PFE 2016 : Conduites lumineuses

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CONDUITES LUMINEUSES Reconvertir un bâtiment industriel en friche à Detroit, Une Ressourcerie

Margaux Donzé Marie-Charlotte Baubet

Projet de fin d’études - Session 2016

Architecture, Ambiances et Cultures Numériques Ecole Nationale Supérieure d’architecture de Grenoble

Digital RDL Research by design laboratory



CONDUITES LUMINEUSES Reconvertir une friche industrielle à Detroit Une Ressourcerie Margaux Donzé Marie-Charlotte Baubet Projet de fin d’études - Architecture, Ambiances et Cultures Numériques. Philippe Liveneau Architecte, Docteur SPI, (Digital RDL, Cresson), TPCAU - Responsable. Equipe d’encadrement : Grégoire Chelkoff Amal Abu Daya Magali Paris C. Bonico-Donato 0livier Baverel

Architecte, Docteur URB / HDR / (Cresson) - Professeur, HDR, STA Architecte, Doctorante (Cresson) - TPCAU, (MAA) Ingénieur Agronome, Paysagiste Docteur, (Cresson) - VT Philosophe, Docteur, (Cresson) - SHS Ingénieur, Docteur, HDR, (EPC Navier) - Professeur, HDR, STA

Jury de Soutenance du PFE : Directeur d’etude : Second Enseignant : Enseignant Ensag : Enseignant Ensag : Enseignant d’une autre école : Personalité extérieure :

Philippe Liveneau, Architecte, Docteur SPI, (RDL, Cresson), TPCAU Grégoire Chelkoff, Architecte, HDR / (Cresson) - Professeur, HDR, STA Guillaume Daydé, Architecte / TPCAU ( Agence Espace Gaia) Frederic Guillaud, Architecte / TPCAU ( Quarcs) Gilles Delelax, Architecte, Docteur, DA, Ensa de Malaquais - (Muoto) Arnaud Hudry, Architecte - Agence Futur A

Projet de fin d’études - Session 2016 Architecture, Ambiances et Cultures Numériques

Digital RDL Research by design laboratory

Ecole Nationale Supérieure d’architecture de Grenoble


Sommaire Introduction

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I. Constat / Problématique

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1. Bâtiments industriels en situation de friche 1.1 Un constat 1.2 Un potentiel 1.3 Un devenir possible: la reconversion (réemploi de bâti)

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2. La lumière comme stratégie de reconversion 2.1 Esthétique existante (constat) 2.1.1 La lumière dans les bâtiments industriels -

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II. Recherches / Form-finding

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1. Lumière naturelle, de multiples intérêts 1.1 Le soleil, une énergie gratuite 1.2 Le soleil, une énergie thérapeutique 1.3 Le soleil, une énergie changeante

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2. Outils d’analyses 2.1 Données contextuelles 2.2 Comportement des rayons solaires 2.3 Notion de calcul

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3. Les conduites lumineuses comme outils de reconversion 3.1 Influence de la forme et de l’emplacement de l’ouverture sur le type de lumière 3.2 Les systèmes de conduites lumineuses

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Une problématique structurante 2.1.2 La Sucrière - Espace culturel 2.1.3 Analyse de reconversion d’usines de verre en chine


III. Projet / Une Ressourcerie à Detroit 1. Une implantation évidente : Détroit, le quartier d’Eastern Market

76 81

1.1 Une ville: Detroit 1.1.1 Recontextualisation - Crise: ville déchet

1.1.2 Etat des lieux : Le réemploi de la ville comme ressources

1.2 Un quartier : Eastern Market

2. Les origines du programme: l’intérêt pour le réemploi

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3. Le remploi de bâtiment : la reconversion

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3.1 Une reconversion 3.2 Analyse esthétique et structurelle 3.2.1. Analyse esthétique

3.2.2. Analyse structurelle et premières intentions

4. Une stratégie de reconversion: la lumière naturelle 4.1 Des besoins lumineux divers

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4.2 Identification de quatre typologies 4.3 Un parcours lumineux

Conclusion Artefacts Bilbiographie

143 147 167


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Introduction

Les morphologies des villes changent avec le temps, en fonction de leur situation politique et économique elles se font et se défont. Certaines se sont formées autour de grands pôles économiques, comme c’est le cas de New York aux états Unis, ou de Saint Etienne en France. Les industries formant l’économie, et donc la ville elle-même, ont été le moteur de celles-ci. Cependant, lorsqu’elles ont du fermer ou se délocaliser, ces villes ont eu le cœur arraché. Sans dynamique et sans apport vital, elles se sont nécrosées et sont devenues des villes fantôme ou des shrinking cities. C’est notamment le cas de la ville de Détroit aux États-Unis et de la ville de Leipzig en Allemagne1. Les architectures délaissées sont

des stigmates flagrants de ces villes abandonnées, à l’image de la rouille qui piquette et grignote une surface. Parmi ces nombreux délaissés architecturaux, les friches industrielles sont des monolithes qui se dressent encore sur leur parcelle bien après l’abandon de leurs locaux. Ces immenses plateaux vides aux planchers patinés sont comme des curseurs sur une frise historique pointant le temps industriel, et à présent révolu, de ces lieux. Ces exploitations ont perdu leur valeur en perdant leur activité, sans fonction ces architectures ont alors longtemps été jugées sans intérêt. Pourtant, depuis les années 1970 on parle de patrimoine industriel2.

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#2/ Le déclin au quotidien : crise perçue et espaces vécus à Leipzig et Détroit - Urbanités [en ligne], Publié le 8 novembre 2013 http://www.revue-urbanites.fr/le-declin-auquotidien-crise-percue-et-espaces-vecus-a-leipzig-et-detroit/ Consulté le 05 avril 2016. 2

Smith, P. (2015, Juillet 07). La reconversion des sites et des bâtiments industriels. In Situ [en ligne] , pp. URL : http://insitu.revues.org/11802, Consulté le 30 mai 2016.


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En effet, ce patrimoine ordinaire à l’esthétique particulière présente des codes architecturaux révélateurs d’une époque, ce sont donc des éléments de patrimoine que l’on se doit de conserver. Les rénovations et les reconversions révèlent alors ces bijoux urbains, comme c’est le cas avec l’ancienne usine Fiat de Lingotto à Turin, reconvertie en 1985 par Renzo Piano. Le travail de street art, ‘’Urban Geode’’, traite aussi de la mise en valeur de l’ordinaire et du délaissé5. Ces bâtiments ont été abandonnés car leur activité première n’est plus d’actualité et pourtant leur emplacement fortement intéressant pour la ville. Leur fonction industrielle ayant guidé leur localisation, ils sont donc à la fois proches des grands axes routiers ou fluviaux (pour le transport de marchandise) et situées en périphérie de la ville tout en restant connectées à celle-ci (pour limiter la pollution sonore tout en raccourcissant les déplacements des ouvriers). Cette position urbaine peut être un

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2016.

avantage pour la ville. En effet, leur reconversion permettrait de redynamiser l’agglomération en créant de nouvelles polarités. En y installant de nouveaux programmes il est possible de relancer l’attractivité de la ville, son tourisme et son économie. Ainsi, un délaissé peut devenir un atout et participer à une démarche de revitalisation de la ville. Ces blocs vides sont également très intéressants au niveau de leur architecture. Les espaces qu’ils proposent sont souvent de vastes surfaces et parfois aussi de grands volumes, ce qui permet une réelle liberté de subdivision de l’espace. Cette modularité spatiale permet également de nombreuses possibilités d’organisation interne, permettant d’être au plus proche des besoins de la nouvelle activité qui s’y implantera. Ces enveloppes peuvent donc presque tout abriter, il suffit pour cela de prendre en compte le potentiel de ces mines d’espace.

Urban Geodes - http://acommonname.com/street-art-project/ Consulté le 05 avril


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Halle Tony Garnier - Lyon, 1997, Jean-Marie Refflé ©

Ancienne usine Fiat de Lingotto à Turin, reconvertie en 1985 par Renzo Piano - Paul Smith ©

GEODE #4, 1911 W. Sunset Blvd, Echo Park, Downtown Los Angeles - 2016, A Common Name ©


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Nous sommes d’ailleurs à une époque où la consommation systématique de matières nouvelles commence à être sérieusement remise en cause. De nombreux évènements tendent à réactualiser la démarche du réemploi en architecture. Par exemple, le collectif Rotor en Belgique s’intéresse au flux de matières dans l’industrie et la construction. Ils développent des positions critiques sur la conception, les ressources matérielles, et des déchets par le biais de la recherche, des expositions, des écrits et des conférences. Dans la même veine, les architectes du collectif Encore Heureux communiquent énormément sur la thématique du réemploi en architecture. Ils ont notamment réalisé le Pavillon Circulaire à l’occasion de la COP 21 à Paris. Cette structure porte un nom qui n’illustre pas sa morphologie mais qui fait plutôt référence au processus de fabrication qui l’a vu naitre. C’est au sein de ce pavillon que Luc Le Chatelier, journaliste «Archi» à Télérama, introduit la notion de réemploi de la ville lorsqu’il ouvre la conférence Matière, Matériaux et Réemploi.

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« […] La ville de demain, elle existe déjà à 80% aujourd’hui et que c’est avec cette ville d’aujourd’hui qu’il vas falloir faire la ville de demain. » Luc Le Chatelier, Matière, Matériaux et Réemploi, 02 :154 Le réemploi peut donc se pratiquer à plusieurs niveaux, que ce soit du réemploi de matériaux, de bâtiments ou de tissus urbains. Le fait de reconvertir des friches industrielles permettrait alors de croiser ces différentes échelles de réflexion. Nous retrouverons cette logique inter scalaire au travers du réemploi de bâtiments dans un contexte particulier ainsi qu’au travers de la mise en place d’un programme favorisant ces démarches de réutilisation des ressources. Le projet Conduites lumineuses porte sur la reconversion de deux bâtiments en situation de friche situés dans le contexte iconique de la ville de Détroit, aux Etats-Unis. Il questionne le potentiel de ces

Julien Choppin, Nicola Delon et Gilles Perraudin, Matière, Matériaux et Réemploi. Conférence du pavillon circulaire dans le cadre des mardis du pavillon, communiquée le 1er Décembre 2015 à Paris. http://www.pavillon-arsenal.com/fr/conferences-debats/cycles-encours/pavillon-circulaire/10132-matiere-materiaux-reemploi.html, Consulté le 2 décembre 2015.


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délaissés urbains à la fois dans un rapport au contexte et à la ville et à la fois dans une introversion quand à son esthétique particulière et son histoire propre. Tout d’abord, le fait de redonner vie à des bâtiments abandonnés à Détroit, et plus particulièrement ces deux bâtisses au sein d’Eastern Market, permettra d’amplifier la dynamique de revitalisation du quartier dans lesquelles elles sont implantées. Comme les citadins de ce quartier sont très investis dans leur ville, et notamment dans sa reconstruction, c’est dans cette démarche de développement des pratiques croisant architecture et réemploi que nous avons choisi de reconvertir cette friche industrielle en Ressourcerie. Ensuite, en lien avec la thématique du réemploi et dans une mise en valeur du patrimoine que sont ces bâtiments industriels, le projet propose une stratégie de reconversion par la lumière. Cet élément naturel devient alors un outil qui permet de structurer et de séquencer les espaces tout en distribuant un

éclairage gratuit ainsi que des ambiances lumineuses tout au long d’un parcours. Travailler la conduite de la lumière naturelle est d’autant plus pertinente ici que les bâtiments que nous souhaitons reconvertir sont actuellement aveugles. Diffuser un éclairage naturel dans des volumes aussi conséquents est donc un enjeu considérable. La lumière devient alors une véritable stratégie de reconversion. Le projet se focalise sur les manières de conduire, diriger, et diffuser cette lumière et ses ambiances dans l’épaisseur de ces bâtis qui sont de véritables éclats de patrimoine urbain. Il interroge également comment cette donnée physique peu produire un projet architectural. Nous focaliserons donc notre recherche de conduites lumineuses sur des enjeux à la fois physique et sensible. Celles-ci conduisant la lumière mais aussi les corps et les usages dans l’espace. Pour répondre à cela nous allons d’abord faire un état


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des lieux des bâtiments industriels en situation de friche et observer leur position dans le milieu urbain, comment ils peuvent être reconvertis et quelle est la place de la lumière dans ces volumes gigantesques. Dans un deuxième temps nous allons nous intéresser à la lumière naturelle. Tout d’abord dans une approche physique pour saisir ses qualités mesurables ainsi que son comportement dans l’espace puis ensuite dans une approche plus architecturale pour comprendre comment elle peut être captée, guidée et diffuser par des dispositifs particuliers. Enfin, nous synthétiserons ses deux enjeux que sont la reconversion de bâtiments industriels et l’aspect structurant des conduites lumineuses au sein d’un projet de Ressourcerie à Détroit.



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I.


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I. Constat / Problématique Aujourd’hui, nous arrivons à ce que l’on pourrait appeler une crise de la matière première, une ère où la quantité de déchets ne cesse de s’accumuler alors que les ressources sont de moins en moins présentes. A plus grande échelle on parle alors de délaissés urbains, ceux-ci sont actuellement très présents dans le paysage des villes. Comment inverser la tendance ou du moins la stabiliser ? Comment s’appuyer sur le « déjà là » et lui redonner de la valeur, transformer le statut d’un bâtiment dit en fin de vie pour lui apporter un nouvel usage? En d’autres termes, faire que les délaissés d’aujourd’hui deviennent les ressources de demain. Nous avons ici élargi le terme de «rebut » pour l’appliquer à l’échelle du bâti et notamment à la problématique des bâtiments industriels en situation de friches.

Ces espaces, emblématiques d’une époque témoignent souvent d’un passé marquant et d’un dynamisme qui a fondé leur image. Ils sont aujourd’hui victimes d’abandon, d’oubli et parfois de dégradation. Comment comprendre ce basculement? Qu’est ce qui a fait que leur statut a pu évoluer de telle sorte qu’ils soient aujourd’hui vus comme des rebuts? Plus que des résidus urbains, ces lieux sont pleins de potentiels, ils sont de véritables atouts pour reconstruire la ville et parfois même des challenges à relever. Alors, que faire de ces espaces délaissés? sont pleins de potentiels, ils sont de véritables atouts pour reconstruire la ville et parfois même des challenges à relever. Alors, que faire de ces espaces délaissés?


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1. Batiments industriels en situation de friche 1.1. Un constat

Par définition, une friche est « un espace historiquement utilisé à des fins industriels, mais qui est aujourd’hui abandonné et inutilisé »5. Ce terme peut définir plusieurs cas de figure : des terrains contaminés ou non, au cœur où à la périphérie des villes et avec des superficies variables. Cependant, quelle que soit la situation l’espace ou les bâtiments sont clairement délaissées. Ce qui est à la fois un danger (puisque la structure n’est pas entretenue et se dégrade) et à la fois un gâchis d’espace. Ce patrimoine industriel ne répond souvent plus aux besoins actuels, en termes de confort notamment. Aujourd’hui, et ce depuis

la crise industrielle de 1970, ces lieux se retrouvent sans utilisation et abandonnés car victimes de la délocalisation, de la fermeture des usines ou de la recomposition du système productif. Le contexte économique peut également être à la base de nombreux abandons d’opération. En France, on compte entre 200 000 et 300 000 sites6 pouvant être classés comme friches industrielles. On en recense également une bonne quantité aux Etats-Unis, si on en croit les estimations de l’Environnemental Protection Agency, leur nombre s’élèverait à 450 0007.

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France Dumesnil et Claudie Ouellet, La réhabilitation des friches industrielles: un pas vers la ville viable? Publié en octobre 2002. https://vertigo.revues.org/3812, Consulté le 15 mai 2016. 6

Suivant une étude réalisée par l’Agence de l’environnement et de la maitrise de

l’énergie. https://vertigo.revues.org/3812, Consulté le 15 mai 2016. 7

France Dumesnil et Claudie Ouellet, La réhabilitation des friches industrielles: un pas vers la ville viable? Op. Cit.


