MKR - ISSUE 02 - HUMANITY

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Numéro 2

HUMANITY


. HUMANITY . 004

006 . EDITORIAL 008 . MANIFESTE

. MODE . 010

010 . edito LOCKDOWN 022 . edito INHUMAN COLD 032 . edito GHOSTS 052 . edito L’EXORCISTE 066 . edito I WANNA DO BAD THINGS TO YOU 076 . edito LAST DAYS 094 . fashion week JCDC BACKSTAGE 098 . fashion week STREETSTYLE 102 . fashion week HEXA BY KUHO BACKSTAGE 108 . INTERVIEW . DIANE PERNET

. CULTURE . 116

118 . ALONE IN INDIA par flavie trichet lespagnol 128 . L’IMAGERIE INFERNALE 132 . SUR LE TARAMA 134 . L’HOMME, CETTE BÊTE IMMONDE 138 . LE SANG MKR -

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139 . MY SHADED VIEW 140 . LE CORPS, UNE MISE A MORT 144 . cinéma . SELECTION FILMS 146 . cinéma . PEUR(S) DU NOIR 148 . cinéma . UNE NUIT AVEC WILLIAM FRIEDKIN 150 . musique . THE STOOGES 152 . interview . SKUNK ANANSIE 158 . interview . TRUST 162 . interview . MARIE MADELEINE 166 . musique . MIX-TAPE 168 . danse . EVE GRINSZTAJN par julien benhamou 176 . danse . SOUFFRANCES 178 . interview . EVE GRINSZTAJN 182 . danse . ECORCHES VIFS

. DÉCOUVERTES . 184

187 . portfolio . MADEMOISELLE JAVEL 198 . portfolio . ADAM PETER HICKS 206 . portfolio . MARGAUX HUG 214 . portfolio . PABLO CEPEDA 223 . zoom . EXPOSITIONS 224 . zoom . EVENEMENTS 230 . zoom . LIEUX

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Rédateur en chef

ERIK RAYNAL Graphisme & Web-Management

EDOUARD TRICHET LESPAGNOL Mode

CHARLES MARIUS THÉLU NATALIE BRODEL Culture

JÉRÉMY BENKEMOUN MARIE DE TOUCHET LUCIE TOSSER SOHRAB CHITAN MILENA PICHON PABLO ALBANDEA PIERRE ANTOINE IRASQUE WENDY NAETONG Communication

SONIA BAILLAT CAMILLE DEVAILLY ANTOINE MOUGENOT

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ONT COLLABORÉ À CE NUMÉO ARTICLES Cuco, Chevalien PHOTOGRAPHES Flavie Trichet Lespagnol, Ricardo Abrahao, Vidhi Doshi, Yann Morrison, Pierre Larose, Florent Darthout, Anna Vatheuer, Sime Eskinja, Hannibal Volkoff, Julien Benhamou, Mademoiselle Javel, Adam-Peter Hicks, Margaux Hug, Pablo Cepeda INTERVIEWS Diane Pernet, Skunk Anansie (Deborah Dyer et Mark Richardson), Trust (Robert Alfons et Aaron Miller), Marie Madeleine (Jarko Weiss), Eve Grinsztajn PIÈCES Agent Provocateur, Glenn Martens, Rad By Rad Hourani, Jean Charles De Castelbajac, Jen Kao, Glenn Martens, Boy, Olympia Le Tan, Yazbukey, Been By D’heygere, Vintage Balenciaga, Michel Perry, Surplus Doursoux, Kris Van Assche, Triumph, Tommy Hilfiger, Allibelus +, Medwinds, Juun.J, Pierre Balmain, Victoria Beckham, Georges Morand, Banana Republic, Asos, Medwinds, Guy Laroche, Bernard Delettrez, Rules By Mary, Yohan Serfaty, Atsuro Tayama, On Aura Tout Vu, Rami Al Ali, Swarovski Anjli London, Songzio, Is Not Dead Paris, Gilbert Gilbert, Zara, Pellessimo, Ruby Feathers, Michel Morelli, Pretty Box, Ruby Feathers, Superated, Avelon, 1-100 For Alexandre Plokhov, Pretty Box, Bijules, Prong By Peirong Zhou, Delphine Charlotte Parmentier, 0044 Paris, Argentinien Embassy, Francois Tamarin

