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Un avocat à la défense du français
Plaideur coloré et habile communicateur, André a quitté un grand cabinet d’avocats afin de se consacrer à Druide informatique, la société spécialisée en intelligence artificielle linguistique qu’il a cofondée. Il orchestre depuis 1996 la commercialisation d’Antidote, le célèbre logiciel d’aide à la rédaction plébiscité par la presse de toute la francophonie.
André d’Orsonnens
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LL. B. 1983
Président du conseil et chef de la direction Druide informatique
Il n’y a pas que la revue Droit Montréal qui fête un 30e anniversaire. Il en va de même pour Druide informatique, la société fondée en 1993 par l’avocat André d’Orsonnens et les informaticiens Éric Brunelle et Bertrand Pelletier dans le but de mettre la puissance de l’ordinateur au service de la langue française. Autre anniversaire dans la vie d’André, voilà maintenant 40 ans qu’il a obtenu son baccalauréat de notre faculté.
« Je garde un excellent souvenir de mon passage à la Faculté, se remémore-t-il. J’y ai appris à poser les bonnes questions afin de bien cerner les multiples facettes d’un enjeu. Je m’y suis également fait des amis pour la vie. Je pense notamment à Paul-André Mathieu et à Pierre Trahan. Sans leur soutien pendant les premières années de Druide, sa trajectoire n’aurait pas été la même. »
En 1995, André d’Orsonnens s’apprête à quitter Heenan Blaikie pour préparer la commercialisation d’Antidote. Me Paul-André Mathieu sait que le budget très serré de Druide laisse peu de place à l’embauche d’un salarié additionnel. Il invite donc son ami à joindre son étude — dans un immeuble qu’il venait tout juste d’acheter et où Druide serait locataire. Cette invitation idéale allait permettre à André, pendant quelques années, de consacrer 80 % de son temps à Druide tout en rendant des services juridiques à quelques autres clients lui procurant 80 % de ses revenus.
Me Pierre Trahan, pour sa part, avait fondé sa première entreprise en 1984 : Cedarome Canada. Onze ans plus tard, cette société productrice d’huiles essentielles connaissait déjà beaucoup de succès, permettant ainsi à son fondateur de devenir un actionnaire influent de Druide. « J’ai été séduit par l’impact qu’Antidote allait avoir sur des compagnies comme la mienne. Je me souviens de m’être dit que lorsque mes employés s’expriment dans un français écrit de piètre qualité, cela rejaillit négativement sur l’image de ma société. Cela peut même en affecter la crédibilité ! Une solution comme Antidote était appelée à devenir incontournable. »
Un véritable Office de la langue française
Les correcteurs grammaticaux et les dictionnaires numériques existaient déjà. Mais personne n’avait pensé à rassembler ces ressources en un seul véritable logiciel d’aide à la rédaction du français.
« Dès sa première édition, Antidote réunissait un correcteur grammatical, un dictionnaire de définitions, un dictionnaire de conjugaison et une grammaire. Le tout en une interface unifiée de consultation et de présentation. Nous avons positionné Antidote comme étant à la langue française ce que les suites de type Office sont à la bureautique, explique André d’Orsonnens. Le marché a répondu avec enthousiasme à cette innovation. Et depuis, Druide n’a jamais cessé d’investir en recherche et développement, augmentant sans relâche la richesse de sa suite logicielle qui compte désormais une dizaine de dictionnaires et autant de guides linguistiques. Individuellement, chacun de ces ouvrages rivalise avec les meilleurs de sa catégorie. Ensemble, ils n’ont pas d’égal. »
Ce dont il est le plus fier
À cette question, le président du conseil et chef de la direction de Druide parle spontanément de la contribution de son entreprise à la collectivité. Il précise que parmi les millions d’utilisateurs et utilisatrices d’Antidote, bon nombre de ceux et celles qui éprouvent des troubles d’apprentissage écrivent désormais avec plaisir et assurance.
Il mentionne aussi un programme de don mis en œuvre par Druide au Canada, puis en Belgique et maintenant en France, qui consiste à remettre gratuitement une licence à une école pour 10 exemplaires vendus au détail.
Il s’attarde enfin au don d’un million de dollars à l’Université de Montréal — effectué à l’occasion des 20 ans d’Antidote — pour créer le Fonds Druide pour la recherche en analyse de texte.
En fait, depuis maintenant plusieurs années, l’engagement d’André envers la langue française et l’éducation dicte entièrement son action bénévole. Il est administrateur de la Fondation pour l’alphabétisation et gouverneur de la Fondation Paul Gérin-Lajoie, au profit de laquelle il organise un tournoi de golf annuel depuis 2009. Il préside aussi le comité de direction de la Chaire de recherche sur les apprentissages fondamentaux en littératie, créée en 2022 grâce à un don d’un million de dollars de Druide informatique à la Fondation de l’UQÀM pour contrer les difficultés d’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Enfin, il préside le conseil d’administration de l’École des entrepreneurs du Québec.
