibles. www.gideons.ch (N.d.E.)


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Quelquefois, à la Mission, on peut entendre Joe accompagner avec son trombone les musiciens d’un équipage. Ils ont toujours beaucoup de plaisir à jouer ensemble. Pour les marins, les contacts amicaux dans un tel environnement de détente sont toujours les bienvenus; ils sont très importants pour eux et très souvent ils débouchent sur des amitiés sincères qui durent. Un jour, Joe a entonné l’air de «When the Saints Go Marching In», accompagné d’un autre tromboniste. On pouvait même entendre ce gospel loin hors des murs du bâtiment de la Mission. Durant toutes ces années, combien de «saints» ont-ils commencé à croire en Jésus-Christ lors de leur première venue dans ce petit bâtiment situé dans la baie de la Résurrection? ...Il s’éleva dans les airs pendant qu’ils le regardaient et une nuée le cacha à leurs yeux. Et comme ils avaient les regards fixés vers le ciel pendant qu’il s’en allait, deux hommes habillés de blanc leur apparurent et dirent: «Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous à regarder le ciel? Ce Jésus qui a été enlevé au ciel du milieu de vous reviendra de la même manière que vous l’avez vu aller au ciel.» Actes 1.9-11

La Mission par voie routière et aérienne…


Chapitre 22 Des aides venues de Corée

«A

lléluia!» C’est l’expression favorite de Monsieur Ham. Ce chrétien est toujours joyeux et reconnaissant, en dépit du fait que lui et sa femme vivent ici, en Alaska, depuis vingt-cinq ans, très loin de leurs familles restées en Corée. Durant leurs premières années en Alaska, le couple Ham avait décidé de prendre des cours d’anglais. Jeannette enseignait justement dans des classes ayant choisi l’anglais comme deuxième langue (ESL)1; elle leur a parlé de la Mission pour les marins. Afin de parfaire son anglais, Monsieur Ham aimait accompagner Jeannette lorsqu’elle faisait ses visites sur les paquebots à quai dans le port d’Anchorage. Jeannette l’a informé qu’un bateau coréen transportant du charbon allait bientôt accoster à Seward. Monsieur et Madame Ham étaient impatients de monter à bord de ce bateau. Durant l’année, David, le directeur de la Mission, n’hésite pas à les appeler chaque fois qu’un bateau coréen accoste. Le couple monte alors à bord et profite du voyage d’Anchorage à Seward pour établir des contacts avec l’équipage coréen. Lorsqu’ils arrivent à Seward, les Ham passent généralement la nuit à la Mission; parfois aussi, ils restent à bord et prêchent l’Evangile à l’équipage coréen au moment du temps de culte en soirée. 1

ESL: English as Second Language (anglais comme seconde langue).


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Monsieur Ham est peintre en bâtiment. Il a mis bénévolement ses capacités au service de la Mission en participant entre autres à la réfection des murs intérieurs. Un jour, il a été victime d’un accident alors qu’il peignait les murs de la maison d’un ami habitant à Anchorage; il est tombé de l’échelle et s’est cassé les deux chevilles. Cet accident ne lui a dès lors plus permis de se déplacer normalement; il pouvait éventuellement se déplacer en glissant avec difficulté sur ses genoux. Il n’a cependant pas cédé au découragement et, malgré cet accident, il a poursuivi son ministère auprès des marins coréens en visite à Seward. Durant le temps de sa convalescence, il s’est fait porter jusque dans la voiture puis à bord du bateau. Il a pu ainsi continuer à encourager ses compatriotes en leur prêchant la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. A la fin de cet été-là, le bateau coréen est à nouveau revenu dans le port. Le couple Ham désirait bien sûr monter à bord, mais ce jour-là, la mer était à ce point déchaînée qu’il leur était impossible d’embarquer à partir du quai. Ils sont alors montés à bord d’un remorqueur qui les a conduits de l’autre côté du bateau. De là, ils ont pu accéder au pont en empruntant une échelle de corde! «C’est bien trop dangereux et les vagues sont beaucoup trop hautes!» a dit le commandant à Jeannette. Mais les Ham ne souhaitaient nullement renoncer à leur projet; ils étaient certains que Jésus les protégerait! «Etes-vous sûrs de vouloir faire cela?» leur a demandé le conducteur de la camionnette alors qu’il les conduisait vers le quai. «Oui, nous voulons y aller!» ont insisté les Ham. A leur sortie de voiture, le vent soufflait si violemment que la portière a même presque failli s’arracher! Alors que les Ham se préparaient à monter à bord et en voyant la bataille que livrait le remorqueur à l’assaut des vagues et les coups de vent violents qui faisaient balancer l’échelle de corde, les marins se sont mis à crier: «Attention! C’est vraiment dangereux!» Lorsqu’ils ont vu cet homme d’un certain âge se hisser jusqu’au pont, ils ont presqu’été sur le


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point d’applaudir. Ils étaient vraiment admiratifs devant ce couple qui venait de prendre de gros risques. Leur exploit a eu pour conséquence une ouverture naturelle qui a par la suite facilité les contacts. «Le charbon que vous transportez jusqu’en Corée va-til servir à alimenter en énergie la centrale électrique?» ont demandé les Ham à l’équipage. «En fait, d’une certaine manière, vous êtes indirectement des transporteurs de lumière, non?» Monsieur Ham en a profité pour leur dire que lui et son épouse étaient venus à bord pour une raison du même ordre: «Nous aussi, nous sommes des porteurs de lumière... Une lumière qui a son origine dans la Bible!» Ainsi, durant de nombreuses années, ils ont fidèlement poursuivi leur ministère de visite auprès des marins. Lors d’une de leurs visites, un homme ne voulait rien entendre de ce qu’ils disaient, ni la première fois, ni la fois suivante. Au cours de cette deuxième visite, ils ont mentionné que Madame Ham se rendrait en Corée quelques semaines plus tard. Elle se trouverait là-bas le jour où le bateau arriverait dans le port coréen pour livrer son charbon. Elle comptait se rendre à nouveau sur le bateau et se réjouissait déjà de revoir tous ces gens qui étaient devenus ses amis. Elle se trouvait en ville le jour où le bateau est arrivé en Corée. Elle a appelé le pont du bateau afin de fixer une rencontre mais l’équipage était trop affairé pour la voir ce jour-là. Le jour suivant elle a appelé de nouveau mais la situation était la même. Elle a décidé de rester une nuit de plus à l’hôtel et, pour la troisième fois, a demandé à voir l’équipage. Elle a finalement obtenu l’accord; elle en a été très reconnaissante car le but ultime de son voyage était moins de rendre visite à sa famille ou à ses connaissances que de revoir ces marins. Un des premiers marins qui l’attendait sur le pont était justement l’homme qui avait rejeté tout ce qu’elle lui avait dit à Seward. A présent, c’était différent. Il était tellement content de la voir et de discuter avec elle que Madame Ham en était complètement stupéfaite! Etait-ce vraiment ce même marin


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rencontré en Alaska qui avait refusé tout contact durant des années? En tant que porteurs de lumière, ce couple coréen avait vraiment réussi à briser les barrières... Ils avaient bravé la tempête et attendu patiemment en Corée. Ces marins avaient pu observer la force des Ham ainsi que leur engagement et cela les avait beaucoup impressionnés. Leur persévérance et leur ténacité avaient permis d’ouvrir le cœur de ces hommes, créant des occasions pour partager l’Evangile, distribuer des Bibles ainsi que toutes autres sortes de documents en langue coréenne. Des cours bibliques ont ensuite permis de maintenir un suivi. Répandre l’Evangile n’est pas toujours facile mais la fidélité est toujours récompensée. Jésus-Christ lui-même est fidèle et patient. Il dit: «Acceptez mes exigences et laissez-vous instruire par moi, car je suis doux et humble de cœur.»2 Cela a vraiment été un privilège de rencontrer des capitaines coréens chrétiens, que ce soit dans le port d’Anchorage ou dans celui de Seward! Ces capitaines étaient dévoués envers leurs équipages et assumaient la responsabilité d’être aussi auprès d’eux des conducteurs spirituels. Deux capitaines prévoyaient de travailler en tant que pasteurs lorsqu’ils seraient à la retraite. Mais dès à présent, ils tendaient la main, évangélisaient et faisaient des disciples parmi leurs membres d’équipage qui venaient de divers pays. La Mission pour les marins est heureuse de faire partie de ce ministère multiculturel hors du commun. Elle a aussi fourni à ces deux capitaines du matériel ainsi que des conseils bibliques qui ont pu se propager une fois de plus tout autour du monde par la grâce de Dieu.

2

Matthieu 11.29.


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Premièrement, j’ai grandement apprécié votre gentillesse envers moi et mon équipage lors de notre séjour à Seward en Alaska. Mais par dessus tout, je voudrais vous remercier vivement de m’avoir remis un cadeau si précieux: la Sainte Bible, et de m’avoir prêté des vidéos de toutes sortes parlant de la Bonne Nouvelle de Jésus. Lorsque j’ai reçu ma Bible, je l’ai lue quotidiennement après avoir prié mon Dieu de m’aider à comprendre toujours plus ses intentions les plus profondes envers moi. Corée



Chapitre 23 Le dessin inspiré

L

a première fois que les employés de la Mission ont fait connaissance avec Monsieur M., c’était à bord d’un bateau charbonnier. Cette compagnie navale comptait douze Coréens qui occupaient un poste d’autorité et six Birmans ayant des tâches plus modestes. Monsieur M. était le responsable du groupe des Birmans. Chaque fois que David parlait de Jésus avec ces hommes, c’était Monsieur M. qui posait les questions et essayait d’expliquer les réponses à ses compatriotes. Ayant été élevé dans un pays bouddhiste, les marins trouvaient très difficile de comprendre le concept d’un Dieu qui s’incarne et qui meurt pour leurs péchés. Monsieur M. était aussi bouddhiste mais marié à une femme catholique. De ce fait, les enseignements chrétiens lui étaient un peu plus familiers. Mais il y avait plus que cela dans sa compréhension de ces vérités. Il semblait saisir de façon innée l’essentiel du message. Cela se traduisait par sa fascination à propos de la mort du Christ sur la croix. Il posait beaucoup de questions: «Qui étaient les hommes que l’on a crucifiés à côté de Jésus? Qu’avaient-ils fait? Qu’avait dit à Jésus le brigand qui irait au paradis?» Monsieur M. avait une prestance et un physique qui inspiraient le respect parmi ses compatriotes. Il faisait preuve aussi d’une vive intelligence. Derrière l’apparente saleté


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inhérente à son travail transparaissaient une sagesse et des talents cachés. David n’a pas été surpris le jour où il a remarqué, accroché dans la salle de loisirs, un dessin au crayon signé de Monsieur M. et représentant une jeune femme. Ce dessin était très beau. Lorsque David lui en a parlé, Monsieur M. a répondu qu’il désirait justement faire un dessin pour la Mission et qu’il le lui donnerait à son retour, le mois suivant. Au moment où on lui a offert le dessin, David n’aurait jamais imaginé, même dans ses rêves les plus fous, recevoir quelque chose d’aussi magnifique que cette représentation en grand format (60 x 90 cm) de la mort de Jésus. L’inspiration que traduisait son dessin révélait la grande profondeur d’âme de cet homme originaire de Birmanie. Durant l’été suivant, ce dessin, qui avait été accroché sur le mur de la pièce principale de la Mission, a suscité de nombreux commentaires. Parmi ceux-ci, aucun n’a été plus remarquable que celui d’un musicien juif nommé Abel et originaire de la République Tchèque. Il n’avait jamais entendu parler de l’existence de la Mission jusqu’au jour où, comme «par enchantement», il a été conduit à ce lieu que les marins surnomment «le foyer loin de leur foyer». Assis à une table en train de boire son café, il a commencé à expliquer l’incroyable succession d’événements l’ayant emmené jusqu’en Alaska, puis à la Mission. Au moment où le dessin de Monsieur M. a attiré son attention, il s’est assis en face à la fois extasié et stupéfait pour le contempler en détail. Un volontaire de la Mission savait qu’Abel n’était pas un Juif pratiquant et qu’il ne connaissait presque rien concernant Jésus, Dieu ou la Bible. Abel, tout en continuant à observer attentivement le dessin, a demandé à un membre de l’équipe de la Mission s’il s’y connaissait en matière d’art. A ce moment-là, personne ne se doutait de ce qu’Abel pensait à propos de la qualité de ce dessin. Il s’en est alors approché avec respect, a gardé un moment le silence, puis il a commencé à expliquer ce qu’il discernait dans cette œuvre. Il était sidéré de voir combien Jésus représentait toute la perfection de Dieu: ses yeux ne regardaient pas seulement la


Le dessin inspiré

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lumière, il était lui-même la source de la lumière, il la reflétait. Puis il a continué à partager ses pensées en parlant des autres éléments du dessin: Satan et l’autre homme qui, a-t-il expliqué, était la représentation de toute l’humanité qui se trouvait dans les ténèbres. Satan tenait la race humaine captive... Abel a ainsi continué avec une telle précision et vérité scripturaires qu’il était difficile pour les bénévoles présents de croire qu’il n’avait jamais lu le Nouveau Testament! Ils sont restés là à l’écouter, tout à fait étonnés. Lorsqu’Abel a terminé ses explications, on lui a demandé comment il était possible qu’un Juif puisse décrire avec une telle exactitude un dessin réalisé par un bouddhiste, tous deux n’ayant qu’une connaissance très limitée du sujet... Abel s’est alors exclamé en riant: «Cela doit venir de Dieu!» Je sais que pour toute chose il y a une raison; et peut-être que ces deux semaines de visite n’étaient prévues que pour vous avoir rencontré durant quinze minutes... Je vous remercie de prier pour moi. C’était comme si vous étiez un ange envoyé par Dieu, pour que je puisse prendre un nouveau départ et consacrer davantage ma vie à Dieu. Kenya

The Death of Jesus (La Mort de Jésus), dessin de Maung Maung Lwn, 2002.



Chapitre 24 Conseil conjugal

C

’était un de ces jours où il régnait une certaine effervescence à la Mission. Deux bateaux de croisière étaient arrivés dans le port et de nombreux marins étaient partout présents dans les locaux de la Mission. Il y avait une liste d’attente pour accéder au poste téléphonique; des sons de guitare provenaient du salon réservé à la musique et les rires des joueurs de pingpong montaient du sous-sol. «Y a-t-il un endroit où l’on pourrait discuter tranquillement?» Sadjoe avait besoin de conseils et il désirait vivement faire part de ses problèmes. Il aimait sa femme de tout son cœur mais elle lui semblait si loin de lui... Il avait l’impression que quelque chose n’allait pas en ce moment. Elle ne répondait plus à ses courriels et il ne parvenait pas non plus à la joindre par téléphone. Il désirait aussi avoir des nouvelles de ses enfants. Sadjoe aurait bien téléphoné à sa mère pour avoir des nouvelles de sa famille, mais elle ne s’entendait pas bien avec sa femme. Il a alors crié à Dieu... Que pouvait-il faire d’autre? Sadjoe s’est senti soulagé lorsqu’une des bénévoles a pris enfin un peu de temps avec lui. Serait-elle prête à l’écouter? Bien sûr, elle était tout à fait disposée à l’entendre, même si elle savait qu’elle devait se rendre disponible pour une tâche particulière en cas de besoin. Ils se sont retirés dans un coin


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tranquille réservé aux discussions privées. Heureusement, l’endroit était libre. Pendant des heures, le marin a parlé de ses soucis... Des conseils lui ont été donnés, des passages de la Bible ont été lus, et la rencontre s’est terminée par un moment de prière avant que le marin ne reparte sur son bateau. Ils avaient convenu que lorsqu’il serait de retour à Seward plusieurs semaines après, ils pourraient faire le point sur sa situation. Après plusieurs mois, Sadjoe a pris la décision de retourner chez lui plus tôt qu’il ne l’avait prévu. Il a pressenti qu’il devait rentrer immédiatement chez lui pour préserver l’unité de sa famille car le risque de rupture était réel! Ce genre de situation est assez fréquent parmi les marins. La solitude d’un des conjoints conduit souvent à l’adultère. Un jour, alors qu’il se promenait à Seward, un bénévole de la Mission a aperçu un marin chrétien, jeune marié, en train d’enlacer une jeune femme. Son épouse était bien loin en Asie. En observant cette triste scène, il s’est dit: «Non, ce n’est pas vrai!» Mais c’était bien le cas; ce jeune marin n’avait pas pu résister à la tentation! Avant cet événement, cet homme aimait se rendre régulièrement à la Mission et participer aux études bibliques à bord du bateau. Mais depuis son choix qu’il savait mauvais, il ne venait plus guère à la Mission, sauf une fois, très brièvement, pour passer un coup de fil et repartir aussitôt. Chacun ayant remarqué la disparition de sa joie, la Mission a alors décidé de lui écrire pour lui apporter conseils et soutien. Qu’ils soient chrétiens ou non, tous les marins éprouvent des difficultés à rester fidèles à leur épouse durant les longs mois de solitude et de vide affectif qu’ils passent en mer. En l’absence de relations conjugales, les pressions et les attaques sont fréquentes. Naviguer sur ces grands bateaux de croisière n’est pas seulement synonyme de paillettes, de beaux uniformes, de somptueux buffets ou de magnifiques paysages à découvrir tout autour du monde... Le Seigneur voit au-delà des apparences; il aime prendre soin de chaque personne


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individuellement, les passagers comme les équipages. Chaque être humain a ses propres responsabilités envers Dieu et envers sa propre famille. Dieu voit chacun dans ses moments de solitude et de tristesse. Il nous entend lorsque nous crions à lui pour implorer son aide. Il répondra et pardonnera lorsqu’un péché est confessé. Nombreuses sont les fois où ces marins ont reçu le pardon de leurs femmes une fois de retour chez eux et après avoir confessé leur adultère. C’est uniquement par la grâce de Dieu qu’un nouveau départ est possible! Un jour, Luis, originaire du Guatemala venait de terminer une conversation téléphonique avec sa parenté. Il a ensuite demandé en espagnol à un bénévole: «S’il vous plaît, avez-vous du temps pour moi? Je vous avais fait part de mes difficultés avec ma femme, après vingt ans de mariage. Elle a maintenant un autre homme dans sa vie et des membres de ma famille me conseillent de me séparer d’elle. Est-ce mauvais de ne pas vouloir suivre leurs conseils et de continuer d’essayer de garder le contact avec elle? J’ai tant prié pour cela... J’ai besoin de vos conseils!» C’est le genre de question à laquelle il est difficile de répondre! Le bénévole lui a demandé s’il était prêt à pardonner à sa femme. Ils ont alors lu dans une Bible en espagnol les passages où Jésus mentionne à ses disciples le nombre de fois où ils devaient pardonner à quelqu’un1. Après la lecture, Luis a dit qu’il était d’accord de pardonner à sa femme, mais il ne savait pas comment agir envers sa parenté. Après une longue heure de conversation, il a déclaré qu’il téléphonerait à son épouse le jour même pour voir comment donner suite à cette situation. Toutes ces dernières semaines, Luis avait paru affligé. Aucune joie ne pouvait se lire sur son visage. Avant qu’il n’appelle chez lui au Guatemala, le bénévole a prié avec lui. Après plusieurs essais, il a finalement réussi à atteindre sa femme par téléphone et ils ont parlé pendant plus d’une heure. Durant la conversation téléphonique, plusieurs bénévoles se 1

Luc 17.4 et Matthieu 18.21-22.


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sont réunis afin de prier pour cette situation, implorant le Seigneur de remplir cet homme de sa grâce durant cet appel. Lorsque Luis est finalement sorti de la cabine téléphonique, il a annoncé presque en criant: «Merci, je n’oublierai jamais cette journée! Nous nous sommes pardonnés l’un l’autre et nous désirons maintenant repartir à zéro... Je lui ai promis, à partir de maintenant, de lui téléphoner de nouveau chaque semaine pour que nous puissions reconstruire notre relation sur de nouvelles bases jusqu’à ce que je rentre après Noël. Je vous enverrai une photo quand je serai de retour à la maison!» Ces couples ont besoin de prières continuelles... Le nombre de marins ayant traversé les mêmes difficultés est considérable. On retrouve le même processus lié à l’éloignement, la solitude et les tentations qui y sont associées. Mais cette histoire nous montre qu’il peut y avoir une heureuse fin s’il y a un profond désir de pardon venant du Seigneur. Conseils et prières sont la seule façon dont la Mission pour les marins peut venir en aide à ces personnes. Ils ont besoin, dans ce service, de beaucoup de sagesse. J’ai bien reçu la lettre que vous m’avez envoyée. Je remercie le Seigneur pour votre désir de continuer ce travail pour Dieu, en fortifiant la vie spirituelle de beaucoup de personnes et en leur montrant la grâce de Dieu, comme vous l’avez fait pour moi. Colombie


Chapitre 25 Un abri pour l’hiver

E

n ce moment, Seward est une ville tranquille, sombre et humide. Aucune montagne aux alentours n’est visible. Rien à comparer avec la période estivale où, il y a quelques semaines encore, les bateaux de croisière, les touristes et les camping-cars faisaient partie du paysage. Andrei et Sergi marchaient sous la pluie battante. Ils avaient travaillé comme pêcheurs durant l’été dans la région de Kodiak et ils venaient d’arriver à Seward par le ferry, avec la ferme intention de rejoindre l’aéroport d’Anchorage le plus rapidement possible. Ils se réjouissaient maintenant de retourner en Slovaquie. Mais, étant donné que le train n’était plus en service et que le bus pour Anchorage partait très tôt chaque matin, ces deux compagnons étaient obligés de passer une nuit à Seward. Chargés de leurs gros sacs à dos trempés, ils marchaient en direction du centre ville pour rejoindre l’hôtel où ils espéraient loger. Malheureusement, cet hôtel était déjà fermé. Ils ignoraient que la plupart des lieux d’hébergement ferment aussitôt la saison touristique terminée. Sur le chemin, Andrei et Sergi sont passés devant la Mission pour les marins. Etant donné qu’il y avait de la lumière à l’intérieur du bâtiment, ils ont pensé que quelqu’un pourrait peut-être leur venir en aide. Trempés et découragés, ils ont aperçu de loin une note sur la porte d’entrée. Ils ont alors


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soupiré, exténués: «Oh non, s’il vous plaît, faites que cet endroit ne soit pas aussi fermé!» En s’approchant, ils ont constaté avec bonheur que la note leur annonçait le contraire: c’était une invitation. Il était écrit: «Entrez s’il vous plaît, servez-vous un café ou une soupe. Je suis de retour dans une minute.» Andrei et Sergi tout heureux sont entrés dans cet endroit confortable où une bonne odeur de soupe mijotée remplissait la pièce. Peu de temps après, David, le directeur de la Mission, est revenu et les a salués chaleureusement: «Enlevez vos habits mouillés et faites comme chez vous!» leur a dit David alors que les deux voyageurs lui racontaient leur histoire. «Prenez un peu de café et de la soupe et pendant ce temps je vais voir ce que je peux faire pour vous!» Après un moment, David leur a offert un abri en leur précisant qu’ils pouvaient dormir à la Mission sans frais. Au cours de leurs échanges, David leur a offert une copie du film «Jésus» dans leur langue maternelle, en espérant qu’ils pourraient le visionner durant leur séjour. Un des deux marins avait beaucoup de questions à propos du christianisme, aussi les trois hommes se sont-ils lancés dans une longue discussion. David a sorti de l’étagère un Nouveau Testament écrit en slovaque et le leur a donné. Ainsi, durant le visionnement du film «Jésus», ils ont pu lire dans leur langue maternelle les versets mentionnés. Le lendemain matin, David a réveillé les deux hommes et leur a offert le petit déjeuner. Avant de les amener à la gare routière, il leur a donné le petit livret intitulé Questions fondamentales en langue slovaque. C’est avec joie et reconnaissance qu’ils l’ont accepté et ils se sont exclamés: «Merci, merci beaucoup pour tout!» Une fois de plus, David a expliqué que c’était l’amour de Jésus qui l’avait poussé à leur offrir l’hospitalité. Ces hommes étaient vraiment étonnés et stupéfaits et ont demandé à échanger leurs adresses électroniques avec David. La Mission pour les marins offre son aide essentiellement à deux groupes principaux: durant l’été aux marins des bateaux de croisière visitant Seward et durant l’hiver aux équipages des


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bateaux charbonniers venant frapper à leur porte. De plus, la maison est ouverte, bien sûr, à tous ceux qui ont besoin d’aide; les possibilités sont diverses. Leur intervention pour partager l’amour de Jésus est active et à disposition douze mois sur douze! Durant l’hiver, toutes sortes de personnes arrivent dans ce lieu simplement à la vue de la pancarte indiquant «Mission». Certains viennent y chercher de l’aide. La population locale participe à ce service en offrant leur contribution sous forme de dons en nourriture, en habits et même parfois en meubles. S’ils ne trouvent personne pour les réceptionner, ils peuvent les déposer dans un grand container situé à l’entrée. Parfois, l’établissement pénitentiaire, le supermarché ou la boulangerie nous soutiennent avec des dons et de la nourriture à partager. Toute la communauté sait que la Mission pour les marins dispose de la seule banque alimentaire de Seward! Elle offre des colis de nourriture aux familles venant d’emménager en ville, elle les aide à trouver du travail et offre également un pied-à-terre aux pêcheurs sans abri. Le jour où Tommy, nouvellement arrivé à Seward, est entré à la Mission, il était dans un triste état. Lorsqu’il a entendu dire qu’il pourrait rester là jusqu’à ce qu’il trouve du travail et qu’il pourrait laver ses vêtements, prendre une douche et recevoir un repas chaud, il s’est exclamé: «Il existe vraiment un Dieu!» Après trois nuits, il a réussi à trouver un travail pour aider à remettre en état un navire sur lequel il a ensuite navigué. Jim était un pêcheur originaire de la région. Il souffrait de problèmes liés à l’alcool et n’avait plus travaillé depuis deux ans. Il vivait généralement à l’arrière de son fourgon, sauf lorsqu’il faisait trop froid. C’est à ce moment-là qu’il est arrivé à la Mission pour se réchauffer et obtenir quelque chose à manger. David a alors déployé des efforts considérables en se déplaçant avec Jim dans les alentours; efforts récompensés car Jim a finalement signé un contrat pour un travail en mer. En 1993, durant le premier hiver où la Mission a commencé ses activités, quatre hommes ayant marché dans la neige


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fondue sans être chaussés de bottes ont frappé à la porte de la Mission. La pluie mélangée à la neige avait complètement trempé ces hommes. David leur a proposé de rester pour la nuit, car ils venaient d’arriver en Alaska et n’avaient pas encore trouvé où aller. En ce temps-là, la famille Hawkins, c’est-à-dire David, sa femme et leur petite fille, vivaient encore dans les locaux de la Mission. La salle vidéo ainsi que la pièce réservée aux communications téléphoniques leur servaient de chambre à coucher. Comme la plupart du temps David ne connaissait pas bien les visiteurs qui allaient et venaient dans la salle de musique, il avait pris l’habitude de fermer les portes à clé pour plus de sécurité et d’intimité. Les hôtes pouvaient sortir de leurs chambres par la porte de derrière. Par coïncidence, le même jour où les quatre hommes sont arrivés, David avait reçu un appel téléphonique de l’aéroport local. Trois de ses amis vivant dans un autre département de l’Alaska revenaient d’une partie de chasse sur une île du golfe. Compte tenu du mauvais temps, ils avaient atterri à Seward et David était la seule personne qu’ils connaissaient dans cette ville. Ils lui ont demandé l’hospitalité pour passer la nuit jusqu’à ce que le temps s’améliore. «Bien sûr, pas de problème!» a répondu David. Ses amis venaient de tuer six chevreuils qu’ils avaient transportés dans la soute de leur avion. Tout fonctionnait à merveille pour eux. Les trois hommes se sont installés dans le sous-sol de la Mission afin de commencer à dépecer les chevreuils. Quel spectacle! Du sang, de la viande et des sacs en plastique de tous les côtés... David en a profité pour prendre quelques bons morceaux de chevreuil et, en tant qu’ancien chef de cuisine, il les a rôtis au four et a servi le tout accompagné d’une sauce et de pommes de terre rissolées. Chacun s’est régalé de cet exceptionnel repas! C’est justement à ce moment-là que les quatre étrangers complètement trempés sont arrivés… David a alors pris quatre assiettes qu’il a garnies de bons morceaux de viande et les a apportées aux quatre hommes installés dans la salle de musique. Voyant cela, les trois amis de David qui étaient de


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vaillants chasseurs et pêcheurs se sont fâchés: «Pourquoi faistu cela pour ces vagabonds?» Ils ne pouvaient vraiment pas comprendre cette façon d’agir. David a profité de cette occasion pour témoigner de sa foi et leur a répondu: «Quoi que vous fassiez, en parole ou en acte, faites tout au nom du Seigneur Jésus»1. Telle a été la «leçon» que ces trois hommes ont apprise ce jour-là. Ce verset de la Bible est un principe de base pour la Mission pour les marins. «Comme je ne connais pas les gens qui viennent ici, je ne veux pas les juger, dit David, je dois les aider et faire confiance à Dieu pour le reste. Peut-être que je pourrais porter un jugement erroné envers quelqu’un qui a authentiquement besoin d’aide!» Il se souvient de s’être souvent trompé en jugeant hâtivement après une première impression puis, plus tard, après avoir appris à connaître le passé de telle ou telle personne dans le besoin, son opinion s’était avérée fausse. L’hiver 1996 a été extrêmement froid, un hiver exceptionnellement rude, accompagné d’un vent glacial venant du nord. En conséquence, les demandes d’aide à la Mission ont augmenté. Des dons sous forme de couvertures ont été considérés comme une vraie bénédiction. La Mission en avait reçu de la compagnie de croisières Princess qui venait d’en acheter de nouvelles pour leurs bateaux. Des endroits chauds pour passer la nuit, des repas et des habits chauds, des bonnets de laine tricotés à la main, tout cela en faveur des marins... En cet hiver particulièrement rude, toutes ces choses ont été un réel réconfort pour de nombreuses personnes! On leur a donné la raison d’être de la Mission et expliqué que toutes ces actions étaient faites à cause de l’amour de Jésus envers eux. Une partie du ministère de la Mission concerne la distribution de nourriture et l’offre d’un abri durant l’hiver. Une autre partie consiste à apporter un suivi psychologique pour les personnes dépendantes de l’alcool et pour les couples en difficulté. 1

Colossiens 3.17.


