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Le français, langue de culture, langue de service, par Xavier North
xavier north
Inspecteur général des Affaires culturelles Ministère de la Culture et de la Communication
Vous avez bien voulu m’inviter à partager quelques réflexions sur l’un des grands paradigmes qui traversent le regard que nous pouvons porter sur les langues. J’en suis évidemment très heureux, car cela me donne l’occasion de retrouver quelques amis. Et aussi très honoré parce que cette invitation ne s’adresse plus à la fonction que j’exerce, mais plutôt à l’observateur de pratiques langagières que je reste et qui n’a d’autres légitimités à intervenir sur ce sujet que celle d’avoir été pendant quelques années chargé d’animer une politique de la langue ou plutôt des langues, car il faut toujours en parler au pluriel.
Langue de culture, langue de service c’est une opposition qui a été posée de manière retentissante par Heinz Wismann et Pierre Judet de la Combe dans leur livre L’avenir des langues. Elle a joué un rôle très utile pour mieux faire apparaître quelques-unes des fonctions de la langue, mais c’est une opposition qu’on peut être tenté de surmonter – vous l’avez fait fort heureusement – et je voudrais à ma manière dire pourquoi. La façon dont est posé ce paradigme nous expose à un malentendu. Dans le foisonnement des langues humaines, il n’y a évidemment pas des langues qui seraient plutôt des langues de culture et d’autres plutôt des langues de service parce qu’une telle approche consisterait à les essentialiser. On disait naguère que l’allemand, reprenant l’héritage du grec, était par excellence la langue de la philosophie et que le français se signalait par sa clarté, mais nous avons fait de longue date justice de ces jugements à l’emporte-pièce. Les langues à condition d’être équipées, c’est-àdire armées de normes, que ces normes soient implicites ou explicites, peuvent tout dire, on peut tout exprimer dans toutes les langues même si on ne dit jamais la même chose dans une langue ou dans une autre, mais j’y reviendrai.
Les langues n’ont pas de génie propre qui sommeillerait au creux de leur syntaxe et de leur vocabulaire comme Aladin au creux de sa lampe. D’ailleurs Heinz Wismann ne dit pas autre chose en faisant observer que les langues de culture et les langues de service ne sont pas différentes à la façon dont sont le français, le polonais, ce sont des usages différents de la langue. C’est ainsi qu’il faut entendre cette opposition, et son grand mérite, c’est d’avoir mis l’accent entre deux usages ou deux régimes de la langue, l’un qui serait plutôt dénotatif, présupposant un monde qui existe déjà et auquel on se réfère, un usage anhistorique et plutôt dégrammaticalisé. Et puis un régime très différent qui serait, lui, connotatif, plutôt historique puisqu’il puiserait dans l’histoire de la langue et serait fortement grammaticalisé. Cette opposition entre
deux régimes, à condition de la prendre avec précaution, est très pertinente, je la trouve, pour ma part, très éclairante et je ne pourrai aujourd’hui que lui apporter un court post-scriptum à ma manière en adoptant un point de vue un peu différent.
