Mission Étrangères pour la vie des peuples du monde

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décembre 2014

Pour la vie des peuples du monde

Dossier

Noël Autrement Le Noël de l’eau nouvelle Toc toc à l’Arche Célébrer en prison


3 MOT DE BIENVENUE

Croire que le bonheur est possible

4 DOSSIER

NOËL AUTREMENT

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Le Noël de l’eau nouvelle

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Guidés par une étoile

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À en oublier mes biscuits

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Célébrer en prison

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Noël comme à la maison

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Le Noël de mes 11 ans

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13 Décembre 2014, volume 36 no 10

Une Bonne Année bien chaleureuse

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Toc Toc à l’Arche

27 CLIN D’ŒIL

Les chapelets d’Agnès

28 VIE DE LA SOCIÉTÉ

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29 NOUS NOUS SOUVENONS Pierre Drouin, p.m.é.

Direction Marie-Hélène Côté Équipe de rédaction Marie-Hélène Côté, Claude Dubois, Martin Laliberté Révision François Gloutnay Photos Marie-Hélène Côté, Sandy Lutz Correction maquette Marie-Hélène Côté, Claude Dubois, François Gloutnay Service aux abonnés Hélène Perreault Graphisme folio&garetti Impression Impression Idesign TITRE LÉGAL : «La Société des Missions-Étrangères de la province de Québec». Pour les provinces mari­times et les États-Unis : «La Société des Missions-Étrangères». DÉPÔT LÉGAL : Bibliothèque nationale du Québec Bibliothèque nationale du Canada (ISSN 0026-6116) Membre de l’Association canadienne des pério­diques catholiques Magazine d’information missionnaire publié cinq fois par année par la Société des Missions-Étrangères 160, place Juge-Desnoyers, Laval (Québec) H7G 1A5 Tél. : 450 667-4190 Tél. sans frais : 1 888 667-4190 Téléc : 450 667-3006 revueme@smelaval.org // www.smelaval.org

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Marie-Hélène Côté

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Numéro d’enregistrement d’organisme de charité : 10798 8511 RR0001

Abonnement : Hélène Perreault / helene@smelaval.org 1 an : 15 $ 1 an soutien : 20 $ 2 ans : 25 $ 2 ans soutien : 30 $ Le numéro : 3$ Envoi de Poste-publications - N° de la convention 00400 62 800 Tirage : 9 500 Nous reconnaissons l’appui financier du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du Canada pour les périodiques, qui relève de Patrimoine canadien.


MOT DE BIENVENUE par Marie-Hélène Côté

Croire que le bonheur est possible

À

quoi pensez-vous spontanément en entendant le mot « Noël »? Aux réunions de famille qui se feront plus nombreuses ou bien aux quelques jours de congé qui vous permettront de souffler un peu? Ou encore aux décorations qui illumineront votre demeure? Peut-être songez-vous déjà à la mystérieuse liturgie de Noël? Quoi qu’il en soit, cette période de l’année ne réveille-t-elle pas nos plus beaux souvenirs? À l’approche de la fête de la Nativité, j’ai donc demandé à quelquesuns de nos missionnaires de revisiter leurs souvenirs et d’y puiser les expériences entourant la fête de Noël qui les ont le plus marqués. Après lecture de ce dossier spécial, vous découvrirez, tout comme moi, les auteurs sous un nouveau jour. Parfois ludique, mais souvent poétique. Claude Lacaille, ce mois-ci, a troqué sa chronique Santé et spiritualité pour quatre poèmes accompagnant les articles d’autant de collaborateurs qui nous font pénétrer, un peu plus profondément, dans le mystère des Noëls en mission.

Pour nous ici, les lumières de Noël prendront bientôt le relais d’un soleil de plus en plus frileux. Les visages de nos enfants et petits-enfants s’illumineront à l’idée de nous voir et, certainement aussi, de déballer les cadeaux qui les attendent sous le sapin. Le réveilmatin, renversé sur la table de nuit, ne fera plus entendre sa voix et nous pourrons passer quelques belles journées en pantoufles. De nos églises surchauffées, les cantiques de Noël retentiront de toute part avant de nous abandonner à la grisaille des mois d’hiver.

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Marie-Hélène Côté

Ces moments heureux, même froids, s’ajouteront à nos souvenirs, comme autant de perles à un chapelet. Croyant que le bonheur est possible, nous saurons que l’espoir, au plus profond de la nuit, est bel et bien vivant. Joyeux temps des Fêtes à chacun!

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Dossier

Noël Autrement À l’approche de la fête de la Nativité, nous vous relatons quelquesuns des plus beaux Noëls de nos missionnaires. De la prison de Lima à l’Arche de Tegucigalpa, des montagnes des Philippines aux rives asséchées de l’Amazonie brésilienne, accompagnezles sur les routes de leur vie. Le regard tourné vers Celui qui incarne notre espoir, devenons les Mages de notre temps. Vivons Noël autrement! CRÉDIT PHOTO

Marie-Hélène Côté


Dossier › Noël Autrement par Martin Laliberté, p.m.é.*

Le Noël de l’eau nouvelle À Caapiranga, ce n’est pas la neige que l’on attend avec impatience à Noël, mais la pluie qui fera gonfler la rivière et sortira la localité de son isolement. Martin Laliberté nous raconte combien Noël est intimement associé à l’arrivée de la saison des pluies en Amazonie brésilienne. (la rédaction)

Q

uand on m’a demandé de partager mon expérience sur mes Noëls vécus en Amazonie brésilienne, j’ai dû replonger dans mes souvenirs. Au début me sont venues bien des anecdotes sur des traits culturels différents des nôtres ou sur des coutumes locales. Mais ce qui est surtout remonté, c’est une ambiance générale liée aux caractéristiques géographiques amazoniennes, et plus particulièrement celles de la petite ville de Caapiranga où j’ai travaillé pendant sept ans. Un fleuve qui impose son rythme Il faut savoir que la région de l’Amazonie brésilienne vit au rythme du grand fleuve Solimões (nom donné au fleuve Amazone dans cette partie du Brésil) et de son bassin formé de nombreux lacs et rivières. Ce fleuve a la particularité de voir son niveau varier de plusieurs mètres selon les époques de l’année. On parle même d’une différence de près de 20 mètres à certains endroits entre le niveau le plus bas de l’année à la fin d’octobre et le niveau le plus haut en juin. Les petites communautés rurales sont les plus affectées par cette réalité. Les hauts et les bas des cours d’eau dictent la vie des agriculteurs et des pêcheurs de l’endroit. On sème ou on récolte en accord avec la crue ou la baisse du fleuve, des

lacs et des rivières. Dépendamment du niveau de l’eau, la pêche est excellente, bonne, moins bonne ou tout simplement mauvaise. Pour les habitants, une crue trop importante peut signifier une inondation de leurs maisons et un exode forcé pour quelques semaines. Une baisse trop grande du niveau de l’eau peut entraîner un isolement parfois dramatique, car les embarcations qui les ravitaillent en denrées de base ne peuvent plus naviguer sur les rivières. Si l’eau nouvelle n’arrive pas, on manquera peut-être même du nécessaire. J’ai l’expérience d’une année où le gouvernement a dû envoyer du ravitaillement par hélicoptère. Nous étions tellement isolés par la baisse du niveau de la rivière qui relie Caapiranga au fleuve principal que la ville avait été déclarée zone sinistrée. Le retour de la crue Vous me direz : qu’est-ce que tout cela a à voir avec Noël? Souvenez-vous de ce que je disais en commençant ce texte : ce que je retiens le plus de mes Noëls au Brésil, c’est une ambiance. Et bien, la fête de la naissance de Jésus correspond justement au moment de l’arrivée de l’eau nouvelle. C’est comme si à Noël, dans les campagnes de l’Amazonie brésilienne, on vivait le même phénomène que l’on vit au temps de Pâques au Canada. Vous savez, quand on est déprimé en février et mars, que l’on

est tanné de la neige, des journées sans soleil, qu’on sent qu’on ne verra jamais la fin de ce trop long hiver… Vient alors le printemps, la neige fond, les fleurs et les feuilles sortent, les jours rallongent et nous fêtons en Église la victoire de la vie sur la mort. Une ambiance de vie nouvelle dans la nature nous fait comprendre jusque dans notre chair ce qu’est la résurrection. Une promesse de vie L’ambiance des Noëls vécus à Caapiranga c’est cela, une vie nouvelle. Après des mois où le lit de la rivière sèche à vue d’œil, après des semaines où le soleil n’en finit plus de vous brûler, après la déprime et l’angoisse d’un isolement qui vous coupe du reste du monde et qui rend votre vie précaire, voilà que, vers le début décembre, on voit la rivière monter peu à peu. On retient son souffle, car on sait que dans quelques jours, on verra enfin le premier bateau de la saison arriver au port avec des provisions fraiches. Alors, on peut enfin respirer. On marche dans la rue et, tout-à-coup, le ciel s’obscurcit. On sent les premières gouttes de pluie qui vous tombent sur le nez comme une caresse bienfaisante. Et voilà qu’en Église, on nous parle de ce petit enfant venant comme réponse à la promesse de vie faite par Dieu à son peuple. On dit qu’avec Lui, c’est une vie nouvelle pour l’humanité qui commence, qui est missions étrangères ¿ Décembre 2014