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Il est arrivé une fois que David, qui connaissait depuis longtemps une famille de Seward ayant sept enfants et dont les parents traversaient de graves problèmes de couple, leur a offert d’inestimables conseils à chacun en particulier. Malgré tout, leur situation n’a fait qu’empirer et les services sociaux qui s’en occupaient n’ont pas trouvé de solution immédiate pour héberger l’épouse et les quatre plus jeunes enfants. David leur est alors venu en aide pour les dépanner pendant environ un mois, durant la période de Noël, jusqu’à ce que les services sociaux aient pu les placer. Les enfants les plus âgés, qui n’étaient même pas encore adolescents, ont été envoyés ailleurs chez des connaissances. Un des enfants s’est écrié en pleurant: «J’aimerais au moins qu’on soit ensemble et qu’on ait un endroit à nous pour Noël...» Cette phrase a marqué l’esprit de David, l’a fait réfléchir et l’a conduit à un nouveau projet nommé Adopt a Family2. La veille de Noël, David a alors aménagé la pièce principale de la Mission pour la maman et ses sept enfants afin qu’ils aient un endroit à eux où ils puissent ouvrir tranquillement leurs cadeaux... Tout s’est déroulé à merveille! Non seulement ils ont reçu des cadeaux de la part de l’association Adopt a Family, mais également des services sociaux. Il y avait en tout cent-sept cadeaux à partager entre les huit. La vue de tous ces dons d’amour était bouleversante! Tard dans la soirée de ce Noël de l’an 2002, les Hawkins ont ouvert leur porte et offert un buffet à tous ceux qui désiraient venir. Le souvenir de cette magnifique journée de Noël restera gravé dans la mémoire de cette famille qui a bénéficié de l’hospitalité de la Mission. Lors d’un après-midi, juste avant l’hiver, il n’y avait à la Mission que deux bénévoles présentes. La table venait d’être mise pour le souper. Tout était tranquille; pas de marins en visite pour le moment. Mais ce calme n’a pas duré longtemps. En l’espace de cinq minutes, cinq personnes dans le besoin et qui ne se connaissaient pas entre elles 2

«Adoptez une famille», voir Matthieu 25.35.


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sont arrivées les unes après les autres pour prendre un bon repas chaud. Est arrivé en premier un chrétien âgé habitant la région. Il avait l’habitude de venir régulièrement prendre un repas à la Mission. Cet homme affermi spirituellement s’est trouvé être une source d’équilibre au cours de la conversation qui a suivi autour de la table pendant que les deux femmes de la Mission s’étaient offertes pour le service. Ont suivi deux jeunes hommes qui étaient à la recherche d’un abri. Ils avaient eu des ennuis avec leur bateau de pêche et devaient rentrer. Comme ils n’habitaient pas Seward, ils étaient arrivés à la Mission. Il n’y avait malheureusement plus de places disponibles pour passer la nuit mais ils étaient heureux de recevoir au moins un repas chaud! Le groupe d’hôtes a continué à s’agrandir avec l’arrivée d’une femme du quartier qui était affamée et avait autant besoin d’un repas que d’une aide pour sa dépendance à l’alcool. On l’a invitée à se joindre à table avec les autres. Finalement est arrivé Eric, un jeune homme malade, qui avait eu des soucis avec son véhicule. Eric n’avait pas mangé depuis plusieurs jours et se sentait vraiment très mal. Il était content qu’on lui offre à manger mais au cours du repas, il s’est senti de plus en plus mal. Il a alors été décidé qu’il devait se rendre à l’hôpital. On n’a plus entendu parler de lui, jusqu’au jour où... Le printemps suivant, des bénévoles occasionnels sont arrivés d’Anchorage afin d’offrir leur aide pour nettoyer et préparer la Mission pour la nouvelle saison. Durant le nettoyage, l’une de ces personnes, à quatre pattes sous la table pour enlever une toile d’araignée, s’est écriée: «Regardez ce que j’ai trouvé! Un portefeuille!» David a alors découvert un permis de conduire ainsi que cinq cents dollars. Une personne de l’équipe de la Mission a reconnu la photo sur le permis et s’est exclamée: «C’est Eric, l’homme qui s’est rendu à l’hôpital l’hiver dernier!» Comment se faisait-il que cet homme ne soit pas revenu chercher son portefeuille? Peut-être était-il à ce point malade qu’il ne s’était même pas rendu compte qu’il


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l’avait perdu ici? Il était étonnant, alors que durant l’hiver toutes sortes de visiteurs se sont succédés à la Mission, que ces cinq cents dollars soient ainsi restés sous la table sans que personne ne s’en aperçoive! Le portefeuille a été apporté à la police qui a finalement réussi à retrouver cet homme. C’est seulement une année plus tard qu’Eric est réapparu à la porte de la Mission pour offrir ses remerciements au sujet de son portefeuille retrouvé. Durant tout ce temps, Eric était devenu chrétien et s’était efforcé de remettre de l’ordre dans sa vie. Il revenait maintenant à Seward afin de trouver un travail et ainsi subvenir aux besoins de sa famille. Trouver un travail à Seward... Cela semble être la réponse aux problèmes financiers de tellement de personnes! Etant donné qu’il y a de nombreux bateaux de pêche et fabriques de conserves en ville, les chômeurs pensent y trouver facilement du travail. Certains arrivent même de l’étranger en ayant de grandes attentes. Ils n’imaginent pas que la vie est difficile dans cette ville où le ciel est si souvent couvert. Après quelques temps, beaucoup sont déçus, se retrouvent seuls et s’ennuient de leur famille. Ils se rappellent alors qu’il existe une petite maison où ils peuvent en tout temps trouver un abri, où les lumières sont toujours allumées et où ils reçoivent un peu de chaleur... la chaleur de Jésus! «En effet, j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire; j’étais étranger et vous m’avez accueilli; j’étais nu et vous m’avez habillé...»3

Merci de m’avoir accueilli à la Mission. J’étais comme à la maison. Cela m’a remis sur pieds, a restauré ma dignité, mon estime de moi-même et m’a redonné confiance. Etats-Unis

3

Matthieu 25.35 et suivants.


Chapitre 26 «Adoptez une famille»

N

oël... Le rappel que Dieu a fait don de son Fils. Noël... Pour beaucoup cela signifie s’amuser, jouir d’un bon repas, et par-dessus tout, recevoir des cadeaux. Mais nombreux sont ceux qui ne sont pas heureux ce jourlà. Pendant que beaucoup de gens vivent dans une ambiance de fête, entourés de leur famille et amis, d’autres qui sont seuls ressentent encore plus intensément leur souffrance et leur solitude durant cette période de l’année. Pour ces personnes, c’est en effet douloureux de voir les autres se réjouir en achetant des cadeaux de Noël... N’y a-t-il personne qui leur offrira quelque chose? N’y a-t-il personne qui les invitera à partager leur repas de Noël? N’y a-t-il personne qui verra leur souffrance? Une chose est sûre: il y a quelqu’un qui les comprend... Quelqu’un qui a connu la solitude maintes et maintes fois et qui a souvent été rejeté... Quelqu’un caractérisé par la plus grande des simplicités et dont le berceau à sa naissance était une mangeoire dans une étable... Après la rencontre à la Mission de familles dans la nécessité et sans moyens financiers pour acheter des cadeaux à leurs


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enfants, l’idée est venue de faire part de ces besoins aux gens fréquentant les églises de Seward. David savait qu’il y avait là des familles vivant dans l’abondance et qui désiraient être en bénédiction pour d’autres. Les gens qui viennent frapper à la porte de la Mission sont, la plupart du temps, inconnus des églises; trop souvent c’est un groupe de personnes oubliées. Ainsi, lorsque Noël approche, David se met à la recherche de familles n’ayant pas de problèmes financiers et qui seraient d’accord «d’adopter» une famille nécessiteuse. Il est convenu que ces familles n’échangent pas leurs noms et n’ont pas de contact entre elles. Les seuls renseignements fournis à la famille qui apporte de l’aide sont les besoins spécifiques de chaque membre de la famille «adoptée». Par exemple, Bob est un garçon de neuf ans qui aime les jeux de ballon, Liz est âgée de six ans et aime jouer à la poupée mais elle n’en a pas. Un autre enfant aimera lire des bandes dessinées ou des livres ou encore faire des puzzles ou dessiner. Le jour où une maman et ses sept enfants sont arrivés pour Noël à la Mission dans une situation d’urgence, David en a aussitôt parlé à l’église. La réponse n’a pas tardé et plusieurs chrétiens se sont proposés pour venir en aide à cette famille. Ainsi, plusieurs familles dans le besoin ont été «adoptées» par des familles plus aisées. Ces cadeaux de Dieu inattendus ont été la source de beaucoup de bonheur et de joie et ont permis à toutes ces personnes de vivre un très joyeux Noël. Lors d’une journée «portes ouvertes», le 22 mai 2003, à l’occasion de la célébration de son dixième anniversaire, la Mission pour les marins a donné une dimension supplémentaire au projet Adoptez une famille. Ce jour-là, une femme dans le besoin est venue nous rendre visite. Après avoir entendu le message de la mort et de la résurrection de Jésus, elle a expliqué comment Christ avait déjà commencé à toucher son cœur lors du précédent Noël lorsqu’on avait pourvu aux besoins de sa famille. Il a alors été décidé que, dorénavant, à chaque Noël, la Mission pour les marins se souviendra des familles dans le


«Adoptez une famille»

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besoin grâce au projet Adoptez une famille. Elle tendra aussi la main aux sans-abri et aux marins qui doivent passer la fête de Noël loin de leurs familles. Ces personnes esseulées ont particulièrement besoin d’encouragement et de réconfort; aussi, chaque année, elles sont mentionnées dans les prières de l’équipe et une carte de Noël leur est envoyée. Joyeux Noël!

De la neige et encore de la neige…



Chapitre 27 Honolulu, Hawaï

«

A

llez, on se reverra en janvier à Hawaï!» s’est exclamé un membre d’équipage en s’adressant à Jeannette alors qu’il quittait la Mission pour la dernière fois cet été. Il savait que Jeannette et Joe Seale avaient l’habitude de voyager à Hawaï chaque année durant l’hiver. Durant plusieurs années, les Seale, qui travaillaient à la Mission, ont eu le privilège de passer leurs vacances à Honolulu. Bien avant qu’Hawaï ne devienne le cinquantième état des Etats-Unis, il existait déjà une Mission pour les marins sur cette île mais personne ne s’était plus rendu à bord des bateaux de croisière depuis des années. Jeannette s’est alors sentie conduite par le Seigneur pour remettre en route un tel service. Dans la zone où les bateaux de croisière sont amarrés en plein port d’Honolulu se trouve un magnifique centre commercial. C’est un endroit agréable qui se prête fort bien à des moments de détente et de discussion. Durant l’hiver 2002, les Seale ont profité de ce cadre idéal pour distribuer gratuitement des brochures et des dépliants sur la foi chrétienne. Parmi les personnes rencontrées à Honolulu par le couple Seale lors de leurs visites effectuées sur onze bateaux de croisière à quai, seulement trois équipages connaissaient


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Seward en Alaska. Cependant, tous avaient des groupes de chrétiens actifs à leur bord. Pour Jeannette, le fait de prendre contact avec les dirigeants de ces groupes était très important. Ses encouragements ainsi que les nouveaux livres qu’elle leur fournissait semblaient très appréciés par les équipages. Tous s’accordent à dire que Jeannette est la première personne avec qui ils ont des contacts une fois débarqués. Ils saisissent avec joie l’occasion qui leur est donnée d’obtenir autant de documentation pour des études bibliques qu’elle peut leur en fournir! Même après de nombreuses années de séparation, rires, accolades et bonne humeur font partie des réunions. Des années auparavant, alors que Joe et Jeannette passaient leurs vacances en Espagne, ils ont aperçu un bateau de croisière Princess et sont montés à bord. «Vérifions sur la liste des membres d’équipage si nous connaissons quelqu’un... Oui, en voici un! Il s’agit sûrement du maître d’hôtel turc que nous avons connu en 1980…» L’officier de la sécurité a téléphoné dans la salle à manger: «Quelqu’un d’Alaska désire vous voir», a-t-il dit. Lorsque le maître d’hôtel est arrivé et a vu le couple Seale, les rires et les embrassades ont été spontanés! Ils ne disposaient que d’une quinzaine de minutes pour parler mais ils ont eu beaucoup de plaisir à se retrouver; ils avaient tant de choses à se dire! Une autre fois, alors qu’ils passaient leurs vacances en Grèce, les Seale ont vu deux bateaux Princess amarrés côte à côte dans le port. Sur le quai, Joe et Jeannette ont reconnu des marins pakistanais et des membres du personnel du capitaine. En tenant les mains de Jeannette, un marin s’est exclamé: «Nous pensions que nous ne vous reverrions jamais!» «Jésus m’a envoyé jusque vers vous afin de vous dire combien il vous aime!» a répondu Jeannette à ces musulmans. Par la même occasion, les Seale ont aussi rendu visite à un capitaine grec qu’ils avaient vu à plusieurs reprises en Alaska durant quatre étés. Une autre fois encore, lors d’une escale à Londres où ils ont passé la nuit, les Seale ont dîné en compagnie d’un médecin


Honolulu, Hawaï

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chrétien, Jonathan, dont ils avaient fait la connaissance six ans plus tôt à Juneau. Cet homme ne travaillait plus à bord des bateaux de croisière mais naviguait à présent sur le Logos1, le bateau de distribution de littérature chrétienne. Les Seale ont été encouragés de voir que Jonathan avait beaucoup approfondi sa relation avec le Seigneur depuis qu’il servait en tant que médecin-missionnaire à bord du Logos. Cette soirée a été un encouragement mutuel pour chacun d’eux. Un jour, à Hawaï, alors que Jeannette attendait sur le quai, elle a dit à son mari: «Tu vois cet homme sur la bicyclette? Celui qui porte un casque... Cela doit être Ronaldo, le maître d’hôtel italien!» Lorsqu’un bateau de croisière de la ligne Américanohollandaise accostait à Seward, elle s’enquerrait souvent au sujet de Ronaldo car elle avait partagé l’Evangile avec lui des années auparavant. De la même manière, quand un paquebot de cette compagnie accostait à Honolulu, Jeannette demandait aux équipages s’ils avaient connaissance d’un certain Ronaldo; mais personne ne semblait le connaître. Ce jour-là, même si ce cycliste avait l’équipement d’un sportif de longues distances, Jeannette avait le pressentiment que c’était bien le maître d’hôtel qu’elle connaissait. Elle a alors appelé: «Ronaldo!» et le cycliste s’est arrêté. «Oh mon Dieu, Jeannette! Je n’en crois pas mes yeux, vous m’avez reconnu? Vous vous souvenez du petit livre que vous m’aviez remis? Je l’ai transporté dans ma valise depuis ces vingt dernières années et cette année, enfin, j’ai décidé de le lire...» Une des tâches du ministère des Seale durant l’hiver est d’écrire des lettres aux marins. Une autre tâche est celle de voyager et de rencontrer différents membres d’équipage tout autour du monde. C’est toujours quelque chose d’incroyable de revoir des gens après les avoir perdus de vue pendant de nombreuses années. Au fil du temps, les visites effectuées dans les ports d’Hawaï sont devenues pour Joe et Jeannette un nouvel objectif de leur 1 Le Logos: un des bateaux appartenant à l’organisation chrétienne d’évangélisation Opération Mobilisation, sillonnant le monde entier (N.d.E.)


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travail durant l’hiver. En raison de divers bouleversements et conflits d’ordre international, les horaires des bateaux de croisière ont également changé et Hawaï est devenue un des endroits les plus fiables quant à la navigation de ces gros paquebots. Jeannette a toujours avec elle son sac à dos rempli de littérature chrétienne. A cause de nombreuses démarches administratives que les mesures de sécurité engendrent dans ces ports, elle a renoncé à monter à bord des bateaux; elle reste à quai. Chaque jour, elle et son mari distribuent, durant trois ou quatre heures, des Nouveaux Testaments, des brochures et des calendriers bibliques comme Notre pain quotidien. Effectuer ce travail sur les quais des ports d’Hawaï et sous un climat tropical est bien sûr plus agréable que de le faire sur ceux de Seward en Alaska! Lorsque vient la période où Joe retourne travailler en Alaska, Jeannette reste encore un temps à Hawaï et chaque jour elle prend le bus pour se rendre sur les quais. Elle connaît parfaitement les horaires d’arrivée des paquebots. Certains d’entre eux qui offrent des croisières de cent jours autour du monde font escale à Honolulu. En hiver, un de ces paquebots fait une fois par mois le tour des cinq îles hawaïennes, puis se dirige vers Mexico et revient dans le port d’Honolulu. Durant toute l’année, un navire norvégien a son port d’attache à Hawaï. Malgré les changements d’équipage du navire, Jeannette a l’occasion de rencontrer souvent les mêmes personnes. Elle s’est ainsi, par exemple, liée d’amitié avec un responsable d’études bibliques. Chaque dimanche après-midi, ils avaient pris l’habitude de se rencontrer au même endroit. Ce frère pouvait ainsi demander à Jeannette certains conseils ou commander des brochures sur des sujets particuliers ou toute autre documentation offerte par la Mission en Alaska. Lorsque Jeannette est seule, il lui arrive de prendre une guitare et de chanter, ce qui facilite ensuite les échanges avec les gens qui s’approchent d’elle pour l’écouter. Après


Honolulu, Hawaï

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quelques chants chrétiens, des conversations s’établissent naturellement. Cette façon de procéder lui donne l’occasion de découvrir les différents arrière-plans religieux des gens avec lesquels elle s’entretient et cela ouvre souvent une porte pour partager sa foi. Lors d’une de ces saisons passées à Hawaï, Jeannette a fait la connaissance de marins hindous venus de Bali qu’elle revoyait tous les dix jours. Comme elle savait qu’ils aimaient jouer de la guitare, elle venait toujours chanter avec eux. «Je sais chanter en indonésien!» a-t-elle déclaré une fois. Les jeunes marins se sont mis à rire, puis elle a commencé à chanter un chant pour enfants: «Je suis si heureuse, tu es si heureux.» «M’dame, que connaissez-vous d’autre?» ont-ils demandé, surpris. «Voici le jour que Dieu a fait, nous allons nous en réjouir et être heureux!» a-t-elle chanté. «Waouh! Cette femme chante dans notre langue!» C’est ainsi qu’ils ont compris le message qu’elle désirait leur adresser. D’autres fois, Jeannette attend la sortie des équipages et aide les nouveaux venus à trouver le téléphone, les banques, les magasins ou les restaurants. Au moins une fois durant l’hiver, elle rencontre une personne qui s’est déjà rendue à la Mission pour les marins à Seward ou à Whittier; mais le moment où elle a revu le capitaine G. a été pour elle le point le plus fort. Jeannette avait appris que ce capitaine allait arriver à Honolulu sur un paquebot grec. Elle a d’abord attendu plusieurs heures à bord avant de le rencontrer finalement dans le terminal du port. Plusieurs années auparavant, alors que Jeannette avait fait sa connaissance à Whittier, le capitaine G. lui avait dit: «Vous méritez plus que d’avoir une inscription en papier à la porte de votre Mission!» Il a donc demandé au charpentier de fabriquer un écriteau en chêne qui, jusqu’à ce jour, trône encore devant la fenêtre de la Mission à Seward. Ce jour-là, le capitaine a dit aux agents de la sécurité: «Cette femme a consacré sa vie aux marins.


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Je n’arrive pas à croire qu’elle se souvienne encore de mon nom après onze ans!»

Lorsque Dieu t’appelle, peu importe où tu te trouves dans le monde, cet appel va attirer ton cœur. Jeannette


Chapitre 28 Funérailles

L

orsque Leo a regardé par sa fenêtre donnant sur le pont de son cargo, il a vu une femme qui arrivait sur le quai. Elle marchait avec difficulté dans la neige épaisse. Elle avait la tête recouverte par la capuche de son manteau de fourrure qui la gardait au chaud dans ce vent glacial. Qu’est-ce-que cette femme pouvait bien faire? Leo a remarqué qu’elle portait un sac à dos qui semblait très lourd à en croire la difficulté avec laquelle elle parvenait à se frayer un chemin à travers la neige. Quel n’a pas été, plus encore, l’étonnement de Leo lorsqu’il a vu cette femme être soulevée du quai puis déposée sur le pont du paquebot où il travaillait à l’aide d’un élévateur à nacelle télescopique! L’équipage venait de terminer un chargement de ciment et s’apprêtait à partir du port d’Anchorage dès le travail achevé. Une fois à bord du bateau, Jeannette se réchauffait dans le mess des officiers. Même si, comme toujours, il faisait très froid dehors, elle rendait visite aux équipages afin de les encourager, et cela, quelle que soit la température extérieure. Quelques temps auparavant, Leo ­– l’ingénieur en chef – et le capitaine du paquebot avaient eu une conversation avec Jeannette et, avant de partir, elle leur avait laissé des brochures à lire. Elle avait promis de revenir... Et voilà qu’elle


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était maintenant de retour! Cette fois-ci, elle était accompagnée de son amie Kristine. Les officiers ainsi que l’équipage leur avaient réservé un accueil chaleureux! Leo a avoué à Jeannette que lorsqu’il l’a vue défiant l’épaisse neige et le vent glacial, il a pensé qu’elle était vraiment une chrétienne dévouée et authentique, car qui d’autre aurait bravé ce mauvais temps pour venir vers eux... Lors du repas offert pour la circonstance, le capitaine ainsi que Leo ont chanté en l’honneur des deux femmes. Comme Kristine était là pour la première fois, Jeannette lui a expliqué qu’il était très rare d’entendre quelqu’un chanter pour elle à bord d’un des paquebots! Etant donné que Kristine possédait une très belle voix, qui était un don de Dieu, Jeannette l’a encouragée à prendre avec elle, pour le lendemain, des cassettes de musique d’accompagnement afin qu’elle puisse, cette fois-ci, elle-même chanter pour l’équipage. Le jour suivant, Leo, l’ingénieur en chef, était tellement enthousiaste à l’écoute de ces beaux chants chrétiens, qu’il a fait une vidéo des chants de Kristine et de la lecture par Jeannette de versets bibliques. Il souhaitait montrer cette vidéo à sa famille et la visionner dans son église. Tous ont trouvé que le temps avait filé beaucoup trop vite. Avant de quitter le bateau, Jeannette a encouragé le capitaine à commencer une étude biblique pour l’équipage car plusieurs chrétiens se trouvaient à bord. Jeannette et Kristine ont gardé un souvenir joyeux de leur expérience et se sont demandées ce qu’il était réellement advenu de la vidéo. Pendant un long laps de temps, Jeannette n’a plus revu ce paquebot. Et puis, dix-huit mois plus tard, alors qu’elle se trouvait à Anchorage et visitait un transporteur qui déchargeait du ciment dans le port, elle a retrouvé ce bateau, bien que son nom ait changé! Jeannette a alors revu quelques membres d’équipage dont elle avait fait la connaissance quelques mois auparavant. Un des marins lui a demandé: «Où est Kristine?» Jeannette a répondu que son amie avait récemment déménagé dans un autre état. Elle en a profité


Funérailles

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pour savoir si quelqu’un à bord pouvait lui donner des nouvelles du capitaine et de l’ingénieur en chef, Leo, car ni l’un ni l’autre ne se trouvaient à bord à ce moment-là. «Leo? Il est mort il y a quelques temps après avoir eu une crise cardiaque à bord», lui a-t-on répondu. Jeannette a pensé: «Leo est mort? Cet homme qui aimait tellement chanter des chants chrétiens!» Napoléon, le collègue philippin de Leo, était en permission chez lui au moment de ce drame; ils habitaient tout près l’un de l’autre. Lorsque la femme de Leo a appris la mauvaise nouvelle, elle s’est écriée: «Non, non! C’est justement ce que j’ai toujours craint. J’ai tellement souvent imaginé qu’une chose pareille pourrait arriver alors qu’il se trouvait si loin en mer...» Accablée par la douleur, elle a fondu en larmes au moment où Napoléon est venu lui annoncer la triste nouvelle. Jeannette a alors appris que durant les dix jours d’attente entre le décès et l’enterrement, le temps que le corps de Leo soit rapatrié aux Philippines et que tous les proches soient rassemblés des quatre coins du globe, la famille sur place a montré toutes les vidéos que Leo avait prises durant les nombreux voyages de sa vie en mer, dont celle où Kristine chantait. La femme de Leo voulait voir son mari en vie et ne cessait de regarder ces films encore et encore. Elle les a visionnés à toute sa famille et aux amis qui venaient l’entourer durant ces jours de deuil et de tristesse. Puis, lors des funérailles, un montage effectué à partir de plusieurs de ces vidéos a été diffusé. Les chants de Kristine ont ainsi officiellement fait partie du service funèbre. Un de ses chants disait: «Je n’ai pas honte de l’Evangile de Jésus-Christ». Nous n’avons jamais su si Napoléon et sa famille étaient chrétiens mais une chose est sûre, tout le village a entendu la belle voix limpide de Kristine parlant de Jésus. Sans s’en être rendu compte, Leo avait préparé lui-même son propre service funèbre alors qu’il se trouvait bien loin de chez lui en Alaska pour que, finalement, tout cela se passe aux Philippines.


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Quel encouragement pour Jeannette de rencontrer cet ancien collègue de Leo plus d’une année après, alors qu’elle rendait visite à un autre paquebot dans le port d’Anchorage, et aussi quel merveilleux rendez-vous divin! Comment aurait-elle appris la mort de Leo si elle ne s’était pas trouvée à cet endroit à ce moment-là? Les souffrances et la mort font partie intégrante de la vie mais n’oublions pas que Dieu a le contrôle de toutes choses! Lui seul pouvait utiliser quelque chose d’aussi simple qu’une vidéo pour faire entendre son message à une famille endeuillée à l’autre bout du monde. Merci Seigneur!

Cela fait vraiment chaud au cœur de voir quelqu’un venir partager avec nous la Bonne Nouvelle de Dieu et ses sages conseils. Malgré l’épaisse couche de glace au dehors, vous vous êtes sacrifiée pour venir à bord jusqu’à nous. Je ne peux pas oublier toutes les faveurs que vous nous avez accordées. Dans ma mémoire reste gravé ce moment où, avec Kristine, vous étiez sur le quai en agitant la main pour nous dire au revoir. Je me réjouis de vous revoir. Très souvent, je visionne la vidéo et j’écoute la magnifique voix de Kristine. Que Dieu vous bénisse! Leo


Chapitre 29 Une lettre pour vous?

E

en brief voor je (Hollandais), Sana bir mektup (Turc), Una carta para usted (Espagnol), Sepucuk surat untuk anda (Indonésien) A letter for you (Anglais). «Avez-vous une lettre pour moi?» Parmi ceux qui rendent visite à la Mission, tous n’aiment pas qu’on leur remette quelque chose à lire. Les marins sont souvent trop occupés ou fatigués pour avoir envie de lire. Ils préfèrent parfois recevoir des cassettes de musique chrétienne ou même des prédications enregistrées dans leur langue maternelle. Ainsi, pendant leur moment de pause à bord, ils rejoignent leur cabine et tranquillement installés sur leur lit, ils écoutent ces bandes sans avoir à fournir d’effort. Par contre, tous les marins aiment beaucoup recevoir du courrier; une lettre est toujours la bienvenue! De nos jours, les contacts par courriel sont fréquents et les lettres personnelles deviennent rares. Aussi, recevoir une lettre dans sa langue maternelle est une chose très précieuse pour les marins! C’est ainsi que, lors d’un séjour à la Mission, un jeune marin indonésien a été heureux de recevoir la brochure Une lettre pour vous dans sa langue: Sepucuk surat untuk anda. Il était


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très curieux de découvrir ce que les missionnaires venaient de lui offrir. Le soir venu, il a commencé la lecture de cette brochure et a découvert son contenu: le récit de quelqu’un qui a caché une Bible dans un mur, le film de notre vie, des chants chrétiens et des versets de la Bible. Très intrigué, il a ensuite pris sa Bible et a commencé à lire les passages mentionnés dans la brochure... N’était-t-il pas déjà chrétien? Il se rendait régulièrement à l’église lorsqu’il était de retour chez lui. Il assistait même aux études bibliques à bord du bateau. Mais en lisant et en relisant ces passages, la puissance du SaintEsprit l’a convaincu de péché et lui a montré qu’il n’avait jamais réellement pris une position claire envers Dieu en confessant ses péchés, ceux pour lesquels Jésus était mort. Il n’avait jusque-là jamais accepté son pardon ni ne l’avait considéré comme son Sauveur personnel. Aussi, alors qu’il était seul dans sa cabine avec sa Bible et cette petite brochure dans sa langue maternelle, ce marin indonésien est tombé à genoux et a prié comme il ne l’avait encore jamais fait auparavant. De retour à la Mission de Seward, lors d’un autre voyage, il a commencé à raconter sa conversion. Ce jour-là, Tim, un jeune officier européen, était aussi présent. Il était en discussion avec d’autres personnes et racontait qu’il ne croyait pas au récit de la création en expliquant qu’il était un rationaliste; il avait besoin de preuves pour tout ce qu’il croyait! Mais sa façon de penser – que le monde soit apparu à partir d’un big-bang – pouvait-elle être prouvée par Tim ou par quiconque? Le jeune marin indonésien écoutait la discussion et, avec quelques mots d’anglais, il a raconté ce qu’il avait appris durant la semaine. Il n’était pas du tout impressionné de parler à un officier européen car, dans le cadre de la Mission, tous sont au même niveau. Chacun essaie de se sentir à l’aise comme au sein d’une grande famille. C’est toujours un moment très spécial lorsque parfois jusqu’à dix nationalités différentes sont réunies pour chanter lors des célébrations communes et


Une lettre pour vous?