Une langue, cet objet complexe – et le bon sens nous commande de l’admettre – c’est d’abord un système de communication auquel correspond un ensemble de compétences productives : parler, écrire, ou réceptives : lire, comprendre. À cet égard, on n’insistera jamais assez sur le rôle de la norme, une norme évolutive, cela va de soi, une norme qui n’est jamais une norme unique, car il y a plusieurs normes à l’intérieur d’une même langue, il y a plusieurs normes du français dont il faut bien voir le rôle. Le rôle de la norme, c’est quelque chose d’un peu magique. Le rôle de la norme c’est de faire disparaître la langue, c’est de la faire provisoirement oublier parce que lorsqu’on accède au sens directement sans trébucher ou hésiter sur la bizarrerie d’une forme ou d’un mot ou sur l’exotisme d’un accent on ne voit plus la langue. Je cite souvent cette phrase de Roland Barthes : « J’ai une maladie, je vois le langage ». Et bien lorsque la norme, quelle qu’elle soit produit tous ses effets sur une langue, la langue disparaît, on accède au sens directement. La norme, qu’elle soit lexicale, syntaxique, morphologique ou phonétique, en proposant au lecteur ou au scripteur un code, si complexe soit-il, vise à faciliter la communication parce que si chacun s’accorde sur la façon de dire ou d’écrire, les mots peuvent s’effacer devant ce qu’ils désignent. Chacun sait que l’échange entre locuteurs d’une même langue doit respecter un certain nombre de cadres expressifs dont les principes admis par tous régissent les modalités d’expression écrite et orale et c’est évidemment à cette seule condition que le langage peut répondre à des besoins d’expression très diversifiés. Qu’il s’agisse de la formulation de la pensée scientifique ou de l’expression de sentiments intimes, nous avons besoin de codes sans lesquels toute communication serait impossible puisqu’ils servent à faire sens. À contrario les parlers qui se développent hors des contraintes de la langue, si riches soient-ils et alors même qu’ils sont le creuset d’autres normes, peuvent conduire à des ghettos qui vont bien au-delà de la linguistique. En français, mettre le déterminant avant le nom n’a rien à voir avec du caporalisme linguistique, c’est une règle admise par tous – encore faut-il qu’elle le soit – et qui a pour seul mérite de permettre un échange fructueux entre locuteurs d’une même langue et donc de la faire disparaître.
Cependant, une langue n’est pas seulement un système de communication auquel correspondraient des compétences. Le CECRL a fait de l’acquisition de compétences l’alpha et l’oméga de l’apprentissage d’une langue et, ce faisant, on a fait l’impasse sur une autre fonction de la langue qui est d’appréhender la réalité ou plus exactement de produire du sens. Il faut ici donner au mot « sens » son sens de direction, pardon pour le jeu de mots, car une langue c’est aussi une manière de s’orienter dans l’opacité du monde, ce n’est pas simplement une compétence.
Remarquons au passage que la réduction d’une langue à sa fonction de communication fait souvent système avec l’idée que les langues sont interchangeables ou du moins convertibles les unes dans les autres. Je crois que c’est ce que veut dire Heinz Wismann lorsqu’il dit qu’une langue de service est une langue réduite à sa fonction dénotative qui présuppose un monde qui existe déjà, or si le monde existe avant la langue, les langues peuvent dire la même chose, puisqu’elles se réfèrent au même monde. Les langues sont traduisibles, sont convertibles les unes dans les autres, comme des monnaies et s’il en est ainsi pourquoi ne pas s’entendre sur une langue unique, c’est tellement plus simple, plus économique, une langue à priori globale. C’est d’ailleurs la thèse que défendent, sans toujours le dire, les tenants du monolinguisme, c’est une conception fondamentalement monétariste qui fait système avec une forme d’idéologie dominante, mais qui repose sur un contresens profond de ce qu’est une langue. Bien évidemment on ne dit pas la même chose dans une langue ou dans une autre et c’est ce que nous apprend la pluralité des langues : les langues ne sont pas interchangeables, et de même que pour Héraclite « on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », on ne dit jamais la même chose dans une langue et dans une autre. Le fait que chaque langue traduise le monde chacune à sa manière, nous en faisons l’expérience chaque fois que nous cherchons à transmettre une langue au locuteur d’une autre langue ou à transférer des significations d’une langue à l’autre, en un mot à traduire. C’est pourquoi dans les projets éducatifs, il est important d’initier les élèves à la traduction, c’est peut-être aussi important que l’apprentissage des langues proprement dit ou l’acquisition de compétences linguistiques parce que c’est l’école d’un relativisme conséquent et c’est sans doute la meilleure manière d’apprendre un savoir-faire avec les différences.