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L’importante quantité de friches sur le territoire américain, nous a conduit à nous intéresser plus particulièrement à une ville au cœur même de cette conjoncture : celle de Detroit. Cette ville à été l’icône et le témoin d’une ère industrielle florissante, mais aujourd’hui, aucune autre ville ne pouvait davantage symboliser cet état de crise et d’abandon porté à son paroxysme. La célèbre Motor City a fait vivre pendant un temps le rêve ouvrier américain, mais après la crise et la délocalisation des grandes industries, Detroit se trouve alors majoritairement peuplée par des bâtiments vides, abandonnés et parfois même voués à l’effondrement. La ville a subi un fort exode de sa population passant de 2 millions

en 1950 à environ 685 000 aujourd’hui ; équivalent à une perte de 61 % de ses habitants en 60 ans. Le constat? des zones de la ville se retrouvent alors complètement désertes: on compte 51,8 km2 de territoires vacants ainsi que 100 000 maisons abandonnées : avec 15% du foncier utilisable. Pourtant, ces espaces sont témoins d’une ère prospère, iconiques et identitaires, ils ont souvent marqué les esprits. Associés au passé glorieux des villes et à leur plus forte période d’expansion, ils constituent un véritable potentiel foncier. Ces espaces, actuellement abandonnés, sont donc à reconsidérer.


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Quartier avec de nombreux terrains vagues - Detroit, 2008, GETTY IMAGES ©.


20 1.2. Un potentiel

Bien plus que des délaissés en décrépitude, ces bâtiments sont à voir comme de véritables richesses, à la fois patrimoniales, spatiales et architecturales. La prise de conscience de ce potentiel de reconversion est assez récente, elle date du début des années 1990. Lorsque l’on s’intéresse à ces espaces, on note plusieurs aspects et caractéristiques qui permettent d’affirmer un certain potentiel. D’abord, ces bâtiments souvent dédiés à des fabrications de grandes envergures libèrent généralement de vastes volumes disponibles. En effet, que la structure soit métallique ou en béton, elle laisse des surfaces souvent gigantesques et donc beaucoup de liberté et d’alternatives dans l’agencement de la future organisation interne. Ces lieux sont aussi souvent situés dans des zones stratégiques à fort enjeu pour le développement de la ville. En effet, leur position au sein de celle-ci est souvent privilégiée. Comme le confirme France Dumesnil et Claudie Ouellet dans leur article

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sur La réhabilitation des friches industrielles: un pas vers la ville viable? «majoritairement dans des zones urbaines de valeur, à proximité du centre […] souvent près du centre-ville des grandes agglomérations des pays industrialisés»8. A Detroit, les bâtiments que nous reconvertissons en sont l’exemple même. Ceuxci se trouvent dans le Greater Downton of Detroit, en d’autres termes, l’extension du centre ville. Ils sont donc légèrement en périphérie tout en restant en lien avec le cœur actif de la ville. Ces espaces permettent également la possibilité d’une renaissance de la ville sur elle même. En effet, plutôt que d’étendre la ville, en construisant toujours plus loin du centre, pourquoi ne pas plutôt prendre en compte l’existant et le réinvestir? Faire avec ces espaces pourrait être une solution pour réduire la croissance périphérique des centres urbains. Ou alors, pourquoi ne pas plutôt remettre en état plutôt que de démolir?

France Dumesnil et Claudie Ouellet, La réhabilitation des friches industrielles: un pas vers la ville viable? Op. Cit.


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Enfin, ces espaces ont souvent bien plus qu’une valeur esthétique, on parle ici de valeur patrimoniale. En effet, ces bâtiments en friche sont porteurs de mémoire, ils conservent en eux une part d’histoire notamment quant à leurs usages d’origine. Ils constituent un

héritage patrimonial sans précédent et assurent une continuité entre les générations et permettent ainsi la transmission d’un héritage. On peut alors parler de patrimoine ordinaire des villes ou plus spécifiquement de patrimoine industriel.

Le patrimoine industriel « Le patrimoine industriel comprend les vestiges de la culture industrielle qui sont de valeur historique, sociale, architecturale ou scientifique. Ces vestiges englobent : des bâtiments et des machines, des ateliers, des moulins et des usines, des mines et des sites de traitement et de raffinage, des entrepôts et des magasins, des centres de production, de transmission et d’utilisation de l’énergie, des structures et infrastructures de transport aussi bien que des lieux utilisés pour des activités sociales en rapport avec l’industrie (habitations, lieux de culte ou d’éducation).[C’est aussi] le témoignage des activités qui ont eu et qui ont encore des conséquences historiques profondes. »9 Alors, comment en s’appuyant sur ce potentiel, faire de ces délaissés, des projets moteurs? Comment protéger ce patrimoine industriel? Et dans un autre temps, comment le

maitriser et le mobiliser? Une alternative possible serait de réutiliser ces bâtiments, de prendre en compte leur potentiel historique et spatial et de s’en servir pour de nouveaux usages.

9 Charte nizhny tagil pour le patrimoine industriel, publié en juillet 2003. http:// www.icomos.org/18thapril/2006/nizhny-tagil-charter-f.pdf, Consulté le le 15 mai 2016.


22 1.3. Un devenir possible: la reconversion (réemploi de bâti)

L’évolution de nos sociétés, les changements économiques ainsi que les délocalisations ont fait que de nombreux bâtiments industriels, ont aujourd’hui perdu leur utilité première et sont restés bloqués à une certaine époque. Ces éléments patrimoniaux, souvent d’une grande valeur, architecturale et mémorielle entre autres, font partie des rares souvenirs qu’ils nous restent de ce passé. Prêts à être ré-appropriés, ils font aujourd’hui l’objet d’une sensibilisation plus grande et sont sujet à différents projets. Depuis plusieurs années, il y a en architecture une forte tendance à s’orienter vers la reconversion de bâtiments en situation de friche et ce pour plusieurs raisons. Nous dénotons par exemple l’intérêt pour la conservation et la volonté de protection d’un patrimoine, l’attractivité de l’ancien ainsi que le goût actuel pour le vintage et des questions économiques. Cette

démarche est directement en lien avec le constat de l’opposition flagrante déchets / ressources. En effet, en reconvertissant un bâtiment abandonné celuici passe du statut de délaissé au statut de projet porteur. En conservant l’essentiel de la structure et donc de la masse du bâtiment, l’économie de matière et donc de moyens est considérable. Cette forme de rénovation permet également la pérennité de l’enveloppe et donc de l’identité du bâti. Comment redonner de la valeur à ces espaces et faire que le changement de fonction soit le plus pertinent et adapté possible? Et comment intégrer un projet actuel dans le respect des valeurs patrimoniale et historique de l’édifice? Plusieurs stratégies peuvent être mises en place, nous avons choisi d’en présenter deux qui nous paraissent clairement significatives et pourtant nettement opposées.


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Lorsque l’on s’intéresse à la définition donnée par le CAUE (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement), on comprend que la reconversion est la pratique qui « affecte un bâtiment à un autre usage que celui pour lequel il a été conçu. Un bâtiment est construit pour une fonction précise – habitat, production industrielle, équipement public, commerce, etc.– tout en correspondant à une intention architecturale et au site sur lequel il prend place. L’évolution des usages étant plus rapide que l’usure des murs, de nombreux édifices trouvent une nouvelle destination. »10 Elle est aussi selon l’architecte Marc Bernard, auteur du texte Durable et patrimonial, l’action qui « consiste à intervenir sur un bâtiment existant, dont sont conservées les principales caractéristiques, mais en réalisant des travaux de réaménagement, de remise à niveau technique, de modification d’usage ou d’aspect. »11

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http://www.fncaue.com/activites-pedagogiques/architecture-et-reconversion/, Consulté le 15 mai 2016. 11

http://www.essonne.fr/fileadmin/cadre_vie/habitat/durable_et_patrimonial.pdf, publié le 4 mars 2009. Consulté le 15 mai 2016.


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Déjà introduit au MoyenAge, avec la transformation de la Porta Nigra de Trèves, la reconversion n’est pas un phénomène récent. Pourtant, dans chaque cas, les acteurs impliqués dans la reconversion de bâtiments patrimoniaux prennent le risque d’être confronter à divers débats. En effet, comme ces bâtiments possèdent une histoire propre, l’intervention doit être maîtrisée et se faire dans une considération et un respect de l’existant. Celleci doit alors conserver l’identité et la mémoire du lieu. On note alors plusieurs stratégies de reconversion d’un patrimoine. Une première stratégie serait de rester en adéquation avec les critères de conservation du patrimoine. L’intervention s’adapterait à l’architecture d’origine, en préserverait l’authenticité et en sauvegarderait ces éléments marquants. Comme l’écrit Chris Van Uffelen dans

son ouvrage Architecture et reconversion, « Lorsqu’on a pris le parti d’inclure l’ancienne structure en tant que facteur esthétique ou matière première au lieu d’en construire une nouvelle, toute utilisation future viendra se juxtaposer à la tradition du lieu. »12 Une seconde stratégie serait d’en créer une interprétation radicalement nouvelle, en confrontant, par exemple, l’ancien et le nouveau. Dans chacun des cas, le changement d’affectation serait plus ou moins marqué mais elle permettrait la sauvegarde du bâti et par la même de l’ancrer dans la vie contemporaine. On note, aujourd’hui, de nombreux exemples de reconversion comme la Gare d’Orsay reconvertie en musée d’art, les piscines en musées comme celle de Roubaix en musée d’Art et d’Industrie ou encore des entrepôts en lofts.

12 Chris Van Uffelen, Architecture et Reconversion, éditions Citadelles & Mazenod, 2011.


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Porta Nigra de Trèves, une des plus anciennes portes de la ville reconvertie en église, juin 2008, Berthold Werner ©.

Gare d’Orsay. juin 2009, Freedom Wizard ©.

Piscine de Roubaix, reconvertie en musée d’Art et d’industrie, M. Libert ©.


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Ces deux stratégies de reconversion ont été un support pour le projet. Elles ont été confrontées, évaluées puis mises en application afin d’apporter la réponse la plus juste possible. On trouve ainsi une confrontation ancien/ nouveau entre, d’une part, le bâtiment reconverti et sa patine d’origine et d’autre part, les inserts lumineuses ainsi que les nouveaux cloisonnements d’espaces, eux plus modernes. Ces éléments inclus restent néanmoins dans le respect de l’existant puisqu’ils viennent s’insérer de façon légère et délicate pour le révéler, le signifier et le mettre en valeur. Pas compris de quoi tu parles… Sauvegarder l’enveloppe extérieure du bâtiment permet donc de conserver son aspect patrimonial. Cependant ces

bâtisses, souvent très massives, forment de grands volumes à éclairer. L’apport de lumière dans le bâtiment devient donc une réflexion essentielle à prendre en compte dans la reconversion. Comment mêler apport de lumière et reconversion réussie? Comment conduire la lumière dans ces bâtiments monolithiques et la faire se propager dans tous les espaces? L’apport de lumière au cœur du bâtiment peut alors prendre forme de différentes manières. Nous allons donc classer les différentes typologies lumineuses que l’on peut retrouver dans les constructions industrielles, puis nous verrons comment ces apports de lumière sont retravaillés lors de leur reconversion sans dénaturer l’architecture.


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2. La lumière comme stratégie de reconversion 2.1. Esthétique existante : constat

Lorsque l’on parle de patrimoine industriel on fait bien sûr allusion au passé et à l’histoire charriée par le bâtiment mais celleci est particulièrement visible au travers de son esthétique. Ce sont les matériaux, comme les briques et les poutres métalliques, qui sont révélateurs d’une époque et d’une fonction industrielle, ce sont les poteaux de bétons de grandes sections et aux hauteurs

vertigineuses qui rappellent la fonction de stockage de ces espaces. Ce sont aussi les rayures et les déformations dues à l’usage de ses espaces qui rappellent le vécu du bâtiment. Ce sont tous ces éléments là qu’il faut mettre en lumière car ce qui est difficile avec le patrimoine ordinaire, c’est d’en remarquer la beauté.

2.1.1 La lumière dans les bâtiments industriels : Une problématique structurante

La lumière dans les bâtiments industriels et les manufactures est un élément fonctionnel et structurant de ces espaces. Elle est révélatrice du type de travail effectué, de sa précision ainsi que de l’organisation et du séquençage de la chaîne de production. Réfléchit comme élément fonctionnel à

l’époque active de l’industrie, elle n’en reste pas moins particulièrement esthétique. Dans les bâtiments industriels, la question de la lumière est importante. Elle apporte un confort visuel particulier en fonction du système lumineux utilisé et surtout elle structure l’espace.


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En effet, si la lumière provient d’ouvertures zénithales régulières alors pour optimiser cet apport naturel l’espace sera organisé avec le moins de cloisons verticales possibles évitant ainsi des zones d’ombre. On sera alors en présence d’un grand plateau avec une lumière homogène et omniprésente. A l’inverse, un bâtiment pourra être plus séquencé et divisé s’il utilise des éclairages artificiels. Celui-ci pourra d’ailleurs se structurer sur plusieurs niveaux verticaux puisqu’il ne dépend pas de la lumière naturelle extérieure. L’usage de la lumière artificielle peut être dicté par la nécessité d’un apport lumineux fort par exemple, c’est le cas pour les travaux de précision comme la couture. Même si l’éclairage permet de multiples formes architecturales, la forme d’un bâtiment industriel

est dictée par l’optimisation de moyens et d’espace, on a donc souvent à faire à de grands monolithes. On peut donc classer les bâtiments industriels en fonction de leurs types d’apports lumineux selon trois grandes catégories : L’éclairage par lumière artificielle, qui ne génère aucune réelle contrainte formelle. L’éclairage par lumière naturelle en façade, qui est un système adapté aux bâtiments sur plusieurs niveaux, mais elle nécessité une faible largeur de plancher, d’ailleurs cet éclairage est souvent secondé par des sources artificielles en profondeur. Et l’éclairage par lumière naturelle en toiture, qui produit une lumière sur toute la surface de plancher mais qui n’éclaire qu’un seul niveau.

Schémas typologiques - Percements et éclairage


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Les bâtiments industriels devant être fonctionnels et économiques à l’usage, il est assez fréquent de trouver des systèmes permettant de diriger la lumière naturelle à l’intérieur du bâtiment. Cet apport lumineux est non négligeable car il permet de faire de considérables économies d’énergies. La lumière est également intéressante au niveau des projets d’architecture car elle organise et vient former les espaces tout en guidant leurs pratiques. Nous nous focaliserons donc sur la lumière naturelle, c’est à dire, sur les deux dernières typologies à savoir les ouvertures en façade et en toiture. Au sein de ces deux grandes familles que sont les percements en façade et les percements en toiture nous pouvons distinguer plusieurs systèmes permettant de conduire la lumière naturelle. Dans le tableau ci-après nous répertorions 8 systèmes lumineux qui nous semblent les plus représentatifs de la distribution de la lumière naturelle dans les bâtiments

industriels et les manufactures. Nous notons particulièrement le fait que la lumière est conduite de différentes manières selon les usages et l’organisation formelle de chaque bâtiment. Nous remarquons que chaque dispositif est induit par l’organisation du bâtiment et de ses usages. Chacun diffuse un type de lumière particulier avec des effets très différents. Les sheds par exemple proposent une lumière douce et homogène, tandis que les verrières apportent une luminosité beaucoup plus intense. La forme des dispositifs vient également rythmer les espaces. Les sheds et les baies vitrées donnent un rythme régulier et une trame sur laquelle il est aisé de s’appuyer pour organiser l’espace. Dans un autre langage, les verrières et les longs bandeaux vitrés, en façade comme en toiture, donnent une impression de longueur et de continuité de l’espace, parfois dans la linéarité de la chaîne de production.