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en germe. On raconte qu’en Lui, tout recommence. Et on sait que c’est vrai puisque chez nous au printemps et à Pâques, on le sent dans notre cœur et dans notre chair. C’est dans cette ambiance de vie nouvelle que nous pouvions expérimenter bien concrètement dans la nature, la fête de Celui qui s’est fait l’un de nous pour que nous ayons la vie en abondance. La fête jusqu’à l’aube Pour le reste, le peuple brésilien étant ce qu’il est, il y avait aussi dans l’air un mélange de mysticisme religieux et de carnaval. Il allait de soi de célébrer la naissance de Jésus par une messe solennelle à l’Église vers 21 h. Les participants y étaient toujours très nombreux. Les enfants avaient la plupart du temps préparé avec les catéchètes une petite pièce de théâtre qui mettait en scène l’histoire de la nativité. Au lieu du traditionnel sapin de Noël, on suspendait à partir du plafond de l’Église jusqu’au sol un filet de pêche dans lequel on accrochait les décorations (boules, étoiles, guirlandes…) et au pied duquel on déposait la crèche. La célébration n’était jamais à minuit, car la tradition veut qu’à 23 h, après

la messe, on prenne le repas en famille ou avec des amis. Le plus souvent, c’est un churrasco ou, si vous préférez, un BBQ. Une année, chez des amis, on m’avait servi un bon filet d’alligator cuit sur charbon de bois. Un délice. Puis, sur le coup de minuit, on fait sauter des feux d’artifice et des pétards. Tous sortent dans les rues, faisant le tour de la ville pour souhaiter un Joyeux Noël à toutes les personnes rencontrées, connues ou non. La fête se poursuit, soit dans les maisons ou les salles communautaires où on danse jusqu’au lever du soleil. Si je me rappelle encore aussi bien de toutes ces coutumes et traditions de mes Noëls à Caapiranga, c’est qu’il reste en moi une impression de renaissance et de renouveau. Cette eau nouvelle signifiera toujours pour moi le retour de la vie et de l’espérance. ¿ *Originaire de Québec, il a été missionnaire au Brésil de 1996 à 2004. Il a ensuite travaillé à la formation missionnaire au Canada. Il est membre du Conseil central depuis 1997 et supérieur général depuis 2013. martin@smelaval.org

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1 Lac Caapiranga au coucher du soleil. 2 Maison flottante de la communauté

de Samaúma. 3 Communauté Nossa Senhora de Aparecida,

située aux abords du lac Sacambú. 4 Église paroissiale de São Sebastião

de Caapiranga, vue du port. 5 Le canot est le mode de transport le plus

utilisé dans cette région de l’Amazonie. 6 Je monte à bord du bateau de la paroisse

afin d’aller visiter les communautés rurales avoisinantes. 7 Maison flottante de la communauté

Nossa Senhora de Aparecida où nous accostions. CRÉDITS PHOTOS

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Archives SMÉ


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Dossier › Noël Autrement par Pierre Samson, p.m.é.*

Guidés par une étoile Chez les Manobos des Philippines, le passage du 31 décembre au premier janvier est un moment déterminant. On veille jusque tard dans la nuit pour déceler dans le ciel les signes de bons et de mauvais présages pour l’année à venir. Les Mages d’Orient n’ont-ils pas fait confiance, eux aussi, à une étoile pour guider leurs pas? C’est ce que nous rappelle Pierre Samson. (la rédaction)

M

es premières expériences de vie missionnaire dans les années 1970 et 1980 m’ont mis en contact avec un groupe autochtone du nom de Manobo, peu touché à l’époque par notre monde moderne. Sur place, avec le temps, je me suis fait accueillir par ces gens ouverts, désireux de me partager leurs façons de penser, d’agir et de réagir. De tradition animiste, le temps de Noël n’avait rien pour eux de notre tradition chrétienne et, à vrai dire, le 25 décembre était un jour semblable aux autres. Les préparatifs Mais qu’en était-il du Jour de l’An? J’avais remarqué que pendant les derniers jours de décembre, les marchands de nourriture faisaient de bonnes affaires. D’un peu partout, parfois arrivant d’assez loin, on venait en famille faire quelques achats pour se préparer au Jour de l’An. Poussé par une curiosité grandissante, j’ai voulu partager avec une famille l’expérience d’accueillir la nouvelle année à leurs côtés. Ma requête fut acceptée. Le 31 décembre donc, avec des membres de la famille, nous avons acheté des victuailles un peu spéciales, en particulier quelques kilos du meilleur riz, un peu de poisson 8

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frais et une bonne quantité de biscuits secs, une rareté dans la diète locale. Et avec eux, j’ai entrepris le chemin du retour vers une maison sur le haut de la montagne. La joie était dans l’air et j’ai recueilli quelques bribes de ce que j’aurais à vivre en cette nuit spéciale.

Les signes positifs veulent créer l’espoir, l’énergie nécessaire pour aller de l’avant. Les signes négatifs veulent préparer à la résilience, au courage. Une fois accueilli dans la famille, on s’affaire aux préparatifs d’un bon souper. Le soir venu, à la lueur d’une lampe à l’huile, nous prenons le repas, nous gardant bien de toucher aux petits biscuits. Et peu à peu nous entrons dans la nuit. Je remarque que le sujet de conversation tourne autour d’une évaluation de l’année qui s’achève. Les joies ou les souffrances présagées par les signes observés s’étaientelles réalisées? J’écoute bien attentivement ce partage, anticipant de vivre bientôt ce début de la nouvelle année en leur compagnie.


Les sens en éveil Et le temps passe… Soudain, jugeant qu’il était assez tard dans la nuit, le chef de famille demande le silence à tout le monde, et pendant environ 15 minutes, nos yeux fixent le ciel attentivement pour bien prendre note de son état : ciel clair ou nuageux, apparence de pluie ou lune visible, la quantité d’étoiles et, par chance, le trajet lumineux d’un météorite. Du haut de la montagne, les yeux se tournent aussi sur la vallée en bas de nous pour y détecter tout signe insolite. Cette attention à notre milieu ambiant occupe ainsi ces longues minutes de veille. Y prennent part aussi nos oreilles pour capter certains sons, certains chants d’oiseaux nocturnes, certains craquements dans les broussailles avoisinantes, signes d’une présence animale ou autre. Tous les sens sont

mis à contribution pour aider à enregistrer les signes présents. Les signes de notre vie Finalement, à un moment donné, le silence est rompu et commence alors l’interprétation plus ou moins rationnelle de ces signes enregistrés pendant les minutes précédentes, signes qui peuvent porter un message positif ou négatif pour la communauté, la famille ou certains individus. Tous semblent communier profondément à cette recherche de sens et certaines conclusions sont mieux acceptées que d’autres. Les signes positifs veulent créer l’espoir, l’énergie nécessaire pour aller de l’avant. Les signes négatifs veulent préparer à la résilience, au courage. C’est en gros le message que le père adresse à sa famille en ce début de la nouvelle année.

