Projet de Fin d'Etude - Part II : Les rouages du système

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L’ARCHITECTE ET LE LOGEMENT SPÉCIALISÉ

OU COMMENT REPENSER LES MÉTHODES DE CONCEPTION / CONCERTATION

#2 SAUVEZ LA CARRIÈRE DE FRANCK CALDERINI: LES ROUAGES DU SYSTÈME

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TESTER DES POSSIBLES - LE LIVRE DONT VOUS ÊTES LE HÉROS Les documents qui vont suivre recomposent un parcours architectural projectuel à choix multiples. Ils sont adressés aux décideurs de la ville, mais aussi à ceux qui en subissent les ordonnances.

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Au vu de l’analyse historique, politique et architecturale que nous venons de traverser, nous remarquons que les méthodes mises en place pour concevoir

les résidences sociales ne permettent pas de répondre dignement aux besoins des travailleurs migrants. Ce document propose alors de comprendre les rouages du système locatif spécialisé pour pouvoir appréhender dans quel ensemble de contraintes s’intègre le travail des architectes.

Lors de cet exercice, vous changerez de peau, et prendrez le rôle de Franck Calderini, le directeur général de Coallia. Au fils du récit, vous découvrirez les décisions prises par le bailleur social du foyer des Mûriers depuis 2007 jusqu’en 2014, concernant sa transformation en résidence sociale. Y seront alors confrontées d’autres alternatives.

Tout au long du récit, et grâce aux différents chemins exposés, surviennent des doutes qui remettent en question les méthodes de conception, de concertation et le rôle de l’architecte. Néanmoins, cet exercice, n’ayant pas pour but de faire de ces expériences, des références dogmatiques, (comme le ferait une recette de cuisines infaillible), reste arbitraire, et tend à montrer


que le hasard a parfois lui aussi sa part de responsabilité dans l’équation. Les différentes directions qui s’offrent à vous ne peuvent donc pas explorer tous les possibles pour trouver «la vérité», mais proposent de peser le pour et le contre de chacune des expériences recueillies. Si cette prospection est arbitraire, elle n’en reste pas moins réaliste, et appuyée sur des recherches, des expériences,

des récits, des méthodes théoriques ou appliquées. Plus qu’une critique des démarches employées par Coallia, ce jeu permet de prendre conscience des mécanismes du système de conception architecturale de ce type de logement. Ce second livret prétend également à une fonction pédagogique puisqu’il est également un recueil de méthodes.

Toutes ressemblances avec des personnes ou des situations existantes, ne seront alors pas fortuites.

FRANCK CALDERINI D.G. COALLIA

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DÉROULÉ DU PROJET DE DU FOYER DES MÛRIERS SAUVEZ LA CARRIÈRE DERÉHABILITATION FRANCK CALDERINI ! CHOISIR L’ÉQUIPE DE QUI S’ENTOURER?

CONCERTATION COMMENT?

PROGRAMMATION QUELLES TECHNIQUES?

APPEL À CONCURRENCE QUELLES DEMANDES POUR LES ARCHITECTES?

SÉLECTION QUELS CRITÈRES?

A

03/2007

02/2007

1 MOIS

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2 AN et 8 MOIS

QUEL SUIVI ?

5 MOIS

INAUGURATION QUELLE RÉCEPTION ?

1 MOIS

2 ANS 01/2014

1 AN et 8 MOIS

QUEL JURY?

TRAVAUX

01/2012

QUELLES ENTREPRISES?

SÉLECTION

12/2011

QUAND ET COMMENT?

APPEL D’OFFRES

07/2011

AVEC QUI?

PERMIS DE CONSTRUIRE

11/2008

ÉUNIONS

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LÉGENDE DÉCISION DE FRANCK CALDERINI

SOLUTION RELATIVEMENT PLUS LONGUE

SOLUTION HONÉREUSE

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SATISFACTION DE VOS DIRIGEANTS

SATISFACTION DES HABITANTS


ACTEURS

L’AGENCE D’ARCHITECTURE DAUFRESNE ET LE GARREC A DESSINÉ LA RÉSIDENCE SOCIALE DES MÛRIERS APRÈS AVOIR GAGNÉ L’APPEL À CONCURRENCE LANCÉ PAR COALLIA. ILS ONT DÉJÀ UNE EXPÉRIENCE DU DESSIN DE CE TYPE DE LOGEMENT ET ONT TRAVAILLÉ AVEC ADOMA, LA SEMAG, EMMAÜS HABITAT, GRAND BESANÇON HABITANT, ETC. COALLIA FAIT ÉGALEMENT APPEL À EUX POUR UNE AUTRE RÉSIDENCE SOCIALE DANS LE 13ÈME ARRONDISSEMENT DE PARIS.

DAUFRESNE ET LE GARREC ARCHITECTES

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FRANCK CALDERINI EST LE GESTIONNAIRE DU FOYER DES MÛRIERS. IL FUT LICENCIÉ AU DÉBUT DE L’ANNÉE 2017 CAR LES GRÈVES DE LOYERS ET LES PLAINTES DES HABITANTS SE SONT AGGRAVÉES SOUS SA DIRECTION. SES COLLÈGUES ONT PARTICIPÉ A SA DESTITUTION EN DÉPLORANT LES MAUVAIS RAPPORTS QU’IL ENTRETENAIT AVEC SES EMPLOYÉS.

BATEG EST L’ENTREPRISE RETENUE POUR LES TRAVAUX DU FOYER. COALLIA EST HABITUÉE À TRAVAILLER AVEC BATEG, COMME BEAUCOUP D’AUTRES BAILLEURS SOCIAUX. LA SOCIÉTÉ, RATTACHÉE AU GROUPE «VINCI», A ÉGALEMENT FAIT PARLER D’ELLE DANS QUELQUES SCANDALES MÉDIATIQUES COMME CELUI DE SCEAUX. L’ENTREPRISE ÉTAIT ALORS ACCUSÉE DE S’ÊTRE ARRANGÉE AVEC LES POUVOIRS PUBLICS POUR AVOIR LE MONOPOLE D’APPEL D’OFFRE PUBLIQUE.

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VINCENT CORROALE D.G. BATEG

FRANCK CALDERINI D.G. COALLIA


IL DIRIGE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET FINANCE DONC EN PARTIE CERTAINS PROJETS DE COALLIA, DONT LE FOYER DES MÛRIERS. DES ARTICLES DE MÉDIAPART LE DÉNONCENT COMME DÉSIRANT DEVENIR ACTIONNAIRE MAJORITAIRE D’ADOMA POUR «PRIVATISER UNE PARTIE DU LOGEMENT SOCIAL».

ANDRÉ YCHÉ D.G. CAISSE DES DÉPÔTS

ELLE EST INVITÉE À L’INAUGURATION DE LA NOUVELLE RÉSIDENCE DES MÛRIERS. LE FOYER BARA À MONTREUIL AVAIT INVITÉ LA MINISTRE DU LOGEMENT ET DE L’ÉGALITÉ DES TERRITOIRES.

MYRIAM EL KHOMRI MINISTRE DU TRAVAIL

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IL PARTICIPA AUX «NÉGOCIATIONS» ENTRE LES HABITANTS ET LES BAILLEURS SOCIAUX À PROPOS DE LA RÉHABILITATION DU FOYER DES MÛRIERS. IL ÉTAIT ÉGALEMENT PRÉSENT LORS DE L’INAUGURATION.

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MOHAMED GASAMA ADJOINT MAIRIE 20E

BRUNO ARBOUET EST LE GESTIONNAIRE REMPLAÇANT DES HABITANTS DU FOYER DES MÛRIERS DE 2012 À 2014. IL A HÉBERGÉ LES HABITANTS PENDANT LES TRAVAUX DU FOYER DES MÛRIERS. IL COMPTE DEMANDER D’ICI PEU, À ANDRÉ YCHÉ (CF, PAGE PRÉCÉDENTE), DE RÉINJECTER DE L’ARGENT DANS SA SOCIÉTÉ (ET DONC LE LAISSER EN DEVENIR L’ACTIONNAIRE MAJORITAIRE). JUSQU’ICI, L’ÉTAT JOUAIT CE RÔLE.

BRUNO ARBOUET D.G. ADOMA


IL FÛT INVITÉ À L’INAUGURATION DE LA RÉSIDENCE SOCIALE DES MÛRIERS. IL SUPERVISE UN ENSEMBLE D’ÉTABLISSEMENTS DANS UN MÊME DÉPARTEMENT (75). IL ASSURE LE DÉVELOPPEMENT COHÉRENT DES OPÉRATIONS PAR RAPPORT AUX ORIENTATIONS DE LA DIRECTION (FRANCK CALDERINI).

JEAN PAUL GARREAU DIR. UNITÉ TERRITORIALE CHEZ COALLIA

IL ASSURE LA CONSOLIDATION DES ACTIVITÉS D’UN SECTEUR (HÉBERGEMENT SOCIAL, MÉDICO-SOCIAL, FORMATION). IL GÈRE DONC LES ACTIVITÉS DE FORMATION, EN TANT QU’ACCOMPAGNATEUR, DANS LA NOUVELLE RÉSIDENCE SOCIALE DES MÛRIERS.