30 Typologies lumineuses des bâtiments industriels Lanterneau horizontal

Lanterneau vertical

Les lanterneaux horizontaux favorisent l’éclairage vertical arrivant directement sur le plan de travail. Leur performance par temps ensoleillé dépend de la latitude. Ils présentent plusieurs avantages, tels que de pouvoir être placés à peu près n’importe où, d’être relativement peu chers en investissement, et de fournir l’éclairement naturel le plus efficace pour des conditions de ciel couvert.

Les lanterneaux verticaux sont orientés vers une direction donnée. Cela les rend plus performants dans des situations d’éclairage où les flux lumineux possèdent un faible angle d’incidence tels que dans les régions situées à des latitudes élevées. Les lanterneaux verticaux présentent de nombreux avantages liés au contrôle de l’éblouissement du fait notamment que la surface apparente de la source lumineuse est ici plus réduite.

Hall de fabrication, Dando, France - Energold ©

Le Magasin Bouchayer-Viallet, Grenoble

Lanterneau veritcal : http://audience.cerma.archi.fr/cerma/pageweb/dispositif/lv/info_lv.html, Consulté le 16 mai 2016 Lanterneau horizontal : http://audience.cerma.archi.fr/cerma/pageweb/dispositif/lh/info_lh.html, Consulté le 16 mai 2016


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Shed Type de couverture de bâtiments industriels présentant un profil en dent de scie et composé d’un versant vitré, de pente rapide exposé au Nord pour un éclairage régulier, et d’un autre, de pente plus faible à couverture opaque.

Verrière zénithale Les verrières zénithales constituent des ouvertures relativement importantes (surfaces toujours supérieures à 1 m2) pratiquées au niveau de la couverture.

Baies vitrées La baie vitrée est une ouverture dans un habitat, qui se distingue d’une fenêtre classique par sa taille plus conséquente. En résulte un fort gain de luminosité dans la pièce. Les baies vitrées se distinguent en termes de matériau, de type d’ouverture et de vitrage.

Filature de soie, Tomioka, Japon. YelloBirdWoodstock ©

Imprimerie Alfred Mame à Tours. Jean Prouvé, 1954. Lili-larchi ©

Werkzeugmaschinenfabrik Union, Chemnitz

Rohrwerk, muldenstein Allemagne

Verrière zénithale : http://audience.cerma.archi.fr/cerma/pageweb/dispositif/vz/info_vz.html, Consulté le 16 mai 2016 Shed : http://audience.cerma.archi.fr/cerma/ pageweb/dispositif/vz/info_vz.html, Consulté le 16 mai 2016 Baie vitrée : http://www.dicodunet.com/definitions/industrie/baie-vitree.html, Consulté le 16 mai 2016


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Comme nous venons de le voir, ces bâtiments industriels se retrouvent souvent sous la forme de grands plateaux ou de grands volumes, ceux-ci sont alors librement aménageables et réaménageables selon les besoins de l’entreprise. C’est aussi un atout qui permet aux usages de changer, par exemple si l’entreprise évolue (avec de nouvelles machines par exemple) ou change de propriétaire elle peut tout de même conserver son enveloppe générale. Cette flexibilité des espaces est encore plus parlante lorsque l’on parle de reconversion car les usages changent alors radicalement tout en préservant la forme globale des locaux. Ces anciennes usines et

industries deviennent alors des lofts, des espaces d’exposition, des centres culturels ou des skates parc, etc. De plus, ces édifices sont véritablement intéressants à reconverti pour leur aspect patrimonial. Les murs, les percements et la structure racontent des histoires qui font vibrer ces espaces et les rendent poétiques. Les deux paragraphes suivants sont l’analyse de deux exemples de reconversion de friches industrielles, chacun présentant un enjeu spécifique et significatif que nous avons intégrés au sein du projet Conduites lumineuses.

2.1.2 La Sucrière - Espace culturel

Ce premier paragraphe porte sur l’analyse du centre d’art de la Sucrière de Lyon car ces anciens entrepôts rendent compte d’un enjeu urbain très fort. En effet, par leur position géographique stratégique, près des quais et proche du centre ville, ils connectent la périphérie et le centre, participant ainsi au dynamisme de l’agglomération. De plus, comme ils ont été reconvertis en pôles artistiques, leur dimension programmatique est pertinente puisqu’elle permet d’étendre

les polarités touristiques et attractives de la ville et d’agrandir ainsi son périmètre d’activités. On peu également noter à la fois une notion de communication, car en réemployant ces bâtiments on peu les nommer, les reconnaître et y lire un fragment de l’histoire industrielle de la ville, et à la fois une notion économique, car réemployer des bâtiments permet d’éviter des coûts de destruction et de traitement des déchets.


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La Sucrière, vue depuis le Quai Jean-Jacques Rousseau, Lyon, auteur inconnu.

La Sucrière, vue depuis la rue Hrant Dink, Lyon, auteur inconnu.


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Comme son nom le laisse deviner, la Sucrière était autrefois une ancienne usine de sucre servant à stocker ses arrivages. Celle-ci ferme en 1993 laissant sur l’ancien secteur des Docks un bâtiment inutilisé. Rénovée et reconvertie en 2002 par le cabinet d’architectes ATLAS, la sucrière est aujourd’hui un lieu d’accueil d’expositions artistiques et d’événements public et privés. L’idée était par cette reconversion d ‘«assurer la pérennité de la Sucrière en tant qu’équipement culturel majeur pour Lyon »13. La position des architectes est ici très respectueuse de son contexte : «On ne voulait pas entrer en concurrence avec les autres bâtiments de la Confluence réalisés par des stars comme JeanMichel Wilmotte ou Rudy Ricciotti. Notre objectif était de conserver un élément qui parle la langue du site et qui affiche les stigmates du temps»14, explique William Vassal.

Dans ces propos on trouve une certaine modestie quand à son travail en tant qu’architecte, à la fois vis-à-vis des autres projets environnants mais aussi par rapport au site lui-même car, comme il le dit si bien, l’usine ‘’parles la langue du site’’. Elle est un élément important qui à toute sa place ici et dont les traces temporelles sont à conserver car elles racontent une histoire. Le domaine de l’art d’ailleurs est fantastique pour ça, il permet de mettre en valeur la poésie des lieux et de narrer leur vécu. Alors, ces espaces reprennent vie. Comme le dit Maréva dans son article du 11 février 2010, La réhabilitation de « La Sucrière » sur le Port Rambaud à Lyon, « Grâce à l’art, il est donc possible de conserver le patrimoine industriel, et lui donner une autre fonction que

13

Architopik, Réhabilitation et extension de la Sucrière, http://architopik.lemoniteur. fr/index.php/realisation-architecture/rehabilitation_et_extension_de_la_sucriere/5162 14

Réhabilitation et extension de la Sucrière, Op. Cit.


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Vue intérieur de la Sucrière, Michel Denancé ©.

Intérieur de la Sucrière, vue depuis l’espace d’exposition principale, auteur inconnu.


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le stockage ou le transport de matériaux. Les bâtiments industriels ont droit alors à une nouvelle vie, aux côtés des constructions contemporaines… La mémoire ouvrière est conservée intacte, grâce à ces lieux qui la symbolisent (silos…) ; une manière de respecter l’Histoire de ce site et les anciens travailleurs des Docks qui peuvent revenir sur les traces de leur passé, mais d’une autre façon. »15 En ce qui concerne les apports lumineux, on remarque là encore un grand respect du bâtiment, le caractère originel ayant fortement été conservé. En effet, peu de transformation ont été opérées en façade, l’enveloppe générale du bâtiment a été maintenue et seules quelques baies vitrées ont été ajoutés rythmant la façade par touches ponctuelles, la plupart donnant

sur des balcons. Néanmoins un travail important sur la lumière a été apporté au niveau des espaces de bureaux : « [Le parti architectural a été la] création de bureaux dans un bâtiment épais (27 m) sans aucun patio mais avec d’immenses loggias offrant des vues cadrées sur la Saône, assurant un apport de lumière naturelle exceptionnel et proposant des espaces de travail radicalement différents. »16 Dans la continuité d’une démarche respectueuse, la lumière artificielle a largement été favorisée à l’intérieur des espaces dédiés à l’événementiel. Ce choix à probablement été dicté par la programmation de ces espaces d’exposition. L’intériorité a été privilégiée, créant ainsi un rapport au bâtiment et sa structure.

2.1.3 Analyse de reconversion d'usines de verre en Chine

Ce second paragraphe se tournera vers l’ancienne usine de verre à Schenzen, en Chine. Cet exemple est directement en lien avec notre projet puisqu’il

s’intéresse à la fois à la lumière et au réemploi du bâtiment et de la matière. En effet, la reconversion de cette ancienne usine de verre réutilise les

15 Maréva, La réhabilitation de « La Sucrière » sur le Port Rambaud à Lyon, Février 2010. http://histart.over-blog.com/article-la-rehabilitation-de-la-sucriere-sur-le-portrambaud-a-lyon-suite-45375391.html, Consulté le 15 mai 2016 16

Réhabilitation et extension de la Sucrière, Op. Cit.


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L’usine de verre de Schenzen, O-Office & Maurer united Š.


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plaques transparentes produites dans l’usine. Cette reconversion travaille également avec la lumière dans un rapport dehors - dedans singulier et ambigu puisqu’il cultive la transparence à la fois au sol et en façade. De plus, cette démarche symbolique articule les besoins lumineux actuels et le souvenir de la fonction première du bâtiment. Cet ancien silo, situé à Shenzhen en Chine a été reconverti par les architectes du collectif O-office Architects. Celleci était à l’époque, la plus grande usine de verre flottant moderne de Chine. Ouverte en 1987 puis laissé à l’abandon jusqu’en 2009, elle est aujourd’hui un autre exemple de transformation réussie. En effet, devenue espace culturel, cette ancienne usine a notamment été choisie pour accueillir les expositions de la Bi-City Biennale d’Urbanisme et d’architecture de 2013. L’expérience de ce centre d’art, est une traversée à travers deux époques: celle du bâtiment d’origine laissé tel quel et dont les traces de son passé d’usine restent clairement visibles. On notera, par exemple, des traces au sol, des rainures, l’usure des murs et bien sûre sa

structure massive et apparente. Puis, celle plus contemporaine visible par ses interventions légères, clairement présentes mais qui dialoguent avec le bâti d’origine en finesse et avec respect. Cette ambivalence esthétique confronte l’usager à ces deux temps historiques. Le parti pris des architectes a été ici d’introduire le tracé d’un chemin particulier au sein du bâtiment, accompagné par une série d’installations spatiales en apesanteur, transparentes, parfois abstraites. Des escaliers, ponts, rampes, murs et terrasses ont été intégrés pour articuler les espaces entre eux. Les architectes qualifient ces espaces comme une « sorte de terrain de jeu avec des rampes en spirale, des escaliers, des planchers de verre »17 C’est avec une grande poésie qu’ils définissent le dialogue entre leurs interventions et le bâti d’origine : «Ces interventions sont légères et modérées et ne réveillent pas le fantôme industriel endormi.»18 Ce dialogue permet au visiteur de prendre du recul et de redécouvrir les espaces existants.

17

Kelsey Campbell-Dollaghan, These Crumbling Industrial Silos Hide Beautiful New Spaces, publié le 31 mars 2014. Traduction de l’anglais personnelle. http://gizmodo.com/ these-crumbling-industrial-silos-hide-beautiful-new-hom-1554034337, Consulté le 15 mai 2016 18

Archdaily, SZ-HK Biennale-Silo Reconversion / O-OFFICE Architects, publié le 31 mars 2014 . Traduction de l’anglais personelle. http://www.archdaily.com/489408/sz-hkbiennale-silo-reconversion-o-office-architects. Consulté le 15 mai 2016


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La transparence vient guider l’usager d’un espace à l’autre, O-Office & Maurer united ©.

Intérieur du silo, la rampe épouse les formes du bâtiment d’origine, O-Office & Maurer united ©.


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Cette promenade a travers le bâtiment provoque une prise de conscience vis-àvis du potentiel des délaissés d’aujourd’hui et de leur valeur. Concernant la lumière, le bâtiment, selon des espaces, est globalement très lumineux naturellement. Les architectes ont choisi le parti pris de conserver les ouvertures d’origines qui apportaient déjà énormément de lumière naturelle, car dans son usage premier c’était probablement indispensable, ou économique. De plus on retrouve, sans doute dans un clin d’œil à son usage premier, d’immenses parois de verre au sol, au plafond et sur les parois. Cette porosité visuelle, en plus d’apporter de la légèreté et de contraster avec la massivité du bâtiment, permet à la lumière de traverser plusieurs niveaux et d’éclairer de plusieurs espaces. Une ambiance particulière a été apportée au niveau des silos cylindriques: une ouverture zénithale qui renforce sa grandeur colossale et met en lumière des éléments d’architecture symboliques du bâtiment.


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L’omniprésence du verre, au sol et en façade, O-Office & Maurer united ©.

Transparence du plafond, vue depuis l’étage inférieur, O-Office & Maurer united ©.


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43

II .


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II . Recherches / Form-Finding Nous venons de voir que la lumière naturelle est un médium architectural véritablement intéressant. Elle est génératrice d’ambiance, elle séquence les espaces et induit des parcours. Cette stratégie de reconversion par la lumière à donc de multiples intérêts. Pour introduire cet élément extérieur à l’intérieur d’un espace clôt il faut concevoir des percements dans l’enveloppe mais aussi des systèmes permettant de conduire cette lumière naturelle au sein du bâtiment. Ces conduites lumineuse apportent alors autant des enjeux formels, esthétiques et spatialisant que des enjeux d’ordre techniques

et physiques. L’objectif sera donc d’allier réflexions architecturales (espace et usages formés) et critères théoriques (calculs et comportement de la lumière naturelle). Dans un premier temps nous allons identifier les intérêts de la lumière naturelle puis nous allons synthétiser les outils permettant de travailler avec cet élément météorologique, enfin nous présenterons différentes typologies de dispositifs permettant de conduire cette lumière à l’intérieur des bâtiments.


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1. Lumière naturelle: de multiples intérêts La lumière naturelle est intéressante vis-à-vis de nombreux domaines d’application. Elle est une énergique gratuite, bénéfique pour le corps humains et elle est un lien entre l’intérieur du bâtiment et son environnement.

1.1 Le soleil, une énergie gratuite

L’énergie solaire est une énergie gratuite et disponible. Mais plus qu’une ressource énergétique transformable elle est tout simplement une source lumineuse agréable qui peut être utilisée tellequelle au sein des bâtiments. Nous ne parlons donc aucunement de panneaux solaires, ni de systèmes de chauffage, mais bien d’ouvertures permettant à la lumière naturelle d’entrer dans l’architecture et d’éclairer ces espaces. Utiliser la lumière naturelle permet donc de faire des économies d’énergie. De simples fenêtres permettant de faire entrer la lumière naturelle sont ce qu’on pourrait appeler un dispositif Low-Tech. Par antinomie au terme High-Tech, il désigne un moyen qui consomme peu voir aucune énergie transformée, il s’agit donc d’un système économique et écologique. « La revendication de l’usage des low-tech témoigne de la volonté de s’opposer aux modes technologiques, considérées comme

19

mercantiles, avilissantes et déraisonnables écologiquement. À cet égard, les low-tech affichent le plus souvent un contenu en énergie grise plus faible que celui des high-tech.19 » Les conduites lumineuses sont donc un moyen physique de diriger la lumière naturelle dans les espaces intérieurs. Ces systèmes seront réfléchis pour apporter une quantité de lumière dans un espace donné mais aussi pour amener des effets lumineux particuliers. Par exemple, nous pourrions avoir besoin tantôt d’une lumière douce et diffuse pour flâner dans les espaces, tantôt d’une lumière plus forte pour pouvoir travailler ou lire.

Low-Tech, https://fr.wikipedia.org/wiki/Low-tech, Consulté le 22 avril 2016.


