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Datura #13 | 01_23 ABEL – BARNES – BECK – BEVERIDGE – BURZ – CAESAR – HOUSSAM – HUBBS – HUFFMAN –GNANADESIKAN – MAOLALAI – MITCHELL –RAFIO – SARNAT – TUSTIN

Editor of the online magazine Ygdrasil for 30 years. A scholar, he had just finished a translation of Dante's Inferno, just for fun. He will be missed by the international literary community but will have left a deep mark. ****

Éditeur de la revue en ligne Ygdrasil depuis 30 ans. Érudit il venait de terminer une traduction de L'enfer de Dante, pour le plaisir. Il manquera au milieu littéraire international mais l'aura marqué profondément.

in memoriam
Klaus J. GERKEN 22 April 1947- 27 December 2022

Contents | Sommaire

Cover illustration | Illustration de couverture: Rafio

• Docteur Burz: editorial

• Léonel Houssam: prose

• Damon Hubbs: the rat control agency and Kessler Syndrome, poetry

• John Tustin: In My Prime, The Me You Cannot See, and Un-, poetry

• Cheryl Caesar: The Treasure-Seeker, drawing

• A.J. Huffman: Betting on Sanity, Eleutherophiliac, Mirroring the Floor, and At the End of the World, poetry

• DS Maolalai: I think of the meat of your heart, poetry

• Robert Beveridge: Amicus and Lack of Ram, poetry

• Gary Beck: Persistence

• Rafio: photograph

• L.Ward Abel: Locus ad Infinitum, Ivory Clouds, Now the Color of Oranges, Low Tones, Curvature, and Requiem Misremembered, poetry

• Rafio: photograph

• Christopher Barnes: Nyet!, Jerk Line Of The Will, DoorThwack, Starbucks Luminant, and Quibbled Dilemas, poetry

• Mukund Gnanadesikan: Trigger Warning and Before You Walk Away, poetry

• William Doreski: A Novel I’m Writing Myself, poetry

• Mark J. Mitchell: Dangerous Knowledge and Espinella On A Surreal Theme, poetry

• Gérard Sarnat: Prisoner Poetry: Trying To Stay On Course The Day Of Our Presidential Election I Can’t Vote In, Copping To, Coping With President’s Comments About “Loser And Sucker” Tortured Prisoners Of War Well As Our Fallen Troops, I can’t say it any better than this Maineline prisoner, Get Out Of Jail Card, and Short-Shorts By The Short Hairs, poetry

• Léonel Houssam: extraits de Notre République (roman)

Editorial du Docteur Burz

Je ne souhaite rien aux gens car je ne leur vœux pas de mal. Déjà publié sur Les déraisons du docteur Burz le 2 janvier 2023

https://ledocteurburz.wordpress.com/2023/01/02/je-ne-souhaiterien-aux-gens-car-je-ne-leur-voeux-pas-de-mal/

L’indubitable et redondante ressemblance entre chaque année qui passe le témoin à une nouvelle, c’est sa capacité à ne rendre aucun souhait viable et véritable. C’est donc en théorie une nouvelle année de merde, allant certainement encore un peu plus loin dans la bêtise et l’ignoble et constante morale qu’on voudrait nous imposer.

Peut être pas forcément au niveau des individualités, mais sans aucun doute au niveau planétaire. Dès lors, si notre monde s’évertue à nous faire croire que l’optimisme est toujours une denrée porteuse, qui permet aux gens de continuer à croire à des miracles techniques (pendant que les industries contournent sans cesse les règles) et d’autres sécuritaires (qui font qu’on dénigre les personnes), nous pouvons penser que les individualités seront également écorchées plus profondément un jour ou l’autre.

Votre nouvelle année de merde, vous pouvez vous la souhaiter comme bon vous semble on s’en branle ! Mentez-vous entre vous si vous le voulez. Proférez-vous des menaces optimistes si vous le désirez. Priez pour la gueule de votre prochain si ça vous tente. Faites résonner votre cœur plein de tendresse et d’absolution à l’encontre de vos proches si c’est votre truc. Provoquez les autres en leur prévoyant de vastes chantiers pour leurs vies, ou des choses et des machins pour qu’ils se sentent heureux d’exister encore… si votre délectation c’est de mentir effrontément aux quidams en pensant faire le bien, pour leur infliger votre volonté sans limite de croyances sans fondement dont il paraît désobligeant de les trouver grossières… vous pourriez refaire facilement carrière chez les témoins de Jéhovah.

( ・﹏・)

Vous allez me dire que je vous fais chier chaque année avec tout un tas de réflexions autour de la fausse éligibilité à pouvoir être heureux sans se poser de questions. Mais c’est vous qui me faites chier, avec votre tradition qui n’a de sens que pour votre irréprochable besoin de faire subir aux autres un truc de l’ordre de la roulette russe !

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Je ne souhaite rien aux gens car je ne leur vœux pas de mal. C’est aussi simple que ça. Faut pas compliquer la vie des gens qui ont déjà du mal à comprendre comment on peut joindre les deux bouts, tandis que d’autres se font un pognon magique de dingue. Évidement, il y en a qui sont plus nombreux que d’autres, et en constante augmentation de chaque côté.