Suit un petit moment de réjouissance. On mange les biscuits, mis à part tel un cadeau spécial, une douceur dont les enfants raffolent tout comme la grand-maman qui est avec nous en ce moment. Quelques heures après, nous serons à nouveau lancés sur le chemin de notre avenir personnel ou communautaire, affrontant les défis, vivant les hauts et les bas de la vie, et qui sait, à l’occasion, liant ces événements aux signes interprétés en cette nuit de passage vers un monde en devenir…

Dans le récit au sujet des Mages, il est surprenant d’apprendre qu’ils se sont laissé guider par une étoile. Cela nous apparaît comme une décision étrange, et si loin de notre façon de lire les signes de notre vie. Dans le récit au sujet des Mages, il est surprenant d’apprendre qu’ils se sont laissé guider par une étoile. Cela nous apparaît comme une décision étrange, et si loin de notre façon de lire les signes de notre vie. Mais cela les a amenés aux pieds de Jésus. Aurons-nous la sagesse de bien regarder autour de nous pour découvrir les signes de la présence bienveillante d’un Dieu qui nous aime, nous guide et nous accompagne sur le chemin menant vers Lui? ¿ *Originaire de Québec, il compte 38 ans de mission aux Philippines. Il est aujourd’hui responsable de la formation missionnaire dans ce pays. samsonpme@yahoo.fr

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Une lumière dans le ciel inatteignable une étoile une utopie des êtres au cœur pur marchent à l’étoile sans savoir où ça mène… la lumière au-dessus de la maison d’un enfant pauvre l’inespéré l’impossible se produit les sages pénètrent se tiennent aux pieds du petit ouvrent leurs trésors puis repartent légers libérés de leurs fardeaux par un enfant pauvre c’est Noël un autre monde est possible Claude Lacaille, p.m.é.

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Dossier › Noël Autrement par Ergete Tesfaye, p.m.é.*

À en oublier mes biscuits Lorsqu’il assiste à la messe de minuit, le jeune Ergete Tesfaye ne pense qu’à une chose : avaler les biscuits et le lait chaud qui l’attendent à la maison. Mais un jour, une messe de Noël, célébrée dans la plus pure tradition éthiopienne, lui fera oublier le sommeil écourté et son précieux goûter. Alors que les tambours retentissent et que les pas des danseurs épousent le rythme des chants, l’enfant est transporté au cœur du mystère de Noël. (la rédaction)

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eune enfant, je me souviens que la grand-messe à laquelle j’assistais se disait en latin. Au moment où j’ai atteint l’âge de faire ma première communion, le latin a été remplacé par la langue locale, l’amharique, mais le rite est resté le même qu’en latin. Une soirée accablante À Noël, ma famille participait à la messe de minuit dans notre petite paroisse d’Addis-Abeba. Mais assister à cette célébration a longtemps été un grand sacrifice pour moi. C’est qu’enfant, avoir une bonne nuit de sommeil a toujours été important pour moi. J’avais d’ailleurs la réputation d’aimer aller tôt au lit et de me lever tôt. Mes frères et sœurs me taquinaient en disant qu’ « Ergete préfère sacrifier son souper plutôt que de perdre une heure de sommeil ». C’est pourquoi j’ose avouer qu’assister à la messe, la veille de Noël, ne me rendait pas joyeux. C’était tout le contraire. Je devais sacrifier mon sommeil et souffrir du froid pendant cette messe nocturne. Les seules compensations pour le petit garçon que j’étais seraient le lait chaud et les biscuits offerts, aussitôt après la messe, tout juste avant d’aller au lit. En

et les biscuits! Mais j’aimais beaucoup rencontrer les membres de la famille qui venaient nous souhaiter un Joyeux Noël. J’appréciais aussi cette visite en après-midi et ce repas chez mes grands-parents. La célébration qui change tout Une année, j’ai assisté avec ma famille à la messe de Noël à la cathédrale. La messe se déroulait selon le rite éthiopien, un rite différent de celui auquel j’étais habitué. Dès que j’ai mis le pied sur le terrain de la cathédrale, j’ai entendu un chant spécial, accompagné de doux battements de tambour. Je suis entré dans la grande église et là j’ai aperçu cette étonnante chorale. Des hommes, tout vêtus de blanc, chantaient dans une langue liturgique appelée guèze. CRÉDIT PHOTO Marie-Hélène Côté Je suis allé m’asseoir en avant, à la place réservée fait, durant la célébration, je me répétais sans cesse : « Quand la aux jeunes garçons. J’ai continué messe va-t-elle se terminer? J’ai d’écouter les membres du chœur hâte de retourner à la maison, de avec curiosité. Le chant terminé, boire mon lait chaud, de goûter aux les cloches de l’église se sont mises à sonner afin d’avertir l’assemblée biscuits, puis d’aller me coucher! » Dans notre tradition, il n’y a pas que la procession allait bientôt de Père Noël qui se faufile au milieu commencer. Des prêtres et des diacres se de la nuit pour nous donner des cadeaux. Jeune enfant, je n’avais sont alors avancés d’une manière aucune autre attente que le lait qui était toute nouvelle pour moi. missions étrangères ¿ Décembre 2014

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moi pour profiter du lait chaud et des biscuits. Et je n’étais pas préoccupé non plus par mes prochaines heures de sommeil. Le point culminant Au moment de sortir de la cathédrale, la chorale traditionnelle a entonné une chanson de Noël. Elle a débuté sous un rythme lent, accompagné par un léger battement de tambour. Tous les hommes chantaient doucement et effectuaient de délicats mouvements. Puis le rythme a changé. Les battements du tambour ont été plus rapides. Le lent mouvement des chanteurs s’est transformé en une danse joyeuse. Toute l’assemblée s’est jointe aux applaudissements et à la danse. Je me suis retrouvé complètement absorbé dans cette ambiance joyeuse. Ce fut le point culminant de cette célébration. J’étais même prêt à laisser tomber le lait chaud, les biscuits et la bonne nuit de sommeil. Avec cette nuit de mon enfance, dans cette cathédrale, je peux dire que j’ai vécu une expérience similaire à celle des bergers de Bethléem : l’expérience de la joie devant la naissance du Messie. Je suis retourné à la maison, rempli d’enthousiasme. Cette nuitlà, j’ai été exposé à quelque chose d’édifiant, de mystique, de chaleureux. Cette expérience allait susciter en moi un intérêt pour une liturgie ancienne, traditionnelle et profondément spirituelle. ¿

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C’était nouveau et fascinant à la fois. Je me souviens que la messe était présidée par l’archevêque de l’époque, Abuna Asrate Mariam. Son apparence gracieuse et les vêtements qu’il portait pour la célébration ont attiré mon attention. Puis des prêtres avec des vêtements similaires se sont approchés de l’autel, suivis par des archidiacres, des diacres et des sous-diacres, tous vêtus selon leur rang. Durant toute cette longue messe, j’étais particulièrement attentif aux sous-diacres, car ils étaient de jeunes garçons comme moi. J’étais fasciné par eux, car ils 12

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Marie-Hélène Côté

participaient très activement à une célébration liturgique qui me semblait bien mystérieuse. J’enviais ces garçons qui chantaient dans cette langue liturgique avec une concentration totale. L’assemblée était aussi composée d’hommes et de femmes enveloppés dans des vêtements blancs. Quant au chant et à l’odeur de l’encens, ils me transportaient dans un monde mystérieux. Même si la messe avait été longue et que je ne pouvais pas y participer activement, je suis demeuré fasciné par tous ces rituels. Étonnamment, je ne pensais plus à retourner chez

*Originaire d’Addis-Abeba en Éthiopie, il est missionnaire au Kenya depuis 2012. En 2014, il a été nommé responsable de la formation des séminaristes de la SMÉ. ergeted@yahoo.com


Dossier › Noël Autrement par Floricien Dubé, p.m.é.*

Célébrer en prison Au centre de détention pour jeunes de Lima, l’ambiance est à la tristesse en cette nuit du 24 décembre. Floricien Dubé le sait bien, lui qui a longtemps été aumônier dans cette institution. Accompagné d’un groupe de bénévoles, il tente depuis d’apporter un peu de joie à l’intérieur des murs. (La rédaction)

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ous sommes le 24 décembre. J’accompagne un groupe de jeunes et d’adultes, tous des bénévoles de la Pastorale de l’espérance. Nous nous dirigeons vers un énorme édifice à deux étages, près de la mer. C’est là que vivent quelque 700 adolescents, condamnés à une peine de réclusion d’un à cinq ans, selon la gravité du délit qu’ils ont commis. Nous nous apprêtons à célébrer Noël à la prison de Lima. Nous entrons dans l’enceinte à 10 heures. On nous demande de laisser notre cellulaire, puis de franchir un dispositif à rayons X, comme dans les aéroports. Nous nous dirigeons ensuite vers la chapelle. On y célé-

brera la messe avec une centaine de jeunes qui ont librement choisi d’y participer.