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1.2 Le soleil, une énergie thérapeutique

La lumière naturelle est bénéfique pour l’homme car elle permet au corps de fabriquer des molécules nécessaires à celui-ci. En effet, elle permet à l’organisme de sécréter du cortisol, l’hormone de l’éveil et de l’énergie. D’après le magazine Avenir et Santé20 elle permet entre autre d’améliorer le moral et de mieux apprendre. Un bâtiment laissant donc entrer un maximum de lumière naturelle verra les utilisateurs de ces espaces de meilleure humeur et plus productifs. La lumière solaire amène également la notion de temporalité. D’une part parce que le soleil se déplace dans le ciel en fonction des heures de la journée et d’autre part parce que sa lumière ainsi que l’étirement des ombres sont également révélatrices des saisons. D’ailleurs, ces données temporelles permettent également la synchronisation de l’horloge interne, il s’agit donc bien d’un

20

élément de confort biologique. De plus, la luminosité produite peut indiquer le temps qu’il fait à l’extérieur. Ces données météorologiques permettent de conserver le lien entre l’intérieur du bâtiment et l’extérieur, tout en conservant une certaine intériorité. Ainsi l’utilisateur ne se sent pas coupé du monde et fait parti d’un tout dans lequel le bâtiment et ses usages s’inscrivent. Le soleil est donc un indicateur de temporalités multiples. Ces différentes temporalités entrent alors en écho avec les temporalités du bâtiment que nous reconvertissons. Elles mettent en lumière les différents âges de ces architectures, comme nous l’avons vu avec la reconversion de l’usine de verre à Shenzen dont l’esthétique ancienne contraste avec celle plus actuelle de son nouveau programme.

Sylvie Riou-Milliot et Elena Senders,7 bienfaits de la lumière du soleil, in Sciences et Avenir, publié le 17 juin 2015. http://www.sciencesetavenir.fr/sante/20140701. OBS2278/7-bienfaits-de-la-lumiere-du-soleil.html, Consulté le 22 avril 2016. Article extrait d’un dossier sur le soleil, publié dans Sciences et Avenir n°809, juillet 2014.


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Au vu de ces deux raisons principales, les ouvertures sur l’extérieur ainsi qu’un apport de lumière naturelle minimal est obligatoire dans les lieux de travail. Le code du travail le stipule ainsi : « Le recours à la lumière naturelle pour l’éclairage des locaux de travail et la possibilité de vue sur l’extérieur pour ceux qui y travaillent, tendent à procurer l’environnement le plus approprié à un bon équilibre physiologique et psychologique des individus, notamment en atténuant les effets néfastes que produit le confinement dans des locaux aveugles (lettre circulaire DRT n] 90-11 du 28 juin 1990). 21» La notion d’équilibre physique et mental est ici bien mise en avant. Les bâtiments que nous reconvertissons à Detroit on vu leurs ouvertures condamnées, c’est pourquoi notre stratégie de reconversion par la lumière naturelle est cohérente.

21

Aide mémoire juridique. Eclairage des locaux de travail. INRS, édition INRS TJ 13, 2009, pp.1


48

Améliorer le moral

« En 1984, le psychiatre américain Norman Rosenthal a démontré le lien entre lumière et dépression. Depuis, des travaux ont postulé que cette action stimulante sur le moral agissait par l'intermédiaire de la sérotonine, un neurotransmetteur intervenant dans la régulation de l'humeur, du sommeil et de l'appétit. Le recours à la luminothérapie contre la dépression saisonnière a été validé en 2005. »22

Mieux apprendre

« La lumière constitue un stimulant puissant pour l'éveil et la cognition. Son impact sur les régions cérébrales nécessaires à la réalisation d'une tâche cognitive dépend de la couleur spécifique de la lumière reçue plus d'une heure auparavant. Selon l'université de Liège et l'Inserm. Une exposition préalable à une lumière orange aide à mieux réaliser une tâche qu'une lumière bleue, celle des ordinateurs notamment. Et ce par le photopigment (la mélanopsine) des noyaux suprachiasmatiques qui reçoit la lumière réagit différemment selon la couleur de celle-ci. »23

Réguler l'horloge interne

« Le plus puissant des synchronisateurs du rythme biologique est la lumière, nos yeux transmettant ce signal vers le cerveau qui commande notamment la sécrétion d'hormones spécifiques. Le fonctionnement de l'organisme (veille/sommeil, température, hormones, mémoire...) est ainsi soumis à un rythme biologique calé sur un cycle d'une journée de plus ou moins 24 heures. L'horloge interne - située dans les noyaux suprachiasmatiques du cerveau - est donc resynchronisée en permanence sur ce cycle précis. »24

22 23 24

7 bienfaits de la lumière du soleil, Op. Cit. 7 bienfaits de la lumière du soleil, Op. Cit. 7 bienfaits de la lumière du soleil, Op. Cit.


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1.3 Le soleil, une énergie changeante

Comme nous venons de le voir, le soleil est mobile, ainsi les ambiances lumineuses sont changeantes et varient en fonction de l’avancement de la journée, de la saison et du temps qu’il fait. C’est une lumière qui se module dans le temps, elle est dynamique et anime les espaces. De plus, suivant l’angle des rayons solaires par rapport à notre atmosphère le ciel se pare d’une multitude de gamme chromatique. On remarque ce type de phénomènes en particulier au coucher et au lever du soleil. Les aurores boréales des pays nordiques sont également révélatrices de ces phénomènes. La Lumière se colore et caresse les surfaces avec différentes intensités. C’est en cela que l’on peut affirmer que la lumière naturelle est grandement créatrice d’ambiance. Claude Monet, avec sa série sur la cathédrale de Rouen, représente bien cette multitude de couleur et d’intensité jouant avec l’architecture. Ce peintre faisait parti du courant des impressionnistes, cherchait à capter des ambiances,

des instants et en particulier la lumière de ses paysages. Dans cette série, sur chacun de ses tableaux nous pouvons deviner le moment de la journée ou la saison à laquelle l’artiste à peint la façade de la cathédrale. 3 .

Série des cathédrales de Rouen, Claude Monet, 1892-1894.


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peinture de 180/ 450cm, 12 avril 2012, acrylique sur toile, Adago, Paris, 2012.

Un autre artiste qui travail dans un rapport avec la lumière naturelle est Pierre Soulages. Bien qu’il ne peigne qu’en deux dimensions et que ces toiles soient monochromes, ces œuvres sont bien plus qu’un simple pan vertical. En effet, la lumière naturelle vient se refléter et décomposer le tableau selon le mois, le jour et l’heure où nous le regardons. Les rayons frappent les rainures dans l’épaisseur du noir de la peinture, ils coulent le long des stries et se diffusent dans les surfaces. Tantôt blanche tantôt colorée, la lumière

apporte une seconde couche chromatique inattendue sur ses surfaces noires ainsi animées. Selon notre emplacement visà-vis de ces tableaux la lumière entrant dans l’œil n’est pas la même, et donc l’œuvre l’est aussi. Ces peintures frémissantes sont aussi la projection d’une poésie personnelle car elles renvoient à la subjectivité de chaque observateur qui les apprécies selon un instant particulier et la manière dont il se place et se meut devant elles.

« Et ces peintures ont une multiplicité d’états selon la lumière. Ça change tout le temps, la réflexion. Regardez! (Il appelle à nouveau son assistant.) Dan, tu peux tourner cette toile ? Vous voyez, la lumière vient vers vous ; l’espace pictural est devant la toile, pas sur la surface, comme dans la peinture romane, et pas derrière, comme dans la peinture avec perspective. Et, d’autre part, même si c’est du noir, vous ne voyez pas du noir. Enfin, si vous voyez avec les yeux, et pas avec ce que vous avez dans la tête... Regardez bien, on voit de la lumière, et toutes les couleurs de la lumière que la peinture reçoit : bleu, orange... C’est ça qui m’intéresse. La lumière, mais reflétée, transmutée par le noir. » 25 Pierre Soulages


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Dans le contexte de la reconversion de bâtiments en situation de friche, la lumière naturelle à alors clairement un rôle dynamique. La modulation de son intensité et de sa teinte anime les espaces. Elle s’accroche aux aspérités et révèle les volumes, elle met en valeur le dessin de chaque pièce, courant le long d’une ligne ou ruisselant le long des murs, elle est le vecteur de nombreuses ambiances. Comme la lumière naturelle provient d’un astre ayant sa dynamique propre. La couleur et l’intensité des rayons varient ainsi que la durée de l’ensoleillement. Ceux-ci jouent avec les formes et les matérialités des espaces. Ils frappent, rebondissent et découpent les volumes dans une prétendue inconstance propre aux phénomènes physiques. Ceux-ci sont pourtant bien analysables et compréhensibles, car c’est finalement la multitude de paramètres changeants qui complexifient la compréhension globale de ce phénomène qu’est la lumière du soleil. Ce sont donc ces outils d’analyse dont nous allons à présent parler.

25

Christophe Ono-Dit-Biot, Les confidences du maitre de la lumière. Article écrit pour Le Point [En ligne], Publié le 15 mai 2014. http://www.lepoint.fr/arts/pierre-soulages-les-confidences-du-maitrede-la-lumiere-15-05-2014-1829303_36.php, Consulté le 06 mai 2015.


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2. Outils d’analyses La physique de la lumière naturelle n’est pas évidente à comprendre lorsque l’on est novice dans ce domaine. Comme nous l’avons vu précédemment, ses paramètres sont multiples et changeants et c’est en cela que tout ce qui se rattache au soleil est difficile à appréhender. Nous allons donc synthétiser ici les principaux éléments à connaitre pour travailler l’architecture avec le paramètre de la lumière naturelle. C’est ensuite sur la base de ces outils que nous allons pouvoir travailler les conduites lumineuses comme projet architectural.

2.1. Données contextuelles

La première donnée à prendre en compte lorsque l’on fait un projet architectural, et d’autant plus lorsque celui-ci se focalise sur l’utilisation de la lumière naturelle, est la localisation du bâtiment, c’est à dire sa latitude ainsi que son orientation. Pour la ville de Detroit on notera une latitude de 42° 23’ Nord et une longitude de 83° 05’ ouest. La latitude permet de créer des diagrammes solaires. Ils indiquent l’orientation et l’inclinaison des rayons solaires sur la parcelle du bâtiment selon chaque heure et chaque saison. Le diagramme solaire est une représentation plane en coordonnées locales de la trajectoire du soleil, perçue depuis un point de

la surface terrestre. La position du soleil est donnée par deux angles précisant ainsi sa hauteur dans le ciel (plan vertical) et son azimut (plan horizontal). On remarque d’ailleurs que l’azimut indique également l’heure de la journée correspondant à la hauteur du soleil. L’orientation, elle, positionne le bâtiment par rapport à ces diagrammes et par rapport à son contexte proche, celui-ci pouvant former des masques solaires. Grâce à ces documents il est possible de déduire l’ensoleillement d’une façade sur un temps donné ainsi que l’inclinaison des rayons

26 Heure à Detroit (Michigan) et Décalage Horaire, http://www.ou-et-quand.net/ heure/etats-unis/detroit-michigan/, Consulté le 15 mai 2016.


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solaires, tout ceci à chaque fois en fonction d’un moment précis dans la journée et sur l’année. Grâce à ces documents il est possible de déduire l’ensoleillement d’une façade sur un temps donné ainsi que l’inclinaison des rayons solaires, tout ceci à chaque fois en fonction d’un moment précis dans la journée et sur l’année. Il faut cependant bien noter que les diagrammes concernant la

lumière naturelle sont donnés en heures solaires. Il est possible de traduire ensuite ces données en heures légales (c’est-à-dire par rapport au fuseau horaire auquel la localité est rattachée). En générale il faut ajouter 1 h en hiver et 2h en été, par exemple, pour la France et les États-Unis il faut noter UTC+1 en hiver et UTC+2 en été.26


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Voyons à présent comment appliquer ces outils pour l’étude d’un des dispostif du projet de la Ressourcerie à Detroit : le patio. Le premier schéma utilise le diagramme solaire horizontal. Celui-ci indique l’orientation des rayons en fonction des saisons et des heures de la journée. En le superposant au plan masse du bâtiment que nous analysons nous pouvons remarquer que la façade exposée au Sud-Est sera éclairée par le soleil de 5h à 14h en été et de 7h à 16h en hiver (heures légales). On peut également remarquer que le soleil sera en face de la façade à 8h du matin en été et à 9h du matin en hiver. Ces données nous permettent également de lire le deuxième diagramme solaire, le diagramme vertical. Celui-ci permet de lire la hauteur du soleil en fonction de l’heure et de la saison choisie. Dans le cas de notre exemple nous choisissons de nous intéresser au rayon perpendiculaire à la façade Sud-Est, ce sont donc les données situé en azimut 145° qui nous intéressent. Lorsque nous traçons une verticale à la graduation correspondant à 145° sur le

schéma vertical nous pouvons alors trouver les hauteurs du soleil en degrés en fonction de chaque saison. A partir de là nous pouvons en déduire les différentes inclinaisons des rayons solaires frappant la façade sud-est à 9h matin. Ces informations nous permettent ensuite de faire une coupe du bâtiment et de vérifier l’impact des rayons solaire sur le dispositif observé, ici il s’agit d’un patio. Nous pouvons donc remarquer qu’en été le soleil est haut et que ses rayons atteignent les étages inférieurs du bâtiment, à l’inverse les rayons d’hiver sont plus rasant et n’atteignent que l’étage supérieur. Cependant il semble que ces rayons rasants pénètrent l’espace en profondeur alors que les rayons estivaux restent proches des parois vitrées. Pour réaliser le schéma en coupe nous avons pris connaissance du comportement des rayons réfléchis. Dans la partie suivante nous allons décrypter les différents types de rayons ainsi que leurs particularités.


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30° fev-oct 16° hiver

56 145° - 9h du matin

145° - 9h du matin

65° été 55° avril-aout 42° mars-sept 30° fev-oct 16° hiver

145° - 9h du matin

145° - 9h


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2.2. Comportement des rayons solaires

Les rayons solaires sont visuellement différents en fonction de leur couleur, de leur intensité ou même de leur angle d’incidence. Voyons alors plus précisément comment ils sont régis par les règles de la physique. Types de rayons solaires. La lumière directe est vive et transmet de l’énergie. Elle apporte énormément d’éclairage et peu procurer un apport de chaleur agréable en hiver. C’est également ce type de rayons qui est nécessaire pour les panneaux solaires et photovoltaïques. En revanche, elle peut parfois éblouir ou provoquer la surchauffe de certains espaces lorsque ceux-ci ne sont pas bien isolés ou ventilés. On parle alors de rayons incidents. La lumière réfléchie pénètre les espaces en profondeur. Lorsqu’elle se répercute sur des parois, les rayons lumineux peuvent éclairer plus loin que les rayons directs. Cependant, à chaque réflexion le rayon perd de son intensité. On part du principe

qu’il est considéré comme nul au bout de trois réflexions. Il est également bon de noter que chaque matériau à un coefficient de réflexion solaire. Ce qui signifie que tous les matériaux ne reflètent pas avec la même intensité. Ces coefficients sont définis en fonction de l’albédo du matériau et/ou de sa couleur. On parle alors de réflexion spéculaire. Si ces rayons sont réfléchis dans une seule direction on parlera de réflexion spéculaire alors que s’ils sont réfléchis dans plusieurs directions on parlera alors de réflexion diffuse. Cette différence se visualise particulièrement lorsque l’on compare une plaque de métal poli ou brute. La lumière diffuse est douce et homogène. Elle ne dessine pas de lignes définies et ne marque pas les ombres. Elle est un éclairage global omnidirectionnel mais peu intense. On parle alors de réflexion diffuse .