Alors Barbara Cassin relève, et c’est devenu un lieu commun aujourd’hui, que dans le mot anglais « mind » on n’entend pas tout à fait la même chose que dans le mot « geist » en allemand ou « esprit » en français, « pravda » désigne en russe à la fois la justice et la vérité. Il ne faut pas croire cependant que ces ambiguïtés, si elles constituent une ressource féconde pour la pensée et notamment pour la pensée philosophique, ne concernent que le seul vocabulaire de la philosophie, encore une fois nous pouvons en faire l’expérience au quotidien avec le langage courant. On ne dit pas bonjour de la même manière dans une langue et dans une autre. « Salut » ce n’est pas la même chose que « bonjour ». On peut se saluer en disant : « As-tu bien mangé aujourd’hui ? » et le monde ne s’ouvre pas de la même manière dans une langue ou dans une autre. St-John Perse évoque, dans un très joli vers, ces langues dravidiennes qui n’ont pas de mot distinct pour hier et pour demain. Dans ces langues du sud de l’Inde, il existe une conception du temps qui distingue entre la présence et l’absence au monde et non pas entre le passé et l’avenir. La langue ne détermine pas la pensée. La caractéristique d’une langue, ce n’est pas ce qu’elle interdit de dire, c’est plutôt ce qu’elle nous force à dire. Une langue prédispose une façon de penser ; Benveniste
l’avait déjà exprimé en disant que ce que l’on peut dire délimite et organise ce qu’on peut penser. Il faut en tirer des conséquences et elles sont profondes en matière de politique de la langue, de sorte qu’en elle peut se reconnaître une collectivité dont la langue reflète les particularismes culturels tout en déterminant ou en surdéterminant ceux-ci, car toute langue entretient un rapport collectif avec le monde et toute langue peut aussi devenir le ferment d’une culture, le ciment d’une société, peut aussi devenir un marqueur d’identité. On peut s’attacher à une langue comme marqueur d’identité, on peut s’entretuer aussi d’ailleurs pour ce marqueur, comme hélas le montre l’actualité tous les jours.
Alors ce long développement, tout comme l’opposition entre langue de culture/ langue de service, pourrait laisser penser que nous nous trouvons face à deux fonctions antithétiques. Or, il n’en est rien et sur ce point je vous suivrai tout à fait, parce que ces deux fonctions sont indissociables et je crois qu’il est dangereux de s’y enfermer. Pour qu’une langue reste l’expression d’une culture vivante, il faut aussi que la langue reste un outil de communication, qu’elle garde sa fonctionnalité, qu’elle permette les échanges dans toutes les circonstances de la vie sociale sinon elle devient le véhicule d’une culture morte. De la même manière, pour qu’une langue joue pleinement son rôle dans la communication, il faut qu’elle garde, qu’elle exalte ses capacités expressives, sa capacité à dire le monde dans sa complexité ; en un mot, il faut qu’elle reste une langue de culture. En vérité, toute langue naturelle est porteuse de culture, fut-elle appauvrie. Il ne faut pas croire que le globish soit un esperanto, cette langue dont la commission européenne, je cite : « n’encourage pas l’utilisation parce qu’elle n’a pas de références culturelles ». Michel Deguy nous parlait plutôt d’un « desesperanto ». Le globish n’est pas une langue spécifique, ça n’est rien d’autre qu’un certain emploi de l’anglais, c’est de l’anglais fut-il appauvri, réduit à l’expression de besoins vitaux, immédiats et ce globish, cet anglais de communication internationale, est porteur d’une culture globale, c’est la négation de celle à laquelle nous croyons mais ce sont des jugements de valeur. En réalité, toutes les langues sont à la fois des langues de culture et des langues de service, elles mêlent très étroitement les deux fonctions, les deux régimes que j’évoquais précédemment, simplement il arrive que dans certains usages ce soit un régime qui prévaut plutôt que l’autre.
