#44
MONADES URBAINES
Revue d’atelier Marc Vaye
Printemps 2015
La promesse de l’aube / Marc Vaye 2014
Acrylique sur toile 120 x 90 cm
Vers une nouvelle charte d’Athènes Andrea Branzi Biennale d’architecture de Venise 2010
#1 La ville comme “favelas à haute technologie” Préférer aux solutions rigides et définitives les dispositifs réversibles, inachevés, transformables, qui permettent d’adapter dans le temps l’espace urbain à des activités nouvelles, non prévues et non programmées.
#2 La ville comme “ordinateur disponible tous les 20m2” Eviter l’identification entre la forme et la fonction, les typologies spécialisées, les dispositifs rigides, les périmètres bondés ; créer des territoires semblables à des “fonctionnoïdes” capables d’accueillir n’importe quelle activité en n’importe quel lieu parce que changeant de fonction en temps réel.
#3 Réaliser “une hospitalité cosmique de la villle” Comme dans les métropoles indiennes, créer les conditions d’une convivialité planétaire entre l’homme et les animaux, les technologies et les divinités, les vivants et les morts ; des métropoles moins anthropocentriques, plus ouvertes aux biodiversités, au sacré, à la beauté humaine.
#4 De nouveaux modèles “d’urbanisation faible” Réaliser de nouveaux seuils perméables entre la ville et la campagne, des territoires hybrides, mi-urbains, mi-agricoles, des territoires de production horizontaux et accueillants (mais sans clochers) qui suivent les saisons et l’évolution du climat, en créant des conditions permettant d’habiter un lieu d’une manière disséminée et réversible.
#5 Périmètres et fondations flous Créer des organismes dont la limite soit réversible pour un tissu urbain où la différence entre l’intérieur et l’extérieur, le public et le privé, tend à disparaître, sur un territoire intégré sans spécialisations fonctionnelles.
#6 Re-fonctionnalisation continu de l’existant Préférer à des constructions nouvelles la réhabilitation du patrimoine bâti abandonné afin d’adapter la ville actuelle aux nouvelles nécessités du travail disséminé, de la micro-entreprise, de l’économie créative, de la production et de la consommation de la culture.
#7 Grandes transformations par micro-intervention Penser le phénomène urbain comme un agrégat moléculaire, dont la qualité est constituée par la sémiosphère qui émane des objets domestiques, des outils, des services, des marchandises et des personnes ; comme des micro-crédits de Mohamad Yunus, il faut pénétrer dans les économies domestiques et les interstices de la vie quotidienne.
Changer de paradigme
Haussmann Š Simon Boudvin 2005
Habiter une monade Nous allons penser des monades* urbaines, des entités sans porte ni fenêtre qui contiendraient la totalité de l’univers dans les plis et replis de leur enveloppe. Une ville verticale (deux versions), une autre horizontale. Les deux abolissent l’opposition classique entre ville et campagne et intègrent plantes et télétravail. Des bâtiments - ville comme la Cité radieuse de Le Corbusier, les utopies de Site ou les recherches d’Edouard François comme “L’ananas”. Etre jeté dans le monde, c’est toujours se trouvé niché dans une sphère, une bulle, une serre plus ou moins fragile, équipée, connectée. Du liquide amniotique à notre maison, nous ne sortons jamais au dehors. Il n’y a pas d’extérieur.
* Notion théorisée par Liebniz au XVIIIe siècle. Dans la monade tout est dedans. Lire “Les monades urbaines“ de Robert Sylverberg, 1971. Titre original “The world Inside”.
Densifier Les gabarits haussmanniens sont abolis. Les hauteurs sur rue peuvent doublées. Les alignements sur rue sont respectés. En cœur d’îlot les hauteurs peuvent gagner 50%.
Télétravailler Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication, NTIC, sont la clé pour marier la croissance urbaine et le développement durable. Les réseaux informatiques peuvent faire baisser la consommation énergétique et les émissions de gaz carbonique des villes, tout en contribuant à leur développement économique et social. Télétravail à domicile, espaces de co-working qui permettent de mutualiser matériel et services.
Cultiver Le modèle est la serre horticole : un jardin d’hiver pour culture maraichères hors-sol ou un jardin d’agrément suspendu en plein air. Le végétal s’invite dans le béton.
0 énergie Le modèle est la première version non-réalisée de la Maison Latapie de Lacaton & Vassal.
La Tour vivante une ferme de production maraîchère hors-sol qui se poursuit depuis l’espace public jusqu’au ciel. ©SOA.
Mixités Mixités sociales et générationnelles grâce à des typologies variées et des stratégies d’adjonction (studio indépendant pour adolescent, personne âgée ou invité).
Hybride L’hybridation fonctionnelle comme stratégie de fluidité programmatique, comme méthode d’urbanisation faible. Eviter l’identification entre la forme et la fonction, les typologies spécialisées, les dispositifs rigides. Créer des territoires capables d’accueillir n’importe quelle activité.
Trois typologies La tour fine accueille environ 20 SOHO (Small Office HOuse) pour célibataires, étudiants ou jeunes travailleurs. Le socle accueille l’accès et les services. Les étages courants les SOHO, les niveaux supérieurs les jardins et jardins d’hiver suspendus, un bain et un foyer en belvédère sur la ville pour offrir l’horizon. La tour fine comme signal d’art urbain. La tour composite est fractionnée en deux parties, la basse et la haute, par un espace de co working associé à un jardin suspendu. La partie basse accueille en rez-dechaussée un commerce, l’accès et les services, quatre niveaux d’habitations avec des duplex intégrant des extérieurs, c’est-à-dire disposant des qualités de l’habitat individuel (maximum 20 unités d’habitations de différentes tailles). La partie haute comprend aussi quatre niveaux d’habitation en duplex intégrant des extérieurs (maximum 20 unités d’habitations de différentes tailles) couronnés de trois niveaux de jardins suspendus, jardins d’hiver et ou patios terrasses. La tour comme ferme de production maraichère hors-sol. La barre est constituée de “maisons de ville” en duplex superposées (maximum 20 unités d’habitations de différentes tailles). Logements familiaux avec stratégie d’adjonction de petites unités complémentaires, de jardins en peine terre ou de jardins suspendus, de jardins d’hiver ou de patios terrasses. La barre comme assemblage d’unités d’habitation indépendantes.
