La ville, théâtre de l'économie

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la ville, théâtre de l’économie 1



du client à l’habitant, comment quitter l’architecture de la consommation



Martin Rubi Dans le cadre du mémoire art, architecture et cinéma. Esteban Restrepo, Hugues Reip, Marylène Négro, Flavie Pinatel, Mina Saidi Shahrouz. ENSAPLV - 2019-2021



remerciements

Je voudrais dans un premier temps remercier les professeurs m’ayant encadré pendant un an et demi, Madame Flavie Pinatel et Monsieur Esteban Restrepo, pour leur patience et leurs conseils, malgré les événements chaotiques de cette année 2020. Je tiens également à remercier Alice Moléon pour sa disponibilité, ses conseils et ses encouragements permanents qui m’ont été très précieux. Merci également à ma famille, en particulier ma mère Michaëla Rubi, pour avoir lu et corrigé ce mémoire, et à ma soeur Louise Rubi pour son soutien.


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introduction

O1 I la ville au service de l’économie

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1 I de la ville historique à la ville contemporaine

a I fonctionnement de la ville historique

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b I le brusque développement de la ville

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a I le modèle américain de la consommation de masse b I standards de consommation architecturale

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2 I une ville devenue produit

c I la stérilisation de la ville

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O2 I partager la ville

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1 I repenser la ville

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a I la ville passante par David Mangin

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b I la ville poreuse par Secchi et Vigano

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2 I la ville construite par ses habitants

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a I participation citoyenne à la création de la ville

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b I les collectifs d’architectes, acteurs de l’ultra-local

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conclusion

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sources

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introduction Pendant des années, nous avons assisté à l’émergence de centres commerciaux, de lotissements et d’une nouvelle manière de consommer : la consommation de masse. Ainsi avons-nous pu acheter nos produits alimentaires et ménagers chez Auchan, Leclerc et tant d’autres enseignes. Au collège encore, nous apprenons que la campagne est grignotée de jours en jours par des lotissements, à cause de la crise du logement en France. Nous avons vu toutes ces nouvelles constructions sortir de terre pour des raisons qui nous dépassent, seule solution présentée comme une sorte de prix à payer pour notre bien-être matériel, pour la croissance qui nous apporte emplois et pouvoir d’achat. Nous vivons dans une société où l’on peut se faire livrer n’importe quoi n’importe quand n’importe où. Amazon, Ebay, Price Minister, Uber, Deliveroo, permettent de ne même plus sortir de chez soi. 10 10

La rue est le théâtre d’une course à la vente : supermarchés, prêt à porter de luxe ou non, restauration… Les panneaux de publicité accompagnent nos trajets du matin, nos pauses déjeuners, et nos sorties le soir. Tous ces éléments nous incitant à acheter plus pour moins cher envahissent nos espaces et influencent nos manières de penser. Les habitants se sentent de plus en plus agressés et nombreux sont ceux qui cherchent une alternative, un moyen de changer la donne, sans vraiment trouver. Ainsi nous rendons-nous compte que nous ne sommes que locataires dans la ville. Mais qui œuvre pour la ville ?


Un espace public appartient originellement à l'État et est mis à la disposition de la population en général. On peut dire que toute personne peut circuler dans un espace public, en respectant les limites évidentes imposées par la loi. Plus précisément, parmi les nombreux types d'espaces publics existants, on peut citer les rues, les places, les salles de sport municipales, les écoles, les hôpitaux, les bibliothèques, les gares ferroviaires ou routières, les routes... L'administration publique est responsable de la réglementation et de la gestion de l'espace public, elle en fixe les conditions d'utilisation. Le gouvernement en place doit garantir l'accessibilité de l'espace public à tous les citoyens, sans distinction d'aucune sorte. En tant que cadre d'interaction sociale, l'espace public remplit à la fois des fonctions matérielles (en fournissant un support physique aux activités collectives) et immatérielles (en permettant l'échange et le dialogue entre les membres de la communauté). Dans un premier temps, nous allons nous intéresser aux différents rôles tenus par la ville au fil du temps et à son évolution pour arriver à sa forme actuelle. Nous définirons d’abord des éléments qui ont donné son poids à la ville de manière historique, avec son contexte géographique, politique et plus tard aussi industriel.

1 : définiton des espaces publics, lesdéfinitions.fr

Ce mémoire s’appuie sur des constats sociaux et a pour objectif de questionner la place de l’habitant dans la ville. Comment en sommesnous arrivés à déléguer des parties de la ville à des organismes privés ? La gestion d’une partie de la ville par ces organismes représente-telle un danger écologique, social, économique ? Quel est le rôle de l’État et des responsables politiques dans le développement de nos villes et quel est leur but ? Comment le contrôle du privé se fait-il ressentir dans un climat social et quelles en sont les conséquences ? Autant de questions qui m’ont aidé à avancer dans ces recherches et que je vais tenter de cerner dans les prochaines pages. Tout d’abord, afin de bien saisir les enjeux de ce mémoire, nous avons besoin d’une définition claire de ce qu’est un espace public. « L'espace est

la partie qu'occupe un objet sensible, la capacité d'un terrain ou l'extension qui contient de la matière existante. Public est un adjectif qui permet de nommer ce qui est manifeste, notoire, connu ou vu de tous, et ce qui appartient à toute la société et est commun au peuple. »1 L'espace public est donc basiquement un lieu ouvert à toute la société, contrairement à l'espace privé qui peut être géré ou même fermé selon les intérêts de son propriétaire.

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Nous verrons par la suite la période des trente glorieuses, période d’après-guerre qui a métamorphosé considérablement le visage de la ville, notamment avec la démocratisation de la voiture, la crise du logement et la reconstruction. Pour ce faire, nous définirons les différents acteurs qui « font » la ville actuellement. Je parle ici des politiques et des programmes de zones (zones d’aménagement concerté, zone à urbaniser en priorité etc.) qui sont apparus dans les années 60 et ont participé à l’évolution des mentalités sur l’urbanisme et notre mode de vie, ainsi qu’à celle de l’aménagement du territoire tel que nous le connaissons aujourd’hui. Nous parlerons aussi des promoteurs immobiliers, venus en complément de ces politiques de zones afin d’installer de nouveaux logements, notamment le parc urbain pavillonnaire, et d’autres acteurs du privé qui investissent dans la ville. Ce dernier point nous servira de transition pour aborder la notion d’idéalisation de la ville, populairement appelé « Disneyfication », un monde merveilleux ou les problèmes sociaux et la pluralité sont dissimulés. Sorte de concept anti-urbain ou aucune rencontre ne se fait par hasard et où règne le « branding » (image de marque, qui consiste à ancrer une marque commerciale dans l’esprit des consommateurs). Nous verrons les systèmes mis en place, avec le « Business Improvement District » 12 12