André d’Orsonnens a reçu, au nom de Druide, l’OCTAS de la Réussite commerciale pour le logiciel Antidote. L’Office québécois de la langue française lui a remis un Mérite pour souligner la contribution de Druide au rayonnement international du français. Sur une base plus personnelle, on lui a décerné le Mérite du Barreau de Montréal, Il a aussi été finaliste au Grand Prix de l’entrepreneur d’Ernst & Young en plus d’être élu PDG de l’année par ses pairs de l’Association québécoise des technologies. En 2016, il a reçu le Prix MÉRITIC – Honoris Causa devenant ainsi membre du Cercle des Grands Bâtisseurs québécois des TI. Plus récemment, l’Association des diplômés en droit de l’Université de Montréal lui a remis un de ses prix Distinction qui visent à honorer des diplômées et diplômés exceptionnels ayant contribué au rayonnement de la Faculté. n
30e numéro
Droit Montréal
L’ascension de Julien BriseBois (LL. B. 1999) vers les hautes sphères du sport
Marquer des points
Le diplômé Julien BriseBois est bien connu à titre de directeur général du club de hockey Lightning de Tampa Bay. Mais Julien a d’abord eu le coup de foudre pour le baseball et le droit des affaires avant d’amorcer sa carrière dans le hockey professionnel. Rencontre avec un passionné qui n’est pas près d’accrocher ses patins...
Quelle place occupait le sport dans votre vie avant d’entamer vos études universitaires ?
J’ai toujours été un passionné de sport. Enfant, j’étais principalement un amateur de baseball. D’ailleurs, lors de mes trois dernières années au secondaire, j’ai fait partie du programme sport-études baseball à l’école Édouard-Montpetit à Montréal. J’ai pratiqué le hockey, le football, le basketball, le tennis, le ski et le squash. Encore aujourd’hui, je m’entraîne régulièrement et j’ai développé un grand intérêt pour le pickleball depuis la pandémie. Pourquoi aviez-vous choisi d’étudier le droit ? À l’adolescence, mon plan A était de jouer au baseball professionnel. Mon plan B était de devenir avocat. La profession d’avocat me semblait stimulante intellectuellement et j’étais attiré par le fait qu’elle était exercée par plusieurs personnes d’influence dans la société. Pourriez-vous nous en dire plus sur votre parcours chez Heenan Blaikie ? Recommanderiez-vous à un étudiant ou une étudiante qui souhaite se faire une place dans le milieu du sport professionnel de commencer sa carrière dans un cabinet spécialisé en droit des affaires ?
J’ai travaillé chez Heenan Blaikie seulement pendant un peu plus de deux ans, mais ce fut la période la plus formatrice et la plus enrichissante de ma carrière. En partie parce que je commençais, donc j’avais tout à apprendre. Aussi, parce que c’était un environnement hyperstimulant. J’étais entouré d’avocats chevronnés et nous travaillions sur des dossiers très intéressants pour des clients très accomplis. Les associés m’ont délégué beaucoup de responsabilités très rapidement, ce qui m’a permis d’apprendre rapidement et de me faire valoir. Quant à savoir si un étudiant ou une étudiante désirant œuvrer dans le milieu du sport professionnel devrait commencer sa carrière en droit des affaires, ma suggestion serait plutôt de s’appliquer à devenir d’abord un excellent avocat ou une excellente avocate. C’est l’excellence de notre travail qui va ouvrir le plus de portes. La meilleure façon d’atteindre cet objectif est de travailler aux côtés d’avocates et avocats d’excellence et d’apprendre auprès d’eux. Comment avez-vous vécu votre transition entre la pratique privée à un poste aux affaires juridiques au sein des Canadiens de Montréal ?
J’étais très enthousiaste à l’idée de travailler pour une équipe de la Ligue nationale de hockey et de faire partie d’un groupe qui pouvait compétitionner pour remporter la coupe Stanley. J’étais également excité de me joindre à l’organisation des Canadiens, une des plus prestigieuses institutions du Québec. J’avais hâte de travailler au quotidien avec André Savard et Pierre Boivin qui étaient à l’époque respectivement directeur général et président de l’équipe. Je savais que j’allais apprendre beaucoup à leurs côtés et il était important pour moi de justifier la confiance qu’ils m’avaient démontrée en m’embauchant. J’étais également soulagé de ne plus avoir à remplir de feuilles de temps ! Et ensuite, votre ascension au sommet de la hiérarchie dans la Ligue nationale de hockey ? J’ai été chanceux d’avoir des patrons qui m’ont fait confiance et qui n’ont pas eu peur de me déléguer de plus en plus de responsabilités. Après avoir travaillé comme adjoint à André Savard, j’ai épaulé Bob Gainey lorsqu’il est devenu directeur général des Canadiens. Au fil du temps, Bob m’a donné des responsabilités qui m’ont permis de croître en tant qu’administrateur dans le monde du hockey professionnel. Puis, j’ai travaillé avec le directeur général Steve Yzerman à Tampa Bay, avant de me voir confier la fonction de directeur général lorsque Steve a délaissé son poste en 2018. Quelle est la place que le droit a occupée dans chacune de vos fonctions et comment vous ont-elles aidé dans votre cheminement ?