Demain, leurs parents viendront peut-être les visiter, s’ils n’habitent pas trop loin ou encore s’ils n’ont rien d’autre à faire. Tout est bien organisé. Les jeunes ont préparé les chants et la musique. Pourquoi participent-ils à cette messe de Noël? C’est pour être avec

Jésus, l’unique ami qui leur reste, confient-ils. Leurs autres amis, ceux avec qui ils ont bu, fumé et fêté, ne sont plus là. Demain, leurs parents viendront peut-être les visiter, s’ils n’habitent pas trop loin ou encore s’ils n’ont rien d’autre à faire. Vers 18 heures, on leur sert un souper de Noël. Mais beaucoup de jeunes n’y touchent pas. Ils le partageront plus tard avec leurs camarades. Puis on se dirige vers les salles communes. On y joue de la musique et on y prépare de petites animations théâtrales pour animer la fête. On sert ensuite un chocolat chaud, des brioches et des friandises. Si c’est possible, nous leur offrirons un cadeau. Ce sera peut-être un gilet, des vêtements sportifs, quelque chose qui

Une année en prison Dans cette prison de Lima, à quoi ressemble le quotidien de ces jeunes? Plusieurs poursuivent leurs études, primaires ou secondaires, à l’intérieur des murs. Ils peuvent aussi apprendre un métier et participer à différents ateliers de menuiserie et de soudure. D’autres s’initient à la couture ou à la coupe des cheveux. Leur vie en détention est aujourd’hui plus aisée qu’auparavant. J’aime à penser que les membres de la Pastorale de l’espérance en sont un peu responsables. Ils ont multiplié les démarches auprès des dirigeants de la prison afin que les droits de ces jeunes soient reconnus et que cessent les mauvais traitements et humiliations qu’on leur faisait subir. CRÉDIT PHOTO

Floricien Dubé

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Avec des craies de couleur, un jeune détenu dessine une crèche sur le sol bétonné de l’établissement carcéral. CRÉDIT PHOTO Floricien

leur manque et dont ils ont besoin. La fête se termine vers 23 heures.

Des fenêtres de leur prison, seuls et tristes, ils entendront les bruits et percevront les lumières de la fête municipale, mais ils ne pourront y participer. Nous quittons. Mais Noël n’est pas terminé pour ces jeunes. Car vers minuit, ce sera fête dans la ville. Il y aura des feux d’artifice, de la musique. Des fenêtres de leur prison, seuls et tristes, ils

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Dubé

entendront les bruits et percevront les lumières de la fête municipale, mais ils ne pourront y participer. Chaque année, le 24 décembre, les jeunes de la prison de Lima sont vraiment seuls. Cette solitude est encore plus lourde pour certains. Ils savent qu’ils vivront d’autres Noëls dans ce lieu, car ils ne le quitteront pas avant quelques années. J’ai vécu ainsi la fête de Noël durant une bonne décennie. J’ai pu semer un peu de joie, d’amour et d’humanité chez des centaines de jeunes qui en ont grandement besoin. Joie, amour, humanité. N’est-ce pas pour cela que Jésus est venu? ¿ *Originaire de Nicolet, il est missionnaire au Pérou depuis 1957. baril1930@hotmail.com


Crèche de rue Sous l’arbre toujours vert de la vie dans les bas-fonds ténébreux de la cité serais-tu messager de joyeuse lumière en irradiant les ciels du scintillement timide d’étoiles nouvelles? Pastoureau de l’espoir, frère des marginaux, de par les rues inondées de néon-néant peut-on repérer l’astre qui nous conduira jusqu’à la maison-lumière où un enfant pauvre nous rendra notre humanité? Entraine hors des soubassements bruyants de la ville les juvéniles bergers de l’errance. Amène-les au grand air dans les champs de la vie pour qu’ils admirent ébahis, sur les hauts-plateaux, les étoiles rieuses de leur destin et, dans le silence de la nuit, qu’ils entendent chanter les anges. Claude Lacaille, p.m.é. CRÉDIT PHOTO

Floricien Dubé

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Dossier › Noël Autrement par Jean Isabelle Samong, missionnaire laïque associée*

Noël comme à la maison Au Cambodge, où travaille Jean Isabelle Samong, Noël passe presque inaperçu. C’est au sein de sa nouvelle famille missionnaire que la jeune femme originaire des Philippines retrouve l’esprit de la fête. (la rédaction)

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our les Philippins, Noël est l’une des plus grandes fêtes de l’année. Chez nous, la période de Noël commence le 16 décembre et se termine le 6 janvier, à l’Épiphanie. Tout l’archipel prend des airs de fête durant cette période. C’est le temps de l’année où nous cuisinons les spécialités locales que nous offrons aux gens qui nous entourent, nos voisins, nos amis et les membres de notre famille. Des groupes d’enfants vont de maison en maison en chantant des cantiques de Noël. La chose que j’apprécie le plus aux Philippines, c’est que nous trouvons toujours le temps d’être avec nos proches, peu importe la distance à parcourir pour nous retrouver. Noël, aux Philippines, est une fête religieuse que l’on célèbre à l’église et en famille.

Noël me rappelle que Dieu a fait sa maison en chacun de nous et que nous sommes devenus sa famille. Au Cambodge, où je suis missionnaire depuis 2011, Noël est tellement différent de ce que j’ai connu dans mon pays d’origine. La raison est fort simple : le Cambodge est un pays bouddhiste et les chrétiens ne représentent qu’une faible minorité de la population. Le temps de Noël est un temps comme les autres. Ceux qui célèbrent Noël le font en privé. Il m’arrive d’apercevoir au détour d’une promenade 16

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quelques signes indiquant que Noël approche. Ici, des décorations sont suspendues à la façade d’un hôtel. Là, des lumières multicolores illuminent la vitrine d’un supermarché. Mais ces décorations sont davantage associées à un souci commercial qu’à cet événement bien spécial qu’on s’apprête à célébrer. Pour moi, célébrer Noël au sein de mon petit groupe missionnaire est devenu la seule manière de me sentir comme à la maison. Notre équipe missionnaire est composée de personnes originaires de différents pays. Nous avons beaucoup de plaisir à passer du temps ensemble. Nous vivons une véritable fraternité, profondément enracinée en Jésus. Même si je me retrouve à des kilomètres des Philippines, dans mon groupe missionnaire, je me sens chez moi. Noël, pour moi, c’est d’abord et avant tout Jésus qui s’invite chez nous. C’est le temps où je me rap-

Jean Isabelle Samong, à l’occasion de l’Assemblée régionale d’Asie, qui a réuni cet automne nos membres et associés du Cambodge, du Japon, des Philippines et de la Chine. CRÉDIT PHOTO

Ever Amador

pelle que Dieu a fait sa maison en chacun de nous et que nous sommes devenus sa famille. C’est le temps de l’année où nous nous rassemblons pour célébrer la vie, si pleine de joie et d’espérance. Je vis aujourd’hui Noël entourée de ceux et celles qui sont devenus une partie de ma vie. Et cet amour rayonne dans mon travail auprès des Cambodgiens. ¿ Traduction de l’anglais : Marie-Hélène Côté *Jean Isabelle Samong est originaire de Davao aux Philippines. Après avoir travaillé six ans auprès des enfants autochtones Manobos, B’laans et Tagakaulos, elle a entrepris sa formation missionnaire. Partie pour le Cambodge en 2011, elle travaille aujourd’hui à Sihanoukville en pastorale sociale. jeanisabellesamong@yahoo.com


La nova de Noël Depuis des lunes, je scrutais ma route solitude au fond des trous noirs de l’humaine galaxie quand l’étoile m’est apparue, rieuse, dans l’éclair bienveillant de ton regard. Serait-ce que désormais à la quête de cette maison de lumière où tout est partage nous serons deux et trois, cent et mille et des millions à presser le pas de l’espoir, mages complices en caravane de l’absolu? Claude Lacaille, p.m.é.