MAKE-UP & HAIR STYLE Camille Perreaud, Tiphany Laboureur, Jeannette Törnqvist, Yoanna Tg, David Lenhardt, Yoshiko Haruki, Maxime Beauvais, Kriss Logan, Carole Fontaine, Masako Hayashi, Mathilde Haddouk, Camille Royer, Margaux Careil, Tiphaine Wioland, Tiphaine Wioland, Florian Dovillez, Jade Mendes MODELS Arthur Jacquier (Marylin Men), Lukas Sindicic (Marylin Men), Sacha (Up Models), Nicky (Up Models), Maxime (Marylin Men), Thomas Smith, Elisa, Thomas Aoustet (Success), Pierre-Harald Leducq (Success), Laura Jade (Img), Paige Rivas (Img), Quentin Lejarre, Dominika (Slides), Alessia (Slides), Kadriana (&Justwm), Younes B. (Rockmen), Alina S. (Evidencemodel), Jeremy S. (Rockmen), Shannon Peck, Diana Delahaye, Alisa Duran, Michiel Gysel, Marc Jorden, Ellis Wahtel SHOWROOMS Creative Door, Cristofoli Press, Quartier Général, Totem LIEUX Musée Du Quai Braly, Musée D’art Moderne De Paris, Eléphant Paname, Tranoï, Maxim’s, Clink Restaurant, Kokon To Zai, Glint MAIS ÉGALEMENT Opera National De Paris, Verycords, Abraao Ferreira, Ambassade d’Argentine à Paris, Nicolas Luzuriaga, Thibault Velez, Alexandra Loyd

SHOOTINGS Midaby Kim, Aicha Laenen, Stéphane Gaboué, François Rousseau, Charlotte Michalak, Garance Moreau, Sarah Delannoy, Oscar Viguier, Romain Sochon, Ana Jerez

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NUMÉRO 2 HUMANITY

EDITORIAL

Que feriez-vous demain si l’on vous disait que la fin du

monde approche ? Que vous n’aviez pas encore eu le temps de réaliser vos objectifs ? Ce second numéro, premier d’une saga en deux parties, aborde une réflexion sur l’Homme en période de cataclysmes. Entre mystères, guerres et réflexion et à l’inspiration de nos précurseurs artistes, philosophes et écrivains nous mettons en valeur l’esthétisme d’un barbarisme sans limites. Des éditos mode subtiles, une partie culture des plus sanguinaires vous conduiront à votre propre introspection. Si l’homme semble reproduire, être fasciné et détruit par ses propres déviances, sa rigidité à aimer, sa brutalité, sa constante hésitation entre le bien et le mal ou encore son attrait pour l’inconnu le conditionne à des moments de doutes et de remises en question. Alors, si 2012 est bien l’année apocalyptique, profitez, lancez-vous et croyez en vous et en vos projets: il n’est jamais trop tard.

Erik RAYNAL MKR -

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CULTURE | HUMANITY

MANIFESTE

ESCHATOLOGIQUE JUSTE AVANT LA FIN DU MONDE par CUCO

1.

3.

Notre fascination pour la cruauté répond à

Ce goût vénéneux pour le basculement

un obscur besoin de dépassement des limites

révèle autant notre mélancolie religieuse que

du raisonnable et du rationnel. En exerçant

notre penchant idolâtre. Chrétiens malgré

la cruauté volontairement, ou en la subissant,

nous, tout en ignorant sa philosophie de

nous choisissons d’ouvrir notre existence au

l’amour révolutionnaire, il semble qu’en

risque de l’illimité, et nous jouons avec la mort.