DJAMEL CHERIDI RESPONSABLE PRODUIT CHEZ COALLIA

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IL AIDE À LA DÉTERMINATION DE PROGRAMMES ET ASSURE LA RÉALISATION DES PROJETS DE COALLIA EN ASSISTANT LES PROPRIÉTAIRES EXTERNES, EN MATIÈRE DE CONSTRUCTION, RÉHABILITATION, DÉMOLITION ET RECONSTRUCTION.

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EMMANUEL BRASSEUR RESPONSABLE PROGRAMME CHEZ COALLIA

ELLE EST RATTACHÉE À LA GESTION ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈRE. ELLE ANALYSE ET SUIT LES ACTIVITÉS DE COALLIA POUR GARANTIR LE RESPECT DES RÈGLES DE GESTION.

CAROLIE PORTA CONTRÔLEUR GESTION CHEZ COALLIA


LES DÉLÉGUÉS DES MÛRIERS AVAIENT UN RÔLE TRÈS IMPORTANT DE PORTE PAROLES ET DE MÉDIATEURS ENTRE LES HABITANTS ET LES BAILLEURS SOCIAUX. DEPUIS LA RÉHABILITATION, LEUR RÔLE S’EST DE PLUS EN PLUS AMOINDRI.

LADJI SAKHO DÉLÉGUÉ DU FOYER

LES HABITANTS DU FOYER DES MÛRIERS 13


CHOISIR L’ÉQUIPE DE QUI S’ENTOURER?

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Nous sommes en 2007 et vous êtes le directeur général de COALLIA. Le foyer des Mûriers, dont vous êtes le gestionnaire, est placé en première priorité par le plan quinquennal de réhabilitation depuis 1997. Suite à la dégradation du bâtiment et des demandes incessantes des habitants, vous cédez, sous la pression de la grève des loyers, et entamez les démarches pour transformer le foyer en résidence sociale. Vous devez alors penser la programmation du projet...

A.

Vous représentez la maitrise d’ouvrage, et vous décidez alors, avec l’aide d’Emmanuel Brasseur*, de la programmation du foyer. Allez page 16

* voir Acteurs, p. 7

B. Vous n’avez pas le

temps de faire ça vousmême. Vous faîtes appel à une entreprise extérieure. Allez page 15

C.

Vous savez déjà ce que vous voulez: la même chose que pour les autres foyers. Vous reprenez la programmation du foyer le plus proche, calculez votre rentabilité locative et lancez l’appel à concurrence pour trouver les architectes qui dessineront le foyer des Mûriers. Allez page 29


CHOISIR L’ÉQUIPE

CONCERTATION

Plusieurs équipes de programmation se présentent. Vous sélectionnez alors...

A.

Une équipe pluridisciplinaire, composée d’architectes, urbanistes, de designers de services, sociologues, anthropologues, qui travaillent sur la question de la participation des habitants. Allez page 21

B.

Une équipe de programmation classique, sans architecte, qui pourra déterminer avec vous, les grandes pistes de projets qui s’offrent à vous. Allez page 22

C.

Vous vous rendez compte que leurs honoraires sont trop chères. Vous demandez à Mohamed Gassama* de faire quelques concertations. Allez page 18

* voir Acteurs, p. 7

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PROGRAMMATION SUR QUELS CRITÈRES? Vous et votre équipe, vous chargez donc de la programmation. Sur quels critères vous appuyez-vous pour la définir?

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A. LA RENTABILITÉ

Puisqu’il est question d’habitation, vous remplissez alors l’espace au maximum de chambres, pour avoir la plus grande rentabilité locative. Allez page 29

B. LE CONFORT

Ils ont vécu si longtemps dans l’insalubrité... Vous ne voulez plus que vos locataires se plaignent ou entament une nouvelle grève des loyers ! Allez page 20

C.

LES REVENDICATIONS Vous avez vu tellement de pétitions défiler sous votre nez que vous savez maintenant de quoi il en retourne. Allez page 45 - 1


PROGRAMMATION SUR QUELS CRITÈRES? Ces critères de notation ont été pondérés par vos soins selon un ordre de priorité bien précis, et qui révèle bien vos intentions.

A. 40% LE PRIX

20% LA RENTABILITÉ 20% LE COÛT GLOBAL D’UTILISATION 10% LE DÉLAIS DE LIVRAISON OU D’EXÉCUTION 10% LE CARACTÈRE ESTHÉTIQUE ET FONCTIONNEL ALLEZ PAGE 32

B. 30% LE PRIX

30% LA QUALITÉ 10% LA RENTABILITÉ 10% LE CARACTÈRE ESTHÉTIQUE ET FONCTIONNEL 10% LE SERVICE APRÈS VENTE ET LE SERVICE TECHNIQUE 10% LE COÛT GLOBAL D’UTILISATION ALLEZ PAGE 36

C.

40% LA QUALITÉ 30% LE CARACTÈRE INNOVANT 10% LE CARACTÈRE ESTHÉTIQUE ET FONCTIONNEL 10% LES PERFORMANCE EN MATIÈRE DE PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT 10% LE SERVICE APRÈS VENTE ALLEZ PAGE 45 - 7

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PROGRAMMATION SUR QUELS CRITÈRES?

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Des ateliers sont alors mis en place, et l’équipe de programmation entame les négociations. Elle aura beaucoup de difficultés à rentrer dans le processus de projet d’architecture, n’étant pas qualifiée dans ce domaine, et malgré les propositions des habitants, très peu d’entre-elles pourront être retenues par les architectes qui dessineront le futur foyer. Ces résultats n’étant pas forcément concluants, vous faites alors au plus simple et calculez votre rentabilité locative. Allez page 29

NOUS DÉSIRONS: DES OISEAUX DANS LES ARBRES DES FLEURS DANS LE JARDIN DES VOISINS SYMPAS DU BEAU TEMPS ON EST JAMAIS MIEUX SERVI QUE PAR SOI-MÊME !


PROGRAMMATION SUR QUELS CRITÈRES? Les réunions, en fonction des compétences des architectes et des aléas de la vie, verront peut-être leur nombre d’adhérents varier au fils des semaines. Il deviendra compliqué de mettre en place un travail régulier, et donc de qualité. Si c’était pour arriver à ce résultat, vous auriez sûrement mieux fait d’employer une agence de programmation classique. Ces résultats n’étant pas concluants, vous faites alors au plus simple et calculez votre rentabilité locative. Allez page 29

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PROGRAMMATION CONSIDÉRATIONS Vous voulez une habitation confortable pour vos locataires. Vous réfléchissez alors à ce que pourrait être le confort des plus démunis, même si vous ne l’êtes pas. Vous serez potentiellement amené à dire des bêtises... Mais vous êtes peutêtre très perspicace.

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A.

Vous décidez de leur offrir des chambres privées, avec sanitaires et kitchenettes intégrées, pour qu’ils puissent avoir de l’intimité. L’espace de la chambre s’en trouve fortement réduit, mais le luxe de pouvoir vivre seul a un prix et vous jugez important qu’ils puissent s’organiser de façon individuelle. Vous réglez en même temps,

le problème de responsabilité dont Jean Paul Garreau* vous parlait, puisque chacun aura alors à charge de maintenir ses biens en bon état. De plus, selon vos calculs, c’est bien plus rentable pour votre entreprise. Allez page 29

* voir Acteurs, p. 7

B.

Vous décidez que leur confort dépend du respect de leurs habitudes. leur organisation collective leur permettant économies et solidarité, vous décidez alors de créer beaucoup d’espace communs. Allez page 45 -1


CONCERTATION GROUPE DE TRAVAIL

L’agence de concertation, aux compétences pluridisciplinaires, a de multiples propositions de méthodes de travail. Ils vous demande de choisir celles qui vous semblent les plus appropriées pour effectuer les concertations. Concernant la composition des groupes de travail...

A.

Ils vous proposent de travailler avec un groupe d’habitants régulier, avec qui ils formeront un collectif. Allez page 23

B.

Ils vous proposent de réaliser des réunions de concertations ouvertes à tous les habitants qui viendront lorsqu’ils le désirerons et le pourront*. Allez page 19

* Collectif ETC Ateliers ouverts de la place du Géant, 21 Saint-Etienne


CONCERTATION GROUPE DE TRAVAIL

Comme d’habitude, vous définissez d’abord un cahier des charges avec l’équipe de programmation et avec Mohamed Gassama* qui fera ensuite une (ou plusieurs, si vous êtes chanceux) proposition aux habitants. Ces derniers n’auront alors plus vraiment les moyens de proposer leurs solutions mais pourront au moins donner leurs avis.

* voir Acteurs, p. 7 22

A.

