Août 2018
Vivre, tout simplement
ÊTRE
créatif
INTERVIEW EXCLUSIVE FABIENNE VERDIER 6,50€
Une grande artiste à l'écoute du silence POTENTIEL
Atteindre l'excellence
Heartfulness Vivre, tout simplement
Rédaction – Meghana Anand, Sylvie Berti Rossi, Genia Catala, Elizabeth Denley, Emma Ivaturi Graphisme – Hélène Camilleri, Emma Ivaturi, Uma Maheswari Traduction – Marianne et Jean-Pierre Baillon, Genia Catala, Sandrine Delacroix, François Déroulède, Sylvie Galland, Clara Gambier, Lucie Hautefeuille, Marie Laure Lagrange, Beba Marantz, Nathalie Moulis, Michelle Pain-Orcet, Vincent Scarito Photographies – Martin Adams, Darren Coleshill, Inès Dielema, Anastasiya Domnitch, Kaylee Eden, Katya Havok, Simonne Holm, Stephen Leonardi, Leila Press, Zachary Nelson, Laure Vasconi, Luna Vandoorne, Gianandrea Villa Illustrations – Elana Casey, Vimal Kumar, Kate Martin, Kaylan Michael, Humna Mustafa, Youheum Son, Fabienne Verdier Contributeurs – Laurie Buchanan, Elana Casey, Elizabeth Denley, Snehal Deshpande, Priyadarshini G., Simonne Holm, Vimal Kumar, Kate Martin, Kaylan Michael, Humna Mustafa, Kamlesh Patel, Parthasarathi Rajagopalachari, Clara Smith, Ravi Venkatesan Interviewés – Jean Appleby, Gary Huber, Fabienne Verdier
ISSN : 2491-2255 N° CPPAP : 0419 K 93360
Envoi des contributions et correspondance avec la rédaction en français, magazine@unimeo.com – en anglais, contributions@heartfulnessmagazine.com Publicité – en français, magazine@unimeo.com ; en anglais, advertising@heartfulnessmagazine.com Abonnements – en français, www.unimeo.com ; en anglais, www.heartfulnessmagazine.com Impression – Aumüller Druck, GmbH & Co. KG, Weidener Straße 2, D-93057 Regensburg Publication – Unimeo, 5 Esplanade Compans Caffarelli, 31000 Toulouse Droits d'impression, publication, distribution, vente, sponsoring et perception des recettes réservés à l'éditeur 2018 © Tous droits réservés à Unimeo Éditeur – Unimeo
www.heartfulness-magazine.fr Les termes « Heartfulness, Relaxation Heartfulness, Sahaj Marg Spirituality Foundation, SMSF », les logos « Learn to Meditate »
et « Heartfulness » sont des marques déposées par la Sahaj Marg Spirituality Foundation. Aucune partie de ce magazine ne peut être reproduite sous quelque forme ou moyen que ce soit sans autorisation écrite préalable. Le nom de domaine www.fr.heartfulness.org est également la propriété de l'Institut Heartfulness.
Les opinions exprimées dans les articles de ce magazine ne reflètent pas toujours celles de la rédaction, de l'Institut Heartfulness ou de la Sahaj Marg Spirituality Foundation.
À la source de notre créativité Prenez quelques instants pour faire une pause et regarder autour de vous. Avez-vous jamais vu deux nuages de la même forme dans le ciel ? Ou deux feuilles du même vert sur un arbre ?
Chaque flocon de neige est unique, tout comme les rayures des zèbres, les taches des léopards
et les empreintes digitales des humains. Cette richesse, cette diversité des formes, n’est pas
seulement l’expression de la créativité de la nature – elle est son essence même. Or nous faisons partie de la nature, et nous portons son essence en nous.
Ce numéro nous fait explorer la créativité sous de multiples facettes. À commencer par l’in-
terview exclusive de la peintre française Fabienne Verdier, qui nous accueille dans son univers unique et très particulier. Parallèlement, d’autres artistes nous font découvrir leurs œuvres et partagent les étapes de leur processus de création.
Mais certains de nos contributeurs s’intéressent à la source de la créativité, à la pensée qui,
telle une graine, porte en elle notre future réalité. Dans sa série sur l’ashtanga yoga, Kamlesh
Patel nous mène au cœur de la pratique du yoga, pour plonger profondément dans dhyana, la méditation, vers ce centre intérieur qui est la source de notre être, et la source de notre créativité. La rédaction
Aoû t 2018
04
20
focus Points de vue
Q&R sur la créativité
6
Attitude
Synergie Encourager nos potentialités.
8
Espace de création Humna Mustafa
11
ça change tout Éduquer
L’importance du lien parent-enfant
22
Être artiste
Stimuler son potentiel
L’inspiration
Nous sommes tous des créatifs
Jean Appleby partage sa longue expérience de la création et ses talents d’enseignante qui ont permis à tant d’adultes et d’enfants d’accéder à la créativité.
12
Espace de création Asha Elana Casey
15
25
Agir autrement
Une pensée-semence
Le négociateur Heartfulness
Parthasarathi Rajagopalachari
30
La puissance d’une graine
16
Espace de création Vimal Kumar
19
7e partie
Espace de création Kate Martin
33
34
l’interview Fabienne Verdier Cette artiste française hors du commun a vécu dix ans en Chine pour s’initier à l’art millénaire de la calligraphie auprès de grands maîtres. De cette expérience forte et exigeante est né un langage pictural original où s’exprime le mouvement de la vie.
36
46
58
être inspiré
le goût de la vie
La science de la spiritualité
Ashtanga Yoga Samyama, 3e partie Kamlesh Patel nous explique les différents niveaux de samadhi, et comment la méditation peut nous aider à nous approcher de notre état originel.
48
Se dépasser
Libérez le potentiel qui sommeille en vous!
56
Médecine intégrative
Médecine et méditation Gary Huber nous rappelle que la santé découle d’une hygiène de vie bien équilibrée.
60
Espace de création Kaylan Michael
67
Cuisine alcaline
Smoothie
68
Yogasanas Heartfulness
Pachimottanasana La posture de l’étirement de l’ouest
70
Le billet de Daaji
Spiritualité vs religion
72
quoi d’neuf ? 74
focus C RÉ AT I V I T É
Le processus crÊatif est un processus d’abandon, pas de contrôle. Julia Cameron
Q & R
Créativité
6
Co m m ent exp loi tez-vou s votre p otenti el c réati f ? Co m m ent la c réati vi té s’exp r i m e-t-elle en vou s ? Qu e l l es s o nt vos a st u ces p o u r cu l t i ve r l a c ré a t i v i té et l ’i n novati on ?
YOUHEU M SO N Illustratrice-Designer (@yson.art) New York, USA Pour nourrir ma créativité, je pratique ce qui me donne de la joie et du bonheur. J’aime partir en randonnée, être en contact physique avec la terre. J’apprécie également les rituels quotidiens comme le yoga, la méditation, la cuisine, les caresses au chat, la lecture et les moments de partage avec ma famille. J’adore me
He ar tf u ln ess
plonger dans ces expériences et ces moments précieux qui deviennent souvent les sujets de mon travail. Je trouve important de vivre en relation avec la nature et de trouver de nouvelles façons de fonctionner pour réduire les déchets et aider notre Terre à guérir. Je me suis lancée dans certains changements, comme habiter dans un espace minuscule, vivre avec le minimum, ne pas encourager la production de masse et passer à un style de vie sans déchets et sans plastique. J’aime fabriquer mon propre dentifrice écologique, faire la lessive à la main et partager mes trouvailles. La chose la plus importante pour moi est d’apprendre à être présente à mon moi intérieur et à ne plus cacher mes imperfections aux autres. Un changement a eu lieu et je suis devenue plus ouverte émotionnellement et plus créative, en me concentrant moins sur mes vulnérabilités et mes manques. Cette transition m’a aidée à nourrir mon esprit et mon énergie créative.
Po i nt s d e v u e
SAVI TH R I SUBASH Élève du premier cycle du secondaire Chennai, Inde Mon esprit est comme une planche à dessin ; j’ai constamment des images qui me viennent. Mais parfois je ne suis pas capable de leur donner vie sur du papier, parce que je suis encore jeune et qu’il me reste à apprendre les techniques d’expression. Cela devient parfois extrêmement frustrant. Je peux passer des mois sans même regarder ou penser à mon art parce que je suis bouleversée et en colère, et cela bloque mon désir de créer. J’ai maintenant commencé à chercher des outils et à rencontrer d’autres artistes qui m’inspirent et m’aident à surmonter ces obstacles, et les choses se font plus fluides. Je m’exprime surtout par le dessin et la peinture. Les livres et les chansons sont ma principale source d’inspiration. Quand je lis un ro-
man, les personnages et l’intrigue commencent à danser devant mes yeux et à former une image. Pour la musique, les émotions et les sentiments d’une chanson me pénètrent, la perception de ce que j’entends émerge et je la traduis en un dessin ou une peinture. Le plus important est de faire confiance à mon instinct et à mes sentiments, parce qu’ils sont la base de tout travail créatif. Plus j’ai confiance en moi, mieux je peux m’exprimer d’une manière qui sort des sentiers battus.
P. BA L AM U R U GAN Étudiant bénéficiant d’une bourse Heartfulness
culier, je suis tenté d’en savoir plus et cette curiosité amène des idées novatrices. À mon avis, l’intérêt est la clé de toute chose, et j’exploite mon potentiel créatif en me concentrant sur ce qui me passionne. Pour mon projet final d’études de troisième cycle, j’avais envie de faire quelque chose de créatif, mais sans savoir comment m’y prendre. Il m’est venu l’idée d’une feuille comme concept de base, et cette pensée m’a donné un point d’ancrage sur lequel travailler et a aiguisé ma curiosité. Je me suis mis à planifier et à faire des recherches sur le design de la feuille. J’ai recueilli beaucoup d’informations qui m’ont donné une vision claire sur la façon de procéder, et finalement j’ai réalisé une merveilleuse station de travail basée sur le concept de la feuille. C’est devenu une habitude : chaque fois que j’ai une pensée créative, je la creuse et l’élabore selon le processus pensée-idée-curiosité-projet-recherche-vision-action. C’est ainsi que la créativité s’exprime en moi. Pour être créatif, il faut développer de l’intérêt. La lecture, l’écoute et les recherches stimulent la créativité. Et l’introspection et la méditation contribuent à nous révéler les choses intérieurement.
La créativité existe en chacun de nous. Lorsque je m’intéresse à un domaine ou à une activité en parti-
Aoû t 2018
7
Synergie Il vaut mieux penser et espérer du bien de ce monde, parce que celui qui pense ainsi échappe à ce monde et crée celui dans lequel il vit. Ralph Waldo Emerson
At t i t u d e
ELIZABETH DENLEY évoque l’impact de nos attitudes positives ou négatives dans nos rapports avec les autres et suggère des pistes pour développer des liens qui nous renforcent et nous enrichissent mutuellement, que ce soit dans le milieu familial, sur le lieu de travail ou en société.
I
ntelligence sociale. Intelligence émotionnelle. Travail d’équipe. Coopération. Harmonie. Intégration de différentes perspectives. Communication efficace. Confiance et respect mutuels. Aujourd’hui, ces qualités sont reconnues comme de super-compétences par le monde de l’entreprise. Bien qu’il soit positif de les voir de plus en plus valorisées dans la culture d’entreprise, il semble assez ridicule que nous ayons dû attendre la confirmation des scientifiques et des psychologues pour reconnaître que l’intelligence émotionnelle est souhaitable pour réussir dans le monde de l’entreprise. N’était-ce pas de tout temps une évidence ? De fait, ces qualités ne sont ni très évoluées ni particulièrement dignes d’éloges. Elles sont simplement des devoirs humains fondamentaux pour vivre les uns avec les autres. Elles apparaissent dans les codes de conduite établis au fil des siècles par toutes les cultures : la voie octuple du bouddhisme, les soutras du yoga, le Coran, la Bible, le Talmud et bien des codes indigènes. Ces prescriptions nous rappellent la nécessité de l’harmonie, de la fraternité et de la paix, à la base du fonctionnement de la société humaine – et pourtant le
monde d’aujourd’hui est toujours en proie aux conflits et aux inégalités. Cultiver ces caractéristiques nous permettrait déjà d’arriver à la coexistence pacifique. Mais je pense que nous devrions placer la barre plus haut. Vivre en paix les uns avec les autres ne suffit pas, il faudrait développer un niveau plus profond de conscience collective – ce qui est du domaine de la synergie. Il y a synergie lorsqu’ensemble nous produisons un effet combiné supérieur à la somme de nos efforts individuels. Dans la synergie, nous accroissons nos compétences et nous nous donnons de la force mutuellement. Comme en physique, lorsque deux ondes ont la même fréquence et qu’elles sont en phase, elles s’amplifient l’une l’autre, créant une onde de plus grande amplitude que chacune d’elles séparément – tandis que lorsqu’elles ne sont pas en phase, elles s’annulent mutuellement. Et si on utilisait cette analogie pour comprendre comment travailler en équipe ? Par exemple, que se passe-t-il lorsque nous accentuons les talents et les compétences des autres et gommons leurs faiblesses ? Et que se passe-t-il – comme cela arrive trop souvent – lorsque nous amplifions les faiblesses des autres et annulons
Aoû t 2018
9
At t i t u d e
leurs talents et leurs compétences par nos jugements et nos critiques ? Nos attitudes positives ou négatives peuvent avoir de grandes répercussions. Pour grandir ensemble et prospérer, nous devons nous soutenir les uns les autres. Chacun de nous a un génie
10
He ar tf u ln ess
particulier qui peut se développer ou être annihilé. Et pour qu’une société humaine s’épanouisse vraiment, le génie de chaque pièce du puzzle humain doit se développer et se manifester. La conscience qui favorise le développement et la synergie s’exprime de façon particulièrement éclairante dans cette phrase de Ram Chandra de Shahjahanpur : « Il n’y a rien de mal à penser que vous êtes remarquable, mais pensez toujours que l’autre en face de vous l’est plus encore. » La pratique la plus efficace pour favoriser la synergie est donc de toujours se concentrer sur le potentiel des autres plutôt que sur leurs limites manifestes. Faites confiance à ce potentiel. Visualisez cet objectif de façon bien concrète. Ce principe s’applique aussi bien à l’éducation des enfants qu’aux relations entre adultes. Ils se sentiront à la fois honorés et soutenus par votre attitude. Mais surtout faites confiance au potentiel qui est en vous ! L’effet d’entraînement fonctionnera. Comment faire confiance à son propre potentiel ? C’est là que la méditation entre en jeu – plus vous découvrez votre potentiel intérieur, plus il vous est facile de lui faire confiance et de le laisser briller. En nous efforçant chacun de placer la barre toujours plus haut, nous pouvons nous aider les uns les autres à faire de même. Et créer ainsi une grande boucle de rétroaction positive !