Occident nous ayons soif pour toujours de transcendance et que nous cherchions notre

2.

anéantissement dans la victimisation, ou dans

Et si tout cela n’était que vieille littérature ? Elle

inconsciemment aux sources de l’iconographie

porte des noms historiques, par exemple «la lit-

doloriste et christique, dans les yeux révulsés

térature et le mal», ou «l’esthétique de la trans-

de la victime ou du bourreau, nous croyons

gression».

voir la matérialisation de l’absolu, comme si

la vision de l’anéantissement de l’autre. Puisant

dans un monde sans Dieu, nous continuions de chercher les états ou les signes de ces états mystiques. Nous croyons à l’extase de la cruauté, parce que nous avons un besoin désespéré de sacré, c’est à dire d’union et de dépassement de soi, grâce à la transgression.

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CULTURE | HUMANITY

4.

nourrit notre inextinguible besoin d’aventure,

La cruauté est aussi banale que sublime; le plus

qui ne doit pas être confondu avec une recherche d’oubli.

souvent, elle endosse les formes prosaïques et déprimantes de la barbarie ordinaire. Quand tu

7.

tapes cruauté dans google, tu tombes sur des milliers de photos de maltraitance animale. Notre époque commence seulement à voir la cruauté perpétrée quotidiennement, à échelle planétaire et capitalistique, s’exerçant contre les membres les plus fragiles de la communauté, ceux qui ne peuvent pas consentir. Et cette prise de conscience ne peut être sans conséquences.

Ars moriendi, véritable noeud de la guerre existentielle, cette croyance nous plonge singulièrement et communément dans le dénuement, mais aussi au coeur de la comédie humaine. Dans tous les esprits, il y a une même ritournelle, une inquiétante litanie, et tel un funambule, Cuco se tient dans l’aura grisante et la puissance aussi anéantissante que revigo-

5.

rante de cet aveu.

La cruauté, mais surtout notre fascination

8.

esthétique pour elle, comme pour une esthétique de la cruauté, pose un problème moral qui doit et peut être dépassé dans une éthique de la cruauté, elle-même susceptible de devenir une esthétique, quand elle en passe par le consentement.

Effet boomerang, cette fin dont on ne veut rien savoir revient en force avec la vieille obsession millénariste. La dernière fois que nous en avons entendu parler, c’était en 2000, aujourd’hui la fin du monde est annoncée le 21 décembre prochain. Pour fêter l’approbation de la vie

6.

jusque dans la mort, Cuco vous donne rdv le 21

Par un étrange retournement, l’éthique de la cruauté commence par l’éradication de toute relation fascinatoire à la cruauté, n’admettant que la cruauté qui s’impose à soi-même, sorte d’entreprise d’auto-désillusionnement. Surtout, l’éthique de la cruauté inscrit comme fondement le 1er rapport cruel à l’existence qui considère que c’est bien la fin qui la constitue. Et si la mort

décembre au Dernier bar avant la fin du monde, 19 avenue Victoria, dans le 1er arrondissement, dans la salle Singularity du sous-sol, pour un partage mystique de nos derniers instants, dans ce lieu où un compteur du temps nous indique le temps qu’il reste. A l’heure où ce manifesto s’achève, le compteur affiche 1 mois, 22 jours, 17 heures et 39 minutes; c’est peu et

est notre horizon, c’est cette conscience qui

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c’est beaucoup.