La question du logement ... da L’unité de mesure urbaine est le logement non pas comme programme mais comme question. L’espace à habiter doit être généreux, confortable, appropriable, économique, fluide, flexible, lumineux, évolutif, “luxueux”... Au-delà de la question de la situation, la liberté d’usage d’un logement est liée à sa dimension. Pour satisfaire la liberté d’usage, les logements doivent être significativement plus grands que les surfaces standard. La générosité spatiale comme première qualité. Fabriquer du plus grand. La première qualité c’est la quantité. Les grands espaces procurent un sentiment vital d’échappement, de liberté. Agrandir ne signifie pas gaspiller mais inventer de la place. Il ne s’agit pas d’agrandir la dimension de chaque pièce mais de se donner des objectifs de conception qui permettent de dépasser la fonctionnalité programmatique pour atteindre une réelle plus-value d’usage des lieux à vivre. Dans ce contexte il n’est pas inconsidéré de porter la surface d’un trois pièces à 100 m2. Au-delà de sa surface de base habitable, chaque logement
ans la ville fertile doit comprendre des surfaces complémentaires. Bien sûr des espaces extérieurs comme des terrasses, des balcons, des loggias ou des patios-terrasses mais aussi des dispositifs temporairement habitables comme des jardins d’hiver. Il doit aussi intégrer des espaces non programmés ou pour le moins à programmations multiples. L’ensemble peut atteindre une surface au moins équivalente à 50% de la surface de base pour permettre une diversité des usages. Chaque pièce principale doit disposer d’un parcours de déplacement ouvert sur un espace extérieur. Pour répondre aux exigences de confort et de flexibilité les systèmes à ossatures (poteaux, poutres, planchers) ont l’avantage d’offrir à la fois efficacité structurelle et maîtrise de l’économie. Ils permettent capacité d’évolution (cloisonnement libre), portées plus grandes et grande capacité de surface pour un coût minimum. L’enveloppe doit favoriser les échanges entre les espaces de base et leurs extensions, elle participe ainsi à la création d’une ambiance confortable.
Habiter c’est se protéger et instaurer des échanges. Parler du logement collectif, c’est parler de la ville. Aujourd’hui la continuité et l’homogénéité ont perdu leurs sens au profit du singulier, de l’objet. Gagnant en autonomie et en puissance graphique le logement gagne en monumentalité. A la linéarité se substitue la faille et la fragmentation, à l’homogénéité la diversité. La ville fertile comme compression de la nature cultivée et de l’architecture. Dans le domaine des dispositifs techniques de la construction, par exemple les toits et les murs végétalisés, la nature est invoquée comme un régulateur de pollution, un outil phytosanitaire, un filtre à air, un régulateur de débits d’eau, un objet de désir, un pourvoyeur de plaisirs… L’architecture et l’agriculture sont les deux catégories territoriales fondamentales, il s’agit de les fusionner dans un scénario où coexistent simultanément de nombreuses activités autrefois exclusives.
L’architecture non plus comme structure de consommation d’énergies produites ailleurs et acheminées pour être distribuées, mais comme une enveloppe productrice d’énergie, sous forme d’électricité, de chaleur, de nourriture. La démarche vaut aussi pour l’eau qui peut bénéficier d’un cycle court d’usage et recyclage sur place. Dans le domaine de l’architecture la considération des champs, des gradients et des flux devrait s’avérer plus naturelle que celle des formes. La ville fertile comme des rêves de jardins qui s’infiltrent dans nos vies urbaines. La ville fertile comme un nouvel horizon où minéral et végétal fusionnent en un nouvel alliage telles les serres qui placent au centre la question de l’ambiance et sont des espaces tournés vers leur intériorité, comme la monade de Liebniz, cette entité sans porte ni fenêtres qui trouve à l’intérieur d’elle même son propre climat, sa propre géographie, son propre univers, sa propre extériorité.
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Monades urbaines Atelier Marc Vaye
Assistant Nicolas Fedoroff
Cycle Licence Semestre 3 Lena Arsenijevic Allal Bencheqroun Ouazzani Taibi Michael Brunel Thibault Chapal Evangelos Dardiotis Chang Fan Esperanza Garcia Soler Mathias Gomart Etienne Lombard Frédéric Melon Alexandre Picolet Louis Umbach Bascone
Antoine Aubert Inès Blanquet du Chayla Sofia Chaoui Magali Dancer Gemayel Aurélia Ducatillon Michael Garel Martorana Stanislas Gimel Hind Lamrini Shao-Lun Lu Margaux North Roberto Paolo Raimondi Emma Vesiez
École Spéciale d’Architecture
Printemps 2015
Références Les quatre concepts fondamentaux de l’architecture contemporaine, Richard Scoffier, Norma éditions 2011. Climats, Conférences de Malaquais, 2012. Architectures météorologiques, Philippe Rahm, Archibook, 2009. L’architecture de l’environnement bien tempéré, Reyner Banham, HYX, 2011. Maison Sugimoto, Kyoto, 1723, Richard Copans, Les films d’ici - ARTE, 2007. Eloge de l’ombre, Jun.ichiro Tanizaki, Publications orientalistes de France, 1977.