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que ces chrétiens réalisent alors qu’ils sont tous «un» dans le Seigneur! Ici, dans ce coin de l’Alaska, beaucoup glorifient Dieu mais plus tard, dans le ciel, il y en aura des millions, de toute langue, de tout peuple et de toute nation1. Toutes ces réflexions ont laissé Tim très songeur. Avant de partir, il a choisi quelques livres parlant de ce sujet et les a emportés. Pourra-t-il accepter les enseignements de la Bible? Pourra-t-il accepter de devenir comme un petit enfant, de croire en des choses invisibles et d’être ouvert à la «folie de la prédication»2 dont parle l’apôtre Paul? Combien il aurait été merveilleux aussi que ce jeune homme européen prenne conscience qu’il n’avait pas seulement à vivre sa vie comme il l’entendait mais qu’il pouvait l’utiliser pour glorifier Dieu en croyant en Celui qui a justement créé cette vie! Maintes et maintes fois, Tim était impressionné par les merveilleux paysages qu’il voyait en Alaska. Il aimait contempler le soleil se reflétant sur les sommets enneigés, d’autres fois il admirait la découpe de ces montagnes sur un fond de ciel embrasé. Il aimait marcher dans les sous-bois sur des tapis de fleurs mauves et contempler les criques bordées de fougères géantes. Il ne se lassait pas de regarder le saut des baleines et les jeux des loutres de mer. Alors qu’il voguait sur son bateau de croisière, des sentiments de crainte et de respect se mêlaient à l’admiration que Tim éprouvait en contemplant les impressionnants glaciers et les immenses blocs de glace qui s’en détachaient avec fracas pour former des icebergs majestueux. Parfois des lions de mer se laissaient flotter sur ces immenses banquises. Tout cela, c’est l’Alaska! Toute cette beauté me transporte d’étonnement. Et ce calme me remplit de paix. Est-ce l’Alaska? Ou bien est-ce Dieu lui-même présent dans sa création? Lorsqu’on admire ces merveilles, la lecture de la brochure Une lettre pour vous ne semble même plus nécessaire! 1

Apocalypse 5.9.

2

1 Corinthiens 1.21.


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Trouver Dieu, apprendre à le connaître et le voir au travers de sa création... Tout cela, c’était la lettre de Dieu pour Tim! Le ciel raconte la gloire de Dieu et l’étendue révèle l’œuvre de ses mains. Psaume 19.2

Le présentoir de bibles et de brochures dans un coin du salon de la Mission.


Chapitre 30 Des pieds de bébé

«

M

a femme est enceinte et c’est mon premier emploi en mer!» Ce membre d’équipage ne pouvait pas dissimuler son mal du pays alors qu’il parlait avec un bénévole de la Mission. Même s’il se trouvait dans un cadre majestueux où montagnes et glaciers brillaient tels des diamants sous un ciel bleu immaculé, on percevait de la tristesse dans le ton de sa voix. Comme beaucoup d’autres hommes de son pays, ce marin philippin s’était rendu à l’évidence qu’il devait partir travailler en mer pour subvenir aux besoins de sa famille, n’ayant pu trouver d’emploi dans les nombreuses îles des Philippines. Le seul emploi qu’il ait trouvé était un travail dans le département technique d’un bateau de croisière. Son épouse était sur le point d’accoucher alors qu’il se trouvait loin de chez lui... Cet homme se sentait au moins un peu soulagé de partager ses soucis avec une bénévole de la Mission. A présent, elle comprenait mieux pourquoi cet homme était resté assis tout seul sans rejoindre ses collègues. Il était heureux d’être descendu du bateau durant son temps libre, mais, après avoir téléphoné à sa femme, il ressentait davantage encore la douleur d’être loin de sa famille. «J’aimerais vous offrir ces petits pieds de bébé», dit la bénévole au marin en lui tendant une petite broche de la grandeur des pieds d’un fœtus de dix semaines, accompagnée


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d’une brochure. Ce petit livre contenait de magnifiques photos du processus de croissance d’un fœtus, montrant clairement l’œuvre de la création de Dieu. Des larmes ont commencé à remplir les yeux de cet homme alors qu’il comprenait combien leur futur petit bébé était déjà aimé de Dieu. La bénévole désirait que ce marin comprenne qu’il pouvait déjà prier ce même Dieu pour qu’il protège ce petit être et encourage sa femme restée seule à la maison. Un sourire a commencé à éclairer son visage. A l’instar d’autres marins dont les femmes étaient enceintes, cet homme allait porter cette broche chaque jour sur le revers de son uniforme afin de lui rappeler la réalité de l’existence de son enfant! Cela fait tellement de bien de pouvoir partager ses émotions avec les autres et d’avoir le sentiment d’être compris et écouté! Lors du moment de recueillement matinal journalier à la Mission, des prières sont adressées pour les familles des marins jusqu’à la naissance des bébés. Durant ces mois d’attente, on demande à ces hommes des nouvelles de leur femme et du déroulement de la grossesse. Une même broche est ainsi remise à chaque marin qui annonce que sa femme attend un enfant. «C’est toi qui as formé mes reins, qui m’as tissé dans le ventre de ma mère. Je te loue de ce que je suis une créature si merveilleuse. Tes œuvres sont admirables, et je le reconnais bien. Mon corps n’était pas caché devant toi lorsque j’ai été fait dans le secret, tissé dans les profondeurs de la terre. Je n’étais encore qu’une masse informe...» (Psaume 139.13-16)

Pourriez-vous, s’il vous plaît, écrire à ma femme… Je serais heureux si vous pouviez lui donner des conseils au sujet de la maternité ou si parfois vous lui téléphoniez. Vous êtes la seule amie sur laquelle je peux compter. Vous êtes la seule amie à qui je peux parler de cette situation. Philippines


Chapitre 31 Pêche aux coquilles Saint-Jacques

A

près avoir passé un été béni en tant que bénévole à la Mission pour les marins, Yolanda avait décidé de se rendre une fois de plus dans le restaurant du petit port de plaisance afin d’y déguster une soupe de poissons et de fruits de mer qu’elle aimait tant! Au moment où elle est entrée, elle a remarqué un des clients. «Etait-ce cet homme qui avait été mis en prison à cause de son état d’ébriété et des bagarres qu’il avait provoquées sur son bateau? Cet homme originaire du Mexique qui portait un bonnet de laine et qui avait l’air si gentil?» Quand Yolanda est entrée, ce mexicain nommé Ray et ses collègues l’ont invitée à se joindre à leur table. Elle ne s’est pas du tout sentie mal à l’aise en compagnie de ces pêcheurs de crustacés, au contraire, elle a considéré cette invitation comme un privilège. Au cours de l’été, elle avait appris à connaître ces hommes lors de leurs fréquentes visites à la Mission, et elle avait particulièrement apprécié les coquilles Saint-Jacques que Ray lui avait offertes. Il lui avait expliqué que la meilleure façon de les apprêter était de les entourer de lard et de les faire frire dans un peu de beurre ou encore de les paner. C’est ce qu’a fait Yolanda une fois de retour chez elle. Mais pour l’heure, elle était sur le point de prendre congé de Ray et considérait ce


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temps comme un moment précieux alors qu’elle se rappelait de tout ce que Dieu avait fait dans la vie de ce pêcheur. La toute première fois où Yolanda avait mangé des coquilles Saint-Jacques, c’était dans un confortable restaurant dans le Nord de la France, en Normandie. «Hum, c’est tout simplement délicieux!» avait-elle dit alors qu’elle les dégustait. Ces fruits de mer savourés dans l’ambiance chaleureuse de ce petit restaurant où crépitait un feu de cheminée avaient laissé dans la mémoire de Yolanda un très agréable souvenir. Bien des années après, Yolanda a visité une ville nommée Saint-Jacques-de-Compostelle située au nord de la côte espagnole. C’est là qu’elle a découvert l’origine de l’appellation de ces coquillages qu’elle aimait tant. Cette ville est visitée chaque année par de nombreux pèlerins. Dans les premiers siècles, en particulier, beaucoup y venaient pour adresser des prières à Jacques, le frère de Jésus. En français «Santiago» se traduit par «Jacques». Dans toute la ville, ces coquilles fabriquées dans toutes sortes de matières sont vendues aux visiteurs. En tant que chrétienne, Yolanda a senti la tristesse l’envahir à la vue de tout l’aspect commercial et idolâtre qui régnait dans cette ville. La Bible n’enseigne-t-elle pas que l’on peut prier Jésus sans intermédiaire? C’est après tous ses voyages que Yolanda, qui est hollandaise d’origine, est arrivée à Seward, et c’est à la Mission qu’on lui a servi à nouveau des coquilles Saint-Jacques, ce plat qu’elle aimait tant! En effet, la Mission venait de recevoir d’un pêcheur mexicain soixante boîtes de coquilles congelées de très belle qualité. Cet homme était un habitué de la Mission et s’y rendait chaque été depuis des années. En Alaska, les petites coquilles sont pêchées dans les baies et les grandes en pleine mer. Dans cette industrie, la pêche aux crabes et la pêche aux coquilles Saint-Jacques sont les plus dangereuses. Ray était justement l’un des meilleurs pêcheurs de coquilles de la compagnie qui l’employait. Le jour où Ray est arrivé pour la première fois à la Mission, il était physiquement dans un triste état. La saison de la pêche


Pêche aux coquilles Saint-Jacques

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n’avait pas encore commencé et de ce fait Ray n’avait plus d’argent. Pendant deux semaines, il a été logé et nourri à la Mission jusqu’à l’arrivée de son équipage. Ils ont alors tous embarqué et sont partis à la pêche aux coquilles Saint-Jacques. A ce moment-là, Ray était considéré par David comme étant l’homme le plus rude qu’il n’ait jamais rencontré! David disait: «Il y a une différence entre agir comme un bagarreur de rue ou être vraiment un bagarreur dans les rues à Mexico». Ray en avait tout le profil et il venait d’un milieu familial très difficile. La pêche aux coquilles Saint-Jacques est un travail qui rapporte beaucoup d’argent, toutefois c’est un travail particulièrement pénible. Les compagnies poissonnières qui possèdent les bateaux de pêche doivent obligatoirement engager des pêcheurs très expérimentés et Ray faisait justement partie de cette catégorie. Il savait comment capturer les coquilles! Mais à cause de son mode de vie chaotique et de son attrait pour l’alcool, il s’attirait toujours des ennuis. Il était connu en Alaska pour ses frasques; cependant lorsqu’il se trouvait à la Mission pour les marins, il était toujours respectueux et se comportait bien. Un jour, David a prêté à Ray à titre personnel un montant de 500 dollars car ce dernier devait quitter la ville. Cet hiver-là, il a laissé ses bagages à la Mission et il a promis à David qu’il lui rembourserait le montant à son retour. Un certain niveau de confiance s’était développé entre les deux hommes. Après avoir eu des contacts durant six ans avec Ray, David a un jour reçu un appel téléphonique lui annonçant que le marin mexicain était en prison à Anchorage. Au cours d’une sortie en mer, le bateau de pêche se trouvait dans un endroit isolé et Ray était à nouveau ivre. Cette fois-ci les choses avaient vraiment mal tourné car Ray avait commencé à terroriser ses compagnons de bord. La bagarre qui avait suivi s’était avérée très rude. «Ray, arrête!» lui avait crié le capitaine, mais Ray n’écoutait plus. Il a cogné, s’est battu et a frappé jusqu’à ce que tout soit sens dessus dessous. Le capitaine a appelé la police et c’est ainsi que Ray s’est retrouvé en prison à Anchorage.


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Plus tard, David a appelé Ray dans sa cellule. Maintenant, le pêcheur était sobre. Son bateau s’apprêtait à partir d’Alaska pour l’hiver et la compagnie pour laquelle il travaillait lui devait encore un montant de 13.500 dollars. David connaissait très bien le capitaine et l’équipage de ce bateau; il s’est rendu à bord pour parler de cette situation. Le capitaine a expliqué que cette fois-ci Ray était allé trop loin et qu’il ne le reprendrait plus jamais à bord. Cependant, il a remis à David l’argent qu’il devait à Ray en signe de confiance. Ensuite, David a téléphoné à Cecil, le président du conseil de la Mission à Anchorage, et lui a expliqué la situation dans laquelle se trouvait Ray. Aussitôt en possession de la somme, le président l’a remise à Ray au cours d’une visite à la prison. Une nouvelle amitié commençait! Même si le capitaine avait décidé de passer outre en ce qui concernait les frais occasionnés par la bagarre, Ray a été retenu en prison car les autorités avaient découvert qu’il n’avait pas de visa d’entrée au pays. C’est alors que Cecil, son nouvel ami de la Mission, l’a aidé dans sa situation autant qu’il le pouvait. Les autorités avaient prévu de renvoyer Ray au Mexique, ce qui mettrait un terme à son histoire en Alaska. Mais comme il venait de recevoir son chèque, Ray avait maintenant la possibilité d’avoir recours à un avocat. Vingt minutes seulement avant son renvoi pour Mexico, l’avocat de Ray a reçu la permission de le voir en prison et à décidé de «bloquer» cette affaire jusqu’à ce que son cas soit réglé. Durant son incarcération, Ray a reçu la permission de se rendre parfois chez Cecil et, de la même manière que David l’avait fait auparavant, Cecil lui a parlé de Jésus. Maintenant, Ray était prêt à accepter Christ dans sa vie comme Sauveur et Seigneur! Lorsque son cas a été réglé et qu’il a été à nouveau en liberté, Ray a remis sa vie en ordre. Il est parti sur la côte Est, a arrêté de boire, a trouvé lui-même un nouveau travail comme pêcheur et a commencé à économiser de l’argent. Tout cela


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était le résultat de l’engagement de Cecil en tant que guide et père spirituel auprès de Ray. Entre-temps, la Mission pour les marins a pris en mains les choses afin que Ray obtienne de façon légale un permis d’immigration. Puis ils ont également mis Ray en contact avec une église de langue espagnole se trouvant à proximité du motel dans lequel il vivait. Ray a été très reconnaissant du changement qu’il y avait eu dans sa vie. Son plaisir maintenant était de passer du temps avec les chrétiens de son église et de vivre pour le Seigneur! Un jour, une offre lui est parvenue de son ancienne compagnie qui, ayant changé d’avis, lui demandait s’il voulait retourner travailler sur le bateau. Il a accepté et est reparti en Alaska pêcher les coquilles Saint-Jacques. Devenu une «nouvelle création», Ray n’est pas retombé dans son ancien style de vie, il est resté «en amont» et «sur la brèche» étant un homme totalement différent. A la suite de toutes ces expériences, Ray était si heureux qu’il est revenu à la Mission les bras chargés de soixante boîtes de 2,5 kilos de coquilles Saint-Jacques d’excellente qualité! A présent, ces bateaux de pêche ont quitté l’Alaska. Certains sont partis en direction de la côte Est tandis que d’autres ont rejoint l’Amérique du Sud. Il n’existe plus de tels bateaux de pêche dans la région de Seward. Ray est aujourd’hui un chrétien heureux, il a mis sa vie en ordre, a acheté un terrain et construit une maison dans son pays natal, le Mexique. Merci à toi Seigneur Tout-Puissant!

Pourquoi n’ai-je pas choisi Dieu plus tôt? Philippines



Chapitre 32 Il était une fois un athée

I

l semble que même après plusieurs années, la chute du «rideau de fer» en Europe et son système communiste laissent encore aujourd’hui des traces dans la vie de nombreuses personnes des pays de l’Est et des Russes plus âgés. La Mission accueille parfois des marins originaires de ces pays et généralement ceux-ci ne montrent aucun intérêt pour le domaine spirituel. Une jeune femme slovaque était très contente de venir à la Mission, même en sachant que cet établissement était chrétien. Toutefois, chaque fois que des films sur Jésus et des livres bibliques lui étaient offerts dans sa langue maternelle, Katja répondait toujours qu’elle ne voulait rien avoir à faire avec ces choses-là. «Oh, non! Pas encore ces trucs!» disait-elle avec dédain. Pourtant, tous les quinze jours, chaque fois que le bateau de croisière à bord duquel elle travaillait revenait à Seward, elle se réjouissait de revoir les personnes de la Mission. Elle ressentait l’amour qui lui était témoigné dans cet endroit, même si elle n’avait aucun intérêt concernant Jésus.


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Lors de sa toute dernière visite à la Mission, juste avant que son bateau ne mette le cap au Sud, elle a discuté avec un homme récemment converti, qu’elle se souvenait avoir rencontré dans la salle à manger du paquebot. Assise à la table de la pièce principale de la Mission, elle a finalement admis qu’elle aimerait passer l’éternité dans le ciel, même si elle ne comprenait pas ce que l’on était en train de lui expliquer à ce moment-là. Après des mois de visites à la Mission, Katja a enfin accepté la petite brochure Questions fondamentales qu’on lui offrait en langue slovaque. Une barrière semblable au «rideau de fer» venait de s’écrouler! Un autre jour, un marin roumain se tenait debout devant le bâtiment de la Mission et lisait le verset inscrit sur la balancelle: «Venez à moi vous tous qui êtes fatigués et chargés et moi je vous donnerai du repos». On lui a demandé s’il savait d’où venait cette citation et il a répondu qu’il n’en avait pas la moindre idée. N’avait-il jamais entendu parler de la Bible? Non, en effet. Ne se sentait-il pas lui aussi «chargé» d’être si éloigné de sa famille? Ce genre de conversation lui paraissait totalement nouveau. Puis, on ne l’a plus jamais revu à la Mission. Pavlo, un autre marin, était un jeune Lithuanien très brillant. Quelques années auparavant, il avait fait part de ses idées athéistes et il menait la vie dure à tous ses collègues de travail à bord de son bateau. Mais un jour, il s’est rendu compte qu’il n’avait même jamais lu un seul ouvrage chrétien. Le premier livre qu’il a lu l’a tellement intéressé qu’il en a pris un deuxième puis un troisième. Quelques temps après, un membre de l’équipe de la Mission l’a rencontré à bord et a constaté qu’il lisait sa Bible de façon quotidienne mais il a avoué ne pas savoir comment s’approcher de Dieu. Les deux hommes n’ont eu que très peu de temps pour discuter mais ils ont compris tous les deux que le seul pas que Pavlo n’avait pas encore franchi était celui de demander à Christ de venir dans sa vie et d’en prendre le contrôle. Ils ont alors prié ensemble sur le pont d’embarquement. Ensuite, la


Il était une fois un athée

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première réflexion de Pavlo encore tout bouillonnant a été: «C’était tellement simple... Pourquoi n’y ai-je pas pensé tout seul?» Durant tout cet été-là, sa foi a grandi et, de retour chez lui, il a raconté à sa femme toute son aventure. Ivan, lui aussi marin, était un jour à la Mission dans la salle des ordinateurs pour vérifier s’il avait reçu des courriels. Un bénévole s’est approché pour lui parler. Ivan n’avait, lui non plus, jamais vu une Bible mais il était d’accord d’en recevoir une en anglais car il avait étudié cette langue depuis assez longtemps. On lui a également remis un exemplaire de l’ouvrage Notre pain quotidien qui offre une lecture biblique quotidienne, et on lui a enfin expliqué comment trouver les versets dans sa Bible. La plupart des marins n’ont que très peu de temps pour étudier la Parole et de ce fait ils apprécient le petit livre Notre pain quotidien car ils ont ainsi au moins une nourriture spirituelle pour chaque jour. A chacun de ses passages à la Mission, Ivan paraissait heureux de l’ambiance familiale qui y régnait. Son visage était toujours éclairé d’un magnifique sourire. Au début, il ne connaissait pas grand chose du christianisme mais depuis qu’il était en possession d’une Bible anglaise, son intérêt avait grandi. Une bénévole nommée Cheryl a passé du temps avec lui à lire la Parole de Dieu. Il préférait la lire en anglais qu’en russe. Après avoir parcouru l’Ecriture, il a été ébahi de ce qu’il venait de découvrir. «Il y a tellement à penser», a-t-il dit! La fois suivante, lorsqu’il est arrivé et qu’il devait attendre son tour pour accéder au téléphone, il s’est assis sur le canapé pour lire à nouveau la Bible. Lorsqu’il a vu Cheryl, il lui a annoncé qu’il croyait tout ce qu’il avait lu! «Mes yeux se sont ouverts», lui a-t-il dit plus tard. Il savait qu’il avait besoin d’être sauvé; il l’a compris par la foi. Il croyait que Dieu avait tracé un chemin et il était maintenant prêt à recevoir ce cadeau de la Vie. Il a alors accepté Christ à ce moment-là! Comme il était pressé de retourner à bord de son bateau, il a dit: «Si j’avais plus de temps, je téléphonerais aussi à mes


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parents pour les avertir de ce qui s’est passé!» L’été suivant Ivan est revenu à la Mission et il était toujours aussi heureux et rayonnant que l’année précédente! «Comment croiront-ils si personne ne le leur explique?»1

«Ici vous êtes comme chez vous» étaient les premiers mots que j’ai entendus lorsque nous nous sommes rencontrés et ces mots ont été très importants compte tenu de la période difficile que je traversais. Au fait, quel est votre secret à la Mission (à part vos délicieux biscuits) pour expliquer le succès que vous avez? Roumanie

1

Voir les passages dans Actes 8.30-31 et Romains 10.14.


Chapitre 33 Cœurs de mères et de grands-mères

U

n marin se tenait l’air émerveillé devant le présentoir de Bibles. Il regardait et regardait encore, puis, finalement, son dévolu s’est porté sur une Bible polonaise pour enfants qui était disposée sur le présentoir de la Mission depuis de nombreuses années. C’était le seul exemplaire de ce genre au milieu des Nouveaux Testaments traduits dans une trentaine de langues différentes. Intrigué, cet homme a pris cette Bible et a commencé à la lire avec grand intérêt. Yolanda, qui était bénévole à cette période-là, l’a regardé parcourir le livre et s’est approchée pour lui proposer d’emporter gratuitement cette Bible avec lui, s’il le désirait. «Ma grand-mère me lisait toujours les histoires de cette Bible illustrée», a-t-il répondu à Yolanda. «Exactement la même Bible et les mêmes histoires!» A voir son expression, on pouvait facilement discerner qu’il était renvoyé à des moments bien lointains... Se revoyait-il tout petit garçon sur les genoux de sa grand-mère? Ou bien était-il transporté dans un salon confortable où il pouvait presque entendre le feu de bois crépiter dans la cheminée... loin, très loin, en Pologne?


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Il s’est assis sur une chaise un peu à l’écart et a continué à lire environ une demi-heure. Parfois, Yolanda le voyait se tenir la tête dans les mains... Peut-être éprouvait-il de la nostalgie? Lorsqu’il a remis la Bible sur le présentoir, Yolanda l’a encouragé une nouvelle fois à la garder et l’emporter avec lui. Malgré cette nouvelle invitation, il a refusé. Il souhaitait laisser cet exemplaire sur le présentoir au cas où quelqu’un d’autre en aurait besoin, a-t-il précisé. Craignait-il, s’il l’emportait, de se sentir honteux que son compagnon de cabine le voie lire une Bible pour enfants? Ou bien ne désirait-il pas que le Dieu qu’il avait appris à connaître dans son enfance ne lui rappelle ses jeunes années et également la façon dont il vivait maintenant à bord de son bateau? Yolanda n’a jamais connu la réponse aux questions qui trottaient dans sa tête à ce moment-là. Malgré cela, ce marin était content de prendre avec lui la brochure Questions fondamentales écrite dans sa langue maternelle. Yolanda savait que si cet homme polonais recherchait Dieu de tout son cœur, celui-ci se laisserait trouver. Elle pensait aussi que certainement le cœur de ce marin avait été touché ce jour-là, même si elle n’a plus jamais revu cet homme par la suite. Quelques jours après, une jeune femme polonaise est arrivée à la Mission et a pris cette même Bible pour enfants; elle était ravie de trouver quelque chose à lire dans sa propre langue. Elle préférait lire cette version plutôt qu’une Bible pour adultes dont elle ne comprenait pas tout le sens des phrases. Après toutes ces années d’attente sur le présentoir, cette Bible avait enfin trouvé son destinataire! Durant la même semaine, un autre marin a également mentionné que sa grand-mère lui lisait des histoires de la Bible lorsqu’il était petit. Ce membre d’équipage, un Péruvien, s’est converti et a souhaité tout de suite téléphoner à sa mère pour lui apprendre cette grande nouvelle car il savait qu’elle priait pour lui depuis longtemps! Les mères et les grands-mères ont une très grande influence sur la vie des enfants en leur parlant fidèlement de Dieu. Même


Cœurs de mères et de grands-mères

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Paul, l’évangéliste, rappelait à son jeune ami nommé Timothée la foi de sa mère et de sa grand-mère1. Les adultes ont toujours des souvenirs d’enfance gravés dans leur mémoire, les bons comme les mauvais. Chaque été, les collaborateurs de la Mission sont frappés d’entendre les marins faire si souvent référence à la foi de leurs mères et de leurs grands-mères. Ils mentionnent combien elles ont influencé leur vie par leur amour et leur relation avec Dieu. Confrontés à la même foi chrétienne lors de leur visite à la Mission de Seward, ces souvenirs leur reviennent alors à la mémoire. Il a été attesté qu’en Russie la foi a survécu principalement grâce aux grands-mères nommées les baboushka. Ce sont elles qui ont gardé vivante la flamme de la foi durant les sept décennies de communisme. Un marin originaire d’Ukraine avait entendu répéter tous les jours à l’école qu’il n’y avait pas de Dieu. Il n’a cependant jamais cru cela car durant toute son enfance, sa grand-mère lui lisait la Bible et lui parlait régulièrement de Jésus. Un de ses collègues de Latvia en Lettonie a raconté que pendant sa jeunesse il n’avait tout simplement jamais entendu le nom de Dieu que ce soit à l’école où lors de discussions. Cependant, il savait que Dieu existait également grâce à sa grand-mère qui lui en avait abondamment parlé! A maintes et maintes reprises, on entend à la Mission pour les marins ces mêmes phrases sortant de la bouche des marins en provenance des pays de l’Est: «Ma grand-mère m’a dit...» A l’époque dans laquelle nous vivons où tout change à une vitesse incroyable, l’amour et l’attention des grands-parents ne changent guère et ces petits garçons qui avaient l’habitude de s’asseoir sur les genoux de leurs grands-mères sont maintenant des marins qui naviguent en pleine mer! Ces grands-mères qui ont osé défier la façon de penser de leurs gouvernements ont toujours dit avec amour et courage la vérité au sujet de Dieu à leurs petits-enfants. Ce que ces grands-mères ont semé il y a 1

2 Timothée 1.5.


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longtemps2 rend le travail de la Mission pour les marins plus facile lorsqu’ils prennent le relais pour partager l’amour de Jésus!

Les grands-parents devraient saisir toutes les occasions pour avoir des relations avec leurs petits-enfants afin que leur foi déteigne sur la leur. Un grand-papa

2

Psaumes 78.3-4.