D’ailleurs nous continuons à souhaiter de bonnes choses aux gens tous les 365 jours alors que la pauvreté explose un peu plus chaque année, et que les super riches augmentent également avec une indécence démultipliée. Nous pouvons donc convenir qu’on se souhaite surtout de ne pas sombrer dans la mélancolie d’une mort prématurée par inexistence, ou celle de ne pas finir comme un simple nouveau connard du consumérisme organisé et obligatoire.

Si ça se trouve c’est exactement la même chose, on sait pas vraiment. Le connard n’a pas de camp, en dehors d’avoir une étiquette. Si pardon, on sait pour les témoins de Jéhovah, c’est pareil.

(¯―¯٥)

Donc voilà.

Tout ça pour dire qu’on doit se fader toutes les 8760 heures vos monstrueuses violations du droit à ne pas être importuné par l’innovation bienfaitrice de la pensée obligatoire pour tous.

Et surtout la santé parait-il.

Moi j’essaye d’être plus ou moins original chaque 31 536 000 secondes que fait notre nouvelle vie à chaque fois, pour éviter que les gens trouvent normal de faire ce genre de truc débile, dont le sens s’évapore à tout bout de champ.

Mais rien n’y fait.

Même si tu t’énerves et que tu racontes aux gens que ça ne représente rien pour toi, que tu t’en branles, que c’est du moutonisme mondial pour éduquer les populations à la fausse sensation d’appartenir à un collectif (comme être un supporter du mondial de quelque chose)… on te regarde comme un pion maléfique.

Pour ça au moins, je vous emmerde poliment.

Comptez de 10 à 0 sans moi, ça et vous, me faites chier. Je fuis littéralement et inconditionnellement ces moments tragiques qui me mettent mal à l’aise là où tout le monde est en joie. Ça pourrait même être une vraie souffrance me concernant. Ce moment fatidique,

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guetté, attendu et prémédité que même les provax et antivax partagent me fait gerber. Je ne suis ni l’un ni l’autre, ni heureux de mentir à qui que ce soit comme ils le font tous.

Le vrai complot ce sont les vœux, chaque année, ouais, je pense franchement que c’est un truc de QAnon pour déstabiliser l’ordre mondial des cons… mais c’est pas facile pour d’autres cons, de déstabiliser d’autres cons.

Ah merde, Tutti Gerbi et Tourista…

©Le Docteur et ©DardMalin vous souhaitent un mensonge durable et personnalisé.

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Nouvelle de Léonel Houssam

Défi littéraire

https://www.facebook.com/photo/? fbid=229225269429504&set=a.101848975500468

La brutale stupidité de mon esprit lorsque j'ai accepté de suivre ce mec derrière la station service. J'avais fait le plein. Je roulais ivre depuis deux heures du matin. Nuit arrosée, déhanché dément au milieu de jeunes sportifs et sportives déglingués par cette techno hardcore de leur génération. Soufflé, expulsé de ma raison, je suis allé jusqu'au camion, dans l'odeur de sa peau noire pas lavée de plusieurs jours, je lui ai laissé le pain, la mie, les miettes et mon môle de mâle. Sa cabine était décorée pour Noël. Des guirlandes illuminées, des sièges en cuir, un accoudoir d'empereur, un rideau marron très seventies. Et la douleur. Son frein dans mon crash, sa veine épaisse dans le cou et sa bave... Nos râles, mes cris, ses grognements. Ma douleur et son plaisir dans la lumière moustiquaire d'un petit lampadaire qui bandait face à son camion…

On a parlé ensuite. J'avais le cul irrité par les sillons sanglants qu'il avait formés. Mon cœur ne cesse de ne pas cesser. Et sa douceur soudaine, presque sa honte, l'odeur comme celle d'une pisse de ménopausée dans les guogues d'une aire d'autoroute. Il parlait, parlait encore, s'épanchait. Sa mère croate, son père congolais. Sa femme vietnamienne et son beau petit garçon qui réussirait tellement mieux que lui à l'école. J'étais blotti contre lui comme une femme fragile. Fluet, feignant l'écoute pour mieux me repêtre de l'essence salée de l'odeur de sa peau.

Comme il balbutiait parfois des excuses, je l'encourageait avec des "hum hum". J'avais sommeil et je me suis endormi, contre lui, lui contre moi jusqu'au matin pétri par les doigts mous d'une aube grise. J'eus honte. Et j'eus de la satisfaction. J'eus peur et j'eus une tasse de chicorée bouillante avec une clope au pied du camion. Avant de repartir vers l'illusion d'une vie normale. Nous nous sommes serrés la pince, qui sentait largement nos liquides asséchés... Un manche dans les yeux, une complicité de plaisir et de douleur. Je n'aurais pas dû.

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Presqu'il
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8…

the rat control agency by Damon Hubbs the rats in the rat control agency can not be killed & the team of Industrial Hygienists hired to tamp down concerns with filtered air & shampooed carpet post-removal activity milestones specific to the Fresh Return Initiative talk Proust as they leverage the robust & hurried fester of the office park. by all accounts the Frenchman pierced the wretched creatures with hatpins when the Black Sea is trudgen with fleas boil the ocean at pace.