Vous insistez pour que l’équipe de concertation trouve un consensus avec les habitants. Allez page 18

B. Vous vous contentez de ces quelques réunions et décidez de lancer l’appel à concurrence pour trouver les architectes qui dessineront le foyer des Mûriers. Allez page 32


CONCERTATION DÉFINIR LES BESOINS

Une fois le collectif monté, l’équipe de concertation vous propose que le travail effectué prenne la forme d’une charte. Celle-ci vous servira de support lors des appels à concurrence que vous lancerez pour trouver les architectes qui dessineront le foyer des Mûriers. La charte définira les besoins des habitants du foyer, et intégrera une pré-programmation , se fondant sur les besoins précédemment définis. Ils vous proposent alors 2 méthodes pour définir le public visé et leurs besoins.

A.

S’appuyer sur une base historique, théorique et statistique. D’après certains ouvrages, études et articles*, il est possible de définir l’origine des habitants, leurs catégories socioprofessionnelles, leur état matrimonial, leur âge, leurs statuts, etc. L’équipe de concertation peut alors dresser un portrait robot de l’habitant «type» du foyer. Allez page 24

* voir Bibliographie, p. 54 ** voir Annexe, p. 56

B.

S’appuyer sur une base plus sensible, en réalisant des entretiens** avec les habitants pour qu’ils racontent leurs journées, leurs exigences, leurs revendications, etc. Allez page 27

23


CONCERTATION DÉFINIR LES BESOINS

,

24

Le collectif a dressé le portrait robot de l’habitant type du foyer des Mûriers. L’équipe en déduit ses besoins et vous remarquez que les habitants ne se reconnaissent pas dans le portrait que l’on a dressé d’eux: leurs besoins sont éloignés des déduction de l’équipe de concertation. Vous virez l’équipe et embauchez rapidement une nouvelle. Craignant une nouvelle grève des loyers, vous décidez de vous fonder sur la méthode sensible. Allez page 25 Tableaux réalisés à l’aide de l’article de Rémi Gallou, voir la bibliographie, p. 54


CONCERTATION DÉFINIR LES BESOINS

L’équipe de concertation réalise des entretiens auprès des habitants. Elle recueille des avis sur différentes questions, mais trouve des difficultés à synthétiser et généraliser les expériences enregistrées. N’ayant pas de base théorique, leurs propositions restent anecdotiques. Vous n’êtes pas encore convaincu, et leur transmettez alors le travail de recherches théoriques pour allier les deux méthodes. Allez page 26

«Avant, quand je finissais le travail, je courais pour rentrer au foyer. Je te jure, je voulais retrouver tous les jeunes de mon âge pour me réunir dans les parties communes. On discutait, on faisait du thé, on partageait pleins de choses. On pouvait aussi se réunir dans les chambres qui étaient plus grandes pour jouer à la PlayStation. On regardait des vidéos du pays. On invitait des amis extérieurs au foyer. Les femmes faisaient la cuisine en bas, et on allait ensemble pour manger un bon plat en discutant. On était heureux. À l’époque on était bien, il y avait de l’ambiance à fond. Nos amis du quartier venaient jouer aux cartes, aux dames. On avait des parties communes. Il y avait un Cap-Verdien qui donnait des cours d’alphabétisation aux jeunes du quartier. On écoutait de la musique et on regardait la télé. Nos cuisines n’étaient pas chères et on avait l’esprit ouvert.» Ladji Sakho, délégué du foyer des Mûriers, voir Annexe p.56 «Aujourd’hui, quand je finis le boulot, ce n’est pas pareil. Je suis fatigué. Il faut que je fasse la cuisine après avoir fait toutes mes prières. Quand mes amis venaient pour partager le repas avec moi, on se réunissait ensemble. Plus personne ne vient. Je rentre, je suis fatigué, je dors ou je fais la cuisine. Faire mes plats ça prend 2h! Et je dois me lever tôt. Nous sommes divisés tous dans nos chambres. Pour avoir des nouvelles de mes amis, maintenant je les appelle, je ne peux plus les inviter. Avant on avait de l’espace. Maintenant on est fermé sur nous mêmes.» Ladji Sakho, délégué du foyer des Mûriers, voir Annexe p.56

25


CONCERTATION

PRÉ-PROGRAMMATION Une fois cette étude menée, l’équipe de concertation définit les besoins des habitants. Le collectif peut maintenant rentrer dans la phase de pré-programmation. On vous demande de choisir entre deux méthodes pour mener à bien cette opération:

26

A.

L’équipe, étant constituée d’architectes entre autres, peut commencer à faire les premières propositions de dessins. Celles-ci seront exposées aux habitants qui pourront émettre des critiques et donner leur avis sur ces premiers essais. Allez page 28

B.

L’équipe demande plus de temps. Elle prévoit des ateliers avec le collectif pour pouvoir faire rentrer les habitants dans le processus de création. Tous réfléchissent alors aux meilleurs moyens d’expression qui seront utilisés au cours des ateliers, en fonction des compétences des habitants (que l’équipe a pu auparavant déterminer). Allez page 27


CONCERTATION SYNTHÈSE / CHARTE

Le collectif a pu réaliser un travail de pré-programmation. Il sera combiné avec la définition des besoins des habitants dans la charte qui vous ai alors transmise.

A. Vous décidez de lancer un 2ème appel à concur-

rence pour trouver les architectes qui dessineront le foyer des Mûriers. Les règles d’admissions et les critères de notation correspondent aux demandes des habitants exprimées dans la charte. Vous calculez votre rentabilité locative sur le même modèle. Allez page 30

B.

Vous comparez la rentabilité locative que vous aviez prévu initialement à celle qu’on vous propose maintenant. Puisque vous êtes moins rentable, vous lancez cet appel à projet, sans transmettre la charte. Vous vous arrangerez avec les architectes pour qu’ils en tiennent compte plus tard. Allez page 45 - 8 27


CONCERTATION SYNTHÈSE / CHARTE

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Vous considérez que les dessins des architectes Daufresne et Le Garrec correspondent à peu près aux revendications des habitants. Néanmoins, vous n’avez aucune garantie que les habitants soient du même avis que vous. Pour être plus assuré, vous demandez au collectif de prendre plus de temps pour organiser des ateliers de co-conception et aboutir à une pré-programmation sur laquelle vous pourrez assurément compter. Allez page 27


APPEL A CONCURRENCE

SÉLECTION ARCHITECTES

Connaissant maintenant votre rentabilité locative, vous lancez un appel à concurrence pour trouver les architectes qui dessineront la nouvelle résidence des Mûriers. Les offres arrivent sur votre bureau 1 mois plus tard. Comment les sélectionnez-vous?

A.

Vous avez défini des critère de notation précis, parmis lesquels on retrouve: la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les performances en matière de protection de l’environnement, d’insertion professionnelle des publics en difficultés, le coût global d’utilisation, la rentabilité, le caractère inno-

vant, le service après vente et l’assistance technique, le délais de livraison ou d’exécution. Allez page 17

C.

Vous demandez aux habitants de choisir avec vous l’offre qui leur conviendra le mieux. Allez page 31

B.

Vous choisissez l’offre la plus rentable. Allez page 32 29


APPEL A CONCURRENCE

SÉLECTION ARCHITECTES Une fois que vous avez reçu les offres des concourants, vous sélectionnez la meilleur proposition:

30

A.

vous organisez un jury avec le collectif et vous décidez ensemble du projet qui vous convient le mieux. Le comité technique validera ensuite un de vos choix*. Allez page 33

B.

Le comité technique, plus qualifié que le collectif et que vous même, est seul juge des propositions. Vous communiquez ensuite la décisions du jury aux habitants. Allez page 45 11

* Radio Grenouille et la Belle Ensemble ayant participé à un jury collectif pour du logement social à Marseille


APPEL A CONCURRENCE

SÉLECTION ARCHITECTES

Vous organisez un jury avec le collectif, qui sera ensuite validé par le comité technique. Si les habitants choisissent avec vous le projet qui répond le plus à leurs besoins, ils ne pourront plus se plaindre une fois les travaux finis...

A.

Vous avez fondé votre appel à concurrence sur les revendications des habitants ou sur les résultats des ateliers de programmation et ces derniers reconnaissent que certains projets proposés correspondent à leurs besoins. Allez page 45 - 4

B.

Vous n’avez pas fondé l’appel à concurrence sur les revendications des habitants ou sur les résultats des ateliers de l’équipe de programmation. Les habitants se trouvent alors très désappointés par les propositions des différents architectes. Les projets sont très éloignés de

leurs besoins et ils se sentent, une fois de plus, invisibles. Allez page 48 - 2

31


NOTIFICATION DU MARCHÉ RÉUNIONS ARCHITECTES

Vous avez trouvé votre bonheur ! L’agence d’architecture Daufresne et Le Garrec répond bien aux attentes et vous notifiez alors le marché, après avoir fait vérifier votre choix par le comité technique. Les premières réunions avec les architectes sont organisées...

32

A.

Lors de celles-ci, vous leur faites corriger au fils du temps, les erreurs d’inattention que peuvent faire les architectes. Ils avaient prévus des espaces permettant aux habitants de s’organiser en collectivité... et ça, ça ne rapporte rien. Allez page 39

B.