Dans les pédagogies du français, on a beaucoup insisté dans la période récente sur des spécialisations, le français du droit, le français du commerce, le français des affaires, etc., ou alors sur des catégories qui sont peut-être aussi trompeuses, celles du FLE, FLS, FLI qui ne sont pas des catégories de la langue mais des catégories de la pédagogie, de la transmission de la langue. Le français langue étrangère c’est du français exactement au même titre que le français langue seconde ou le français langue d’intégration qui, d’ailleurs, n’est qu’une approche et même pas une catégorie didactique. Pour toutes sortes de raisons et en particulier pour celle-là, j’ai toujours pensé qu’on se tirait une balle dans le pied en refusant de promouvoir le français
comme langue de culture d’abord parce qu’historiquement, le français ne s’est jamais réduit à sa fonction véhiculaire d’outil de communication. Il a toujours constitué pour ses locuteurs un marqueur d’identité sociale, ou un marqueur d’identité nationale puisque la langue française, et je suis bien placé pour en parler, est, sans doute, avec l’attachement au territoire qui par le droit du sol fonde l’exercice de la citoyenneté, l’un des deux principaux éléments de l’identité culturelle ou nationale de ce pays. Le français a toujours tiré sa vitalité de sa capacité à produire des idées ou des œuvres marquantes. C’est ce qu’on pourrait appeler la littérarité d’une langue, car si vous vous interrogez sur ce qui fait la vitalité d’une langue, vous êtes amenés à identifier trois ou quatre facteurs. D’abord son efficacité, sa capacité à dire le monde : une langue vivante, c’est une langue qui peut dire le monde, qui a les instruments pour le faire, par la complexité d’un lexique, de sa syntaxe, etc. Le second facteur serait sa fonctionnalité : une langue vivante c’est une langue qui est en usage, qui a un emploi dans les différents secteurs de la vie sociale. Le troisième facteur est sa littérarité, c’est-à-dire le fait que des œuvres de l’esprit se produisent en elles. Enfin le quatrième facteur : il faut qu’une langue soit soutenue par une volonté politique qui en dernière instance ne peut être que l’expression de la volonté des citoyens eux-mêmes.
Je referme cette parenthèse sur la vitalité d’une langue pour insister simplement sur le fait que le facteur de littérarité a historiquement joué un rôle très important dans le rayonnement du français. C’est une langue dont la portée intellectuelle a contribué probablement plus que tout autre facteur à la répandre, car, selon la belle formule d’Henri Meschonnic, ce sont les œuvres qui portent la langue, et non pas les langues qui portent les œuvres. Ce qui fait le rayonnement de l’arabe, c’est le Coran et non l’inverse.
De même dans les pays comme la France, où il a existé et il continue d’exister un continuum entre la langue, la littérature, la nation, ce qui fait le rayonnement du français, c’est le corpus de textes produits par les auteurs, les romanciers, les philosophes et non l’inverse. Mais contradictoirement, il y a un véritable risque à trop promouvoir le français au nom de la culture, de ce rapport collectif au monde. Au nom de cette littérarité, on néglige sa fonction de communication et il est très préoccupant qu’on apprenne de moins en moins le français pour sa fonction véhiculaire, de langue de service et de plus en plus pour son image culturelle. Il faut en permanence tenir les deux bouts, c’est le message que je voudrais faire passer. Il ne faut pas en douter un seul instant, si le français recule comme langue de service, il reculera comme langue de culture. D’ailleurs les esprits chagrins qui spéculent sur le recul du français le disent à leur manière : si les usages du français reculent dans le monde, c’est parce que la culture est en plein déclin. S’il recule comme langue de culture, il reculera aussi comme langue de service. Cette ambivalence profonde des langues qui sont à la fois des outils de communication et qui expriment par ailleurs un rapport collectif avec le monde expose leur avenir à deux évolutions contradictoires parce
que si la diversité des langues est bien un obstacle à la communication dans le village global, il est non moins clair que dans le village global chacun tient à affirmer son identité singulière, à faire valoir sa valeur différenciée, son avantage comparatif, en d’autres termes si les langues comme outil de communication tendent vers l’uniformité, les langues comme marqueurs d’identité tendent vers la diversité et c’est dans cette tension qu’il faut penser leur avenir. Elles sont toutes prises dans un mouvement contradictoire, pendulaire, d’attraction sous l’effet de la mondialisation, de l’internationalisation des marchés, sous l’effet de l’internationalisation des sociétés et par réaction de différenciation linguistique sous l’effet de revendication identitaire quoiqu’on puisse penser de ces revendications.