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Angle d’incidence

« L’angle d’incidence caractérise l’incidence avec lequel le rayon solaire frappe la paroi: c’est l’angle entre la normale à la paroi et le rayon solaire à l’instant considéré. L’inclinaison, l’orientation de la paroi et la direction du rayon solaire permettent d’évaluer cet angle d’incidence. Plus le flux est normal à la paroi, plus il est important, plus il est rasant, plus il est faible. »27

Rayon i Rayon i

Rayon r Rayon r

a rayon incident = a rayon réfléchi a rayon incident = a rayon réfléchi

Ces trois types de rayons solaires ont été observés au sein de nos dispositifs, d’abord par une approche théorique par le biais de dessins analytiques puis dans une approche plus concrète avec des expériences en maquettes . Sur les diagrammes solaires que nous avons présenté plus haut, les rayons représentés sont directs et réfléchis. Pour ce qui est des expérimentations en maquettes, ces deux types de rayons sont observés avec un dispositif simulant les rayons solaires sous une latitude donnée, l’Héliodon. Pour ce qui est de la lumière diffuse elle peu être rendue par un ciel artificiel. Ce second système d’expérimentation permet entre 27

Rayon diffus Rayon diffus

autre de calculer la quantité de lumière reçue par une surface à l’aide d’un luxmètre. On parle alors de réflexion diffuse. Couleur La notion de colorimétrie est importante dans le traitement de la lumière, c’est pourquoi nous presenterons cet aspect là dans le paragraphe suivant. Cependant notre projet n’iras pas jusqu’à ce niveau de détail car nous nous focaliserons principalement sur la mise en forme des dispositifs ainsi que leur dialogue formel avec les espaces qu’ils éclairent. La couleur des surfaces

Audience, http://audience.cerma.archi.fr/cerma/pageweb/theorie/solaire/rayont_ solaire.html, Consulté le 07 mai 2016.


59

est importance car elle influe sur le type de lumière qu’elle renvoie. Dans un premier temps, si une surface est colorée alors la lumière qu’elle renvoie sera également colorée. Celle-ci sera donc vecteur d’ambiance. Dans un deuxième temps, il faut savoir que la lumière naturelle ne réagit pas de la même manière suivant la couleur de la surface qu’elle vient frapper. Pour comprendre cela il est nécessaire de faire un point sur le spectre lumineux de la lumière du soleil. La lumière naturelle est constituée d’un ensemble de longueur d’onde formant ce qu’on appelle le spectre de la lumière. Le spectre visible se situe entre 400 et 700 nanomètres. Chaque couleur correspond à une certaine longueur d’onde : le rouge > 620700 nm, l’orange > 592-620 nm, le jaune > 578-592 nm, le vert > 500578 nm, le bleu > 446-500 nm, le violet > 400-446 nm28. La lumière colorée fonctionne par synthèse additive, cela signifie que quand le spectre est complet il est de couleur blanche. Lorsque des rayons d’une lumière blanche viennent éclairer une surface colorée une partie des rayons sera absorbée par la matière et une autre sera renvoyée dans notre œil. Si la lumière du soleil frappe une surface colorée, les rayons réfléchis 28

ne couvriront qu’une partie du spectre visible, influant ainsi sur sa couleur et donc sa quantité. Par exemple, si on éclaire un mur jaune avec une lumière blanche notre œil, le rayon réfléchit contiendra du rouge et du vert ce qui, par synthèse additive, donne du jaune. Si par la suite on éclaire un mur vert alors il ne restera que les longueurs d’onde correspondant au vert. Donc, si un rayon lumineux frappe une succession de surfaces colorées, sa longueur d’onde et donc son intensité risque d’être fortement diminuée. Une surface blanche renverra donc un maximum de rayons tandis qu’une surface noire les absorbera presque tous et en renverra très peu.

synthèse soustractive (peinture)

synthèse additive (lumière)

Le spectre de la lumière, http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doschim/decouv/ couleurs/loupe_spect_lum.html, Consulté le 07 mai 2016.


60

Albedo Comme nous venons de le voir, la couleur octroie au matériau qu’elle recouvre un pouvoir réfléchissant ou absorbant. Par exemple, le noir absorbera les longueurs d’onde tandis que le blanc les réfléchit. Ce pouvoir de réflexion est défini par un albédo, il est le rapport entre l’énergie lumineuse réfléchie et l’énergie lumineuse incidente. L’albédo d’un matériau est donc compris entre 0 et 1 avec 0 pour un matériau absorbant toutes les longueurs d’onde et 1 pour celui les réfléchissant toutes. « Un corps noir parfait, qui absorberait toutes les longueurs d’onde sans en réfléchir aucune, aurait un albédo nul, tandis qu’un miroir parfait, qui réfléchirait toutes les longueurs d’onde, sans en absorber une seule, aurait un albédo égal à 1. »29 Mais la couleur n’est pas le seul paramètre qui définit le pouvoir de réflexion d’une surface. Chaque matériaux à un albédo qui lui est propre. C’est principalement l’état de surface de ces matériaux qui définissent leur pouvoir

29 30

de réflexion. Le métal ou la céramique par exemple sont très réfléchissants tandis que le bois ou le béton brut le sont beaucoup moins. Par exemple une forêt de conifères a un albédo compris entre 0,05 et 0,15, le sable sec a un albédo compris entre 0,25 et 0,40 et la neige a un albédo compris entre 0,60 à 0,90. 30 Dans nos dispositifs de conduites lumineuses nous avons parfois besoin de parois fortement réfléchissantes pour amener la lumière naturelle dans la profondeur des espaces. Nous avons donc choisi de recouvrir ces surfaces par des plaque d’aluminium poli car avec un albédo compris entre 0.6 et 0.75 il s’agit d’un des matériaux de construction le plus réfléchissant. On note également que L’Alucobond® présente un albédo similaire. D’après le site du fabricant31, les plaques d’Alucobond® Pure White 10 ont un indice de réflexion de 0.77, ce qui équivaut à une réflexion de 92,26 % de la lumière reçue.

Albédo, https://fr.wikipedia.org/wiki/Alb%C3%A9do, Consulté le 07 mai 2016. Ensoleillement, Cours L5C de Nicolas Tixier, www.grenoble.archi.fr/cours-en-ligne/ tixier/L5C-01-ensoleillement.pdf, Consulté le 19 avril 2016 31 Solar & Light Reflectivity Values for Alucobond Colours & Finishes, http:// www.ecospecifier.com/media/448015/130319_new%20alucobond%20solar_%20light%20 reflectivity%20values.pdf, consulté le 28 mai 2016


61

Après avoir vu les aspects théoriques, physiques et géométriques, du comportement de la lumière, voyons à présent comment celle-ci peut etre mesurée concrètement et comment peut on expérimenter ces phénomènes.

2.3. Notion de calcul naturel intérieur reçu. Le FLJ Nous avons alors parlé s’exprime alors en %. plus haut de ciel artificiel et de FLJ = E intérieur / E extérieur (%) luxmètre. Le ciel artificiel est une pièce à l’éclairage homogène qui « Sous les conditions de ciel diffuse un éclairement équivalent couvert, les valeurs du facteur à un ciel couvert. Le luxmètre de lumière de jour sont quant à lui, permet de mesurer indépendantes de l’orientation l’éclairement en lux. On note des baies vitrées, de la saison d’ailleurs que l’éclairement du ciel et de l’heure. Elles donnent artificiel approche les 5 000 lux. ainsi une mesure objective La notion de facteur de et facilement comparable de lumière du jour (FLJ) permet de la qualité de l’éclairement calculer facilement la quantité à l’intérieur d’un bâtiment. de lumière qui pénètre par les Les valeurs du FLJ d’un local ouvertures du bâtiment. Elle est Test sous ciel artificiel: Canonspeuvent à lumière - Espace café alors être comparées le rapport entre l’éclairement Eclairement (lux) : 3085 au FLJ minimum de référence »32 naturel extérieur éxtérieur et l’éclairement

Tests/ réflexivité sur les maquettes partielles

FLJ

32

<1% Très faible

1-2% Faible

2-5% Moyen

5-10% Elevé

>10% Très élevé

FLJ Moyen Sigrid Reiter et AFond ndré de Herde, naturel (%) des bâtiments, Presses Devant MilieuL’éclairage

Dispositifs Expérimentés

Éclairement (lux)

universitaires de Louvain, 2004.

A B

229 238

257 243

350 376

9.04 9.27


Tests/ réflexivité sur les maquettes partielles

62 Test sous ciel artificiel: Canons à lumière - Espace café Eclairement éxtérieur (lux) : 3085

Expérimentations, maquettes partielles

Test sous ciel<1% artificiel: Canons café >10% FLJ 1-2% à lumière 2-5% - Espace 5-10% faible (lux): Faible Moyen Elevé Très élevé EclairementTrès éxtérieur 3085

Dispositifs Expérimentés

Éclairement (lux) Fond

Milieu

Devant

350 A 257 229 376 B 243 238 213 D 210 221 365 G 253 255 289 H 266 249 265 K 324 245 290 L 286 268 301 M 291 276 253 N 338 243 325 O 242 236 333 P 286 262 416 Q 420 284 494 R 360 276 334 S 302 259 Tableau des lux mesurés en maquette

FLJ Moyen (%) 9.04 9.27 6.96 9.44 8.70 9.02 9.13 9.38 9.01 8.68 9.52 12.10 12.20 9.68


63

Shémas en coupe des dispositifs testés. Mesure le pourcentage de FLJ en fonction de la profondeur de la pièce en mêtre.


64

Tests/ réflexivité sur les maquettes partielles Expérimentations, maquettes partielles Test sous ciel artificiel: Patio - Bibliothèque Test sous ciel artificiel: Patio - Bibliothèque

Eclairement éxtérieur Eclairement éxtérieur (lux):(lux) 2830: 2800 Dispositifs Expérimentés

Zone 1 (lux)

Zone 2 (lux)

FLJ zone 1 FLJ zone 2 (%) (%)

1

Patio 1

510

477

18,2

17

2

Patio 2

462

439

16,5

15,6

Patio 2 + paroi reflechissante

510

458

18,2

16,3

Patio 3

513

445

18,3

15,9

Patio 3 + paroi réfléchissante Patio 3 4 + paroi réfléchissante + Patio 3 5 + paroi réfléchissante ++

555

504

19,8

18

561

504

20

18

570

505

20,3

18

6

Patio 4

550

473

19,6

16,9

569

511

20,3

18,2

7

Patio 4 + paroi réfléchissante Patio 4 + paroi réfléchissante +

597

543

21,3

19,4

8

Patio 5

455

435

16,2

15,5

Patio 5 + paroi réfléchissante

546

450

19,5

16

Patio 5bis

529

437

18,9

15,6

Patio 5bis + paroi réfléchissante

552

478

19,7

17

570

444

20,3

15,8

646

514

23

18,3

601

530

21,4

18,9

652

623

23,3

22,2

3

9

10 Patio 5bisbis Patio 5bisbis + paroi réfléchissante

11 Patio 6 Patio 6 + paroi réfléchissante


65


66


67


68

Concrètement, ce calcul peut être utilisé lors de tests en maquette grâce à l’utilisation combinée du ciel artificiel et du luxmètre. Si une maquette est réalisée à l’échelle avec des matériaux dont les taux de réflexion sont similaires à ceux du projet réel, alors il est possible de calculer les lux d’une pièce, et ce en fonction de l’endroit et du type d’ouverture utilisée. C’est une technique que nous avons utilisé pour la réflexion du projet. En effet, celle-ci nous a permis de sélectionner la forme la plus efficace en termes de quantité d’apport lumineux pour nos dispositifs. Prenons l’exemple des canons à lumière. Grâce aux schémas ci-contre, on comprend que la forme importe peu mais que la lumière est plus intense et se diffuse plus largement lorsque le canon est court avec une ouverture large. Nous avons également testé la forme de l’ouverture du patio. Ces tests ont permis de définir l’inclinaison optimale de la paroi supérieure orientée au NordOuest. En effet, celle-ci devait être suffisamment inclinée pour renvoyer les rayons dans les 15m de profondeur du bâtiment (comme nous avons pu l’observer grâce à la coupe schématique plus haut) tout en gardant une ouverture la plus grande possible pour permettre de 33

capter un maximum de rayons (d’où l’ébrasement de la paroi Sud-Est). Certains outils informatiques permettent de sortir des données numériques et des diagrammes en fonction de la localité et de l’orientation de la zone à analyser. Par exemple, le site internet audience.cerma.archi.fr33 est un projet européen d’autoformation, à destination des architectes à la maîtrise des ambiances. Il propose différents onglets permettant de s’informer sur les différents systèmes, leurs effets et les outils de calcul traitant particulièrement la question de la lumière naturelle. Il propose également cinq outils qui permettent de calculer des informations solaires en fonction de la latitude du bâtiment et d’une date donnée (mois, jour et heure). Cela permet par exemple d’obtenir le diagramme solaire de la localité, la durée d’ensoleillement d’une façade ou même la quantité d’énergie reçue par une surface suivant sont inclinaison. Ces outils sont de véritables aides à la conception d’espaces car ils permettent d’analyser rapidement plusieurs hypothèses et d’en visualiser certains effets.

Audience, audience.cerma.archi.fr. Consulté le 06 mai 2016


69

3. Les conduites lumineuses comme outil de reconversion

3.1 Influence de la forme et de l’emplacement de l’ouverture sur le type de lumière Dans L’éclairage naturel des bâtiments (p. 81)34, l’influence de la forme de la fenêtre à été analysée en comparant la répartition lumineuse fournie par trois fenêtres de proportions différentes, pour une surface vitrée identique et une hauteur d’allège constante. De cette analyse, il ressort que l’éclairement moyen reste sensiblement identique quelques soit les formes étudiées, mais sa répartition devient moins uniforme. La question de l’emplacement de ces ouvertures a également été analysée. Il apparait alors que plus une ouverture est placée en hauteur, plus la lumière se diffuse en profondeur dans la pièce. C’est le cas avec une fenêtre verticale ou une fenêtre horizontale dont le linteau est élevé. D’ailleurs il est également bon de remarquer que le faisceau lumineux pénétrant par la fenêtre atteint une profondeur égale à deux fois la hauteur de celle-ci.

34

[Note : lorsque l’on parle d’éclairement il s’agit alors de rayons diffus et rarement de rayons directs. Le lux (lx) est l’éclairement d’une surface qui reçoit normalement, d’une manière uniformément répartie, un flux lumineux de 1 lumen par mètre carré.] Les bâtiments industriels sont souvent des blocs de grandes dimensions et leur enveloppe peut parfois être presque entièrement aveugle si les procédés de fabrication favorisaient les éclairages artificiels. Dans une reconversion, dans ce cas là, l’apport de lumière naturelle dans l’épaisseur du bâtiment est véritablement important. Les dispositifs devront diriger cette lumière en différents endroits et relever de la technique pour l’amener sur l’ensemble des plateaux dans l’épaisseur du bâtiment.

Sigrid Reiter et André de Herde, L’éclairage naturel des bâtiments, Presses universitaires de Louvain, 2004


70

Taille de l’ouverture, in L’éclairage naturel des bâtiments. p. 82

La position de l’ouverture, in L’éclairage naturel des bâtiments. p. 83


71

3.2 Les systèmes de conduites lumineuses

Les dispositifs lumineux permettent de faire entrer la lumière mais ensuite il faut la diriger dans le bâtiment. Pour cela des dispositifs intérieurs peuvent prendre le relais. Par exemple, il est possible de renvoyer le jour avec des plafonds miroitants et des surfaces claires (parois, plafond, sol, mobilier) ou avec des dispositifs intérieurs ou extérieurs avec des réflecteurs, comme des tablettes de fenêtres, permettant la pénétration en profondeur de la lumière (par réflexion). Il est aussi tout simplement possible de rehausser les plafonds pour avoir

35 36 37

plus de lumière en profondeur (rappelons que les rayons entrants éclairent sur une profondeur à une distance qui équivaut à deux fois la hauteur du percement par lequel il entre dans l’espace). Pour favoriser la diffusion de lumière naturelle il est également intéressant de multiplier les côtés éclairants et les parois transparentes, ce qui permet par exemple de transférer une partie de la lumière naturelle à un local voisin. C’est d’ailleurs le cas dans la reconversion de l’usine de verre à Shenzen que nous avons analysé dans la partie I.