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Kessler Syndrome

“We

=====it was late in the afternoon of the twenty-seventh day in the Ninth Month when the inner moon of Planet B strayed too close and was ripped apart by gravity=====

=====plume blasts of ocean spray shoot from tigerstriped fractures in the south pole. center embedding / the global water ocean beneath its frozen crust [lost] ,,, spigot spray beyond the tip point of primal goodnesss

orbit trail of debris-strewn rings mottle the spacescape like the white birches of Worpswede. We wept goodbye to water, to white birches. Tilted towards excess, we expected vertigo thirstily

two whole numbers and nobody answers the call between the fractions.

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shall often have to call a halt before the unknown.”
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In My Prime

Can you imagine me in my prime alone in my apartment all night with my snootful of budget beer, my mind fulsome with foaming words while the music played so loudly and I sang along with very word being sung?

I am imagining it now as I stand for ten minutes in front of the toilet at 2 AM because my enlarged prostrate is unimpressed that I had two cups of coffee so close to bedtime.

Those were the days, my friend. Those were the days.

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The Me You Cannot See

In bed at night finally and I lie on my stomach-side and I curl and stretch myself becoming smaller than a pea on a plate in a kitchen in a house and expanding faster and larger than the universe

The only fear remaining being what I will dream of and whether I’ll remember it or will its atmosphere reverberate when I wake up and become again the me that you can see

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Roses lie brown and dead On horrid graves Of unrecalled love And lost time unredeemed Spent unremarkably By all accounts But mine.

Sadness marks the passing Of time And memories scrubbed of salience

By all but me. I remain unmarked. Unneeded. Unknown.

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The Treasure-Seeker, original charcoal erasure drawing by Cheryl Caesar

Betting on Sanity

A true fool’s play, in the moonlight mind set on holding itself together until dawn. It listens too intently to every stutter: a fan’s blur, a web’s whisper, the faint baa of a phantom sheep so black it cannot be counted. As sleep threatens to break through, armor cracks. A hatching egg? The first last sound. Its resonation could destroy the world.

Flags flying and fledglings falling: two sides of the same symbol. Stars and eagles and empty expanses line up as signs of the ephemeral gift. The motion, the movement, the spirit of a dream without end, a world without walls, a space without time. Unconfined. The word echoes with possibility, promise. Choice is the exponential mitigator, the only internal guide, the pull in the base of a gut that signals it is time to answer the call of the wind.

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Mirroring the Floor by

I look down on my reflection, hoping perspective will change my appreciation for the apparition that returns my gaze. Unfortunately, she is still smiling back through blackened eyes that understand the futility of such desperate attempts at corrective vision. Together we remember how hollow past frames fell.

At the End of the World by A.J. Huffmann

after Farewell Kiss by Vladamir Kush

Clouds frame the sun, a pearl pursed between ephemeral lips. Tonight they glow, red with desire. I swallow their flight like candy, choke on the wrapper. I am the sinking skies warn of, the darkness rising on too many horizons. More than sailors should beware.

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in my teeth and of salt, and our marriage and of tension of tendons. I think of your chest, open as the shell of a sea creature blue and exposed. your ribs make a shape made away from each other. make the shape of fingers at offering reaching the ceilings of churches. your heart, and your hands and your eyes as you watch and the blood on my chin making bubbles on stubble and catching and sticking and staining.

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I think of the meat of your heart by DS Maolalai
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rotofascient omnicrist autofocus pick pick pick at the rocks in the cliff on the wall in the eye. we ask it again and again and again but the response is always in Hungarian, or maybe Igbo and we can only respond with our balls in a can

when the lungfish developed fingers and learned to fix tomato soup the artisanal cheese wheel threw itself from the cliff bombs away soon whole villages of fingered lungfish traded soup with villages of monkeys who harvested plantains and then they founded the world’s first dairy-free cooking school

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Lack
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Persistence

Throughout history man, then men and women resisted tyranny, failing, perishing, unremembered in the annals of time. Some endured dire oppression, but the brevity of life generally prevailed removing the oppressed, finally oppressors, the human condition always in danger of extinction.

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Locus ad Infinitum

Feel the hundreds-years-old shanty brick and beams overhead that sag under weight of space/time and the doings of people

while memories of here wander a room so large as to be without walls, passing through as we all have and do.

Ivory Clouds, Now the Color of Oranges by L. Ward Abel

There sixty miles maybe more despite a crease of night east of here all the way to Monticello

I can see ivory clouds, now the color of oranges out of focus, reflecting sun from a million miles to the west;

and the nightward rain is full of light while westward the cities that we made running-hard from our then-old world recede

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Low Tones

Low tones the ocean speaks it groans, its green belies liquidity as if trees were just below.

Oh, wind slightly west of south with Cuba down beyond the long curve that turns blue to black burning cool unconsumed.

Thicker than water the rivers speak beneath sound, groan even lower tones. There a view sweeps wide in three-sixty to where curvature leaves behind horizon. The blue sings unified with all green below, and while some of us may lose our way the miles-deep film of air never does.

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Requiem Misremembered

So it’s come down to this instant. By the time I understand it I’ll refute and disown it.

The moment swims only as afterthought accessed consciously just before losing color then lines altogether.