Cette ambiguïté ou cette ambivalence explique les hésitations qui caractérisent la politique européenne des langues et la politique tout court ainsi que les difficultés qu’elle peut rencontrer à s’imposer, tiraillée qu’elle est entre la logique unificatrice des marchés qui militent pour une langue de service commune ou pour un même régime de langues de service, d’une part, et le souci de ménager des possibilités d’expression des identités culturelles nationales, d’autre part. Cette politique oscille en permanence entre les impératifs de l’échange dans un marché ouvert, d’une part, et l’attachement légitime des citoyens à leur langue nationale, voire aux langues régionales, d’autre part. A bien y réfléchir, ces hésitations ne sont que le reflet de l’ambivalence des langues elles-mêmes que l’on ne peut réduire à leur fonction de communication ni limiter à leur fonction identitaire qu’elles ne préservent qu’en gardant justement leur fonctionnalité puisqu’une langue sans emploi est une langue morte.
Alors quelles conséquences tirer de ces remarques hâtives ? Pour ma part, j’insisterai sur la nécessité pratique, pragmatique, de surmonter ce paradigme par ce qu’on pourrait appeler le vis-à-vis de langue. Qu’entend-on par là ? On peut tenter de concilier, et il est urgent de le faire, ces deux fonctions de la langue que nous avons tendance à schématiser après Heinz Wismann et Pierre Judet de la Combe en mettant les langues en vis-à-vis. On peut le faire de trois manières.
D’abord par le vis-à-vis de deux langues : une langue vivante et une langue morte, pourquoi pas ? Et le fait de mettre par hypothèse le français en vis-à-vis avec le latin ou le grec permet de restituer à la langue cette profondeur historique, cette historicité dont une langue de service dans son régime de langue de service est dépourvue. Ce peut être aussi le vis-à-vis de deux langues tout simplement, sa langue maternelle avec une autre langue vivante dont on acquiert la compétence en la mettant en visà-vis de la langue de départ pour constater ce qui est sans doute le fondement de la langue c’est que les langues ne disent pas la même chose, jamais exactement la même chose dans une langue et dans une autre. Ce vis-à-vis peut trouver une forme pratique quintessenciée dans la traduction et la forme d’un vis-à-vis en action en faisant passer des significations d’une langue dans une autre et en constatant à la fois que les
langues sont intraduisibles théoriquement alors même qu’on ne cesse pas, comme dit Barbara Cassin, de ne pas traduire, c’est-à-dire qu’on ne cesse jamais de traduire pratiquement. La traduction est impossible et pourtant toujours possible pratiquement puisqu’on ne cesse pas de traduire.
Et enfin le rapport à la littérature dans son acception la plus large. Heinz Wismann, dans sa réflexion, insiste beaucoup sur ce point à juste titre. Le rapport à la littérature est une des formes du vis-à-vis des langues. Un texte littéraire est toujours lié à une autre langue, il y a toujours beaucoup d’étranger dans la langue – toutes les langues sont travaillées par la diversité bien sûr – mais les usages littéraires de la langue, à supposer qu’on puisse parler d’usages littéraires de la langue ce qui serait péjoratif, disons la littérature elle-même c’est toujours de l’étranger dans la langue. Proust disait à juste titre que les plus beaux livres sont écrits dans une langue étrangère et on comprend très bien ce qu’il veut dire quand on a un véritable rapport à la littérature ; ce qui permet d’identifier qu’un texte est littéraire d’ailleurs c’est qu’il parle une autre langue. Voilà pourquoi il est essentiel dans la pratique des langues et dans leur transmission, dans leur enseignement et dans leur apprentissage de ne pas séparer les différents usages de la langue, il ne faut pas craindre qu’à défendre des usages culturels de la langue, on se prive de la défendre comme outil de communication et vice versa, il faut que les deux choses marchent d’un même pas.