Vous autorisez les délégués du foyer à assister aux réunions. Aucune concertation n’ayant été faite au paravent, ils découvrent alors le projet. Allez page 34

* Daufresne et LeGarrec Agence


NOTIFICATION DU MARCHÉ RÉUNIONS ARCHITECTES

Le marché est donc notifié et vous devez organiser des réunions avec les architectes pour suivre l’évolution du projet...

A.

Vous invitez une fois de plus le collectif. Les habitants ont la possibilité d’influencer l’évolution des plans. Allez page 37

B.

Vous invitez une fois de plus le collectif, et vous aviez prévu le coup ! Pendant que l’appel à concurrence était lancé, l’équipe de concertation vous a proposé d’organiser des ateliers de formation avec Djamel Cheridi* pour préparer les habitants aux réunions. Un 2ème groupe de tra* voir Acteurs, p. 7

vail s’était alors monté, composé d’habitants maintenant qualifiés, et de ceux qui avaient déjà des compétences dans le domaine. Allez page 41

C.

Vous décidez de suivre seul les réunions avec les architectes, le travail participatif étant terminé. Allez page 39 33


NOTIFICATION DU MARCHÉ RÉUNIONS ARCHITECTES

Lors des réunions, les délégués tentent tant bien que mal de compromettre vos plans, car le projet ne semble pas correspondre à leurs attentes...

34

A. Vous donnez l’ordre

aux architectes de ne pas écouter les habitants. Les réunions sont chaotiques mais vous voyez le bout du tunnel. Tenez bon, et bientôt, le permis de construire sera déposé. Allez page 44

B.

Vous êtes désemparé par les requêtes des délégués et, plein de remords, vous décidez de bloquer l’avancement du projet tant que les habitants ne se seront pas accordés avec les architectes. Vous proposez alors de revenir en arrière dans le processus de conception du projet pour y intégrer les habi-

tants. Si vous avez plus de 50 ans, allez page 48 - 7, si non, allez page 21.

C.

Décidément, vous avez beaucoup de chance et les habitants comprennent ce qu’il se passe dans les réunions car ils sont tous miraculeusement qualifiés dans le domaine! Allez page 39


NOTIFICATION DU MARCHÉ RÉUNIONS ARCHITECTES

2 situations: Dans le cas où les critères de notation que vous aviez prévus dans l’appel à concurrence plaçaient la qualité en plus haute importance: les habitants sont déçus de voir que le projet ne correspond pas parfaitement à leurs besoins et les réunions sont très conflictuelles. Mais vos futurs locataires sont tout de même impressionnés par la qualité du projet proposé et décident de vous pardonner. Allez page 40.

Si les critères de notation pondérés par vos soins ne plaçaient pas la qualité en plus haute importance, les habitants découvrent un projet qui ne correspond absolument pas à leurs attentes, se révoltent, et entament une nouvelle grève des loyers. Vous faites encore perdre de l’argent à Coallia, André Yché* va pouvoir racheter encore un peu plus de parts sur votre société. Allez page 48 - 2

JE NE SAIS PAS TROP CE QU’ON VA Y FAIRE MAIS C’EST BEAU !

WOUAW!!

* voir Acteurs, p. 7

RÉNOVATION DES MÛRIERS

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NOTIFICATION DU MARCHÉ RÉUNIONS ARCHITECTES

Vous avez essayé d’être le plus à l’écoute des habitants, tout en gardant un minimum de crédibilité aux yeux de vos dirigeants, qui vous trouvent déjà très généreux avec vos locataires. En fonction de vos critères de notation, vous sélectionnez alors l’agence la plus adaptée. Allez page 32

36

?


NOTIFICATION DU MARCHÉ

ALORS... POUR LES RÉSERVATIONS DES MENUISERIES, ON PRÉVOIT QUELLE DIMENSION DE TABLEAU ET HAUTEUR D’ALLÈGE?

RÉUNIONS ARCHITECTES

Quand bien même votre équipe d’architecte serait patiente, les problèmes de communication avec les habitants lors des réunions provoquent des conflits et les architectes prêtent alors de moins en moins attention à leurs remarques. Les habitants finissent par être éjectés des réunions ou à ne plus venir d’eux mêmes. Allez page 39

37


NOTIFICATION DU MARCHÉ PILOTAGE DES TRAVAUX

L’entreprise que vous avez choisie organise des réunions avec les habitants qualifiés et leur propose même de participer à certaines opérations légères d’aménagement. Qu’ils soient intéressés ou non, on ne peut pas dire que vous les laissiez sur le banc de touche. Les travaux prennent fin en 2014.

38

A.

Le groupe de travail qui avait été mis en place a communiqué régulièrement avec les habitants à propos de l’évolution de la charte, des plans des architectes et de l’avancé des travaux. Allez page 44

B.

Vous ne vous êtes pas assuré que le groupe d’habitants ayant travaillé sur la charte, les plans et les travaux, ait pris le temps de communiquer régulièrement avec les habitants. Allez page 48 6

* Collectif ETC / Chantier Participatif sur la place du Géant, Saint Etienne


PERMIS DE CONSTRUIRE COMMUNICATIONS

Les plans des architectes semblent maintenant vous convenir et le permis de construire est alors déposé.

A.

Fier de vous, vous décidez de montrer aux habitants ce qu’il a enfin été décidé pour la réhabilitation. Vous communiquez alors le plan final des architectes. Allez page 35

B.

Vous lancez directement une consultation des entreprises des travaux. Allez page 40

39


APPEL D’OFFRE

SÉLECTION ENTREPRISES Les offres des entreprises sont arrivées. Vous avez un mauvais souvenir des dernières réunions avec les délégués du foyer et vous décidez alors de ne pas les inviter à choisir avec vous l’entreprise qui réalisera les travaux.

40

A.

Vous sélectionnez l’entreprise «Bateg groupe Vinci», réputée pour faire faire de grandes économies aux bailleurs. Vous avez déjà vu le résultat sur plusieurs foyers vous appartenant et l’entreprise avait été d’une grande rentabilité pour votre société. Les habitants vous avaient, à cette époque accusé d’être respon-

sable, par ce choix, du plâtre qui tombait dans leurs assiettes, mais tout le monde sait que s’ils n’hébergeaient pas leurs proches, le plafond ne s’émietterait pas. Allez page 42

B.

Vous sélectionnez une entreprise reconnue pour la qualité de ses services, et pour la rapidité de l’assistance technique qu’elle propose en cas de problèmes, tant pis pour Vincent Corroale*. Allez page 45 - 5 * voir Acteurs, p. 7


APPEL D’OFFRE

SÉLECTION ENTREPRISES Le projet proposé par les architectes a été suivi par les habitants qui sont alors satisfaits du dessin final, et qui comprennent également pourquoi toutes leurs requêtes n’ont pu aboutir. Le permis de construire est alors déposé. Vous lancez la consultation des entreprises, et peu de temps après, vous recevez leur offre.

A.

Vous avez glissé la charte du collectif dans le dossier, avec le plan des architectes et vous voyez alors se présenter des entreprises ayant déjà effectué des travaux en participation avec les habitants. En mettant en place la même démarche que pour le

dernier appel à concurrence, vous organisez un jury collectif avec les habitants qualifiés. Allez page 38

B.

Vous choisissez seul l’entreprise la moins cher: «Bateg groupe Vinci», avec qui vous avez l’habitude de travailler, par ce

que vous êtes déjà trop en retard dans vos démarches et que vous ne pouvez plus perdre du temps ou de l’argent! Allez page 43

41


TRAVAUX RELOGER HABITANTS Une fois le marché notifié, vous décidez de lancer les travaux. Mais il faut d’abord reloger les habitants. Vincent Corroale* vous propose alors de...

42

* voir Acteurs, p. 7

A.

Laisser les habitants dans le foyer pendant les travaux. Ils n’auront qu’à habiter la moitié du bâtiment, pendant que l’autre sera en travaux. Eux qui ont l’habitude de recevoir leur famille, cela ne devrait pas les gêner. Allez page 48 - 5

50m

À VUE DE NEZ, ÇA RENTRE... !

B.

Demander à votre grand copain Bruno Arbouet*, réputé pour ses scandales médiatiques, d’héberger vos locataires dans plusieurs de ses foyers, même s’ils sont parfois très éloignés de leur lieu de travail. allez page 43


TRAVAUX

RÉCEPTION / INAUGURATION Les habitants attendront dans le foyer temporaire jusqu’en 2014, année qui signera la fin des travaux. Lors de l’inauguration, vous invitez le gratin, et Myriam El Khomri témoignera alors de votre bonne volonté et des négociations bien-menées avec vos locataires.

A. Si vous aviez choi-

si l’entreprise Bateg groupe Vinci : peu de temps après, le bâtiment commence déjà à se dégrader, et les habitants se révoltent. Ils entament une nouvelle grève des loyers et la direction trouve que vous êtes un gouffre financier. Vous êtes viré.