développé en Grande Bretagne, et feront un parallèle avec la situation en France. Nous verrons ainsi la question de la spécialisation des espaces, qui vise à cadrer des usages donnés. En deuxième partie, nous explorerons les pistes qui émergent depuis quelques années pour répondre aux problématiques liés à l’implication des habitants dans la fabrication de la ville. Nous allons explorer la notion de « droit à la ville », un concept développé par le philosophe Henri Lefebvre dans son livre éponyme paru en mars 1968. Le concept comprend la nécessité d’être impliqué et de prendre part aux décisions relative à la qualité de vie urbaine. Il reconnaît ainsi l’habitant comme usager de la ville ayant droit de participation aux décisions d’aménagement et d’urbanisme et remet en cause l’industrialisation de l’urbanisme comme une fin. Il s’agit pour lui plutôt d’un moyen, au même titre que l’art, la philosophie et la science, qui ne peuvent évidemment pas marcher seuls, mais en coopération. C’est donc un des prémices de la démocratie urbaine, une idée de plus en plus répandue et présentée aujourd’hui comme nécessaire à l’évolution de la situation des habitants de la ville. Nous verrons tout d’abord deux concepts développés par des architectes urbanistes, qui essaient de répondre, en donnant des clés


de réflexion, aux problématiques de la vie contemporaine. Le premier, David Mangin, base ses recherches sur le fonctionnement et l’évolution de la ville, jusqu’aujourd’hui, pour faire en sorte de mieux comprendre la situation actuelle, et mieux résoudre ses problèmes. Il s’intéresse notamment à la place de la voiture dans l’organisation actuelle de l’urbanisme, accompagné de ses réseaux viaires, mais aussi à l’urbanisme commercial et l’expension de l’urbanisme dit résidentiel. Les seconds sont les urbanistes Bernardo Secchi et Paola Vigano, qui travaillent actuellement sur le Grand Paris. Ils proposent quant à eux la « ville poreuse », un concept visant à créer de multiples centralités afin de déconcentrer la ville, en créant également un lien entre ces centralités à petite échelle qui donnerait une continuité plus globale à la ville. Nous nous intéresserons également à la place de l’habitant dans la ville, en nous penchant sur les mesures à disposition des citoyens actuellement, mais aussi en étudiant le cas d’une coopérative zurichoise, pionnière dans l’habitat coopératif en Europe, et qui constitue un cas intéressant de poids des habitants dans la fabrique de la ville. Nous finirons par la place des architectes dans cette problématique et la façon dont de nouvelles générations d’architectes deviennent les acteurs de l’implication citadine.

Ils sensibilisent la population qui a perdu cet intérêt pour l’aménagement de la ville en appliquant le droit à la ville grâce à des chantiers participatifs. Ces collectifs d’architectes participent, grâce à des installations, éphémères ou non, qu’elles soient purement pratiques ou à but culturel, à redonner le pouvoir aux habitants dans une échelle ultra-locale.

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la ville au service de l’Êconomie

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de la ville historique Ă la ville contemporaineÂ

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a fonctionnement de la ville historique

1 : Henri Lefebvre, Le droit à la ville, p.;44, Paris édition anthropos

Charles Marville, Album du vieux Paris, 1865-1868

La ville telle que nous la connaissons aujourd’hui est le résultat d’une longue évolution. « La ville eut

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toujours des rapports avec la société dans son ensemble, avec ses éléments constitutifs (campagne et agriculture, puissance offensive et défensive, pouvoirs politiques, États, etc.) avec son histoire. Elle change donc lorsque la société dans son ensemble change » 1. Penchons-

nous dans un premier temps sur la ville du Moyen Âge et son évolution jusqu’à la Renaissance. Ce type de ville apparaît après la destruction de l’empire Romain et de ses cités, qui organisait les rapports de production de la société. Les villes sont principalement fortifiées et concentrent le pouvoir politique et militaire. Elles sont entourées de bourgs assurant la production agricole nécessaire à l’approvisionnement de la ville.


1 : Henri Lefebvre, Le droit à la ville, p.45, Paris édition anthropos

Les villes se développent ainsi dans une ère préindustrielle ou les échanges se font de moins en moins par le servage, mais davantage par l’échange, où les commerçants fournissent des matières premières aux artisans en vue de vendre un produit fini en ville, ce qui participe à la naissance de la bourgeoisie et à sa croissance, tant économique que sociale, et finira par faire partie des facteurs qui aboutiront à la révolution française de 1789. La révolution industrielle amène à la ville un vent de nouveautés. Premièrement, elle est une des principales cause et conséquence de l’exode rural, qui va participer à renverser le rapport de force entre la ville et la campagne au cours du XIXe siècle. En effet, les usines étant un secteur nouveau et nécessitant beaucoup de personnes, les paysans sont poussés à rejoindre les villes et bourgs où fleurissent les usines afin d’avoir une possibilité d’améliorer leurs conditions de vie. En effet, l’agriculture nécessite moins de main d’œuvre du fait de l’utilisation de machines améliorant les rendements. La révolution industrielle est aussi le fait de la bourgeoisie, classe hétérogène, qui va assoir sa domination en investissant les villes d’entreprises et entrepôts dans les anciens quartiers aristocratiques, comme le Marais à Paris.

Ainsi apparait le système féodal, hiérarchie de territoires fondée sur des contrats interpersonnels. Les seigneurs sont suzerains et ont la propriété des sols que les paysans cultivent en campagne et les artisans utilisent en ville. Au cours du Moyen Âge, de plus en plus d’artisans s’affranchissent du ban des seigneurs censés garantir leur protection et se rassemblent dans les villes où ils créent des corporations. Ces dernières accumulent un capital économique et acquièrent un certain poids. Ainsi, le rapport de force entre ville et campagne était en faveur de la campagne dans le sens où la ville était dépendante des productions de la campagne. Elle était ainsi modelée par des marchands pour leur besoin directs. Les centres villes historiques que nous connaissons encore aujourd’hui sont le lieu où se rassemblaient ces marchands pour promouvoir les échanges commerciaux. Cependant, pour Henri Lefebvre, « La ville fut pour eux bien plus valeur d’usage que valeur d’échange »1, dans le sens où ils considéraient leur ville comme représentatrice de leurs intérêts et promouvaient la qualité de vie comme un symbole de puissance, en embellissant la ville grâce à la richesse issue des commerces. 22


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Affiche du film « Berlin, Symphonie d’une grande ville », 1927


1 : Henri Lefebvre, Le droit à la ville, p.13, Paris édition anthropos

La bourgeoisie possède des moyens d’action dans les commerces, les banques et l’État. Cependant, les ouvriers affluent de plus en plus et menacent cet équilibre installé dans la ville par la classe bourgeoise qui a remplacé l’oppression du féodalisme par l’exploitation de la classe ouvrière. La population urbaine est croissante, avec un nombre d’habitants à Paris passant de 670 000 en 1800 à 1 200 000 en 1850. De par leur nombre, les ouvriers menacent la dominance bourgeoise et provoquent les journées de juin 1848, révolte contre la fermeture des ateliers nationaux censés fournir du travail aux chômeurs. L’adaptation de la morphologie urbaine à l’industrialisation a lieu sous le Second Empire. Paris est métamorphosée par les travaux du baron Haussmann qui marquent la fin d’une mixité sociale jusque-là prédominante à Paris, en

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« expulsant du centre urbain et de la ville elle-même le prolétariat, en détruisant "l’urbanité" » 1.