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MODE

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HUMANITY | MODE

RICARDO ABRHAO PHOTOS & REALISATION

NATALIE BRODEL STYLISM

MIDABY KIM ASSISTANT

CAMILLE PERREAUD MAKE-UP

TIPHANY LABOUREUR HAIR

ARTHUR JACQUIER LUKAS SINDICIC MODELS

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HUMANITY | MODE

VIDHI DOSHI

PHOTOS & REALISATION

AICHA LAENEN ARTISTIC DIRECTION

JEANNETTE TÖRNQVIST MAKE-UP

YOANNA TG HAIR

SACHA + NICKY (UP MODELS) LUCAS + ARTHUR + MAXIME (MARYLIN MEN AND DOMINO AURORO) THOMAS SMITH ELISA MODELS

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- Elisa Kaftan as veil AGENT PROVOCATEUR Top GLENN MARTENS


- Arthur Suspenders RAD BY RAD HOURANI Jacket RAD BY RAD HOURANI Shirt RAD BY RAD HOURANI - MAXIME Tuxedo JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Necklace JEN KAO Keychain JEN KAO


- Lucas Top RAD BY RAD HOURANI Coat RAD BY RAD HOURANI


- ELISA Top + long skirt GLENN MARTENS Mini wrap skirt JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Clutch BOY Shoes JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC

- Sasha ‘Raspberry’ leggings BEEN BY D’HEYGERE Withney body AGENT PROVOCATEUR Etrier boots MICHEL PERRY Lace bra PASIONNATA Jumper STYLIST OWN


- Nicky Jacket JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Shorts JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Trousers JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Clutch OLYMPIA LE TAN



- Maxime Tuxedo JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Trousers JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC Necklace JEN KAO Keychain JEN KAO


- Victor ‘Madonna’ necklace YAZBUKEY Jacket JEAN CHARLES DE CASTELBAJAC ‘Pineapple’ leggings BEEN BY D’HEYGERE ‘Eye’ mirror YAZBUKEY - Elisa Sunglasses VINTAGE BALENCIAGA ‘Grace Jones’ necklace YAZBUKEY Kaftan AGENT PROVOCATEUR christabelle body AGENT PROVOCATEUR Skirt OLYMPIA LE TAN Clutch OLYMPIA LE TAN


- Elisa Sunglasses VINTAGE BALENCIAGA ‘Grace Jones’ necklace YAZBUKEY Kaftan AGENT PROVOCATEUR Christabelle body AGENT PROVOCATEUR Skirt OLYMPIA LE TAN Clutch OLYMPIA LE TAN Up and down boots MICHEL PERRY


HUMANITY | MODE

YANN MORRISON PHOTOS & REALISATION

STÉPHANE GABOUÉ STYLISM

DAVID LENHARDT (with MAC) MAKE-UP

YOSHIKO HARUKI HAIR

FRANÇOIS ROUSSEAU CHARLOTTE MICHALAK REGIE

THOMAS AOUSTET (SUCCESS) PIERRE-HARALD LEDUCQ (SUCCESS) LAURA JADE (IMG) PAIGE RIVAS (IMG) MODELS

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GHOSTS

MILLER

Veste vintage SURPLUS DOURSOUX


GHOSTS

AS I WALK

Veste SURPLUS DOURSOUX Pantalon KRIS VAN ASSCHE Chaussures KRIS VAN ASSCHE



GHOSTS

FRIGHT OF THEE


Bustier TRIUMPH


GHOSTS

DARK PARTS


Manteau TOMMY HILFIGER


GHOSTS

WOUNDS


Veste et pantalon PIERRE BALMAIN Chaussures MEDWINDS Manteau ALLIBELUS Pantalon JUUN.J



Robe VICTORIA BECKHAM Gants GEORGES MORAND

GHOSTS

BLANK SHOT


Cape BANANA REPUBLIC Robe VICTORIA BECKHAM Gants GEORGES MORAND Chapeau ASOS


GHOSTS

PUT THE BLAME ON ME


GHOSTS

YOUTH DISAPPEARANCE


Veste SURPLUS DOURSOUX Pantalon KRIS VAN ASSCHE Chaussures KRIS VAN ASSCHE


GHOSTS

MORNING SURRENDER


Manteau TOMMY HILFIGER Pull BANANA REPUBLIC Pantalon PIERRE BALMAIN Chaussures MEDWINDS