B.

Si vous aviez choisi une entreprise plus cher: la qualité des travaux ravissent les habitants. Ils prennent alors d’autant plus soin des lieux, c’est une affaire qui roule. Les habitants auraient préféré un autre aménagement de l’espace mais tant que leurs conditions de vie sont dignes, c’est le

principal à leurs yeux. Néanmoins, Caroline Porta* ayant comparé votre rentabilité avec celle de vos prédécesseurs, vous êtes rapidement viré. allez page 43

* voir Acteurs, p. 7

43


TRAVAUX

RECEPTION / INAUGURATION Les habitants ne sont pas surpris de découvrir leur nouveau lieu d’habitation. Il correspond à leurs besoins et à leurs attentes et les habitants sont alors heureux de re-investir les lieux. Malheureusement, vous avez perdu beaucoup trop de temps avec toutes ces concertations, et vos supérieurs ayant comparé votre rentabilité avec celle de vos prédécesseurs... Vous êtes viré.

44


HASARD ET CHANCES

1. Vous décidez de prendre en compte les revendications des habitants et proposez de créer beaucoup d’espaces collectifs, mais votre entreprise n’a pas l’habitude de ce genre de propositions de votre part...

A.

Vous perdez beau coup de temps au téléphone,

à convaincre André Yché* que si l’entreprise veux éviter une nouvelle grève des loyers, vous devez écouter les revendications de vos locataires. Caroline Porta* vous regarde d’un drôle d’œil, mais vous êtes persuadé que vos dirigeants verront bientôt le résultat de vos démarches et qu’ils vous remercieront par la suite. Si nous sommes

un vendredi, Allez page 45 - 2, si nous sommes un lundi, allez page 45 - 3.

B. Sous la pres-

sion de vos supérieurs, vous vous rendez compte qu’il n’est pas possible de satisfaire les revendications des habitants du foyer et vous revoyez la programmation... Si vous aviez eu des professionnels pour témoigner de l’utilité de vos

décisions, vous auriez pu peut être les convaincre, mais vous êtes seuls face à la hiérarchie. Retournez à la page 14.

45 45


2. Vos dirigeants prévoient demain, un week-end sympathique dans leur résidence secondaire. Oui, vous êtes chanceux, ils sont de bonne humeur, mais il aurait pu en être autrement ! Ils décident de vous laisser tenter l’expérience, malgré le fait que votre rentabilité soit moins importante que prévu. Allez page 29 3. Vos dirigeants ont passé une semaine terrible et sont

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épuisés de voir les habitants des foyers se révolter. Non, vous n’avez pas de chance, même s’il aurait pu en être autrement... Ils ne se laisseront pas faire, et ne céderont pas sous la menace ! Allez page 48 -1 4. Le comité technique valide un des projets sélectionnés par les habitants et votre équipe.

Si les habitants ont des goûts de luxe, allez page 28. Si les habitants sont raisonnables, ont pitié de vous, et savent que vous n’êtes pas Rothschild... Allez page 32 5. Vous vous débattez avec vos supérieurs. Vous leur expliquez qu’il serait plus rentable pour l’entreprise de ne pas souffrir d’une nouvelle

grève des loyers. C’est ce qui risquerait d’arriver si vous faisiez appel à «Bateg - groupe vinci» même si l’entreprise a l’habitude de travailler avec Vincent Corroale*. Si vous avez un grand talent d’orateur, allez page 45 - 6, si non allez page 48 - 4. 6. Vous avez eu chaud, mais André Yché* a fini par se ranger de votre


côté, et vous l’avez convaincu d’investir plus d’argent dans les travaux de réhabilitation. Allez page 42 7. Les projets proposés par les différentes agences sont d’une très grande qualité, vous n’en revenez pas ! Vos dirigeants non plus: les prix des propositions sont exorbitants. Si votre supérieur vient de gagner au loto, et décide de vous suivre dans cette magnifique expérience, allez page 32. Si non,

allez page 48 -1. 8. Que vous organisiez un jury collectif ou non, vous n’avez aucune garantie que les architectes sélectionnés puissent répondre aux requêtes de la charte. Si les architectes sont devins, allez page 48 - 10, si non, allez page 48 - 9. Les 9. peuvent

architectes se trouver

désemparés par cette nouvelle contrainte et le projet ne correspondra pas forcément aux attentes des habitants. Tout ce que vous aviez fait jusqu’ici ne sert plus à grand chose. Retournez page 32.

10. Les architectes sont très malins, et arrivent à combiner votre cahier des charges et la charte des habitants. En revanche,

ils augmentent leurs honoraires. Allez page 33. 11. Vous risquez de confronter vos goûts à ceux des habitants. Rien ne peut vous promettre que vous ayez les mêmes...

A.

Si vous aimez le bleu, vous tombez d’accord ! Allez page 33.

B. Si vous aimez

le rouge: miséricorde... Allez page 48 - 2.

47


VOUSÊTES

VIRÉ

1. Vos directeurs ne comprennent pas vos décisions, basées uniquement sur vos déductions personnelles, et considèrent alors que vous faites perdre du temps ou de l’argent à l’entreprise: vous n’êtes pas assez rentable. Vous êtes viré. 48

2. Les habitants se révoltent et entament une nouvelle grève des loyers. Vos supérieurs trouvent que vous êtes un gouffre financier et vous êtes viré. 3. Les habitants veulent ce qu’il y a de mieux. Ils vous ont donc fait choisir un projet très onéreux. Vos supérieurs, déjà très embêtés par vos méthodes de

communiste, ont de forte chance de ne plus vous faire confiance. Vous devenez un gouffre financier. Vous êtes viré. 4. Vous ne réussissez pas à les convaincre. Vous avez épuisé vos jokers, et vos compétences sont remises en cause par vos supérieurs. Vous avez déjà fait perdre trop de temps et d’argent à COALLIA, qui ne veut

même plus financer votre licenciement. Vous finissez vousmême par démissionner. 5. Les habitants se révoltent, ne veulent pas vivre deux fois plus entassés qu’ils ne le sont déjà, avec le bruit des travaux et tous les inconvénients que cela implique. Ils entament une nouvelle grève des loyers, et vous êtes alors viré.


6. Peut être que le collectif n’était pas représentatif des désirs des habitants, et que vous avez été dupé. Les habitants sont mécontents et entament une nouvelle grève des loyers. Dommage, vous y étiez presque, mais vous êtes viré. 7. Caroline Porta aurait pu vous pardoner, vous trouver des airs d’artistes aventuriers... mais vous avez plus de 50 ans. Les dirigeants ne vous loupent pas et ne vous donnes pas de seconde chance. Vous êtes viré.

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SYNTHÈSE ET CONCLUSIONS Vous avez pu remarquer que

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quelques soient vos décisions, vous finissez toujours par être viré. Néanmoins, vous avez le choix de ne pas entraîner dans votre chute, la qualité du projet, les habitants ou les finances de Coallia. Cette fin tragique montre symboliquement que dans le système actuel, les contraintes des bailleurs sociaux sont fortes, et que l’on ne peut pas forcément satisfaire tout le monde.

Se glisser dans le rôle de Franck Calderini plutôt que dans celui de Daufresne et Le Garrec (les architectes) est un choix qui illustre la multitude des contraintes qui pèsent sur les architectes. Dans le cas du logement spécialisé, le client n’est pas celui qui habitera les lieux, contrairement aux commandes privées de particuliers. L’architecte traite donc généralement moins avec les usagers, que les pouvoirs publics, les commanditaires, les mécènes ou autres. Vouloir repenser les méthodes de conception des architectes sans comprendre comment

s’organise ce système est peine perdue. L’arborescence de possibilités d’actions, mise en forme dans ce livre à choix multiples, crée une sorte de constellation de contraintes qui révèle en partie où se situent les nœuds déterminants. La position décisionnelle du gestionnaire semble alors charnière dans le déroulement du processus de création du logement locatif spécialisé. Plus que ce constat, nous pouvons également tirer certaines conclusions sur les différents rôles de l’architecte dans un projet comme celui-ci.

Dans ces différents récits, on retrouve l’idée que les architectes pourraient intervenir à plusieurs étapes du projets, et non plus seulement pour dessiner les plans. Comme dans le cas de la médecine: il pourrait y avoir ceux qui traitent un symptôme en réhabilitant le foyer; et ceux qui exercent une forme de médecine préventive, en travaillant en amont avec les habitants. Ces derniers apportent alors un point de vue intérieur à la compréhension de l’ensemble de données sur lequel le projet peut s’appuyer. L’investigation qu’ils mènent est également


la bienvenue par la traduction qu’ils peuvent apporter quand aux informations recueillies : étant qualifiés, ils savent sur quoi peut s’appuyer l’équipe nominée pour le dessin du foyer. Ce travail produit des compléments essentiels pour permettre une compréhension complexe des enjeux de la réhabilitation. C’est une façon de travailler la matière première d’un projet. Produire et créer avec ceux qui habitent, construisent, financent: ceux qui pensent déjà le projet, avant les architectes.