Haussmann crée ces boulevards que nous lui connaissons bien, sans vraiment prendre en compte le tissu urbain préexistant, remplaçant les rues et quartiers insalubres de Paris par de beaux bâtiments, mettant en valeur les nouvelles portes des villes, c’est à dire les gares, par de grandes avenues traversant la ville. Ces travaux très coûteux ont participé à assoir la domination de l’État, permettant des interventions militaires du fait de leurs dimensions. Ils crééent aussi une ségrégation, la qualité des logements étant trop chère à l’intérieur des limites des villes pour le niveau de vie de la classe ouvrière, avec pour conséquence le départ de cette dernière vers les quartiers périphériques, puis le soulèvement de la Commune de Paris en 1871. La révolution industrielle

apporte une nouvelle organisation de la ville, avec l’implantation progressive d’usines en banlieue qui viennent petit à petit dépasser la production de Paris intra-muros, puis l’annexion en 1860 des communes limitrophes comme Auteuil ou les Batignolles. Les conditions de salubrité de logements des ouvriers soulèvent des questionnements et engagent des recherches qui conduiront à des expérimentations de logement novateurs dans les cités ouvrières et de cités jardins, qui sont les prémices de l’architecture industrielle appliquée au logement.

« Le vieux Paris n'est plus (la forme d'une ville, change plus vite, hélas ! que le cœur d'un mortel)» Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857 25


ble brusque

dĂŠveloppement de la ville

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L’architecture industrielle prend tout son sens après la seconde guerre mondiale qui a causé la destruction de 15 % du parc de logements disponible en France. En effet, après les ravages de ces destructions, il est nécessaire de reconstruire de nouveaux logements afin d’héberger une population qui s’amasse dans des bidonvilles. Le caractère urgent de la situation pousse à la construction massive d’immeubles d’habitats collectifs dits « en barre » ou « en tour » dans les banlieues directes, avec un recours systématique à des matériaux de construction industriels. Dans un premier temps, ces logements en barre sont assez bien accueillis par la population.

« Sur cette métamorphose qui devrait être le signal d’une fête de l’architecture, l’anarchie et l’âpreté veillent comme deux sorcières. On rêve d’un New York humanisé par la Seine, on a Haussmann multiplié par Pouillon. Même si les névroses de la solitude à mille fenêtres, même si ce que l’on a dû baptiser « la pathologie des grands ensembles» n’arrivent pas à nous faire regretter les taudis originels, on sait du moins qu’ici, il y avait place pour le bonheur. Et là... on ne sait pas. » 28

Le Joli Mai, 1963, Chris Marker


Après plusieurs mois voire années à attendre que l’État propose une solution, on passe de logements insalubres au nombre de pièces trop réduit pour des familles nombreuses (qui étaient alors la norme), à des logements à la pointe de la technologie, avec salles d’eau pour se laver, balcons et fenêtres. Malheureusement, le temps passant, ces immeubles censés être provisoires se dégradent, les habitants sont victimes d’un manque d’offre de transports en communs, ce qui les rend dépendants de la banlieue dans laquelle ils ont été relogés. Ces grands ensembles font dorénavant partie de l’identité de la banlieue. La fin de la guerre amorce aussi une autre grande nouveauté : la démocratisation de la voiture. La voiture, qui s’est imposée comme symbole de la liberté dans les années 60, a connu un véritable pic pendant les Trente Glorieuses. Elle a permis une plus grande liberté de déplacement et de ce fait, un désenclavement partiel des banlieues : la distance n’étant plus un problème si l’on ne considère pas les embouteillages et autres difficultés que les automobilistes peuvent rencontrer. Cette liberté de mouvement a naturellement entraîné un étalement urbain sans précédent, encouragé par les politiques d’accessibilité à une

première propriété. Le réseau routier se développe à partir des années 50 et intéresse les élus régionaux et nationaux, afin de répartir de manière égalitaire la distribution routière du tissu urbain. On créer des voies rapides pour relier les grandes métropoles entre elles puis, pour désengorger les centres villes, on crée des voies de contournement le long desquelles se développent les banlieues. Mais l’on crée aussi du service public : hôpitaux régionaux, campus universitaires, grands ensembles etc. Avec les routes s’implantent aussi les supermarchés, hypermarchés et grandes enseignes cherchant à se greffer au plus proche des villes, près des échangeurs, afin de toucher une clientèle des villes, mais aussi des banlieues et bourgs les plus proches. Le réseau routier continue encore de s’agrandir, jusqu’à former une deuxième couronne, plus loin de la ville afin de ne pas entrer en conflit avec les résidents de la première couronne, ce qui participe encore à un étalement diffus de l’urbanité. Les rocades ont donc participé à la mutation de la ville en passant de l’échelle du centre-ville, avec les commerces implantés en cœur d’îlots, au commerce industriel à l’échelle de la banlieue, puis à l’échelle des couronnes et rocades plus tard.

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© Publicité pour la « Coccinelle » par l’agence DDB, 1959, Groupe Volkswagen


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L’urbanisation de nos sociétés est un enjeu majeur du 21e siècle et tend à croître, notamment avec la demande des pays en voie de développement. L’espace urbain est aujourd’hui pensé comme une économie de production et de consommation dans une logique de croissance.

une ville devenue produit 33


ale modèle américain

de la consommation de masse

Avec la fin de la seconde guerre mondiale, les pays européens doivent se reconstruire quasiment intégralement. Les États-Unis, dont la popularité avait déjà augmenté grâce à leur intervention en Europe lors de la première guerre mondiale, apparaissent désormais comme les sauveurs de l’Europe, comme un modèle politique symbolisant la liberté. Ils signent avec la France notamment, les accords de BlumByrnes, un contrat de libre-échange très avantageux pour eux, leur permettant de diffuser ce qu’on appelle communément « l’American way of life ». C’est le début de la croissance du soft power américain, qui influencera par le biais des films hollywoodiens, du plan Marshall, et de la consommation de produits américains, la manière de vivre des Européens. Ainsi s’implante la culture du pays de la voiture en Europe et avec elle, son système de consommation.

sont faits en périphérie, pour 20 % dans les centres-villes et 10 % dans les quartiers. » 1. Aujourd’hui, les

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franchises de grande distribution ont su s’adapter et ont créé les centres commerciaux, que l’on peut retrouver en tant que tels aujourd’hui en centres villes, mais aussi adossés aux hypermarchés des périphéries.