Lors de mes débuts au sein de l’organisation des Canadiens en 2001, 20 % de mon temps était alloué aux affaires de l’organisation en tant que conseiller juridique et 80 % aux opérations de hockey.
À l’été 2006, j’ai délaissé les responsabilités de la première fonction pour me consacrer entièrement aux opérations de hockey. Je n’ai pas pratiqué le droit depuis. Toutefois, la rigueur sur le plan de la communication et du raisonnement acquise lorsque j’ai travaillé comme jeune avocat me sert encore dans mes activités professionnelles aujourd’hui. Comment exercez-vous votre leadership dans un milieu aussi compétitif ? Quelle est la recette de votre succès ?
Je crois qu’un leader doit pouvoir clairement communiquer la mission du groupe, élaborer la stratégie à suivre pour remplir ladite mission, s’entourer des bonnes personnes pour exécuter la stratégie et procurer à ces personnes les ressources et le support nécessaires pour qu’elles puissent connaître du succès. J’ai été chanceux, tout au long de ma carrière, d’être entouré de collègues très performants. J’ai à la fois appris auprès d’eux et bénéficié de la qualité de leur travail. Comment on se sent d’avoir son nom inscrit deux fois sur la coupe Stanley et deux fois sur la coupe Calder ?
C’est un grand sentiment d’accomplissement chaque fois. Ce qui ajoute à l’intensité de l’émotion qui accompagne un championnat au hockey professionnel, c’est qu’il s’agit d’un exploit collectif et que le sentiment d’accomplissement est partagé avec tous les autres membres de l’organisation, avec nos proches et les partisans. Le sentiment de pur bonheur qui accompagne un championnat de la coupe Stanley est partagé avec toute une collectivité. C’est incomparable. Est-ce important pour vous de redonner à l’équipe de hockey féminin des Carabins ?
C’est important pour moi de redonner à l’Université de Montréal. En tant que diplômé ou diplômée, on a une responsabilité de faire rayonner l’université qui nous a donné les moyens de nos ambitions. Ici, au Québec, c’est une des plus grandes institutions du savoir au monde et la plus grande en français à l’extérieur de la France. Je suis content de pouvoir aider. Ce que j’espère vraiment, c’est inspirer d’autres diplômés et diplômées à faire des dons pour qu’on puisse bâtir sur cet important actif de la société québécoise qu’est l’Université de Montréal. Je suis très fier d’être associé à un programme réputé comme celui des Carabins. La progression et les succès qu’a connus son équipe de hockey féminin depuis ses débuts sont assez phénoménaux. Le hockey universitaire canadien représente l’excellence au sein de la pyramide du hockey féminin et les Carabins en sont une référence au pays.
Quels conseils donneriez-vous aux étudiants et étudiantes qui souhaitent laisser leur marque dans le milieu sportif ? Comment se distinguer ? Lorsqu’une organisation sportive affiche un poste à combler, il y a généralement des centaines de candidatures. Chaque candidate ou candidat est passionné, intelligent et travaillant. La clé est justement de trouver une façon de se distinguer, de contribuer différemment à l’organisation par rapport aux autres candidats et candidates. Lorsque j’ai été sélectionné pour faire un stage chez Heenan Blaikie, ce qui m’a différencié des autres, c’était que j’avais rédigé un article sur la relation contractuelle entre un athlète professionnel et son agent en vertu du droit québécois. L’article avait été publié dans la Revue juridique Thémis et c’est sur cette base que le cabinet avait vu en moi quelqu’un qui pouvait aider à démarrer une pratique en droit sportif. Lorsque les Canadiens m’ont embauché, initialement, c’était basé sur le fait que j’avais développé une expertise en matière de dossiers d’arbitrage salarial pour les équipes de la Ligue nationale alors que je pratiquais chez Heenan Blaikie. La publication des résultats d’une recherche sur un sujet relié au sport, par exemple sur des statistiques avancées, ou la publication d’un article touchant au droit sportif sont des façons de se distinguer et de développer un début d’expertise. n