CRÉDIT PHOTO

Gilles Dubé

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Dossier › Noël Autrement par Benard Mutisya, séminariste

Le Noël de mes 11 ans Le jeune séminariste Benard Mutisya nous raconte un Noël qui a particulièrement marqué son enfance au Kenya. (la rédaction)

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nfant, je voyais approcher Noël avec un mélange de nostalgie et d’excitation. À l’époque, ma famille avait l’habitude de voyager vers le sud du pays pour le temps des Fêtes. C’était l’occasion de visiter ma grand-mère et les membres de notre parenté. Et de m’amuser avec mes cousins et leurs amis. Ma grand-mère, chez qui nous demeurions, possédait trois bâtiments de ferme logeant sur un terrain d’une superficie d’environ un acre et demi. Elle y faisait pousser toutes sortes de fruits comme des mangues, des avocats, des bananes et des goyaves. Elle avait un petit champ de canne à sucre. On y pénétrait avec un couteau afin de trancher quelques tiges dont on se régalait. Les fruits cultivés par ma grand-mère étaient destinés à la consommation familiale. Les surplus étaient ensuite écoulés au marché local. Ma grand-mère possédait également quelques animaux, tels des vaches, des chèvres, des poulets et surtout deux bons chiens. Ceuxci servaient surtout à éloigner les singes qui descendaient de la colline pour piller le verger. Un de mes Noëls les plus mémorables fut certainement celui de mes 11 ans. C’était une année exceptionnelle, car presque toute la parenté s’était déplacée pour le temps des Fêtes. Nous étions si nombreux qu’un de mes oncles a offert un de ses taureaux pour le repas de Noël. C’était la première fois que je voyais un si gros animal être abattu. Il a fallu pas moins de

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Pour accéder au bâtiment de ferme le plus éloigné de la demeure de ma grand-mère, nous devions gravir cette route escarpée. CRÉDIT PHOTO Benard Mutisya


plaisir d’aider à rôtir la viande et à la partager avec toutes les personnes présentes! Une partie du taureau fut cuisinée pour notre célébration familiale et le reste fut partagé entre nos familles.

Le dik-dik doit son nom au bruit qu’il émet lorsqu’il perçoit un danger.

huit hommes pour attacher l’animal et le tuer. On a alors enseigné, aux jeunes garçons que nous étions, comment manipuler et préparer les différentes parties de l’animal. Quel

Une chasse infructueuse Ce Noël-là, mon jeune frère et moi avons décidé d’aller chasser dans une zone située non loin de la maison. La veille, nous avions remarqué des traces laissées par des lièvres et des dik-diks. Les dik-diks sont de toutes petites antilopes qui pèsent à peine cinq kilos. Nous avons alors pris les flèches de mon père et un arc que j’avais fabriqué parce que celui de mon père était trop grand et difficile à manœuvrer. Nous avons consciencieusement suivi les pistes en cherchant les trous dans le sol qui pouvaient être des terriers. Tout à coup, un lièvre a bondi d’un buisson tout près de nous. J’ai été si surpris que j’ai cru

que mon cœur allait sortir de ma poitrine. Nous avons poursuivi le lièvre et, toujours en courant, j’ai tenté de tirer une flèche dans sa direction. J’ai raté la petite bête. Nous l’avons poursuivie en terrain montagneux, mais elle nous a déjoués et elle est disparue dans un buisson. Quelle déception! Nous aurions tant aimé donner ce lièvre à notre famille pour le repas du soir. Pour nous, Noël a toujours été l’occasion de faire plaisir à nos proches, de partager et de passer du bon temps ensemble. Un temps pour écouter les histoires que racontaient nos pères autour d’un feu de bois à l’extérieur de la maison. Un prétexte aussi pour contempler les étoiles filantes. Un moment pour renforcer nos liens familiaux et, enfin, pour partager l’amour de ce Dieu qui nous habite. ¿ Traduction de l’anglais : Marie-Hélène Côté

Quelques mots sur l’auteur Je suis né au Kenya, dans une petite ville appelée Machakos. Je suis l’aîné d’une famille de six garçons. Mes parents et mes frères ont toujours appuyé mon projet missionnaire. Je leur en suis reconnaissant. Devenir missionnaire. Ce désir s’est manifesté alors que j’étudiais en génie des télécommunications à l’université. Il n’a pas cessé de croître depuis. Après avoir obtenu mon diplôme, j’ai travaillé durant six années, dont quatre dans un parc de conservation pour animaux sauvages, à quelques kilomètres de la réserve Masaï Mara, le plus connu des parcs nationaux du Kenya. Ce travail m’a permis d’aider ma famille, mais aussi de réfléchir à mon avenir. Mon amour pour Dieu et mon goût pour la mission n’ont jamais fléchi. J’ai finalement quitté cet emploi que j’aimais beaucoup afin d’approfondir ce désir que je ressentais en moi depuis si longtemps. Je suis actuellement séminariste en formation à Montréal. Pour moi, ce stage est une première expérience missionnaire au sein d’une nouvelle culture et d’une langue étrangère. J’expérimente chaque jour ce qu’est la mission.

BENARD MUTISYA. CRÉDIT PHOTO Marie-Hélène Côté

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Dossier › Noël Autrement par Caraquet, mouton missionnaire

Une Bonne Année bien chaleureuse L’année 2015 est à nos portes. Je vous la souhaite chaleureuse. Mais je suis certain qu’elle le sera puisque, selon l’horoscope chinois, 2015 sera l’année du Mouton. Ce souhait, il vient de moi, mais aussi de tous les autres moutons du troupeau. Mais laissez-moi me présenter. Je me nomme Caraquet et je suis le premier d’une collection de moutons commencée il y a plus de vingt ans.

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ien en vue dans un magasin de souvenirs de Caraquet au Nouveau-Brunswick, j’ai été acheté par un voyageur, un missionnaire, je crois. Chaque fois qu’il allait quelque part, il en rapportait un nouveau. Parfois, ce sont les parents et les amis qui se chargeaient d’enrichir sa collection. Ainsi sont arrivés Justin, Fatima, Tonton, Néné et bien d’autres.

Nous laissons nos prés pour partir à la recherche de ce que les anges ont chanté un certain soir : « Un enfant extraordinaire est né... partez à sa recherche ». Nous devions bien être une quinzaine lorsque le missionnaire est reparti pour le Japon. Quel voyage et quel défi que de vivre dans un nouveau pays! Au début, la langue ne fut pas facile. Mais en bêlant un peu mieux tous les jours, nous nous sommes vite fait de nouveaux compagnons, encore donnés par des gens. Chaque nouvel arrivé avait une histoire bien particulière. Yamamoto est le don d’une personne atteinte d’un cancer, Inori est une demande de prière, Fukushima

Caraquet, premier mouton de la collection, trône fièrement dans la bibliothèque de Jean Gaboury, p.m.é. CRÉDIT PHOTO Jean

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Gaboury


nous rappelle le désastre de mars 2011, sans oublier Itazura (espiègle), puis Fuwafuwa (soyeux), etc. Nous sommes maintenant près d’une centaine et nous formons une belle famille. Vous vous en doutez bien, notre plus beau temps de l’année, c’est le mois de décembre. Nous laissons nos prés pour partir à la recherche de ce que les anges ont chanté un certain soir : « Un enfant extraordinaire est né... partez à sa recherche ». La route, qu’elle soit belle ou difficile, est un lieu privilégié pour faire des rencontres. Nous y avons rencontré des enfants de la maternelle, leurs parents, des voyageurs solitaires ou des membres de commu-

nautés chrétiennes. Lorsqu’ils entendent le but de notre voyage, ils ne cessent de s’émerveiller et insistent pour nous accompagner. Marcher ensemble stimule notre courage et au terme de notre pèlerinage, nous sommes remplis de joie d’être parvenus chez Celui qui est venu dans la famille humaine, d’une façon assez inhabituelle. Pourtant, nous qui étions les premiers arrivés en ce fameux soir, nous savons que c’est Quelqu’un qui apporte le bonheur puisqu’une crèche est faite spécialement pour honorer sa personne. Ainsi, chaque année, pendant un peu plus d’un mois, le missionnaire-voyageur se sert de Caraquet et de tous les

Noël à tokyo

autres pour présenter l’histoire de Noël. Cette année, il est même question d’un article dans la revue Missions Étrangères. J’en frissonne. C’est toujours un plaisir renouvelé de partager notre joie avant de réintégrer nos prés en janvier. J’aurais encore beaucoup à dire mais je dois voir à la poursuite de notre pélerinage qui vient à peine de commencer.