Embrace W H AT I S Avec un diplôme en dessin de textile et un vif intérêt pour l'art traditionnel du henné, HUMNA MUSTAFA a commencé son voyage professionnel il y a environ 20 ans. Elle a grandi au MoyenOrient et s'est installée en Australie où elle a longuement expérimenté et développé son art. Elle choisit de vivre selon les paroles de Picasso : « Le sens de la vie est de trouver son don, le but de la vie est de le partager. » Instagaram@humnamustafa
Mon art est vraiment ce que je ressens. Il est personnel, vrai, c’est tout simplement le reflet de moi-même au moment où je crée. Quand je dessine sur le corps d’une personne avec du henné, je commence par créer des motifs qui reflètent son énergie. Ensuite, revenue dans mon espace, j’utilise ces éléments pour raconter ma propre histoire sur le papier. La guérison que je procure aux gens grâce au henné est ma source d’inspiration. Au-delà de sa peau, je regarde plus profondément dans la personne, pour raconter son histoire dans des dessins qui l’aident à laisser le passé s’en aller, à faire face au présent et à se préparer à l’avenir.
Plus je me connecte aux gens, en voyant leur énergie à travers mes dessins, plus je me connecte à mon vrai moi. Je suis tombée sur le mot gallois hiraeth, qui signifie « nostalgie », ou plus communément « mal du pays ». C’est devenu pour moi la définition de ce que je ressentais ; en rassemblant mes idées, j’ai pu me voir au fil des ans et découvrir ce qui se trouve vraiment au cœur de mon être. Dans « Embrace what is » j’ai choisi le paon mâle. Par le langage des images, le tableau encourage à ne pas regarder plus loin, ne pas chercher davantage, ne pas avoir besoin de beaucoup de choses, et à embrasser ce qui est. Sans agitation ni désir de s’envoler n’importe où, il est possible de rester tranquille et de simplement prendre plaisir à la sensation d’être. Il s’agit vraiment de créer un foyer en soi, avant de le créer en ce monde, car lorsque le foyer est à l’intérieur, le monde en devient un lui aussi, et cela nous permet d’embrasser ce qui est.
NOUS SOMMES TOUS
G. PRIYADARSHINI apprend depuis longtemps à cultiver sa créativité. Elle nous fait part de certaines astuces qui ont fonctionné pour elle dans cette découverte et raconte son apprentissage du processus créatif.
12
He ar tf u ln ess
St i m u l e r so n pote nt i e l
sur lui. Pour moi, cela signifie que tout ce qui se trouve dans notre espace mental peut se manifester dans la réalité, si on le stimule. Alors :
D
’ où nous viennent les idées ? J’ai beaucoup réfléchi à la question dernièrement. La créativité, ce n’est pas de la pensée ni du raisonnement logique – en tout cas, pas seulement – c’est quelque chose de viscéral, c’est en nous, c’est une part de qui nous sommes. Et si on veut améliorer sa créativité, il faut développer ses sensations, sa réceptivité. La connaissance et l’imagination aident à libérer ce potentiel, et elles sont présentes en nous. Pour les rendre disponibles, ajoutez-y la bonne attitude et… la créativité émerge ! Selon la première loi de Newton, un corps au repos restera au repos à moins qu’une force extérieure n’agisse
Aoû t 2018
Si des idées vous habitent, aidez-les à sortir. Au lieu d’attendre que les choses arrivent, faites en sorte qu’elles se manifestent. Faites des expériences tous les jours. Même un travail simple peut être une expérience – essayez de le voir comme ça. Apprenez à vous détacher des résultats et des imperfections, alors plus que jamais votre créativité se manifestera. 13
Stim u l e r so n pote nt i e l
J’ai choisi d’être enseignante auprès de jeunes enfants, principalement pour observer comment les enfants absorbent les choses, et c’est ainsi que j’ai découvert qu’ils expriment de la créativité dans chaque petite chose qu’ils font.
J’aime motiver les gens autour de moi et les pousser à mettre leurs pensées en actes. Pour ce faire et contribuer à l’évolution de la société, j’ai commencé à travailler avec de jeunes enfants. J’ai choisi le travail d’enseignante, principalement pour observer comment les enfants absorbent les choses, et c’est ainsi que j’ai découvert qu’ils expriment de la créativité dans chaque petite chose qu’ils font. Le fait d’être avec eux crée un espace vibrant, qui me pousse à être créative – chanter des chansons, jouer de la musique, dessiner, peindre, faire du bricolage, fabriquer des poupées avec de la laine, etc. J’ai du plaisir à être créative dans chacune de mes actions.
Se désintoxiquer du numérique
Voici ce que chacun de nous peut faire pour trouver de nouvelles idées :
La plupart des innovations nous viennent quand nous relions et combinons des idées. Alors, partagez vos idées et respectez les idées des autres quand ils les partagent.
Passer chaque jour du temps en plein air Cela peut être une simple promenade de dix à quinze minutes. Respirez profondément et prenez plaisir à découvrir votre environnement et observer la nature. Cela peut vous aider à vous connecter plus profondément à vous-même.
14
Éloignez-vous de tous vos appareils pendant un moment de la journée et voyez la différence.
Méditer C’est un outil essentiel qui renforce la créativité et l’innovation, car nous apprenons à voir clairement ce qui se passe à l’intérieur de nous.
Célébrer les grandes idées, quelle que soit la personne à qui elles sont venues
La créativité et l’esprit d’innovation sont en nous, comme un moteur… à nous de le faire démarrer !
He ar tf u ln ess
Handirubvi I N B LU E ASHA ELANA CASEY est une artiste contemporaine qui pratique la technique mixte ; elle enseigne également l’art. Dans sa création, elle développe l’idée que la spiritualité peut être une source de guérison pour les personnes d’origine africaine. Elle vit et travaille actuellement à Washington, DC. Pour plus d’informations, visitez son site www.elanacaseystudio.com.
En créant « Handirubvi in Blue », je songeais aux implications spirituelles du bleu dans les religions du monde. Je repensais surtout au lapis-lazuli, à la vénération dont on l’entourait, et au sens de la mandorle, dans le christianisme. En faisant cohabiter de nombreux symboles issus de différentes religions, j’espère créer un art capable d’offrir un lieu de guérison pour les personnes d’ascendance africaine. En général, j’amalgame des symboles utilisés dans les pratiques spirituelles des peuples africains, dont la plupart proviennent des cosmogonies Akan, Ifa et
chrétienne. Je fais appel à ces symboles pour représenter les femmes comme des divinités, des ouvrières de la spiritualité, des chercheuses d’illumination et des ancêtres. La vénération des ancêtres et les cosmogrammes imprègnent cette œuvre. Les cosmogrammes prennent la forme d’abstractions géométriques. Ils illustrent la méditation, la guérison intérieure et sont une interprétation visuelle de l’univers. Divers textes d’auteurs et de féministes afro-américains influencent également mon processus de création.
La puissance d’une graine
16
He ar tf u ln ess
Un e pe n sé e-se me n c e
PARTHASARATHI RAJAGOPALACHARI (19272014) aborde des questions séculaires sur la création et la créativité, et évoque la façon dont nous pouvons cultiver des idées-semences pour faire naître ce qui est unique et nouveau.
M
on guide spirituel m’a dit un jour : « Il y a une question sur laquelle butent depuis toujours les philosophes du monde entier : qui est arrivé en premier, l’œuf ou la poule ? La graine ou l’arbre ? » Il a ajouté : « Dieu n’est pas stupide au point de créer un arbre, quand il peut produire une graine qui a le potentiel d’en devenir un ! » La science occidentale a trébuché sur cette vérité – ou ce secret – en parlant de l’atome primitif à l’origine de tout notre univers. Un jour, cet univers se rétractera, s’affaissera sur lui-même et retournera à l’état de graine, dans un mouvement de balancier perpétuel. C’est la danse de Shiva, comme on l’appelle dans la mythologie hindoue – création, destruction, création. Ce n’est rien d’autre que l’effondrement de la totalité en elle-même, qui deviendra semence pour la création suivante. Ainsi, ce qui nous est donné sous forme de graine est un cadeau. Je me souviens d’un conte pour enfants
Aoû t 2018
à propos d’un homme riche qui avait trois fils. L’aîné était avare, le deuxième, cupide et le troisième, patient et travailleur. Quand le vieil homme mourut, ils découvrirent dans son testament qu’il léguait ses usines au premier, son argent au deuxième, et au plus jeune un paquet de semences. Au moment du partage, tout le monde pensa que c’était très injuste. Le vieil homme devait être stupide pour avoir traité ses enfants aussi inégalement, surtout le plus jeune, avec ce sachet de graines. Pourtant, c’est lui qui devint célèbre : avec ces graines il fit pousser des forêts immenses, qu’il exploita pour vendre du bois, ce qui lui procura en définitive tout ce que la richesse peut apporter. La finalité d’un arbre est de produire à nouveau des graines, les graines tombent sur le sol et deviennent à leur tour des arbres. À supposer qu’un arbre se reproduise par simple multiplication, qu’arriverait-il ? Il n’y aurait pas de beauté, il n’y aurait pas de création, pas de
17
Un e pe n sé e-se m e n c e
C’est du rien que tout provient. De quelque chose, il ne peut venir que quelque chose. C’est une équation fondamentale. Quelque chose ne peut donner lieu qu’à quelque chose. Alors que le rien recèle la possibilité du tout.
18
nouveauté, pas d’originalité, pas de changement. C’est dans le passage créatif d’une graine à un sujet adulte – qu’il s’agisse d’une plante, d’un animal, d’un être humain ou même d’un univers – que se trouve la possibilité d’un changement. En termes de biologie, c’est là que peut se produire une mutation. Quand on fabrique des clones, il n’y a jamais de mutation, il n’y a jamais de changement. La diversité ne vient pas de ce que Dieu a créé des variétés différentes, mais de ce qu’il a produit des graines en leur donnant la capacité de se modifier, d’évoluer sous l’influence des circonstances extérieures, et c’est cela qui rend chaque croissance unique. Par conséquent, l’unicité provient de ces petits cadeaux que sont les graines. Nous pouvons nous aussi entreprendre d’exprimer ce qui est caché en nous sous forme de graine. Dans une histoire tirée de la Brihadaranyaka Upanishad, un garçon voit une graine coupée en deux et dit : « Il n’y a rien à l’intérieur. » Le rishi lui répond : « C’est de ce rien qu’est sorti cet arbre. » Ainsi, c’est du rien que tout provient. De quelque chose, il ne peut venir que quelque chose. C’est une équation fondamentale. Quelque chose ne peut donner lieu qu’à quelque chose. Alors que le rien recèle la possibilité du tout. Q u’e s t - c e q u i s o r t d e l a graine ? Un foisonnement. Qu’est-ce que ce foisonnement produit ? Simplement d’autres graines, là encore afin de générer l’abondance. Une pensée-semence doit se multiplier.
He ar tf u ln ess
Sinon, on n’irait pas acheter des graines. Qui donc achèterait des gerbes de céréales et les planterait dans son jardin, pour le seul plaisir de les couper et de les battre ? L’ effort doit donc plus porter sur la recherche de la bonne graine que sur son développement. Quelle graine dois-je utiliser ? Quelle penséesemence devrais-je planter ? Quelle pensée-semence m’aidera à développer ce qui est nécessaire ici ? Il est bien connu que l’on ne peut pas planter des chênes là où poussent les manguiers. Il faut donc sélectionner la bonne graine ! Je connais beaucoup de gens qui s’intéressent au jardinage, et si l’un d’eux émet un doute au moment où il plante ses graines : « Je me demande lesquelles vont pousser… », rien ne vient. Puis il y en a d’autres qui ne connaissent pas la botanique, la zoologie, les semences, ni la science du sol. Ils plantent leurs graines avec amour, arrosent tendrement leur jardin, et tout prospère. Nous disons qu’ils ont la main verte – en fait ils ont un cœur aimant. Qu’est-ce que la main verte ? C’est l’amour qui, avec l’eau, coule jusqu’à la graine. La graine pousse en réponse à cet amour. Alors, quand vous recevez des graines en cadeau, soignez-les avec délicatesse, avec amour et attention. Arrosez-les avec patience et laissez-les croître à leur rythme.
Extraits d’une conférence intitulée The potency of a seed, La puissance d’une graine.
SPIRIT
self
VIMAL KUMAR est un artiste singapourien multidisciplinaire dont les œuvres s’inspirent souvent de thèmes liés à la culture, l’ethnicité, la spiritualité et l’écologie. Il travaille avec des moyens traditionnels, comme l’huile, la gouache et l’encre. Depuis peu, il en explore d’autres, en particulier la photographie et la peinture numérique. Instagram @vamsidhari.art
« Spirit Self » est une représentation imaginaire de divers aspects de mon moi spirituel, ce qui en fait un autoportrait inhabituel. La teinte turquoise de la peau évoque le sentiment de profondeur et d’omniprésence que nous donnent le ciel et l’océan : et je trouve mon moi intérieur au cœur de mon corps mortel. Le troisième œil symbolise ma capacité à percevoir des choses qui restent invisibles aux yeux physiques ; il manifeste l’ouverture de l’intuitivité et de la conscience de soi. Les lotus en boutons représentent la paix, le calme et la fraîcheur qui me viennent éternellement de l’intérieur. L’arc-en-ciel illuminé est l’équilibre complet de mes
énergies dans mon corps subtil. Je me vois comme un être calme, serein et épanoui, rempli d’une énergie pure, vibrante et expansive. Il s’agit là d’un processus méditatif qui cherche à faire surgir nos qualités positives, en les aidant à passer de notre nature intérieure au corps physique qui les manifeste à l’extérieur. J’ai choisi la peinture à l’huile pour obtenir les textures et les tons que je voulais dans la disposition des diverses couleurs. Puisqu’il n’y a pas de limites à l’imaginaire créatif, je lui ai laissé toute liberté en peignant mon esprit intérieur de la façon dont je le vois.
รงa
change
tout
Laissez l’espace entrer au sein de votre union, et que les vents du ciel dansent entre vous. Aimez-vous l’un l’autre mais ne faites pas de l’amour une chaîne. Qu’il soit plutôt une mer qui se laisse bercer entre les rivages de vos âmes. Khalil Gibran
L’importance du lien parent-enfant Qu’est-ce que votre enfant attend réellement de vous ? Que signifie pour vous « être avec votre enfant » ? SNEHAL DESHPANDE nous parle des premières années de formation, et insiste sur l’importance du lien affectif pour le développement général de l’enfant.
