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CTTEI
Jean-François Vermette
Directeur scientifique Biophysicien, M. Sc. Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTÉI)
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jeanfrancois.vermette@cttei.com
Avec la collaboration d’Astrid Debeissat, B. Sc. M. Comm., Pol., réd.a. (CTTÉI)
NETTOYER LES BOUES D’ÉTANGS AÉRÉS SANS POLLUER
Afin de traiter les eaux usées, le gouvernement du Québec a engagé dans les années 1980 et 19901 une modernisation massive des stations d’épuration. Les étangs aérés représentent un procédé d’épuration parfait pour la Belle Province, qui dispose de grands espaces peu coûteux à acquérir.
Trente ans plus tard, la population s’est accrue et le volume d’eau à traiter a augmenté encore davantage. Au fond des étangs, les résidus solides se sont accumulés. Les villes comme Repentigny, Saint-Bruno-de-Montarville ou SorelTracy doivent vidanger ponctuellement les bassins pour conserver l’efficacité du procédé d’épuration. Nous estimons que depuis 2011, au Québec, plus de 50 millions de dollars y ont été consacrés. Mais une nouvelle solution existe : l’oxydation en voie humide.
POURQUOI DES BOUES AU FOND DES ÉTANGS ?
Au Québec, près de 600 stations d’épuration sont exploitées en étangs aérés, soit 67 % des stations de la province. Ce procédé est très performant. Les eaux usées traversent d’immenses bassins extérieurs. Les matières en suspension décantent et la charge organique est traitée par procédé biologique. L’eau atteint un niveau de propreté suffisant pour être renvoyée au fleuve. Sa demande biologique en oxygène et sa teneur en phosphore sont grandement réduites. Toutefois, les résidus qui résistent à ce traitement s’amassent lentement au fond des bassins et compromettent leur efficacité. Que faire de ces boues ?
BIOMÉTHANISATION, ÉPANDAGE OU ENFOUISSEMENT ?
La biométhanisation n’est pas efficace. Le procédé de digestion anaérobique fonctionne bien lors du traitement des « jeunes boues », mais dans le cas de matières accumulées de longue date, tout ce qui pouvait être biodégradé l’ayant déjà été, les boues n’ont plus qu’un infime potentiel méthanogène.
Les municipalités doivent alors se tourner vers l’enfouissement ou l’épandage agricole. L’enfouissement des tonnes vidangées, coûteux, engendrerait d’importantes répercussions environnementales. L’épandage, lui, est un bel exemple d’économie circulaire. Les boues contiennent du phosphore aux propriétés fertilisantes. L’utilisation de ces biosolides en agriculture tombe néanmoins dans une zone grise en matière d’innocuité environnementale et populationnelle. En 2016, l’Institut national de santé publique du Québec publiait une étude sur les Risques pour la santé associés à l’épandage de biosolides municipaux sur des terres agricoles. Elle concluait à une pratique « acceptable par les autorités sanitaires », mais soulignait des incertitudes scientifiques sur l’impact de contaminants chimiques pour lesquels il n’existe aucune norme ou dont les effets sont mal connus : microorganismes antibiorésistants et micropolluants pharmaceutiques liés aux effluents d’hôpitaux.
L’épandage mobilise aussi une lourde chaîne logistique : il faut d’abord extraire, déshydrater et nettoyer ; ensuite, trouver des agriculteurs preneurs ; enfin, transporter et épandre en volumes adéquats.
Centre de traitement & lieu d’enfouissement de sols contaminés
Pour nous contacter
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L’OVH, PROCÉDÉ PROPRE IMBATTABLE
Depuis plusieurs années, le CTTÉI développe une expertise sur l’oxydation hydrothermale, aussi appelée « oxydation en voie humide » (OVH), méconnue en Amérique du Nord. Les boues résiduelles sont chauffées, pressurisées et enrichies en oxygène. Les réactions induites, qui offrent un rendement et une cinétique extrêmement efficaces, permettent de dégrader les résidus proprement, et la réaction génère de l’énergie propice au chauffage des bâtiments ou de procédés industriels.
L’eau récupérée est propre à 80 ou 90 %, biodégradable, et peut être retournée dans les étangs. Seul résidu : un solide stable, semblable à un sable, 20 fois moins volumineux, que l’on peut déshydrater, réemployer dans des recettes de béton, valoriser comme matière de recouvrement ou, dans le pire scénario, enfouir. En plus d’un bilan énergétique positif, au lieu d’enfouir 20 000 tonnes de boues riches en matières organiques condamnées à libérer des gaz à effet de serre, on enfouit ou valorise 1 000 tonnes de sable inerte.
SOREL-TRACY : UN EXEMPLE PARLANT
À Sorel-Tracy, le CTTÉI étudie le réseau de la Régie d’assainissement des eaux Richelieu Saint-Laurent, qui dessert 40 000 habitants et compte six étangs aérés placés. Les exigences de qualité quant aux rejets dans le fleuve sont respectées, mais 200 000 tonnes de boues sont accumulées : l’équivalent de cent piscines olympiques. La concentration de métaux dans le biosolide résiduel varie d’un étang à l’autre. Elle est parfois trop élevée pour l’épandage agricole. Quelle solution existe-t-il, à part prélever les boues, les déshydrater, puis les enfouir ?
Les résultats du traitement par OVH parlent d’eux-mêmes :
Le Programme d’assainissement des eaux du Québec (PAEQ) : http://www.environnement.gouv.qc.ca/eau/eaux-usees/industrielles/chapitre1_b.htm
100 % 90 % 80 % 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 %
0% 65-85 $/tonne
760 camions 3000 t CO2eq
48 $/tonne
88 camions
226 t CO2eq
Enfouissement OVH Coûts Camionnage Gaz à effet de serre
On estime pouvoir réduire les coûts d’enfouissement sur 15 ans de 27 à 44 % selon l’optimisme du scénario, diviser par 8 le camionnage nécessaire pour l’enfouissement des solides (ou leur valorisation) et par 13 les émissions de gaz à effet de serre.
L’AVENIR DE L’OVH
Les prochaines étapes ? Poursuivre la valorisation des boues d’étangs aérés de Sorel-Tracy à grande échelle, soumettre ce procédé propre à l’approbation du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, puis élargir son utilisation.
Les possibilités d’applications futures de l’OVH ne s’arrêtent pas là. Toutes les matières organiques dont l’enfouissement est le seul mode de gestion, certaines matières dangereuses, ainsi que les effluents trop concentrés ou réfractaires aux procédés biologiques peuvent bénéficier de cette technologie de pointe afin de diminuer leur empreinte environnementale et leurs coûts d’exploitation.
Plus que jamais, au Québec, l’avenir est dans notre plus grande ressource : l’eau ! n
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