Chapitre 34 Les greniers de Dieu

«

S

oyez les bienvenus! C’est un plaisir de vous revoir!» Les membres d’équipage étaient invités à prendre place dans la camionnette de la Mission qui les attendait sur le quai. Le véhicule perdait de l’huile, ce qui avait pour effet de dégager une mauvaise odeur! Ce vieux véhicule bleu, âgé de douze ans, avait déjà été réparé maintes et maintes fois, mais la fuite d’huile demeurait malgré les nombreuses prières formulées à ce sujet... Après quelques soubresauts, la camionnette a calé en arrivant sur le quai. Cette fois-ci, le problème semblait à ce point grave que les membres de la Mission ont convenu que le coût d’une réparation serait trop élevé pour être envisageable. Que faisait Dieu dans cette situation? La saison n’en était qu’à la moitié de son terme et la Mission ne disposait à présent que d’un seul véhicule! En période de forte affluence, deux véhicules sont nécessaires pour effectuer les allers-retours entre le quai et la Mission. Les pauses des marins étant très courtes, peu de temps est réservé aux déplacements. Or, si un seul véhicule est disponible, plusieurs marins ne peuvent venir passer un moment à la Mission. Quelques années auparavant, le Seigneur avait pourvu la Mission d’un second véhicule de façon miraculeuse, mais


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en la circonstance aucune économie n’était disponible pour remplacer la vieille camionnette! Tous les membres de l’équipe étaient certains que Dieu avait le contrôle de toutes choses mais pourtant rien ne se passait! Cette situation avait déjà fait l’objet d’un sujet de prière durant l’hiver précédent. Demeurer patients et attendre les projets de Dieu semblait la seule chose à faire et le seul espoir. Puis un jour, une compagnie locale a téléphoné à la Mission: «Qu’en est-il de vos véhicules pour la saison à venir, sontils tous les deux en bon état?» En quelques jours, les fonds manquants sont arrivés... et des prières de reconnaissance sont alors montées vers Dieu! Combien c’était réjouissant de voir les marins grimper dans ce nouveau véhicule gris métallisé! Cette histoire de véhicule était souvent relatée aux équipages lors de leurs pauses autour d’un café! Parfois, d’autres marins, assis à une petite table et jouant aux échecs, écoutaient cette histoire avec intérêt. L’atmosphère était familiale. Personne ne semblait faire attention à l’état matériel des équipements de la Mission, à l’usure des tables ou aux nombreuses chaises dépareillées. Personne, vraiment? Un jour, on a demandé à une bénévole qui effectuait une visite sur un des paquebots si la Mission aurait l’utilité de quelques assiettes. «Oui, pourquoi pas!» a-t-elle répondu. Elle est alors revenue à la Mission avec une camionnette remplie de 400 assiettes superbes... Par ailleurs, l’équipe de la Mission désirait une nouvelle table, une table vraiment plus grande pour accueillir plus de monde. Or là encore, les coûts étaient élevés. Peu de temps après, une personne a proposé de payer une grande table sur mesure, fabriquée à la prison de Seward! Tout était vraiment impeccable lorsque la nouvelle table a été dressée pour la première fois; tout sauf les chaises vieilles et dépareillées! La même semaine où la table est arrivée, un des responsables d’un bateau de croisière a demandé à la Mission si elle avait besoin de quelques chaises…C’est ainsi qu’un ensemble de chaises a été offert à la Mission. Pour couronner


Les greniers de Dieu

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le tout, un autre bateau a offert, dans la même période, de l’argenterie! L’année précédente, la Mission avait déjà reçu d’un chrétien de la ville un nouvel équipement de cuisine et une machine à laver. Ainsi, après dix ans, la Mission a bénéficié d’un rafraîchissement matériel grâce à des dons guidés par la main du Seigneur. Cette même année, un message provenant de la Société Biblique Internationale a averti la Mission qu’une palette entière de Bibles en différentes langues, dont aucune destination particulière n’avait été attribuée, lui était offerte gratuitement. Cette palette est parvenue au beau milieu d’une de ces journées trépidantes où deux bateaux arrivent au même moment... Comment allait-on ranger toutes ces Bibles? Dieu a pourvu une fois de plus! En effet, le même jour, une famille venue d’une ville d’Alaska nommée Glennallen est arrivée, juste comme ça, pour voir comment les choses allaient… Un moment qui tombait à pic! Cette famille a décidé de rester deux jours et de s’occuper de ranger toutes les Bibles. Leurs enfants ont même aidé à les étiqueter. Gloire soit rendue à Dieu! Merci pour toutes les personnes qui ont été des instruments dans ses mains alors qu’elles ne connaissaient pas les besoins ou les désirs de la Mission. Le Seigneur, lui, les connaissait! Il avait le contrôle sur tout!

Notre groupe a besoin de brochures dans différentes langues afin de les distribuer aux personnes qui seraient intéressées à se joindre à nos moments de partage. Si vous pouvez nous les faire parvenir, nous nous empresserons de les distribuer. Philippines



Chapitre 35 Et si l’on passait à table?

T

arte aux myrtilles. Steak de saumon. Ragoût d’élan. Saucisse de renne. Soupe aux palourdes. Lorsque les marins arrivent à la Mission durant leur temps libre, le fumet de la soupe qui mijote sur le feu remplit la pièce et invite à se mettre à table. Du pain fait maison est livré par la boulangerie et ainsi chacun jouit d’un délicieux repas. Depuis plusieurs étés, un membre de la Mission se rend chaque soir en voiture jusqu’à la boulangerie pour y recevoir du pain, des beignets, des pâtisseries et de la soupe. A l’heure du déjeuner, on retrouve ici ou là des marins tenant un bol de maïs ou de soupe aux palourdes ou autre préparation locale. Le soir, la table est dressée et chacun est invité à se joindre au repas avec l’équipe de la Mission. La nourriture est différente de celle à laquelle les marins sont habitués. Parfois une nourriture locale est servie, telle que du flétan ou du saumon offert par des pêcheurs locaux et cuit au barbecue. Certaines personnes soutiennent la Mission en apportant des produits frais, congelés ou en boîte. Des hamburgers ou des hot-dogs, très appréciés, sont parfois offerts. Un jour, une femme nous a apporté un élan chassé par sa famille. David, en sa qualité de cuisinier professionnel, l’a alors apprêté pour en faire un ragoût délicieux.


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Avant que cette viande d’élan n’arrive à la Mission, Yolanda, une bénévole hollandaise, a vécu une expérience inoubliable. Un jour, elle est partie rendre visite à son amie Lois qui habite dans une crique non loin de Seward. Lois venait de temps en temps à la Mission pour donner un coup de main à la cuisine; mais ce jour-là, elle était chez elle et travaillait dur pour dépecer une très grosse pièce de viande qu’elle avait l’intention de hacher pour en faire des hamburgers d’élan. Yolanda lui a offert de l’aider. Comme un gros os devait être retiré, les deux femmes ont décidé de le scier en deux. Lois se débattait avec une scie à main pour couper cet immense côte tout en maintenant avec Yolanda l’énorme carcasse, le tout dans un fatras indescriptible! Tout cela était fort drôle. Le lendemain, lorsque Yolanda a dégusté le délicieux ragoût d’élan, elle s’est rappelée en souriant de ces moments un peu fous passés avec Lois. Une fois le repas terminé, elle a raconté toute cette histoire au marin qui était assis à table à côté d’elle; après le repas bien sûr, pas pendant! Au début de l’automne, on trouve des myrtilles sauvages dans les montagnes proches de Seward. Les gens apprécient beaucoup ces baies sucrées mais les ours en raffolent aussi! Pour cette raison, il y a des précautions à prendre lorsque l’on part à la cueillette! La Mission aime en avoir en réserve, ce qui permet d’offrir le dessert par excellence: une tarte aux myrtilles préparée par Ina, l’épouse de David...! Dieu est vraiment merveilleux d’avoir créé une si grande variété de nourriture, ce qui permet à la Mission d’offrir aux marins du monde entier les spécialités d’Alaska. La Mission leur offre ainsi la nourriture pour leurs corps et pour leurs âmes!1

1 «L’homme ne vivra pas de pain seulement...» (Matthieu 4.4); «Je suis le pain de la vie» (Jean 6.48).


Et si l’on passait à table?

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Il y a deux semaines, nous commencions notre croisière pour faire le tour du monde. Nous avons encore un grand bout de chemin devant nous. Nous allons découvrir l’Australie, Hong Kong, Singapour, l’Inde, l’Afrique du Sud et Rio de Janeiro, juste pour nommer quelques-unes des destinations prévues. Mais dans tout ce périple, je n’oublierai jamais ce «remarquable pays», l’Alaska, ainsi que vous tous à la Mission pour les marins. J’en garderai les meilleurs souvenirs. Tchécoslovaquie

Un repas en plein air.



Chapitre 36 Corneille et Cie

L

ydie, Corneille et un homme d’Ethiopie...1 Victor, du Mexique, Carlos, du Portugal, Ganesh, du Népal... Toutes ces personnes ont quelque chose en commun: elles craignent Dieu. Des gardiens de sécurité originaires du Népal sont employés sur certaines lignes de bateaux de croisières. Ces Gurkas, comme on les appelle, sont des militaires à la retraite ayant reçu un entraînement spécial de l’armée britannique. Ganesh est l’un d’eux. A son arrivée à la Mission, il a parlé à un bénévole de sa vie au Népal. Il a fait part de la pauvreté des habitants de la ville dans laquelle il habitait et des bonnes relations qu’il entretenait avec eux lorsqu’il rentrait au pays. Il a aussi raconté qu’il utilisait une partie de son salaire pour aider une école chrétienne que sa femme et la sœur de celle-ci avaient fondée à Biratnager, une ville de l’est du Népal. Dans certaines provinces de ce pays, la persécution envers les chrétiens augmente régulièrement et rend leur vie de plus en plus difficile. Mais, en dépit de cette situation, les personnes craignant Dieu, à l’instar de Ganesh, continuent à honorer Jésus. Lorsque Ganesh a commencé à travailler à bord des bateaux

1

Actes 16.14, Actes 10.1, Actes 8.27.


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de croisière, il a persévéré dans la prière et la lecture de la Bible, et a rejoint d’autres membres d’équipage chrétiens pour des moments de prière en commun. Tout semblait aller pour le mieux dans la vie de cet homme; mais lorsque Jeannette s’est jointe un jour à l’une des réunions de prière auxquelles il participait, elle a eu le sentiment que quelque chose manquait dans la vie de cet homme. Il œuvrait d’après les connaissances qu’il avait à propos de Dieu, mais il ne semblait pas avoir une relation d’intimité avec Christ. Il était prêt à s’asseoir et à parler avec Jeannette et se sentait ouvert à en entendre un peu plus sur Jésus. La plupart des bénévoles de la Mission croient que Dieu les a placés dans ce lieu et dans différentes situations pour les utiliser de façon personnelle. En la circonstance, Jeannette s’est sentie particulièrement bouleversée en prenant conscience de son rôle en tant qu’instrument dans la main de Dieu. Elle s’est sentie poussée à parler de l’Evangile le plus clairement possible à cet homme qui essayait de comprendre des concepts théologiques dans sa «troisième» langue... Un jour, à l’heure du déjeuner, Jeannette s’est rendue sur le bateau pour assister à une réunion de prière dans le quartier des officiers. Habituellement, les marins arrivaient à cette rencontre en uniforme mais cette fois-ci, ils avaient gardé leurs combinaisons de travail pleines de peinture fraîche. Ils sont arrivés tels quels, prêts à jouer de la guitare, chanter et prier. Ce jour-là, le capitaine du personnel avait proposé aux marins d’utiliser son carré d’officiers étant donné qu’aucun autre endroit n’était libre à ce moment-là pour une telle rencontre. Celle-ci réunissait habituellement des marins indonésiens, des gardiens népalais ainsi que Jeannette. Les premiers arrivés à la réunion ont été Jeannette et Ganesh qui ont alors entamé une conversation. Jeannette, se rappelant que lors d’un précédent entretien, Ganesh lui avait dit qu’il n’était pas chrétien, en a profité cette fois-ci pour lui demander: «Ganesh, quand souhaiteras-tu prendre au sérieux ton engagement


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avec Jésus?» En riant il lui a répondu: «Aujourd’hui!» C’est à ce moment-là que les autres marins sont arrivés. Ils avaient tous écourté leur temps de repos pour assister à la réunion de prière. Après un bref moment de discussion à bâtons rompus, chaque homme à tour de rôle a prié à haute voix. Lorsque le tour de Ganesh est arrivé, il a prié et prié encore en népalais. A la fin de ses prières, les marins ont vite quitté la pièce pour rejoindre leur lieu de travail mais Jeannette a retenu Ganesh et lui a demandé: «Tu as dit que tu voulais prendre Jésus au sérieux aujourd’hui, n’est-ce pas?» Ganesh lui a alors répondu: «Je viens de le faire! Lorsque mon tour est venu de prier, j’ai demandé à Jésus de pardonner tous mes péchés et d’être maintenant le pilote de ma vie...» Quelques temps plus tard, lors de son baptême, Ganesh a désiré changer son nom en adoptant le nom biblique de Corneille, un officier de l’armée romaine craignant Dieu2! Durant l’hiver qui a suivi, Ganesh Corneille a continué à avoir des contacts avec les marins chrétiens à bord. A la fin de son contrat, il est retourné en vacances chez lui en emportant de nombreuses brochures d’études bibliques. La saison suivante il a décidé de rester chez lui et de trouver un nouveau travail; il désirait passer plus de temps avec sa femme Ana qui luttait contre une grave maladie. Son nouvel emploi lui a également permis de s’investir davantage au sein de leur école chrétienne. Peu après son retour au pays, Ganesh a rencontré un de ses amis qui était également du régiment Gurka. Ce dernier lui a demandé s’il désirait l’accompagner en ville avec sa moto pour acheter quelques bières. La réponse de Ganesh a été: «Non, j’économise maintenant mon argent pour venir en aide à l’école chrétienne et de toute façon j’ai arrêté de boire!» A la suite de cette réaction, les deux hommes ont commencé une discussion au sujet du changement opéré dans la vie de Ganesh. Peu de temps après cette rencontre, cet ami a accepté Christ dans sa vie! 2

Actes 10,1-2.


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L’été suivant, lorsque Jeannette est arrivée à bord des bateaux de croisière, un gardien de sécurité népalais qu’elle n’avait jamais rencontré auparavant l’attendait. Il lui dit: «J’attendais pour vous rencontrer car je suis un bon ami de Ganesh que vous avez vu l’an dernier. Il y a deux semaines, je suis venu à Seward. Comme notre bateau était là pour la première fois, j’ai marché pendant quatre heures à la recherche de la Mission pour les marins dont mon ami m’avait parlé mais je ne l’ai pas trouvée!» Ces militaires du régiment Gurka se connaissent tous très bien par leurs noms et beaucoup entretiennent entre eux des relations amicales. Cela ouvre une porte pour le témoignage auprès des non-chrétiens de leur ancien régiment. Lorsqu’ils deviennent Gurkas, ces hommes doivent signer un formulaire attestant qu’ils n’adopteront aucune religion des pays occidentalisés; mais lorsqu’ils arrivent à la retraite, ils deviennent libres de leurs choix et bien sûr, certains d’entre eux sont curieux de découvrir ce qui leur était interdit auparavant! La Mission pour les marins est restée en contact avec l’école chrétienne située dans l’est du Népal en leur envoyant de temps en temps de la documentation biblique. Par ailleurs, Jeannette a appris que la belle-sœur de Ganesh, Mila, qui des années auparavant avait commencé cette école chrétienne avec sa sœur Ana, travaillait maintenant à bord des paquebots. Elle a même eu l’occasion de visiter Seward au cours de ses nombreux voyages au travers des mers et des différentes parties d’Alaska. Quelle joie alors pour Jeannette et Mila de faire connaissance! Mila a pu ainsi lui raconter toute l’histoire de cette école chrétienne. Elle avait grandi en Inde dans un environnement indo-bouddhiste. Lorsqu’elle était encore une petite fille, Mila est devenue très faible et malade, ce qui l’a obligée de rester à l’hôpital pendant longtemps. Durant cette période, elle a eu des contacts avec un missionnaire qui lui a parlé de Jésus. Elle a alors appris à prier et, au moment où Dieu l’a décidé, elle a


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été guérie. Puis, elle a expliqué à sa sœur Ana ce qu’elle avait entendu et toutes deux se sont converties. Malgré leur foi, elles ont été mariées à deux hommes hindous, comme la tradition indienne et népalaise l’exigeait. Heureusement, après leur mariage, les deux sœurs ont vécu dans la même ville située dans les montagnes de l’est népalais. Cette région ne possédait aucune école et le gouvernement refusait d’en construire une car les gens de cet endroit étaient pauvres et souvent malades. Ils pensaient qu’éduquer de tels enfants était du temps perdu! De toute façon, la plupart d’entre eux mourraient car il était connu que très peu atteignaient l’âge de douze ans. C’est alors que les deux sœurs ont décidé de commencer une école dans leur propre maison. Chaque jour, environ 85 enfants venaient chez elles pour être enseignés. Comme il était illégal d’être chrétien au Népal, les deux sœurs n’étaient pas autorisées à parler de la Bible aux enfants. Même s’il y a une certaine tolérance envers les chrétiens du Népal, l’évangélisation y est interdite! De ce fait, il n’y avait pas de culte le dimanche mais par contre, le samedi, à l’école, il y avait toujours un moment où des histoires étaient racontées. Durant cette période, Ana et Mila créaient des occasions pour enseigner des principes de vie basés sur des histoires de la Bible. L’école grandissant, l’argent dont elles avaient besoin manquait et les deux sœurs ont commencé à prier pour que Dieu ouvre les écluses des cieux. Mila s’est alors sentie conduite par le Seigneur à partir travailler en mer afin de subvenir aux frais que cette école occasionnait, alors que son mari continuerait à travailler au Népal. La dernière fois que le bateau de Mila est arrivé à Seward, Jeannette lui a remis beaucoup de documents et de supports pédagogiques chrétiens qu’elle a envoyés dans des caisses à son mari resté au Népal. Après les avoir reçues, il a commencé à lire certains livres puis s’est converti... Ainsi, grâce aux contacts avec la Mission pour les marins de Seward, ces deux sœurs ont à présent chacune un mari chrétien. C’est certainement une


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réponse aux nombreuses prières de ces deux fidèles épouses, «labourant» pour le Seigneur alors que leurs maris étaient encore hindous! Lorsque la maison de ces deux sœurs est devenue trop petite à cause des 400 élèves qui la fréquentaient, Mila et Ana ont décidé de construire un bâtiment. Avec les économies de son salaire, Mila a pu offrir les fenêtres et le plancher. La Mission de Seward continue à les soutenir par du matériel et des prières, et certains bénévoles aident personnellement cette école en leur envoyant une aide financière régulière. Souvent les membres de l’équipe de la Mission présentent l’Evangile avec crainte et tremblement, demandant en silence l’aide de Dieu alors qu’ils font face à des situations inattendues. Ils sont régulièrement émerveillés de voir les réponses de Dieu à leurs prières qui leur rappelle juste au bon moment les versets de la Bible qui concordent à la situation. Lors d’une rencontre, des bénévoles ont relevé des similitudes entre l’histoire de Ganesh et de Corneille; tous deux étaient des hommes craignant Dieu et qui ont consacré leur vie pour répandre la Bonne Nouvelle de Jésus leur Sauveur. La discussion s’est poursuivie et a mis en lumière que les histoires relatées dans la Bible montrent comment Dieu, dans sa grâce, honore la fidélité des personnes qui le craignent. Il met ensuite sur leur chemin un croyant afin de les aider à faire un pas de plus et connaître plus intimement Jésus. Dieu a envoyé Pierre vers Corneille, Paul a rencontré Lydie, et Philippe se trouvait sur la route de l’Ethiopien. Dieu continue aujourd’hui à procéder de la même manière. Il a envoyé Jeannette vers Ganesh le Népalais, Cheryl vers Victor le Mexicain et Yolanda auprès de Carlos le Portugais. Oui, Dieu continue d’envoyer des membres de l’équipe de la Mission auprès de personnes craignant Dieu afin de leur faire découvrir l’amour de Jésus! J’ai vécu cinquante-et-un ans et personne ne m’avait jamais fait part de ce message auparavant. J’ai demandé à Dieu de m’envoyer quelqu’un pour m’expliquer sa Vérité! Ethiopie


Chapitre 37 Incendies, tempêtes et pirates

«

C

eux qui étaient partis en mer sur leur bateau et travaillaient sur les grandes eaux, ceux-là ont vu la façon d’agir de l’Eternel et ses merveilles en haute mer. D’un mot il a fait souffler un vent de tempête qui a soulevé les vagues de la mer. Ils montaient vers le ciel, ils descendaient dans l’abîme, ils étaient angoissés face au danger; saisis de vertige, ils titubaient comme un homme ivre, et toute leur habileté était réduite à néant. Dans leur détresse, ils ont crié à l’Eternel, et il les a délivrés de leurs angoisses: il a arrêté la tempête, ramené le calme, et les vagues se sont calmées. Ils se sont réjouis de ce qu’elles s’étaient apaisées, et l’Eternel les a conduits au port désiré.»1 Tempête dans le golfe d’Alaska! Les rafales de vent atteignent 145 km/heure! Même les grands navires de croisière ont du mal à faire face aux vagues. La plupart des passagers restent allongés dans leurs cabines. «Pourquoi avons-nous choisi de partir avec la dernière croisière de l’été?» a crié une passagère à son mari. Elle se sentait malade et était terrorisée. Jamais elle n’avait pensé qu’une chose pareille arriverait alors qu’elle avait planifié ces si belles vacances. Elle et son mari s’étaient réjouis de pouvoir se retrouver sur le pont d’un navire à contempler le 1

Psaume 107.23-30.


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scintillement des glaciers majestueux; ils avaient attendu avec impatience de prendre des repas somptueux dans d’élégants salons agrémentés par la musique douce jouée par un groupe de musiciens... Mais, à cause de nombreuses baleines tuées par des bateaux de croisières les semaines précédentes, la compagnie de navigation avait modifié son itinéraire. Les passagers avaient été très déçus et, de plus, ils faisaient à présent face à cette terrible tempête! Un énorme bruit s’est soudain fait entendre. «Qu’est-ce que c’est que ce bruit? Avons-nous touché un rocher? En tous cas, je ne passerai plus jamais mes vacances à bord d’un bateau!» a affirmé cette passagère avec force. «Et pourquoi maintenant penser au naufrage du Titanic?» Elle désirait tellement jouir de ses vacances. Etait-ce un rêve ou un cauchemar? Le personnel de cabine était très occupé à prendre soin des passagers malades qui les appelaient à tour de rôle. Le mal de mer donnait du fil à retordre au personnel de l’intendance. Cela a été pour tout le monde un véritable soulagement lorsque le paquebot est enfin arrivé au port de Seward. Chaque jour de cette semaine-là arrivait un bateau avec les mêmes histoires à raconter. L’un d’entre eux avait affronté une vague tellement haute et forte qu’une partie de la balustrade avait été endommagée! Qui aurait cru une chose pareille? Plusieurs années auparavant, un bateau de croisière de la compagnie Regent a été aux prises avec une énorme tempête en plein golfe. Une semaine plus tard, ce même bateau nommé Regent Star a de nouveau rencontré des difficultés. Il a quitté à l’heure prévue le port de Seward sans problème, mais soudain, au milieu de la nuit, la salle des machines a pris feu. La petite salle de contrôle des machines était située au-dessus des moteurs, ce qui permettait aux techniciens d’observer les machines. Tout s’est passé très vite! Bert, qui était à ce momentlà machiniste de garde, a soudain vu des flammes contre les vitres de la salle de contrôle: «Oh non, a-t-il hurlé, nous allons tous mourir!» L’équipe responsable est immédiatement arrivée


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pour combattre les flammes mais après une demi-heure de lutte, le feu a continué à faire rage; le brasier augmentait. La chaleur intense qui se dégageait de ces flammes de près de dix mètres de haut a atteint la conduite d’eau située près du plafond de la salle des machines, et les jointures se sont séparées. Puis, l’eau a jailli de partout jusqu’à inonder complètement la pièce. Finalement, le feu a été étouffé. Mais comment avait-il été possible d’éteindre tout ce gazole brûlant avec de l’eau? Que s’était-il donc passé? Bert, lui, le savait... C’est Dieu lui-même qui avait éteint le feu! Des signaux de détresse ont été envoyés. Le bateau de croisière Rotterdam se trouvant à proximité et ayant entendu les SOS s’est dirigé vers le navire en détresse. Au milieu de la nuit, 800 passagers ont embarqué dans des canots de sauvetage et ont été emmenés à bord du Rotterdam avec l’aide de marins indonésiens. Ces marins ont travaillé sans relâche en pleine nuit jusqu’à ce que chacun soit en sécurité. Le Rotterdam a rejoint Seward à sept heures du matin. D’autres canots ou tenders2 ont servi à acheminer les bagages des passagers puis, finalement, le navire endommagé a été remorqué en direction de Whittier. Durant tout ce sauvetage, il n’y a pas eu de problèmes de communication ni aucun blessé lors des transferts. Les responsables de ces deux bateaux étaient chrétiens et les deux avaient fait confiance à Dieu pour son aide au cœur de cette situation dramatique. Le paquebot, situé maintenant dans le port de Whittier afin d’y être réparé temporairement, ne pouvait pas se rendre plus au sud pour de plus importantes rénovations. Durant ce laps de temps, David et Jeannette se sont relayés pour parcourir les 160 kilomètres qui les séparaient de Seward à Whittier afin de rendre visite à l’équipage et leur fournir ce dont ils avaient besoin tel que des cartes téléphoniques, des temps de prière et du soutien. Les marins ont vécu à bord du bateau durant 2 Un tender est un petit bateau servant au transfert de passagers ou de matériel depuis un paquebot au mouillage. (N.d.E.)


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plusieurs semaines et cette période n’a pas été facile car l’incendie les avait laissés sans électricité. A la suite de ces évènements, les techniciens-machinistes ont dû se rendre à Anchorage afin d’y être entendus par les garde-côtes officiels qui menaient une enquête à propos de cet incendie. Jeannette a reçu l’autorisation d’accompagner ces hommes pour qu’ils reçoivent un certain encouragement. Elle a eu l’occasion de s’entretenir avec les officiers grecs impliqués dans cette tragédie. Ces hommes la connaissaient grâce à ses nombreuses visites sur leur bateau et ils lui accordaient leur confiance. C’était un vrai miracle et une réponse aux prières qu’aucune vie n’ait été perdue lors de ce désastre! Chacun avait maintenant une meilleure appréciation de la nécessité des fréquents exercices et des règles de sécurité de ces garde-côtes! Chacun mesurait aussi la nécessité des prières pour la protection des navires et des équipages, car chaque voyage en mer n’est pas exempt de problèmes! A la fin d’une des saisons, lors d’une sombre, froide et venteuse nuit, un capitaine chrétien a pris contact avec David à la Mission et lui a demandé de venir le rejoindre avec le plus grand nombre de bénévoles possible sur son bateau accosté au quai de Seward. Toute l’équipe est arrivée à bord et s’est dirigée vers le salon du capitaine. Sa femme était aussi présente ainsi que quelques marins indonésiens, ce qui était très rare. Le capitaine a alors demandé à David de prier pour le paquebot et les personnes à bord car les conditions s’avéraient tumultueuses. Le navire était conçu pour faire face à de puissants vents; et même si le capitaine n’avait pas l’intention de prendre des risques inconsidérés, il demandait malgré tout que l’on prie pour cette situation. Une fois au large, le vent a considérablement augmenté et les vagues étaient encore bien plus hautes qu’il ne l’avait prévu. Le navire a brutalement été assailli de tous côtés, ce qui a provoqué la panique à bord. Tous les passagers étaient malades et pétrifiés de peur. Lorsque la mer s’est enfin calmée,


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des dommages ont été constatés mais personne n’avait été blessé. Dieu avait répondu aux prières! A la suite de cette mauvaise expérience, la compagnie de navigation a cessé d’envoyer ses bateaux de croisière dans le golfe d’Alaska durant le mois de septembre. Chaque fois que David a l’occasion de discuter avec le capitaine ou l’équipage qui se trouvait à bord de ce paquebot, ils reparlent de «la» tempête… Certaines mers et certains océans sont connus pour être spécialement dangereux, comme par exemple la mer du Golfe de Biscay3 où de nombreux bateaux ont déjà fait naufrage, ou l’océan Pacifique connu pour ses typhons. On se souvient de la protection miraculeuse du bateau missionnaire Doulos4 qui a été pris dans un typhon alors qu’il transportait de la littérature biblique depuis le Japon pour se rendre en Malaisie. Une autre fois, sur ce même bateau, quelques bénévoles de la Mission qui étaient en stage ont été surpris par un autre danger totalement inattendu en pleine nuit. «Vite, vite, partez toutes vous réfugier dans vos cabines!» avaient entendu crier les jeunes filles se trouvant sur le pont. «Dépêchez-vous!» Cette nuit-là, ces jeunes avaient décidé de dormir sur le pont à la belle étoile. La mer était calme et elles voulaient profiter de l’air frais et de la nuit étoilée. Les membres de l’équipage avaient attendu ce moment qui n’était possible que sous les tropiques, endroit où voguait alors le Doulos. «Pourquoi nous réveiller et nous faire peur?» ont demandé les filles en riant. Elles pensaient que tout cela était une farce du matelot qui se trouvait sur le pont. Mais lorsque celui-ci a pointé son doigt en direction du large, elles ont soudain saisi le sérieux de la situation et ont été terrifiées sur-le-champ: plusieurs bateaux de pirates arrivaient en direction du Doulos!! Durant cette période, on pouvait lire dans les journaux européens que des pirates étaient actifs dans le Pacifique. 3 Golfe de Biscay ou golfe de Gascogne: baie dans l’océan Atlantique entre le nord de l’Espagne et la France occidentale. (N.d.E.) 4

Le Doulos est un des bateaux d’Opération Mobilisation. www.fr.om.org/fr (N.d.E.)