Diane, promotion de l’éclairage naturel, p. 55 Diane, promotion de l’éclairage naturel, p.55 Audience, audience.cerma.archi.fr, Consulté le 06 mai 2016


72

Certains systèmes, par leur forme, leur orientation et leur inclinaison, permettent de capter puis de conduire la lumière dans les espaces. Interessons nous à quelques uns.36 - 37 Commençons par un système positionné en toiture. Lorsque l’ouverture pratiquée dans la couverture est de dimension importante on parle alors de verrières zénithales. Celles-ci ont la particularité d’apporter un très grand volume de lumière. Quand ce dispositif est couplé à un vide central ont peut également parler d’Atrium. En général, les circulations s’enroulent autour de ce fut vertical qui permet la distribution de la lumière à tous les étages. C’est notamment le cas du musée Guggenheim de Franck Lloyd Wright à New York.

Guggenheim de New York, Franck Lloyd Wright

Verrière zénithale

Atrium


73

Dans une échelle plus modeste, les lanterneaux horizontaux profitent également de la lumière zénithale. Ils apportent alors un éclairage direct et relativement intense. Ces systèmes sont particulièrement efficaces dans l’apport de grandes quantités d’éclairement naturel sur des endroits précis. Un exemple parlant est l’espace d’exposition du musée Vitra de Franck O’Gehry. On remarque d’ailleurs que l’éclairage artificiel est peu présent et conçu comme un système d’éclairage secondaire. Les lanterneaux verticaux sont eux aussi positionnés en toiture mais ils ne captent pas la lumière par une ouverture horizontale. Cette manière de capter la lumière ne donne pas de point de vue sur l’extérieur mais émet une lumière douce et diffuse. On peut en voir un exemple dans deux bâtiments réalisés par l’architecte Josep Lluís Sert, à savoir la fondation Joan Miro à Barcelone (photo ci-contre) et la fondation Maeght à Valence. La forme arrondie des dispositifs permet la diffusion de cette lumière naturelle dans les salles d’exposition.

Lanterneaux horizontaux

Musée Vitra de Franck O’Gehry

Lanterneaux verticaux

Fondation Joan Miro, Josep Lluis Sert


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Les systèmes de conduites lumineuses peuvent être plus techniques, c’est le cas du plafond anidolique. Il s’agit d’un conduit intégré à un plafond suspendu, captant la lumière en façade et l’amenant dans la profondeur de la pièce à éclairer. Ce système apporte une lumière ciblée et contrôlée, cependant il ne donne aucun point de vue sur l’extérieur et ne structure pas l’espace.38 Dans une autre forme de technicité, la fibre optique est un moyen ingénieux de conduire la lumière naturelle. En effet, celleci est concentrée dans de la fibre optique pour être ensuite dirigée à l’intérieur des espaces. Ce câblage de la lumière permet de la diffuser n’importe où dans le bâtiment. Cependant ce système ne donne, lui non plus, aucun point de vue sur l’extérieur et ne structure pas l’espace.

38

Plafond anidolique

Echy

Echy, http://www.echy.fr/, Consulté le 30 avril 2016.


75

Concernant le projet nous nous sommes focalisées sur quatre systèmes de conduite slumineuse. Chacun apportant un cadrage sur l’extérieur et un éclairement particulier. Leur mise en forme apportera également une dimension architecturale spatialisante intéressante dans une dimension projectuelle. Le système de patio reprend les codes de l’atrium mais sans être couvert en toiture. Son ouverture zénithale apporte une grande quantité de lumière qui plonge dans l’épaisseur du bâtiment et apporte de la lumière à chaque étage. Le plan de sol du dispositif forme une cour intérieure à ciel ouvert qu’il est possible de traverser. Cet insert apporte donc une nouvelle centralité ainsi qu’une forme d’introversion du bâtiment. Le système de lanterneaux horizontaux que nous avons vu plus haut a été précisé sous la forme de deux dispositifs particuliers : les canons à lumière et les mitraillettes. Ses dénominations font référence aux systèmes de conduites lumineuses que l’architecte Le Corbusier à mis en place au couvent de la Tourette. Dans une manière similaire à celle qu’il a mise en place, les canons

à lumière dirigent la lumière naturelle de manière ponctuelle dans les espaces. Ces grandes ouvertures zénithales apportent alors une quantité de lumière conséquente tout en offrant des points de vue sur le ciel. Les mitraillettes sont plus étroites et fonctionnent en groupe. Leur forte présence visuelle et leur verticalité fera de ces dispositifs des objets à la fois esthétiques et signalétiques. La lumière qu’elles conduiront est intense et précise, dessinant une pixellisation lumineuse au sol. Leur accumulation apporte également un aspect dynamique à l’espace et permet d’en appuyer sa composition. La loggia est un système qui travaille particulièrement dans un rapport au corps et à la circulation. En effet, celleci perce la façade à partir du plancher du niveau sur lequel elle se positionne. Les taches de lumière qui s’étirent au sol interpellent le visiteur et guident sont parcours. Celui-ci peut alors contourner cette excroissance ou la traverser pour sortir à l’extérieur et apprécier la vue à 180°.


76


77

III .


78

III . Projet / Une Ressourcerie à Detroit Précedemment, nous avons saisi les comportements de la lumiere naturelle et ainsi défini les dispositifs lumineux formants le projet. A present, nous allons fusionner ces dimensions là avec la notion de reconversion de bâtiments en situation de friche, dans le cadre d’un projet de Ressourcerie à Detroit. Au travers de ce projet nous développons un scénario d’application de la reconversion de bâtiment industriel par les conduites lumineuses.

Au préalable, nous nous sommes intéressées, aux bâtiments industriels en situation de friche et avons noté un réel potentiel, notamment concernant leur requalification. L’intérêt de leur redonner un nouvel usage est double. En effet, en plus de conserver la mémoire d’un lieu cette démarche participe à la revitalisation de la ville, ou tout du moins d’une partie, puisqu’elle vient régénérer un espace laissé à l’abandon.


79

L’époque industrielle et notamment la crise de 70, a marqué les villes et les civilisations, laissant comme seule mémoire aujourd’hui un paysage de bâtiments en friche et délaissés. Nous avons choisi de nous intéresser à une ville qui est l’illustration par excellence de ce déclin, la célèbre ville de Détroit. Cette ville des États-Unis, icône et symbole d’une ère industrielle prospère, a vécu pendant un temps le rêve ouvrier américain.

Aujourd’hui entre abandon et insécurité, la ville a du mal à se relever de la crise, pourtant un potentiel fort continu de l’habiter.


80 CANADA

MONTREAL

MICHIGAN DETROIT

TORONTO

CHICAGO NEW YORK

ETATS UNIS


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1. Une implantation évidente: Detroit, le quartier d’Eastern Market 1.1 Une ville: Detroit 1.1.1 Recontextualisation - Crise: ville déchet

La ville de Détroit se situe dans la région des grands lacs, au nord-est des Etats-Unis. Principale ville de l’état du Michigan, elle compte aujourd’hui une population d’environ 680 250 habitants dont 82% de Noirs (population afroaméricaine). Fondée en 1701 par un Français, Antoine de LamotheCadillac, la ville de Détroit est située sur la Detroit river. Il s’agit donc d’une ville portuaire d’importance et sa position stratégique fait d’elle le siège du comté de Wayne

ainsi qu’une localité prospère pour les industries. Surnommée Motorcity ou Mo-town, elle devient la capitale des industries automobile, lorsque trois célèbres firmes automobiles américaines: General Motors, Ford et Chrysler, choisissent de s’y implanter. Grâce à elles, la ville connait une forte croissance économique et démographique à partir du XXème siècle, et ce jusqu’à son apogée en 1950, avec une population approximant les deux millions.


82

La ville investi et de nouvelles infrastructures routières voient le jour: on compte alors sept autoroutes qui découpent la ville: l’automobile devient le symbole de la liberté. Malheureusement, cette liberté va progressivement conduire la ville à sa perte puisqu’elle incitera l’exode. En effet, encouragées par une importante tension sociale, les familles, majoritairement blanches, quittent le centre ville pour aller travailler en banlieues. Une forte ségrégation raciale se développe en ville, renforcée par une arrivée massive de familles afro-américaines avec l’intention de trouver du travail dans le secteur de l’automobile. En 1967, de graves émeutes éclatent. Ajoutée à cette crise urbaine, la fameuse crise automobile débute et entraine avec elle de nombreuses fermetures d’usines et délocalisations. Certains quartiers se retrouvent alors complètement laissés à l’abandon, ne donnant à voir désormais qu’un paysage de bâtiments en ruines et de terrains vacants. Ville délaissée, abandonnée, désertée, violente et dangereuse. Les mots sont durs pour décrire le Détroit d’aujourd’hui, terni par les crises sociales et industrielles. Depuis

le 18 juillet 2013 et avec une dette de 18,5 milliards de dollars américains, Detroit est la première grande ville américaine à être déclarée en faillite. Ce lourd constat pourrait laisser penser que l’avenir de la ville est perdu, or aujourd’hui elle tente courageusement de se relever de ses cendres, comme lors du premier incendie qui la dévasta en 1805. Sortie vainqueur, la citation « nous espérons des lendemains meilleurs, elle renaitra de ses cendres »39 deviendra sa devise. Elle est aussi la cible de jeux de mots comme « Detroit, always on the road »40 qui prouve que certains sont convaincus de son potentiel. Detroit intrigue et passionne, à tel point qu’elle devient un véritable territoire d’expérimentations et la cible de journalistes et de photographes qui s’adonnent à un style appelé «Ruin porn»41 (pornographie des ruines). Plus que le constat d’un déclin, cette ville laisse derrière elle les vestiges d’une des plus importantes ères industrielles de l’histoire. Ceux-ci donnent de grandes opportunités quant à sa reconstruction.

39 Aymeric Bôle-Richard, Detroit, portrait d’un phénix urbain, publié le 11 septembre 2014. http://balises.bpi.fr/histoire/detroit-portrait-dun-phenix-urbain, Consulté le 30 avril 2016 40 Detroit, portrait d’un phénix urbain, Op. Cit. 41 Detroit, portrait d’un phénix urbain, Op. Cit.


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ruin porn - Ballroom, American Hotel, 2007, Marchand-Meffre Š.

ruin porn - Ballroom, Lee Plaza Hotel, 2006 2007, Marchand-Meffre Š.


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1.1.2 Etat des lieux : Le réemploi de la ville comme ressources

Comme nous l’avons dit précédemment, Détroit a subi un fort exode de sa population, passant de 2 millions en 1950 à environ 685 mille aujourd’hui, ce qui équivaut à une perte de 61% de ses habitants en 60 ans. Des zones de la ville se retrouvent alors complètement désertes: on compte 51,8 km2 de territoires vacants ainsi que 100 000 maisons abandonnées, avec 15% du foncier utilisable. L’étalement urbain de la ville d’antan renforce cette désertification, son échelle n’est plus adaptée à sa population car son tissu urbain est trop distendu ; on assiste à un phénomène que l’on appelle « Shrinking city » (ville qui rétrécit). De plus, 21% des Détroitiers ne possèdent pas de voiture, ce qui renforce ce phénomène. Le 10 décembre 2014, la ville a officiellement quitté l’état de faillite. Elle est désormais en dynamique de renouveau et prête

à prendre un nouveau départ. Pour penser l’avenir de la ville, il faut la voir autrement pour commencer. Par exemple, en regardant ces espaces vacants non pas comme des déchets mais comme de véritable potentiels, des invitations à la création pour reconstruire progressivement l’espace urbain. Il s’agit désormais de se focaliser sur les dynamiques de renouveau déjà en place et de s’appuyer sur les points forts existants. A savoir, des espaces disponibles et des loyers attractifs. «[Détroit est] une des villes des Etats-unis où l’immobilier est le moins cher »42. Ces indices avantageux permettent d’attirer de nouveaux acteurs économiques comme des starts-ups qui apportent ainsi à la ville dynamisme et émulsion d’idées régénératrices.

Detroit. https://fr.wikipedia.org/wiki/Détroit, Consulté le 30 avril

42


85

Greater Downtown faible vacance vacance modĂŠrĂŠe forte vacance Carte de vacance - Detroit


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Ainsi, on assiste à une reconversion massive : « d’anciennes usines deviennent résidences d’artistes, un commissariat de police une galerie, des maisons abandonnées se reconvertissent en studio d’enregistrement high-tech, un théâtre devient parking, tout un quartier désaffecté revît par la customisation des rues. [...] Même les bâtiments et terrains abandonnés, laissés en ruine ou en friche par la municipalité, qui se contente généralement de les barricader de fils barbelés, ont commencé à être ré-appropriés, remis en état et réutilisés par les habitants »43 Certains ont des idées bien précises quant au devenir de la ville : « la relance consiste à en faire un pôle de nouvelles technologies »44 Twitter vient d’ailleurs de s’y établir, un véritable phénomène de gentrification commence à se développer. La désertification de bâtiments emblématiques comme par exemple la Michigan Station ou encore des salles de spectacle et des opéras reconvertis en simples parkings posent néanmoins question. On pourrait parler davantage ici de reconversion spontanée mais le devenir de ces lieux est inquiétant et interroge. Comment intervenir rapidement

43 44

contrepoints.org, Consulté le 30 avril balises-bpi.fr, Consulté le 30 avril

et durablement avant qu’ils ne soient envahis puis détériorés par des occupants clandestins? Il est clair qu’il y a ici un réel potentiel à conquérir. La reconversion est elle vraiment toujours pratiquée à bonne escient? Aujourd’hui la ville de Detroit compte 150 000 parcelles libres. Cette ville en crise, à la forte dynamique de renouveau est en accord avec nos intentions de revitalisation d’un secteur. De plus, Il est à noter que les Detroitiers sont mus par une forte volonté de faire revivre leur ville, et développent ainsi de nombreux mouvements basés sur le Do It Oursleves (faisonsle nous-même) dans un esprit solidaire et communautaire. Cet esprit est particulièrement présent et développé dans un des quartiers de la ville : Eastern Market. Le choix de notre implantation s’est donc porté vers celui-ci avec l’intention d’amplifier l’attractivité apportée par la zone de marché et les interventions artistiques comme le Heidelberg project. L’enjeu est d’appuyer ces actions ponctuelles pour apporter une vie sociale quotidienne et pérenne au sein de ce quartier.


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le Michigan theater, reconverti en parking, juin 2015, Baubet ©.

La célèbre Michigan station, laissée à l’abandon, juin 2015, Baubet ©.


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Eastern Market, juin 2015, Baubet Š.

Eastern Market, juin 2015, Baubet Š.


89

1.2. Un quartier : Eastern Market

Eastern Market est un quartier connecté au reste de la ville par différents projets. En effet, l’avenue Gratiot, axe majeur qui traverse le quartier en diagonale, est en cours de reconversion en ligne de tramway. Cette voie connecterait ainsi directement le quartier au centre ville. On note également la présence d’une ancienne voie ferroviaire, la Dequindre Cut. Celle-ci vient diviser le quartier en deux. Elle fait actuellement l’objet d’un projet de reconversion en voie verte, destinée à des modes de déplacement doux (pistes cyclable et pietonnes). Cette piste relierait ainsi directement le quartier au front de rivière. Ce quartier à une identité propre et forte ; réserve alimentaire de la ville et de la région, il constitue un centre économique puissant. Il est ancré dans la mémoire collective des habitants

de Détroit par son ancienneté et sa taille. C’est sûrement un des lieux les plus vivants de la ville et on y croise une grande mixité d’usagers, tous attirés par l’activité maraichère. Il existe deux marchés différents : le marché de gros réservés aux professionnels qui se tient tous les soirs de la semaine et le marché public qui attire plus de 40 000 personnes jusqu’à deux fois par semaine selon les saisons. Cependant, le rythme du quartier se calque sur celui du marché. Ce qui signifie qu’en dehors des horaires d’activités commerciales il se vide et souffre d’un climat d’insécurité propre aux quartiers désertiques de la ville. Il est essentiel de trouver un moyen d’harmoniser la fréquentation du quartier en le rendant attractif pour tous quel que soit le jour et la saison.