GHOSTS

THE FAREWELLS

Manteau PIERRE BALMAIN


HUMANITY | MODE

PIERRE LAROSE & FLORENT DARTHOUT PHOTOS, LIGHTS & SET DESIGN

CHARLES MARIUS THELU REALISATION

GARANCE MOREAU STYLISM ASSISTANT

MAXIME BEAUVAIS MAKE-UP

KRISS LOGAN HAIR

QUENTIN LEJARRE DOMINIKA (SLIDES) ALESSIA (SLIDES) MODELS

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- Alessia Robe en sequin vert ĂŠmeraude GUY LAROCHE Bague octopus en bronze avec chryocolla bleu BERNARD DELETTREZ


MODE | L’EXORCISTE

- Quentin Chapeau melon noir RULES BY MARY Manteau long en coton et col en cuir Y-project by YOHAN SERFATY Slim noir brillant stretch ATSURO TAYAMA MKR - avec piques - NUMERO Bague croix en argent BERNARD2DELETTREZ

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MODE | L’EXORCISTE

- Dominika Couronne ON AURA TOUT VU Robe en sequin RAMI AL ALI Collier insectes en bronze BERNARD DELETTREZ - cristaux - NUMERO 2 LONDON Bracelet enMKR or avec SWAROVSKI ANJLI

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- Quentin Masque en dentelle noir et argenté ALIBELLUS+ Veste noire SONGZIO Robe IS NOT DEAD PARIS Bague GILBERT GILBERT



- Quentin Veste noire SONGZIO Robe IS NOT DEAD PARIS - Alessia Robe à perles rouge ON AURA TOUT VU Boucles d’oreilles tête de mort blanc roi et fou du roi chaîne argent BERNARD DELETTREZ




MODE | L’EXORCISTE

- Quentin Col métal ZARA MKR Chemise noir en dentelle de coton ALIBELLUS+

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MODE | L’EXORCISTE

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HUMANITY | MODE

ANNA VATHEUER PHOTOS & REALISATION

NATALIE BRODEL STYLISM

CAROLE FONTAINE MAKE-UP

MASAKO HAYASHI HAIR

KADRIANA (&JUSTWM) MODELS

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Jacket PELLESSIMO Necklace & Top RUBY FEATHERS


Pants & Dress MICHEL MORELLI Skull PRETTY BOX Head accessoire RUBY FEATHERS



Jumpsuit SUPERATED Body AVELON Necklace RUBY FEATHERS


Shoulder piece RUBY FEATHERS


T-shirt AVELON Pants & Corsage MICHEL MORELLI Earrings RUBY FEATHERS Jacket VINTAGE



Necklace & Top RUBY FEATHERS Trousers PELLESSIMO


Head piece RUBY FEATHERS Pullover AVELON


HUMANITY | MODE

SIME ESKINJA

PHOTOS & REALISATION

NATALIE BRODEL STYLISM

MATHILDE HADDOUK MAKE-UP & HAIR

YOUNES B. (rockmen) ALINA S. (Evidencemodel) JEREMY S. (ROCKMEN) MODELS

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- Alina Top & Jacket MICHEL MORELLI Trousers, Shoes & Granate PRETTY BOX Bracelet 1-100 FOR ALEXANDRE PLOKHOV


- Alina Dress & Corsage MICHEL MORELLI Necklace PRETTY BOX Bracelet & Earrings BIJULES


- Jeremy Scarf PRONG BY PEIRONG ZHOU Waistcoat MICHEL MORELLI Body jewelry & Ring DELPHINE CHARLOTTE PARMENTIER



- Younes Trousers & Neck-piece 0044 PARIS Belt & Arm-accessory PRETTY BOX - Jeremy Necklace, Top, Trousers & Belt 0044 PARIS Fur MICHEL MORELLI


- Younes TOP & Body Belt & Trousers 0044 PARIS - Alina Alina: Dress & corsage - MICHEL MORELLI Skull & Snake ring BERNARD DELETTREZ - Jeremy Shoulder piece & Trousers 0044 PARIS Arm Accessory PRETTY BOX