The empty quadrant becomes lit up by the act followed by a filing away in long rows of me.

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NYET!

(after Riot Days by Maria Alyokhina, Pussy Riot) by Christopher Barnes

Bonfire glisters through panes. Columnists snit the front man. In niches, solicitors dither. Questions kick back. Birthright to my title? Acid ruckles in veins.

The chorus returns –Showtime!

JERK LINE OF THE WILL

(after Riot Days by Maria Alyokhina, Pussy Riot) by Christopher Barnes

Walls sweat psoriasis, Everything's icky. Spurning nourishment hollows eyes. Vigilance under troublesome quilt. Ceiling obsesses. Meddling frisks, contrived to sicken.

Thwang the overture. Bring on the violins.

DOOR-THWACK

(after Riot Days by Maria Alyokhina, Pussy Riot) by Christopher Barnes

Vodaphones wing-it as brightness. Cold facts dim. Hearts sputter, Blackbird-nimble. Insurrection's a comic yarnWe wait for ovations.

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STARBUCKS LUMINANT

(after Riot Days by Maria Alyokhina, Pussy Riot.) by Christopher Barnes

Integrated earth Heard conquers of the altar rail. Pussy footing through Moscow, Humbled by wit’s-end stars. Could be fingered In an hour, or a second.

Mere dramatic convention.

QUIBBLED DILEMAS

(after Riot Days by Maria Alyokhina, Pussy Riot) by Christopher Barnes

Back door hawk-eye Or guiltless sightseers? Footwear's a whisper. Prowling motors improvise jitters. Deserting Russia's no blueprintStage-right is a muzzle. You know the plot.

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Trigger Warning

The dream is a night visitor, my black and white companion.

No ghosts or goblins are required only closed eyelids, immobile.

The repeated image rises: my naked head, shaven, chrome gun barrel resplendent at my left temple.

Whose hand holds this instrument? Unknown and immaterial-

Instants later reddish-purple pool surrounds my crumpled body.

The white dog lingers, whimpers

licks an ear, sits Shiva by the waning sun.

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Before You Walk Away

Before you walk away across the distant fields, turn back. Run to me, leap into my arms.

Young one, your appointed time is not yet here I defy its premature arrival for darkness is not yet fallen. Let us link fingers until then:

I implore you, one more smile, sparks reflected in blue oval eye-pools, recall the pitter patter of your tiny narrow feet that used to tap dance on the parquet floor.

How shall I forestall the ending of this story?

The ferryman has come to carry you. He has no words. He begs no pardon.

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A Novel I’m Writing Myself

Reading in the dark illuminates organs unrelated to sight. The pages flop in my paws like salmon scooped from a stream. The stark night encourages.

You want to turn on a light but I object because engaged in a novel I’m writing myself chapter by chapter with nothing between myself and my narrative.

The night whispers of creatures busy about their little chores. You retreat to the bedroom to watch a movie streaming from the ether. Another story telling itself

rather than the tale becoming the teller. I write in cloudy script that no Rosetta Stone mediates. Only the murmur of the TV textures the silence I impose.

My imagined characters romp in various sexual attitudes, pampering each other’s organs. Such pastoral should commemorate lives we never learned to live.

Miles away, the sea roughs up for another kind of narrative but one I hope to incorporate into dark pages so compelling even you will want to parse them.

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DANGEROUS KNOWLEDGE

You thought she saw your god the other night. Her quick step, the tilt of her upturned face— Something gave away a sinister trace of knowledge she shouldn’t own. You don’t show that you saw that she saw. You watch the light bounce off her glasses, reach for her soft hand. Never let on that you’ve seen through her plans— They’re already in motion, still unknown even to her. Unsure why you kept that god so secret. Hidden from priests, from long nuns. You’re almost glad someone else finally sees exactly what your idol is. Her nod, a squeeze on your palm says something’s begun that may not end, fragile as last night’s breeze.

ESPINELLA ON A SURREAL THEME

Chilren are afraid of idols. • Gisèle Prassing, Arrogant Hair

Children, quite wise, are afraid of idols. Not stone faces, cold rites of sacrifice. It’s a terror that they view through new eyes, telling them they’re false, more unreal than dolls. They look hungry for tiny bones and souls. So—sudden cries, wailing at church statues and park heroes. There’s nothing you can do. Even butterflies or windblown daisies won’t end the noise. Take them where they won’t see those cold eyes. Find some god that’s new.

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PRISONER POETRY

1. Trying To Stay On Course The Day Of Our Presidential Election I Can’t Vote In

WTF could be a more misleadingly-named town to house The Golden State’s Lompoc Correctional Center than Mt. Pleasant?

Been keeping busy putting together The Cultural History of American Painting course. Didn’t think I’d be speaking regards Transcendentalism or The Enlightenment or blood trees in North Carolina which has the South’s largest Klan chapter, but in due course devouring such things in order to stay distracted is what doin’ time’s really about.

Extra work to have a damn syllabus approved so the troops might get credit then building attendance is a fickin pain in the arsem though…. Why the FBI putz did what he did we’'ll never know unless of course it’s politics against Lock-Her-Up Hillary. Naw couldn't be.