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Tramway sur futurFutur tramway gratiot l’avenue Gratiot prévu pour 2015 prévu pour 2015

Dequindre DequindreCut cut

projet en cours

projet en cours


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C’est dans cette zone de Detroit, dit économiquement stable que les dynamiques citoyennes sont les plus présentes et investies. La plupart d’entre elles sont particulièrement engagées dans la culture du réemploi et influent ainsi sur le reste de la ville. Detroit ayant subi la crise, beaucoup de bâtiments se retrouvent à l’abandon, en ruine et finissent par être des carrières de matières premières. En effet, la pauvreté et l’abondance de matériaux sont omniprésentes. Certains ont déjà identifié ce potentiel, c’est le cas de « Recycle Here! »45, le centre de recyclage officiel de Détroit, créé en 2005. L’objectif de cet espace étant bien

47 45 46

sûre de stocker et recycler mais également de créer une zone de rencontre de voisinage. On trouve également l’entreprise « Reclaim Detroit »46 créée en 2011, liée au recyclage. Son but est de changer les esprits sur la déconstruction. Pour cela, l’entreprise récupère, stocke et détourne des matériaux et des objets. Le projet artistique « Heidelberg project »47, créé en 1986, s’intéresse également à ces carrières de matériaux. Ce projet réinvesti une zone d’Eastern Market par le biais de l’art, en pratiquant le recyclage artistique. Le but de cette démarche est de redorer l’image de ce quartier.

Recycle Here, http://www.recyclehere.net/, Consulté le 15 novembre 2015 Reclaim Detroit, https://reclaimingdetroit.org/ , Consulté le 15 novembre 2015 Heidelberg project, http://www.heidelberg.org/, Consulté le 15 novembre 2015


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Recycle Here!, auteur inconnu.

Heidelberg project, juin 2015, Baubet ©.


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Les « Motor City Blight Busters »48, une association principalement constituée de bénévoles et créée par John J. George il y a 25 ans, s’est spécialisée dans la sécurisation et la déconstruction de maisons abandonnées. Ces constructions rencontrent souvent un risque profond d’effondrement et deviennent un danger pour les usagers. Par cette demarche, les Motor City Blight Busters opèrent un véritable « nettoyage » de la ville. Enfin la culture du réemploi se retrouve également dans le projet « Power House Production »49, une organisation à but non lucratif créée en 2009. « Power House Production », réinvesti des bâtiments ou terrains en friche dans le but de les stabiliser. C’est un projet artistique qui permet le rassemblement d’habitants du quartier autour de stratégies créatives (skate house, play house, sound house).

48

49

Motor city Blight Busters, http://www.mcbbdetroit.com/, Consulté le 15 novembre 2015 Power house production, http://www.powerhouseproductions.org/, Consulté le 15 novembre 2015


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Les Motor City Blight Busters en action, Rebecca Cook/ Reuters/ Landov Š.

Power House production, auteur inconnu.


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2. Les origines du programme: l’interêt pour le réemploi

Après l’analyse sociale de la ville et notamment des différentes dynamiques citoyennes, nous avons identifié un fort engagement dans la culture du réemploi. En effet, beaucoup d’organisations, d’infrastructures, et même de projets artistiques se sont montées à partir de cette problématique urbaine. Chacune d’elle fait vivre cette culture à sa façon : en sensibilisant par l’art ou en récupérant, en stockant, en nettoyant, chacun à son niveau apportant alors une seconde vie aux éléments récupérés. Cependant, bien que complémentaires, aucune de ces infrastructures ne permet la continuité de chacune de ces pratiques dans un processus Conduites complet. Le projet lumineuses s’est nourri de chacune de ces initiatives, en essayant d’en extraire les points forts et les

faiblesses. Celui-ci ne cherche pas à rivaliser avec ces activités, au contraire il vient s’appuyer sur celles-ci pour les renforcer et leur donner plus d’impact. L’idée serait de fusionner ces initiatives au sein d’un même projet et faire qu’elles se nourrissent les unes des autres. Vient alors la question du type d’infrastructures susceptibles de valoriser au mieux l’idée du réemploi. Nous avons, d’abord, pensé à un centre culturel sur le réemploi, afin de sensibiliser les gens à cette nouvelle pratique et de leur montrer le potentiel des matériaux issus de la déconstruction à travers différentes expositions. Or, cette idée bien qu’intéressante n’avait pas assez d’ampleur et aurait donc eu peu d’impact sur le quartier.


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Après plusieurs recherches, le concept de « Ressourcerie » nous a paru particulièrement pertinent. A l’occasion d’une réunion d’information organisée par l’Observatoire Régional des Déchets d’Ile-de-France (ORDIF)50, Sandrine Simeon (chargée de développement du Réseau des Ressourcerie) tiens

ce discours : « Les Ressourceries collectent, valorisent, revendent et sensibilisent pour prolonger la durée de vie des produits et inciter au changement de comportement’ ». De plus, une Ressourcerie s’appuie sur trois objectifs : écologique, économique et social.

Tout d’abord, écologique : « en sensibilisant son public à l’acquisition de comportements respectueux de l’environnement [et en mettant l’accent sur une] priorité à la réduction, au réemploi […] des déchets »51 Ensuite, économique puisque la Ressourcerie va transformer ces déchets en ressources en leur apportant une valeur ajoutée, entrainant ainsi des « couts evités de transports et des traitements des déchets ultimes, au développement d’activités dans des zones rurales et à la création d’emplois pérennes et en insertion »52. Enfin, social, par les emplois qu’elle crée : «[La ressourcerie] offre des contrats aidés à des personnes éloignés de l’emploi. Elle constitue une passerelle qui permet (…) de construire son projet socioprofessionnel. Elle favorise un développement local et solidaire grâce à la participation active des citoyens et au développement de nouveaux métiers. »53

50

Ce réseau existe, sous le statut associatif, depuis le 26 septembre 2000.

Ressourcerie Trimaran, https://ressourcerietrimaran.wordpress.com/definitionressourcerie/, Consulté le 15 mai 2016.

51

52

Ressourcerie Trimaran, Op. Cit.

Ressourcerie Trimaran, Op. Cit.

53


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Ce concept est adéquat pour le projet car en plus de proposer un espace de stockage il fait participer les usagers. En effet, ceux-ci déconstruisent, récupèrent et déposent leurs « déchets » au centre. Ces actions permettent de les rendre acteurs et donc plus concernés et sensibilisés à cette pratique qu’est le réemploi. Ce concept de Ressourcerie a donc été associé à l’idée de base du projet : éduquer les usagers à la culture du réemploi. Des espaces d’expositions ont donc été prévus ainsi qu’une bibliothèque et un espace café. Il était également important d’intégrer une partie plus pratique au sein du programme. Faire que les usagers qui parcourent ce bâtiment puissent réinvestir directement

leurs connaissances leurs idées et leurs envie au travers d’expérimentation concrètes. Deux ateliers de production ont donc été intégrés : le «grand atelier» est directement lié à l’espace de stockage et dédié à la construction de grandes infrastructures tandis que «le petit atelier», est en lien avec la bibliothèque et est destiné à de plus petites créations. Au sein de cette ressourcerie on distinguera donc deux catégories d’espace : ceux pour éduquer vis à vis du réemploi et ceux pour faire en en expérimentant au sein des ateliers. Ce complexe permettra à la fois de s’instruire, de partager et de créer.


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Organigramme fonctionnel

espace café

stockage

grand atelier

exposition temporaire

petit atelier

exposition permanente

salle de bibliothéque conférence


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3. Le remploi de bâtiment : la reconversion 3.1. Une reconversion

Considérant le nombre de bâtiments vacants au sein de la ville et pour rester en accord avec la thématique du réemploi privilégiée dans notre programme, nous avons choisi de reconvertir deux bâtiments existants au sein d’Eastern Market. La reconversion est un choix qui permet d’utiliser les ressources et le potentiel déjà présent sur le site. Les bâtiments en question se trouvent à une place stratégique au sein du quartier, au croisement de la Dequindre Cut et de l’avenue Gratiot, précédemment évoqués. Cette situation de carrefour fait de cette structure une connexion entre deux axes urbains majeurs. Au niveau de la chaussée, l’avenue Gratiot reliant la périphérie de la ville au Down-Town, tandis que la Dequindre Cut située en contrebas relie le quarter d’Eastern Market au

River Front. Ces deux bâtiments sont donc très visibles et directement accessibles dans des modes de déplacements multiples, que ce soit en voiture, à pied, en vélo ou en tramway. Reconvertir des bâtiments à Détroit prend en compte l’esthétique urbaine particulière qui lui est propre. En conservant des fragments de ville nous souhaitons préserver le patrimoine identitaire tout en le mettant en valeur. Comme nous sommes également à une époque où l’économie d’énergie et de matériaux est au cœur des préoccupations mondiales, cette démarche de réemploi du tissus urbain d’une ville en crise nous semble pertinente.


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projet entrepots, zone de stockage zone de marchÊ bâtiment public commerces maisons individuelles


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vue des deux batiments depuis Division Street, Michelle and Chris Gerard Š.

vue des deux batiments depuis Orleans Street, Michelle and Chris Gerard Š.


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3.2. Analyse esthétique et structurelle 3.2.1. Analyse esthétique Concernant les bâtiments, ceux-ci présentent une esthétique propre à l’univers industriel. Comme on peut le voir à partir de la Dequindre Cut, les bâtiments sont constitués de deux parties esthétiquement différentes. La partie basse, c’est-à-dire en dessous du niveau de la rue, est révélatrice de la structure interne du bâti. Une trame de poteaux en béton vient longer le mur de soutènement de l’ancienne voie ferroviaire. En partie haute, au niveau de la rue, on devine une structure poteaux/dalle béton recouverte d’un parement

en briques. On note donc un contraste intéressant. D’un côté de grandes ouvertures sur la future voie verte ainsi que la notion de légèreté apportée par le rythme régulier des poteaux et de l’autre la notion de massivité, comme une coque de protection se repliant sur elle-même dans une forte intériorité. De plus, la trame régulière des poteaux en partie basse et le rythme apporté par les cheminées en toiture marque leur identité et renforce leur caractère industriel.


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Existant


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Existant - analyse


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3.2.2. Analyse structurelle et premières intentions Nous avons donc émis l’hypothèse d’une structure poteaux/poutre portant des dalles béton, cette structure forme une trame régulière et permet une grande liberté d’organisation de l’espace. Cette trame existante sera renforcée par le projet dans une succession linéaire d’espaces. Ceux-ci font ainsi échos aux lignes de production industrielles mais aussi au processus par étapes du réemploi (comme sélectionner, récupérer, nettoyer, stocker, réemployer). Les deux bâtiments que nous avons choisi de réinvestir sont distincts et se développent sur 80m de long et 20 m de profondeur. Ces dimensions monumentales rendent ces constructions très massives, d’autant plus que l’étage supérieur

R-2 (28)

ne dispose actuellement d’aucune ouverture sur l’extérieur. D’ailleurs, le calpinage des briques laisse deviner que d’anciennes ouvertures ont été rebouchées. De plus, les façades Nord-Est des bâtiments sont en bord de parcelle et donc mitoyennes avec les bâtiments voisins, ce qui les rend obligatoirement aveugles. Ces friches industrielles sont actuellement monolithiques et sombres, c’est donc dans une logique d’apports lumineux dans l’épaisseur de ces volumes que nous avons choisi de travailler. Nous avons donc développé une stratégie de reconversion par le biais de percements permettant l’apport de lumière naturelle.

principe structurel


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4. Une stratégie de reconversion: la lumière naturelle 4.1 Des besoins lumineux divers La Ressourcerie est constituée d’espaces d’exposition, de zones de lecture et d’ateliers, nécessitant chacun des ambiances lumineuses particulières. Les dispositifs créés viendront alors apporter de l’éclairement et des ambiances différentes en fonction à la fois de leur forme et de la matérialité de leurs parois. Pour cette phase de recherche nous nous focaliserons particulièrement sur les ambiances lumineuses pour ses qualités de signal, de transition, d’appel et de mise en lumière des formes et des textures. Ces dispositifs seront spatialisants et intègreront alors la notion d’usage dans la pratique du bâtiment.

Ce travail se traduit par une réflexion sur les percements de l’enveloppe des bâtis. Les dispositifs viennent creuser, évider, entamer la matière, et y apporter des ambiances lumineuses variées. Plus qu’un rapport à la lumière, ces percements intègrent également la notion de regard sur l’extérieur ou d’introversion. Les atmosphères dégagées par les dispositifs seront appuyées par un choix de matériaux de différents degrés d’opacité. Nous identifions alors deux axes de recherche : une réflexion autour de la forme des dispositifs de percement et une réflexion autour de leurs différentes matérialités.


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Plan d’ambiances lumineuses


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4.2 Identification de quatre typologies Les dispositifs que nous avons choisis de développer s’articulent autour de plusieurs modes d’expérience de la lumière naturelle. Chacune des ces expériences formant alors des typologies de dispositifs lumineux et chaque dispositif diffusant et conduisant la lumière de manière particulière. Notons également que les parois des dispositifs pourront être opaques, transparentes, translucides, diffusantes ou réfléchissantes selon les ambiances lumineuses voulues. Pour faire écho au programme de la Ressourcerie, ces qualités plastiques pourraient être obtenues avec des éléments de réemploi. Nous avons donc identifié quatre typologies répondant à des critères particuliers selon des logiques de contour, d’inclusion, de localisation et de pixellisation. Le patio à la particularité de conduire la lumière dans une épaisseur verticale, diffusant un éclairement périphérique délicat à

chaque niveau. Ce dispositif est le seul qui permet de relier les étages entre eux et de conduire la lumière jusque dans les niveaux inférieurs. La typologie de la loggia est caractérisée par un évidement ponctuel en façade. Cette boite est une machine de vision couplant des expériences visuelles et corporelles. Dans l’espace intérieur, la volumétrie du dispositif guide les trajectoires des déambulations des visiteurs tandis que les dessins lumineux tracés au sol orientent le regard sur l’extérieur. Dans un second temps, le l’usager peut s’extraire de cette intériorité pour se positionner à fleur de façade permettant une vue plongeante sur la Dequindre Cut. Le patio et la loggia ont en commun le fait d’être en contact direct avec les usagers. Leurs parois touchent les planchers et sont à porté de mains. Elles ont donc un fort pouvoir d’affordance.


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Schemas de principe La loggia

Le patio

en coupe

en plan


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Les deux typologies restantes viennent percer la toiture du bâti pour conduire la lumière zénithale. Les canons à lumière et les mitraillettes sont similaires dans leur mise en forme et leur façon de capter la lumière mais elles diffèrent par leur manière spécifique de conduire la lumière et leur composition spatiale. Les canons à lumière sont de larges ouvertures ponctuelles qui permettent un éclairement sur l’arrière du bâtiment. Ces dispositifs conduisent à la fois des rayons directs formant des taches mouvantes au sol ainsi que des rayons diffus produisant un éclairement homogène. Afin de répartir au mieux cet éclairement, plusieurs de ces canons à lumière pourront être placés dans un même espace. Les mitraillettes ont des ouvertures moins larges que les canons à lumière et la verticalité de leur fût est beaucoup plus accentuée. La petitesse de leur évasement concentre le flux lumineux en un éclairement précis. Ces entités travaillent en petits groupes comme

des stalactites lumineuses. Les édifices dans lesquelles s’inscrivent ces dispositifs sont situés dans un contexte précis comprenant une latitude ainsi qu’une orientation particulière. Comme nous l’avons vu dans la partie 2 de cet écrit, le travail de la lumière doit prendre en compte ces données géographiques et contextuelles. Par le biais de calculs géométriques et d’expérimentations en maquette nous avons orienté et déformé les parois des conduites lumineuses afin qu’elles trouvent un compromis entre la course du soleil et les besoins lumineux de chaque espace. Comme le soleil est un astre mouvant ses rayons sont également changeants et dynamiques. La lumière captée viendra alors animer la Ressourcerie et apporter une modulation de l’espace, produisant ainsi différentes formes d’expériences rythmant le parcours.