1 : David Mangin, La ville franchisée, formes et structures de la ville contemporaine, p.109, éditions de la Vilette, 2004

Né aux États-Unis dans les années 20, le supermarché séduit par son attractivité économique. Il fait chuter les prix des biens et permet à tous de consommer à moindre prix. Il arrive en France au début des années 50 avec le premier magasin Leclerc, franchise bien connue de tous. Dans les années 60, face au succès de ce dernier, Carrefour crée un hypermarché à quelques kilomètres de Paris, à SainteGeneviève-des-Bois. Ensuite, le phénomène se multiplie, touche toutes les grandes villes puis toute la France. Ces commerces de grande taille se greffent à la période de développement des réseaux routiers et viennent se placer aux nœuds routiers entre voies rapides et voies régionales, ou voies régionales et voies départementales, en prévoyant de grands parkings dans le but de séduire cette nouvelle classe moyenne qui possède une voiture. En France, « 70 % des chiffres d’affaire


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© Échangeur autoroutier à Paris porte de Bagnolet, 2018, Google


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Un nouveau concept apparaît depuis ces dernières années, avec des principes d’urbanisation complète autour de ces centres commerciaux, afin d’attirer aussi une clientèle locale. Ces centres commerciaux sont conçus pour recréer des villes miniatures, avec du mobilier urbain tel que bancs, arbres et rues, à la différence près qu’ils sont encerclés de boutiques, dans un espace fermé et à grande échelle, conçu pour vous faire rester le plus longtemps possible. Dans ces supermarchés, les slogans publicitaires sont de mise, de plus en plus court et percutants. On peut les lires sur les routes, dans le métro, ou les voir avant une émission, une vidéo. Ces publicités envahissantes s’infiltrent dans notre quotidien, sans vraiment s’imposer, fruits de recherches d’experts en marketing qui visent à créer une image de marque présente dans l’imaginaire commun et à affiner le profil type du consommateur moyen. C’est le principe même du système capitaliste qui pénètre de plus en plus facilement dans notre vie, en créant de nouveaux besoins auxquelles des marques salvatrices vont répondre.

« Il y en a qui jouent en bourse et gueulent comme des serins. D’autres font fortune en escroquant leur prochain. Moi, de tout cela, croyezmoi, je m’en fous, Car je suis heureux, hein! eh ben! quand je suis sans le sou. Oui, oui, oui, oui ! Il y a des gens qui se font un brin de mauvais sang, Si ça leur arrive de se trouver sans argent. Moi, bien au contraire, je m’en fous royalement. Et voilà pourquoi, je vous le dis gaiement. Eh, eh ! Je ne vous le dis pas en chantant, mais je ne sais pas chanter, Je ne sais pas chanter, je chante faux par-dessus le marché. Oui, oui, oui, oui ! Quand je suis fauché, je me sens léger. Il me semble avoir des ailes. Quand je suis fauché, je me sens léger, Je suis agile comme une gazelle. Quand je suis fauché, c’est peut-être idiot, Joyeux comme un poisson dans l’eau, Quand je suis fauché, bien ma foi, Je suis bien plus heureux qu’un roi. » Le Joli Mai, 1963, Chris Marker 37


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© « Highway 86 » par James Wines, Vancouver, 1986, Rick Marotz


bstandards

de consommation architecturale

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1 : David Mangin, La ville franchisée, formes et structures de la ville contemporaine, p.165, éditions de la Vilette, 2004

Avec ces différentes zones se développent aussi les lotissements pavillonnaires, habitats neufs et bons marchés à proximité du rêve commercial. Les lotissements pavillonnaires ont connu une croissance énorme à la fin des politiques de grands ensembles au milieu des années 70. En effet, après la désillusion quant aux villes nouvelles et aux grands ensembles, l’accent est mis à présent sur le charme de la ruralité. David Mangin dit : « Un

leur lieu de vie. En effet, hormis des modifications mineures, les maisons sont essentiellement choisies sur catalogue. De plus, la loi de Gaston Deferre (alors ministre de l’Intérieur) sur la décentralisation est promulguée en 1981 : ce sont maintenant les élus locaux qui ont le pouvoir de délivrer les permis de construire. L’urbanisme n’ayant pas grand-chose à voir avec le métier de maire en général, beaucoup ont délégué à des promoteurs, ce qui apporte un logement de plus en plus banal. Ainsi, pour réaliser des travaux sur ces maisons ou pour construire différemment, il faudra non seulement respecter un Plan local d’urbanisme (PLU) contraignant, mais il faudra aussi de nombreuses démarches administratives longues, pénibles et décourageantes. De plus, les élus locaux de petites communes se retrouvent pris au piège de la construction neuve en utilisant les terrains non construits pour attirer des habitants et faire survivre leurs villages. Enfin, sous couvert d’arguments d’insécurité, les lotissements ont de plus en plus tendance à être privatisés par les voiries menant à eux, originellement déjà peu nombreuses par souci d’économie.

ménage aux revenus moyens peut emprunter 84 000 euros sur 20 ans. Or ce montant s’avère insuffisant pour acquérir un 2 pièces en centre-ville […] En revanche, une telle somme permettait de faire construire une maison sur une parcelle de taille moyenne dans la périphérie de la plupart des villes ». Des maisons

de plain-pied avec un jardin, c’est attirant certes, mais c’est surtout une solution proposée par rapport aux centres-villes devenus trop chers pour les plus modestes. On passe à une consommation de l’architecture en choisissant une maison conçue par un promoteur, placée dans un dédale de rues tracées à la règle, dans un environnement quadrillé où tout est à la même taille. Dans ce cas de figure, les habitants sont clients sans vraiment avoir de pouvoir sur 42


Extrait de « Dog day’s », Ulrich Seidl, 2001, ALLEGRO FILMS

Ainsi, ces habitations sont de plus en plus enclavées et ne communiquent pas entre elles. Le problème soulevé ici n’est pas tant la place que prend cette urbanisation croissante, mais les conséquences de ce type d’urbanisation : en effet, un ensemble de lotissement accessible par une route unique nécessite quasi systématiquement l’utilisation d’une voiture. La voiture, plus tôt présentée comme un facteur déterminant de l’urbanisation telle qu’on la connaît aujourd’hui, amène aussi une dépendance vis-à-vis de l’utilisateur. En pensant l’urbanité à partir de la voiture, on condamne plus ou moins les autres moyens de transports, notamment la marche à pied ou les transports en commun.

De par sa nature, la voiture nous maintient dans une bulle privée difficile à percer. Aujourd’hui, des interventions se font jour afin de déconstruire tout le mode de vie créé autour de la voiture (je pense notamment au combat très médiatisé d’Anne Hidalgo contre les automobiles), mais elles sont encore insuffisantes tant dans les petites villes et les villes moyennes en général, que dans les villages périphériques aux grandes villes. Nous vivons en réalité dans une ère de l’urbanité individuelle de ségrégation, entretenant le mythe d’un village qui n’existe plus.

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cla stérilisation de la ville

L’individualisation de la société est un sujet que l’on peut traiter dans beaucoup de domaines et dans lequel l’architecture vient jouer un rôle important. En effet, cette individualisation se caractérise par le constat que nous communiquons moins entre nous en utilisant de nombreux moyens considérés communément et à juste titre comme des développements majeurs des sociétés modernes. Citons notamment le téléphone et l’essor des réseaux sociaux qui sont nos principaux alliés aujourd’hui pour communiquer. Cependant, les algorithmes destinés à mieux cibler nos habitudes de consommateurs, limitent notre capacité à nous informer en nous montrant des informations qui nous confortent dans nos opinions (phénomène assez ancien, car les médias traditionnels le faisaient également) et qui, en maintenant l’illusion de nous laisser choisir, nous enferment dans une réalité individuelle qui nous est propre.