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Mais ces jeunes étudiantes n’auraient jamais pensé qu’une telle chose aurait pu arriver à leur paquebot chrétien! Elles ont alors couru en direction de leurs cabines et, tremblantes, se sont mises à prier instamment le Seigneur pour sa protection. Pendant ce temps, le capitaine a ordonné que toutes les lumières du bateau s’allument afin que les incursions de ces pirates soient immédiatement repérées. Etait-ce le Seigneur qui avait donné au capitaine l’intelligence et la sagesse d’agir de cette façon, en réponse aux prières? Quoi qu’il en soit, les bateaux de pirates ont immédiatement fait demi-tour, aussi vite qu’ils étaient arrivés, et on ne les a plus revus! Ces récits terrifiants au sujet des aventures en mer sont toujours monnaie courante parmi les histoires de marins. Dans la Bible, Paul s’est aussi souvent trouvé au sein de tempêtes. Il a même failli une fois perdre la vie. Mais là encore, on peut lire que le Seigneur a protégé l’équipage et les passagers5. Incendies, vagues gigantesques, pirates, brouillard et typhon; c’est encore et toujours le Maître de la mer qui en a le contrôle... «Qui est donc cet homme? Même le vent et le mer lui obéissent!»6

5

Actes 27.

6

Marc 4.41.


Chapitre 38 Histoires d’ours

«

Q

ui parmi vous a peur des serpents?» a demandé Roeli, la missionnaire, à des enfants européens venus regarder un soir des diapositives concernant la Mission pour les marins en Alaska. «Des serpents en Alaska?» a réagi un enfant très intelligemment. «Vous voulez dire des ours!» a-t-il continué. «Bien, d’accord, alors qui a peur des ours?» a poursuivi la missionnaire. Ce jeune garçon n’était maintenant plus aussi sûr de ce qu’il devait répondre. Alors Roeli a expliqué: «Pour être honnête avec vous, j’ai toujours eu peur de me rendre dans des pays où l’on pourrait trouver des serpents ou des ours, mais figurez-vous que j’ai vu les deux dans mon jardin! Des serpents en Amérique du sud et des ours en Amérique du nord! Malgré ma peur, le Seigneur m’a envoyé dans ces deux endroits. Il désirait que je parle à d’autres de son amour dans ces parties du monde!» Les ours noirs vivent dans les montagnes qui entourent Seward en Alaska mais très peu se déplacent jusqu’en ville. Un soir, David travaillait dans le bureau de la Mission pendant que sa femme et ses deux enfants regardaient une vidéo chez eux, la porte d’à côté. «Maman, est-ce qu’on peut encore regarder un autre film? Celui-là est terminé. ont demandé les enfants. Ina, l’épouse de David, avait presque fini de préparer le souper


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et désirait maintenant arrêter la télévision mais soudain elle a entendu des martèlements contre la porte. «Ina! Ina! Ouvre la porte! Ina...!» Que se passait-il? Ina a accouru pour ouvrir la porte d’entrée. Son mari s’est précipité à l’intérieur et a refermé rapidement la porte derrière lui. «Un ours! Un ours dans la cabane de jardin!» a-t-il haleté. «Pourquoi n’es-tu pas venue m’ouvrir plus rapidement?» «J’étais dans la pièce avec les enfants», a répondu Ina inquiète. Elle lui a expliqué qu’elle avait hésité car habituellement David rentre par la porte de derrière qui n’est jamais fermée à clé. David lui a alors raconté ce qui s’était passé. Après avoir terminé son travail à la Mission, David est sorti dans la nuit pour rentrer chez lui. Comme d’habitude, il s’est dirigé vers la porte de derrière en direction de l’abri à poubelles et c’est alors qu’il a aperçu un ours derrière les ordures. Il a vite fait volte-face et a couru vers le devant de la maison, en criant et en frappant contre la porte. Le lendemain matin, ils ont découvert les ordures éparpillées et une partie de la paroi de l’abri démolie. Ils ont alors appelé les policiers qui leur ont appris que des ours s’en étaient pris à plusieurs poubelles dans la même rue cette nuit-là. Ils les ont mis en garde et leur ont conseillé de rester prudents car à cette période de l’année, les ours sortent de leur hibernation et sont affamés. En effet, à la fin de l’hiver il n’y a pas encore beaucoup de saumons ou de baies sauvages pour satisfaire leur appétit. Quelques jours plus tard, ils ont entendu des tirs durant la nuit. Deux ours avaient essayé d’attaquer des chevaux dans une écurie située près de la Mission. Lorsque le propriétaire les a découverts, il a pris son fusil et a tiré sur les deux ours. En Alaska, les histoires d’ours sont plutôt fréquentes. Presque chaque personne qui revient d’une excursion a une histoire à raconter! Lorsque les membres d’équipage ont quelques heures libres, ils partent parfois se promener dans le parc derrière la Mission pour admirer des chutes d’eau. Lors de leurs escapades, ils emmènent avec eux Rosie la chienne de la Mission. Cette compagnie est pour eux à la fois un plaisir mais


Histoires d’ours

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aussi une sécurité lorsqu’ils aperçoivent des traces laissées par les ours le long des sentiers broussailleux. Un jour, une femme allemande nommée Heidi est arrivée à la Mission. Elle a raconté qu’elle venait de rentrer d’une escapade au Glacier Exit, situé à quelques kilomètres de Seward. Elle s’était munie de clochettes pour faire fuir les ours et avait décidé d’emprunter le sentier le plus élevé pour se rendre jusqu’à la mer de glace Harding. Mais ses clochettes ne l’avaient pas protégée comme elle l’aurait cru. Arrivée au sommet du sentier, elle a contourné un gros rocher quand soudain elle a vu deux ours noirs courir à toute allure dans sa direction. Terrifiée, Heidi s’est figée net! «Oh Seigneur!» a-t-elle crié. Elle croyait vivre les derniers instants de ses 21 ans d’existence. «N’était-ce pas stupide de s’aventurer toute seule dans une région où les ours sont si nombreux?» a-t-elle pensé terrifiée... «Pourquoi ces clochettes n’avaient-elles servi à rien?» On lui avait expliqué que si elle se trouvait en face d’un ours, elle devait reculer en marchant très lentement et, si l’ours l’avait repérée, elle devait lui parler doucement et sans interruption. Mais en la circonstance, ces deux ours n’avaient pas l’air de l’écouter; ils continuaient leur course dans sa direction! Puis, à sa grande surprise, et à celle des ours eux-mêmes semblait-il, les bêtes se sont détournées de façon tout à fait inattendue et ont continué leur course! De retour à la Mission, Heidi était à présent heureuse de raconter son histoire dans sa langue à Anne-Marie, une autre bénévole allemande. Sur ces entrefaites, cette dernière lui a demandé ce qu’il en était de sa relation personnelle avec Dieu: «Que se serait-il passé si ces deux ours t’avaient vraiment tuée?» Heidi lui a répondu qu’auparavant, lorsqu’elle était en Allemagne, elle avait l’habitude d’aller à l’église avec ses parents mais qu’elle avait été déçue par les gens. «Le fait d’aller à l’église ne fait de personne un chrétien», lui a dit Anne-Marie. «Cela ne sauvera pas la vie de quelqu’un. La réponse n’est-elle pas d’avoir une connaissance personnelle de la personne de Christ?» Elle a ensuite donné à Heidi la version allemande de


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la brochure Questions fondamentales. Heidi l’a acceptée et l’a emportée dans ses bagages le lendemain lors de son départ. A la suite de cette expérience, l’équipe l’a invitée pour la prochaine fois à dormir à la Mission plutôt que quelque part sous sa tente! Dieu avait-il sauvé la vie d’Heidi afin qu’elle apprenne à mieux le connaître? L’année suivante, lors d’un de leurs jours de congé, Joe et Jeannette étaient heureux de partir à nouveau à la découverte d’un des nombreux sentiers de la région de Seward, juste pour être pendant un moment éloignés des multiples activités missionnaires. Ils connaissaient bien la région, ses risques et sa beauté sauvage. Ils se délectaient de leur jour de congé ensoleillé et admiraient les magnifiques fleurs qu’offre ce coin du monde. Les myrtilliers étaient en fleur. «Que se passerait-il si j’ouvrais maintenant les yeux et que j’aperçoive un ours devant moi?» s’est soudain mise à penser Jeannette, alors qu’elle était couchée dans l’herbe sur un flanc de colline. «Ne serait- ce pas amusant?» Quelques minutes plus tard, Joe s’est levé et est monté un petit peu plus loin vers le sommet de la montagne pour toucher la neige; il a soudain sursauté. «Qu’as-tu vu?» lui a demandé Jeannette avec empressement en s’approchant de lui. «Viens, vite, rebroussons chemin», lui a ordonné Joe. «Il y a un ours là-bas de l’autre côté des buissons...» A présent, Jeannette voyait l’ours flairant les alentours et sentant certainement leur présence. Alors qu’ils descendaient rapidement le sentier, l’appareil de photo de Jeannette est tombé de sa poche au milieu des petits buissons. «Comment allons-nous retrouver cet appareil?» a-t-elle chuchoté à son mari. «Joe, observe l’ours pendant que je cherche dans les buissons!» Avant même que l’ours ne les rejoigne, le pied de Joe a accidentellement heurté l’appareil ainsi retrouvé; ils ont alors repris leur course en dévalant la colline! Ici, dans cette région et en particulier dans les fjords Kenai d’Alaska, les ours sont partout et les promeneurs doivent être prudents. En même temps, ces fjords font partie de la création de Dieu qu’il est bon de pouvoir contempler. Durant la période


Histoires d’ours

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estivale, des touristes arrivent presque tous les jours dans cette région à bord de leurs bateaux de croisière pour admirer ces paysages fabuleux. Sur ces mêmes bateaux travaillent des hommes et des femmes merveilleux, originaires des quatre coins du monde; ils travaillent dur pour servir les passagers et assurer la bonne navigation des navires. Autant pour les touristes que pour les marins, le message est le même: «Soyez avisés quant aux ours!» Mais plus encore... «Soyez avisés quant à Dieu!»



Chapitre 39 SOS et bouées de sauvetage

L

e cri de détresse enregistré sur le répondeur téléphonique a laissé David totalement perplexe... Il ne savait pas où lancer la bouée de sauvetage! Ce message était arrivé juste avant Noël et provenait d’un membre d’équipage travaillant à bord d’un bateau de pêche russe accosté dans le port de Seward. David s’est alors dirigé vers le quai afin de parler avec les marins. Leur compagnie maritime venait de prendre la décision de les renvoyer dès le lendemain chez eux par avion à Vladivostok en Sibérie. Ce départ soudain créerait de gros problèmes. Ces marins avaient travaillé durement à bord de ce bateau pendant six mois et n’avaient encore reçu aucun salaire. Lorsqu’ils seraient à nouveau en Russie où cette compagnie n’a pas de représentant officiel, il serait quasi impossible pour l’équipage de recevoir l’argent qui leur était dû. En attendant, et à cause de ce retard de salaire, les épouses de ces marins avaient dû emprunter de l’argent; des escrocs à Vladivostok avaient été très contents de leur offrir cet argent comptant! Si l’équipage retournait maintenant à la maison sans argent, chacun irait au devant de graves ennuis. «David, que pouvons-nous faire? S’il te plaît, aide-nous!» l’ont-ils supplié. David était disponible cette journée-là et il a été en mesure de prendre des dispositions pour obtenir


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une assistance juridique. Les autorités ont alors contacté les propriétaires de ce vaisseau et leur ont fait comprendre qu’ils n’avaient pas d’autres choix que de payer les salaires complets à l’équipage. S’ils ne s’exécutaient pas immédiatement, leur bateau serait saisi et si les propriétaires n’avaient pas d’argent, des mesures seraient prises afin de vendre le navire. L’équipage serait ainsi payé et l’argent restant serait utilisé pour régler les frais des spécialistes légaux. Il s’est avéré que les propriétaires étaient des Russes domiciliés à Seattle et les salaires complets ont été versés à l’équipage dans les vingt-quatre heures qui ont suivi... Ces marins sont ainsi retournés dans leurs familles la veille de Noël entièrement indemnisés! Avant que David ne reparte, ces hommes lui ont remis une bouée de sauvetage en signe de gratitude envers la Mission et en souvenir de l’aide reçue à la suite de leur SOS. De la même manière, un équipage d’un bateau cargo a aussi téléphoné à David pour solliciter son aide. Alors que David rendait visite à ce vieux vaisseau, quelques membres de l’équipage se sont approchés de lui de nuit. Les conditions de sécurité étant insuffisantes à bord, les marins ont remis à David une longue liste détaillant les différents problèmes techniques qu’ils rencontraient. «S’il te plaît, aide-nous! La compagnie veut que nous mettions le cap sur le Pacifique nord mais au niveau de la chaîne aléoutienne1, les rafales de vent atteignent jusqu’à 200 km/h. Nous ne pouvons pas y arriver avec un navire dans un si mauvais état; c’est beaucoup trop dangereux...» Les marins ont poursuivi en lui expliquant qu’ils avaient rencontré de nombreux problèmes dans la salle des machines lors de leur voyage les menant de l’Asie jusqu’à Seward; leur moteur a calé douze fois! Malgré cela, la compagnie désirait continuer le voyage avec ce vieux bateau même si le temps était menaçant. Ces hommes étaient vraiment inquiets! 1 La chaîne aléoutienne est une chaîne de montagnes d’Alaska. Elle culmine à 3109 mètres au-dessus du niveau de la mer. (N.d.E.)


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David a contacté les personnes impliquées et finalement a fait contrôler les moteurs en s’assurant que tout était bien réparé avant que le bateau ne parte pour la traversée du Pacifique nord. Le Seigneur a ainsi utilisé la Mission en tant qu’intermédiaire pour aider cet équipage. En reconnaissance, la Mission a reçu une autre bouée de sauvetage! Ces deux bouées de couleur orange sont exposées dans l’entrée du bâtiment de la Mission. Les équipages de ces deux vaisseaux savaient qu’ils pouvaient compter sur la Mission pour les marins pour obtenir un résultat concret; il était clair pour eux que non seulement David était l’homme de la situation pour servir d’intermédiaire auprès des autorités en place mais également qu’il intercéderait par ses prières auprès du Dieu des cieux. Même si David n’avait pas touché le cœur des personnes des compagnies de navigation concernées, le Seigneur avait été présent lorsque ces marins avaient crié dans leur détresse: «Aide-nous! Sauve nos âmes!» Un hiver, lorsqu’un bateau charbonnier est arrivé pour la première fois dans le port de Seward, il s’avérait difficile de savoir si cet équipage formé de Grecs et d’Ukrainiens avait des besoins spécifiques. Un premier indice est apparu au moment où l’officier responsable de l’immigration a refusé à l’équipage la permission de descendre à terre. Pour ajouter à cette privation, un vent glacial d’une vitesse de 90km/h. n’a cessé de souffler durant les neuf jours de leur séjour, rendant leur travail difficile et dangereux. La Mission s’est assurée que les membres d’équipage soient munis de vêtements adéquats pour faire face à ces températures glaciales alors qu’ils s’affairaient sur le pont. David leur a rendu de nombreux services mais leur plus grand besoin était d’obtenir un téléphone. «Nous voulons appeler nos femmes!» réclamaient désespérément ces hommes. Leur bateau étant amarré à l’extrémité d’un quai d’environ 400 mètres de long, tirer une ligne téléphonique sur une si longue distance était hors de question. A cette époque il n’existait encore aucun téléphone portable pour usage domestique, mais


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une compagnie téléphonique située à Kenai a été d’accord de prêter à la Mission un des leurs. Le visage triste d’un des membres de l’équipage s’est changé en une expression de soulagement lorsque sa femme lui a annoncé qu’ils venaient d’être parents d’un petit bébé, un garçon en pleine forme... Il a même versé des larmes de joie. Cette scène émouvante valait plus que toute autre récompense! Mais où se trouvait Jésus dans tout cela? Pour l’équipage de ce bateau composé de Grecs et de Russes orthodoxes, Noël n’était pas loin non plus. David leur a parlé librement des différentes dates auxquelles la naissance du Sauveur était célébrée et en a profité pour relever que ces traditions ne devaient pas être des occasions de division gâchant ainsi le miracle de la venue de Christ sur terre. Il s’est avéré que tous ceux qui parlaient anglais étaient d’accord de discuter de spiritualité. David a déclaré: «Ils ont demandé des Bibles dans les deux langues et cela a été pour moi un privilège de pouvoir répondre à leur demande... pour le salut de leurs âmes!» Depuis de nombreuses années je suis un homme religieux et j’ai essayé d’atteindre Dieu mais maintenant c’est Dieu lui-même qui est venu vers moi. Philippines


Chapitre 40 Le carton à pizza

«

E

tes-vous au courant que notre paquebot a heurté un rocher ou un iceberg dans la Baie du Prince William?» Cette question a été posée de nombreuses fois à l’équipe de la Mission après l’arrivée au port du bateau de croisière. L’évaluation des dégâts a été effectuée par des plongeurs qui ont examiné la coque du bateau. Les dégâts étaient plus importants que prévus et des réparations de première urgence devaient être faites rapidement. Un délai de deux jours était maintenant nécessaire afin que les gardes-côtes contrôlent la sécurité et que la compagnie d’assurance puisse envoyer des experts sur place. Cette situation a permis à quelques membres d’équipage de débarquer et, durant ces deux soirées, la Mission est restée ouverte jusqu’à des heures tardives. Quelques semaines auparavant, un des membres d’équipage de ce bateau était assis seul sur le canapé de la pièce principale de la Mission. Il avait décliné l’invitation de se joindre aux autres marins pour le souper; il attendait ses amis qui étaient en train de téléphoner. Yolanda, une des bénévoles présentes, s’est dirigée vers lui pour lui parler. Cet homme nommé Alfredo était originaire de Madère, une île portugaise située dans l’océan Atlantique. Au premier abord, ce marin


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semblait timide, mais finalement il s’est ouvert à Yolanda et lui a fait part de ses soucis... D’un commun accord, Alfredo et sa femme avaient décidé qu’il devrait aller travailler en mer afin de gagner plus d’argent pour améliorer leurs conditions de vie; mais après avoir vécu de nombreux mois sans lui, son épouse ne pouvait plus supporter la solitude. Durant sa récente permission, sa femme lui avait dit qu’elle souhaitait le quitter. A présent Alfredo se demandait quels pouvaient bien être ses projets pour le futur! Yolanda l’a écouté avec compassion puis lui a offert la petite brochure intitulée Questions fondamentales, ainsi qu’une Bible, le tout en portugais. Elle a été contente qu’il les accepte! Grâce au délai engendré par les dégâts du navire, Alfredo a eu la possibilité de revenir à plusieurs reprises à la Mission durant le week-end. Il a expliqué que lors de sa lecture de la Bible et de la brochure, il avait ressenti une paix profonde et ceci même si sa situation maritale n’avait pas évolué. Lorsqu’on a demandé à Alfredo s’il désirait suivre un cours biblique par correspondance afin de l’aider dans l’étude de la Bible, une longue conversation s’en est suivie. Durant cette discussion, Alfredo a confié que même s’il ne venait pas d’une famille très riche, il aimait partager avec d’autres ce qu’il possédait et il a raconté ce qui lui était arrivé le soir où il s’était rendu dans une pizzeria avec ses amis. Il avait vu un homme sans-abri assis au bord de la route et s’était dit qu’il allait acheter une pizza supplémentaire pour la lui donner. Lorsqu’il lui a proposé la pizza, le mendiant a refusé de la prendre. Surpris, il la lui a présentée une seconde fois mais cet homme n’a même pas daigné le regarder. Alfredo était perplexe... Il a alors essayé une autre technique. Cette fois-ci il a ouvert le couvercle du carton et la lui a donnée. A cet instant, les yeux de cet homme se sont ouverts tout grands car il voyait vraiment le cadeau qui lui était offert! Il a pris la pizza et l’a immédiatement mangée! Quelqu’un avait vraiment pensé à lui dans ses besoins alors qu’il se débattait comme il le pouvait face aux épreuves de la vie... En écoutant cette histoire, Yolanda était émerveillée par


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l’exemple merveilleux que le Seigneur lui donnait à ce moment précis. Alfredo avait déjà entendu l’histoire du sacrifice de Jésus sur la croix et de son offre de pardon mais il ne l’avait pas encore acceptée pour lui-même; il n’arrivait pas à croire cela. A une occasion, ce salut lui avait été présenté personnellement mais il ne pouvait pas croire que ce «Pain de Vie»1 lui était aussi destiné! A cet instant, Yolanda a demandé à Alfredo s’il n’avait jamais considéré que le cadeau qu’il avait donné à ce mendiant pouvait avoir une similitude avec celui que Jésus voulait lui offrir à lui personnellement. Ce n’est pas avant que la boîte ait été ouverte, c’est-à-dire pas avant qu’Alfredo ne commence à ouvrir la Bible, qu’il a vu que c’était quelque chose qu’il désirait vraiment posséder... Alfredo a alors commencé à saisir cela et ce même soir, il a accepté Christ dans sa vie! Le retard du départ de son bateau avait permis à Alfredo de passer plus de temps à la Mission, ce qui a donné lieu à des discussions approfondies! Oui, son bateau avait bien heurté un rocher et les dégâts auraient pu être plus graves encore, mais le Seigneur désirait offrir à une personne le cadeau du salut à l’instar d’une «pizza présentée dans une boîte ouverte»! Cette fois-ci, le fait de heurter un rocher n’avait pas entraîné le même désastre que pour le Titanic. A la place, Dieu avait profité de cet incident pour en tirer du bien. Des dégâts causés, il en était résulté un cadeau de vie éternelle pour un marin vivant sur une île située dans un autre océan. Dieu connaissait les soucis et les angoisses d’Alfredo concernant sa vie et il avait aussi entendu ses cris. De son côté, Jeannette, qui travaille aussi à la Mission, avait fait ce même été la connaissance d’Alfredo à bord de son bateau lors de sa première venue à Seward. Lorsqu’il lui a dit qu’il venait de Madère, ils ont commencé à parler de cette île car Jeannette connaissait assez bien cet endroit. Il y a quelques années, elle et son mari s’y étaient rendus pour les vacances et avaient 1

Jean 6.48.


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même fait la connaissance d’un missionnaire qui travaillait sur place. Il les avait invités à participer aux rencontres organisées dans son église. Durant le restant de l’été, Jeannette n’avait pas eu l’occasion de revoir Alfredo à bord du bateau mais ils s’étaient revus à plusieurs reprises à la Mission. Grâce à ce premier contact où Jeannette avait mentionné ses vacances à Madère six ans auparavant, une «fondation» avait en quelque sorte été posée pour la réalisation future d’un plan que Dieu avait en réserve... Seul Dieu a cette vue d’ensemble; ses voies et ses pensées sont bien plus élevées que ce que les êtres humains ne peuvent penser2! Une fois le bateau réparé, prêt à quitter l’Alaska et à voguer sur d’autres eaux, Alfredo a confié que lors de sa prochaine permission à Madère, il était déterminé à rendre visite à l’église de la Mission dont lui avait parlé Jeannette.

J’ai apprécié l’aide que vous apportez en écoutant les problèmes des gens, spécialement les miens! Je prie pour que Dieu continue à toujours vous diriger. Indonésie

2

Esaïe 55.9.


Chapitre 41 Libéré de son fardeau

P

endant qu’elle était en train de se servir une tasse de café, Yolanda a demandé à l’homme assis à côté d’elle: «Voulezvous aussi un café?» Au même moment, le pianiste qui était en train de jouer a marqué un silence; la bénévole a alors continué: «J’aime votre façon de jouer du piano aujourd’hui, Edgar!» Yolanda avait déjà entendu cet homme qui jouait toujours du piano lors des cultes de la Mission. Il a souvent retenu son attention car il jouait de façon tranquille avec beaucoup de sensibilité, la plupart du temps en mode mineur, comme s’il était triste, son regard perdu dans le lointain. Elle l’avait observé à de nombreuses occasions mais n’avait jamais eu un contact direct avec ce marin auparavant. Mais ce soir, il jouait différemment, comme si quelque chose s’était apaisé peut-être en lui... Elle lui a alors avoué qu’elle appréciait particulièrement sa façon de jouer à ce moment-là. Finalement Edgar s’est décidé à parler. Il y a une année, après la mort de son petit garçon, il avait eu beaucoup de difficultés à se remettre à jouer du piano. La maladie de son fils avait duré plusieurs années et maintenant, il n’était plus là. Ce petit garçon manquait terriblement à ce père endeuillé; on pouvait lire la douleur sur son visage... A l’écoute de ce récit, des larmes ont rempli les yeux de Yolanda. A présent, c’était à son tour d’être «perdue» dans ses


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pensées car ce récit lui rappelait la mort de son propre bébé et celle de son mari un peu plus tard alors qu’il était encore jeune... Dans le salon de la Mission, une vingtaine de marins parlaient, s’affairaient et blaguaient en se déplaçant ici et là. Yolanda a pris une Bible de l’étalage et s’est assise par terre à côté de la chaise d’Edgar. Tous deux ont continué leur discussion, comme s’ils étaient tout seuls sans se soucier des gens présents autour d’eux. Ils partageaient leur peine commune d’avoir été séparés de leurs bien-aimés. Yolanda a ouvert la Bible et a commencé la lecture d’un Psaume réconfortant: «Si l’Eternel n’était pas mon secours, j’habiterais bien vite dans le monde du silence.»1 Edgar a regardé Yolanda et lui a dit: «Mais vous savez... tout cela est de ma faute... à cause de ma façon de vivre, Dieu m’a puni...» C’est ce que sa femme lui avait dit aussi! Le cœur de Yolanda a été transpercé de douleur en entendant cela. «Mais Edgar, vous m’avez dit que votre fils était malade, qu’il était atteint d’un cancer. Comment cela aurait-il pu être de votre faute?» Yolanda a senti que cet homme était écrasé par un sentiment de culpabilité. Elle a repris sa Bible et a lu un autre Psaume: «Je n’étais encore qu’une masse informe, mais tes yeux me voyaient, et sur ton livre étaient inscrits tous les jours qui m’étaient destinés avant qu’un seul d’entre eux n’existe.»2 Yolanda a expliqué à Edgar que Dieu avait le contrôle de chacune de nos journées, sachant ce qui arrivera bien avant que ce jour ne vienne. «Vous savez, c’est pour cette raison que Jésus est mort, c’est justement pour prendre sur lui toutes les punitions qui nous étaient destinées», a-t-elle continué. Edgar a fixé de nouveau Yolanda: «C’est une révélation!» lui a-t-il répondu. «Je ne l’avais jamais compris de cette façon... Vous m’avez vraiment encouragé. Merci!» Yolanda a écrit les versets qu’elle venait de lire afin qu’Edgar, une fois dans sa cabine, puisse à nouveau les retrouver dans la Bible écrite dans sa langue maternelle. Il était l’heure maintenant pour 1

Psaume 94.17.

2

Psaume 139.16.


Libéré de son fardeau

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chacun d’eux de retourner à leur travail respectif. Le cœur de Yolanda avait été touché par le récit de ce marin et elle y repense encore souvent. Deux semaines après, ce même équipage était de retour et Yolanda a revu ce marin dans le sous-sol de la Mission. Il était en train de rechercher de la littérature chrétienne. Edgar se trouvait là accompagné d’un collègue chrétien et d’un bénévole. «Yolanda, vous savez la nouvelle? Edgar a accepté Christ durant ces deux dernières semaines de voyage en mer!» Yolanda ne pouvait presque pas croire ce qu’elle entendait... «Edgar n’était donc pas chrétien lorsqu’ils avaient parlé la dernière fois? Avait-il été libéré de sa culpabilité?» Son cœur était vraiment touché en prenant conscience qu’au travers d’un partage concernant la perte de leurs bienaimés, le Seigneur avait créé quelque chose de nouveau... Bien d’autres personnes avaient essayé de réconforter Edgar dans le passé mais ils n’avaient jamais expérimenté un deuil comme le sien. Par contre, Yolanda savait exactement ce qu’il ressentait car elle avait fait face à ce même genre d’expérience douloureuse, et leur conversation avait eu un sens totalement différent! Maintenant Edgar savait que la mort de son petit garçon n’était pas liée au style de vie qu’il avait mené... Il a partagé cela avec sa femme et à présent il peut prier afin que tous les deux reçoivent la guérison et que leur mariage soit restauré. Sa tristesse est toujours présente mais son sentiment de culpabilité a disparu. «Merci Seigneur Jésus!» Maintenant Edgar peut être assuré de retrouver un jour son fils dans les cieux... Deux semaines plus tard encore, le bateau de croisière d’Edgar est revenu pour une dernière fois avant de mettre le cap vers le Sud. Une fois de plus Edgar a joué du piano à la Mission. Un chant de victoire s’est élevé dans toute la maison! C’était vraiment de la musique! Yolanda qui se tenait près du piano s’est presque mise à pleurer. Cet homme était-il le même Edgar rencontré un mois plus tôt?


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Quand les cœurs chavirent

Quelques instants auparavant, alors qu’elle discutait avec Edgar, une femme slovaque nommée Katja s’est mêlée à leur conversation. Tous deux se connaissaient car ils travaillaient dans le même département à bord du bateau. Edgar a commencé à parler de Jésus à cette jeune femme. Yolanda retenait sa respiration car elle savait que Katja ne voulait rien entendre à ce qui touchait la foi chrétienne. Elle lui avait offert une fois un film sur Jésus en slovaque, ce qui avait provoqué en elle une forte réaction de mépris. Mais tranquillement, Edgar continuait à s’adresser à Katja dont le visage s’adoucissait alors qu’elle l’écoutait. Etait-ce la même Katja que celle qu’elle avait connue? Etait-ce le même Edgar qu’auparavant? Etait-il possible que cette toute nouvelle plante qui était sortie d’une graine de douleur était déjà si rapidement en train de porter du fruit?3 Oh merci mon Dieu pour le changement que tu opères dans ces vies!

