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PORTRAIT
On Studio Photo. C’est le nom de l’entreprise créée par Nahida Ousseni Riziki, jeune photographe de 26 ans. Il suffit de jeter un seul coup d’œil à son travail pour comprendre qu’elle sort du
Le Soutien De Ses Coll Gues
Masculins
À Mayotte, actuellement on compte seulement deux photographes professionnelles, et la créatrice d’On Studio Photo est l’unique Mahoraise. Lorsqu’elle arrive sur le territoire avec l’ambition de se faire une place dans cet univers très masculin, ses confrères l’accueillent chaleureusement. « On est comme une famille, on se soutient tous. On se prête notre matériel. Il n’y a pas d’animosité entre nous et c’est rare à Mayotte parce que je sais que dans d’autres domaines, ce n’est pas le cas », affirme Nahida. Une relation professionnelle mais également fraternelle se crée immédiatement entre elle et le photographe Toibrane, de Mayan’art. « Je l’ai rencontré il y a presque 10 ans. Il m’a beaucoup soutenue quand j’étais à l’école de photographe. Depuis que je suis rentrée sur l’île, il est toujours là pour moi. Je peux faire mes shootings dans son studio, parfois il m’envoie le remplacer dans des missions. On est dans la même équipe mais chacun a sa société », expliquet-elle. Désormais la petite protégée veut prendre son envol, et va prochainement ouvrir son propre studio dans son village d’origine à Sada.
Tre Une Femme Photographe Mayotte
lot. Ses photos sont une explosion de couleurs. Une manière pour elle d’exprimer tout l’amour qu’elle porte à son activité. Tout a commencé il y a une dizaine d’années, alors qu’elle n’était qu’une lycéenne. « Une amie m’a fait découvrir sa passion qui était la photo et j’ai tout de suite adoré. Je faisais des portraits de mes camarades presque tous les jours, des photos de couchers de soleil. Je photographiais tout ce que je voyais. Ça a été un amour fou direct avec la photo », se souvient-elle. Mais à la sortie du bac, la jeune fille n’ose pas embrasser une carrière de photographe. Elle est persuadée que son entourage ne la soutiendra pas. « Je m’étais moi-même mis dans la tête que je ne pouvais pas en faire mon métier car à Mayotte, tout ce qui est artistique n’est pas bien perçu de manière générale. »
Elle décide alors de s’orienter vers une licence Langues étrangères appliquées, mais au bout de deux ans, elle se réoriente vers un BTS MUC, Management des unités commerciales. Une fois de plus, elle ne va pas jusqu’au bout puisqu’elle n’aime pas ce qu’elle fait. Suite à cela, elle prend le temps de réfléchir et se lance enfin dans ce qui l’a toujours motivée. « J’ai dit à mes parents qu’il était hors de question que je retourne à l’école si ce n’est pas pour faire de la photo ! » raconte-t-elle. À sa grande surprise, ils l’ont immédiatement soutenue et l’ont même aidée financièrement. En 2018, elle entame un parcours de deux ans dans une école de photographe et obtient son diplôme tant convoité. Nahida est officiellement une photographe professionnelle, le rêve d’une vie se réalise. Et même si elle a mis du temps à atteindre cet objectif, elle ne regrette pas son parcours d’étudiante. « Tout ce que j’ai fait m’a permis de forger mon caractère. Je pense que j’ai fait cette école au bon moment. »
Nahida Ousseni Riziki n’est pas surprise d’être l’une des seules femmes photographes de l’île. Selon elle, plusieurs facteurs expliquent cela. « Je pense qu’elles ont la même inquiétude que moi au début, je me disais qu’on allait me juger. Les frais de scolarité pour une école de photographe peuvent aussi être un frein. Ma première année coûtait 6000 euros, à cela s’ajoute les dépenses de la vie. Ce sont mes parents et moi qui avons financé », indique-t-elle. Ce n’est qu’en deuxième année qu’elle demande une aide de financement auprès de la Direction des politiques scolaires et universitaires.
L’insécurité peut également décourager la gent féminine. Elle a d’ailleurs un impact dans l’activité de Nahida. « Contrairement à mes collègues hommes, je ne peux pas me permettre de trop traîner dehors. C’est risqué pour eux aussi, mais on sait tous qu’une femme est plus en danger. Donc quelquefois, je ne peux pas accepter certains contrats car les conditions de sécurité ne sont pas réunies, et cela me fait perdre des clients. » Malgré tout cela, la professionnelle souhaite qu’il y ait plus de femmes dans le milieu. « Certaines me demandent des conseils et je leur dis qu’il faut se lancer, ne pas avoir peur. Il y a beaucoup d’opportunités dans ce domaine et on a tous une touche à apporter qui nous différencie des autres. » Et pour Nahida, la peur de l’échec n’est pas une raison d’abandonner ses rêves. « Il y aura forcément des moments de doutes et c’est normal. Je doute encore de moi, mais il faut se donner une chance. Quand on échoue ce n’est pas grave, on recommence jusqu’à ce que l’on réussisse. » Son parcours est la preuve que l’on peut effectivement réussir avec de la volonté et du travail. n