Reprendre Racine - Livret de PFE

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Ecole nationale superieure d’architecture de Paris la Villette

Projet de fin d’études Gaspard Schwarzbard

et

Martin Rubi

Dirigé par Yann Nussaume Soutenu le 13/07/2021 Yann Nussaume Antoine Saubot Hector Docarragal Montero Benoit Jacquet 1

REPRENDRE RACINES

Ministère de la culture et de la communication


Résumé Pour se faire, le projet se développe au travers de trois interventions à différentes échelles. D’une part, il propose de développer l’économie d’une ressource et des savoir-faire locaux par la création d’une filière-formation Terre-Bois visant à faire venir une population jeune sur le territoire de la commune. Cette filière-formation réhabilite des bâtiments vacants afin de les inclure à nouveau dans le bourg. Ce processus permet de requalifier le centre et de réaffirmer la présence du piéton en valorisant des venelles et en requalifiant les trois pôles principaux du village : la place des porches, la place du presbytère, et la place de l’école. D’autre part, il propose la construction de deux bâtiments d’habitations utilisant l’expertise de la filière implantée et des matériaux locaux afin de répondre aux enjeux de croissance démographique de la commune tout en limitant l’étalement urbain.

Le Projet de Fin d’Études « Reprendre Racines » est le résultat d’une collaboration avec la mairie de Couëtronau-Perche, qui s’intéresse aux travaux des étudiants afin d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion. Le bourg de Souday, chef-lieu de Couëtron au Perche, souffre aujourd’hui d’une désertification en son centre. Cela se traduit par de hauts taux de vacances, et des bâtiments désuets à l’image de nombreuses communes rurales. Les habitants, confrontés à ce phénomène, quittent la commune pour aller vivre en ville ou construisent des pavillons à bas coût, dans la périphérie du bourg, grignotant ainsi sur les parcelles agricoles. Face à ce phénomène, le projet a pour objectif de mettre en valeur et de développer les potentialités du bourg de Souday afin d’accompagner la démarche de la mairie d’accueillir 100 nouveaux habitants d’ici à 2030. 2


«L’enracinement est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine. C’est un des plus difficile à définir. Un être humain à une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l'existence d’une collectivité qui conserve vivant certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir. Participation naturelle, c’est à dire amenée automatiquement par le lieu, par la naissance, la formation, l’entourage. Chaque être humain à besoin d’avoir de multiples racines. Il a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle, spirituelle, par l’intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie.» Simone Weil, L’enracinement, éd.Gallimard, 1949

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sommaire

4


p.8-9

Introduction

p.10-11

1. Des richesses à valoriser

p.12

a. La haie bocagère comme élément structurant du territoire

p.13

b. La brique de terre cuite, un savoir faire percheron

p.14-15

c. Une commune particulièrement dynamique

p.16-17

d. Un bourg où les services subsistent

p.18-19

2. Des problématiques rurales

p.22-23

a. Un vieillissement de la population

p.24-25

b. Un étalement urbain au détriment du patrimoine bâti

p.26-27

c. Des espaces publics déconnectés

p.28-29

3. Une proposition à plusieurs échelles

p.32-33

a. Implanter une filière formation au coeur du village

p.34-39

b. Relier les différents pôles du bourg

p.40-47

c. Introduire une nouvelle manière de vivre

p.48

Conclusion

p.49

Bibliographie 5


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Carte de situation de Couetron au Perche par rapport au parc naturel régional du Perche


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Couëtron au Perche au sein de la communauté de communes


…) et immatérielles (qualités paysagères, savoir-faire, cadre de vie) propres à leur territoire. Ils sont également ouverts à l’innovation en encourageant de nouvelles manières de construire, d’apprendre et de travailler. Pour pousser les entreprises et démarches locales à protéger l’environnement et les savoir-faire, les parcs ont développé le label “Valeur Parc” qui est alors délivré comme un gage de qualité.