A
shwin est un enfant de trois ans que j’ai vu aujourd’hui dans mon cabinet avec ses parents. Sa maman occupe un poste élevé dans les ressources humaines d’une société multinationale et son papa est banquier d’affaires. Ils ont récemment découvert qu’Ashwin ne parlait pas et ne créait aucun contact visuel. Il est confié à la garde d’une nounou qui passe le plus clair de son temps sur son téléphone
22
portable. Le petit garçon répète de façon distincte les dialogues du « cochon Peppa » et imite également le personnage de Doremon. Il joue avec des petites voitures et d’autres jouets qu’il aligne. Il aime tourner sur luimême et regarder le ventilateur au plafond. Il évite le contact visuel et n’aime pas engager une conversation. C’est un scénario courant dans de nombreuses familles aujourd’hui. En tant que thérapeute, je rencontre beaucoup d’enfants anxieux et insécurisés. Qu’est-ce qui mène à cela ? Le manque de lien ou d’attachement entre l’enfant et la personne qui s’occupe de lui. Celle-ci n’a pas conscience de ce qui sécurise l’enfant. Le psychanalyste britannique John Bowlby est un pionnier de l’étude des liens affectifs. Sa théorie de l’attachement montre comment les bébés s’attachent à leur mère pour des raisons de survie, et décrit également les effets de la privation de ce lien sur les nourrissons. Ceux-ci s’attachent aux adultes qui sont sensibles et attentifs, qui répondent à leurs besoins et prennent
He ar tf u ln ess
soin d’eux de façon suivie entre 6 mois et 2 ans. Les réponses des parents permettent à l’enfant de créer des schémas d’attachement menant à la construction de modèles intérieurs qui plus tard détermineront ses sentiments, ses pensées et ses attentes dans la vie et dans les relations. Dans une situation normale, le cortex préfrontal se développe durant les deux premières années de la vie, et favorise la création de stratégies de résilience. C’est aussi via ce cortex que se construit chez l’enfant un sentiment de sécurité qui contribue à un développement sain, à une capacité d’autorégulation et à la confiance en soi. Des parents qui répondent aux besoins de l’enfant lui donnent un sentiment de sécurité, de confiance, d’importance et d’appartenance, et tous ces facteurs réunis créent en lui un sentiment de compétence. Dans son livre Self-Reg, le docteur Stuart Shanker explique que les interactions sociales entre les parents et le bébé passent par les expressions du visage, la ges-
Aoû t 2018
Les réponses des parents permettent à l ’enfant de créer des schémas d ’attachement menant à la construction de modèles intérieurs qui plus tard détermineront ses sentiments, ses pensées et ses attentes dans la vie et dans les relations.
23
Éd u q u e r
tuelle, la posture et le son de la voix. Il relève que ces interactions vont au-delà d’une simple compréhension mutuelle. « Il s’agit d’un processus de co-régulation bien plus primitif, dans lequel chacun répond par un comportement automatique, une réaction viscérale, à ce que l’autre ressent. En fait il s’agit des fondements de la lecture de pensées, c’est-à-dire la capacité de savoir ce que l’autre pense ou ressent, à partir du langage corporel. » Les deux premières années de la vie sont une période d’intense développement des capacités sensorielles et d’assimilation de l’enfant. Elles sont déterminantes pour son avenir. La découverte des neurones miroirs par les neuroscientifiques est un bon exemple d’application de données scientifiques à la démarche clinique. Les neurones miroirs nous aident à capter les sentiments et les émotions d’une autre personne et seraient en fait à la base de l’empathie. Quand nous observons le langage non verbal d’un autre, nos neurones miroirs sont activés ; ils reproduisent ce que nous voyons et envoient ces signaux au cortex insulaire, ce qui nous fait ressentir ce que l’autre ressent. Il est donc vital que nous comprenions que les enfants ont besoin de notre présence et de notre affection de façon régulière pendant leurs deux premières années, qui sont les années formatrices de la vie.
VOICI QUELQUES SUGGESTIONS : Créez un lien solide avec votre bébé. Les premiers mois sont les plus propices à la création d’un lien qui durera toute la vie. Remplissez-vous d’un sentiment d’amour, de sécurité et d’appartenance. Vous pouvez partager ce qui vous habite. L’ a nxiété d’un parent est ressentie par le petit. Il en va de même pour la joie. Si le parent est joyeux, le petit le sera aussi. Ces sentiments sont tout de suite perçus par le cortex préfrontal de l’enfant, et auront un impact considérable sur la régulation des émotions, de la motivation, de la récompense et de l’empathie.
24
Remplacez le temps passé sur les tablettes électroniques et autres médias par du temps partagé. En prenant le temps de parler à votre enfant, vous augmentez sa capacité d’attention. Les gestes aussi sont stimulants et poussent l’enfant à l’action, comme chanter et danser ensemble, par exemple. Renseignez-vous sur les différents stades de développement chez l’enfant et choisissez des jouets adaptés à son âge. Lorsque vous confiez votre enfant à une nounou, assurez-vous qu’elle a de l’expérience et saura répondre aux besoins émotionnels de votre enfant de façon à encourager son développement et sa faculté de se connecter à l’autre. Dans le lien parents-enfants, la socialisation est essentielle pour que les enfants développent naturellement des compétences dans la conversation et la communication. Faites des promenades dans la nature avec votre enfant. Faites jouer les enfants avec des matières naturelles, comme l’eau, la terre, l’argile, afin qu’ils révèlent leurs talents et leurs compétences. Encouragez les grands-parents à passer du temps avec vos enfants. Evitez d’exposer les jeunes enfants aux gadgets électroniques. Rien ne peut remplacer l’éducation donnée par une mère attentive et aimante. RÉFÉRENCES : Bretherton, I. and K.A. Munholland, 1999. Handbook of Attachment: Theory, Research and Clinical Applications, ’Internal Working Models in Attachment Relationships: A Construct Revisited’. Guilford Press, USA. Graham, L., 2013. Bouncing Back: Rewiring the Brain for Maximum Resilience and Well-being. New World Library, USA.
He ar tf u ln ess
L’inspiration
Potière, professeur d’art et ex-doyenne du Cleveland Institute of Art, aux États-Unis, JEAN APPLEBY a passé le plus clair de sa vie à travailler l’argile. Invitée comme artiste en résidence, elle vient de passer quelques semaines à l’ashram de Kanha Shanti Vanam, près d’Hyderabad en Inde, où elle a installé l’atelier de poterie et enseigné aux adultes et aux enfants les joies de la poterie. Elle a été interviewée par MEGHANA ANAND, alors qu’elle animait un programme avec des enfants. Aoû t 2018
25
Êt re a r t i ste
Qu’est-ce qui vous a poussée à l’art et à la créativité ? À huit ans, je savais que je serais artiste. Dès le premier cycle, mes professeurs m’ont encouragée à participer à une exposition étudiante. Puis au lycée, j’ai étudié les arts, ainsi que les autres matières – intensément – car j’avais décidé de m’inscrire en art à l’université.
Où trouvez-vous votre inspiration ? L’art est en quelque sorte une forme de méditation, car pour créer, un artiste doit plonger en lui-même et se demander : « Qu’est-ce que je veux vraiment dire ? Par quel moyen vais-je exprimer ce que je ressens profondément ? » J’ai toujours aimé faire de la randonnée, du camping, explorer de beaux endroits. La nature et ses formes sont une grande source d’inspiration pour moi. Pendant ma formation universitaire, qui visait à faire de nous des artistes professionnels, on nous inculquait les principes fondamentaux du design comme on enseigne les fondements de la démarche scientifique à de futurs ingénieurs ou scientifiques. Concevoir, créer quelque chose, c’est entamer un processus de résolution de problème, un problème artistique. C’est une façon de penser, de regar-
26
der, d’observer et de proposer une solution visuelle à un problème donné ; on part d’une idée pour arriver à une proposition en trois dimensions. J’applique d’ailleurs cette approche à toute activité qui implique de résoudre une question, qu’il s’agisse de mettre sur pied une formation, un partenariat communautaire ou une formation pour des étudiants. Tout ce que j’ai créé jusqu’à présent m’a toujours montré comment aborder l’œuvre suivante. J’ai vendu la plupart de mes pièces, et on me demande parfois si je n’aimerais pas en avoir gardé certaines. Je réponds que chacune m’a enseigné ce que je devais faire ensuite, et que je me sentais donc prête à la laisser partir.
Quelle idée inspirante ! Pouvez-vous nous parler de l’évolution de la poterie au fil du temps ? Et où en est-elle, aujourd’hui ? De tous temps, on a creusé la terre pour en extraire l’argile dont on a fabriqué des pots et d’autres ustensiles. C’est ce que trouvent presque toujours les archéologues dans leurs fouilles. Ces pots étaient de deux types : la majorité étaient utilitaires et servaient à contenir de l’eau ou de l’huile ; d’autres pots, des bols, mais aussi des carreaux et des fresques, étaient de nature artistique. Ces
He ar tf u ln ess
œuvres racontaient l’histoire de la culture et de la civilisation en question – c’est ce qu’ont fait des hommes et des femmes depuis des millénaires. Aujourd’hui, on parle de poterie ou de céramique pour désigner le travail de l’argile, ou on utilise encore d’autres noms pour divers types de créations artistiques. Il y a ceux qui font des pièces fonctionnelles, et ceux qui créent des œuvres avec de l’argile pure, ou combinée avec d’autres matériaux.
Y a-t-il des avantages à cuisiner et à manger dans des récipients en terre ou en argile ? Ici, en Inde, on pense qu’il est plus sain de cuisiner dans des pots en terre cuite que dans des casseroles en métal. Je n’ai pas fait de recherches scientifiques sur leurs bénéfices spécifiques, mais les récipients en argile ne modifient généralement pas la composition de la nourriture. Si je prépare un dahl dans une cocotte en terre, il va cuire lentement, avec un bon transfert de chaleur, bien réparti. Ce qui importe, c’est que l’ émail ne se combine pas avec l’aliment. Quand on chauffe du jus de citron ou d’autres ingrédients acides dans une casserole en aluminium, il y a une interaction avec le métal, qui altère la nourriture.
Êt re a r t i ste
Pendant ma formation universitaire, qui visait à faire de nous des artistes professionnels, on nous inculquait les principes fondamentaux du design comme on enseigne les fondements de la démarche scientif ique à de futurs ingénieurs ou scientif iques. Concevoir, créer quelque chose, c’est entamer un processus de résolution de problème, un problème artistique. Après de nombreuses années passées à enseigner l’art, vous revenez aujourd’hui à la création. Pensez-vous que votre approche s’est modifiée ?
Je ne sais pas trop quelle tournure mon nouveau travail va prendre, mais je sais qu’il sera influencé par mes pièces précédentes, par l’expérience accumulée en travaillant avec
Aoû t 2018
27
Êt re a r t i ste
d’autres dans les domaines de l’art et de l’éducation, et par ma pratique de la méditation – je pense que ce sera une combinaison des trois.
Pouvez-vous nous parler davantage du lien entre l’art et la méditation ? Comme je l’ai dit, je vois la création artistique comme une forme de méditation. L’art et la méditation sont tous deux des pratiques. Un de mes professeurs, John Carter, définissait ainsi la pratique : « Tout ce qu’on décide de faire régulièrement pour l’exécuter de mieux en mieux. » Quand j’étais jeune, j’avais de l’inspiration, mais je ne savais pas trop comment elle me venait, j’étais simplement heureuse qu’elle soit là. Déjà à cette époque, je réfléchissais,
28
je cherchais au-dedans de moi comment aider mes idées à affleurer, à sortir de ma vie intérieure.
relation avec le monde qui nous entoure ?
Comme je médite depuis 26 ans, j’apprécie de plus en plus d’avoir une vie intérieure et une vie extérieure. Et une partie de mon travail, au quotidien, est de les garder en équilibre. Du fait que je plonge dans mon cœur et que je m’absorbe dans mon for intérieur durant la méditation, je trouve plus facilement le chemin pour y retourner et y puiser l’inspiration. J’ai donc l’impression que la méditation et la création artistique fusionnent en une seule pratique.
J’ai la conviction profonde que nous sommes tous créatifs, que nous sommes tous nés avec des talents. En fait, nous avons la responsabilité de les découvrir et de les utiliser dans notre travail et dans nos vies, car notre créativité nous aide à atteindre notre plein potentiel. Quand je rencontre des gens qui me disent qu’ils sont incapables de tracer une ligne droite ou qu’ils ne sont pas créatifs, je souris et réponds : « Bien sûr que vous l’êtes ! Chacun de nous est créatif. Le tout est de découvrir de quelle façon. »
Qu’est-ce que la créativité, pour vous, et comment l’utilisez-vous pour entrer en
Que l’on soit doué pour collaborer avec les autres, monter à cheval, diriger une équipe, ou bien qu’on adore faire du théâtre, la cuisine ou encore élever son enfant ou
He ar tf u ln ess
Êt re a r t i ste
travailler comme bénévole – tout ça, ce sont des actes créatifs. Et si nous les voyons comme tels, nous avons beaucoup plus de chances de donner le meilleur de nous-même.
Comment faites-vous pour inspirer les enfants et les encourager à explorer leur créativité, dans cette société axée sur la technologie, où tout va si vite ? Je crois que chaque fois qu’il y a un changement majeur dans notre culture et dans notre mode de vie – comme c’est le cas de la technologie qui a bouleversé nos existences – nous avons le choix : accompagner ce changement et apprendre en quoi il peut être utile à notre développement, ou rester, comme beaucoup le font, dans la seule fascination de ces gadgets. En regardant les jeunes utiliser leurs téléphones, consoles de jeu et autres appareils, j’ai remarqué que leur capacité de passer de façon fluide, sans hiatus, d’une chose à l’autre, tout en se focalisant sur chacune, est une parfaite caractéristique de la créativité. C’est l’aptitude même qui permet, quand on crée, de réagir à ce qui se passe dans la réalité de l’instant. On n’est pas prisonnier d’un dessin, d’un croquis ou d’une idée.
Lorsqu’un adulte sympathique et bienveillant apporte des matériaux intéressants à des enfants, leur donne des directives claires – du genre « Voilà le projet qu’on va réaliser aujourd ’hui » – et une bonne organisation pratique, ils s’engagent spontanément.
Je pense donc que les enfants peuvent tirer parti des capacités que ces outils et ces jouets contribuent à développer, pour être parfaitement réactifs à ce qu’offre le moment présent et de pouvoir se concentrer sur une chose. Je voudrais ajouter que lorsqu’un adulte sympathique et bienveillant apporte des matériaux intéressants à des enfants, leur donne des directives claires – du genre « voilà le projet
Aoû t 2018
qu’on va réaliser aujourd’hui » – et une bonne organisation pratique, ils s’engagent spontanément. Il est très important de guider nos enfants, de répondre à leurs questions et de leur montrer comment utiliser les matériaux et les outils en toute sécurité, pour leur donner à vivre ainsi une expérience complète de la création. Et peu importe si la pièce en question est achevée ou non, réussie ou non, parce que tout cela fait partie de l’apprentissage.
Comment encouragez-vous vos élèves à surmonter leurs inhibitions et à exploiter pleinement leur potentiel créatif ? Nous incluons toujours une séance de relaxation dans nos programmes, nos formations, nos ateliers ou nos sessions d’un jour pour les familles, dans l’idée qu’on ne peut pas être simultanément détendu et angoissé. La relaxation équilibre le cœur et l’esprit, et c’est donc un merveilleux moyen de faire naturellement émerger la créativité et l’inspiration – un moyen toujours disponible. Ainsi, c’est par une simple relaxation que nous débutons, car elle nous mettra dans une bonne disposition pour nous lancer dans le travail, pleins de joie et d’inspiration, dans l’attente enthousiaste de voir ce que nous allons produire ce jour-là.
29
Le N ÉG O C I AT E U R
heartfulness 7 e PARTIE
Le mental – toujours en train de penser et de créer sa version de la réalité
Dans les six articles précédents, RAVI VENKATESAN décrivait les sentiments et les émotions qui agitent le cœur, ainsi que le rôle que jouent notre ego et notre intellect dans les négociations. Dans cet article, nous allons découvrir le rôle qu’y tient notre mental, la tendance à la dispersion qui fait partie de sa nature, et la façon de le canaliser pour obtenir de meilleurs résultats.