Grâce à votre ministère, j’ai vu la vie d’une façon différente et maintenant je fais confiance à Dieu journellement. Continuez à prier pour moi afin qu’un jour je me donne tout entier à Lui. Saint Vincent

3

Jean 12.24.


Chapitre 42 Répercussions du 11 septembre

N

elly, une bénévole hollandaise, a travaillé quelque temps à la Mission et devait bientôt rentrer dans son pays pour reprendre son travail dans un hôpital. Elle avait déjà réservé une place sur le bateau de nuit et elle devait absolument être de retour le week-end suivant. Nelly avait toujours rêvé de partir en Mission. Durant les années précédentes, elle avait passé ses vacances en proposant son aide dans des missions de différents pays. Son périple l’avait conduite jusqu’à la Mission pour les marins de Seward en tant que bénévole. Cette infirmière avait aussi été invitée à se rendre à Glennallen pour visiter l’hôpital Faith Hospital de Send International. Elle désirait faire l’expérience de la vie quotidienne au sein des populations les plus reculées d’Alaska. George, le mari de Cheryl, était un missionnaire à plein temps travaillant justement à Glennallen à la station de radio de la Mission Send International où devait se rendre Nelly. Elle a ainsi fait le trajet avec lui et a pu apprécier la beauté des paysages. Ils ont sillonné la vallée de Matsu et ont traversé des canyons et des ravins dont celui de la rivière qui s’écoule du glacier Matanuska et disparaît dans des gorges aux profondeurs impressionnantes. Nelly était particulièrement sensible à ces paysages montagneux grandioses puisqu’elle habitait dans un pays tout à fait plat. Ces beautés faisaient monter en elle des


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Quand les cœurs chavirent

élans de louange envers Dieu et sa création magnifique dont la pureté rendait sa présence presque tangible! «George, est-ce que tu dois faire tous ces kilomètres tous les quinze jours?» a demandé Nelly. Dans son petit pays, on peut presque rejoindre les quatre frontières limitrophes dans les huit heures de conduite qu’ils venaient d’effectuer! L’Alaska lui paraissait tellement immense en comparaison des Pays-Bas! Une fois arrivés à Glennallen, Nelly a aussi beaucoup apprécié la visite de la station radio dans laquelle travaillait George. C’était intéressant de voir l’endroit où lui et son épouse Cheryl avaient exercé leur ministère durant 25 ans. En tant qu’infirmière, Nelly se réjouissait de visiter à présent le petit hôpital. Ina Hawkins lui en avait parlé plusieurs fois en lui racontant quelques souvenirs lorsqu’elle y travaillait. Il s’agissait en fait d’une clinique pour les urgences de la région et l’établissement ne ressemblait en rien à l’hôpital flambant neuf dans lequel Nelly travaillait en Hollande. L’attitude si aimable du personnel donnait l’impression que tout le monde était chrétien... Nelly a dormi dans l’enceinte de la Mission Send International et cette même nuit, un malade a dû être transféré par hélicoptère vers Anchorage. Elle comprenait mieux maintenant l’état de vulnérabilité dans lequel pouvaient se sentir les gens vivant dans ces zones si retirées et les dangers éventuels qu’ils pouvaient encourir. Cependant, deux jours plus tard, au moment de l’effondrement des Twin Towers du World Trade Center, elle a pensé que tout cela était bien relatif et que vivre dans une grande ville comme New York pouvait aussi comporter des risques! Sur le chemin du retour, ils ont emprunté une des plus belles routes d’Alaska, celle qui conduit de Glennallen à Valdez. De là, Nelly a pris le ferry en direction de Whittier en ce fameux jour du 11 septembre 2001! Un de ses collègues s’était offert pour venir la chercher à Whittier et la ramener à la Mission à Seward. Nelly s’était réjouie à l’idée de voir des loutres, des otaries et peut-être même des baleines dans la magnifique Baie du Prince


Répercussions du 11 septembre

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William. Elle avait beaucoup aimé son séjour en Alaska ainsi que les défis qui avaient été devant elle lors de sa collaboration à la Mission pour les marins. Elle était vraiment emballée d’avoir découvert au moins une partie de ce grand pays avant de rentrer en Hollande quelques jours plus tard. Mais comme ce matin-là, Nelly n’avait pas entendu les nouvelles, elle n’avait aucune idée des sujets de conversation qui allaient animer les discussions à bord du ferry. Chacun à la Mission était maintenant au courant de la nouvelle choquante des attaques terroristes qui venaient de survenir. «Mais qu’en était-il de Nelly?» ont-ils pensé... «Nous ne pouvons pas l’atteindre. Estce que le ferry fera la traversée malgré ces circonstances?» Un des bénévoles a pris la décision de se rendre malgré tout à Whittier et d’y attendre son amie voyageuse. Nelly est arrivée à l’heure prévue mais ensuite le ferry n’a pas obtenu l’autorisation de repartir à cause d’une alerte à la bombe à Valdez. Cette ville se situe au terminus d’un gazoduc de 1450 kilomètres de long et abrite d’immenses et multiples réservoirs de carburant. Plus tard, on a appris que cette annonce était une fausse alerte. Cependant, aucun transport n’a pu être garanti durant plusieurs jours. Le 12 septembre, ainsi que les jours qui ont suivi, tous les bateaux de croisière sont restés bloqués dans le port de Seward. En temps normal, les passagers s’embarquent pour une semaine de croisière en allant de Vancouver à Seward. De là, ils prennent un bus ou un train en direction d’Anchorage puis l’avion pour rentrer chez eux ou inversement. Mais à présent tout était bloqué! Non seulement pour les passagers mais aussi pour tous les membres d’équipage qui avaient l’intention de prendre l’avion pour rentrer chez eux et retrouver leurs familles. Un vent de panique soufflait sur le quai de Seward accompagné de toutes sortes de règles de sécurité additionnelles. Les premiers jours, aucun membre d’équipage n’avait le droit de débarquer, puis, plus tard, seulement un nombre limité y était autorisé. Pour des questions de sécurité, les bateaux


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ont reçu l’ordre de ne plus partir le soir mais uniquement le matin lorsqu’il faisait jour! A cause de ce retard, les membres d’équipage avaient des occasions supplémentaires pour se rendre en ville. La Mission a alors décidé de rester ouverte également le soir afin de fournir des services annexes aux marins. Aucun visiteur, vraiment aucun, n’était autorisé à descendre sur le quai, jusqu’au moment où finalement le capitaine a autorisé les membres de l’équipe de la Mission à se rendre à bord. Il avait réalisé combien il était important pour son équipage d’avoir des contacts avec des personnes extérieures au bateau. Le personnel de sécurité n’a pas compris pourquoi la Mission pour les marins était la seule à avoir reçu cette permission! Cela a été un témoignage vivant pour toutes les personnes concernées! Les passagers et les équipages avaient des problèmes pour retourner chez eux tout comme Nelly qui se retrouvait dans la même situation. Lorsque les bateaux de croisière ont finalement reçu le feu vert pour quitter Seward, seulement la moitié des passagers est montée à bord car les avions ne pouvaient ni atterrir ni décoller d’Anchorage. Dans cette situation particulière et afin d’attirer les clients, les compagnies de navigation ont baissé leurs tarifs dans le but qu’au moins quelques cabines du bateau se remplissent. Même certains membres d’équipage de compagnies aériennes avaient l’habitude d’utiliser les bateaux de croisière comme moyen de transport pour rejoindre Vancouver au Canada et de là s’envoler vers des destinations internationales. Cette idée faisait son chemin dans l’esprit de Nelly. «Mais alors je serai peut-être toute seule à bord du bateau...!» a-t-elle pensé. Fallait-il voir là une coïncidence lorsque Hank, un élèveofficier hollandais d’une des lignes de croisière de la Holland America, et qu’elle avait rencontré auparavant à la Mission, lui a proposé de l’accompagner là où elle le souhaitait? Hank s’était rendu à la Mission pour les marins toutes les deux semaines et Nelly avait eu l’occasion de parler du christianisme avec


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lui ainsi que de bien d’autres sujets. Elle ne serait donc pas seule sur le bateau! De plus, les chrétiens du groupe biblique à bord étaient tout contents qu’une bénévole de la Mission pour les marins voyage sur leur bateau. Plus tard, la jeune femme a déclaré que ce voyage avait été très stimulant pour elle, de même que pour tout l’équipage: «J’ai pu contempler de mes propres yeux tous les lieux dont les équipages parlaient durant la période où j’ai travaillé à la Mission... J’ai vu le vêlage1 des magnifiques glaciers, j’ai marché sur les passerelles en bois de Ketchikan, j’ai admiré le Passage Intérieur et je me suis promenée avec Hank sur un sentier dans le parc national de Sitka2... Tout cela était un cadeau supplémentaire envoyé par le Seigneur!» A son arrivée à Vancouver, Nelly était attendue par des collaborateurs de la Mission pour les marins établie dans ce lieu et qui l’ont emmenée du port jusqu’à l’aéroport. «Tout a été parfaitement calculé pour moi!» s’est-elle émerveillée. «Mais les moments les plus intenses ont été ceux partagés avec les membres d’équipage chrétiens dans leurs groupes de rencontres où nous avons passé des soirées à chanter et à prier. Je me sentais comme une des leurs!» a-t-elle dit avec émotion. Puisque Nelly avait choisi d’emprunter cet itinéraire de retour vers son pays, cette solution s’est également avérée utile pour transporter un membre d’équipage blessé. Adar s’était fait une mauvaise fracture à une jambe et il attendait à présent à Anchorage pour être transporté par avion à l’hôpital de Seattle. Il souffrait beaucoup et on ne savait pas encore quand l’aéroport serait à nouveau ouvert. Durant ce temps d’attente, Jeannette s’est rendue à l’hôpital d’Anchorage pour rendre visite à Adar. Elle a appelé le personnel médical de la compagnie de croisière pour laquelle il travaillait pour les avertir de la situation. L’infirmière à Seattle se demandait bien comment ce marin pourrait arriver jusque chez eux. Jeannette 1 2

Vêlage: libération d’icebergs par désagrégation de la banquise. (N.d.E.)

Sitka: île située au sud de l’Alaska et connue pour ses forêts d’épicéa. Son bois blanc est recherché pour sa qualité dans l’industrie du papier.


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Quand les cœurs chavirent

lui a alors dit qu’une solution serait qu’il voyage sur un des bateaux de croisière. Etant donné qu’à ce moment-là les choses étaient un peu partout chaotiques et désorganisées, le transport d’Adar d’Anchorage jusqu’à sa cabine à bord du bateau n’a pas été facile à organiser. Lorsqu’il est descendu du bus sur le quai de Seward, il a vraiment été heureux de rencontrer Jeannette, car personne n’avait été spécialement désigné pour prendre soin de lui! C’est elle qui l’a aidé à monter à bord, qui s’est occupée de ses documents administratifs et qui l’a emmené dans sa cabine. Elle s’est aussi arrangée pour qu’il ait ses médicaments et tout ce dont il avait besoin. Quatre heures ont été nécessaires jusqu’à ce qu’il soit bien installé. Mais juste avant que son bateau ne parte, Jeannette et Adar, ce jeune musulman, ont prié ensemble. Hélas, il n’était pas à bord du même bateau que Nelly, sinon il aurait eu quelqu’un à ses côtés pour prendre soin de lui pendant tout le voyage! Une année après cet événement, Adar est revenu à la Mission pour exprimer sa gratitude et dire combien il était reconnaissant de l’aimable aide apportée par Jeannette. L’année ayant suivi les attaques du 11 septembre 2001 a été remplie d’incertitudes quant à la possibilité d’accéder à bord des bateaux pour les visites. Partout, la sécurité avait été renforcée. La situation pour l’obtention des laissez-passer afin d’accéder au quai ou de monter à bord des navires commençait à devenir problématique car il avait été décidé par certaines compagnies que l’accès pourrait être refusé. Une fois, l’équipe de la Mission n’a même pas reçu l’autorisation de se rendre au-delà de la passerelle d’un des paquebots. Mais quelques semaines plus tard et à la grande surprise de Jeannette, elle a été convoquée par le bureau du capitaine. Dieu avait placé à ce poste un homme qui n’était pas revenu en Alaska depuis six ans. A cause du vif désir qu’il avait de reparler de sujets spirituels, la Mission pour les marins a reçu une autorisation de monter à bord du bateau en question et ceci, durant tout le reste de l’été!


Répercussions du 11 septembre

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A la suite de l’invitation initiée par ce capitaine, la Mission a reçu un courriel d’une femme chrétienne qui avait été un membre d’équipage et que l’on n’avait plus revue à la Mission depuis cinq ans. Elle était établie maintenant en Afrique du Sud et avait épousé le capitaine d’un bateau qui voguait dans les environs de l’Australie. Son mari venait juste de se joindre à l’équipage d’un bateau de croisière dans le port de Vancouver et elle l’accompagnait jusqu’à Seward. Elle demandait dans son courriel: «S’il vous plaît, quelqu’un de la Mission pourrait-il se rendre à bord à notre arrivée?» Lorsque la Mission lui a expliqué que cela serait impossible car cette compagnie-là leur refusait l’accès à bord, elle leur a rapidement répondu qu’elle avait une solution. En effet, le jour «J», lorsque Jeannette s’est rendue sur le bateau à 9 h 15 du matin, son nom avait été souligné en orange fluorescent sur la liste des visiteurs autorisés; puis en un éclair elle a été escortée jusqu’à la cabine du capitaine... Les deux amies se sont ainsi retrouvées dans le couloir et alors qu’elles riaient et pleuraient de joie, Jeannette a expliqué à son amie, l’épouse du capitaine, comment Dieu avait justement conduit cette dernière de l’Afrique du Sud jusqu’à Seward pour que la Mission soit autorisée à monter à bord de ce bateau! De plus, cette permission a été valable pour tout le restant de la saison d’été! Les effets du 11 septembre 2001 ont eu des répercussions dans le monde entier! Au départ, on a pensé que l’industrie des croisières allait disparaître du marché mais elle a survécu, et cela a été la réponse à de nombreuses prières. Les marins dont les conditions de travail sont difficiles ont ainsi pu garder leurs emplois permettant ainsi à leurs familles de survivre. Par contre, dans un premier temps, certains marins indonésiens se sont trouvés dans une situation difficile parce qu’ils provenaient de régions musulmanes radicales. Mais finalement, ils ont été autorisés à garder leur travail et ils ont à nouveau reçu la permission de débarquer dans le port de Seward. Le Seigneur des seigneurs avait le contrôle!


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Quand les cœurs chavirent

Cette Mission pour les marins a un ministère indispensable et je suis très reconnaissant de voir la manière dont Dieu vous utilise! Un agent naval

Entre terre, mer et ciel.


Chapitre 43 Ouvriers de la conserverie

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e nombreux hommes déambulaient dans la Mission à la recherche d’une vidéo à visionner. «Bonjour, d’où venezvous?» leur a demandé une bénévole récemment arrivée. Elle pensait que ces travailleurs venaient directement du bateau de croisière qui avait accosté ce jour même dans le port. «Je viens de la conserverie», lui a répondu l’un des visiteurs. «Je vous demande pardon? Que voulez-vous dire par là?» Ils lui ont alors expliqué qu’ils travaillaient pour un fabriquant de conserves de poissons à Seward. Ces hommes ont l’habitude de venir à la Mission et ils y sont aussi bien accueillis que les marins. Ils sont généralement originaires du Mexique ou parfois d’Europe de l’Est. Tout comme les membres d’équipage, ils aiment se rendre de temps à autre à la Mission pour les marins qu’ils considèrent aussi comme «leur maison à l’étranger»! Ils aiment venir y prendre un café, déguster quelques beignets, jouer au ping-pong et se détendre ou simplement discuter avec les bénévoles présents. Lors d’une soirée, une des bénévoles a eu l’occasion de partager l’Evangile avec deux travailleurs de cette conserverie. L’un des deux était russe et parlait bien l’anglais ainsi que d’autres langues. Il traduisait la conversation en polonais pour


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ses amis qui ne comprenaient pas l’anglais. Ces deux hommes étaient intéressés par le message de l’Evangile qui leur était présenté et ont été ravis de recevoir une Bible dans leur langue maternelle. Ils ont aussi emporté avec eux de la documentation chrétienne qu’ils souhaitaient lire une fois de retour dans leur dortoir. La Mission est bien connue des employés de la conserverie. Lorsqu’ils viennent pour une pause café, ils apprécient d’y croiser le pasteur David qui souvent leur donne des sacs de petits pains sucrés ou autres biscuits qu’il a en surplus. Certains de ces hommes se sentent à la Mission comme chez eux et ils y viennent parfois plusieurs fois dans la semaine. Hector est un de ces hommes. Il est enchanté lorsqu’on met pour lui un CD de musique chrétienne en espagnol. Il aime aborder des sujets touchant la spiritualité. Il y a encore tellement de choses qu’il ne comprend pas et pour lesquelles il désire tant avoir une réponse! Il est particulièrement intrigué par les questions concernant le futur et par le livre de l’Apocalypse. Une année, il y a eu Sam qui venait régulièrement à la Mission. Au lieu de dormir dans le cabanon que la conserverie lui avait assigné, il préférait s’installer dans sa tente sur la plage. Cet homme faisait face à un problème sérieux: il dépensait tout l’argent qu’il gagnait avec difficulté en boissons alcoolisées. Lorsque la saison de pêche a pris fin et que ses collègues de travail sont repartis vers le Sud, Sam, lui, est resté à son campement. Il a continué ses visites à la Mission et un jour il a accepté Christ! Lorsque les conditions climatiques sont devenues difficiles, Sam s’est installé dans la chambre d’amis de la Mission. En attendant qu’il trouve un nouvel emploi rémunéré, ses dons de charpentier ont été mis au service de la Mission pour différents projets. Durant trois mois, Sam a avidement appris la vie de disciple. Puis il a trouvé un emploi comme marin pêcheur sur la mer de Béring1; mais une blessure l’a obligé à revenir à Seward. Il a 1

Mer située dans le Pacifique Nord entre l’Alaska et la Sibérie. (N.d.E.)


Ouvriers de la conserverie

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alors continué de fournir de l’aide à la Mission, sa foi a mûri et il a pris du temps pour rechercher la volonté de Dieu quant à sa vie. Tyler, un autre employé de la conserverie, était lui aussi un très gros buveur. Un jour, il a expliqué à David qu’il désirait passer l’hiver sur le Mont Marathon, situé derrière la Mission, et qu’il prendrait ses chiens pitbull avec lui. Comme Tyler n’avait qu’un bras, David lui a fait part de ses préoccupations quant aux difficultés qu’il rencontrerait avec son handicap pour survivre dans un froid si intense. Mais rien ne semblait retenir Tyler qui prétendait qu’il s’en était toujours sorti avec un seul bras. Il ne voyait pas de problème, il allait bien se débrouiller! Quelques temps plus tard, un homme est arrivé aux urgences de l’hôpital se situant au pied du Mont Marathon. «Aidez-moi! Aidez-moi! S’il vous plaît, de l’aide!...» disaitil chancelant en s’approchant du personnel. Etait-ce une coïncidence que la femme de David, Ina, soit ce jour-là l’infirmière de service? Tous deux se connaissaient; Tyler était soulagé que quelqu’un prenne soin de lui. Il a raconté ses péripéties. Au cours de la nuit, alors qu’il était à son campement situé sur le flanc de la montagne, il a eu faim et s’est préparé un repas chaud. Soudain, le réchaud portatif a explosé! Tyler était brûlé au troisième degré sur les pieds. Il est alors descendu dans la nuit avec beaucoup de difficulté jusqu’à l’hôpital. Ina a fait part de cet incident à son mari David et la Mission a décidé d’aider Tyler en lui fournissant de nouveaux vêtements, un nécessaire de toilette et autres effets. Tout ce qu’il possédait avait été brûlé! A sa sortie d’hôpital, Tyler est venu passer ses sept semaines de convalescence à la Mission tout en continuant à se rendre régulièrement à l’hôpital pour y recevoir des soins. Aujourd’hui, la vie de Tyler a bien changé: il a arrêté de boire, s’est marié et s’est établi avec sa famille sur la péninsule. Il revient de temps en temps rendre visite à ses amis de la


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Quand les cœurs chavirent

Mission et il en profite pour prendre une exemplaire du petit calendrier biblique Notre pain quotidien.

Ce que j’apprécie à la Mission, c’est son âme. Pologne

Trophée de pêche locale.


Chapitre 44 Intercepté sur la route

D

urant une année entière, Rico avait cherché un emploi aux Philippines mais hélas sans succès! En discutant avec sa femme, ils en sont venus à la conclusion qu’il ne restait plus qu’une seule possibilité pour obtenir un revenu correct pour eux et leurs deux bébés: aller travailler en mer! C’était la première fois de sa vie qu’il prenait l’avion. Epuisé à la suite de ces longues heures de voyage, des Philippines à Vancouver au Canada, il a directement embarqué sur le bateau de croisière pour commencer son nouvel emploi. Sa première semaine de travail n’a pas été facile, alors que son bateau voguait le long des côtes de l’Alaska. Il avait du mal à s’adapter à ce nouvel environnement. Il a vraiment été heureux lorsqu’il a débarqué à Seward! A sa sortie du terminal, il n’avait aucune idée d’où il pourrait téléphoner à sa femme Mary Ann pour avoir de ses nouvelles ainsi que de ses enfants. Il s’est alors dirigé en direction de la petite ville située à l’autre extrémité du port, en espérant y trouver des cabines téléphoniques. Il se sentait bien seul en marchant sous la pluie; le chaud climat des Philippines lui manquait. Pris dans ses pensées, il n’avait même pas remarqué le véhicule qui s’était arrêté à côté de lui. Yolanda, une nouvelle bénévole originaire d’Europe, venait d’arriver à la Mission et, ce matin-là, elle était chargée pour


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la première fois de conduire la camionnette pour transporter les marins du port jusqu’à la Mission. Les jours précédents, un collègue lui avait montré le chemin. La plupart des marins avaient l’habitude d’attendre la navette de la Mission devant le terminal. Chaque conducteur savait qu’il fallait parfois attendre un certain temps sur le quai avant que les membres d’équipage ne débarquent du bateau. Un bénévole avait dit à Yolanda alors qu’elle démarrait le véhicule: «N’oublie pas de snagger1!» «Snagger? Qu’est-ce que ça signifie?» a répondu Yolanda perplexe. «Eh bien, a expliqué son collègue, lorsque tu conduis, tu essaies de repérer s’il n’y a pas d’éventuels membres d’équipage qui marcheraient du quai en direction de la ville et tu les invites à monter dans ton véhicule...» Justement, Yolanda venait de repérer quelqu’un qui marchait le long de la route... Pour elle, c’était une première et elle était un peu nerveuse. Cet homme ne ressemblait pas à un touriste, mais était-ce un pêcheur, un employé de la conserverie ou un marin? Elle se demandait si elle devait s’arrêter ou non. Elle pensait: «Oui, non, oui, non...?» Au tout dernier moment, elle s’est quand même arrêtée sur le côté de la route, a ouvert sa fenêtre et lui a demandé s’il était descendu du bateau de croisière qui venait d’arriver. «Puis-je vous aider, Monsieur?» a-t-elle demandé d’une voix amicale. Pour Rico, cette demande semblait venir droit du ciel... «Je suis ici pour la première fois et je cherche un endroit pour téléphoner», lui a-t-il répondu. Il était tout content de monter dans un véhicule chauffé! Yolanda lui a alors expliqué en détails tous les services que la Mission offre aux marins. A leur arrivée, Yolanda a fait visiter la Mission à Rico. Elle a expliqué à Cheryl, qui était responsable ce jour-là des services téléphoniques, que Rico était là pour la première fois et qu’il avait un urgent besoin d’appeler sa femme. Ne parvenant pas à atteindre Mary Ann du premier coup, Cheryl l’a aidé et, après de multiples essais, l’appel a enfin abouti. Après une demi-heure de conversation avec sa femme, Rico est sorti de la cabine téléphonique tout heureux. Il était aussi 1

To snag en anglais: accrocher, intercepter. (N.d.E.)


Intercepté sur la route

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très reconnaissant pour la gentillesse avec laquelle on l’avait accueilli. Soulagé et souriant, il a accepté une tasse de café et a commencé à raconter son histoire à Cheryl pendant plus de deux heures. Rico reconnaissait déjà que c’était Dieu lui-même qui l’avait conduit dans ce bâtiment alors qu’il venait de descendre de son bateau et qu’il ressentait une grande solitude. Cheryl lui a demandé s’il était déjà allé à l’église chez lui aux Philippines et s’il avait déjà entendu parler de Jésus-Christ et de la Bible. C’est ainsi que la conversation s’est poursuivie et qu’ils ont continué de parler, parler et parler... A la fin de la journée, lorsque Rico est remonté à bord de son bateau, il se sentait renouvelé, il était un autre homme car il venait d’accepter Christ comme son Sauveur personnel et de plus il avait maintenant de nouveaux amis! A la suite de leur conversation, Cheryl avait présenté Rico à d’autres marins philippins chrétiens qui étaient aussi en visite à la Mission. A l’heure de repartir travailler, ils sont tous montés dans la camionnette en direction du port. Rico se sentait tout différent car il avait Jésus pour ami... Il aurait bien aimé rappeler sa femme pour tout lui raconter mais à cause des difficultés de connexion qu’il avait eues, il a pris la décision d’attendre la prochaine escale dans le port suivant. A bord, Rico a été tout heureux de participer au groupe d’étude biblique des Philippins. Trois fois par semaine et tard le soir, ils se rencontraient pour étudier la Bible, prier et chanter ensemble. Malheureusement, à cause de ses horaires de travail, Rico ne pouvait pas toujours se joindre à eux mais il y allait le plus souvent possible car à chaque fois il était encouragé et grandissait dans sa foi. A la fin de l’été, avant que le bateau de Rico ne quitte pour de bon l’Alaska et ne se dirige vers les Caraïbes, il a encore une fois exprimé sa reconnaissance envers la Mission en leur donnant sa dîme. Il avait en effet économisé une partie de son salaire afin de l’offrir pour le travail du Seigneur au sein de la Mission. Combien ce cadeau a été touchant pour l’équipe!


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Puisqu’il n’aurait plus à présent l’occasion de participer aux moments de culte à la Mission, Rico a emporté avec lui, avant de partir, de nombreux livres qu’il pourrait étudier dans les mois qui suivraient. Il a eu beaucoup de peine à dire au revoir à sa nouvelle famille d’Alaska mais il lui restait les doux souvenirs des moments qu’ils avaient partagés ensemble. Qui sera maintenant le prochain «snag» pour cette conductrice?

J’espère que vous serez toujours en bonne santé afin de pouvoir encore «pêcher» de nombreuses personnes. Indonésie

Véhicule de la Mission stationné dans le port.


Chapitre 45 Le sacrifice d’un cœur de père

C

e grand et beau jeune homme, bien éduqué, était impeccablement habillé. Il expliquait à une des bénévoles qu’il avait grandi en ayant eu une éducation dans des écoles catholiques et protestantes mais qu’en fait il était musulman. Cet homme avait d’innombrables questions existentielles et il était en quête de vérité spirituelle. Ce jeune marin a raconté que son père travaillait depuis vingt ans à bord des bateaux de croisière et que son navire arriverait la semaine suivante à Seward. La bénévole lui a dit qu’elle essaierait de prendre contact avec lui. Au moment venu et comme promis, elle s’est mise à la recherche de son père et cette investigation a abouti. A bord du paquebot et alors qu’elle marchait dans un des couloirs, le plus petit homme qu’elle n’ait jamais rencontré est sorti d’une des salles de réception, un chiffon à poussière à la main. La bénévole a eu un instant d’hésitation puis elle s’est présentée. C’était bien le père du jeune homme. Lorsque cet homme a appris que son fils était passé à Seward, son visage a rayonné. Il avait de nombreuses questions: «Est-il bien éduqué? Est-il bien habillé? Vous a-t-il parlé avec respect? Mon fils est-il quelqu’un de bien?» La jeune femme, d’abord un peu troublée par toutes ces questions, lui a demandé


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Quand les cœurs chavirent

s’il désirait écrire une lettre à son fils. Sans attendre, il a griffonné une phrase sur un papier qu’il lui a remis. La semaine suivante, la bénévole a donné le billet au jeune homme qui était de retour à Seward et c’est là qu’il lui a expliqué qu’en fait il ne connaissait pas vraiment son père. Ils ne s’étaient vus que très rarement durant les vingt années qu’il avait passées en mer. Il aurait bien aimé lui écrire mais il ne savait pas quoi lui dire. Pour finir, il a pris lui aussi un papier et a écrit en vitesse une petite phrase. C’est à ce moment-là que la bénévole a saisi qu’elle était le trait d’union entre ce fils et son père qui étaient des étrangers l’un pour l’autre! Ce jeune homme a ensuite parlé librement de la remarquable éducation qu’il avait reçue grâce à l’argent procuré par le travail de son père. Il reconnaissait qu’il avait de ce côté-là bénéficié de bien plus que la plupart des jeunes Indonésiens, mais il sentait par contre qu’il n’avait pas la paix dans son cœur. Il avait reçu une bonne éducation mais sans Dieu et sans but. En recherche de vérité spirituelle, il était ouvert en ce qui concernait Jésus. Il n’était pas un musulman pratiquant comme son père, mais il n’était pas non plus chrétien. Alors qu’ils continuaient leur discussion, la bénévole n’a pu s’empêcher de penser au nombre incalculable de bagages que son humble père avait transportés, aux centaines de lits qu’il avait faits et refaits et aux innombrables toilettes qu’il avait nettoyées avec soin... Et tout cela par amour pour son fils! Une semaine plus tard, elle a remis le petit billet contenant une seule phrase au père de ce jeune homme. Il l’a glissé dans sa poche et a de nouveau demandé si son fils était bien éduqué et respectueux. Il a également demandé quels avaient été les sujets de conversation qu’elle avait eus avec son fils. Elle le lui a alors raconté. A l’écoute de ce que lui disait la bénévole, le petit homme rayonnait et il a fini par l’inviter à venir rendre visite à sa famille en Indonésie. En le quittant, elle a retenu ses sanglots devant cet homme remarquable qui avait sacrifié sa vie pour un fils qu’il ne connaissait pas... Ce fils qui était sans espoir et sans Dieu! Ceci est aussi le prix à payer lorsqu’on travaille en mer...