About 122 days till release -is this the first instance I’ve allowed me to write that?

They say it’s tougher as the date draws near & the possibility of freedom courses through your veins. Plus no way us felons can help but start figuring, even Xing days off our cell wall like death row cons do. Kid yourself not, this prisoner’s nada gonna count. /

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2. Copping To, Coping With President’s Comments About “Loser And Sucker” Tortured Prisoners Of War Well As Our Fallen Troops

— thanks to General J. Kelly, former Trump White House Chief of Staff, 3 September 20

What happens after you lose loved ones

from US military? Their combat buds wrap

h/her all up inside whatever passes as a shroud

put inside helicopter. Eventually the first leg back ends when sent to Europe stopover where ice packed again

for flight into Dover airbase for task of embalming

remains before they are so meticulously dressed (uniform

includes all service medals + emblems). Then are flown

home accompanied by at least one casualty

officer while at similar time others go to both parents & spouse’s

houses early in morning now wait for first light to come on, knock

on doors, proceed to break hearts of family members staying with them for long stretches often through interment — this was what transpired with John’s own son.

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3. I can’t say it any better than this Maineline prisoner.

Frontline, Last Days of Solitary, 18 April 2017 -- prisoner MDOC# 102817

“I would rather be free in my grave than living as a puppet or slave.”

“People cutting up is our only form of entertainment and control.”

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4.Get Out Of Jail Card

Dear friends and relatives, Marvin Gardens, the renowned yellow Monopoly property -the only one not in Atlantic City -- is now back on the board as the other coast’s asphalt jungle halfway house where my baby will be transferred after finishing up her sentence.

With only 12 boring days left Inside, though a double whammy of zilch signal how long she’ll be there in Watts -plus we wouldn’t trust a thing The System’d say anyway -- after netting $10.80 that disgusting first month in the can

then a whopping upswing to $17.64 cleaning latrines in January, it could be strangely groovy to earn minimum wage -- minus 25% deducted for room & board -- flipping Whoppers 12 hours a shift at a Burger King 3 bus transfers through Stalkers territory.

Then around 2 or 6 weeks -- I’ve been told by lotsa folks

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F- bomb bodice ripper rage rapper, this kid is too young to toss away.
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probably toward the former ‘cause of high turnover from prisons -- my star-crossed love’ll finally be released home to our family wearing an ankle bracelet with diamonds on the soles of those shoes.

We are looking forward to seeing you soon.

5.SHORT-SHORTS BY THE SHORT HAIRS

i.Running For Prez Then From Prison

Friday the 13th , 1st Trump public appearance since election (unmentioned), orange —> gray coif plus oy looks drugged up, maybe he fired $$ hair dresser or is preparing to change color co-ordination when dons orange jump suits.

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ii.Men’s Central Jail

Sis, trust you’re well. Simple misdemeanants don’t pay parking tickets, sixty jumpy orange suits in cells meant for fifteen, I try to disappear among handfuls of loud proud more complex miscreants who made – or didn’t make -- terrible decisions which led to wasted lives and provoke excessive force in here.

iii. She Takes No Prisoners tanka

Fragile mind-body, Clumsy, clambering, casting Corporeally about In her bed; bloodshot Corporal Lance’s dream is popped.

iv.CRT Creche kouta

Him and her alabaster pilgrim progress at expense of indigenous: un/witting bastards?

v.Post Churchillian Jailbreak tanka

Bad bits, leftover Fish ‘n chips all et, you went Wandering New World. Fled war-torn bombed London. Turned out best move ever earned.

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AUX NOUVEAUX TYRANS À TÊTE D'ANGE

« Ceux qui se soumettent aux nouveaux tyrans à tête d'ange seront balancés dans la fosse commune et je chierai sur leurs cadavres » Il étouffe dans ce goulot, ses yeux plongent dans le vertige, la panique, le silence si puissant. Ramper, plonger en apnée dans l’artère bouchée par les écoulements des eaux de pluie. Bertrand n’en voit pas le bout, n’en connaît plus l’issue, son sac à dos attaché à sa cheville avec une corde fermement nouée tire sur sa jambe, un peu comme si les muscles de son mollet et de la cuisse s’étiraient jusqu’au déchirement ultime. Qui tire là-haut ? Il pleure. L’indien lui souffle dans l’oreille qu’il faut tenir encore, avancer, qu’il faut aller jusqu’au bout. Mais quand les fantômes veillent, secouent leurs corps gluants à l’instar de pines molles… Sa République dégouline… « dans la fosse commune sur laquelle il s’assoit »

LES ENTREPRISES SONT DES SEIGNEURIES

« Les entreprises qui ont des salariés ou des travailleurs « libéraux » à leur service sont des seigneuries, quelque-soit leur taille, elles sont des lieux anti-démocratiques voués à l’abus de pouvoir de Seigneurs locaux. C’est au bon vouloir ce ceux-ci que chacun doit se soumettre. S’il est un monarque local éclairé, il distribuera de l’empathie et des bons morceaux du banquet, s’il est un autocrate teigneux et con comme toute sa lignée, il roustera ses serfs à coups de menaces de licenciement, de « demander toujours plus pour toujours moins de salaire » et de harcèlements moraux divers et variés. Il n’y a rien à faire. La féodalité moderne est à ce prix… Ma République ne leur donne aucune chance. Ils ne m’auront pas… Il y a eux, il y a moi » Il parvient tout juste à jaillir de la vulve terreuse qui fait office de sortie du tunnel. Nouveau-né couvert de merde, il étire son corps sur l’humus tiède du petit bois. Il fait encore nuit mais l’aube pointe déjà. Les balles crépitent au loin. Il est hors de portée de leur vue.