D
epuis la nuit des temps le mental a fait l’objet d’études et a suscité notre curiosité. Wikipedia définit la psychologie comme la science des comportements et de l’esprit, ce qui comprend les phénomènes conscients et inconscients, ainsi que les sentiments. Le mental et le cœur ne sont pas deux choses distinctes, mais plutôt les deux extrémités d’un spectre. Dans notre dernier article, nous avons décrit le mental comme un des éléments subtils, ou non physiques, qui néanmoins font partie de nous. Le mental ne possède aucune sorte de « boussole morale ». Celle-ci vient du « cœur ». Ainsi notre mental peut nous aider à projeter un crime odieux, en programmant chaque étape et chaque détail, tout comme il peut nous aider à plani-
30
fier la construction d’un orphelinat. C’est pourquoi les négociateurs Heartfulness utilisent toujours le cœur pour diriger ou guider le mental. À notre époque, la partie consciente de notre mental est souvent dans un état de dispersion, de non-focalisation, et le taux d’efficacité de son fonctionnement est très faible. Les causes en sont multiples : les téléphones cellulaires, la télévision, les envies de toutes sortes, le stress, l’angoisse, etc. Chez beaucoup d’entre nous, l’état habituel du mental est un vagabondage non régulé, avec des idées et des pensées qui surgissent sans cesse. Nous sommes nombreux à faire porter la responsabilité de cette absence de paix et de calme à notre mental. J’entends souvent ce genre de phrases :
He ar tf u ln ess
Ag i r a u t re me nt
Chris va enregistrer son premier album avec CoolRecords, et il en négocie la production avec Julien.
JULIEN : Chris, nous sommes ravis d’enregistrer votre premier album. Vous devez être très heureux de faire cette expérience.
[Chris pense in petto : comme c’est mon premier album, il va vouloir baisser les droits d’auteur. Je ne vais pas me laisser faire.]
CHRIS : Bonjour Julien, je suis heureux moi aussi,
mais même si c’est mon premier album, j’ai déjà eu des échanges avec plusieurs maisons de disques et je sais comment ça se passe.
JULIEN : Tant mieux, ça facilitera l’ensemble de la procédure. Nous avons d’abord quelques suggestions à vous faire sur le contenu de l’album.
« Si seulement je pouvais stopper mon mental pendant quelques minutes, comme je me sentirais mieux, mais il n’arrête jamais ! » Beaucoup de gens n’arrivent pas à dormir la nuit à cause de ce mental hyperactif, ce qui entraîne également des problèmes de santé. Pendant les négociations, une personne dont l’esprit vagabonde sera distraite par les réflexions et les pensées qui lui viennent. Elle risque de laisser échapper des détails importants et de prendre des décisions sur la base d’idées qui ont déformé la réalité. Pour mieux comprendre ce processus, prenons ce scénario de négociation entre Chris, un jeune pianiste, et Julien, responsable de la découverte et du lancement d’artistes chez CoolRecords, une maison de disques bien connue.
[Chris, toujours préoccupé par l’idée d’être exploité, manque la première partie de ce qu’a dit Julien et n’entend que la deuxième phrase.]
CHRIS : Des suggestions ? Mais pourquoi ? Je suis
assez satisfait du contenu tel qu’il est et je ne veux pas qu’on touche à la partie créative.
JULIEN : Chris, votre façon d’aborder les choses me
déplaît. Nous avons le droit de suggérer des changements de contenu pour faciliter la commercialisation. N’oublions pas que c’est votre premier album. [Chris commence à craindre de perdre son contrat et se dit qu’il vaut mieux changer son fusil d’épaule.]
CHRIS : Je suis désolé. Je suis prêt à faire tous les changements que vous jugerez nécessaires.
Aoû t 2018
31
Ag i r a u t re me nt
JULIEN : Pas besoin de vous excuser, il faut juste que
vous compreniez comment on travaille chez nous. Pas de souci, tout se passera bien. Ce qui vient de se dérouler est très fréquent. Le mental de Chris a émis plusieurs fausses hypothèses au cours de cette négociation toute simple. Julien n’avait aucunement l’intention de discuter des droits d’auteur et des aspects commerciaux, contrairement à ce que Chris a supposé. Julien n’envisageait pas davantage de profiter du fait qu’il s’agissait du premier album de Chris, même si celui-ci a imaginé qu’il le ferait. Du fait de toutes ces pensées qui lui flottaient dans la tête, Chris n’a pas prêté suffisamment attention à ce que Julien lui communiquait.
bon signal, la bonne réponse. Pour l’entendre, il suffit de faire une pause, de plonger profondément en vous-même et de laisser la réponse émerger de façon naturelle.
Dans le prochain article, nous résumerons tout ce que nous avons appris jusqu’à présent, et ferons une liste de contrôle facile à utiliser pour mener des négociations pleines de cœur. D’ici là, bonne chance dans la régulation de votre mental ! Guidez-le avec le cœur !
Quelques conseils pour gérer votre mental au cours de négociations Heartfulness :
32
•
Soyez attentif aux idées et aux pensées qui vous viennent : sont-elles conformes à la réalité ou de pures inventions ?
•
Clarifiez votre mental avant toute négociation. La méditation Heartfulness peut beaucoup vous aider à cet égard. 15 minutes de méditation suffisent à éclaircir les idées et vous amener à un état de calme.
•
Concentrez-vous sur le présent. Le mental a tendance à vagabonder dans le passé et le futur. Le ramener dans le présent vous permet d’enregistrer toutes les informations pertinentes, de prendre les meilleures décisions et de négocier avec efficacité.
•
En cas de doute, référez-vous toujours au cœur. Le mental n’a pas de boussole morale, alors que le cœur vous donnera toujours le
He ar tf u ln ess
Beyond KATE MARTIN est une artiste abstraite devenue professionnelle il y a un an et demi. Elle peint également sur commande. Vous pouvez prendre contact avec elle sur coloursbykate@outlook.com ou via instagram @coloursbykate.
La couleur a toujours fait partie intégrante de ma vie. J’ai grandi dans une entreprise familiale de peinture où j’aidais mon père à choisir les couleurs pour ses clients, et c’est ainsi que sont nés ma passion et mon amour de la couleur. J’éprouve tant de joie à créer des œuvres d’art qui apportent de la couleur dans la vie des autres. Le style de peinture qui me plaît le plus est abstrait, et je suis principalement inspirée par l’eau – qu’il s’agisse de l’océan, de vagues ou simplement d’un mouvement fluide. J’aime aussi incorporer à mes œuvres des motifs floraux. Quand je commence une nouvelle pièce, c’est sans projet précis. Il y a peut-être certaines couleurs que j’ai envie d’utiliser ou d’essayer, mais une fois que je me suis lancée, rien de tout cela ne subsiste et je déverse sur la toile tout ce qui est en moi. J’aime expérimenter différents moyens d’expression et les exploiter à fond pour explorer de nouveaux résultats passionnants.
On m’a récemment suggéré de faire l’expérience d’un caisson d’isolation sensorielle comme source d’inspiration pour créer une œuvre d’art. Quand je me suis retrouvée dans cet habitacle en état d’apesanteur, un sentiment de paix m’a envahie. Alors que certaines pensées négatives tentaient de s’infiltrer en moi, le sentiment de paix a pris le dessus et les a bloquées, me laissant dans une sensation d’émerveillement. J’ai passé cette heure à prier, pleine de gratitude, en songeant à cette bénédiction que représente la vie. C’est après cela que j’ai peint « Beyond », avec de la peinture acrylique fluide et un pistolet, en appliquant la peinture comme de l’aquarelle, avec beaucoup de couches aqueuses. Cela donne quelque chose d’aérien et communique une sensation de lumière, de paix, de joie et de chaleur.
I N TE R
VIEW
Le bon voyageur n’a pas de plans arrêtés et n’a pas pour but d’arriver. Un bon artiste laisse son intuition le conduire où elle veut. Un bon scientifique s’est libéré des concepts et garde son esprit d’abandon, pas de contrôle. Lao-Tseu
Tableau : Roland Garros, 2018 (courtesy FFT et Galerie Lelong &co)
wo rd of t h e a r t i c l e
EN CONVERSATION
AVEC FABIENNE VERDIER
He ar tf u ln ess
FABIENNE VERDIER est une artiste peintre française inclassable, à l’origine d’une œuvre singulière et fascinante. Reconnue internationalement, son œuvre est exposée dans de grandes collections muséales publiques et privées. Après avoir étudié à l’École des Beaux-Arts de Toulouse, elle quitte tout à 22 ans et s’envole pour la Chine, au Sichuan, une région reculée proche du Tibet. Dans un face-à-face redoutable avec elle-même, dans un environnement où tout lui est hostile, courageuse et obstinée, elle débute un véritable voyage initiatique qui durera dix ans. Elle part à la rencontre des vieux maîtres chinois, rejetés par la révolution culturelle, et s’initie à la calligraphie, art millénaire des lettrés, à la lumière d’un enseignement très dur qui l’ouvre enfin à ce qu’elle cherchait tant. D’interprète elle est devenue artiste. Et, d’un « unique trait de pinceau », elle crée un nouveau langage pictural universel qui se fait l’écho d’une recherche sensible, poétique et très exigeante sur le vivant. Grande dame, brillante, humble et contemplative, elle aime le silence et se tient à l’écoute de sa nécessité intérieure. Elle est interviewée par DÉBORAH FEST KINDLER, historienne de l’art passionnée et conseillère en art.
wo rd of t h e a r t i c l e
Comment présenter votre travail en quelques mots ? Le vivant est au cœur de mon travail. Je cherche à explorer toutes les formes de vie qui nous entourent. Leurs dynamismes et leurs énergies m’intéressent. J’essaie de les transcrire en peinture.
Qu’est-ce qui vous a fait prendre le chemin de l’art ?
38
Très jeune, j’ai ressenti qu’il fallait faire un effort pour aller vers l’autre et pour vivre un échange qui aille dans les deux sens. C’est sans doute cette expression vitale que chacun a en soi que l’on peut partager. J’ai pensé que la peinture serait un moyen possible. Quoi de plus beau que d’échanger sur des formes et des idées. Mais pour cela, il fallait d’abord entamer un travail personnel, se confronter à l’histoire de l’art, étudier les formes et les sensations qui ont déjà été explorées pour essayer à son tour de toucher le cœur des Hommes. J’ai toujours été bouleversée par l’idée que sur un petit châssis de bois d’une extrême simplicité on pouvait
He ar tf u ln ess
wo rd of t h e a r t i c l e
Marche bleue, 2015
transmettre une expérience intérieure d’une certaine intensité.
D’ailleurs dès votre plus jeune âge, vous avez ressenti l’art comme une nécessité intérieure et comme une échappatoire. Oui, enfant j’avais une sorte d’hypersensibilité et je me sentais réceptive à toute forme de vibration, à tout ce qui éveillait une dynamique dans l’imaginaire.
Dans mon travail de peinture je tente de retransmettre cette expérience du vivant. Ce partage de sensations est pour moi presque une nécessité. Jeune adolescente, j’étais très frappée par la violence et par les conflits ou même les guerres. Ma situation familiale complexe faisait écho à des actualités télévisées difficiles. Je me souviens d’une période où je n’avais pas très envie de vivre. Et puis j’ai eu le besoin de me créer un petit jardin secret pour pouvoir vivre tout simplement. Et très vite, j’ai ressenti la nécessité d’aller vers une sorte d’intégrité, d’authenticité, de vérité.
Aoû t 2018
39
wo rd of t h e a r t i c l e
Musique - Mutation, Planche n° 1
Mais je m’interrogeais : comment apporter quelque chose en peinture après tous les grands maîtres que j’ai tant aimés ? Après Matisse qui était totalement connecté à la nature et à l’esprit du vivant ; après Monet qui a passé sa vie devant ses nymphéas pour saisir une éclosion, les captations et les réfractions de la lumière ; après les abstraits américains que j’admire beaucoup... J’avais beaucoup de chance, car toute petite, j’ai fréquenté les musées et notamment le musée d’art moderne de la ville de Paris. Très vite, j’ai eu envie de vivre dans ce monde-là.
Et pleine de ces références à l’art occidental, vous intégrez l’École des Beaux-Arts de Toulouse. Pourtant, alors que vous êtes une élève brillante, c’est une étape qui semble douloureuse, car vous n’êtes pas en accord avec l’enseignement 40
dispensé. Et une fois diplômée, vous décidez de tout quitter et de partir à l’autre bout du monde. En effet, à cette époque je ne suis pas en accord avec ce que m’enseigne l’École. Je cherche, je cherche et je trouve, à l’extérieur de l’École. Et c’est le grand départ, un voyage initiatique, on y passe tous ! Direction la Chine, nous sommes dans les années 1980. Depuis longtemps je m’intéressais au mouvement. Et je trouvais qu’on avait un problème dans la représentation de nos émotions : on est obligé de les fixer – donc on est dans l’immobilité. Et dès que c’est immobile, c’est pour moi une sorte de mort. Je cherchais quelque chose de plus proche du vol de l’oiseau qui me fascinait tant, du papillonnement du vivant… Donc je me suis retrouvée en contradiction avec mes professeurs. Ils m’ont confirmé qu’ils ne pouvaient
He ar tf u ln ess
Il faut aller au-delà de la maîtrise car celle-ci peut vous enfermer dans une tradition et vous dicter un chemin. Accepter de lâcher la maîtrise de quelque chose vous permet d ’être plus réceptif. Ne pas rester sur ses acquis est un travail sur soi constant et souvent éprouvant.
liberté, de spontanéité en peinture. Vous décidez de vous former en Chine à un enseignement exigeant, discipliné et très dur et vous en sortez encore plus libre et plus spontanée. Oui, mais après 30 ans de travail ! Dans ces traditions millénaires, comme au Japon par exemple, lorsqu’on est apprenti, il est très difficile de devenir un créateur. C’est pareil en musique : on peut être un excellent interprète de Bach ou Fauré mais on n’est pas forcément un créateur. J’ai réussi à être une bonne interprète des grands maîtres. Mais le pas entre être interprète, entre le fait d’avoir compris l’état d’esprit des lettrés et la création est très difficile. Car il faut oser la transformation, oser une synthèse, oser transgresser…
La création se situe-t-elle là ? pas me transmettre ce que je cherchais tant, que ce n’était pas en France, dans une École des Beaux-Arts, que je le trouverais, mais plutôt en Asie peut-être, à travers cet art millénaire de la peinture et des lettrés. Finalement toute jeune, j’étais déjà plus proche du musicien dans le désir d’une interprétation spontanée, d’un jeu sonore et vibratoire.
Je rebondis sur cette question de la spontanéité… …rebondir : vous avez choisi le bon mot. Le vivant c’est ça, le fait de rebondir. C’est un ressort et j’essaie de transmettre cela en peinture. Une sorte de dynamique, d’énergie vibratoire. C’est grâce à l’acte de peindre à la verticale et à ma rencontre avec l’art chinois que j’ai compris que je pouvais peut-être apporter quelque chose…
Votre parcours est impressionnant. Depuis le début vous êtes en recherche, en quête de
Oui exactement là. D’ailleurs mon travail a été très mal reçu par certains sinologues, parce que j’ai osé inventer, j’ai osé transformer pour pouvoir m’envoler.