Introduction Depuis quelques années, face à la désertification de leurs territoires et au déclin démographique et économique, les communes rurales travaillent à la revitalisation des centresbourgs et de leur bassin de vie. Ces revitalisations visent à favoriser le dynamisme culturel et économique de localités pleines de richesses patrimoniales, architecturales et paysagères. Pour atteindre ce but et définir une stratégie cohérente, il est nécessaire d’appréhender des problématiques communes à tous ces territoires : mobilité, logement, économie locale, gestion des ressources, alimentation … Nous avons participé à un atelier « Hors Les murs », en partenariat avec le Parc Naturel Régional du Perche (PNRP). Cet atelier consistait à mobiliser des étudiants afin d’élaborer avec les acteurs locaux un projet sur le thème de la revitalisation d’une commune et d’un bassin de vie. Les parcs naturels régionaux ont pour objectif de mettre en valeur les différentes qualités matérielles (architecturales, patrimoniales

Financés en partie par l’Etat, ils sont chargés de piloter les stratégies de développement de leur territoire en accord avec leurs objectifs. Le PNRP n’est pas limité par les frontières départementales, et ne constitue pas une zone définitivement fermée. Il est actuellement réparti sur 88 communes dans les départements de l’Eure et Loire et de l’Orne. Le PNRP doit écrire une nouvelle charte prochainement. Certaines localités profitent de cette occasion pour postuler, notamment dans le Loire et Cher, au sud, avec la quasi-totalité de la communauté de commune des collines du Perche (CCCP). 9


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1 . DES RICHESSES À VALORISER


Haie bocagère, réalisation personnelle, 2021

a.

La haie bocagère comme élément structurant du territoire Enfin, elles forment

un paysage naturel boisé qui abrite les constructions agricoles (fermes, hangar, étables…) de la route, tout en créant des chemins La présence des haies bocagères creux entre les différentes est une autre caractéristique parcelles. Les haies bocagères remarquable du paysage sont aujourd’hui considérées percheron. Ces haies ont de comme un patrimoine naturel multiples utilités : elles servent à conserver, car elles ont été d’une part à délimiter les dégradées par l’agrandissement parcelles agricoles de manière des parcelles agricoles pour y naturelle et d’autre part à créer pratiquer de la monoculture. Elles de l’ombre pour le bétail, tout représentent également une en l’empêchant de se disperser. ressource en bois, notamment Elles participent aussi à la de chauffage, que le PNRP et les biodiversité en abritant diverses communes alentours essaient espèces de la faune et de la flore. de démocratiser. 12


b.

Les briques de terre cuites artisanales, un savoir faire percheron

Brique de Souday, réalisation personnelle, 2021

Il subsiste toutefois à l’HômeChamondot, au Nord du PNRP une des dernière briqueterie artisanale de France, qui réalise ses briques avec une presse du XIXe siècle (à 95 centimes l’unité). Ce matériau est aujourd’hui fabriqué à moindre frais (entre 70 et 90 centimes à l’unité) à l’échelle industrielle, et les techniques traditionnelles de fabrication de la brique de terre cuite sont réservées à des rénovations de patrimoine bâti ancien. Le briquetier n’ayant pas d’apprentis, son savoir-faire et son expertise sont en péril. Il existe au sein du PNR une coopérative labellisée “Valeur Couëtron-au-Perche possède un Parc” nommée Eco-pertica, savoir-faire local de la production qui prône l’utilisation d’écode brique de terre cuite du fait matériaux, comme la terre crue de la richesse de sa terre en ou le chanvre. Cette coopérative argile. La dernière briqueterie développe ses propres filières a cependant fermé il y a 21 d’exploitation et fournit une aux particuliers ans. C’est un métier difficile, expertise sur l’utilisation de matériaux notamment au niveau de la cuisson qui dure plusieurs jours. respectueux de l’environnement. 13


c.

Une commune particulièrement dynamique Cette initiative naît En 2019 quand Arnaud Poissonnier, entrepreneur parisien La commune nouvelle de récemment installé à CouëtronCouëtron-au-Perche, pôle Au-Perche, est frappé par le taux d’équilibre au sein du territoire de vacance des logements en de la CCCP a candidaté pour cœur de bourg. D’un autre côté, intégrer le PNRP. Elle naît il remarque les nombreux atouts en 2018 du rassemblement du village : un prix du foncier 10 administratif de cinq anciennes fois inférieur aux prix parisiens, communes de 80 à 510 habitants une vie culturelle dynamique et : Le chef-lieu Souday, Saint-Agil, un accès privilégié à la nature. Il Oigny, Arville et Saint-Avit, pour propose à l’équipe municipale une population totale de 1088 de lancer l’opération qu’ils habitants. Elle témoigne de nommeront plus tard : « Hacker similitudes fortes avec le paysage un village » pour faire venir une et le patrimoine Percheron. On centaine de nouveaux habitants y trouve des haies bocagères, issus des villes. La commune des lavoirs, une architecture de a employé Alexis Vannier briques ou de pans de bois et pour effectuer un travail de de nombreuses fermes. Faisant communication et de visibilité face aux mêmes problématiques en amont des installations, que les autres territoires ruraux, mais aussi en aval pour faciliter cette commune se démarque l’emménagement de nouveaux notamment par une initiative habitants, notamment des citoyenne : “Hacker un Village”. citadins. Un inventaire des 14