Chapitre 46 Wang et Ying

U

n enfant se tenait debout à l’extérieur d’une église chrétienne et regardait les fidèles qui s’y rendaient. Dans son cœur il enviait ce que possédaient ces gens bien habillés, joyeux et ayant des amis avec lesquels passer du temps. Chaque dimanche, ce petit garçon revenait à cet endroit pour regarder ces gens. Puis le régime communiste s’est écroulé et les gens ne se rendaient plus dans les églises. Ce petit Chinois nommé Wang a grandi, est allé à l’université et est devenu un politicien cultivé. Au plus profond de son cœur, il n’avait jamais adhéré aux idées communistes et de temps en temps il repensait à ces gens d’église qu’il avait si longuement observés durant ses jeunes années. Il désirait même ardemment posséder ce qu’ils semblaient avoir. Alors que les années avaient passé et que Wang devenait plus âgé, il a quitté son emploi de professeur de littérature anglaise où il avait même enseigné Shakespeare. Comme il parlait très bien l’anglais, le gouvernement l’a alors affecté à un travail d’interprète sur les bateaux de croisière. Un jour d’été, le navire de Wang a accosté à Seward. Là, il a entendu parler de la Mission où il pourrait téléphoner à sa famille. Dans cet endroit, il a également trouvé une église avec


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Quand les cœurs chavirent

des gens qui avaient la même joie et un rayonnement semblable à ceux qu’il avait vus et dont le souvenir était encore bien présent, même après de si nombreuses années. Maintenant il était libre de s’entretenir de toutes les interrogations qui le préoccupaient et c’est ce qu’il a fait. Wang a posé de nombreuses questions à plusieurs bénévoles de la Mission et lorsqu’il a reçu une Bible, un livre qu’il n’avait jamais vu auparavant, Wang a encore redoublé de questions. Il est alors revenu maintes et maintes fois à la Mission où il a toujours pu apprendre davantage de choses au sujet de Jésus et enfin, il a trouvé la joie et la paix qu’il cherchait si ardemment depuis de longues années. A sa dernière visite à Seward, il a été heureux d’apprendre que les Seale, dont il avait fait connaissance à la Mission, allaient se trouver en tant que passagers sur le même bateau que lui pour se rendre à Vancouver. Cela lui a donné l’occasion d’approfondir encore davantage certains sujets comme ce que signifie dans la vie quotidienne le fait d’être chrétien et les responsabilités que cela entraînait maintenant pour lui. De retour dans son pays, on lui a de nouveau offert un poste de professeur mais il a refusé afin d’avoir du temps pour étudier la Bible. Il a commencé à correspondre avec Cheryl, une bénévole de la Mission. Elle lui a envoyé un cours biblique en chinois qu’il a été heureux d’étudier. C’est ainsi qu’il a découvert l’existence du baptême. Il s’est mis à penser: «Comme ça serait merveilleux si quelqu’un de la Mission de Seward pouvait venir en Chine pour me baptiser car c’est là que j’ai rencontré les premières personnes qui m’ont parlé de Christ!» Bien que ce désir n’ait pas pu se réaliser, Cheryl lui a donné l’adresse de quelques églises situées dans sa région et où il pourrait demander à être baptisé. A présent, le système politique avait changé et il n’était plus nécessaire de tout faire secrètement, comme par le passé où il était très dangereux de se rendre en tant que Chinois dans une église chrétienne. Les gens n’étaient pas autorisés à


Wang et Ying

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posséder une Bible et ils pouvaient même être emprisonnés si on découvrait qu’ils en avaient une. Maintenant, Wang pouvait étudier les brochures qu’il se faisait régulièrement envoyer. Il avait encore un désir bien précis: raconter et montrer à ses petits-enfants ce qu’était la vie chrétienne et qu’à leur tour ils choisissent ce même chemin. Quelques années plus tard, Ying, qui était aussi un interprète chinois, est arrivé à la Mission. Il n’était pas encore né au moment du communisme. Il savait pourtant que son grand-père avait été un jour déporté et avait été tué à cause de sa foi chrétienne. Ying pensait souvent à son grand-père. Il aurait tant désiré faire sa connaissance. Il allait régulièrement rendre visite à sa grand-mère. Là, il aimait prendre la Bible de son grand-père et la lire. Il désirait connaître la foi de son aïeul et ce pourquoi il avait été un martyr. Cependant, sa grand-mère ne voyait pas cela d’un bon œil; elle craignait que Ying subisse le même sort que son mari et qu’il disparaisse... Ying a fait des études approfondies d’anglais et cela l’a qualifié pour postuler en tant qu’interprète sur un bateau de croisière. C’est comme cela qu’il est également arrivé à la Mission de Seward. Il était débordant de reconnaissance de rencontrer des chrétiens et curieux de trouver une Bible; il pourrait enfin découvrir le secret de la foi de son grand-père! Au moment de son départ, quand son bateau devait quitter l’Alaska, il avait encore beaucoup de questions à poser. Il a lui aussi continué de correspondre avec Cheryl qui lui a envoyé, comme elle l’avait fait pour Wang, un cours biblique en chinois qu’il a reçu et étudié avec reconnaissance. Un jour, Cheryl s’est exclamée: «Regardez ce que j’ai reçu!» C’était une photo de mariage de Ying et de son épouse. Ying et Cheryl étaient devenus de vrais amis grâce à la correspondance qu’ils avaient entretenue entre eux. Un jour, après quatre ans de correspondance, Ying lui a demandé d’entrer en contact avec un de ses amis chinois en lui envoyant une lettre. C’était pour elle un vrai défi que d’écrire à une personne qu’elle ne connaissait pas du tout, mais d’un autre côté c’était une réelle


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Quand les cœurs chavirent

occasion de parler de l’amour de Jésus. Une requête comme celle-là venant de Chine... elle ne pouvait pas la refuser!

C’est pour moi une occasion unique que d’être à bord de ce bateau. J’apprends à connaître la Bible et j’ai compris le chemin du salut. Maintenant je vais rentrer à la maison et je veux continuer à grandir dans ma foi en lisant ma Bible et en participant aux rencontres dans une église chrétienne. Vous allez me manquer mais je compte beaucoup sur vos prières. Chine


Chapitre 47 Femme dans un univers masculin

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outes les deux semaines, Carmen, une Philippine chrétienne fidèle, assiste au service de culte à la Mission pour les marins. Elle attend ces moments avec impatience car, dit-elle, «j’ai désespérément besoin d’être encouragée et fortifiée!» Son mari et ses quatre enfants lui manquent beaucoup. Elle n’est pas seulement partie travailler en mer pour subvenir aux besoins financiers de sa famille, elle utilise aussi ses revenus pour soutenir l’église dans laquelle son mari travaille comme pasteur. Avant de s’engager dans ce travail, on l’avait avertie et on lui avait dit: «Sur les bateaux, la vie est vraiment très difficile pour les femmes!» Pour cette raison, elle et son mari avaient prié Dieu pour sa protection et sa direction. Lorsqu’elle a rejoint son bateau à Puerto Rico pour se rendre en Alaska, Carmen a été très réjouie lorsqu’elle a entendu parler de la Mission et elle a été heureuse d’y rencontrer des frères et sœurs en Christ. Lors de sa première visite à la Mission, Carmen a raconté son histoire et a parlé de ses motivations. Elle a évoqué les nombreuses circonstances dans lesquelles la vie est si difficile à bord pour une femme. Carmen était cependant très reconnaissante envers le Seigneur du fait que les officiers traitent avec respect les femmes qui travaillent sur les bateaux.


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Durant tout l’été, elle était heureuse lorsqu’elle pouvait passer des moments à la Mission, loin du bateau, loin de ce lieu où toutes sortes de relations mondaines allaient bon train et avec lesquelles elle n’était pas d’accord. Elle avait même vu des chrétiens incapables de faire face aux tentations et tomber dans le péché de l’adultère. Il lui arrivait même d’en pleurer... Seulement dix pour cent des équipages sont des femmes; cela signifie que sur les plus gros bateaux de croisière comportant mille membres d’équipage, il y a seulement cent femmes! Comment résister à la tentation? Les femmes sont démoralisées à l’idée de se rendre toutes seules dans le mess de l’équipage à cause de la conduite des hommes et de leur façon de parler lorsqu’une femme est présente. Dans cet environnement, les hommes courtisent ouvertement les femmes célibataires. Sur un des bateaux, Ryan, un jeune chrétien consacré et fidèle, était sensible à ce genre de situation. Ce jeune Indonésien célibataire accompagnait les jeunes filles chrétiennes lorsqu’elles désiraient se rendre au mess ou même en ville. Son intention était en quelque sorte de les protéger. En voyant Ryan en compagnie de ces femmes, les hommes restaient à distance. Ryan était connu pour être un chrétien admirable et sincère. Grâce à son attitude amicale, il était respecté de chacun. Il était clair pour tous que ses motivations étaient désintéressées. Le fait de se joindre à un groupe de partage chrétien à bord d’un bateau donne également à ces femmes une protection spirituelle dans différents domaines. C’est ce qu’Helen, originaire d’Amérique du Sud, a appris. Elle appréciait son travail qui consistait à s’occuper des enfants dans un département spécifique, mais elle aimait aussi rencontrer d’autres membres d’équipage parlant espagnol lors des services religieux. Malgré tout, n’ayant pas de compatriote féminine chrétienne avec laquelle partager sa foi, elle ressentait une grande solitude. Helen passait alors presque tout son temps libre à étudier la Bible et à prier avec l’espoir de devenir un jour missionnaire.


Femme dans un univers masculin

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Pour une femme qui travaille à bord en tant qu’officier de navigation ou ingénieur, se faire respecter par des hommes est souvent difficile et, de ce fait, elle doit prouver qu’elle est leur égale en travaillant encore plus durement. Certains hommes qui n’aiment pas particulièrement travailler avec des femmes dans leur département se montrent parfois sarcastiques et adoptent certains comportements pour tenter de les décourager. Une femme-officier ou ingénieur non chrétienne, entourée uniquement d’hommes, fait face souvent à une vie difficile! La Mission pour les marins a fait l’expérience qu’il était très dur d’atteindre les femmes non croyantes avec l’Evangile. Au cours d’un été, on peut compter une seule femme qui se tourne vers Christ pour quarante ou cinquante hommes! Une des raisons qui pourraient expliquer cela est le fait que, dans ce milieu, les femmes dressent de véritables forteresses autour d’elles afin de se protéger des hommes qui représentent la très grande majorité du personnel naviguant. Nelly, nouvellement arrivée à la Mission comme bénévole, s’est étonnée du nombre si peu élevé de femmes ayant un emploi à bord des navires et elle s’est demandée dans quels départements ces femmes travaillent. Est-ce dans les boutiques, les salons de beauté ou les restaurants? Est-ce comme femmes de chambres ou comme infirmières pour l’hôpital du bateau? Ou encore au service d’information, au casino ou dans les salles de remise en forme? Parfois ces femmes sont employées comme photographes ou même comme saxophonistes dans un orchestre. Nelly a découvert des métiers qu’elle n’aurait pas imaginés auparavant. Quelle que soit leur fonction, une chose est sûre pour ces femmes: elles attendent toutes avec impatience le moment où elles pourront à nouveau retrouver leurs familles à la fin de leur long contrat. Certaines décident parfois de ne plus retourner dans ce monde de la navigation, à l’instar d’Elsa qui vient d’Allemagne: «Plus jamais, plus jamais! a-t-elle dit, la vie en mer est beaucoup trop difficile pour une femme!»


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«Cheryl! Il y a un appel pour Cheryl! C’est Ethel qui appelle de Jamaïque...» Cheryl, très surprise a couru vers le téléphone. Elle se disait en elle-même: «J’ai cru qu’Ethel avait cessé de travailler à bord des bateaux!» «Je voulais juste te dire que je viens de trouver un travail dans la ville où j’habite! lui dit la jeune jamaïquaine... Je vais aussi dans une église tout près de chez moi. Je suis tellement contente d’être de retour à la maison. Comme je sais que tu pries régulièrement pour moi, je voulais juste t’avertir!» Cheryl était émue car Ethel avait accepté Christ l’année précédente... C’était une femme qui, par la grâce de Dieu, avait résisté aux tentations et était devenue chrétienne malgré l’environnement masculin particulier qu’on pouvait parfois trouver à bord des bateaux et dans lequel elle avait été plongée... Dieu soit loué!

Merci pour votre gentillesse et votre aimable aide. Merci d’avoir partagé l’Evangile avec nous et nous avoir aidés à affermir notre foi lorsque nous nous sentions faibles. En tout cas, nous ne vous oublierons jamais! Colombie


Chapitre 48 Quand il faut se dire adieu

«

...d toute nation...»

e toute tribu, de toute langue, de tout peuple et de 1 A l’heure où le dernier bateau de croisière quitte le port de Seward et marque la fin de la saison estivale, d’innombrables sujets de reconnaissance viennent à notre esprit et la louange monte de notre cœur envers notre Seigneur. Les adieux sont parfois difficiles entre les bénévoles de la Mission et les marins. «Est-ce que l’on se reverra?» Gâteaux d’adieu, embrassades et larmes sont une réalité dans ces moments-là. Les marins savent tous que dans les autres ports ils ne trouveront pas d’endroit comparable à celui-ci: «Une ambiance familiale loin de leur foyer». Combien de mois leur reste-t-il encore à voguer en mer? Combien de temps avant d’être à nouveau réunis au sein de leurs familles et églises dans leurs pays respectifs? Leur bateau va quitter les terres froides de l’Alaska pour se diriger vers des pays plus chauds. Les équipages vont connaître de constants changements. Pendant que l’un d’entre eux se rendra à Vancouver pour sa dernière croisière, un autre commencera juste son contrat d’une durée d’environ dix mois. «Au revoir! Tu nous manqueras! Que Dieu te bénisse!» Les deux minibus remplis des membres d’équipage venaient de 1

Apocalypse 5.9.


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partir de la Mission pour la dernière fois de la saison et se dirigeaient vers leur bateau de croisière. Tout en agitant sa main en guise d’au revoir pour les bénévoles restés en arrière, une des femmes a dit au conducteur: «C’est comme si je disais au revoir à ma maman. Chaque fois que je viens à la Mission de Seward, je me sens vraiment comme à la maison!» Elle n’était pas la première à éprouver ce sentiment! Combien de marins ont-ils franchi le seuil de la porte de la Mission durant cette saison? Cinquante à cent cinquante par jour? Comment quelqu’un aurait-il réussi en d’autres circonstances à mettre autant de personnes en contact avec l’Evangile en quatre mois seulement? Le Seigneur Jésus n’a-t-il pas ordonné lui-même: Allez vers les nations «et enseignez-leur à mettre en pratique tout ce que je vous ai prescrit»2? A la Mission pour les marins, les serviteurs de Dieu n’ont pas à aller jusqu’au bout du monde, dans des pays tels que les Philippines, la Jamaïque, le Népal, le Pérou, la Lettonie et d’autres encore. Les gens de 130 nationalités différentes sont venus d’eux-mêmes jusqu’à la Mission. Toutes ces personnes n’ont-elles pas été amenées en Alaska par Dieu lui-même afin qu’elles entendent au moins une fois dans leur vie l’Evangile, qu’elles découvrent l’amour de Dieu et qu’elles aient le choix d’accepter de suivre ou de rejeter Jésus? Le Seigneur laisse chacun de nous libre pour ce choix! Au terme de la saison d’été, sur les sept mille visiteurs qui se sont arrêtés à la Mission, combien d’entre eux étaient déjà chrétiens? Combien ont été sauvés à la suite de leur passage? Combien ont été touchés dans leur cœur et y repensent alors qu’ils lisent leur Bible ou les brochures ou les documents qu’ils ont reçus? Reviendront-ils encore une fois à Seward, seront-ils transférés en Europe ou encore arrêteront-ils ce travail en mer? Parfois, certains d’entre eux reviennent après un ou deux ans. C’est alors vraiment la joie des retrouvailles! C’est comme si les membres d’une famille se retrouvaient. «Tu me reconnais?» est la première question qui est posée! 2

Matthieu 28.20.


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Ces marins ont souvent eu l’occasion, les mois précédents, de retourner chez eux et de parler de la Mission de Seward à leurs proches. Ils leur ont montré les Bibles, les cours par correspondance ou les autres documents qu’ils ont reçus. Durant ces mois passés chez eux, ces marins sont restés en contact avec des membres de la Mission. Ils ont correspondu ou envoyé des courriels tout au long de l’hiver et, de cette façon, ont partagé leurs questionnements ou leurs soucis à propos de leur nouvelle vie de disciple ou d’autres préoccupations. Combien ce suivi est important! De la même façon, le Seigneur Jésus n’a pas laissé ses disciples seuls lorsqu’il est monté au ciel. Il leur a envoyé un consolateur et un guide: le Saint-Esprit. Tous les chrétiens peuvent en faire l’expérience. Le travail de suite effectué par les bénévoles durant la saison d’hiver est vraiment important… jusqu’aux prochaines retrouvailles?

C’est vraiment difficile de dire au revoir à des amis tels que vous tous. Je n’oublierai jamais la joie que je peux ressentir lorsque je m’approche de la Mission, parce que je peux déjà sentir que le Seigneur Jésus est là et qu’Il nous attend! La façon dont nous chantons ensemble, quand nous prions ensemble, quand nous lisons la Bible, quand nous recevons des conseils pour notre vie de famille et que nous pouvons parler de nos petits problèmes… Philippines



Chapitre 49 Un concert imprévisible

J

eannette n’avait pas revu Franz depuis six ans. Quelle n’a pas alors été sa joie lorsqu’il est de nouveau apparu à la Mission! Franz était hollandais. Dans le passé, son bateau accostait dans le port de Seward le dimanche et, accompagné de son fils, ils avaient l’habitude de venir à la Mission jouer du violon. Jeannette se remémorait maintenant avec lui tous les souvenirs du «bon vieux temps»! Franz lui a confié qu’entre temps il était devenu chrétien et qu’il désirait apprendre les cantiques qu’ils avaient chantés autrefois à la Mission. Malgré le fait qu’il soit maintenant un grand-père âgé de 75 ans, son désir avait été de retourner travailler sur un bateau comme musicien! Jeannette sentait que non seulement Franz s’ennuyait de sa famille et de son église, mais il languissait également de jouer de la musique avec un partenaire, comme il l’avait fait par le passé avec son propre fils. Alors Jeannette lui a dit: «Franz, la prochaine fois que tu accosteras à Seward, je viendrai à bord de ton bateau, je jouerai du violon avec toi et nous nous exercerons ensemble pour jouer ces chants et ces hymnes!» Tous les deux se réjouissaient déjà en vue de cette occasion. Le jour arrivé, Jeannette s’est emparée avec impatience de son violon et de son gros livre de chants et s’est dirigée vers


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Quand les cœurs chavirent

le bateau. Franz l’attendait de l’autre côté de la barrière de sécurité. Il l’a emmenée dans l’élégant «Salon des explorateurs» où un piano à queue trônait sur la scène. «Voici l’endroit où nous allons jouer, c’est là où je joue habituellement!» lui a déclaré ce grand violoniste professionnel. Jeannette était figée, le salon était rempli de passagers en attente pour prendre le bus qui allait à Anchorage! «Jouer ici avec tous ces gens autour de nous? C’est terrifiant!» a pensé Jeannette. «Cela fait deux semaines que je n’ai plus touché mon violon. Franz m’avait pourtant dit que nous ne répéterions ces cantiques que tous les deux!» Jeannette était maintenant un peu irritée mais comme Franz s’exprimait mal en anglais, elle ne pouvait pas lui expliquer que cet endroit n’était peut-être pas le meilleur qui soit pour jouer… Franz, lui, semblait à l’aise et, intraitable, il ne semblait pas avoir l’intention de changer d’endroit. Jeannette a alors ouvert la valise contenant son violon, elle l’a accordé et, en suivant sur son livre de cantiques, elle a commencé à jouer un de ses hymnes favoris, Grace Greater Than All Our Sin1. Ils ont joué le tout sans une seule erreur. «Seigneur, c’est ta main qui nous a guidés car c’était parfait», a pensé Jeannette. A la suite de ce morceau, la salle, qui était comble, a littéralement explosé en applaudissements et en acclamations: «Hourra, bravo, hourra!» Une fois de plus, Jeannette était touchée par cette situation; elle a alors pensé: «Si le maître d’hôtel me trouve ici, il m’expulsera du bateau à la seconde même et je pourrai oublier à tout jamais de remonter à bord!» Mais les applaudissements continuaient de plus belle. Les passagers, pensant qu’il s’agissait d’un service régulier de culte au programme du dimanche matin, ont alors demandé aux deux musiciens de jouer un autre cantique! Jeannette a essayé de leur expliquer qu’il ne s’agissait que d’exercices de répétition. «Oh… mais pourquoi ne vous a-t-on pas vue plus tôt durant cette semaine?» a demandé une passagère. Puis, s’étant promptement levée de 1

«Une grâce plus grande que tous nos péchés».


Un concert imprévisible

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sa chaise, elle est montée sur la scène et s’est mise à chanter avec les deux violonistes! Cette femme se déplaçait tour à tour près de Franz et de Jeannette et, hymne après hymne, offrait aux passagers ses prestations jusqu’à ce que l’appel pour leur bus retentisse. Finalement, il ne restait dans la salle qu’une seule personne, un infirmier américain qui téléphonait à sa famille avec, en musique de fond, le son des deux violons. Après s’être exercés pendant près d’une heure et demie, Franz lui a demandé: «S’il vous plaît, seriez-vous d’accord de revenir à chaque fois sur le bateau quand je serai à Seward pour que nous puissions jouer ensemble?» Etant âgé de 75 ans et éloigné des siens, il avait de vrais besoins. Comme prochainement il allait une nouvelle fois être grand-père, Jeannette lui a offert une petite broche représentant les pieds d’un bébé afin qu’il se rappelle qu’un nouveau petit enfant était déjà en train de grandir. Après cela, l’atmosphère était encore plus profonde. Jeannette n’avait pas envie d’arrêter ces moments de musique et de s’en aller mais elle avait encore d’autres responsabilités à assumer sur ce bateau. Ils avaient partagé un merveilleux moment en jouant et chantant pour l’honneur et la gloire de Dieu. Sans même y avoir pensé, Jeannette avait une fois de plus joué du violon pour des passagers… exactement comme la première fois à bord d’un autre bateau à Juneau en 1980.

Lorsque Dieu vous lance un appel, peu importe où vous vous trouvez dans le monde, cet appel résonne dans votre cœur. Jeannette



Chapitre 50 La symphonie de Jésus

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e ministère envers les marins a commencé en 1981 à Juneau, en Alaska, avec pour seul point de départ le chant d’une personne ou d’une famille à bord des bateaux de croisière. Huit ans plus tard, la petite équipe a grandi et s’est installée dans un appartement à Whittier sous le nom de «Mission pour les marins». Dès ce moment-là, de nombreux bénévoles sont arrivés pour des séjours à court terme et ceci durant quatre étés consécutifs. En 1993, la Mission a déménagé dans un bâtiment situé à Seward dans la Baie de la Résurrection. Ce bâtiment disposait de l’espace et des pièces nécessaires à ce travail missionnaire. Le Seigneur a également pourvu pour une équipe à plein temps, un directeur coordonnant le tout ainsi que de nombreux bénévoles venant renforcer l’équipe de base. La Mission pour les marins a grandi. D’un statut «d’hommeorchestre» elle est passée à celui d’un quintette accompagné d’un orchestre de chambre formé de différents participants, changeant à tout moment. Ensemble, ils ont joué la symphonie de Jésus munis de leurs divers instruments et talents! A Juneau, Joe et Jeannette Seale ont été les initiateurs de ce ministère. A Whittier, David et Ina Hawkins les ont rejoints en


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tant que bénévoles. Puis à Seward ces deux couples ont formé une équipe travaillant ensemble avec David comme directeur de la Mission. Chacun a son propre domaine d’action et son propre apport mais tous ont été guidés par le Seigneur et ont obéi un jour à son appel. Jeannette a fait la connaissance de Betsy dans une église à Anchorage alors qu’elle présentait la Mission. Betsy s’est demandée à quoi pouvait bien ressembler ce ministère auprès des marins à Seward, alors elle a envisagé d’y passer quelques temps comme bénévole à court terme. En 1994, Betsy et son mari sont arrivés à Seward pour la première fois, sans être conscients bien sûr à ce moment-là que le Seigneur allait utiliser les dons musicaux de Betsy pour faire d’elle la directrice à plein temps des activités concernant la musique. Betsy pense que ce titre est exagéré mais il décrit de façon claire ses fonctions au sein de l’équipe. La timidité de Betsy s’est peu à peu effacée et depuis, elle s’épanouit dans son ministère en tant que responsable de la musique. Elle passe beaucoup de temps dans la préparation: elle compile des chants sur ordinateur, prend contact avec des éditeurs, joue de nouvelles compositions sur sa guitare et répète les chants avec assiduité. Au cours de la journée, on l’aperçoit souvent donnant des cours de guitare et s’exerçant sur des chants avec un marin. En tant que pasteur, David prépare les méditations journalières pour les deux semaines à venir. Betsy prépare quant à elle des feuillets de chants servant de support aux messages de David. La plupart du temps elle les prépare jusqu’à des heures très tardives, quand les bateaux ont déjà quitté le port. Pour ceux qui assistent au culte, Betsy est une vraie bénédiction. Chaque office dominical commence avec de nombreux cantiques. Parfois, la musique improvisée remplit la pièce bien avant que la période de chant ne commence. Betsy a souvent des contacts privilégiés avec les musiciens professionnels travaillant sur les navires. Ils apprécient beaucoup de se joindre à l’équipe de musique de la Mission;


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ils unissent alors leurs talents exceptionnels de pianiste ou de violoniste à ceux de Betsy à la guitare. Durant la semaine, les contacts personnels sont fréquents avec certains marins qui désirent seulement jouer de la musique. Ainsi Betsy est toujours disposée à apprendre un nouveau chant dans n’importe quelle langue. En ce qui concerne les échanges musicaux qu’elle a avec des marins, une de ses expériences les plus marquantes a été celle qu’elle a vécue lors de la visite de quatre marins musulmans indonésiens. Un soir, alors qu’il était tard et qu’ils chantaient et jouaient de la guitare dans la salle de musique, Betsy a entonné un chant indonésien composé à partir du Psaume 23. Ces hommes ne connaissaient pas ces paroles car le livre du Coran ne contient pas les Psaumes. Alors Betsy leur a montré ces versets dans la Bible. Comme ces hommes visitaient la Mission pour la dernière fois de l’année, ils désiraient laisser un cadeau en guise de souvenir. Ils ont demandé s’ils pouvaient chanter un chant indonésien pour l’équipe avant de retourner sur leur bateau. Leur chant s’intitulait Au revoir, au revoir. Ce chant était vraiment magnifique! A l’image des amis qui ce soir-là se trouvaient dans la salle de musique, les amis dont il était question dans cette chanson se disaient au revoir, tout en ignorant quand ils se reverraient. D’un geste rapide, Betsy a saisi un magnétophone et a enregistré ce chant afin de l’apprendre et de le chanter à nouveau lors d’autres occasions d’adieu. Au cours d’une visite précédente, et de leur propre initiative, certains de ces marins indonésiens s’étaient rendus au sous-sol de l’établissement et avaient choisi de la littérature chrétienne pour l’emporter avec eux. Betsy a raconté: «Je pense que ces échanges emprunts d’amour que nous avons eus les uns avec les autres ont contribué à attirer leurs cœurs à Christ. Lorsque nous montrons une reconnaissance authentique de ce que les marins nous apportent, le Seigneur utilise cette attitude pour les aider à recevoir Jésus par notre intermédiaire!»