Caraquet

un des moutons de la collection de Jean Gaboury, p.m.é.

Par Jean Gaboury, p.m.é.*

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n ce dimanche matin de septembre, les membres du comité de la paroisse d’Akatsutsumi, à Tokyo, se rencontrent. Un des points à l’ordre du jour est la planification des activités de l’automne, dont la très attendue célébration du 24 décembre.

Dans toutes les communautés chrétiennes du Japon, cette célébration est suivie d’un goûter. Comme les chrétiens sont peu nombreux (à peine 1 % de la population), ils profitent de ce moment pour fraterniser et partager la joie de Noël. C’est également l’occasion d’accueillir les personnes qui auront eu le courage de franchir le seuil d’une église afin de connaître l’origine de cette fête et de découvrir la façon de célébrer des chrétiens. Un point reste à déterminer lors de notre réunion. Quelle sera l’heure de la célébration du 24 décembre? Certains proposent que la célébration débute à 19 heures afin de pouvoir retourner à la maison assez tôt. Il faut être en forme le lendemain, car il y a école et travail. Le 25 décembre n’est pas une journée de congé. D’autres optent plutôt pour 20 heures, car il faut avoir du temps pour revenir du travail et passer à la maison avant la célébration. Le 24 décembre, au Japon, est aussi un jour ordinaire. La très grande majorité des japonais ignorent tout de cet événement qui réjouit tant les chrétiens. L’ambiance qui règne dans les rues laisse pourtant croire que tout le monde est

À l’intérieur de l’église d’Akatsutsumi, on remarque une œuvre de l’artiste peintre Gilles Caron, p.m.é., missionnaire au Japon de 1960 à 2007. CRÉDIT PHOTO Jean

Gaboury

au courant. Dès les premières semaines de novembre, la musique de Noël ne se fait-elle pas entendre? Quant à Santa Claus, il semble propriétaire de tous les commerces, tant son image est omniprésente. Le 24 au soir, manger du poulet rôti et du gâteau de Noël en famille est même devenu une coutume. Revenons à l’heure de notre célébration paroissiale. Quelle que soit la décision prise, cette réflexion annuelle illustre l’importance de cette fête pour les croyants. La chaleur avec laquelle ils la célèbrent est un vivant rappel de ce qu’est la venue de Jésus. *Originaire de Maskinongé, Jean Gaboury est missionnaire au Japon depuis 1973. Courriel : gabouryjean@gmail.com

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Je t’ai reconnu Je t’ai cherché parmi les santons de la crèche sous l’arbre scintillant de la vie. Serais-tu de ces bergers patients qui sur la terre maternelle espèrent que s’illumine la longue nuit de l’humanité? Ou encore, la brebis insouciante de la pastourelle qui refuse de serrer les rangs? Serais-tu de ces marcheurs à l’étoile, mages-sages, qui sillonnent en silence les sentiers sinueux du destin en quête d’une maison où la lampe brille? Es-tu venu parmi les anges qui, plus d’une fois, de façon surprenante et inattendue ont ému mon cœur par l’annonce d’une bonne nouvelle? Je t’ai cherché parmi les santons de la crèche, toi, mon ami, toi ma sœur, mystère de mon altérité, si près de moi et si autre à la fois, insaisissable et proche comme l’enfant que tu fus et que tu cherches à devenir. Dans l’enfant que l’on attend toujours, je t’ai reconnu. Claude Lacaille, p.m.é. CRÉDIT PHOTO

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Jean Gaboury


Dossier › Noël Autrement par Beatriz Medina, missionnaire laïque associée

Toc Toc à l’Arche À Tegucigalpa, au Honduras, Beatriz Medina célèbre Noël de manière bien spéciale. C’est dans la simplicité, parmi les résidents de l’Arche de Jean Vanier, qu’elle accueille le Sauveur. Faisant le parallèle avec les posadas, une coutume locale, elle nous révèle comment la Sainte famille trouve un toit à l’Arche. (la rédaction)

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epuis l’enfance, j’ai toujours considéré Noël comme un événement spécial qu’on devait attendre durant toute l’année. Mes parents nous ont inculqué que c’était très important de le passer ensemble, en famille, et, en fait, la tradition se poursuit. Cependant, dans mon cas, j’ai dû apprendre à vivre cette célébration parfois à la maison et d’autres fois en mission. Le premier Noël loin de la maison, je l’ai vécu avec des sentiments contradictoires, car j’étais dans un pays différent, avec une nouvelle famille et de nouvelles façons de célébrer. Avec le temps, j’ai appris à élargir mes perspectives sur Noël et à le vivre vraiment pour ce qu’il représente : la manifestation de l’amour universel et la naissance du Sauveur de toute l’humanité. Un esprit de fête Au Honduras, mon actuel pays de mission, dès le mois d’octobre, on commence les préparatifs qui indiquent que Noël approche. Mais on le fait surtout du point de vue commercial : lumières scintillantes, couleurs éclatantes, offres de cadeaux, affiches publicitaires, arbres de Noël, chansons spéciales à la radio, etc. Mais l’hôte, celui qu’on attend et qui nous convie, où est-il? Le foyer de l’Arche de Jean Vanier où je travaille présentement

Mes sœurs et mes frères si humbles de l’Arche m’ont appris à avoir une sensibilité particulière pour accueillir la vie dans mon cœur. m’aide à vivre Noël pleinement. Les ateliers en lien avec l’Arche se remplissent de magie, de cou-

Beatriz Medina en compagnie d’Esperanzita, une résidente de L’Arche. Ensemble, elles cuisinent un gâteau pour le réveillon. CRÉDIT PHOTO Beatriz

Medina

leur, de vie et de joie débordante et contagieuse. On confectionne des cartes, des décorations, des crèches de Noël à base de feuilles de maïs. Un véritable esprit de fête règne dans chaque aire de travail. Certains ne verbalisent pas bien, mais tous sont conscients du pourquoi de ces préparatifs. Ils l’expriment avec des mots comme Jésus, Noël, missions étrangères ¿ Décembre 2014

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de soi. Le rôle qu’ils jouent dans ce drame représente une véritable catéchèse qui s’accompagne de respect et de sérieux dans le déroulement de chaque scène. Sur le chemin pour trouver une place pour l’Enfant, personne n’est laissé de côté. Tous participent à l’annonce de cette grande nouvelle de la naissance prochaine de l’Enfant Dieu. Ils le font avec des tambourins, des guitares et des cris de joie. Ils poussent le fauteuil roulant d’un compagnon, en prennent un autre par la main pour l’aider à avancer. Ils s’encouragent mutuellement à poursuivre la route. Ainsi avance la procession de la Sainte Famille, à la recherche d’un cœur qui embrasse le Sauveur. Pour ma part, en les regardant, je me dis : « Décidément, ces gens ont vraiment une crèche dans leur coeur, prête pour accueillir Jésus ».