Malgré les facilités offertes pour s’informer, bouger, avoir accès à une éducation, l’être humain a tendance (parfois inconsciemment) à vouloir vivre avec ceux qui lui ressemblent. J’ai trouvé à ce sujet une simulation interactive qui explique l’étude « Modèles de ségrégation dynamique » réalisée en 1971 par Thomas C. Schelling sur ce phénomène. La simulation met en scène deux types de personnages : un carré gris et un triangle blanc, qui peuvent représenter n’importe quelle catégorie de personnes, par exemple de religions, d’origines socio-économiques ou encore d’orientations politiques différentes. Dans la simulation, il est possible de modifier le pourcentage de tolérance de ces personnages les uns envers les autres et de voir à partir de quelle proportion ces personnages voudront déménager si un trop grand nombre de leurs voisins ne partagent pas les mêmes opinions ou le même mode de vie. 44


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© Parable of the Polygons, Nicky case


Si nous définissons cette condition à 33%, nous pouvons voir que nous arrivons à une ségrégation de la ville à 63%, alors même que si nous prenons au cas par cas, tout le monde est suffisamment ouvert d’esprit pour accepter d’avoir 2/3 de ses voisins d’une autre condition. Nous sommes quasiment tous entouré de gens de mêmes conditions, nous isolant de la diversité d’opinions ou de conditions. La seule façon de permettre à nos villes de rester hétérogènes serait que toute la population apprécie davantage la diversité que craindre de faire partie d’une minorité. Ce phénomène, que nous admettrons comme norme, est encouragé aujourd’hui par de multiples biais sortant du domaine de compétence de l’architecture, mais cette dernière n’y est pas étrangère. Une des formes de cette individualisation passe par la conception de lotissements privés. En effet, souvent confiés à des promoteurs-constructeurs privés et dessinés par des géomètres (à hauteur des trois quarts des maisons réalisées en secteur diffus) ou, de manière plus vaste par des Sociétés d’économie mixtes chargées du développement global d’un territoire défini (région/ département, par exemple), ces lotissements sont généralement dessinés en raquette afin d’économiser sur les coûts de voirie.

Les voiries sont d’ailleurs privées jusqu’à ce qu’elles soient « déclassées

Encore une fois, cela a pour conséquence de préserver l’habitant d’une réalité différente de la sienne, le rendant petit à petit plus intolérant à n’importe quelle différence. Outre-manche, l’essor du Business Improvement District (BID) pose un problème similaire. Ce mécanisme permet de céder au privé une partie de la gouvernance publique pour certaines rues, places ou quartier. Dans ces quartiers, les commerçants s’organisent entre eux et paient une taxe à hauteur de 1 % de leur revenu annuel. Ils ont ainsi le pouvoir de décider de la couleur du pavement, de l’usage des espaces publique pour l’organisation d’évènements ou du nombre de policiers patrouillant sur leur territoire. Leur budget étant de plus en plus serré, cela permet aux municipalités d’économiser de l’argent, mais soulève la question de la place des habitants au sein de la ville. En effet, ces derniers ne sont pas concertés quant à la gestion de ce BID. La ville est vue ici comme un espace essentiellement fait pour l’investissement et est considérée comme un produit.

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1 : David Mangin, La ville franchisée, formes et structures de la ville contemporaine, p.170, éditions de la Vilette, 2004

après enquête publique, à moins que le lotissement devienne « résidentialisé » ou privatisé »1


On dissuade la fréquentation de ces lieux par les sans-abris, mendiants et autres éléments considérés comme perturbateurs, ou qui ne vont pas consommer sur place.

Cependant, ce modèle a ses limites, car, comme en Grande Bretagne, les municipalités françaises ont moins d’argent et l’action publique perd de son pouvoir. Aujourd’hui, au motif de l’austérité économique, on voit des missions publiques transférées vers le privé. Ce que je veux démontrer par-là, c’est que nous arrivons à la production de la ville par des acteurs tiers dont les intérêts ne sont pas le bien commun, mais la santé de leur entreprise. La ville ne se définit alors que par un intérêt économique, et l’architecte et l’urbaniste (en ce qui nous concerne), mais aussi les sociologues, les artistes, les historiens, les philosophes et surtout la population sont mis à l’écart dans ce qui les concerne en premier lieu. Cette simplification de la ville empêche des échanges plus riches entre les citoyens, et encourage une individualisation et un manque de communication qui induit un extrémisme croissant de nos sociétés.

« L’espace public est toujours un espace où convergent des intérêts très différents. C’est problématique quand les intérêts particuliers et les mécanismes limitent l’accessibilité et la diversité d’usage de ces espaces » Andrej Holm, sociologue, Main mise sur les villes, 2015.

En France, la situation n’est pas aussi explicite : historiquement, l’action publique occupe une place plus forte que le privé. C’est ce qui prévaut jusque dans les années 80, avec les modèles des ZUP, des grands ensembles qui s’imposent sur le territoire. Aujourd’hui, l’urbanisme entre dans une approche de partenariats publicsprivés, c’est l’action publique qui va définir les grandes lignes tandis que les acteurs privés vont organiser «Ce n’est pas un signe de bonne santé ces cadres d’action. Nous sommes a que d’être bien adapté à une société priori protégés des contrecoups, car profondément malade.» la mobilisation des acteurs privés Jiddu Krishnamur se fait très en amont des discussions de stratégie urbaine, qui appartient in fine à l’action publique. Il y a en France une méfiance envers les acteurs privés et un système qui cherche à les contrôler a priori.

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© Serie « derrière les grilles », 2019, cinql


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partager la ville Nous avons vu tout au long de la première partie comment la ville avait évolué au fil du temps, notamment grâce à l’économie, et comment elle était de plus en plus réduite depuis la fin de la seconde guerre mondiale à un lieu de consommation, au détriment d’un lieu d’échange et de rencontres. Nous allons dans cette nouvelle partie nous intéresser dans un premier temps aux différents enjeux qui touchent aussi nos villes à travers la vision de plusieurs personnes qui ont réfléchis à différentes solutions. 51 51


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repenser la villeÂ

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© Schémas, de l’urbanisme du réel vers l’urbanisme du possible, 2004, David Mangin


a la ville passante

selon David Mangin

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Dans son ouvrage La ville franchisée, David Mangin décrit les différents mécanismes qui ont mené à la ville contemporaine, et notamment les différentes faiblesses que ces mécanismes ont induit dans cette dernière. Si nous continuons de pratiquer « l’urbanisme du réel », nous continuerons à utiliser la voiture telle qu’elle est utilisée aujourd’hui, ne répondrons donc pas aux enjeux de l’étalement urbain, ni dans les pays développés, ni dans les pays en voie de développement, qui sont en train de créer leur réseau routier. Nous assisterons à une certaine homogénéisation de nos villes, par le transfert des responsabilités publiques vers le privé, avec une proportion croissante des produits clés en main, et une marchandisation de l’espace urbain au profit de groupes capitalistes. Vingt ans après la parution de son livre, c’est encore d’actualité. En France, les sociétés d’économie mixte (qui fonctionne avec l’association d’une partie publique et d’une partie privée minoritaire)

des contraintes de déplacements et dans l’invention de formes urbaines moins productrices de dépendance automobile et d’enclavement.»1. 56