bâtis vacants de Couëtron-auPerche a été réalisé, afin de déterminer les raisons liées à la vacances et l’état général du bâti. L’objectif de cet inventaire est de prendre des mesures pour débloquer ce patrimoine qui se dégrade au fil du temps. La mairie a par exemple mis en place un impôt sur la vacance, ou démarche directement les propriétaires. Cette initiative a pour but de sensibiliser les potentiels nouveaux habitants aux différents aspects positifs et négatifs de la vie rurale, mais aussi de préparer les habitants déjà installés à l’arrivée d’une nouvelle population. Le CAUE veut en parallèle proposer trois maisons types destinées à différents budgets pour montrer les possibilités de réalisations avec les matériaux locaux. Ce partenariat fait ainsi le lien entre

les savoirs traditionnels et les besoins actuels de construction et rénovation du bâti. La mairie travaille par ailleurs actuellement à la réhabilitation de l’ancien presbytère accolé à l’église pour y relocaliser ses locaux. Ce besoin de relocalisation fait suite au rassemblement des cinq bourgs.

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d. Un bourg où les services subsistent

Couëtron-au-Perche se démarque également par la présence de tous les services de proximité au sein de son territoire : école primaire, poste, deux épiceries dont une participative, station essence, commerces, village est constituée par des restaurant, boulangerie, maisons de bourg anciennes boucherie, bar, un centre de aux caractéristiques typiques télétravail… Cette commune percheronne : pan de bois à dispose d’outils culturels remplissage terre et paille, développés et attrayants pour des soubassements en pierre une nouvelle population. On de grison (présente dans les y trouve par exemple une salle couches superficielles des sols de spectacle nommée l’Echalier agricoles). On trouve également (mot Percheron désignant une des maisons en brique de terre sorte d’escabeau destiné à cuite. Hors des centres, on trouve regarder par-dessus une haie), le des lotissements pavillonnaires siège d’une troupe de circassiens construits entre les années (Le Cheptel Aleykoum), mais 70 et aujourd’hui, dont les aussi une commanderie caractéristiques sont communes templière remarquablement à toute la France. Enfin, on peut conservée. Le paysage de la relever la présence de Grès commune est essentiellement Roussard, une pierre pourpre agricole, avec une concentration locale, présente surtout dans les bâtie forte au niveau des cinq bâtiments importants (Eglise, bourgs, et très diffuse dans le Mairie, Ecole …) ou dans les reste du territoire qui prend habitations plus riches. la forme de hameaux ou de fermes isolées. L’architecture du 16


17

La salle de l’Echalier, réalisation personnelle, 2021


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19

2 . DES PROBLÉMATIQUES RURALES


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21 Plan masse actuel, réalisation personnelle, 2021


Un vieillissement de la population La part des logements secondaires tend à reculer à Couëtron-au-Perche et dans la communauté de commune en général. Ce recul s’explique par l’arrivée de leurs propriétaires pour y passer leur retraite. Ce sont d’ailleurs ces retraités qui sont à l’origine de la hausse de population dans la communauté de commune. Malgré une croissance démographique positive, le solde d’arrivée et de départ des 15-24 ans est négatif. Cela s’explique par l’absence d’emplois ou de formations, qui sont généralement implantés dans les grands pôles urbains. 22

Evolution comparée des populations de Couëtron au Perche et du Loire et Cher, réalisation personnelle, 2021

a.