Quelle a été la réception de votre travail à votre retour en France ? Cela a été très violent pour moi. Mon travail a été parfois mal reçu en France. Le milieu de l’art a eu du mal à comprendre ce que la culture des lettrés pouvait apporter à la peinture abstraite. On a rapidement collé une étiquette sur mon travail. Obtenir une forme de reconnaissance dans cette forme de synthèse culturelle, c’est très long !
Aujourd’hui votre œuvre est reconnue. Sa contemplation en a été facilitée par les nombreux ouvrages dont elle a fait l’objet et il en ressort une évidence, une formidable liberté et une meilleure appropriation par le public.
Aoû t 2018
41
wo rd of t h e a r t i c l e
Je travaille pour cela. Pour que l’abstraction puisse mettre en mouvement l’imaginaire de celui qui la regarde. Je travaille pour que celui qui se retrouve dans le tableau devienne un peu plus vivant, en éveillant par exemple, en lui, des formes répertoriées dans sa mémoire, des expériences de son contact avec le vent, les nuages, le minéral, les montagnes, les sonorités et en réactivant tout cela. Oui, j’essaie simplement d’éveiller ou de réveiller celui qui prend le temps de se connecter au tableau, donc à quelque chose qu’il a en lui, au vivant qui est en lui par le truchement de l’art.
Vous vous situez entre la maîtrise et le lâcher-prise ? 42
Oui mais il faut aller au-delà de la maîtrise car celle-ci peut vous enfermer dans une tradition et vous dicter un chemin. Accepter de lâcher la maîtrise de quelque chose vous permet d’être plus réceptif. Ne pas rester sur ses acquis est un travail sur soi constant et souvent éprouvant. Si on reste dans la maîtrise, on devient esthétisant. À mon sens, il y a une telle diversité, une telle variation dans le monde qui vous entoure, qu’il faut être à l’écoute, être réceptif à l’intime transformation des choses, jouer avec votre esprit et transmettre. Un jour vous pouvez être ému des ombres qui éveillent des choses en vous ou de l’eau qui dessine un souvenir…
He ar tf u ln ess
wo rd of t h e a r t i c l e
Grotte - Genèse, 2016
C’est un profond travail de contemplation et d’exercice de l’œil. C’est un travail constant d’acuité du regard. Récemment j’étais au bord d’un fleuve. C’était incroyable, j’y ai vu les coups de pinceau dans l’eau ! Tout était là ! J’étais bouleversée, je retrouve les mêmes lignes de force lorsque je travaille sur le vent, les courants d’air ou la tectonique des plaques.
Gaston Bachelard, notamment son ouvrage L’eau et les rêves , pourrait être une lecture conseillée pour aborder votre travail ?
Je me sens très proche de Bachelard. Il parle de tout ce que j’essaye de faire, notamment cette « imagination dynamique ».
Vous travaillez d’une manière très particulière. Vous avez créé des outils, des pinceaux, à la mesure de votre corps et de votre recherche. Et, debout dans l’espace pictural, vous semblez exécuter une sorte de chorégraphie guidée par un processus intérieur particulier. Pouvez-vous nous en dire plus ? En Europe et en Occident, on travaillait sur chevalet. Par la force de la gravité et de l’attraction terrestre, la
Aoû t 2018
43
matière tombe du pinceau et il faut toujours recharger le pinceau. Et travailler avec une matière la plus collante possible pour qu’elle adhère à la toile. Ce qui m’a intéressée chez les lettrés chinois, c’est l’acte de peindre à la verticale. Au début, j’ai mis du temps à comprendre que cette façon de peindre joue avec les forces à l’œuvre, celle de la gravitation notamment. Toutes les formes de l’univers sont façonnées par cette loi physique, j’ai pensé que, dans cet acte de peindre à la verticale, ce qui s’écoulerait de mon pinceau aurait peut-être plus de chance d’être en harmonie avec les formes de la nature qui naissent sous les mêmes forces. J’ai rapidement voulu agrandir mon pinceau, mais le poids était bien trop lourd pour moi. A mon retour en France, j’ai donc conçu un atelier autour de mon pinceau, avec tout un mécanisme me permettant plus de liberté dans l’espace. Mon père d’abord m’a suggéré d’utiliser des câbles élastiques, puis au gré de mes expériences et de mes recherches, aidée par des échanges avec des scientifiques, j’ai développé de nouveaux outils. J’ai ensuite créé un nouveau pinceau avec un guidon de vélo. Une sorte de 3e dimension a surgi dans le trait de
44
peinture. Je me suis rendu compte que, chaque fois que je fais varier une toute petite chose dans mes outils, je crée un trait différent. Ces explorations me passionnent.
À suivre
Photos des tableaux Inès Dieleman, Fabienne Verdier travaillant dans son atelier : archive Fabienne Verdier.
Pour en savoir plus
He ar tf u ln ess
Fabienne Verdier, Passagère du silence: 10 ans d’initiation en Chine, 2003, Livre de poche. Elle participe, en 2017, à une édition spéciale du Petit Robert pour les 50 ans du célèbre dictionnaire. https://fabienneverdier.com
COMMENT SE DÉTENDRE? Asseyez-vous confortablement et fermez doucement les yeux. Commencez par les orteils. Remuez-les. Maintenant, sentez qu’ils se détendent… Détendez vos chevilles et vos pieds… Sentez l’énergie qui monte de la terre… de vos pieds jusqu’à vos genoux, et qui détend les jambes… Détendez les cuisses… L’énergie monte le long des jambes… et les détend. Maintenant détendez profondément vos hanches… votre ventre… et votre taille… Détendez votre dos… Votre dos est entièrement détendu, du haut en bas… Détendez votre poitrine et… vos épaules. Sentez simplement que vos épaules fondent… Détendez le haut de vos bras… Détendez chaque muscle de vos avant-bras… vos mains… jusqu’au bout des doigts… Détendez les muscles du cou… Portez votre attention sur votre visage… Détendez les mâchoires… la bouche… le nez… les yeux… les lobes des oreilles… les muscles du visage… le front… jusqu’au sommet de la tête. Sentez que tout votre corps est maintenant complètement détendu… Dirigez maintenant votre attention sur votre esprit, vous sentant profondément détendu à l’intérieur… Respirez calmement... Laissez votre esprit se relâcher. Déplacez votre attention vers le cœur… Émettez tranquillement l’idée que la Source de lumière illumine votre cœur de l’intérieur et attire votre attention. Sentez-vous immergé dans l’ amour et la lumière dans votre cœur. Restez dans le calme et le silence et absorbez-vous lentement en vous-même.
fr.heartfulness.org
être inspiré. Allez de l’avant sans suivre un chemin, ne craignant rien, ne vous souciant de rien ! Allez en solitaire, comme le rhinocéros ! Pareil au lion, que les bruits ne font pas trembler, pareil au vent, que les filets ne peuvent capturer, pareil à la feuille de lotus, que l’eau ne souille pas, allez en solitaire, comme le rhinocéros ! Sutta Nipata
PRATYAHARA
PRANAYAMA
Retrait à l’intérieur
Régulation du souffle
ASANA Posture
Ashtanga
DHARANA Focalisation mentale
yoga
DHYANA Méditation
NIYAMA Régularité Observation
SAMADHI
Condition originelle (équilibre)
YAMA
Bonne conduite
Seriez-vous intéressé si quelqu’un vous disait qu’il existe un ensemble de pratiques simples qui aident à gérer tous les aspects de la vie quotidienne, tout en élevant le potentiel humain à un niveau qui dépasse l’imagination la plus folle ? Cela attiserait pour le moins la curiosité de la plupart des gens. En fait, cela correspond précisément à la description des pratiques du yoga, mais rares sont ceux qui s’en rendent compte. Le yoga comprend un ensemble holistique de pratiques qui visent au développement personnel et au bien-être du corps, de l’esprit et de l’âme. Il y a quelques milliers d’années, le grand sage Patanjali a répertorié les pratiques yogiques en vigueur en son temps et les a présentées dans un traité en huit étapes, qu’on utilise encore aujourd’hui. Il s’agit de l’ashtanga yoga. Mais les pratiques du yoga ont évolué depuis Patanjali, surtout au cours des 150 dernières années, pour répondre aux besoins de l’époque. Dans cette série d’articles, KAMLESH PATEL décrit chaque étape du yoga à la lumière des pratiques yogiques modernes de Heartfulness. Il nous montre comment concilier nos pratiques spirituelles intérieures avec la vie dans le monde, et comment affiner notre personnalité pour parvenir au véritable état du yoga – c’est-à-dire à l’efficacité dans l’action et à l’harmonisation des aspects spirituel et matériel de la vie. 48
He ar tf u ln ess
SA M YA M A 3e partie
D h a ra n a • D hyan a • Samad h i
Dhyana, qu’ on traduit souvent par méditation, est la pièce maîtresse de l’ashtanga yoga de Patanjali. Au cours du voyage spirituel, c’ est elle qui nous conduit au samadhi, l’état originel. Dans cet article, Kamlesh Patel met l’accent sur la pratique de la méditation et décrit la façon dont elle nous mène au samadhi.
La méditation est un état d’éveil intérieur intense. Les Upanishads
I
l y a deux attitudes que nous voyons très fréquemment chez les personnes en train de méditer. La première est celle d’un méditant assis bien droit, dans un asana traditionnel, jambes croisées, attentif, observant ses pensées et très alerte. La seconde est celle d’un pratiquant absorbé dans un état de samadhi, inconscient de tout ce qui l’entoure, parfois dans un état de conscience semblable à celui d’une pierre. Il est également assis dans un asana traditionnel, mais souvent sa tête tombe en avant, parfois même jusqu’à toucher le sol. Ces façons de méditer semblent totalement différentes – dans l’une on est pleinement conscient et attentif,
dans l’autre on est tout à fait inconscient, absorbé dans ce qui ressemble à un sommeil profond. En fait, ce sont différents stades du processus de la méditation ; il faut les comprendre en les replaçant dans le contexte global de la conscience. Qu’arrive-t-il réellement à notre conscience pendant la méditation ? Cela dépend de nombreux facteurs. Nous allons en étudier quelques-uns. L’un d’eux est la préparation. Comment se prépare-t-on à la méditation ? Dans le dernier article, nous avons vu l’importance de se préparer la veille au soir pour la méditation du matin. Examinons maintenant plus en détail le déroulement de la méditation du matin. Tout d’abord, il est important de s’installer dans l’endroit habituel où l’on médite, d’adopter une position confor-
Aoû t 2018
49
La scie n c e d e l a spi r i t u a l i té
table, de détendre son corps et de trouver le calme. Patanjali a recommandé la relaxation comme condition préalable à la méditation ou dhyana, car si l’on n’est pas détendu, l’attention passe d’une partie du corps à l’autre, à la recherche d’une position confortable. Pour bien méditer, il faut pouvoir fermer les yeux doucement et laisser passivement les choses se dérouler. Cet abandon, associé à une posture stable et confortable, nous prépare à plonger dans la méditation, car on a créé le champ voulu. Si on ne commence pas par se préparer de cette façon, si on est pressé ou agité, quelle sera l’efficacité de la méditation ? La première chose à faire est donc de bien s’installer. Ensuite ? On définit souvent la première étape de la méditation comme le fait de penser à une seule chose
de façon continue ; généralement on commence par se concentrer doucement sur l’objet de sa méditation. Cet aspect de l’ashtanga yoga est appelé dharana : il consiste à focaliser son attention, maintenir une idée et la nourrir. Quelle que soit la suggestion que nous faisons, elle devient notre but, l’objectif de notre méditation, et elle détermine ce que nous deviendrons. Mais nous restons souvent bloqués sur cette définition de la méditation qui nous fait perdre de vue le but réel de dhyana. Dans le yoga, la méditation est un processus de révélation, où la vraie nature de l’objet sur lequel nous méditons est progressivement dévoilée. Or une telle révélation ne vient pas sous la forme d’une pensée, mais d’une sensation. Dans la méditation, nous passons de la pensée à la sensation ;
Schéma : Source - But Supraconscient - Subconscient Fine couche de conscience disponible
50
He ar tf u ln ess
La sc i e n c e d e l a spi r i t u a l i té
Pranahuti, la transmission yogique, facilite cette expérience et, lorsqu’elle se produit, notre méditation prend son envol. Le maître qui est à l’intérieur est le témoin. Le corps et le mental ont pris leur juste place et nous pouvons alors nous identifier au maître intérieur, à la Réalité, à la cause de notre existence.
de la pensée du Divin au ressenti de la Présence Divine, pour finalement faire un avec cette présence. C’est un voyage qui va de la complexité du mental à la simplicité du cœur et, à travers le cœur, jusqu’au Centre même de notre être.
LE SPECTRE DE LA CONSCIENCE Ce voyage nous emmène du niveau superficiel et limité de la conscience à des niveaux plus profonds, où nous nous éveillons et accédons à l’expérience d’une partie de plus en plus grande du spectre entier de la supraconscience-conscience-subconscience. Nous faisons donc différentes expériences sur ce chemin. Il y a des moments où nous sommes très éveillés et conscients pendant la méditation, que ce soit dans le calme, ou avec un mental agité de pensées, d’émotions, d’attentes, de désirs et de préoccupations. À d’autres moments nous allons au-delà de la conscience, dans des états de sushupti semblables au sommeil profond, où nous semblons être totalement inconscients de ce qui se passe, parce que nous avons été emmenés dans des dimensions dont notre conscience n’a pas encore « conscience ». Il y a aussi des états semi-conscients, comme dans les rêves, où notre subconscient est très actif. Et il y a l’état ultime d’expansion où la conscience s’étend à tout le spectre, de l’absorption totale à la vigilance totale. Ce voyage n’est pas linéaire : on ne peut pas dire qu’au début nous sommes agités et qu’ensuite nous allons vers l’absorption et le calme. En fait, à chaque étape du chemin, nous sommes légèrement perturbés par le changement au moment où nous pénétrons dans un nouveau domaine ; progressivement nous allons être absorbés inconsciemment, jusqu’à ce que notre conscience s’installe dans ce nouveau lieu, qui lui devient suffisamment familier pour qu’elle s’y sente à l’aise. Finalement nous « possédons » ce lieu, nous n’y remarquons plus rien de particulier – notre conscience s’est en quelque sorte étendue à ce domaine. Il est alors temps de passer au point
ou chakra suivant. En poursuivant notre voyage vers l’intérieur, nous vivons ainsi un jeu cyclique d’interactions entre stabilité et agitation, samadhi inconscient et samadhi conscient. Pourquoi certains d’entre nous sont-ils capables de plonger profondément dans les différentes dimensions de l’expérience humaine, alors que d’autres semblent flotter à la surface, pris par les pensées, les émotions et les sensations physiques, et distraits par ce qui se passe autour d’eux ? Nous pouvons considérer le premier cas de figure comme une expansion verticale de la conscience dans différentes dimensions de l’existence, et le second comme une expansion horizontale dans une seule et même dimension de l’existence. Les deux ont leur place dans notre évolution, mais il est important de savoir les distinguer, car sans croissance verticale, nous n’évoluons pas. Si nous demeurons à la surface, nous pouvons devenir très habiles à observer nos pensées et nos émotions, mais nous resterons bloqués dans une
Aoû t 2018
51
La scie n c e d e l a spi r i t u a l i té
Mais, plus important encore, la méditation nous fait faire l’expérience du maître qui se trouve en-deça des « véhicules ». Nous découvrons de première main que nous ne sommes pas seulement les véhicules que sont le corps et le mental, mais aussi celui qui les utilise. Pranahuti, la transmission yogique, facilite cette expérience et, lorsqu’elle se produit, notre méditation prend son envol. Le maître qui est à l’intérieur est le témoin. Le corps et le mental ont pris leur juste place et nous pouvons alors nous identifier au maître intérieur, à la Réalité, à la cause de notre existence.