1 : David Mangin, La ville franchisée, formes et structures de la ville contemporaine, p.319, éditions de la Vilette, 2004

sont une forme de partenariat public privé permettant aux institutions publiques de profiter du savoir faire du privé afin de mener à bien un projet d’utilité publique. Censées être un outil d’aide pour les institutions, elles se révèlent insuffisantes dans la pratique pour encadrer des rapports publics-privés déséquilibrés en matière de moyen financiers. La mise en concurrence est aussi biaisée par le fait que c’est l’opérateur privé disposant des capacités financières les plus importantes (pour des raisons de techniques, de capacités de réalisation des chantiers …) qui va être sélectionné, ce qui favorise les grands groupes déjà en place au détriment des acteurs locaux, peutêtre moins affirmés. Pour éviter un aggravement de la situation durable, et afin de répondre aux enjeux actuels, que sont le réchauffement climatique, la réussite du vivre ensemble, la lutte contre les discriminations etc., David Mangin propose le concept de « la ville passante ». Au lieu de faire table rase du passé, et de recommencer utopiquement depuis zéro, la ville passante serait une «optimisation


Dans la pratique, cela se caractérise par une intervention sur les réseaux viaires, en ouvrant les différents modèles d’espaces sécurisés, en créant de la voirie pour les relier entre eux, plutôt que d’avoir une seule voirie desservant plusieurs espaces. Cela aurait pour avantage de réduire la dépendance automobile par la réduction des distances de trajet, mais aussi par la multiplication des choix de déplacement, répondant à une diversité des besoins des habitants ce qui favorise une accessibilité à la mobilité.

La ville passante passe aussi par l’abandon de l’urbanisme de zone. Il consiste à séparer les fonctions de la ville et de spécialiser les espaces, propre à la ville fonctionnaliste, augmentant les distances entre deux usages différents. David Mangin y oppose la « ville métisse », beaucoup plus favorable à la réalité sociale, avec une proximité des différents usages urbains. Il faudrait par exemple augmenter les densités de population aux alentours des gares ou des arrêts de transport en communs, et réfléchir à une meilleure répartition des équipements publics. La ville passante n’est pas le modèle d’une ville idéale, mais plutôt un cadre pour une recherche approfondie de solutions, et de coordinations des acteurs du développement territorial. Il faut d’ailleurs faire attention à ne pas s’appuyer uniquement sur le saupoudrage d’équipements ou la multiplication de réseaux viaires de manière aléatoire, en passant par une étude de la ville, sans quoi ces travaux coûteux ne serviraient que peu.

« N’exigez pas de la politique qu’elle rétablisse des "droits" de l’individu tels que la philosophie les a définis, l’individu est le produit du pouvoir. Ce qu’il faut, c’est désindividualiser par la multiplication et le déplacement des divers agencements. Le groupe ne doit pas être le lien organique qui unit des individus hiérarchisés, mais un constant générateur de «désindividualisation». Michel Foucault, 1972, Dits et Ecrits III

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vivre avec l’eau : un réseau de fossés et de bassins, © équipe Studio 08,Secchi-Viganò

b la ville poreuse, selon Secchi et Vigano

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Dans la continuité de ce que propose David Mangin, les architectes urbanistes Paola Vigano et Bernardo Secchi ont également étudié l’histoire de la ville et l’évolution de son fonctionnement au cours du XXe siècle. Réfléchissant aujourd’hui à la métropole du grand Paris, ils ont développé la théorie de la « ville poreuse », en réaction à la fragmentation de la ville contemporaine, et sa diffusion dans et autour de ses banlieues, créant un modèle de ville dispersée. On fait donc face à une ville à la fois concentrée et dispersée, avec une problématique identitaire et de cohérence du territoire. La « ville poreuse » se caractérise d’abord par un désenclavement géographique des différentes entités urbaines qui composent la ville (quartiers, arrondissement …), et l’utilisation des différents tissus qui composent un territoire (trame verte, trame bleu …) pour connecter ces entités, à l’échelle locale, mais aussi plus largement à l’échelle nationale.

Cela permet de désenclaver socialement les régions à fortes disparités (Le grand Paris étant composé de territoires extrêmement denses comme de territoires très peu denses, avec différents types de population entre autre.). La ville poreuse passe également par le développement des infrastructures publiques en termes de mobilité, afin de développer l’accessibilité sur tout le territoire, et enfin la révision des règles encadrant la conception, qui sont ici considérées comme un frein pour les urbanistes, qui ont du mal à s'affranchir du modèle de la continuité de la ville du XIXe siècle, par opposition à la ville contemporaine qui, à une échelle bien plus vaste, apparaît bien plus confuse. 59


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« Trois espaces, trois vitesses, trois réseaux », © équipe Studio 08, Secchi-Viganò


La révision de ces règles aidera à la conception de la ville en généralisant la recherche de nouvelles solutions plutôt que de rester sur des habitudes obsolètes. L’originalité de cette approche réside dans sa continuité territoriale à grande échelle pour assurer un fonctionnement local, et dans sa prise en considération des ressources naturelles comme la Seine (pour Paris) en tant que réel moteur de désenclavement, et outil de connexion des espaces urbains. Le but de la ville poreuse est également de créer des villes avec des centralités multiples, définis comme des monuments par les auteurs, mais qui peuvent aussi bien se traduire par des bâtiments que par des quartiers ou des parcs. On parle ici d’un lieu qui a un écho culturel et social, qui permettrait à une population donnée d’avoir un point de repère, un lieu qu’ils peuvent s’approprier. On peut souligner des similarités avec la ville passante de David Mangin, quant à la recherche de solution visà-vis de la place de la voiture dans la ville. Avec le développement des infrastructure publiques favorisant la mobilité à l’intérieur d’un territoire, qui favorisera à son tour l’utilisation de moyens de transports tiers.

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« Redensifier le pavillonaire », © équipe Studio 08, Secchi-Viganò


« Un projet de ville poreuse dit d’une manière concrète ce que l’on entend par ville poreuse : une ville dense de lieux significatifs, qui donne de l’espace à l’eau et aux échanges biotiques, où la biodiversité se diffuse par percolation et les parcs ne séparent pas, qui se transforme par stratification et qui accueille les différentes idiorythmies. En d’autres termes, on a avancé l’hypothèse que les principaux problèmes auxquels toutes les métropoles du 21e siècle devront se confronter seront ceux de l’inégalité sociale, de l’énergie, de la gestion des eaux, de l’utilisation des zones résiduelles que chaque génération a laissé en héritage, et enfin, d’un nouveau système de mobilité qui puisse désenclaver le territoire » Secchi et Viganò, La ville poreuse un projet pour le Grand Paris et la métropole de l’après-Kyoto, Metispresses, 2011 63


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la ville construite par les habitants

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a participation Coupe perspective de l’immeuble de Kraftwerk1, © Stücheli Architekten

citoyenne à la création de la ville Nous avons vu dans la partie précédente ce que différents architectes-urbanistes et philosophes ont imaginé pour aller vers une ville plus juste à l’avenir. Nous allons maintenant nous intéresser à la place du citoyen dans la création de la ville. Nous parlions antérieurement du droit à la ville. Il est intéressant de se poser la question de la mesure d’investissement qu’on peut attendre des habitants, mais aussi de leur légitimité à participer à la création de la ville. En effet, la grande majorité de la population aujourd’hui n’est pas formée, pas sensibilisée, aussi peut on douter de la qualité de cette 67 participation.