23 Population comparée par tranche d’âge, réalisation personnelle, 2021


Evolution du village de Souday entre 1950 et 2018, © géoportail, 2021

Un étalement urbain au détriment du parc bâti

b.

premier concerne l’étalement urbain: originellement concentré autour de la départementale D117, le bourg de Souday s’est étendu perpendiculairement durant de la seconde moitié du XXe siècle. Cet étalement a pris la forme d’habitat de lotissement. La superficie du bourg a augmenté alors que, sa population est passée de

Couëtron-au-Perche étant un territoire très étendu, nous avons concentré notre analyse sur le bourg de Souday, le plus important de la commune, car il regroupe l’essentiel des commerces et de la population de Couëtron-au-Perche. Ce bourg à lui seul présente plusieurs enjeux majeurs. Le 24


Occupation des sols, du bâti historique au bâti contemporain, réalisation personnelle, 2021

De ce fait, les nouveaux habitants de Souday, ou même les enfants des habitants actuels, préfèrent construire un pavillon plutôt que d’habiter d’anciennes maisons. Cela a plusieurs conséquences : La part des logements vacants à Souday est supérieure à la moyenne nationale (13,7% en 2017 contre 8,4% sur le territoire Français), et la majorité de ces logements se situent dans le centre bourg. Certains sont vacants depuis plus de 10 ans, détériorant par la même occasion le cœur du bourg, son attractivité ainsi que le patrimoine architectural percheron. De plus, cette vacance implique l’immobilisation du parcellaire en centre bourg, ce qui empêche la commune de se développer correctement, en proposant des services et aménagements plus durables.

plus de 1000 habitants dans les années soixante à 510 en 2015. Ce phénomène s’explique par le vieillissement du parc bâti existant en centre bourg, qui ne correspond plus aux standards de confort contemporains. La population qui vient s’installer à la campagne veut une parcelle avec un jardin, une maison avec de grands espaces intérieurs plutôt que plusieurs petites pièces, chose qui n’est pas forcément possible dans ces anciennes maisons. 25


c.

Schémas des espaces réservés à la voiture, réalisation personnelle, 2021

v

Des espaces publics déconnectés ou autres aménagements Malgré les services accessibles destinés à réduire la vitesse de à pied, la voiture est nécessaire l’automobile. La place centrale pour se déplacer au sein de la du village est coupée en deux commune (Saint-Agil est à 5 par cette départementale minutes en voiture, mais a plus rapide Cette limite l’empêche d’une heure de marche), mais d’incarner son rôle premier, en aussi par exemple pour faire tant que lieu de rassemblement ses courses à Mondoubleau (15 du village pour des activités minutes en voiture). communes (marché, festivités). De plus, le village est On remarque que la voiture régulièrement traversé par détériore la vie des espaces des engins agricoles, ce qui qu’elle relie. Les infrastructures implique que la route soit de stationnement comme le assez large (6m50). Le centre parking de l’école sont boudées bourg ne dispose donc pas de au profit du stationnement trottoirs d’une largeur suffisante sauvage sur la place des Porches pour que le piéton soit à l’aise (à une minute à pied.) Nous et en sécurité. Il est par ailleurs pensons qu’une révision de dépourvu de dos d’ânes, ces infrastructures pour rendre 26


cette place aux piétons serait bénéfique pour le bourg. Il existe également plusieurs venelles d’accès au cœur de parcelles. Servant à l’origine accéder aux champs, elles sont aujourd’hui largement privatisées, sauf quelques exceptions. Ces venelles se matérialisent par un espace laissé libre, bien que serré entre deux bâtiments. Elles reprennent le modèle du chemin creux créé par les haies bocagères de manière plus urbaines. Leur utilisation aujourd’hui se limite à desservir une habitation, parfois deux. Deux venelles sont encore utilisées dans le cœur du bourg pour desservir l’arrière de l’école, d’où sortent les enfants depuis la rue de la mairie, et le stade depuis la départementale D117. La départementale et le passage fréquent garantit la survie des commerces du centre, valoriser des cheminements piétons tels que ces venelles permettrait de protéger à la fois les piétons et les commerces. 27


28


29

3 . UNE PROPOSITION À PLUSIEURS ÉCHELLES


30


31 Plan masse projeté, réalisation personnelle, 2021


a. Implanter une filière formation au cœur du village pour la somme symbolique Afin d’aider la commune de d’un euro, et laissé en l’état Couëtron-au-Perche dans sa par manque de projet. Cette démarche d’intégration au parc filière permet d’innover dans naturel régional du Perche, trois l’utilisation de ce matériau interventions dans le bourg de traditionnel, et de démocratiser Souday sont proposées. l’usage contemporain de la terre. La terre étant très présente dans Elle répond ainsi aux enjeux de le bourg, sous forme de brique réhabilitation du parc vacant, de terre cuite, ou de torchis de mais aussi à la dynamisation de terre crue, il paraît important de l’économie, avec l’implantation revaloriser ce matériau et son d’une activité supplémentaire usage en implantant une filière de destinée à la formation et qui terre et de bois pour former des permettra de faire venir une apprentis qui pourront ensuite population jeune, ou de former prendre part aux différentes celle déjà présente. Elle vient interventions envisagées. Cette également soutenir l’offre locale filière s’implante dans un des d’artisans, en sous effectifs par bâtis vacants de la place des rapport à la demande. porches acquis il y a quelques années par la mairie de Souday, 32