Le rôle qu’ils jouent dans ce drame représente une véritable catéchèse qui s’accompagne de respect et de sérieux. La veille de Noël, quelques résidents de l’Arche recréent des scènes de la Nativité. CRÉDIT PHOTO Beatriz

Enfant Dieu et posadas. Je voudrais vous entretenir un peu de ce dernier aspect. Un toit pour l’Enfant Les posadas, qu’on peut traduire littéralement en français par auberges, sont une sorte de représentation de la vie de Marie et de Joseph alors qu’ils étaient à la recherche d’un endroit pour donner naissance à leur enfant. Les acteurs de ce drame portent des costumes typiques de l’époque de Jésus. Ils sont accompagnés par la communauté et ils passent de maison en maison en cognant aux portes. Au rythme du « toc, toc! » sur les portes, on commence à chanter : « Je demande posada (c’est-à-dire hébergement) pour l’Enfant ». De 24

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Medina.

l’intérieur des maisons, on répond en chantant : « Ne nous embêtez pas, il n’y pas de place ». Et ainsi de suite, on va d’une maison à l’autre, jusqu’à ce que finalement une famille accepte d’accueillir Marie et Joseph. C’est là que naît l’Enfant. À l’Arche, les personnes qui jouent dans ce drame des posadas, ne sont pas des membres du personnel ou des bénévoles, mais des personnes que nous accueillons et qui vivent avec le syndrome de Down, l’autisme, certaines formes de paralysie, etc. Ici, on ne fait pas de différence : tous peuvent ressentir et exprimer leur amour pour l’Enfant Jésus qui naît pour tous et qui unit notre communauté. Tout cela, ils le vivent avec un grand esprit de joie, de dévotion et de don

La vie dans sa plénitude J’ai appris avec ces petits à vivre le vrai sens de Noël, là où il n’y a pas de division, de méchanceté ou de discorde. Nous vivons cet événement dans la simplicité des petites choses, le travail de chaque jour, en nous joignant à la communauté paroissiale et en rassemblant les deux foyers de l’Arche qui existent à Tegucigalpa. Nous vivons ainsi Noël comme une vraie famille. Pour moi, la dimension la plus importante et authentique de Noël, c’est d’accueillir la vie dans toute sa plénitude. Mes sœurs et mes frères si humbles de l’Arche m’ont appris à avoir une sensibilité particulière pour accueillir la vie dans mon cœur. Jésus est né pour tout le monde. Toc, toc! Y a-t-il posada, c’est-à-dire de la place, pour lui dans ton cœur? ¿ Traduction de l’espagnol : Claude Dubois, p.m.é.


À propos de Beatriz Medina Je suis originaire de Reconquista, en Argentine. Troisième d’une famille de huit enfants, j’ai œuvré en Église dès l’âge de 16 ans. Je visitais les enfants de la catéchèse, j’organisais des collectes ou des corvées pour aider les familles les plus pauvres, je visitais les maisons en mai, durant le mois de Marie, pour y réciter le chapelet avec les voisins. En participant à un congrès missionnaire, j’ai entendu le témoignage d’un jeune homme de mon diocèse qui avait été en Afrique et qui se préparait à partir de nouveau. Ce témoignage a eu un tel impact sur moi que j’ai commencé à ressentir le vif désir de faire la même chose. Cette même année, l’évêque de mon diocèse a invité plusieurs jeunes à se joindre à une formation visant à les sensibiliser à l’activité missionnaire. Une douzaine de jeunes ont pris part à cette belle aventure. Trois sont partis vivre la mission à l’extérieur de leur pays. J’en fais partie. Certains disent que, pour être missionnaire, il faut se sentir appelé. C’est certainement vrai, mais j’ajouterais qu’on devient missionnaire en vivant au milieu des gens, en voyant leurs besoins et en partageant leur vie. C’est ce que j’ai toujours voulu faire. Je réalise mon engagement dans un des foyers de l’Arche de Jean Vanier à Tegucigalpa, au Honduras. J’y assume notamment l’accompagnement spirituel et humain des personnes que nous accueillons et des assistants qui travaillent dans l’institution. J’aime bien les écouter, les encourager et les réconforter dans les difficultés qu’ils rencontrent. Je fais aussi partie du Conseil de la communauté. C’est là

CRÉDIT PHOTO Beatriz

Medina.

qu’on planifie et qu’on organise tout ce qui concerne le quotidien de la communauté. Enfin, je collabore aux ateliers d’artisanat, de broderie et de couture. Je fais ma part pour l’entretien et la propreté de la maison, l’alimentation des personnes qui ne peuvent pas manger seules et les autres activités nécessaires à la bonne marche de notre foyer. Courriel : beamedi2007@yahoo.com.ar

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Se préparer pour

la mission

dans le dialogue interreligieux… entre les cultures et les Églises… avec les exclus… au service de l’Évangile…

La Société des Missions-Étrangères continue son engagement d’envoyer des hommes et des femmes soutenir les aspirations des peuples du monde. Le Programme intercommunautaire de formation missionnaire (PIFM) permet à toute personne âgée de 20 à 40 ans de vérifier les motivations sous-jacentes à son désir d’engagement missionnaire à l’étranger comme prêtre, prêtre associé ou missionnaire laïque. Il offre le discernement, l’accompagnement et la formation pour donner des bases solides à un engagement, au nom de sa foi, au service de frères et sœurs en Asie, en Amérique latine et en Afrique.

Pour plus d’information Région de Montréal Jean Binette, p.m.é. 8055, avenue Casgrain Montréal (Québec) H2R 1Z4 Tél. : 514 383-3694 jean_binette@yahoo.ca Les missionnaires laïques Miguel Granados (originaire du Costa Rica et missionnaire au Cambodge), Maria Teresa Dalisay (originaire des Philippines et oeuvrant dans ce pays) et Silvia Pucheta (originaire d’Argentine et travaillant au Japon) lors de l’Assemblée régionale d’Asie. CRÉDIT PHOTO

Ever Amador

Région de Québec Christian Busset 867, rue Rochette Québec (Québec) G1V 2S6 Tél. : 418 527-3273 smerochette@videotron.ca

ie Une deuxième v

pour vos timbres vos us faire parvenir Mille mercis de no bres. tim de s vos collection r vieux timbres ou ce an fin de et rm nous pe Votre générosité missionnaires. les projets de nos s timbres à Faites parvenir vo ns-Étrangères io Société des Miss p.m.é. t, en nc Vi a/s Florent noyers es -D ge Ju e ac pl 180, 1A4 G H7 Laval (Québec) ste 124 po 0 19 7-4 66 Tél. : 450 mail.com @g 99 Courriel: fvincent19

missionnaire au Japon Florent Vincent, p.m.é., aire nne, p.m.é., missionn Dio l 09 ). (1956-2005) et Marce -20 93 (19 s ura nd ) et au Ho en Argentine (1963-67

Lorsque vous nous faites parvenir vos timbres, prenez soin d’en conserver la dentelure, sans quoi ils perdent toute leur valeur.


Clin d’œil par Roland Laneuville, p.m.é.*

Les chapelets d’Agnès Agnès Kagwiria Irimba vit à Nairobi, au Kenya. Elle confectionne les magnifiques chapelets que nous vendons au secrétariat de notre Maison centrale, à Laval. Voici son histoire (La rédaction)

C

elle qui confectionne les plus beaux chapelets au monde n’a qu’un seul bras. Agnès a été victime d’un accident en 2001. Elle était alors à l’emploi d’une petite entreprise comme secrétaire. « Qu’est-ce qu’on fait quand on perd son bras droit? » Tout en gardant son sourire, mais avec une certaine mélancolie, elle répond: « J’ai connu la dépression et j’ai eu besoin de counselling. J’ai réussi à ne pas me prendre en pitié. J’ai décidé de faire tout ce que je pouvais avec ma seule main. » Effectuer un travail aussi délicat que la confection de chapelets, avec de si petites perles, cela ne me semble pas la solution la plus évidente dans son cas. En examinant ses chapelets, je lui dis donc: « Voilà ce que tu as décidé de faire? » « Je fais des chapelets, répond-elle, mais je sais aussi cultiver le sol. Vous pourrez prendre des photos de ce que je peux faire avec une pelle et une pioche dans un jardin. » Agnès a travaillé quelque temps dans un laboratoire de semences. Une associée, en qui elle avait mis sa confiance, s’est sauvée un jour avec une partie de son matériel d’artisanat. « Peu importe, j’ai recommencé ». Pour prendre en main

son destin et éduquer son fils de huit ans, cette petite femme ne recule devant aucun défi. ¿

*Originaire de Saint-Maurice-de-Champlain, il a travaillé à Cuba (1965-79) et au Soudan (198697). Il a été membre du Conseil central de 1979 à 1985 et supérieur général de 1998 à 2003. Il est aujourd’hui missionnaire au Kenya et est responsable du Petit groupe missionnaire d’Afrique. rolandlaneuville@yahoo.com

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Roland Laneuville

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LA VIE DE LA SOCIÉTÉ par Marie-Hélène Côté

1 Benard Mutisya et Martin Mwangi ont célébré le 7 juillet dernier leur engagement au sein de la Société des Missions-Étrangères. Si pour Martin il s’agissait d’un premier engagement comme membre temporaire, Benard, lui, devenait officiellement séminariste.