CORPS PHYSIQUE
sthoola sharir
CORPS SUBTIL
sookshma sharir conscience (chit) mind (manas) intellect (buddhi) ego (ahankar)
CORPS CAUSAL
Cela fait penser à une pianiste : elle se sert des touches, des cordes et des pédales du piano pour jouer de la musique, mais il est évident qu’elle n’est rien de tout cela – ce sont des « véhicules » qui lui permettent de faire de la musique. La pratique régulière de la méditation nous permet de comprendre cette différence, puisque notre conscience observe le mental pendant la méditation.
karana sharir atman
parcelle de conscience qui n’est qu’une infime partie de notre être.
L’OBJET DE LA MÉDITATION C’est là que l’objet de notre méditation devient très important : que voulons-nous devenir ? À quoi nous identifions-nous ? Nous avons longuement décrit dans les articles précédents les différents corps que nous possédons – le corps physique ou sthool sharir, le corps subtil ou sookshma sharir, qu’on appelle aussi le mental, et le corps causal ou karan sharir, l’âme. Notre corps et notre mental sont tous deux les « véhicules » de l’âme, laquelle est la cause de notre existence, le maître de notre existence. Le mental est l’interface entre le corps et l’âme. Pendant la méditation, ou à tout autre moment d’ailleurs, nous pouvons diriger notre attention soit vers la vie physique temporelle soit vers l’existence de l’âme, ou encore reconnaître et intégrer les deux, ce qui est la voie du yoga.
52
LES TROIS CORPS Les répercussions de cette compréhension sont stupéfiantes. Par exemple, une fois que nous nous identifions à la conscience et à l’âme, notre perception de la mort change. L’âme meurt-elle ? La conscience meurt-elle ? Seuls meurent le corps et les aspects du mental directement liés au corps, comme les sens et les canaux d’énergie. Quand nous quittons notre corps physique, c’est comme si nous enlevions des vêtements qui ne nous iraient plus. La plupart des aspects du corps subtil poursuivent le voyage avec l’âme : ce sont les fonctions que nous appelons manas (le mental contemplatif ), buddhi (l’intelligence), ahankar (l’ego) et chit (la conscience). De fait, le corps subtil s’en va avec notre âme au moment de la mort. Et une fois que nous sommes devenus pure conscience, ahankar devient pure identité. Quand nous restons témoins de la vie, l’ego se dissout, tandis que lorsque nous sommes occupés à « faire » dans le monde, l’ego en général se fortifie. L’astuce consiste
He ar tf u ln ess
La sc i e n c e d e l a spi r i t u a l i té
à apprendre à « faire sans faire », et c’est là aussi que la méditation entre en jeu. Quand nous méditons, nous sommes gratifiés d’un état méditatif. Si nous sommes capables de conserver la conscience de cet état tout au long de la journée dans nos activités, si nous laissons cet état s’écouler du Centre de notre être dans tout ce que nous faisons, nous apprenons alors à « faire sans être celui qui fait ».
LES SUTRAS DE PATANJALI Patanjali décrit ce concept dans ses sutras :
4.18 : Sada jnatah chitta vrittayah tat prabhu purusasya aparinamitvat Les activités du mental sont toujours connues par la conscience pure, parce que la conscience pure est supérieure au mental, elle le soutient et elle en est le maître. Ou plutôt, la conscience opère à travers le mental. Le Seigneur du mental est immuable.
Source de toutes choses, qu’on appelle aussi l’Ultime, l’Infini, l’Absolu ou Dieu. C’est de cette façon que nous déclenchons l’expansion verticale de notre conscience pendant la méditation – nous nous fixons sur le Centre et non sur la périphérie. Pendant que nous méditons, nous ne nous occupons pas d’analyser nos pensées ni de chercher comment nous améliorer au quotidien ; nous gardons cela pour un autre temps et une autre pratique. La méditation sert au contraire à plonger plus profondément, puisque ce qui nous intéresse à ce moment-là est l’expansion de la conscience, d’une conscience pure, d’une conscience dynamique. C’est la raison pour laquelle il est si difficile d’écrire sur les états méditatifs, car le langage qui décrit les choses est celui de la dualité, alors que nous allons au-delà de la dualité du mental, au-delà du mental, au-delà même de la conscience, vers ce qui est caché derrière tout cela – ce qui transcende la dualité.
SAMADHI
4.19 : Na tat svabhasam drishyatvat Le mental ne s’éclaire pas lui-même, car il est l’objet de la connaissance et de la perception de la conscience pure. Le mental est comme la lune, qui a besoin du soleil pour l’éclairer. Dans la méditation, lorsque nous nous connectons à la Source, la pure conscience universelle illumine le mental, ce qui, par la transmission yogique, peut se produire très rapidement. Cela nous fait prendre conscience, par exemple, que nous ne sommes pas centrés et nous aide à nous ajuster et nous recalibrer. Une fois que nous sommes centrés, le maître intérieur discipline et guide nos vies. Dans la pratique Heartfulness, nous établissons dès le début une connexion avec ce maître intérieur, si bien que nous nous focalisons directement sur le Centre de notre être, sur la Source. C’est la même Source que la
C’est grâce à cette connexion intérieure que nous sommes capables de plonger profondément dans la méditation et de voyager chaque fois un peu plus loin, en nous absorbant dans les différents niveaux de samadhi. Le samadhi est un état très recherché dans le yoga. C’est la huitième et ultime étape de l’ashtanga yoga de Patanjali. Dans les Sutras, Patanjali décrit le premier niveau de samadhi comme un état de conscience semblable à celui d’une pierre, où nous sommes inconscients de ce qui se passe. Cela est dû au fait que nous avons voyagé dans des parties de notre mental situées au-delà de la conscience. Dans le deuxième état, nous sommes dans un samadhi subconscient, comme dans les rêves, et dans le troisième, nous sommes à la fois pleinement conscients et absorbés, c’est ce qu’on appelle le sahaj samadhi. Dans la pratique Heartfulness, nous pouvons expérimenter assez rapidement les états plus subtils et plus évolués du samadhi. Le sahaj samadhi est une condition où nous sommes profondément absorbés dans la méditation, et en même temps pleinement conscients de tout ce qui se passe.
Aoû t 2018
53
La scie n c e d e l a spi r i t u a l i té
Dans les Yoga Shastras (traités de yoga), on l’appelle la condition de turiya, ou le quatrième état. Nous voyons tout – nous sommes conscients des bruits extérieurs, des pensées dans notre tête et de la connexion intérieure la plus profonde avec la Source. Tout cela est intégré en nous, et alors tout devient une expression de la partie la plus profonde de notre être. Notre conscience est entière et totale. Nous pouvons aussi emmener cet état dans nos diverses occupations quotidiennes. Nous sommes capables de nous concentrer simultanément sur notre travail, sur notre environnement, sur la télévision, sur ce qui se passe à l’extérieur, tout en restant en communion avec notre être intérieur. Nous pouvons voir en même temps le flux de la transmission et toutes les pensées qui surgissent, et décider de la prochaine étape où nous engager. Nous restons paisibles pendant que toutes ces choses se produisent simultanément. C’est ce que le yoga appelle l’état de turiyateet. C’est un état où, les yeux ouverts, nous avons accès au spectre complet de la conscience. Il n’est pas nécessaire de se centrer sur une chose en particulier. Dès que nous le faisons, il ne s’agit plus de méditation mais de concentration.
cette pratique, nous l’engageons sur le bon chemin, en l’amenant à transformer ses habitudes. Une fois cette transformation accomplie, nos pensées cessent, de façon naturelle, de s’égarer. » 1 « La méditation est la seule chose qui puisse vous conduire jusqu’au bout. Il n’y a pas d’autre moyen d’approcher le Centre. Nous avons vu qu’une seule pensée émanant du Centre avait créé un si vaste univers. Nous avons en nous la même force centrale, bien qu’elle soit gâchée par nos actions erronées. Nous utilisons le même pouvoir qui, en nous, est automatique. Nous travaillons avec cette même force dans la méditation. Voilà comment nous procédons de façon naturelle, en nous servant de la force de la Nature. » 2
LA SCIENCE DE LA MÉDITATION La méditation est encore bien plus que tout cela, car il y a derrière elle une vaste science, et elle est sous-tendue par une philosophie. La meilleure façon de l’étudier est de la pratiquer. Ram Chandra de Shahjahanpur en parle ainsi : « On peut se demander pourquoi il est nécessaire de commencer par la méditation au premier stade du raja yoga. La réponse est très simple. Nous nous rassemblons alors en un seul point, pour que notre mental individuel perde son habitude de vagabonder. Par
1 2
Raja Yoga, histoire et tradition, vol. 6, p. 100 Ibid, p. 101
54
He ar tf u ln ess
Kamlesh Patel, guide spirituel et responsable international Heartfulness, incarne cette rare fusion du cœur oriental et de l’esprit occidental. Dans une approche à la fois scientifique et pratique, il partage aujourd’hui son expérience de la méditation et de la spiritualité dans des conférences, des interviews et des cours dans le monde entier. Auteur de nombreux écrits, notamment sur l’évolution de la conscience, il vient de co-écrire The Heartfulness Way : Heart-Based Meditations for Spiritual Transformation. Pour en savoir plus : daaji.org
COMMENT MÉDITER? Asseyez-vous confortablement dans un endroit où vous pouvez méditer sans bruit ni distractions, de préférence au même endroit et à la même heure chaque jour. Éteignez votre téléphone portable et vos autres appareils. Fermez doucement les yeux et détendez-vous. Asseyez-vous le dos droit, mais sans rigidité. Pratiquez la relaxation Heartfulness pour détendre votre corps. Portez votre attention vers l’intérieur et prenez un moment pour vous observer. Ensuite, émettez calmement la suggestion que la Source de lumière est là, présente dans votre cœur. Pensez que cette lumière vous attire de l’intérieur. Faites cela de manière douce et naturelle. Il n’est pas nécessaire de vous concentrer. Si vous sentez que votre attention dérive vers d’autres pensées, revenez tranquillement à l’idée de la Source de lumière dans votre cœur. Laissez votre attention posée sur le cœur. Sentez que vous vous fondez dans cette perception. Vous allez peut-être franchir l’état de vigilance pour atteindre un état de détente profonde. Tout va bien. Restez en méditation jusqu’à ce que vous sentiez qu’elle est terminée.
fr.heartfulness.org
Libérez LE P OT E N T IE L QU I SO M M E IL L E E N VOUS ! CLARA SMITH, sportive de haut niveau en athlétisme, défend les couleurs de son pays, l’Australie, au niveau international. Elle partage ici certains de ses secrets pour accéder à la performance, en particulier comment conserver sa motivation à faire régulièrement de l’exercice et créer ainsi de saines habitudes.
S
ingulièrement, la différence entre la personne que vous êtes et celle que vous voudriez être est infime. Tous ceux qui pratiquent un sport au plus haut niveau ont un point commun : ils sont attentifs aux détails. Ils développent des habitudes et une discipline hors norme là où d’autres restent dans leur zone de confort. Ils savent prendre de petites décisions positives au quotidien. Le résultat ne s’en ressent pas au bout d’une semaine, mais à force de les entretenir pendant des mois ou des
56
S e d é pa sse r
années, ces habitudes gagnent en puissance et peuvent avoir un effet phénoménal. Il n’est pas question de talent, car ni les habitudes ni la discipline ne sont acquises dès la naissance. C’est une question de choix. La discipline est la base du succès dans n’importe quel domaine : c’est se lever tôt, traiter les gens comme on voudrait qu’ils nous traitent, accomplir les tâches qu’on n’a pas forcément envie de faire. Quand on commence à considérer la discipline comme un apprentissage plutôt qu’une punition, notre cheminement devient très positif. Selon moi, un athlète qui s’entraîne à l’endurance donne l’exemple parfait de l’union du corps, du cœur et de l’esprit. Une des raisons pour lesquelles tant de gens n’arrivent pas à se rendre au fitness, c’est qu’ils savent que ce sera douloureux, et ils abandonnent. Mais en abordant les choses dans la perspective d’un mental régulé, on apprend à se battre d’abord avec lui, ce qui facilite les combats avec le physique. De fait, on entend souvent dire que le plus difficile, dans une séance d’entraînement, c’est de sortir du lit et de se rendre au fitness, alors que l’athlète, lui, développe la constance. Dès lors que vous vous entraînez régulièrement, votre corps réagit naturellement et vous pouvez le pousser de plus en plus loin jusqu’à atteindre 100% de ses capacités. Un athlète sait qu’une fois la routine établie, tout devient plus facile. C’est pourquoi la réussite d’un exercice commence dans le mental. Comment parvenir à cette stabilité mentale ? Il n’y a pas de plus grande maîtrise que la maîtrise de soi : c’est la clé de toutes les maîtrises. Pour y parvenir, pour voler, nous avons besoin de deux ailes, l’une spirituelle et l’autre matérielle. Quand on ne s’assure le succès que dans la sphère matérielle, on rencontre un problème : le succès, ça va, ça vient. On peut avoir un emploi bien rémunéré, être riche, être un athlète qui réussit… et tout cela peut disparaître. On peut perdre son emploi, son argent – ou se blesser et devoir renoncer à sa carrière. C’est pourquoi tant d’athlètes à la retraite, ou qui ne sont plus sous la lumière des projecteurs, deviennent dépressifs. Ils se retrouvent d’un coup livrés à eux-mêmes, dans un monde incon-
nu : leur moi intime. Il faut donc nous concentrer sur ce que nous sommes à l’intérieur autant que sur nos succès extérieurs. La méditation Heartfulness, ainsi que d’autres techniques, m’a aidée à améliorer mon bien-être physique et mental. J’aime citer cette pensée profonde de William Penn : « Le vrai silence est le repos de l’esprit ; il est à l’esprit ce que le sommeil est au corps, nourriture et ressourcement. » Il avait raison. On sait aujourd’hui que la méditation a pour effet de modifier notre corps au niveau cellulaire. Selon des recherches publiées dans la revue internationale « Frontiers in Immunology », la méditation a la capacité d’inverser dans notre ADN les réactions moléculaires qui mènent au stress, à une altération de la santé et à la dépression. Ces nouvelles découvertes ont changé la donne par le fait qu’elles nous attribuent un pouvoir bien réel : en nous engageant à méditer 10 à 20 minutes par jour, nous pouvons améliorer notre santé, réduire le stress, être plus concentrés et renforcer notre détermination à atteindre le but. Voici le défi que je vous lance : sortez de votre routine habituelle pour expérimenter la méditation et apprendre ainsi à régler votre mental en passant de la pensée au sentiment, afin de déverrouiller et libérer ce potentiel inexploité qui n’attend que ça au fond de vous.