LE TRAVAIL DE FORÇAT DANS UNE MANUFACTURE MONDIALE

La voix de Bertrand se fraye un chemin entre les arbres :

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Notre République (extraits) de Léonel Houssam. Editions Burn-Out.
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« A la différence des séquences plaintives individuelles d’occidentaux de classe moyenne plutôt bien protégés, les souffrances collectives impliquent une forme de neutralité dans la souffrance. Souffrir au même niveau que l’autre. Souffrir ni plus ni moins que l’autre même s’il existe des inégalités individuelles entre chaque être. Peu à peu le capitalisme mondialisé s’est approprié l’ensemble des territoires, chaque parcelle de la croûte terrestre, des pans entiers de milliards d’esprits. Après les grandes famines des années post-coloniales. » Sombre et puissante, sa voix atteint les lignes arrières. Dans un camp fait de trois marabouts aux couleur camouflage, quatre 4x4, des malles énormes et un fil à linge semés de slips blancs kangourous. Un filet de fumée blanche s’échappe de la cantine. « Qu’est-ce que ce type fout à poil là-bas ? Dans le bois. Tu vois pas ? Il braille en levant les bras.

- Un taré.

- On devrait aller voir »

Les deux soldats lâchent leur ration de saucisses-lentilles sur la caisse qui fait office de table. Une dizaine de canettes de bière vides forment un cercle parfait en son centre. Fusils en bandoulière, ils s’avancent. Ils doivent traverser la départementale bitumineuse avant de sauter au-dessus d’une haie de ronces. Le parterre de feuilles mortes qui suit est moelleux, craquant, presque mouvant. L’odeur de champignons, de lichens rappelle cette grosse averse orageuse qui s’est abattue une heure plus tôt, imbibant les sols chauds d’une pluie acide venue du Nord-Est. Leurs pas sont sûrs, rapides. Leur dextérité de soldats surentraînés leur permet de passer creux, troncs, bosses sans embûche. Une pie picorant un tee-shirt en haillons prend son envol. Délirant à première vue, L’homme ne cesse de parler, possédé: « Les grands-messes humanitaires des années 80, les chorales de chanteurs pop pour éradiquer la famine en Ethiopie ou ailleurs ont engrangé assez de thunes pour enrichir des générations de bourgeois aux grands cœurs ! Ces étoiles filantes de la soupe variétoche étaient les idiots utiles du système. Grâce à eux, tout comme on avait fermé les grands ensembles industriels en Occident devenus des foyers protestataires socialisant, il fallait fermer les pays-famines, les remplacer par des pays usines, des pays centres d’appels, des pays où tout affamé reconnaîtrait dans le travail de forçat dans une manufacture mondiale ou une plantation en monoculture une sorte de rédemption, d’accès direct à un paradis terrestre. Mieux vaut être esclave dans une fabrique de jouets en plastique pour enfants de classe moyenne qu’affamé dans un camp-mouroir ou un village-abattoir. Et sans ma seule force de conviction, ma seule conviction. »

Les deux soldats se ruent sur lui sans même lui parler, le plaquant au sol avec une brutalité telle que Bertrand marque un temps, étourdi par le choc avant de casser le visage à coup de

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tête au plus grand des deux assaillants. Sans attendre, son long bras d’acier entoure le cou de l’autre tel un python. Les cervicales craquent, le corps plie et se meut en une masse molle et lourde dans un sillon d’humus. Péniblement, il se relève en grommelant, comme extirpé du sommeil. Bertrand constate sa nudité, l’éparpillement de ses vêtements et du contenu de son sac à dos avant de fixer le trou étroit par lequel il est sorti. Repérant le camp de soldats un peu plus loin, il s’attelle immédiatement à tirer les deux corps sur le trou avant de les couvrir de terre, de feuilles, de branches. Aussi étonnant que ça puisse paraître, personne ne repère son manège. Il a le temps de se rhabiller avec les vêtements propres qui s’entassent au fond du sac à dos. Un tee-shirt noir, un pantalon à pinces bleu, une paire de baskets. Avant de quitter les lieux, uniquement armé d’un sac en bandoulière rempli avec deux boites de raviolis, d’une cuillère et d’une gourde pleine d’eau, il jette un dernier regard vers le village dont on peut apercevoir les toits des premières maisons derrière un terril ratatiné. Un hélicoptère lâche un missile airsol qui pulvérise une maison sans cachet à l’entrée du village. Il s’avance vers le nord. Au-delà du bois, il ira à travers champs durant une heure avant de bifurquer vers le sud pour y disparaître.