33

Coupe du bâtiment réhabilité en atelier, réalisation personnelle, 2021


b. Relier les différents pôles du bourg

34


Le bourg de Souday possède des potentialités qui sont actuellement sous exploitées. Il dispose déjà de plusieurs pôles, pour l’instant déconnectés à l’échelle du piéton alors qu’ils sont très proches géographiquement : la place des porches, le terrain du presbytère, et l’école. Cette intervention consiste à relier ces pôles à l’aide de venelles déjà existantes, ou par là création de tronçons manquants, et dont l’usage sera renouvelé. Dans la prolongation de la haie bocagère et des chemins creux, qui séparent et relient à la fois, ces venelles viennent mailler le bourg pour créer des cheminements piétons, parallèles à la chaussée. Pour inviter ces derniers à les utiliser, ces venelles seront accompagnées d’un mobilier composé de plusieurs modules. La polarité n’existe que par le

Coupe sur une venelle, réalisation personnelle, 2021

Les venelles, modèle urbain de la haie bocagère

"Afin de retrouver leur caractère d'intimité, les lieux de passage entre les habitations ne doivent pas être des couloirs fermés. Ils sont rendus vivants par l'interaction entre les sphères publiques et privées grâce à laquelle on peut ressentir la vie imprégner chaque habitat." Yann Nussaume, Tadao Ando, Pensées sur L’architecture et le Paysage, éd.Arléa, 2014, p.78 35


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unifiées. Les espaces réservés aux piétons sont marqués du même revêtement de sol que les venelles, de sorte à ce que ces dernières soient perçues comme une prolongation des espaces publiques. l’espace est volontairement laissé libre, à l’exception de quelques arbres remarquables, pour laisser la possibilité d’une plus grande modulabilité Parmi les usages disparus, on peut imaginer un marché hebdomadaire, ou une terrasse pour le restaurant.)Pour éviter le stationnement sauvage, des places de parking délimitées seront aménagées sur les bords de la place.

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schéma du fonctionnement de la place des porches, réalisation personnelle, 2021

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La place des porches représente le cœur du village. Aujourd’hui le tracé de la route découpe des îlots déconnectés qui formaient autrefois une place soudée. Le projet souhaite reconnecter en altérant l’échelle d’usage de l’espace public, de la voiture vers le piéton. Pour cela plusieurs interventions visent à ralentir l’automobiliste : le tracé de la route tout d’abord. La création d’une chicane devant l’église oblige à un ralentissement. La matérialité attribuée à la route est également altérée afin de mettre en valeur le caractère particulier de cette zone. L’usage de briques de terre cuite de réemploi sert ainsi à signifier des limites claires où la voiture est tolérée ainsi qu’à générer dans l’habitacle un bruit enjoignant au ralentissement. Les espaces réservés aux piétons et aux voitures sont remis au même niveau, pour que la voiture perde le repère du trottoir et soit plus attentive aux piétons. Ainsi, les deux rives de la place sont plus


détail du revêtement de la place, réalisation personnelle, 2021

La place des porches : noyau historique des commerces

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La place du presbytère tient un rôle particulier : celui des loisirs. Pour qu’un bourg soit attractif, il a besoin d’espaces publics destinés à accueillir ses habitants. L’ancienne salle de classe qui faisait office de salle des fêtes sera démolie du fait de sa vétusté, au profit de la réhabilitation de la grange du presbytère en salle des fêtes. Cette intervention en bordure de champ vise à rendre aux habitants un bâtiment remarquable du patrimoine agricole. Un parvis est agencé pour accueillir la nouvelle mairie, séparé en deux par la grange. Cette séparation permet l’aménagement d’un espace de parking pour venir en renfort à celui de la place des porches. Le fond de parcelle, en bordure de champ, est aménagé sur la longueur de la haie bocagère, recréant un chemin creux dans lequel vient se loger un auvent à usage saisonnier et des jeux pour enfants. 38