Aoû t 2018
Ce monde est une montagne, l’écho qu’il renvoie dépend de vous, si vous criez de belles choses, il vous les donnera en retour. Si quelqu’un dit du mal de vous, dites du bien de lui ; changez votre cœur pour changer le monde. Cham de Tabriz 57
le goût de la vie
Un cœur joyeux est un bon remède, mais un esprit abattu assèche les os. Proverbes 17 : 22
Médecine &
MÉDITATION FIN
Le DR GARY HUBER, interviewé par VICTOR KANNAN, continue de nous décrire les effets de la méditation sur la santé et le bien-être.
Q
Est-ce que vous recommandez la méditation aux enfants ?
Oui, et je pense qu’il est important que nous, les adultes, réalisions que les enfants sont très intelligents et qu’ils comprennent beaucoup de choses, si nous leur en parlons. On ne devrait pas les traiter en bébés. Si vous leur parlez de nourriture, ils comprennent. Si vous leur parlez de méditation et de pleine conscience, ils comprennent, parce qu’ils se le représentent mieux que nous.
Q 60
Intéressant !
Lorsqu’ils font du coloriage ou jouent à un jeu tranquille, ils ne sont pas distraits, ils ne font pas plusieurs choses à la fois. Ils sont donc en méditation dès leur plus jeune âge. J’ai appris à méditer à mes enfants quand ils avaient 9 ou 10 ans, et j’aurais commencé plus tôt si je l’avais su, mais je n’en étais pas du tout conscient. Cela commence par une conversation ; il suffit d’en parler avec eux, et la méditation leur semble très naturelle parce que, justement, elle l’est. Je pense que c’est particulièrement important pour les enfants, à l’heure où l’iPhone fête son 10e anniversaire. Ils sont immergés dans ce concept global qui veut que leur cerveau soit abreuvé d’images numériques 24 h sur
He ar tf u ln ess
Mé d e c i n e i nté g ra t i ve
24 – une déferlante d’informations qu’ils sont littéralement dans l’obligation d’esquiver. Comment vont-ils y parvenir ? En activant le mode « suppression ». Remontez quelques centaines d’années en arrière : comment faisait Léonard de Vinci pour apprendre quelque chose de nouveau ? Il devait prendre son cheval et gagner une autre ville, en vue de rencontrer un érudit ou de tomber sur un livre qu’il n’aurait pas encore lu. Il fallait qu’il sorte, qu’il aille au-devant de l’information. À présent les enfants en sont gavés à un rythme si effarant que si nous ne leur enseignons pas comment méditer ou calmer leur esprit et se relaxer, tout cet afflux digital finira par les briser. C’est cela qui me préoccupe.
Q
Pensez-vous que notre époque favorise l’émergence de nouvelles pathologies, tel le trouble du déficit de l’attention (TDA) ? Absolument. Les maladies auto-immunes sont en hausse, les troubles du spectre autistique sont en hausse et les maladies dégénératives explosent. Ces maladies ont décuplé en une génération. Dans le cas du TDA, je dis aux parents : « On a diagnostiqué un TDA chez votre fils. Vous savez ce que ça signifie ? Cela signifie un Tas de Décisions Aberrantes. » Le TDA n’est pas une maladie, et je le leur fais comprendre en les interrogeant : « A-t-on fait des analyses médicales pour diagnostiquer ce TDA ? Des radios ? Un scanner ? » À toutes mes questions, ils ne peuvent que répondre : « Non ». Comprenez-moi bien. On répertorie une liste de symptômes comme l’inattention, les difficultés scolaires, les crises de colère, et on colle en vrac à tout ça le diagnostic TDA. Mais ce ne sont que des symptômes, l’enfant n’a pas de maladie – il a juste un problème, et la question est de savoir pourquoi il manifeste ces symptômes.
En réalité tout cela provient de ce que je considère comme un Tas de Décisions Aberrantes. On nourrit les enfants de céréales sucrées, de chips, de sodas, de bonbons et autres cochonneries transformées. On ne leur donne ni légumes, parce qu’ils n’aiment pas ça, ni légumineuses. On leur donne ce qu’une mère a un jour appelé de la « kid food » ; qu’est-ce que c’est ? Des hotdogs, des macaronis, du fromage et des saloperies de produits industriels. On les nourrit de toutes ces saletés, puis on les colle devant des jeux vidéo pendant trois heures, à se prendre des flashs lumineux plein les yeux, on les laisse veiller tard, ils n’arrivent plus à s’endormir et ils manquent de sommeil. Comment leur cerveau va-t-il réagir à tout ça, selon vous ? Croyez-vous qu’il restera calme ? Non, il va s’agiter dans tous les sens et on dira de l’enfant qu’il est hyperactif. Il importe de savoir à quoi nous exposons nos enfants, et de prendre ensuite les bonnes décisions. Mais faire méditer les enfants est un concept étranger à notre culture occidentale, du moins aux États-Unis.
Q
Avez-vous constaté les bienfaits de la méditation chez les enfants, en particulier ceux qui souffrent de TDA et de troubles de ce genre ? Eh bien, je la recommande systématiquement à mes patients, mais combien d’entre eux s’y engagent durablement et reviennent me voir, c’est une autre question. Alors, non, je ne peux pas dire que j’aie vu la méditation réduire le TDA, mais j’en ai constaté les bienfaits chez mes enfants. Un jour, mon fils avait un match de foot très important au lycée, il était très stressé. Le soir, il m’a dit : « Papa, j’ai médité pendant 5 mn avant le match et je me suis senti vraiment mieux, je crois que ça m’a aidé à bien jouer ». J’étais stupéfait, non pas que ça l’ait
Aoû t 2018
61
Pour faire prendre conscience d’un déséquilibre, voici quelques questions simples à poser : « Pensez-vous qu’il soit raisonnable d’espérer avoir de l’énergie quand on ne dort pas ? Je parie que vous traitez mieux votre voiture que la machine qu’est votre corps : vous la faites vidanger tous les 10 000 km, vous effectuez des contrôles réguliers, vous changez les pneus. Et pour vous-mêmes, que faites-vous ? Quel genre de carburant mettez-vous dans votre moteur ? À cela, mes patients répondent : « C’est vrai que je ne fais pas ce qu’il faudrait, mais j’y suis obligé parce que je n’ai pas le temps : il y a les enfants, des tas de choses à faire, mon boulot et tout ce qu’on me demande à côté. » Alors, pour les faire réfléchir, je rétorque doucement : « Qui a rempli votre vie de toutes ces exigences ? Quel est cet être affreux qui vous fait faire tout cela ? Vous-même ». En fin de compte, c’est nous les responsables.
aidé, mais qu’il m’ait écouté, qu’il ait fait ce dont nous avions parlé. Et je reçois aussi quelques enfants qui me disent : « Oui, je médite, et je trouve que ça m’aide ». Je sais que ça marche. Souvent, il suffit que les parents encouragent leurs enfants pour qu’ils s’y mettent.
Q
La vie moderne est déséquilibrée. Nous mangeons de la malbouffe, nous dormons moins et nous nous angoissons. Nous créons notre propre déséquilibre, volontairement ou sans nous en rendre compte. Alors, que faire pour comprendre que nous sommes déséquilibrés, et pour ensuite nous rééquilibrer ? 62
Ainsi, beaucoup d’entre nous sont mariés avec leur ego. Lorsque j’affirme cela, les gens rétorquent : « Êtes-vous en train de dire que je suis égoïste ? » Non, nous avons tous un ego, qui n’est jamais au repos. Il est toujours occupé à poursuivre ce qu’il désire ou à fuir ce qu’il craint. Nous passons notre vie à penser que nous devons être comme ceci ou comme cela, conduire telle voiture ou fréquenter tel club. C’est ça, l’ego. Lorsque nous cessons d’agir ainsi et cherchons notre bien-être dans le silence, dans ce que nous sommes, dans les plaisirs simples, la vie commence à ralentir. On y trouve un niveau de bien-être et de satisfaction qu’on n’obtiendrait jamais en étant marié avec son ego. Et on ne pourra rien acheter au centre commercial qui nous rende aussi heureux que de vivre le moment présent. En essayant de faire passer ces idées, qui font naturellement partie de la méditation, je tente d’encourager les gens à manger mieux, à faire de l’exercice. Mais si
He ar tf u ln ess
Mé d e c i n e i nté g ra t i ve
Je pense qu’il est important que nous, les adultes, réalisions que les enfants sont très intelligents et qu’ils comprennent beaucoup de choses, si nous leur en parlons. On ne devrait pas les traiter en bébés. Si vous leur parlez de nourriture, ils comprennent. Si vous leur parlez de méditation et de pleine conscience, ils comprennent, parce qu’ils se le représentent mieux que nous.
nous n’avons pas le désir de changer notre regard sur notre vie et d’en prendre le contrôle, nous ne sommes pas au bout de nos peines.
Q
Certaines personnes ne savent pas quel système de méditation choisir. Que recommanderiez-vous ? Je pense qu’il y a de multiples façons de méditer. Je suis un grand fan de l’approche Heartfulness, mais je reconnais que la méditation transcendantale, la méditation de pleine conscience et d’autres encore sont elles aussi remarquables. Ce sont d’excellentes portes d’entrée et elles se rejoignent, elles ont beaucoup de points communs. Prenez la voie dans laquelle vous vous sentez à l’aise. La clé, c’est d’entrer dans la piscine. C’est comme faire de l’exercice : il n’y a pas d’exercice parfait. Il y a toutes sortes de façons de faire bouger son corps. Découvrez ce qui marche pour le vôtre.
Q
Avez-vous des conseils à donner aux jeunes médecins qui débutent dans leur pratique, surtout en cette période de nouvelles maladies, de nouveaux défis et de nouveaux modes de vie ? Je dis à ces jeunes gens que nous aurons toujours besoin de chirurgiens thoraciques, d’urgentistes, de médecins traditionnels, mais j’aimerais que tous les médecins aient une certaine compréhension de la médecine intégrative. On ne nous l’enseigne pas dans les écoles de médecine. Particulièrement pour ceux qui deviendront médecins de famille, internistes ou généralistes, j’adorerais que l’approche intégrative, qui utilise la méditation comme outil, fasse partie de la formation. Et j’aimerais aussi qu’ils aient une formation en nutrition.
Il y a quelques jeunes internes des hôpitaux qui s’intéressent au modèle intégratif et qui parlent à leurs patients des bienfaits du sommeil, de l’alimentation, de la méditation et de l’exercice. Je ne sais pas ce qu’il faudrait pour réaliser ce projet à une plus grande échelle, en plus de ce que Heartfulness fait déjà en diffusant ce message. J’espère que mes collègues seront de plus en plus nombreux à y adhérer. La médecine intégrative suscite un intérêt croissant. Je donne des conférences à l’American Academy of Anti-
Aoû t 2018
63
Q
+
+
+
Méd e c i n e i nté g ra t i ve
On parle de méditer sur le cerveau, de méditer sur le cœur, on dit que la méditation a des effets sur le cœur, sur le cerveau, sur la fréquence cardiaque, etc.
Aging Medicine et au Metabolic Medicine Institute de l’Université George Washington, où des médecins viennent l’étudier.
Q
Je suis impressionné par toutes les informations qu’on trouve sur www.nih.gov. On y publie de nombreuses études et on y fait la promotion de la méditation pour la santé. Il existe toute une littérature sur le sujet. Il y a 120 articles sur des recherches faites par IRM sur des personnes pratiquant la méditation, qui font état de changements. C’est devenu une science exacte. Il ne s’agit là que des recherches par IRM, mais il y a aussi des centaines d’autres études. Nous disposons maintenant de preuves.
Q
Que pensez-vous de la connexion cœur-cerveau ? Vous ne pouvez vivre ni sans l’un, ni sans l’autre !
Q
J’aime votre sens de l’humour !
La vie ne devrait pas être ennuyeuse ; s’ennuyer, ce n’est pas amusant…
64
Tout a des effets sur tout. Le stress réduit le fonctionnement de la thyroïde, diminue les hormones sexuelles et augmente le taux de sucre dans le sang. Il affecte le cerveau et le sommeil. Le cœur et le cerveau ne sont que deux organes, deux pièces du puzzle, et ils envoient et reçoivent des milliers de signaux par minute. La méditation a un impact sur le nerf vague. Nous avons un système parasympathique, qui engendre le calme, la détente, le confort, et un système sympathique qui nous dit : « Allez, allez, cours, agis, passe à l’attaque ! » Ces signaux circulent entre le cerveau et le cœur, seconde après seconde. La méditation agit sur les irrégularités du rythme cardiaque, c’est-à-dire les différences d’intervalle entre chaque battement du cœur. Grâce à ces mesures, nous constatons que la méditation les améliore. Je ne pense pas qu’on puisse séparer le cœur et le cerveau, tellement ils sont entremêlés. La conscience et la pensée ne se situent pas seulement dans le cerveau ; chaque cellule de notre corps a une conscience. Quand nous comprenons cela, nous savons que chaque partie de notre corps joue un rôle. Nous ne sommes rien d’autre qu’une boule d’énergie. Ces énergies se déplacent et fluctuent de différentes manières, qui souvent échappent à nos mesures. La pensée n’est pas seulement dans le cerveau : toutes les parties communiquent d’une certaine façon.
Q
La méditation peut-elle nous aider dans notre vie relationnelle ? Oh que oui ! Mes relations se construisent sur le socle de ma décontraction et de ma confiance en moi. Si je suis stressé et marié avec mon ego, si je doute de moi
He ar tf u ln ess
Mé d e c i n e i nté g ra t i ve
et que je suis dispersé, habité par des envies et des peurs, il sera plus difficile d’établir une relation avec moi qu’avec quelqu’un de calme et qui sait jouir du moment présent.
Q
Les capacités d’empathie et d’écoute profonde sont des qualités essentielles pour la vie en société. Pour ressentir de la bienveillance et de l’empathie envers quelqu’un et comprendre sa situation, il faut se décentrer de soi-même et s’ouvrir à l’expérience des autres. La méditation m’a aidé à le faire dans ma vie personnelle. J’ai grandi dans une famille aimante avec cinq enfants, une mère et un père. Vous allez dire : « Ah, la famille américaine type ! » Ma mère, que Dieu la bénisse, s’est donné beaucoup de peine. Elle a fait beaucoup de bonnes choses, mais elle était très catégorique dans ses jugements, ce qui a déteint sur moi dès mon plus jeune âge. À vingt ans, j’étais assez dur,
j’avais des idées bien arrêtées sur ce qu’était la vérité ; je voyais tout en noir et blanc, je n’étais pas ouvert d’esprit. Apprendre à méditer m’a vraiment aidé à me changer, à transformer ma physiologie, à devenir bienveillant, plus ouvert et tolérant.
Q
C’est un exemple de la façon dont l’épigénétique nous influence. Les choix que nous faisons ne sont pas définitifs, nous pouvons changer qui nous sommes et ce que nous faisons. Oui, à tout moment !
Q
Nous ne naissons donc pas avec une destinée inéluctable ; nous pouvons la changer.