Il semble également intéressant d’étendre l’intervention de ces architectes «de prévention» sur toutes les phases du projet. Sans comparer l’habitant à la victime d’un jugement, mais plutôt à celui qui encourt les décisions prises par les décideurs de la ville, il semble impensable que l’habitant n’ait pas d’avocat pour le défendre. L’architecte pourrait alors tenir ce rôle. Grâce à leur présence lors des jury collectifs, mais aussi des réunions de conceptions des plans et de chantier, l’architecte peut alors défendre l’intérêt des habitants, qui sont souvent mis de côté dans ce processus

de conception / création. Les architectes ont la capacité de préparer les habitants aux réunions, comme le ferait un avocat lors d’une audience. En s’assurant de la défense des habitants, le bailleur social s’assure en même temps de la bonne réception de son projet par ses locataires et entérine la menace d’une grève des loyers. Peut être que le temps perdu à négocier devient alors un avantage pour les bailleurs s’il leur permet de recevoir régulièrement les redevances. C’est une façon de créer des ponts entre les besoins et les intérêts de chaque acteur.

En parvenant à tisser des liens entre les différents acteurs, les architectes deviennent alors des médiateurs qui réunissent et entrelacent différents intérêts. Ils peuvent alors mettre en scène et théâtraliser les multiples perspectives des acteurs, en essayant de trouver une équation adaptée à chacun. Nous pouvons penser ici à l’image de la permaculture. La définition de la permaculture d’après Sylvaine Anani, Philippe Caillaud et Eric Escoffier nous apprend que « la permaculture est une méthode systémique et globale qui vise à concevoir des systèmes en s’inspirant

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de l’écologie naturelle et de la tradition. Elle n’est pas une méthode figée mais un « mode d’action » qui prend en considération la biodiversité de chaque écosystème. Elle ambitionne une production agricole durable, très économe en énergie et respectueuse des êtres vivants et de leurs relations réciproques, tout en laissant à la nature sauvage, le plus de place possible. » Cette image, transposée aux relations entre les différents acteurs du projet, nous permet de proposer à l’architecte de prendre le rôle de celui qui pense cette organisation en

essayant de faire en sorte que les revendications d’un acteur, servent celles de celui qui aurait été, autrement, son adversaire. Le produit architecture évolue en fonction de ces différentes organisations. C’est ce que nous allons mettre en scène, par le biais d’une pièce de théâtre illustrée, dans la dernière partie de ce travail.

MISE EN SCÈNE D’UNE

CONCERTATION

POUR LA

RÉHABILITATION

DU FOYER DES MÛRIERS.

La pièce de théâtre représente une concertation entre les différents acteurs du projet. On y retrouve alors Franck Calderini, André Yché, Ladji Sakho et Vincent Corroale, mais aussi

de nouveaux personnages comme «Madame Enface» qui incarne une voisine du foyer et Hélène Vicq, chargée de l’urbanisme et de l’architecture à la mairie du 20ème arrondissement. L’architecte, lui, est le médiateur de ce débat. La pièce se déroule en 6 actes, dont chacun aborde un thème précis de la conception du projet de réhabilitation. On retrouve alors: la volumétrie, la façade, les usages, les qualités spatiales, le caractère environnemental et la végétation. Chaque acte est alors ponctué de scènes qui précisent les


différents questionnements qui en découlent.

le même bain», tous les acteurs du projet.

Cette organisation déroule une synthèse des intérêts des acteurs du projet. A chaque thème abordé, une conciliation est proposée et illustrée par les pensées de l’architecte qui formalisent les suggestions des acteurs. La pièce de théâtre est introduite par un décor inquiétant: celui d’une prise d’otage surréaliste. Rappelant que les possibles sont toujours plus larges que ce que l’on imagine, cette situation met «dans

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BIBLIOGRAPHIE & RÉFÉRENCES • ANDREANI EMMANUELLE, « La vie de Pacha des patrons de la Sonacotra », Capital, 23 juin 2011. • BANKS-COPAF, Blog citoyen, Subvention du Val-de-Marne : le cas de COALLIA, Juin 2013, 9 pages. • BERNARDOT MARC, Le grand âge en foyer migrant : nouvelles figures, nouveaux enjeux, 2006, 9 pages. • LE CANARD ENCHAINE, « Des

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bétonneurs très obligeants », Mercredi 30 oct. 2013. • «Formes D’action – CapaCités.» CapaCités. Web. 30 May 2017. • «Chantier Ouvert.» Collectif Etc, Support D’expérimentations Urbaines. Web. 30 May 2017. • LA COORDINATION DES 5 FOYERS DU 20EME ARRONDISSEMENT, Charte pour la réhabilitation démocratique des foyers de travailleurs immigrés, 2009, 1 page.

• COURS DES COMPTES, Rapport public annuel sur La transformation des foyers de travailleurs migrants en résidence sociales : une politique à refonder, fev. 2014, 61 pages. • DAUFRESNE LE GARREC ET ASSOCIES, Restructuration-Réhabilitation d’un foyer et sa transformation en résidence sociale, en site occupé et en 2 phase, 1 page. • GALLOU Rémi, «Les immigrés isolés : la spécificité des résidants en foyer», Retraite et Socitété, n°44, 2005

• «Projets - Deux degrés.» Deux Degrés. Web. 30 May 2017. • JURISLOGEMENT, Fin du contrat en hébergement, logement foyer, logement de transition : Quels droits et obligations pour les personnes et organismes gestionnaires ?, Mars 2015, 16 pages. • LA FRICHE DE LA BELLE DE MAI, Habiter la Friche: Projet d’habitat social participatif, Bilan des temps publics, 2015, 24 pages • Les membres du collectif LA BELLE ENSEMBLE, Charte des


habitants, La friche de la Belle de Mai pour le projet Habiter la Friche, 2016, 2 pages. LA FRICHE DE LA BELLE DE MAI, Habiter la friche: projet d’habitat social participatif, nov. 2014, 16 pages. SAKHO Ladji et SYLLA B., Interview au Foyer des Mûriers, Mars 2017, réalisée par Mélusine Pagnier, 6 pages. LAURENT AGNES, « Travailleurs migrants : les foyers de la discorde », l’Express-Société, 17 janv. 2017. LE MOINE BLEU, « Drame du

Hessel : l’AFTAM expulse encore ! » Web. 12.05.2017 • « Foyer de travailleurs Migrants : la rénovation de l’habitat, pas la soumission de l’habitant », Alternative Libertaire. Web. 12.05.2017 • NOIZET PASQUALE, « Extrait du compte rendu et témoignage sur la lutte des résidents des foyers de travailleurs migrants à Paris », Réveil Communiste, 10 janv. 2010 • OBSERVATOIRE REGIONAL – URHAJ IDF, « Observatoire statistique 2015 », Ile de France

et départements, nov. 2016, 36 pages. • « Paris 20ème : Résidence Sociale », Daufresne, Le Garrec et Associés, Projets. Web. 12.05.2017. • «Place Au Changement – Opus 2.» Collectif Etc, Support D’expérimentations Urbaines. Web. 30 May 2017. • RESSOURCES SOLIDARES, « Entretien exclusif avec Franck Calderini, Directeur général de COALLIA, sur la mixité sociale et l’accueil des réfugiers », 8 dec. 2015.

• ROL-TANGUY FRANCIS, Les foyers de travailleurs migrants à Paris, Etat des lieux en 2016 et inventaire des interventions sociales, sanitaires et culturelles, APUR, sept. 2011, 86 pages. • ROL-TANGUY FRANCIS, Les foyers de travailleurs migrants à Paris, Etat des lieux en 2010 et inventaire des interventions sociales, sanitaires et culturelles, APUR, 2010, 3 pages. • UNAFO, La résidence sociale, un logement au service de l’insertion; Analyse et réflexion pour un nouvel équilibre économique,

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ANNEXES - ENTRETIENS • 2015, 23 pages. • UNAFO, Guide de l’attribution de logement, Méthodes et bonnes pratiques, Avr. 2014, 32 pages. • URHAJ, Le logement des jeunes en Ile de France, Références et principes partagés, janv. 2015.