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Schéma de fonctionnement de la place du presbytère, réalisation personnelle, 2021

La place du presbytère : Un espace dédié aux rassemblements


Vue depuis l’école, réalisation personnelle, 2021

La place de l’école : une nouvelle centralité pour rassembler le village

La proximité avec le bâtiment d’habitation est travaillée de sorte à ce que, malgré une légère surélévation du bâtiment, les deux soient connectés. La place de l’école se veut être Cette intervention en fond de une place vivant aux horaires parcelle s’inspire à la fois de la des écoliers. Située à la jonction nature environnante en habitant entre la partie historique et la la limite mais aussi des formes partie pavillonnaire du village, architecturales passées comme la elle rassemble les habitants longère agricole. L’interprétation autour des enfants. Aménagée actuelle des savoir-faire liés à en long, entre un bâtiment l’usage du bois, de l’osier plessé d’habitation participatif, et la ou de la terre crue et non plus délimitation de l’école, la sortie cuite symbolisent la modernité des classes se fait dans un du village. Son emplacement cadre protégé de la voiture où derrière l’école, à la frontière les parents peuvent attendre du centre bourg et du quartier ensemble. La place de l’école pavillonnaire, symbolise quant à est reliée par deux venelles, et lui le rapport à son histoire et la en prend elle-même la forme. volonté d’unité et de modernité Sa largeur varie en fonction des habitants se basant sur des des usages qu’on lui attribue et racines communes. 39


40

Coupe détail du nouveau bâtiment de la place de l’école, réalisation personnelle,


c. Introduire une nouvelle manière de vivre

41


v

Le projet architectural

Ces deux bâtiments sont bio sourcés locaux est une développés sur la longueur de réinterprétation de la structure la venelle reliant la place des traditionnelle à pans de bois et porches à la place de l’école, torchis. Les extérieurs aux abords et sont composés de nouveaux du bâtiments sont pensés afin logements à destination du parc de préserver l’intimité des rezlocatif peu présent à Souday. de-chaussée, sans en interdire Ces constructions permettent l’accès. Les appartements sont de répondre aux attentes de composés en majorité de petites développement de la commune typologies, pour accueillir une d’ici à 2030 dans le cadre du population avec des revenus PADD de la CCCP. Reprenant la limités avec 12 appartements typologie visuelle et matérielle de petite typologie (T2-T3), 4 de la ferme longère, typique de appartements plus spacieux l’architecture percheronne, ses type T-5 et T-6, et deux grandes usages sont déviés pour s’adapter colocations de type cluster au confort contemporain. En (T12), placé afin de loger effet, le bâtiment est réalisé en éventuellement les apprentis structure bois à remplissage venus en formations. Ces habitats terre au sud pour profiter des introduisent une manière de caractéristiques bioclimatiques vivre participative, de sorte à ce de la terre et remplissage paille que les espaces extérieurs soient au nord. L’utilisation d’une non seulement un espace de structure de bois et de matériaux passage, mais aussi un espace 42


“Car en fin de compte, l’opposition détruit l’environnement, alors que dans la mesure ou elle reconnait tout autant l’ancien que le nouveau, la graduation valorise le tout et répare l’environnement.” Kengo Kuma, L’architecture Naturelle, éd.Arléa, 2020 où l’on se retrouve. Ces grandes typologies, s’inspirant des clusters des habitats participatifs Zurichois comme Kraftwerk I et II, permettent une densification des formes d’habiter et de multiplier les usages des espaces extérieurs. Cette multiplicité d’usage permet par ailleurs une gradation de l’espace public vers l’espace privé puis intime. Ces typologies sont aussi une manière de questionner l’isolement de certains types de populations à la campagne. Promouvoir ce type d’habitat à l’intérieur d’un espace dédié à l’apprentissage des enfants ou à celui de savoir-faire constructifs permet de multiplier les racines et donc d’ancrer plus encore les habitants dans les milieux dont ils font naturellement partie. 43


Stratégie de confort et d’énergie Un effort particulier a été fourni au niveau de la consommation d’énergie des nouveaux bâtiments. Développés dans l’axe nord sud, les bâtiments exploitent la chaleur solaire par la disposition d’un module préfabriqué de mur Trombe et en se protégeant avec un mur peu ouvert contre les vents dominants provenant du nord. Le bâtiment se compose de plusieurs matériaux biosourcés :