« Des Quatre Frontières au-delà desquelles prospérera la République, je choisis celle du sud »

LE SMOG PUANT QUI NE QUITTE PLUS L’HÉMISPHÈRE

L’hiver s’était littéralement effondré sur la France. Une couche de neige de près de cinquante centimètres sclérosait la vie de la petite ville industrielle. Les cheminées avaient cessé de cracher leurs fumées noires et âcres, ces rots puants à l’odeur de fonte. Chacun restait chez soi, devant les radios à piles donnant des nouvelles sur l’évolution de la tempête hivernale. Ne plus rien faire. Boire du café au lait chaud très sucré. Et attendre. Les chômeurs et les ouvriers, leurs gosses et leurs parents retraités étaient entravés. Novembre inaugurait un hiver, un vrai, un hiver assassin qui durerait trop longtemps. Jours trop courts, températures glaciales, rivières gelées sur lesquelles les enfants viendraient patiner en hurlant, se poussant, se bastonnant. Les enfants de ces temps de quatre saisons. « Une belle époque de connards », pense Bertrand. Il était adossé au mur. Le crépi jaune-blanc abîmait son K-way rouge. Sa capuche fermement attaché sous le menton. On voyait à peine l’immense colline qui se soulevait à cinq cents mètres en face de la maison familiale. Bertrand, gelé mais vaillant, dans son jean, ses baskets s’avança dans le molleton épais. La neige

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était légère. Poudreuse dans laquelle son petit corps de gosse de huit ans se frayait sans mal un chemin. Jusqu’au sapin… Puis plus bas, en contrebas. Ses pieds butant contre les branches décrépies de genêt. Il s’éloigna de la maison. Tout le monde se désintéressait de lui, le petit dernier, le venu trop tard, le fatiguant, le de trop, le coûteux. Il s’approcha de la maison en contrebas, celle de ces voisins fantomatiques dont on ne savait presque rien… Car il faut tout savoir de tout le monde dans les petites villes, se reluquer les uns les autres, un peu comme si chaque être était une cellule d’un même corps. Si l’une se désolidarisait des autres, alors le corps risquait de se disloquer.

« A coups de pieds dans le cul, c’est comme ça qu’on fait avancer les enfants » Bertrand rêvait des Inuits (on disait esquimaux à l’époque, un peu comme la marque de glace qu’on pouvait sucer l’été à côté du camion du monsieur qui en vendait après avoir fait son klaxon mélodique prévenant de sa venue...). Il rêvait de graisse de phoque, d’igloo (ça lui faisait penser au poisson pané du Captain Iglo dont il raffolait), d’étendues infinies, figées dans l’éternité… Il sauta par-dessus le grillage. Ce dernier ploya sous son poids. Ça l’amusa, ne l’empêcha pas d’arriver devant la portefenêtre de derrière, là où le volet en PVC était entrouvert. Dans l’obscurité du salon, il aperçut une silhouette sur le canapé. Celle d’un homme immense, d’au-moins un mètre quatre-vingt-quinze, presque obèse. Sans trop y penser, il prit un parpaing posé sur la terrasse et le jeta contre la vitre qui explosa. Il entra. Il se figea devant le géant qui sursauta. Tout était sombre, puant. Ça sentait le caca et le vomi, les pieds sales aussi.

« Qu’est-ce que tu fous là toi ? » Il ne répondit pas. Le toisa. Il n’avait pas peur.

« T’es chez moi bordel ! »

L’immense bonhomme tenta de se relever du canapé. Il parvint à peine à s’asseoir. Sa grosse main molle attrapa les Gitanes bleues. En l’allumant, son visage d’ogre barbu se dessina sur le fond ocre du salon.

« Je te reconnais. T’es le petit con qui vit au-dessus. Tu viens tout l’temps zieuter ici. J’te fascine gamin ? T’as jamais vu un type énorme crever dans sa maison ?

- Nan jamais. Vous êtes pas normal. Vous êtes dangereux. Tout le monde le dit.

- On dit ça ?

- Ouais, dans le quartier, les parents disent qu’il faut pas approcher d’ici.

- Ah on dit ça dans ce patelin de merde. On dit, on juge. Ils n’ont que ça à foutre tous ces crétins, les ouvriers, les contremaîtres, les patrons des usines, les chômeurs, leurs bonnes femmes. Tout le monde parle. Ils disent ça ?

- Ouais espèce de taré »

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Bertrand se rappelle qu’il s’était approché pour prendre une cigarette dans le paquet. Le géant lui avait allumé dans se poser la question de son jeune âge. En fumant, il vint s’installer sur le fauteuil en velours qui se trouvait à la droite du canapé du gros. Pour l’écouter, et aussi prendre quelques gorgées dans la bouteille de vin débouchée trônant sur la table de salon. Le vent froid rentrait par la fenêtre brisée, mais il s’en tapait, il savourait. Le géant puant ne semblait pas si dangereux. « Je suis à l’agonie petit. Comment tu t’appelles ?

- Je m’appelle Bertrand. Et vous ?

- Je m’appelle aussi Bertrand.

- Ah ouais ?

- Exactement »

Il prit un temps avant que sa voix d’ogre ne réchauffe à nouveau la pièce :

« C’est presque le dernier hiver. L’un des derniers. Il y en aura quelques-uns mais ils s’atténueront pour disparaître pour toujours de la Terre.