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ENTRETIENS LADJI SAKHO: délégué du foyer des Mûriers, arrivé ici en 2007. BRAHMA SYLLA: délégué du foyer des Mûriers GENERALITE SUR LES HABITANTS «Nous sommes des travailleurs, nous participons activement dans les associations du quartier pour montrer que nous participant aux efforts de la France. Nous aimerions que tous les habitants et les associations sachent que nous sommes gentils et que nous ne

sommes pas des voyous. Tout ce qui touche à la France me touche aussi. Quand la France est frappée, je suis frappé. On passe plus de temps ici, qu’au pays.» L.S. «La plupart des habitants travaillent dans le bâtiment, l’hôtellerie, la restauration… Les horaires sont très durs. Monsieur Sacko commence tard et finit tard. Monsieur Cilla travaille dans la sécurité, du matin très tôt jusqu’au soir.» B.S. «Moi je paye 542€ pour 18m2. Je gagne 1200€ par mois, j’envoie 500€pour la famille pauvre au pays. Je paye ma nourriture, et les transports… il ne me reste rien à

la fin. Mais si je n’ai pas d’argent, je vais voir monsieur cilla, je vais lui demander de l’argent. On vous accueille, on vous donne à manger. Bienvenu ! S’il n’était pas là, je ferais quoi? J’irai voir les associations qui donnent de la nourriture dans la rue? La moyenne des habitants touche le SMIC. Et même moins, car nous ne travaillons pas tous en temps pleins.» L.S. «80% 90% des habitants dans les foyers ont la nationalité française.» B.S. HISTOIRE DU FOYER «Le foyer a été construit en 1975. Avant, les habitants étaient


logés au 134 rue d’Oberkampf. Le site des Muriers était alors une antenne d’administration et lorsque le site d’Oberkampf a été trop dégradé et qu’il n’y avait plus assez de logements, il y a eu des manifestations. C’était une chance pour nos parents de pouvoir être transféré ici. Ils sont donc arrivés en 1975 et jusqu’en 2006 c’était la CASVP qui s’occupait du foyer. L’association AFTAM a repris le foyer de 2006 à 2010. Avant il y avait des chambres individuelles, mais aussi des chambres à 3 lits. Les cuisines étaient collectives les douches et les sanitaires aussi.» B.S. «Le foyer des Muriers est un foyer

social. C’était un lieu de partager de solidarité. J’ai connu d’autres foyers qui fonctionnaient sur le même système.» B.S. «C’est ça l’objectif de venir en France. Si on est venu ici, ce n’est pas par hasard, il y a une histoire derrière tout ça. Pourquoi n’est-on pas parti en Australie ? Pourquoi n’est-on pas parti en Allemagne ? Pourquoi n’est-on pas parti au Brésil ? Parce qu’il y a une histoire et c’est cette histoire-là qui fait qu’on est venu ici. On n’est pas venu ici pour jouer, mais pour travailler. Après la guerre mondiale, la France avait besoin de main-d’oeuvre et c’est eux qui sont venus nous chercher.

Cette guerre-là on y avait participé comme le grand-père. Le slogan de la France c’est liberté-égalitéfraternité. Et c’est les Africains qui ont aussi participé à la libération de la France.» L.S PENDANT LES TRAVAUX «Lorsque le foyer était en travaux, nous avons été heureux de loger dans un foyer géré par la société Adoma. C’était à Porte Dorée dans le 12e. Après les travaux, nous sommes venus ici le 1er mars 2014. Pendant les chantiers, nous avons été relogés dans un foyer Adoma durant 4 ans.Les habitants ont été dispersés en Île-de-France, parfois très loin de leur lieu de travail.» B.S.

«Les 41 personnes qui n’ont pas été relogées au foyer des Mûriers ont été envoyées à Vincennes, en dehors de Paris. C’est surtout les Arabes qui sont restés à Vincennes, ils trouvent que c’est mieux ici. Coallia a demandé à tous le monde où ils voulaient être relogés, et moi j’ai demandé d’être en appartement, mais bien sûr, ils n’ont rien trouvé. Le surnuméraire n’a évidemment pas été relogé non plus.» B.S. RAPPORT AVEC COALLIA «Depuis notre arrivée, nous ne sommes pas tout à fait contents de Coallia... Les gestionnaires sont là, juste pour ramasser l’argent des loyers. Nous ne savons même pas

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à qui nous avons à nous adresser et personne ne semble vouloir répondre à nos besoins.» L.S.

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«Dans la pièce dà côté, il y a une réunion avec Coallia. Mais ces réunions non aucun effet. Ils n’écoutent pas ce qu’on a à leur dire. Ils ne tiennent pas leur parole. C’est des criminels. Il y a des concertations, mais ceux qui le font n’ont rien à voir avec ce qu’ils disent. Ils ont refusé de me loger avec ma famille. Le gérant m’a affirmé que si je refusais d’habiter là où il m’avait placé pendant les travaux, je ne retrouverais pas ma chambre au foyer des Mûriers. C’est une menace et moi je n’avais pas le choix donc

j’ai accepté.» L.S. PROBLÈMES TECHNIQUES DANS LE FOYER «Il y a des inondations chaque semaine, les ascenseurs tombent en panne 3 fois par semaine. Mais est-ce vraiment des pannes si les ascenseurs fonctionnent quand les gérants visitent le foyer ?» B.S. «Après les travaux, les chambres individuelles devaient être impeccables. Mais les problèmes sont nombreux. Il n’y a pas d’eau chaude.» L.S «Maintenant, chacun cuisine dans

sa chambre, et c’est plus cher. De plus, comme les chambres sont petites, les odeurs imprègnent tous les vêtements, et les chambres sentent la nourriture.» L.S. «Depuis que nous sommes arrivés, nous subissons des inondations qui commencent à 19h et finissent à minuit, alors que nous partons travailler le lendemain. Les éviers sont bouchés, et je passe énormément de temps à écoper, à déboucher...etc. Il y a des problèmes d’électricité tous les jours. Les rideaux électriques sont cassés et certaines chambres sont toutes la journée dans le noir. Et des techniciens passent presque tous

les jours pour réparer les problèmes électriques. Les meubles sont cassés, les matériaux se dégradent. Les tables se sont par exemple cassées très rapidement. Ces tables ne servent pas seulement à nous, mais aussi à recevoir nos bailleurs, les politiques… et aussi à donner des cours d’alphabétisation à des jeunes qui sont là. Madame El komri, elle ne vit pas ici, elle s’en fout. Les problèmes sont pires que ceux qu’on avait avant. Les travaux qui ont été faits sont d’une très mauvaise qualité.» L.S.


PROBLÈMES ÉTHIQUES DANS LE FOYER «Nous n’avons pas le droit de faire le double de nos clés jusqu’en 2023. Comme les clés sont spéciales, qu’elles ne ressemblent pas à des clés normales, les serruriers nous demandent des autorisations et nous ne pouvons pas les avoir.» B.S. «Franck Calderini nous empêche d’héberger des proches, alors que nous sommes des humains. Je ne laisse pas un frère dormir dehors alors que je suis sous un toit. C’est impossible ! Quand Coallia est arrivé, ils ont voulu casser cette vie sociale.» L.S.

«Coallia pense que nous faisons beaucoup d’argent alors que c’est faux. On travaille ici, on cotise ici, on paye des impôts, mais on a une famille là-bas et on doit subvenir à leurs besoins.» L.S. «L’AFTAM avait conscience de ça et nous a donné des vraies bonnes conditions de vie. Mais Coallia ne s’intéresse plus à nous et les gestionnaires ont oublié ce qu’il s’est passé. On nous traite maintenant de façon inhumaine. Il n’y a plus de reconnaissance. Ce qui l’intéresse c’est de faire une grosse fortune sur le dos des pauvres. Aucun Français n’accepterait de vivre dans les conditions dans lesquelles nous

vivons maintenant.» L.S. «Abandonner toute ta famille derrière pour être dans un local de 12 mètres carrés. Cela peut même affecté moralement. Avec les inondations, la maltraitance, et la peur, tu ne peux pas être bien dans ta tête. On veut que tout ça prenne fin.» B.S. «Les résidences sociales c’est mettre tout le monde dans sa petite cage à lapin.» Intervention de Jacqueline, directrice du COPAF ANCIENNES PRATIQUES AUX FOYER «À l’époque, on considérait le foyer

comment lieu d’éducation, un lieu de partage, un lieu de convivialité. Nous sommes habitués à une vie communautaire. C’est une vie qu’on a laissée en Afrique et qu’on essaie de retrouver en France. Ce qui veut dire, qu’on mange ensemble, qu’on dort ensemble, on fait tous ensemble. Les plus pauvres vivent aussi avec nous, mangent avec nous, dorment avec nous. Les personnes âgées qui vivent dans le foyer on fait beaucoup de choses pour nous, leurs petits-enfants. C’est grâce à eux, que nous avons appris la langue française dans les écoles qu’ils ont construit des écoles. C’est aussi grâce à eux que nous avons accès à l’eau potable.

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personnes âgées nous ont donné une bonne éducation. C’est eux qui nous guident aujourd’hui. Tout ce que nous avons pu apprendre, c’est parce que nous vivons ensemble. Nous vivons dans des espaces communs pour discuter de tout, ensemble. C’est une richesse, que les immigrés avaient avant. Nous nous rencontrons, nous discutons, nous buvons ensemble.» L.S. PROBLÈMES COLLECTIVITÉ DANS LE NOUVEAU FOYER «Cette convivialité a disparu aujourd’hui dans les foyers. Les politiques nous isolent, ils nous divisent pour mieux régner.» B.S.