Terre Crue Souday étant situé sur une terre d’argile, il est aisé de penser à la terre crue. Déjà très utilisé dans l’architecture locale, sous forme de torchis, ce matériau possède des qualités d’inertie thermique très concluantes, et sera utilisé pour le déphasage du mur trombe en façade sud, couplé à son utilisation dans du béton d’argile sur la dalle collaborante en chêne. Ces deux matériaux mariés pour former chaque plancher permettent d’une part d’augmenter l’inertie générale du bâtiment, son confort thermique et hygrométrique ainsi que de parfaire le confort acoustique. En effet la dalle collaborante (type O’portune) offre un confort visuel et acoustique par la présence d’alvéoles et simplifie le passage des réseaux.

Bois : Le bois est une ressource abondante au sein du Perche. Plusieurs scieries sont présentes aux alentours de Souday, comme la Scierie “les Négoces du Perche”, spécialisée dans le bois de Chêne qui sera utilisé pour la charpente et pour la dalle collaborante. Le bois est notamment utilisé pour sa résistance mécanique, pour ses capacités hygrométriques, et pour la faible énergie grise qu’émet l’utilisation de ce matériau. 44


Paille : La paille aussi est un matériau présent en abondance dans la campagne en général. Utiliser la paille permet aux agriculteurs de valoriser un stock de matière Osier : souvent inutilisé. La paille profite Le plessage de l’osier est une d’un bon bilan environnemental, technique traditionnelle utilisée puisqu’aucune énergie grise dans la région percheronne, supplémentaire n’est fournie originellement pour empêcher pour son utilisation dans les animaux de se disperser, le bâtiment. C’est un très ou d’accéder aux jardins bon isolant dont le coût et médiévaux. Aujourd’hui, il est l’énergie grise favorise son assez peu utilisé, sinon pour usage, surtout en zone rurale, ombrager des mares, ou former néanmoins sa mise en oeuvre une haie. L’utilisation de l’osier est complexe notamment au dans le projet se fait pour créer niveau de la résistance au feu un bardage en osier sur la façade ou des protections à la pluie qui nord, des brises soleils pour nécessitent d’être perspirante si éviter la surchauffe de la façade l’on ne souhaite pas utiliser de la sud en été, et des gardes corps pour les balcons. chaux en parement. 45


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Vue d’un appartement, réalisation personnelle, 2021


Conclusion

Au travers de plusieurs interventions à différentes échelles spatiales et temporelles, ce projet de fin d’étude nous a conduit à travailler dans le contexte réel d’une commune rurale dynamique, de ses débats politiques, des envies des riverains, des besoins et des possibilités. Les questionnements autour des matériaux de construction plus respectueux de l’environnement, des savoir-faire et des racines d’un lieu, de méthodes frugales, discrètes ou innovantes sont pour nous étudiants les réels enjeux d’avenir de notre profession.

C’est le type de projet que nous souhaiterions mener à bien par la suite. Ce travail fut exaltant tant dans les recherches théoriques que par les nombreuses visites du site ou encore par la conjugaison d’un travail d’équipe créatif et engagé. Il est, comme tout projet, critiquable et nous espérons que la discussion qui viendra sera féconde. Nous vous remercions pour la lecture de cette plaquette. Martin Rubi Schwarzbard

48

&

Gaspard


Bibliographie

BOUDET Dominique, Nouveaux logements à Zurich, la renaissance des coopératives FUCHS Matthieu & MUSSIER Julien, Construire avec le bois, d’habitat, éd.Park Books, 2017 CLEMENT Gilles, Manifeste du éd.Le Moniteur, 2019 Tiers-Paysage, éd.ducommun, KUMA Kengo, L’architecture Naturelle, éd.Arléa, 2020 2004 COURGEY Samuel & OLIVA NUSSAUME Yann, Tadao Andô, Jean-Pierre, La conception Pensées sur l’architecture et le paysage, éd.Arléa 2014 bioclimatique, des maisons DETRAZ Yvan , Zone sweet éd.Terre vivante, 2006 Zone, La marche comme projet VOLHARD Franz, Construire en terre allégée, éd.Actes Sud, urbain, éd.wildproject, 2013 DUD’HUIT Albert & MORIN 2016 Alain, Trésors du parler WEIL Simone, L’enracinement, Percheron, association les amis éd.Folio Essais, 1949 du Perche, 1979 49


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