Cependant, un enjeu majeur se joue avec la participation des habitants, celui de la démocratie. La démocratie en France est actuellement en crise, en sont la preuve la baisse de participation aux différentes élections (signe d’un désintérêt de la vie politique), le mouvement des Gilets Jaunes et la revendication de la démocratie participative aux élections présidentielles de 2017. Il s’agit ici de promouvoir les processus participatifs afin d’aller vers une politique dynamisée du bas vers le haut, ou le pouvoir de décision se nourrit des éléments de réflexion du travail provenant des citoyens, afin de créer des projets d’utilité publiques mieux adaptés à la situation réelle. On retrouve actuellement plusieurs schémas de participation citoyenne. Le premier serait la participation passive, où les élus recueillent l’avis des habitants sur des projets déjà finalisés par des professionnels, sans qu’ils aient réellement la possibilité d’intervenir sur le projet en luimême, et en ayant un pouvoir très

limité quant à la réalisation du projet. C’est le système le plus commun en France. On a ensuite la gestion similaire au Business Improvement District (qui se rapproche d’ailleurs en Grande-Bretagne à ce qu’on appelle les Neighbourhood Improvement District), avec des sondages de satisfaction de services publiques, gérés par le secteur privé, qui permet aux municipalités de réduire les coûts, ou d’optimiser les services, comme par exemple avec la gestion des déchets. Un dernier modèle serait l’initiative purement citoyenne, sans encadrement, lorsque les institutions publiques ne sont pas assez présentes sur certains points d’attentes des habitants. Les citoyens s’organisent donc entre eux pour améliorer leur cadre de vie. Malheureusement en France, peu de dispositifs de participation fonctionne réellement, encore actuellement. Il peut être judicieux de s’intéresser à des modèles dépassants nos frontières. Nous nous appuierons ici sur le fonctionnement d’une coopérative zurichoise pionnière, Kraftwerk 1. La Suisse,

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et plus particulièrement Zurich, est reconnue pour ses coopératives d’habitation. Elles fonctionnent de la manière suivante. Une personne peut intégrer une coopérative en en achetant une action. En tant que membre de la coopérative, cette personne a le droit de participer au fonctionnement de la coopérative au suffrage universel, et de louer un appartement au sein de cette coopérative de logements. Ces coopératives calculent les loyers selon les coûts qu’elles doivent entreprendre, et le surplus est réinvesti. Cela permet notamment aux coopératives de détacher leurs loyer de l’inflation du prix du foncier à Zurich, et de proposer des loyers plus bas que la moyenne de la ville. Kraftwerk 1 est à l’origine un manifeste publié en 1993, qui pointe des problèmes propres à Zurich, et propose des pistes de réflexion pour un mode de vie alternatif, afin d’arriver à un projet construit, ce qui arriva en 1995, quand ils s’installèrent sur une friche industrielle. La participation citoyenne se traduit par une intervention dans la conception architecturale : Les fondateurs de

Kraftwerk 1 attendaient des habitants qu’lis développent les principes de programmation du bâtiment sans définir au cas par cas leur appartement (ce qui aurait été trop coûteux.). Ils ont également développé le concept des « clusters », de grandes colocations mutualisant les espaces communs (séjours, cuisines, salles de bains…), permettant de réduire encore les coûts. De grands débats génériques ont été organisés autour de l’écologie, des enfants, des espaces extérieurs, de la cohabitation, des fonds communs de contribution, et de l’architecture et des relations publiques, afin que les habitants définissent eux-mêmes leurs besoins. La participation des habitants après l’emménagement continue, et les coopératives ont un réel poids à l’extérieur de la coopérative. Grâce au financement participatif des fonds communs, ils ont par exemple fait annuler la construction d’un centre commercial dans leur quartier, en finançant une campagne afin de faire entendre leur voix.

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Kraftwerk1 de nuit, Stücheli Architekten, Kraftwerk1 / © Reinhard Zimmermann


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«Les habitants (ou utilisateurs des produits de l’architecte et de l’urbaniste) ne doivent pas être considérés seulement comme des consommateurs mais comme des professionnels hautement spécialisés et experts en matière d’habitat, chacun ayant une suffisamment longue expérience du mode de vie qui lui convient pour savoir ce qu’il veut .» Yona Friedman, 1970

bles architectes

comme acteurs de l’ultra-local

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Aménagement Place du Panthéon par le collectif Etc, © Samuel Colin-Canivez


Trop souvent au cours des études d’architecture, des étudiants se sont plaints d’un manque d’ancrage dans le réel, d’enseignements trop théoriques. C’est à partir de ce constat que des jeunes architectes créent les premiers collectifs français durant la décennie 1990, au nombre de 6 (Ne pas plier, Arpenteurs, Coloco, Robins des Villes, Bruit du Frigo et Pixel). Ils ont pour démarche commune de redonner une place à l’expérimentation de l’architecture, notamment par le biais de la sensibilisation de la population aux problématiques communes à tous. La participation citoyenne est donc au cœur de ce que les collectifs d’architectes défendent. Le collectif ETC, un collectif né en 2009 à Strasbourg, essaie de redéfinir la manière de faire l’architecture, en passant d’une logique verticale et hiérarchique à une logique horizontale, en faisant participer les habitants usagers, mais aussi en y incluant des acteurs artistiques, artisanaux ou sociaux. Ils expliquent au travers d’une thèse les trois axes principaux de leur démarche. Le premier axe est de définir un univers, une histoire autour de laquelle créer une synergie entre plusieurs acteurs de différents domaines de compétence.

« un récit est un discours qui raconte une histoire, et qu’une histoire se définit comme une transformation d’états affectant le rapport d’un certain sujet avec un certain objet » Yves Citton, Mythocratie. Storytelling et imaginaire de gauche, 2010 75


Fort de ce savoir-faire, les habitants de Gourna pourraient avoir un travail, et seraient fiers d’avoir fait eux même leur village, en ayant acquis les compétences nécessaires à l’entretien de leurs habitations, chose impossible si l’Etat n’avait qu’implanté des habitations en béton, dont l’entretien est couteux et dont les matériaux n’étaient pas disponibles aisément. Le troisième et dernier axe définit par le collectif est l’axe politique et concerne la manière de mettre en œuvre des processus favorisant un partage des décisions :

Ainsi, la mise en place d’un récit permet une appropriation des enjeux relatifs à un projet par un groupe de personnes concernées, qui permet la dimension multidisciplinaire nécessaire aux collectifs pour mener à bien leur projet. Cela permet par la même occasion une coopération entre ces différents acteurs, et force une interaction qui n’aurait pas lieu sans cela. Le deuxième axe mis en avant par ce collectif est l’axe constructif. Pour faciliter l’implication des habitants, usagers et constructeurs, il faut leur laisser une marge de manœuvre. Il ne faut pas voir ici le chantier comme un devoir, mais comme une expérience. C’est ce que fait Hassan Fathy avec le projet de New Gourna, qu’il décrit dans son ouvrage « Construire avec le Peuple », en incluant directement les habitants de ce village dans la construction du nouveau. Les habitants de l’ancien Gourna vivaient pour la majorité du pillage des tombes égyptiennes de l’antiquité. Hassan Fathy, pour réduire les coûts de construction et promouvoir une manière de faire l’architecture différemment, propose de construire le nouveau village en brique de terre crue, en formant les habitants sans qualification (Dans les années 1940, dans la campagne égyptienne) à devenir des ouvriers.