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A PROPOS DE FRANCK CALDERINI «Le 23 mai, il a envoyé la police au foyer Diderot. Le contrat que Coallia avait fait signer aux résidents du foyer ne prévoyait pas l’installation de compteurs d’eau. Calderini a tout de même appelé des installateurs, et les habitants ont bloqué leur entrée pour que les travaux ne puissent pas se faire. Le lendemain, la police était là et elle a attrapé 40 à 50 personnes pour les envoyés dans le centre de rétention à Vincennes. Le 24 mai, Franck Calderini a envoyé la police au foyer de Boulogne pour fermer les cuisines collectives. Ils ont arrêté les femmes cuisinières, ils ont jeté toute la nourriture. Pour quelle raison Caollia nous retire ce

droit?» L.S. «Franck Calderini a été éjecté maintenant de Coallia, et nous sommes maintenant en attente d’un nouveau directeur général. Il ne s’entendait pas avec les locataires, mais aussi avec ses propres employés. On a fait beaucoup de manifestations pour faire remonter notre colère. On est allé crier nos revendications devant le siège de Coallia, qui sont déjà au courant de tout cela. Notre force collective nous a fait gagner.» B.S. CUISINE COLLECTIVES «Ces cuisines sont très importantes pour nous, elles nous permettent

de manger ensemble et de manger à notre gout. Il y a beaucoup de pauvres dans les foyers. Pour 2€, vous pouvez manger un bon repas, et les Français aussi. Il y a beaucoup de Français qui aiment ces plats et Coallia a cassé tout ça.» L.S. LIEUX DE CULTE «Les lieux de culte viennent de fermer ici. Le 27 janvier, un huissier a recensé tous les “fidèles”. Mais pour quoi faire? Même avant Coallia, les pouvoirs publics ne veulent pas que nous pratiquions la religion à l’intérieur du foyer.» B.S. GRÈVE DES LOYERS «De plus, Franck Calderini a fait


perdre de l’argent à Coallia. Avec le système qu’il mettait en place, ça a créé des problèmes. Pendant des mois, deux gros foyers ont fait une grève des loyers. Pendant 6 à 7 mois, il y a donc eu un gros déficit pour Coallia et Franck Calderini n’a pas pu remonter les finances après ça. La grève des loyers, c’est costaud!» B.S. «La grève des loyers qui était prévue récemment a été stoppée. L’association 20e soleil qui soutenait nos démarches nous a fait remarquer que les habitants du foyer n’étaient plus assez nombreux à se mobiliser et ils ont alors décidé qu’ils ne voulaient plus prendre le

risque de nous soutenir. Lorsqu’il y a des réunions par rapport aux grèves des loyers, plus personne ne vient. Les habitants ont peur et n’ont plus le courage de revendiquer des choses.» B.S.

leurs loyers. Maintenant, quand on convoque les habitants, ils ne viennent pas. On publie des tracts, on en parle à la mosquée, on les convoque, mais ça ne marche pas.» B.S.

«À l’époque, ce n’était pas les mêmes générations qui luttaient. Certaines générations, c’est “jusqu’à la mort”. Maintenant c’est différent. Les vieux qui étaient là respectaient leurs paroles. Lorsque mes grands-parents ont quitté le foyer d’Oberkampf, ils s’unissaient tous, c’était “union pour la force, on va faire des grèves, on va réussir”. C’est vrai que ça a marché, même si certains ont quand même payé

SUIVI DES TRAVAUX «Avant les travaux, j’ai eu des difficultés avec mes collègues délégués. On se demandait comment on allait s’y prendre pour participer aux comités de pilotage des travaux. Pendant les travaux, les délégués ont pu suivre une partie de l’évolution des plans du foyer, mais par la suite, rien n’a été respecté. Cela a semé la zizanie chez les délégués. On ne sait pas

si c’était les délégués qui suivaient mal les travaux ou si c’était les bailleurs qui n’écoutaient rien. Moi je pense qu’il faut former les délégués et les habitants pour qu’ils puissent participer aux comités de pilotage.» B.S. «Les bailleurs nous ont fait remarquer que nous étions “petits”, non qualifiés, et donc, ils ne nous écoutent pas. Même si on suit les travaux, les actionnaires ne respectent pas nos décisions et font ce qui les arrange. Ils nous montrent les plans, et puis nous disent que c’est trop tard, qu’on ne peut plus rien modifier.» L.S.

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«Nous n’avons pas été concertés pendant les travaux, et quand nous faisons entendre nos revendications, ils s’en foutent. On leur fait noter tout ce qui ne va pas, même si nous ne sommes pas des architectes, mais ils ne font rien. Ils ne nous invitent pas dans les comités de pilotage pour prendre leurs décisions dans leurs coins. Former les habitants est une bonne idée parce que nous aurions une vraie crédibilité auprès des décisionnaires.» L.S.

les jeunes de mon âge pour me réunir dans les parties communes. On discutait, on faisait du thé, on partageait pleins de choses. On pouvait aussi se réunir dans les chambres qui étaient plus grandes pour jouer à la PlayStation. On regardait des vidéos du pays. On invitait des amis extérieurs du foyer. Les femmes faisaient la cuisine en bas, et on allait manger ensemble pour manger un bon plat en discutant. On était heureux.»

UNE JOURNÉE AU FOYER AVANT SA RÉHABILITATION «Avant, quand je finissais le travail, je courais pour rentrer au foyer. Je te jure, je voulais retrouver tous

«À l’époque on était bien, on avait de l’ambiance à fond. Nos amis du quartier venaient jouer aux cartes, aux dames. On avait des parties communes. Il y avait un cap verdien

qui donnait des cours aux jeunes du quartier. On écoutait de la musique et on regardait la télé. Nos cuisines n’étaient pas chères et on avait l’esprit ouvert.» B.S. UNE JOURNÉE A LA RÉSIDENCE SOCIALE «Aujourd’hui, quand je finis le boulot, ce n’est pas pareil. Je suis fatigué. Il faut que je fasse la cuisine après avoir fait toutes mes prières. Quand mes amis venaient pour partager le repas avec moi, on se réunissait ensemble. Plus personne ne vient. Je rentre, je suis fatigué, je dors ou je fais la cuisine. Faire mes plats ça prend 2h! Et je dois me lever tôt. Nous sommes divisés tous

dans nos chambres. Pour avoir des nouvelles de mes amis, maintenant je les appelle, je ne peux plus les inviter. Avant on avait de l’espace. Maintenant on est fermé sur nous même.» L.S. LES DÉLÉGUÉS «Les délégués jouent un rôle très important dans le foyer. Malgré tous les problèmes de Coallia et des gestionnaires, on fait des efforts. Si nous sommes délégués, c’est qu’on nous a choisis pour mettre les choses en ordre. On fait donc aussi respecter l’ordre. Nous avons établi un règlement intérieur pour nous respecter les uns les autres.


À certaines heures dans le foyer, on n’entend aucun bruit. On ne voit pas de saleté. Il est interdit de fumer dans les locaux, de se battre, d’amener de mauvaises personnes dans ce bâtiment. Ce bâtiment nous appartient aussi, c’est là où nous passons toute notre vie donc nous devons le respecter pour nous respecter nous même, et nous faire respecter. Si on laissait entrer les fumeurs, les squatteurs, et de mauvaises personnes, la police viendrait en permanence, et il pourrait y avoir des règlements de comptes. Même les commerçants sont dehors. Certains foyers étalent leurs marchandises partout, et il n’y a même plus de place pour passer.

Nous avons fait en sorte que le foyer soit bien tenu. Nous sommes très rigoureux de ce côté-là. C’est en se respectant que les autres peuvent nous respecter. Nous organisons des journées de nettoyage collectif par respect pour ceux qui viennent nettoyer eux même.» L.S. LA NÉCESSITÉ D’AVOIR DES FOYERS: «Si Coallia continue de nous traiter comme ça, ça peut provoquer la non-réussite des Africains qui viennent en France. C’est mauvais pour ces Africains, mais c’est aussi mauvais pour le pays, parce qu’ils seront au chômage, ou dealer, ou de mauvaises personnes. Si le

foyer est bien tenu, s’il est cadré, il s’en sortira. Si le foyer disparaît, ça va être très compliqué pour les jeunes Africains qui arrivent. Le foyer est aussi un lieu d’éducation et de cadre qui nous permet de bien nous comporter. Nos grandsparents nous éduquent. Un enfant croit ce qu’il voit et ce qu’il entend. Quand il est au foyer, il voit des gens qui vont travailler, des gens qui se respectent, qui se mobilisent. On doit tout faire pour garder les foyers.» L.S COPAF «C’est une association qui regroupe tous les délégués des foyers coallia. Grâce au COPAF (COllectif Pour

l’Avenir des Foyers), on a compris toute la politique de Coallia. Ça fait plus de 10 ans que le COPAF nous prévient de ce qui va arriver. Nous, on ne savait pas. Grâce à eux, on a pu comprendre beaucoup de choses sur ces mauvais bailleurs. Ils nous donnent des guides pour que nous puissions comprendre les règlements, les travaux, les recours possibles…» L.S. «Les gens ne savent pas ce qui se passe ici, il est donc important que des gens comme vous, nous aident à faire savoir ce qui se passe.» L.S.

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