- Comment vous savez ça ?

- Je le sais. On me l’a dit. Le temps est un immense cerceau. Le froid se raréfiera. Les bourgeons viendront de plus en plus tôt avant de ne plus jamais revenir.

- Pourquoi ?

- Les arbres mourront. Presque tout sera détruit.

- C’est des conneries Monsieur.

- Pense ce que tu veux. Je le sais.

- Et pourquoi vous me racontez ça ?

- Parce que tu es venu. Parce que tu es Bertrand. Comme moi.

- Ah ouais comme si j’étais vous en enfant.

- C’est exactement ça. Je ne sais pourquoi, mais je suis là. Et je veux que tu saches. Le cancer va m’emporter.

- Il faut se soigner Monsieur.

- C’est trop tard, et inutile. Je suis foutu.

- Et si vous êtes moi, alors je suis pas content. Vous êtes horrible, vous êtes raté.

- C’est ce que tu seras. Mais tout le monde le sera. Pas un seul être humain n’échappera à son sort.

- C’est impossible pour les hivers. Il fait trop froid, c’est la Terre et la nature qui décident pour nous et les saisons, ça risque pas de bouger.

- Ça bougera. Lentement au début. Ce sera progressif. Comme quelqu’un qu’on voit tous les jours. On ne le voit pas vieillir, pas au point de ceux qu’on croise des années après, qu’on n’a plus vu évoluer et qui sont restés figés dans nos esprits… Les hivers se raccourciront. Parfois il y aura des regains qui laisseront croire que ça ne va pas si mal, que ça ne va pas si vite, que ça ne devient pas un four. Mais l’illusion ne sera que de courte durée. Notre ère prendra fin presque du jour au lendemain et les

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ravages seront tellement immenses que personne ne sera en capacité de réagir faute d’avoir pu croire, imaginer l’inimaginable.

- Et pourquoi vous êtes là ? Vous faites des voyages dans le temps comme l’émission de Jacques Martin ?

- Ah ah ! Oui je me rappelle ! J’adorais ! Il voyageait dans une capsule blanche. Une boule. C’était bien vu !

- Mais ça passe encore ! C’est pas fini l’émission !

- Pour moi elle est. Elle n’est plus qu’un souvenir que tu me rappelles »

Il se mit à tousser. Une toux réellement dégueulasse qui soulevait le cœur de celui qui l’entendait. Les glaires avaient le volume d’une balle de baby-foot. Et s’écrasaient sur la moquette bleue. Jaunes/grises/bulleuses.

« Tu es là. C’est mon dernier jour.

- Mais non, faut pas mourir monsieur !

- C’est ainsi. Je veux juste que tu te rappelles que tant que tu ne te retrouveras pas dans ce salon, obèse, à crever sur ce canapé, tu auras toute la vie pour toi. Tu seras libre de faire tout ce qu’il te plaira.

- Même tuer des gens ?

- Aussi.

- Et j’irai en prison !

- Peut-être. Peut-être pas. Je ne te le dirai pas.

- Pourquoi ?

- Parce que je veux que tu savoures. J’ai tout juste soixante ans et ce jour est le dernier… Je suis si heureux d’avoir revu l’hiver et ta bouille de petit merdeux»

Bertrand se relève du tronc sur lequel il est assis. Il a mal aux pieds. Depuis qu’il a laissé les cadavres des soldats dans le bois, il n’a avalé qu’une gourde d’eau. La faim le tiraille. Six jours sans trop dormir. Fiévreux. Souffrant. Ne voyant pas le bout du voyage. « La frontière sud est quelque part par là… à des lieues d’ici »

Un panneau indiquant la direction de Marseille penche vers le sol. La chaleur est accablante. Les rares oiseaux remontent péniblement vers le nord, luttant dans le smog puant qui ne quitte plus l’hémisphère…

« Si je t'ai blessé, c'est pour mieux t'achever ». Bertrand a eu tout juste le temps d’attraper la gorge de ce flic avec son lacet de chaussure après lui avoir cassé le nez avec le manche de la pelle chopée à l’arrière du pick-up du policier. Ce dernier s’est arrêté à son abord quelques minutes plus tôt : « Qu’est-ce que vous faites par ici Monsieur ? C’est une zone interdite aux citoyens vous savez ?

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DATURA – A PRINT AND ONLINE JOURNAL OF DEVIANT AND DEFIANT WORK PUBLISHED RANDOMLY. ISSUE 13 – JANUARY 2023 – ISSN : 2646-2257 –LEGAL SUBMISSION (TO BNF) : ON PUBLICATION – SPECIAL PRINTING –MASTHEAD : WALTER RUHLMANN 60 RUE DU PRIEURÉ 76540 ÉCRETTEVILLESUR-MER

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DATURA – REVUE DE LITTÉRATURE DEVIANTE ET PROVOCATRICE EN LIGNE ET IMPRIMEE A PARUTION ALEATOIRE – N°13 – JANVIER 2023 –ISSN : 2646-2257 – DÉPÔT LÉGAL : À PARUTION – IMPRIMERIE SPÉCIALE DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : WALTER RUHLMANN 60 RUE DU PRIEURÉ 76540 ÉCRETTEVILLE-SUR-MER

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