R-2 (20) R-2 (20)

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Schemas de principe

Les mitraillettes

Les canons

en coupe

en plan


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4.3. Un parcours lumineux Les quatre typologies de conduites lumineuses ont un rôle structurant et spatialisant, c’est pourquoi elles se dispersent tout au long du bâtiment, séparant les éléments du programme et séquençant le parcours et les usages. La structure imposante dessinée par les poteaux forme une trame régulière dans laquelle nous avons positionné les éléments

du programme. Ces espaces séquencent le bâtiment de manière transversale tandis qu’un parcours unique les traverse dans une continuité longitudinale. L’organisation linéaire du cheminement interne est un clin d’œil aux chaines de production industrielles. Ce rythme est ensuite appuyé sur l’intégralité du parcours par les conduites lumineuses.


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Morphogènese

Trame


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A présent, voyons en détail le déroulement d’une des possibilités de parcours de la Ressourcerie. Pour commencer, observons le rez-de-chaussée de la Ressourcerie. On trouvera l’entrée principale au niveau de l’avenue Gratiot. Visible depuis l’avenue automobile, elle sera également directement desservie par la future ligne de tramway. Lorsque l’on pénètre à l’intérieur du bâtiment, on s’arrête dans un premier espace, l’accueil. Celui ci est rythmé par un jeu de mitraillettes. Ces longues stalactites viennent symboliser et mettre en lumière ce pôle d’information. L’autre espace d’accueil utilisera également cette esthétique reconnaissable. La fonction signalétique de ces dispositifs est importante car elle permet de trouver facilement ces espaces informatifs.

Les mitraillettes de plus petites tailles fonctionnent par grappes. Elles composent et rythment l’espace car sous leur halos lumineux se positionnent des éléments de mobilier qui décomposent les cheminements et fluidifient la circulation de ce premier espace. Les longs conduits de ces mitraillettes sont particulièrement esthétiques car ils renforcent la verticalité des volumes et attirent l’attention sur la grande hauteur sous plafond. Cependant leur rapport hauteur / largeur ne permet pas de conduire la lumière naturelle aussi profondément. La lumière naturelle est alors couplée à un apport artificiel : En partie haute, les parois des petites mitraillettes sont translucides, fonctionnant alors comme des résonateurs lumineux tandis qu’en partie basse un éclairage artificiel viens mettre en lumière les éléments de mobilier.

Les mitraillettes

Les mitraillettes prennent forme dans deux tailles différentes, fonctionnant alors de manière distincte. Les grandes mitraillettes (2 x 3 x 5m) viennent capter puis diriger la lumière naturelle en des endroits précis. Elles seront placées au dessus des banques d’accueil.

Axonométrie du dispositif


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coupe transversale sur les mitraillettes - espace d’accueil


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Localisation des dispositifs

Coupe longitudinale sur les mitraillettes - espace d’accueil


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Maquette partielle Mitraillettes- espace d’accueil


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Le visiteur est ensuite appelé vers l’espace suivant par un second dispositif : la loggia.

La loggia

Sa forme biaisée permet à la fois de capter un maximum de lumière tout en orientant le visiteur vers l’entrée des salles d’exposition permanentes. Comme nous l’avons vu plus haut, ce dispositif est le seul qui permet au regard de plonger sur le panorama extérieur. Dans ce cas précis, il est possible de traverser la loggia pour sortir en bord de façade, juste au dessus de la Dequindre Cut.

façade sud-est

Axonométrie du dispositif


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coupe transversale sur la loggia


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Lorsque l’on poursuit le parcours un autre dispositif lumineux fait appel, il s’agit du patio.

Le patio

Cette conduite lumineuse s’étirant sur toute la hauteur du bâtiment (environ 15m) est une des plus complexes. En effet, elle se déforme en de multiples endroits en fonction de la lumière qu’elle renvoi ou qu’elle transmet ainsi qu’en fonction de ses affordances spatialisante. Ce patio-ci est travaillé de deux manière différente : les faces latérales, donnant sur les espace d’expositions (RDC et R+1) et dans la bibliothèque ( R-1 et R-2), se déforment pour créer des socles, des appuis et des points de vue. Les deux autres faces pixellisent la lumière. Les percements s’agrandisent graduellement vers le bas de manière à laisser un maximum de surface réfléchissante en partie haute du dispositif et de diffuser ainsi la lumière en partie basse.

Axonométrie du dispositif


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Effet lumineux - Maquette du patio en impression 3D


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Coupe longitudinale


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Coupe transversale


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Le parcours se poursuit et nous entraine sur un nouvel espace d’accueil Ce second pôle est marqué par l’accumulation mis lustre, mis luminaire des mitraillettes de l’entrée principale. Ce second regroupement de résonateur lumineux se trouve à un endroit stratégique au niveau du bâtiment car il est directement en lien avec la faille qui permet l’accès au bâtiment depuis la Dequindre Cut. A la manière du vide qui sépare les deux mezzanines dont nous avons parlé précédement, cette faille vient aussi faire la transition entre des espaces de natures différentes. Au rez-de-chaussée on trouve d’un côté les espaces d’expositions et de l’autre l’espace café. Cet espace est un grand volume fait pour se réunir et partager des connaissances, il est lui aussi animé par des dispositifs bien spécifiques : les canons à lumière.

Les canons à lumière

Situés à la fois en toiture et en façade (pour des raisons d’éclairement) viennent composer le plan de cet espace et créer des zones bien spécifiques. Ce grand plateau est tacheté de d’aplats lumineux. Mouvant au fil de la journée et des saisons, ils viennent animer cet espace convivial. Une mezzanine vient étendre la surface de cet espace d’échange. Elle donne un point de vue sur l’espace café en contre bas mais également sur l’extérieur car elle bénéficie d’une loggia.

Axonométrie du dispositif

RDC


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coupe transversale canons à lumi!ère - Espace café



Maquette partielle - canons à lumière



Maquette partielle - canons à lumière


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La loggia

Celle-ci ne cadre pas sur la Dequindre Cut mais sur le deuxième bâtiment de la Ressourcerie. Sa prolongation sur l’extérieur dirige le regard et répond au dispositif d’entrée de la façade à laquelle il fait face. Cette connexion formelle et visuelle permet de créer une continuité et de comprendre que les deux bâtiments font partis d’un même programme. Axonométrie du dispositif


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Coupe longitudinale La loggia donne sur l’entrée du second bâtiment

Coupe transversale loggia Mezzanine de l’espace café


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Connexion au R-2

Intéressons-nous désormais au plan en R-2, c’est-à-dire au niveau de la Dequindre Cut. De nouveau, la faille partage des espaces de natures différentes : des espaces pour éduquer et d’autres pour faire. En effet, on trouve sur la droite de la faille, directement en dessous des espaces d’exposition, une bibliothèque et un espace de conférence, tandis qu’à gauche de la faille se trouve le petit atelier. Ces espaces sont situés juste derrière la trame de poteau qui découpe la façade principale, c’est donc dans une logique d’ouverture sur l’extérieur (visuelle et lumineuse) ainsi que pour une mise en valeur de l’aspect patrimonial de cette structure que nous avons choisi de les habiller avec de grandes baies vitrées. Cette paroi a donc pour effet d’apporter de la lumière dans les espaces tout en étant connecté à l’espace publique extérieur. Comme on peut le voir à partir de la façade principale, les espaces en R-2 sont très ouverts sur l’extérieur tandis qu’au RDC les espaces sont plus introvertis. Nous retrouvons ici le patio étudié précédement. Ce dispositif vertical connectant différents niveaux s’adapte à chaque espace qu’il traverse. La bibliothèque nécessite une lumière tamisée pour ne pas

abimer les ouvrages ainsi que des tables de travail avec de la lumière artificielle dont l’éclairage plus intense permet la lecture. Le patio est un élément central autour duquel se compose la bibliothèque. Ce dispositif vient se déformer par endroits pour conduire la lumière et former des affordances particulières. Il permet entre autre des appuis éclairés par la lumière du jour pour des lectures rapides ou des percées dirigeant les regards en contrebas lorsque l’usager se situe sur la mezzanine. Celle-ci se situe à l’arrière de l’espace de façon à ne pas occulter l’apport d’éclairage naturel de la façade principale.


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Venons en à présent au second bâtiment, situé de l’autre coté de la rue Adelaïde, celui-ci propose des espaces axés sur la réalisation de projet de grande envergure. D’ailleurs, le rez-de-chaussée de ce bâtiment est destiné au déchargement et au stockage des matériaux de récupération, comme des éléments d’architecture issus de la déconstruction. En R-2 on trouve un second espace d’atelier connecté à celui du premier bâtiment par une salle d’outillage. Ce «grand atelier» est dédié à des structures plus conséquentes. Cet espace propose des volumes plus importants permettant ainsi la manipulation d’éléments de grandes dimensions et ce avec des

machines adaptées (comme des scies à panneaux par exemple). La mezzanine de l’espace d’atelier propose des espaces nécessitant d’être séparés des espaces de fabrication bruyants et poussiéreux. On y trouvera donc un espace de réunion, des vestiaires et un espace pour se restaurer. Ces deux espaces que sont le lieu de stockage et le grand atelier sont structurés autour d’un patio central.

Extrait - coupe longitudinale


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Le patio

Celui-ci s’évase en partie supérieure pour venir capter un maximum de rayons lumineux et s’incline pour les renvoyer dans la profondeur des étages. Par ces différents percements localisés il connecte l’espace mezzanine à l’espace d’atelier, cela permet notamment de conserver contact visuel sur ce qu’il se fait en contre bas.

Axonométrie du dispositif


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coupe transversale patio - Petit bâtiment


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coupe longitufinale patio - Petit bâtiment


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Conclusion Le projet Conduites lumineuses questionne la lumière en tant qu’outil capable de reconvertir des bâtiments en situation de friche. Plus précisément, ce projet interroge les différentes manières de conduire et de diffuser la lumière naturelle dans l’intériorité des espaces. Dès le départ notre parti pris a été d’intervenir dans une ville en crise et d’investir des bâtiments voués à l’abandon : les friches industrielles. L’utilisation de la lumière comme outil de reconversion est alors un premier élément de réponse. Celle-ci revitalise, réhabilite et met en scène la mémoire de ces patrimoines ordinaires. Cette stratégie d’acheminement de la lumière naturelle à l’intérieur d’un bâtiment est une entrée projectuelle complexe. A la fois dans son aspect physique et scientifique et à la fois dans la multiplicité des champs architecturaux qu’elle aborde. Tout d’abord, nous nous sommes alors focalisées sur la compréhension du comportement de la lumière comme élément

physique aux critères quantitatifs. La maitrise et l’utilisation des outils de calculs et d’expérimentation on permis un développement concret des morphologies des dispositifs du projet. Les quatre typologies ont été développées en suivant un protocole d’analyse physique en parallèle de l’évolution de leur forme architecturale. Par la suite, le travail des conduites lumineuses comme projet d’étude nous a permis d’appréhender la relation entre une forme architecturale spatialisante et la distribution de la lumière comme vecteur d’ambiances et d’éclairement. Ces dispositifs conduisent la lumière mais également les corps et les usages. Les affordances lumineuses des dispositifs viennent ponctuer le parcours du bâtiment et guider l’usager dans ses déambulations. Cette double entrée met donc en corrélation des enjeux techniques, physiques et normatifs avec des enjeux spatiaux, qualitatifs et poétiques.


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Cette stratégie de reconversion par les conduites lumineuses s’applique ici dans un contexte bien particulier que sont les bâtiments industriels en situation de friche. Nous pensons cependant que cette stratégie réhabilitation par la lumière peut être un outil de reconversion majeur, quelque soient les types de bâtiments. D’ailleurs, un des développements possibles de ce projet serait d’amender la notion d’éclairement par la notion d’apport énergétique que comprend la lumière naturelle. Ce travail de projet fut pour nous l’occasion de développer des compétences spécifiques en matière de connaissances physiques dans le domaine de la lumière naturelle. Cet apport théorique à été un apprentissage à part entière de ce second semestre

de Master 2. Un autre point intéressant fut d’avoir la possibilité de mûrir le projet par de nombreux allers-retours entre théorie et expérimentations. Les outils que sont le ciel artificiel, le luxmètre et l’héliodon nous ont permis une approche plus concrète du projet Conduites Lumineuses. Pour conclure, la lumière naturelle réuni de nombreuses vertus, que ce soit pour ses qualités d’ambiance, de confort physique et moral ou ses bienfaits biologiques. De plus, elle est une des rare ressource à être encore gratuite. Nous penssons donc qu’il est véritablement important d’inclure cette notion comme un élément à part entière des projets.



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Artefacts .


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R+1

RDC plans des niveaux


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R-1

R-2 plans des niveaux


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coupe longitudinale


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plan masse


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maquette de l’existant


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maquette de l’existant


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maquette radicale


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maquette conceptuelle


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Bibliographie


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Bibliographie Livres Aide mémoire juridique. Eclairage des locaux de travail. INRS, édition INRS TJ 13, 2009. Chris Van Uffelen, Architecture & Reconversion, Paris, Editions Citadelles & Mazenod, 2011 Diane, Promotion de l’éclairage naturel, Cresson

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Remerciements Nous tenons tout d’abord à remercier toute l’équipe pédagogique du Master «Architecture, Ambiance et Cultures Numériques» pour leurs suivis réguliers ainsi que leurs précieux conseils de projet. Le laboratoire CRESSON, pour le prêt de ses ouvrages et de ses outils de mesure, qui nous furent d’une grande aide. Nous remercions également tous nos collégues du master pour leur soutien et leur bonne humeur quotidienne. Enfin, nous transmettons toute notre reconnaissance particulièrement à nos familles respectives et nos proches qui nous ont soutenues cette année mais également pendant nos cinq années à l’Ecole d’Architecture.


Comment la lumière naturelle peut-elle être un outil de reconversion au sein des bâtimens des friches industrielles ? Plus particulièrement, comment conduire, diriger, et diffuser cette lumière et ses ambiances dans ces bâtis qui sont de véritables éclats de patrimoine urbain ? Comment faire de cette donnée physique un projet architectural ? La reconversion que nous proposons ici se veut dans une intervention delicate par rapport au patrimoine existant, le projet se développant alors sous forme d’inserts lumineux. Ce projet mêle ainsi réemploi de la lumière naturelle et réemploi du tissu urbain. Ces inserts se déclinent selon quatre typologies de conduites lumineuses. Chacune d’elle à été pensée en fonction de plusieurs critères, à savoir la conduite des rayons lumineux mais aussi des corps et des usages dans l’espace. Pour donner corps à ces réflexions, le projet investit un édifice dans une friche industrielle de Détroit et la reconvertit en Ressourcerie.

How can light be a reconversion tool within brownfields? More specifically, how to lead, conduct, and diffuse light and atmospheres within these buildings that are pieces of an urban heritage? How do we transform this physical data into an architectural project? The reconversion proposed here is meant to deal gently with the existing assets, developing the project as luminous inserts. This project combines reuse of natural light and urban fabric. These inserts are shaped in four types. Each of them has been designed in relation to several factors : driving a pathway for the daylight as well as for the users. To frame these reflections, the project invests a building in a brownfield in Detroit and reconverts it into a Ressourcerie.


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