Aoû t 2018
65
Méd e c i n e i nté g ra t i ve
Je suis d’accord à 100 % avec ça. La destinée dépend de ce que vous décidez d’être. Votre marge de manœuvre est illimitée. En un instant vous pouvez décider de penser différemment, d’être plus large d’esprit, cela ouvre des portes et change le cours de votre vie.
Q
Avez-vous une prescription simple à nous donner pour la vie de tous les jours ? C’est une excellente question. Je dis souvent à mes patients : « Écoutez, la vie est assez simple, c’est nous qui la compliquons. On peut la rendre aussi compliquée ou aussi simple qu’on le veut. » Pour être heureux et en bonne santé, nous avons besoin de ces quatre choses basiques : - une bonne nourriture, - du sommeil, pour que notre corps se désintoxique et que notre cerveau se recharge : un bon sommeil prépare notre corps tout entier pour la journée qui vient, - de l’exercice physique, quelques mouvements de base : notre corps est fait pour bouger, - savoir gérer le stress. Si vous respectez ces quatre points, votre corps fonctionnera naturellement. Au lieu de vous complaire à trop travailler, à vous surmener, à être constamment occupés, à manger des cochonneries et faire tout de travers, simplifiez-vous la vie ! Gérer le stress, c’est lâcher prise. C’est méditer et faire de l’exercice. Pour contrebalancer le stress, cultivez vos passions ! Caressez le chien, prenez votre femme dans vos bras, passez du temps avec vos enfants, pêchez si vous aimez la pêche, mais faites quelque chose que vous aimez, qui vous fasse du bien, qui vous fasse sourire. La passion est nécessaire pour équilibrer l’équation. Voilà mon ordonnance.
66
He ar tf u ln ess
La conscience et la pensée ne se situent pas seulement dans le cerveau ; chaque cellule de notre corps a une conscience. Quand nous comprenons cela, nous savons que chaque partie de notre corps joue un rôle. Nous ne sommes rien d ’autre qu’une boule d ’énergie. Ces énergies se déplacent et fluctuent de différentes manières, qui souvent échappent à nos mesures.
Pour en savoir plus Blog du Dr Garr y Huber https://w w w.huberpm.com
Jardin CAC H É KAYLAN MICHAEL, alias Lost in the Island, est une artiste multidisciplinaire qui réside actuellement à Montréal, au Canada. On a dit de son art qu’il était spirituel, mystérieux, abstrait, électrique et futuriste. Instagram @lost_intheisland
La motivation derrière mon art est de briser les règles et de ne me figer dans aucun moule, tout en édifiant l’expression de soi. Je suis inspirée par la vie – les expériences, la science, la mode, la musique, l’univers, la spiritualité et la nature. Je suis poussée par mon moi intérieur, mon humeur et le moment de la journée. C’est thérapeutique et en même temps une façon de libérer mon esprit créatif. D’autres artistes indépendants et amis m’inspirent aussi et me poussent à aller plus loin dans mon expression. Pour créer un collage ou une œuvre d’art, je détermine d’abord son humeur, qui peut être basée sur mon état d’esprit du moment, une situation qui s’est produite auparavant, ou une chose qui cherche à s’exprimer. Puis j’écris un court poème, qui m’aide à décider quel
élément sera incorporé dans l’œuvre et quelle énergie globale la traversera. Ensuite, j’esquisse quelques idées pour visualiser ces pensées et sélectionner l’image principale. Mon imagination me porte. Je travaille en général avec des portraits de femmes. Dernièrement, j’ai commencé à utiliser Photoshop. De nouvelles idées me viennent souvent en cours de route, alors je suis ce flux et laisse mes émotions s’exprimer pendant le processus créatif. Après Photoshop je soumets le collage final à Lightroom pour une retouche photo. Chaque œuvre est une partie de moi que je partage. « Jardin secret » représente la croissance. Être capable de persévérer, d’aller de l’avant sans se soucier des périodes sombres – c’est une force. Il y a de la lumière au bout du tunnel.
P ETI T DÉ JEUNE R
Smoothie alcalin Photos et recettes de SIMONNE HOLM Alkaline-Institut.com
POUR 2 PERSONNES
INGRÉDIENTS 2 grosses poignées d’épinards 1 gros citron sans écorce 1 poivron vert 1 avocat Un petit morceau de gingembre frais râpé Une pincée de sel de l’Himalaya 2 à 4 c à s d’huile d’olive extra vierge 1 c à s de graines de chanvre ou de graines de chia moulues 1 tasse d’eau fraîche (moins d’eau pour un bol de smoothie) Mélangez le tout et ajoutez l’huile en dernier. GARNITURES Graines de chanvre et/ou de chia. Pour les débutants dans le régime alcalin, vous pouvez ajouter un peu de fruits, par exemple du pamplemousse rose, de la pastèque ou des baies. SUBSTITUTIONS Poivron vert = concombre Avocat = moins d’eau ou alors plus d’huile et plus de légumes Huile d’olive = huile de coco extra vierge Épinards = feuilles vertes, salades et chou vert
68
He ar tf u ln ess
C u i si n e a l c a l i n e
Merci, Terre mère, de m’avoir donné cette belle et bonne nourriture, nutritive et transformatrice. Je sens la terre, et je sens le soleil, l’eau et l’oxygène qui tous contribuent à notre vie sur terre. Je les respecte, je prépare cette nourriture avec reconnaissance et tout mon amour, et je la sers à mon bien-aimé qui sentira sa lumière. S I MON N E
Aoû t 2018
69
Yogasanas Heartfulness PACHIMOTTANASANA Posture de l’étirement de l’ouest
Première étape Prenez la position de dandasana. Écartez les jambes autant que possible sans plier les genoux en essayant de former un angle d’environ 90 degrés. En inspirant, levez les bras en l’air. En expirant, penchez-vous en avant et placez les paumes des mains sur le sol.
70
Étirez le corps en avant aussi loin que possible et tentez de toucher le sol avec le front. Sentez l’étirement à l’intérieur des cuisses. Maintenez la posture en pratiquant six inspirations et expirations longues, douces et profondes. En inspirant, remontez lentement.
Deuxième étape En expirant, penchez-vous vers la droite, le front touchant le genou, les paumes des mains tenant les orteils. Sentez l’étirement à l’intérieur des cuisses. Maintenez la position en pratiquant six inspirations et expirations longues, douces et profondes. En inspirant, remontez lentement.
He ar tf u ln ess
BIENFAITS En expirant, penchez-vous vers la gauche, le front touchant le genou, les paumes des mains tenant les orteils. Maintenez la posture en pratiquant six inspirations et expirations longues, douces et profondes. En inspirant, remontez lentement. En expirant, relâchez les bras sur les côtés.
Troisième étape Asseyez-vous dans la position de dandasana.
Essayez d’amener la poitrine aussi près des cuisses que possible. Baissez le front et essayez de le poser sur vos genoux. Gardez les genoux tendus et les pieds réunis. Détendez les muscles du dos, et restez dans cette position en pratiquant six inspirations et expirations longues, douces et profondes.
Pachimottanasana étire toute la colonne vertébrale, tonifie ses muscles et les nerfs qui leur sont associés. Il étire tout l’arrière du corps, des talons au sommet de la colonne vertébrale. Il améliore l’activité des nerfs spinaux.
En inspirant, étirez les bras vers le haut.
Il assouplit les articulations de la hanche.
En expirant, abaissez les bras, quittez la posture et détendez-vous dans la position de sithila dandasana.
Il tonifie et masse les organes abdominaux – le foie, le pancréas, la rate, les reins et les glandes surrénales.
En inspirant, étirez les deux bras au-dessus de la tête.
Il aide à éliminer l’excès de graisse de la région abdominale et des cuisses.
En expirant et tout en maintenant l’étirement, penchez-vous en avant à partir des hanches, la tête et le tronc allant aussi loin que possible, et tentez d’attraper les orteils ou les chevilles.
Il est utile en cas de troubles digestifs, en renforçant les organes et le tractus digestifs. Il régule les fonctions du pancréas, qui contrôle le métabolisme des glucides et le taux de sucre dans le sang, et de ce fait aide à guérir le diabète.
Gardez la tête entre les avant-bras et sentez l’étirement de la colonne vertébrale.
Il tonifie les organes reproducteurs.
Aoû t 2018
71
72
LE BILLET
de Daaji
Religion
Spiritualité
Dévotions plusieurs fois par jour.
Le cœur s’abandonne à la dévotion 24h/24.
Le « je » domine.
Le « nous » est l’attitude clé.
Il s’agit globalement d’apprendre.
Il s’agit de désapprendre.
S’oppose souvent à la vie.
Transcende aussi bien les confirmations de la vie que ses antagonismes.
A tendance à se dissocier
Il s’agit d’intégrer les deux aspects,
de l’existence
matériel et spirituel, de la vie.
Le yatra, le pèlerinage,
Le yatra est toujours INTÉRIEUR,
consiste souvent à se rendre
il nous fait passer d’un chakra
dans certains lieux.
à un autre.
C’est généralement une approche
L’approche devient toujours
plus pesante.
plus subtile.
On reste attaché aux formes.
Il s’agit d’aller à la fois au-delà des formes et de ce qui n’en a pas.
Les dévotions sont offertes
C’est vous qui êtes le dévot.
par un intermédiaire, à votre
PERSONNE NE PEUT AGIR
place.
À VOTRE PLACE.
73
en ligne FE ST IVITÉ S Ces Rencontres sont un événement festif, musical, familial et convivial autour du Cinéma documentaire. 5 au 9 septembre 2018, Mirabel et Blacons (Drôme) - Prix libre Ce festival veut créer un espace de visibilité pour des œuvres documentaires inédites, portées par un collectif de réalisateurs, producteurs, diffuseurs et amateurs passionnés, de la Vallée de la Drôme. Il vise à rapprocher le documentaire des spectateurs, soutenir les jeunes talents et permettre un échange autour de la « fabrique documentaire » - de l’écriture au tournage et du montage à la diffusion. Des concerts ouvrent chaque soirée avant les projections en plein air ; une buvette et de la nourriture locale et de saison vous sont proposées midi et soir. Et nous serons aussi présents… www.lesrencontresadhoc.com
74
L’APPL I L ET ’S M EDITATE VERT PO P Du 23 au 26 août à Liège ! Vert Pop, c’est participatif, ouvert, prospectif, c’est la grande fête de l’écologie. Entre « université d’été en journée » et « fête le soir », le rendez-vous des Journées d’Été, devenu incontournable depuis maintenant 26 ans, va dorénavant plus loin dans la découverte et l’ouverture. Prendre l’air à la rencontre des nouvelles créations qui font bouger le monde, dans de multiples formats : débats, formations, festival des Nouveaux Mondes, le Off...
Méditer avec un formateur Heartfulness à toute heure et en tout lieu. Télécharger l’application Let’s Meditate sur Android ou iOs letsmeditate@ heartfulness.org
PRÈS DE CHEZ VO U S
L’atelier méditation Heartfullness aura lieu vendredi 24 et samedi 25 août, à partir de 8h.
Trouvez un formateur Heartfulness près de chez vous ! Explorez les Heartspots et les centres pour participer aux méditations de groupe et aux événements.
Retrouver le programme vertpop.etopia.be
fr.heartfulness.org contact@heartfulness.fr
Week-end plus
DEVEN I R 3 master classes Découvrez le « Heartfulness Way » dans trois master classes de méditation en ligne gratuites, conduites par Daaji. Il vous enseignera les bienfaits multiples de la méditation quotidienne. Ces master classes sont accessibles dès votre inscription, et tout au long de la journée. Chaque session dure de 35 à 45 min. fr.heartfulness.org/ masterclass
Saines Gourmandises en Drôme
de magazine
L E M ISO
A B O NNEMENT
Le miso, un ingrédient merveilleux à découvrir !
Magazine Heartfulness
Du 9 au 11 novembre 2018, au cœur de la Bio Vallée, venez apprendre, vous régaler et vous ressourcer, dans un cadre privilégié, avec Félicie Toczé consultante, cuisinière et auteure en alimentation saine et végétale. Apprenez à réaliser votre miso maison, suivez un cours de cuisine de miso au quotidien et régalez-vous d’un dîner en table d’hôte où le miso sera mis à l’honneur, tout en profitant des lieux (piscine chauffée, sauna, balade dans une nature sublime).
L’abonnement annuel (12 nos) est disponible en ligne pour 62€ (France) et 66€ (Europe) frais de port inclus. Vous pouvez le commander dès aujourd’hui. unimeo.com Un cadeau inspirant à s’offrir et à offrir à vos proches pour vous accompagner tout au long de cette année ! Vous pouvez aussi découvrir le magazine en vous abonnant gratuitement au e-magazine. heartfulness-magazine.fr
Contact 06 63 97 68 27 ou contact@felicietocze.fr
75
Pearl CULTIVER LE SILENCE CE NT RE DE RE TRAITE DANOIS Faites une pause dans votre vie quotidienne et prenez le temps de vous connecter à votre Soi dans le silence d’un écrin de verdure enchanteur. Tentez cette expérience qui mène à la paix intérieure et à la clarté du mental grâce à une connexion plus profonde avec le cœur. Ces retraites silencieuses durent de 3 à 15 jours. Cette retraite est ouverte à tous ceux qui pratiquent régulièrement la méditation Heartfulness depuis au moins un an. Pour plus d’information, envoyez un mail à : retreat@vradssandeashram.dk
W EB INA IR E HEA RTFU L NE S S La méditation peut-elle soulager la dépression et l’anxiété ? 25 août 2018 Webinaire avec le Dr Gary Huber, lauréat du Leadership Award attribué par le magazine Venue, pour son travail en médecine intégrative. « Sommes-nous les artisans de notre propre malheur ? Pour beaucoup d’entre nous, la vie moderne va trop vite ; le sentiment d’ être inadéquat nous rend anxieux, voire dépressifs, et nous fait parfois accuser quelque chose ou quelqu’un. Mais la réponse est peutêtre en nous. Est-il possible que nous ayons perdu le contact avec notre véritable essence et adopté un style de vie artificiel et malsain ? » En anglais Inscription : http://webinar. heartfulness.org
76
F O R M ATIO N Le Yoga Heartfulness, formation pour enseignants Diplôme supérieur de yoga avancé. Apprenez à enseigner les huit étapes du yoga et à associer l’art traditionnel du yoga à une approche professionnelle moderne. Chennai – 1er au 29 novembre 2018 (en anglais) http://education. heartfulness.org/yogatrainers
Un partenaire fiable pour mener à bien vos projets d’énergies renouvelables, d’éclairage et de gestion de l’énergie
www.amarenco.fr
Un euro par jour Partout dans le monde, de plus en plus de personnes font l’expérience de la méditation Heartfulness. Le succès des événements, programmes et ateliers organisés par Heartfulness montre que cette approche simple de la spiritualité touche les cœurs.
Selon l’idée que les petits ruisseaux font les grandes rivières, la Fondation Sahaj Marg Spiritualité a créé le fonds « Un euro par jour » pour soutenir financièrement les activités Heartfulness en Europe et dans le monde. En mettant de côté une petite somme chaque jour sans déséquilibrer son budget, chacun peut contribuer à la construction d’une nouvelle « civilisation du cœur ». Soyons nombreux à rejoindre ce grand élan !
www.one-euro-a-day.ch