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Betsy a composé de nombreux cahiers de chants en différentes langues en vue d’un usage journalier à la Mission. Cependant, après de nombreuses demandes de photocopies, elle a décidé de composer un livret conçu spécialement pour que les équipages l’emportent et l’utilisent à bord. Ce travail a occupé presque tout son temps durant un hiver. Depuis longtemps les marins demandaient un recueil de chants à utiliser lors de leurs rencontres chrétiennes ainsi que pour leur usage personnel lorsqu’ils désiraient jouer de la guitare dans leur cabine… Un livre de chants exprès pour eux et qui leur rappelle les joyeux moments de louange passés à la Mission de Seward. En 1997, le Seigneur a amené à Seward des amis de la famille Hawkins, George et Cheryl. Ce couple avait travaillé plus de 25 ans en tant que missionnaires à plein temps pour la station radio chrétienne KCAM faisant partie de la Mission Send International à Glennallen en Alaska. A cause des responsabilités auxquelles il devait faire face aux studios, George devait rester à Glennallen durant l’année. Mais aussitôt qu’un remplaçant a été trouvé pour assumer son travail durant les étés, il a également désiré travailler à plein temps à Seward pour un mois au minimum. Le second mois, il fait les allersretours toutes les deux semaines (environ sept heures de route pour un trajet) afin de rendre visite à sa femme qui, elle, reste à la Mission pour les marins durant tout l’été. Lors des week-ends où il se trouve à la Mission, George est habituellement le chauffeur de la camionnette. Ce service constitue une part importante de ce ministère auprès des marins car le conducteur est en quelque sorte le premier représentant de la Mission auprès des nouveaux venus. Parfois il embarque dans la camionnette des membres d’équipage se trouvant le long de la route mais d’autres fois, il attend plusieurs heures sur le quai jusqu’à ce que tout l’équipage soit descendu du bateau, et ceci souvent par temps pluvieux! Les conducteurs de la camionnette font un travail vraiment nécessaire car les marins sont toujours impatients d’arriver le plus vite possible à la Mission. Ils sont fatigués à cause


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de leur travail pénible et ils ont souvent très peu de temps libre. Pendant que George conduit, sa femme Cheryl qui l’accompagne parle avec les marins et apporte les premiers éléments de réponses à ceux qui sont ouverts à l’Evangile et qui désirent en connaître plus sur Jésus au nom duquel le don de l’amour est présenté à la Mission. Avant qu’un petit espace soit agencé pour elle au sous-sol pour offrir des conseils et de l’aide aux marins, Cheryl avait son «bureau» à côté du réfrigérateur! Là, on la voyait souvent enseigner les Ecritures à un marin, en utilisant des Bibles et d’autres documents dans sa langue maternelle. Parfois, il est arrivé qu’un marin rentre à la Mission et demande directement: «Qui pourrait me parler de Jésus?» ou encore «Puis-je avoir une Bible?» Ils ont entendu parler de cet endroit par leurs camarades de cabine, leurs collègues ou encore leurs compatriotes. Cheryl, toujours disponible, leur explique comment lire la Bible, et ceci parfois durant des heures! Il arrive que la même personne quitte le bâtiment en étant convertie et en emportant avec elle des supports pédagogiques pour l’aider dans la lecture et l’étude de la Bible qu’elle vient juste de recevoir. Durant le premier mois qui suit la conversion de ces marins, Cheryl leur écrit une lettre par semaine afin de les encourager à grandir dans leur foi. Ces lettres sont également traduites en espagnol et en indonésien, car lire la Bible dans sa propre langue aide la personne à mieux saisir l’Ecriture. Durant l’hiver, George et Cheryl sont de retour chez eux. Ils reprennent souvent la route pour sillonner la région car George fait des reportages en direct des matchs de hockey pour la station de radio où il travaille. Lorsqu’ils ne voyagent pas, Cheryl essaie d’établir des contacts avec la population locale en proposant des études bibliques. Roeli est hollandaise. Elle et son mari ont été missionnaires durant dix ans au Surinam en Amérique du Sud. Son mari ayant été repris par le Seigneur, Roeli est alors rentrée seule aux Pays-Bas, priant et attendant une réponse pour repartir en


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tant que missionnaire. La majeure partie de son travail a été de s’occuper de littérature chrétienne. Que ce soit au Surinam ou en Hollande, elle a avec assiduité organisé des stands de présentation de livres, géré des librairies, écrit et publié des ouvrages. Les études bibliques que son mari avait rédigées sont aujourd’hui encore disponibles dans de nombreuses langues et utilisées tout autour du monde. C’est durant l’été 2000 que Roeli a franchi pour la première fois le seuil de la Mission pour les marins à Seward. Jusquelà, elle s’était engagée comme bénévole chaque été, pour une période plus ou moins longue, heureuse de continuer son trajet de missionnaire en partageant l’amour de Christ. Comme elle l’avait déjà fait durant de nombreuses années, elle s’est occupée tout naturellement des publications chrétiennes. Elle a réorganisé le coin des livres et des brochures situé au soussol de la Mission et a rendu ainsi possible un meilleur accès à toutes ces publications qui sont distribuées aux marins venant du monde entier. Bien qu’il y ait de grandes différences entre le climat tropical et celui de l’Arctique, Roeli a constaté de nombreuses similarités entre ces deux pays car elle s’occupait aussi bien des publications chrétiennes que des personnes venant de diverses cultures. Grâce à son expérience «internationale», Roeli connait les différents contacts et réseaux pour trouver des documents et des publications chrétiennes. Son expérience lui donne souvent aussi des occasions pour nouer des contacts personnels. Durant la saison d’hiver, lorsqu’elle rentre en Europe, elle s’occupe de la commande et de la préparation de toute la documentation nécessaire pour la prochaine saison d’été en Alaska. Etant persuadée de l’importance des études bibliques, elle commande et imprime de nombreux exemplaires destinés à des cours bibliques par correspondance dans une grande variété de langues. Un autre aspect de son activité est de promouvoir de nombreuses traductions des livres de son


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mari afin de les distribuer également en Alaska. Chaque année, environ 100 à 130 nationalités différentes visitent la Mission et de ce fait, de nombreux efforts sont entrepris afin que chaque langue soit représentée sur les étagères de la Mission. Ainsi, il y a toujours quelque chose de gratuit à offrir aux marins de passage, que ce soit des Bibles, des dépliants ou des brochures. Toutes ces publications prises par les marins sont ensuite emportées sur leurs bateaux puis dans leurs familles… Comme ce moyen est un des plus efficaces pour que les marins grandissent spirituellement, Roeli est reconnaissante d’avoir part à ce ministère! Il est arrivé à plusieurs reprises qu’un marin commande tel ou tel livre ou vidéo en feuilletant le catalogue disponible à la Mission. Ensuite, la commande lui est envoyée contre remboursement. Une fois, des documents pédagogiques chrétiens ont été envoyés à une école chrétienne au Népal. Parfois, des marins demandent aussi si l’on peut envoyer des documents pour l’école du dimanche de leur église. Un homme pakistanais désirant commencer une école chrétienne dans son petit village a envoyé 100 dollars à la Mission et lui a demandé de lui faire parvenir le plus grand nombre possible de livres pour l’école du dimanche en langue urdu, ce que la Mission a fait. Lorsqu’elle ne travaillait pas en mer, une femme roumaine enseignait pour l’école du dimanche de son église. Lors d’un de ses passages à la Mission, elle a été déçue de ne pas trouver de documents sonores pour l’enseignement de ses enfants roumains. Grâce aux catalogues disponibles, des supports appropriés ont été commandés pour elle. Durant la saison d’été, de nombreux bénévoles à court terme viennent soulager la charge de travail du personnel fixe de la Mission en accomplissant toutes sortes de travaux, chacun offrant ses propres talents. Certains célibataires ou couples viennent d’autres états ou même d’Europe pour une durée d’un mois; d’autres arrivent aussi directement d’Anchorage, de Glennallen ou même de Seward. Ils rejoignent la Mission


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Quand les cœurs chavirent

pour une semaine, un jour ou pour préparer un repas. Une fois, un marin chrétien a offert au Seigneur quelques semaines de ses vacances pour répondre aux besoins de partager l’amour de Jésus d’une façon toute pratique. La main de Dieu s’est concrètement manifestée par l’arrivée des cinq serviteurs à plein temps mentionnés au début de ce chapitre et qui servent chaque été la Mission tel un quintette. Leurs différents talents se complètent magnifiquement. Les épouses encouragent ce travail et coopèrent avec leurs maris dans un esprit d’équipe; elles le font avec beaucoup de grâce. Et pour finir, comme pour toute organisation, ceux qui sont engagés dans ce travail ont besoin d’être soumis à une autorité. Le Conseil de la Mission remplit cette fonction. Les hommes qui le composent guident constamment l’équipe avec sagesse et sont un vrai soutien; ils viennent rétablir l’équilibre lorsque la stabilité et l’harmonie de l’orchestre sont quelque peu ébranlées ou dissonantes. Ces chers serviteurs de Dieu n’ont jamais été avares de leur temps et sont à tout moment pleins de compréhension et d’attention. Sans leur force discrète, le travail de la Mission pour les marins n’aurait jamais pu être accompli. Comme il est bon de prendre conscience que c’est Dieu luimême qui a amené chaque travailleur pour être un instrument de la Mission pour les marins, afin d’œuvrer au sein d’une équipe qui forme un orchestre jouant la «symphonie de Jésus»!

Sais-tu conduire une camionnette? Faire des biscuits? Réconforter des gens dans la douleur? Nettoyer les toilettes? Encourager les faibles? Prier avec ceux qui désirent se repentir? Griller du poulet sur le barbecue? Jouer d’un instrument? Récurer le sol? Laver un bus? T’occuper d’un jardin? Sais-tu partager l’amour et la vérité concernant Jésus-Christ notre Sauveur? Si oui, alors les marins pourront certainement profiter de ton aide lors d’un prochain été, que tu sois bénévole pour un jour, une semaine, deux jours, un mois ou même pour les quatre mois d’été!


La symphonie de Jésus

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La chambre et la nourriture te sont fournies. La rémunération est éternelle! Est-ce que Dieu t’appelle à le servir? Est-ce qu’en lisant ce chapitre Dieu a saisi ton cœur en te faisant savoir que son désir est que tu t’investisses également dans ce travail? Dieu désire avant tout un cœur qui est disposé à le servir, le reste c’est lui qui le fera! David

Une partie de l’équipe de la Mission.



Chapitre 51 Partenaires de prière

L

ors d’une saison d’été, l’équipe de la Mission a appris l’importance de prier pour les marins en leur présence. Dans le passé, combien de fois n’a-t-on pas dit aux marins: «Nous prierons pour vous!» Rien d’étonnant qu’avec le temps, chacun était convaincu que cette façon de faire n’était pas suffisante. Après en avoir discuté, nous avons décidé alors de prier chaque fois qu’un besoin se ferait sentir ou à chaque fois qu’un souci serait mentionné, après avoir bien sûr fait tout notre possible pour offrir une aide pratique. Cette décision a eu pour conséquence qu’il arrivait maintenant qu’un bénévole prie avec un marin dans la salle des téléphones ou que d’autres se réunissaient pour prier dans la cuisine, au sous-sol et même dans le minibus stationné sur le quai. Les hommes qui sont connus de l’équipe de la Mission depuis des années n’ont aucune honte à verser des larmes lorsque leurs problèmes sont placés devant le Seigneur. Très souvent, ils expriment alors spontanément des remerciements sincères pour l’aide spirituelle qui leur est offerte. Cette façon de prier confère-t-elle une certaine influence pour atteindre des cœurs pour le Seigneur? Ces réactions ne sont-elles qu’émotionnelles? C’est difficile à dire; mais une chose est sûre,


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Quand les cœurs chavirent

ces réponses montrent un désir d’épanouissement spirituel qui fait tellement défaut dans la vie de ces marins. Pour la plupart des chrétiens, le fait d’intercéder devant Dieu est une habitude quotidienne. Pourtant, il semble que pour certains, la prière ait été peu à peu oubliée et pour d’autres encore, prier se révèle une expérience tout à fait nouvelle! De toute façon, il s’avère que les personnes ayant de réels besoins refusent rarement que l’équipe prie pour eux, qu’ils se trouvent dans les locaux, dans le minibus, dans le mess de l’équipage, sur le quai d’amarrage ou dans n’importe quel autre endroit. L’apôtre Paul a écrit à de nombreuses reprises au sujet de la prière. Il dit aux chrétiens qu’il prie sans cesse pour eux. A son fils spirituel Timothée, il mentionne même qu’il prie pour lui nuit et jour en se rappelant de ses larmes1. Paul demande également aux chrétiens d’Ephèse de prier pour lui et pour son ministère2. A présent, la Mission pour les marins vous demande, à vous lecteurs, de faire de même. Sans vous et vos prières, cette œuvre aura peu d’impact et de force. Vos prières ont le pouvoir d’abattre chaque jour des forteresses pour les personnes qui sont encore dans les ténèbres spirituelles. Les résultats des prières ferventes de chrétiens consacrés se font sentir lorsque des musulmans arrivent dans le bâtiment de la Mission pour chercher des réponses à leurs questions, ou lorsqu’un bateau qui préalablement avait refusé à l’équipe l’autorisation de monter à bord change soudain d’avis sans raison et leur en permet l’accès. Parfois il arrive même que l’équipage d’un bateau, qui par le passé avait évité de se rendre à la Mission, commence à y venir chaque fois que leur bateau amarre dans le port! Il n’y a pas d’explication à tous ces évènements, excepté que Dieu entend et exauce vos prières! S’il vous plaît… Continuez de prier pour ce ministère auprès des marins afin que l’équipe de la Mission soit prête à délivrer le message du mystère de 1

2 Timothée 1.3-4.

2

Ephésiens 6.18-19.


Partenaires de prière

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Christ de façon compréhensible lorsque ces occasions si exceptionnelles se présentent. Paul a dit: «Priez pour moi afin que, lorsque j’ouvre la bouche, la parole me soit donnée pour faire connaître avec assurance le mystère de l’Evangile.»1 C’est votre participation au développement de l’Evangile2. Par vos prières, vous devenez un partenaire de ce ministère, un bénévole dans la prière. Nous en avons ardemment besoin! Merci!

Vous ne cessez d’être dans mes prières. Lorsque je vais à l’église, je parle de vous à mes amis et je leur raconte tout ce que vous accomplissez dans cette petite mission en Alaska. Vous êtes une bénédiction pour tous ces gens de si nombreux pays. Nous persévérons dans la prière pour vous afin que le message de Dieu continue à se répandre à toutes les personnes qui en ont besoin. Colombie

1

Ephésiens 6.19.

2

Philippiens 1.5.



Chapitre 52 Epilogue

«

Q

u’en est-il maintenant de notre maison en Alaska?» Cette question a été posée par quelques membres d’équipage qui venaient d’entendre parler des changements qui allaient se passer dans les années à venir. «N’y aura-t-il bientôt plus de Mission à Seward?» Ils ne pouvaient pas le croire… Ne plus jouer de la musique ensemble? Plus de discussions amicales autour du barbecue et d’un plat de riz à la suite du culte? Les marins étaient en pleurs en quittant le bâtiment. Quelques photos de dernière minute ont été prises en ce mois de septembre 2003, juste avant leur départ de Seward pour se rendre dans les Caraïbes. L’équipe de la Mission était également très peinée face à cette situation en réalisant que tout cet endroit allait changer dans l’année à venir. Le pasteur Ramon n’allait plus se joindre fidèlement à nous deux fois par semaine comme il en avait l’habitude depuis de nombreuses années. Et qu’en serait-il du matériel qu’il apportait toujours pour les rencontres chrétiennes à bord des bateaux? Plus de frère June, plus de frère Eduardo, non…, non…? Tous ont commencé à crier à Dieu, tout en réalisant qu’il avait malgré tout encore la situation sous son contrôle.


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Quand les cœurs chavirent

En effet, après avoir offert durant onze étés un lieu familial aux équipages des bateaux de croisière, la situation des embarquements a subitement changé. Une décision a été prise de reconstruire un quai dans le port de Whittier, comme par le passé. Certaines compagnies ont décidé de ne plus accoster à Seward comme elles l’avaient fait jusqu’à présent mais de se rendre à Whittier. Bien que cette petite ville soit située plus près d’Anchorage et que les bus aient obtenu l’autorisation de passer le tunnel les amenant de l’autre côté de la montagne, il n’est pas sûr que cette nouvelle façon de procéder soit un gain de temps pour les passagers faisant les allers-retours depuis l’aéroport d’Anchorage. Les années à venir nous dirons si cette situation s’avère favorable ou non. Après de nombreuses prières, l’équipe de la Mission a décidé qu’ils loueraient à nouveau un appartement en copropriété dans la Tour Begich à Whittier. Une partie de l’équipe se rendrait là-bas pour l’accueil de certains bateaux tandis que les autres resteraient à la Mission de Seward car certaines compagnies n’allaient pas de suite changer de port d’embarcation. Toute cette situation engendrerait de nombreuses heures de conduite sur les routes, les deux endroits étant distants de 160 kilomètres. La Mission aura besoin d’une plus grande quantité de bénévoles sur place afin d’avoir assez de monde sur les deux sites en même temps. Seul le Seigneur connaissait le futur. N’y aurait-il dans quelques années plus aucun bateau de croisière dans le port de Seward? Nous demandons des prières pour cette situation qui est spécialement difficile pour tous ces marins qui étaient tellement contents durant ces dernières années d’avoir «un foyer loin de leur foyer» situé à la troisième avenue à Seward, Alaska. Printemps 2004 A l’heure de la traduction de ce livre et pour conclure tout cela, on peut affirmer que le Seigneur a répondu aux prières


Epilogue

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comme lui seul sait le faire. La Mission de Seward n’a pas fermé ses portes, elle continue à y accueillir des marins. Des bateaux de croisière arrivent dans les deux ports. En 2007, Dieu a permis que nous ayons deux petits appartements à Whittier, l’un en face de l’autre dans la Tour Begich. Dans ce nouvel endroit, des centaines de marins y trouvent également l’hospitalité, la tranquillité, l’Evangile ainsi qu’un espace où ils peuvent téléphoner chez eux ou encore regarder des photos de leurs familles sur leurs ordinateurs portables. Entre-temps, le développement technique concernant les télécommunications a radicalement changé depuis 1989 et permet d’offrir aux équipages le matériel dont ils ont aujourd’hui besoin. Durant ce temps, une pièce réservée aux supports médiatiques facilite la recherche de publications chrétiennes, de CD, de DVD et de conseils. A Dieu revienne toute la gloire dans cette aventure! «C’est de lui, par lui et pour lui que sont toutes choses. A lui la gloire dans tous les siècles! Amen!» (Romains 11.36)

Terre et glace de l’Alaska.



Post-scriptum

U

n jour de 2005, un appel téléphonique est parvenu à la Mission avec cette demande: «Pourriez-vous fournir des téléphones à un équipage mexicain d’un navire de marine? Ce bateau devait accoster à Anchorage et voilà qu’au tout dernier moment, le capitaine a décidé d’aborder plutôt à Seward. Tous les invités d’honneur devront trouver également un logement en ville!» Quelques moments plus tard, les voici arrivés… Des groupes de magnifiques hommes vêtus d’uniformes de la marine ont traversé la 3e avenue, très impatients de téléphoner à leurs familles après un long séjour en mer. Presqu’aucun d’eux ne parlaient anglais et, dans l’équipe de la Mission, seulement une personne s’exprimait en espagnol… Cependant malgré ces «frontières», des cartes de téléphone, du café ainsi que des Bibles en espagnol leur ont été fournis. Toute cette trépidante aventure a continué durant cinq jours consécutifs! Tôt le matin, une partie de l’équipage attendait déjà sur le porche d’entrée de la Mission afin d’être les premiers à pouvoir téléphoner. Ils avaient même établi leurs propres listes d’attente! Puis, le personnel de la Mission a été invité à faire un tour sur ce vaisseau exceptionnel muni de nombreuses voiles. Le capitaine a reçu un Nouveau Testament bilingue anglais/


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Quand les cœurs chavirent

espagnol accompagné du film Jésus et il a ensuite rendu visite à la Mission. Après ces jours agités mais bénis, il s’est avéré que, malgré les barrières linguistiques, quelques marins ont accepté Christ dans leur cœur et toutes les publications en espagnol ont été dévalisées par cet équipage spirituellement affamé! Personne n’est reparti les mains vides sans avoir reçu ne fut-ce qu’un échantillon du message de la Bonne Nouvelle. Cet évènement n’est pas passé inaperçu pour les habitants de Seward lorsqu’ils ont vu les marins accrochés en haut des voiles du vaisseau lors de leur départ de la Baie de la Résurrection. Ce n’est pas sans émotion que les bénévoles de la Mission pour les marins, restés en retrait, se sont sentis bénis et remplis de joie à la suite de cette semaine mexicaine surprise. Il n’y a pas eu assez de temps ensuite pour réfléchir à tous ces souvenirs heureux car déjà deux nouveaux gros bateaux de croisière venaient d’accoster et des marins attendaient qu’on prenne soin d’eux et, le jour suivant, un autre bateau encore, puis un autre, un autre, un…

Que Dieu soit toujours avec vous! Merci pour votre générosité! Gracias, muchas gracias por todo!1 Les mexicains du Cuauhtémoc

1 Citation imprimée sur le poster du bateau à voiles, offert à la Mission pour les marins.


Informations générales sur la Mission pour les marins

L

a Mission est dirigée par le Ministère chrétien d’Alaska en faveur des marins, une société à but non lucratif. Cette Mission n’est rattachée à aucune dénomination chrétienne en particulier mais vit de foi et compte uniquement sur Dieu pour pourvoir à ses besoins. Leur activité principale est de s’occuper du personnel naviguant sur les bateaux de croisière et ceci durant la saison d’été. Ils visitent également des bateaux de chargement (cargos) et des bateaux de pêcheurs. Durant l’année, ils rendent visite aux marins hospitalisés, distribuent également de la nourriture, des vêtements et offrent un abri durant l’hiver à la collectivité dans le besoin. Durant l’été, environ 7000 membres d’équipage de bateaux de croisière rendent visite à la Mission. Cela fait en moyenne 70 visiteurs par jour. Ces personnes représentent une énorme diversité de pays, de groupes ethniques et d’arrière-plans religieux. L’objectif principal de la Mission est de partager l’amour de Jésus-Christ en mettant en contact les non-chrétiens avec l’Evangile par l’enseignement, l’aide et l’encouragement. La Mission équipe aussi les chrétiens pour animer les groupes de rencontres à bord des bateaux.


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Quand les cœurs chavirent

«Allez donc, faites de toutes les nations des disciples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit et enseignez-leur à mettre en pratique tout ce que je vous ai prescrit.» (Matthieu 28.19-20) Si vous voulez en connaître plus au sujet de la Mission pour les marins, si vous désirez vous-mêmes vous engager dans ce ministère rempli de bénédictions, vous pouvez nous contacter: Seaman’s Mission P.O. Box 2742 Seward, AK 99664 U.S.A. Téléphone/télécopieur: (--) 1-907-224-8482 E-mail: seamission@juno.com Internet: www.seamission.org

Prêt pour l’embarquement…


Notes à propos de l’auteure

N

ée et ayant grandi en Hollande, Roeli Elbers-Heij rencontre son mari en 1960 au sein du ministère «Jeunesse pour Christ». Même une fois mariés, parents de six enfants et à la tête d’un commerce, elle et son mari ont toujours été engagés dans l’évangélisation de proximité, le plus souvent avec des enfants ou par le biais de la littérature chrétienne. En 1983, ils prennent la décision de revendre leur commerce pour s’engager dans une Mission en Amérique su Sud, au Surinam. Bien qu’installés dans la station missionnaire, ils se rendent régulièrement auprès de peuplades indiennes dans la jungle. Leur maison est à la fois leur foyer, l’église, la librairie et l’imprimerie. Ils commencent l’édition d’un petit mensuel et c’est à ce moment-là que le goût pour l’écriture naît dans le cœur de Roeli Elbers-Heij. A la suite de problèmes cardiaques, le mari de Roeli décède en 1994. Elle retourne alors en Hollande pour travailler dans une librairie chrétienne, puis pour traduire et publier dans diverses langues quelques livres écrits par son mari. Finalement, c’est en l’an 2000 que Roeli s’engage à la Mission pour les marins (Seaman’s Mission) et que de nombreuses rencontres commencent, que ce soit avec des marins ou avec


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des autochtones. Ce sont ces rencontres qu’elle nous livre dans cet ouvrage intitulé Quand les cœurs chavirent. Des tropiques à l’Arctique, les différences de climat et les conditions de vie diffèrent, mais le but final demeure le même: répandre la Bonne Nouvelle de Jésus auprès des peuples les plus isolés.


A découvrir dans la même collection Chute vers le ciel, Ammon Norbert Agé de 28 ans, Norbert Ammon apprend qu’il a le cancer. Terrible diagnostic! Jeune homme ambitieux, promis à une brillante carrière, il doit apprendre à accepter la maladie. Au sein même de cette épreuve, il expérimente l’amour de Dieu et sa force. Le jeune homme égoïste devient alors un homme selon le cœur de Dieu. Il nous fait part ici du chemin qu’il a parcouru avec Dieu à travers la souffrance, un chemin de paix malgré la douleur. Touchant par son honnêteté et son style direct, vivant et passionnant, ce témoignage est aussi encourageant, car il montre comment Dieu porte et conduit ses enfants en toute circonstance. - 256 pages ISBN 2-8260-3472-3

Entre les mains des talibans, Mühlan Eberhard & Shelter Now C’était en août 2001, et ils étaient huit. Huit collaborateurs de l’organisation humanitaire Shelter Now à être arrêtés par les talibans, puis retenus comme otages pendant plus de trois mois. 105 jours d’incertitude et de peur au cours desquels ils ont couru bien


des dangers et côtoyé l’extrême souffrance du peuple afghan. Mais ils ont aussi vécu des moments inoubliables: de vraies amitiés, l’aide désintéressée apportée par leurs codétenus afghans et le soutien de Dieu dans une épreuve qui semblait ne jamais vouloir finir. Un témoignage très vivant, captivant et émouvant, qui apporte au lecteur de précieuses informations sur l’Afghanistan. Il montre que même dans l’épreuve la plus dure, la force, l’espérance et le secours se trouvent en Dieu, qui n’abandonne jamais les siens. - 272 pages ISBN 2-8260-3483-9

Reprendre son envol, Gracia Burnham «La route de l’angoisse, de la souffrance et des bouleversements est longue, mais malgré tout, au bout, il y a cette possibilité de découvrir la joie. Peutêtre ne la ressentons-nous pas dès le début, mais, en coulisses, Dieu est à l’oeuvre. Et au bon moment, cette joie jaillira pour réchauffer notre coeur et celui de tous ceux qui nous entourent.» Que penser des souffrances permises par Dieu dans la vie de ses enfants? Après une année de captivité dans la jungle des Philippines, et la perte de son mari, Gracia Burnham nous livre le fruit de sa réflexion sur le sujet. Les deux années écoulées depuis la mort de Martin lui ont permis de mieux prendre conscience de la grandeur de l’amour de Dieu et de considérer la vie ici-bas à la lumière de l’éternité. Cet ouvrage est enrichissant pour chacun, car l’auteur n’y développe pas des théories sur la souffrance, mais, avec une grande honnêteté, elle montre comment, au sein même de l’épreuve, il est possible d’expérimenter l’amour de Dieu, sa fidélité, sa bonté, et d’apprendre à mieux le connaître. A lire et à offrir! - 176 pages ISBN 2-8260-3488-X


Brûlés vifs, Andreas Rapp & Gladys Staines Missionnaire parmi les lépreux en Inde, Graham Staines y périt avec ses deux fils: des extrémistes hindous ont mis le feu à la voiture dans laquelle ils se trouvaient. Un puissant témoignage de pardon et de consécration au Christ. - 160 pages ISBN 2-8260-3418-9

Chambre 105, Marcus Luedi & Allen Roberts «... vient de mourir, je suis désolé.» Cette phrase, Marcus Luedi l’a entendue à deux reprises, à propos de son épouse Marianne d’abord, puis de son fils Andrew, tous deux à la suite d’un cancer. Comment garder la foi quand l’épreuve s’abat ainsi sur vous? Si Dieu a la puissance de guérir, pourquoi ne le fait-il pas? «Chambre 105» raconte comment Marcus a traversé ces longues années de souffrance et de doute. Un témoignage authentique et profond de foi, d’espérance et de délivrance. - 280 pages ISBN 2-8260-3429-4



Questionnaire de qualité Vous venez de lire un ouvrage des éditions La Maison de la Bible. Votre avis a de l’importance pour nous! Nous serons donc très reconnaissants à celles et ceux qui prendront la peine de nous faire parvenir leurs réponses au questionnaire cidessous (à renvoyer à La Maison de la Bible, Comité d’édition, Case Postale 151, CH-1032 Romanel-sur-Lausanne, Suisse ou à compléter sur notre site Internet: www.maisonbible.net/ questionnaire).

Quand les cœurs chavirent Roeli Elbers-Heij Vous habitez…

 en Belgique  en France  en Suisse  au Canada  autre: ......................... Questions portant sur le contenu Le contenu du livre est

 édifiant / intéressant  moyen  sans intérêt

Le titre est

 accrocheur  moyen  mauvais

La formulation française est

 bonne  passable  mauvaise


Questions portant sur la forme Le prix du livre est

 trop élevé  correct  trop bas

Le format du livre est

 trop grand  bon  trop petit

La couverture du livre est

 attractive  moyenne  inadaptée

La reliure du livre est

 trop rigide  assez solide et souple  pas assez solide

La typographie du livre est

 pas assez serrée  agréable  trop serrée

Vos autres remarques ……………………………………………………………………… ……………………………………………………………………… ………………………………………………………………………


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