CRÉDIT PHOTO Gilles

Dubé

Benard Mukeku Mutisya Né au Kenya, Benard Mukeku Mutisya a fait son cours primaire dans une école musulmane puis il a poursuivi ses études à l’université. Sa spécialisation est le génie électronique. Après six années sur le marché du travail, il a entrepris un cheminement en vue du sacerdoce auprès de la Société des Missions-Étrangères. En mai dernier, il a terminé sa formation au Centre international de formation missionnaire (CIFM). Ouvert aux différences, curieux et désireux d’apprendre, Benard a été un bon compagnon de vie durant tout son parcours au CIFM. Il s’intéresse à la culture du Québec, réussit bien son apprentissage de la langue française – on l’a même entendu prononcer quelques mots en joual. Il connaît des chansons québécoises, populaires et religieuses et il apprécie découvrir Montréal, sa géographie, ses festivals, ses gens. Il s’intéresse aussi à notre sport national, le hockey. Raymond Desrochers, p.m.é.

Martin Ngura Mwangi Martin Ngura Mwangi a fait une année de spiritualité au séminaire diocésain de Nyeri, au Kenya. Il a ensuite obtenu un diplôme en administration, puis a travaillé comme professeur durant sept ans dans un collège, l’équivalent au Québec du cégep. Il a joint la Société des Missions-Étrangères (SMÉ) en janvier 2011. Il a œuvré une année dans notre paroisse de Namanga, puis il a entrepris des études philosophiques à Tangaza. Il y a deux ans, Martin est venu au Canada. Il a alors effectué son année de probation au Centre international de formation missionnaire et une autre année avec l’équipe pastorale des paroisses Notre-Dame-de-Lourdes et NotreDame-des-Sept-Douleurs de Verdun. Durant toutes ces années avec nous, Martin s’est toujours montré discret, simple, humble, joyeux et très sérieux dans l’exercice de ses responsabilités. Son sens de l’appartenance et sa connaissance de la SMÉ ont constamment grandi. Gilles Poirier, p.m.é. 28

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Du 29 septembre au 3 octobre dernier, s’est tenue l’Assemblée régionale d’Asie à Sendai au Japon. L’événement a réuni nos membres et associés oeuvrant au Cambodge, au Japon, aux Philippines et en Chine. Gilles Poirier, p.m.é. (du Conseil central) et Marie-Laure Joly (du Service de l’animation missionnaire) ont également participé à la rencontre ayant pour thème Une spiritualité missionnaire pour l’Asie. Rangée du bas (de gauche à droite) : José González (invité), Maria Teresa Dalisay, Silvia Pucheta, Fabiola Gómez, Yessica Guzmán et Jean-Charles Loiselle, p.m.é. Rangée du haut : Jean Isabelle Samong, Maurice Labbé, p.m.é., Ana María Jara, Beatriz Millena, Gilles Poirier, p.m.é., Melissa Simmons, Marie-Laure Joly, Jean Gaboury, p.m.é., Grégoire Vignola, p.m.é., Asakura So (conférencier), Sylvie Brazeau, Risa Asakura (épouse du conférencier), Paul Too, p.m.é., Émile Étémé, p.m.é., Jean Lebeau, p.m.é., Charles-Aimé Bolduc, p.m.é., Miguel Granados et Ever Amador. CRÉDIT PHOTO Ever Amador

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Le 1er octobre, à l’occasion de la fête de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, la SMÉ a célébré le 90e anniversaire de la présence des sœurs Antoniennes de Marie auprès de ses membres. De gauche à droite : Marie-Jeanne Lalancette, Denise Michaud et Rolande Voyer. Un photoreportage sera consacré au travail de ces trois religieuses auprès de nos missionnaires dans le prochain numéro de Missions Étrangères. CRÉDIT PHOTO Gilles Dubé

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Nous nous souvenons

Pierre Drouin, p.m.é. (1931-2014)

Pierre Drouin est né à Montréal le 12 août 1931. Ordonné prêtre le 29 juin 1956, il va d’abord faire des études à Rome avant de partir pour le Honduras en janvier 1960. Il y sera missionnaire jusqu’en 2010. Durant ces années, il a aussi travaillé au Canada, au Service de l’animation missionnaire (1974-77), et exercé du ministère au Guatemala (1977-79). Au Honduras, il a été supérieur régional ainsi que directeur général du Centre de spiritualité El Tabor, dans le diocèse de Tegucigalpa. Il est décédé à Laval, le 26 octobre 2014, à l’âge de 83 ans et 2 mois. Ses funérailles ont été célébrées à notre Maison centrale de Pont-Viau, le vendredi 31 octobre. Ap 14, 13 Mt 25, 31-46 La Parole de Dieu proclamée aujourd’hui nous dit, au livre de l’Apocalypse : « Les œuvres des justes vont les suivre » jusqu’au-delà de la mort. Dieu sait combien notre confrère Pierre Drouin en a réalisé des œuvres qui lui ont demandé hardiesse, courage et persévérance. De son côté, l’Évangile de saint Matthieu nous permet d’anticiper ce qui se passera au jugement dernier : « J’avais faim, j’étais nu, j’étais malade… » Ceux à qui Jésus s’adresse n’avaient pas conscience de servir le Christ en secourant ceux qui étaient mal pris. Il leur dit : « Quand vous l’avez fait, c’est à moi que vous l’avez fait ». Ceux qui, par contre, ont bien conscience de trouver le Christ présent dans ceux qui souffrent, enrichissent grandement leur vie spirituelle en mettant leurs pas dans les traces du Seigneur. Au Honduras, comme curé à la paroisse Nuestra Señora de Guadalupe, Pierre s’est toujours préoccupé de la santé spirituelle et sociale de ses paroissiens. Pierre a vu dans les enfants des quartiers défavorisés de la capitale autant de Jésus affamés, malades ou opprimés. Il fonda l’association Koinonia qui, encore aujourd’hui, contribue au développement des enfants de sept quartiers de la capitale. Pierre a vite compris que les initiatives qu’il avait prises pour faire face aux besoins spirituels de ses paroissiens ne suffiraient jamais à produire les effets recherchés. Comme les besoins de formation croissaient, tant chez les jeunes communautés de religieuses que du côté des laïcs, il était de plus en plus convaincu de la nécessité d’un centre de spiritualité.

À proximité de Valle de los Ángeles. il s’est donc affairé à la construction du centre Las Tres Rosas (Les trois roses), mis à la disposition des groupes de pastorale jeunesse. Sur le même terrain, les premiers pavillons d’un deuxième centre, El Tabor, allaient assurer la dimension de l’évangélisation proprement dite. Ce lieu allait accueillir les assoiffés de Dieu en quête de renouveau. Ayant eu personnellement le privilège de seconder Pierre durant plus d’un an, je suis en mesure de témoigner de son travail ardu et de son engagement. Je veux signaler en lui le prédicateur assidu à la messe quotidienne et le directeur des retraites spirituelles qui accueillait des centaines d’étudiants universitaires, des délégués de la Parole et des religieuses des nouvelles communautés venus se ressourcer au Tabor. J’ai vu le généreux don de soi qui l’amenait à s’investir avec ardeur dans l’accompagnement spirituel. On venait parfois de loin pour recevoir ses précieuses orientations, pour boire aux effluves qui se dégageaient de sa personnalité en lien si étroit avec son Seigneur. Les œuvres réalisées par Pierre, comme, par exemple, la clinique du Tabor ouverte au profit des familles avoisinantes, et toutes ses initiatives conduites avec tant de dévouement et d’engagement à la cause de la mission, forment un bilan des plus impressionnants. S’il a réalisé tant d’œuvres, il ne l’a pas fait comme s’il avait été dirigeant d’une ONG humanitaire, comme disait le pape François, mais c’est qu’il percevait la réalité hondurienne à la lumière de la foi. Pierre Drouin, p.m.é.,aura été un géant de la mission. Extraits de l’homélie de Jean-Paul Guillet, p.m.é., missionnaire au Honduras durant 24 ans.

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