« Cette stratégie engendrerait ainsi une situation dans laquelle la maîtrise d’usage – les « habitudes habitantes » - deviendrait maîtrise d’ouvrage, en influençant la commande » Collectif Etc

Cette prise de position passe par la construction d’une situation, qui va changer les relations entre individus, pour faire évoluer leur comportement et faire émerger de nouvelles pratiques. Ces situations peuvent prendre la forme de chantiers ouverts, de microarchitecture expérimentée dans des démarches artistiques ou évènementielles en appui à certains processus participatifs (comme des cuisines mobiles, ou du mobilier urbain temporaire). 76


Plan masse du village de New Gourna, Hassan Fathy, 1952

La balade urbaine est un système d’appropriation de la ville, qui nous permet de se confronter au réel, de faire une analyse de la situation pour y implanter son projet, et prendre un point de vue intérieur au site. Cela permet par exemple de se rendre compte du potentiel d’un territoire. Autant d’outils pouvant permettre de briser la distance entre les habitants et leur habitat. En outre, les collectifs viennent se positionner comme contre-pouvoir politique, et comme partenaire temporaire entre la ville et les habitants, visant à aider la démarche des habitants à exercer leur droit à la ville et à devenir des citoyens. Cette démarche encore en marge il y a une vingtaine d’année rencontre de plus en plus d’échos aujourd’hui.

Il faut garder à l’esprit que la participation des habitants ne peut pas se faire aveuglément. Les projets portés par ces collectifs ne sont pas un modèle à répéter qui doit devenir une norme dans l’architecture. Leur essentialité réside dans le fait qu’ils sont des lieux destinés à l’expérimentation de la manière de percevoir la ville. De plus, les habitants et les urbanistes n’ont pas forcément les mêmes valeurs. La façon dont veulent vivre les gens en générale peut être assez peu éthique, c’est aussi ce qui donne les gated communities si célèbres aux Etats-Unis. Il y a des contradictions inhérentes entre le fait de construire un environnement bâti et d’y vivre. 77


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conclusion

Nous avons pu voir au cours de ce mémoire comment la ville a évolué, et contribué à un changement dans les mentalités depuis les années 1960. D’une ville nécessaire à la survie d’une population rurale avant la révolution industrielle, nous sommes aujourd’hui arrivés au produit d’une longue évolution, comportant des points positifs naturellement, mais aussi négatifs qu’il est important de prendre en compte pour essayer de comprendre le fonctionnement de notre société. Tout d’abord, la ville connait une croissance exponentielle depuis un demi-siècle, et a induit plusieurs changements forts dans notre société. Le premier étant l’exode rural, à la fois cause et conséquence de cet agrandissement, qui a changé le rapport de force entre la campagne et la ville, en faisant de cette dernière le point incontournable de notre société. 79 79


Les villes surpeuplées ont donc eu un besoin de s’agrandir, besoin auquel nous avons répondu de plusieurs manières, avec le développement des grands ensembles et des lotissements pavillonnaires. Cette croissance concorde également avec le développement de la voiture individuelle, qui s’impose encore aujourd’hui comme le mode de transport le plus utilisé en France. Les villes se sont donc développées avec la voiture, en construisant routes et rocades sans le recul nécessaire à la réflexion des conséquences de ces aménagements. Vient également la mondialisation, et le développement du principe de supermarché en France, qui s’implante dans les périphéries devenues plus accessibles. L’économie de supermarchés a transformé notre manière de consommer et a su s’implanter durablement dans nos sociétés, en donnant accès à des produits moins chers et centralisés dans un même lieu. Tout ces développements qui ont constitué des solutions à court termes posent aujourd’hui des problèmes de durabilité vis-à-vis de l’écologie, mais aussi des problèmes d’interactions sociales. Avec ce développement brutal et non réfléchi,

la ville contemporaine s’étend sans mesures, et nous semblons pris au piège de notre propre manière de la construire. Le but de ce mémoire n’est pas de désigner un responsable, car les problématiques soulevées ne sont en réalité pas le produit d’une volonté malveillante, mais la conséquence d’une insouciance collective vis-àvis de notre environnement urbain trop longtemps ignoré au nom de l’économie. Il est difficile aujourd’hui d’aller à contre-courant de cette insouciance, du fait qu’elle a permis le développement d’un confort individuel jusque là inconnu. La conscience collective actuelle en est affaiblie, de plus qu’elle est altérée par une société qui mise sur l’individualité à des fins commerciales, notamment grâce au développement d’internet. Poursuivre dans cette direction serait cautionner le développement de la ville des ZAC, sorte de schéma théorique obsolète bien qu’abouti, alors que la ville peut être non seulement plus agréable, mais un véritable acteur du changement de notre société. Nous avons vu en seconde partie plusieurs manière de renouveler la ville contemporaine vers un modèle plus actif dans les interactions sociales. Tout d’abord avec le concept de « ville

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passante » développée par David Mangin, qui essaie de s’affranchir de la voiture en milieu urbain et de ramener une hétérogénéité des usages dans la ville, mais aussi avec le concept de ville poreuse de Secchi et Vigano qui luttent contre la fragmentation de la ville en créant une continuité grâce notamment aux différentes trament propre à une ville, et une hétérogénéité à l’intérieur des programmes existants, en densifiant les périphéries pavillonnaires ou formées par les grands ensembles et en y diversifiant les usages, notamment à fin communes. La ville pourrait ainsi repartir sur une base en adéquation avec les enjeux actuels, et remettre les habitants au cœur de la ville. En effet, le désintérêt actuel est en partie du a un sentiment d’impuissance, et de méconnaissance de la ville, alors que cela devrait être une responsabilité collective. Il paraît aujourd’hui utopique de penser la ville à travers les habitants. Nous avons cependant pu voir que cela était déjà mis en pratique dans certains pays, notamment avec l’exemple de la coopérative Suisse Kraftwerk1. Ce projet architectural prend un sens urbain car les habitants ont développé grâce à cette organisme un

véritable contre-pouvoir vis-à-vis des constructeurs privés. Il est raisonnable d’imaginer que ce projet puisse servir d’inspiration à un concept à échelle plus large, si tant est que la population soit prête à s’informer sur le fonctionnement d’une ville et ses enjeux actuels et s’investir dans son fonctionnement. Les architectes et urbanistes ont un rôle à jouer, dans le sens ou ils peuvent servir de médiateurs entre la ville et ses habitants. Les architectes peuvent ainsi participer à une sensibilisation de la population à ces enjeux, et encourager une prise de conscience essentielle afin que nous reprenions nos droits sur la ville.

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