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« JE PENSE QUE CLANDESTINITÉLA JOUE UN RÔLE IMPORTANT DANS CETTE VIOLENCE »
DEPUIS UNE DIZAINE D’ANNÉES, L’INSÉCURITÉ EST GRANDISSANTE À MAYOTTE. LES ACTES DE VANDALISME ET LES AGRESSIONS SONT DE PLUS EN PLUS VIOLENTS. ILS RYTHMENT ÉGALEMENT LE QUOTIDIEN DES HABITANTS DE L’ÎLE. UN PHÉNOMÈNE QUI S’EXPLIQUERAIT PAR L’IMMIGRATION CLANDESTINE ET L’ÉVOLUTION DE LA SOCIÉTÉ.
Mamoudzou », raconte Salim Mouhoutar. C’est le début du chaos pour les Mahoraises et Mahorais puisque les actes sont de plus en plus violents et leurs auteurs de plus en plus jeunes. Selon l’auteur-conférencier, ce phénomène s’explique en partie par les conditions de vie des personnes en situation irrégulière sur le territoire. « Je pense que la clandestinité joue un rôle important dans cette violence. Lorsque vous vivez dans la clandestinité administrative, on est menés à se débrouiller. Si à Mayotte, on était comme dans n’importe quelle autre région de France où les étrangers sont autorisés à exister, on aurait eu moins de violence. Mais chez nous l’étranger est bien là mais il n’a pas la possibilité d’exister », affirme-t-il avant d’ajouter que rien ne justifie la violence.
« Le premier phénomène de violence officielle a émergé en 1993 » , se souvient Salim Mouhoutar, auteur-conférencier et membre de l’Observatoire des violences de Mayotte ainsi que l’Observatoire pour la parentalité de l'océan Indien. À l’époque, des organisations syndicales revendiquaient une augmentation du salaire minimum. En marge de cela, des individus ont brûlé les locaux des services fiscaux, l’office du tourisme et la caisse de sécurité sociale. Après cela, les épisodes de violence sont ponctuels à Mayotte jusqu’en 2012. « Cette année marque un grand tournant. Un adolescent a été poursuivi par un groupe d’autres jeunes et a été poignardé au lycée Bamana à
L’AUTORITÉ TRADITIONNELLE N’EST PLUS ADAPTÉE
L’évolution de la société a également un rôle à jouer dans cette violence juvénile. Les schémas d’autorité traditionnels ne sont plus en adéquation avec la nouvelle génération. Il s’agit de la famille, de la communauté et de la religion qui régissaient le fonctionnement de la vie en société. Aujourd’hui ces trois institutions n’ont plus la même importance. « On passe d’une société qui était jadis collective et communautaire à une qui est individuelle. Avant la communauté primait sur l’individu, et on existait seulement si on appartenait à un groupe », rappelle le membre de l’Observatoire des violences de Mayotte. Ce qui n’est plus le cas de nos jours puisque l’individualisme a pris le dessus. La religion est également reléguée au second plan, pourtant les maires, le conseil départemental et même la préfecture ont souvent essayé d’inclure le cadi (autorité religieuse) dans les solutions de lutte contre la délinquance. « La religion ne fonctionne plus car nous ne sommes plus aussi spirituels qu’avant. Autrefois nous avions plein de croyances, les enfants allaient à l’école coranique pour apprendre l’islam mais aussi le respect, l’hygiène, les bonnes manières. Aujourd’hui ce n’est plus le cas et les parents ne compensent pas le travail que faisait l’école coranique », explique Salim Mouhoutar.
Le R Le Des Parents
La composition des familles a également évolué au fil des années. Les familles monoparentales sont plus nombreuses et ce sont souvent les mères qui s’occupent des enfants. « Les pères doivent prendre leurs responsabilités, qu’il soit avec la mère ou pas. Même s’ils sont ensemble, aujourd’hui le papa est comme un invité d’honneur chez sa femme. Il fait juste acte de présence », dénonce le professionnel. Il estime que les deux parents doivent « guider » leurs enfants dans la vie et les inciter à faire les bons choix. L’éducation est l’une des clés qui permettront à Mayotte de sortir de ce fléau de la violence. Mais cela ne suffira pas. Salim Mouhoutar préconise de créer ce qu’il appelle « le droit commun plus ou moins institutionnel ». Cela consiste à réduire l’inégalité sociale et « autoriser aux étrangers d’exister sur le territoire comme cela se fait en métropole. » Un point de vue qui ne fait pas l’unanimité à Mayotte et encore moins en France hexagonale.
JEUNESSE