- Younes Neckpiece 0044 PARIS


- Jeremy Top, Body Belt & Trousers 0044 PARIS


- Alina Dress & Corsage MICHEL MORELLI Necklace PRETTY BOX Cross Ring BERNARD DELETTREZ Bracelet-Ring DELPHINE CHARLOTTE PARMENTIER Bracelet & Earrings BIJULES - Jeremy Waistcoat & Fur Belt MICHEL MORELLI Body jewelry DELPHINE CHARLOTTE PARMENTIER Trousers 0044 PARIS




- Younes TOP PRONG BY PEIRONG ZHOU Leather corsage MICHEL MORELLI Bracelet & Ring 1-100 FOR ALEXANDRE PLOKHOV Trousers 0044 PARIS - Alina Dress MICHEL MORELLI Rings BERNARD DELETTREZ - Jeremy Necklace 0044 PARIS Bracelet BIJULES


- Younes Trousers & Neck-piece 0044 PARIS Belt & Arm-accessory PRETTY BOX


- Alina Dress & Corsage MICHEL MORELLI Necklace PRETTY BOX Bracelet & Earrings BIJULES



- Younes &Jeremy Jeremy & Younes: Trousers 0044 PARIS Bracelet DELPHINE CHARLOTTE PARMENTIER - Alina Golden Jacket NICOLÁS LUZURIAGA Body AVELON Body-Jewls BIJULES Shorts MICHEL MORELLI Ring DELPHINE CHARLOTTE PARMENTIER


HUMANITY | MODE

JCDC

B A C K S TA G E

FASHION WEEK HANNIBAL VOLKOFF

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HUMANITY | MODE

« C

’est un ballet où chacun tient son rôle dans une hystérie maîtrisée, l’espace et le temps son réduits, et en leur sein, le frémissement urgent d’une ruche. Le photographe est le témoin de ce mouvement, au plus près des détails vestimentaires, de la concentration de l’équipe, de la séduction des mannequins. Sa tâche est celle du chasseur dans un jeu de cache-cache: alors que l’agencement (des habits, des cadrages, des positions) évolue en permanence, il se doit de trouver l’instant qui fera sens.

»

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HUMANITY | MODE

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HUMANITY | MODE

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Ann Demeulesmeester

HUMANITY | MODE

Ann Demeulesmeester

Ann Demeulesmeester

STREETSTYLE

FASHION WEEK

JULIE MORIN

Ann Demeulemeester

Rick Owens

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Rick Owens


HUMANITY | MODE

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Rick Owens


HUMANITY | MODE

Christian Dior

Christian Dior

Jean Paul Gaultier

Jean Paul Gaultier

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HUMANITY | MODE

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Christian Dior


HUMANITY | MODE

HEXA BY KUHO

B A C K S TA G E

FASHION WEEK HANNIBAL VOLKOFF

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HUMANITY | MODE

« Si les bonnes combinaisons peuvent être partout, on privilégiera alors

l’instinct et la fluidité. Et selon les caprices de la chorégraphie s’adopte le registre, du compte-rendu du travail à la retranscription d’une ambiance en passant par l’hommage à la beauté des gazelles.

»

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HUMANITY | MODE

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HUMANITY | MODE

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HUMANITY | MODE

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HUMANITY | MODE

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INTERVIEW MKR -

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HUMANITY | INTERVIEW

Diane Pernet Rencontre avec l’incontournable,

légendaire et talentueuse Diane Pernet. #1 Vous êtes une «fashion curator» (créatrice de tendance) reconnue, mais aussi une journaliste/bloggeuse résidant à Paris, pourriez-vous nous parler de vos débuts dans le milieu de la mode ? Et pourquoi avoir décidé de vous installer à Paris ? ... Il est souvent difficile de déceler ce qui va vous conduire à une carrière. Parfois, même en prenant du recul, ce n’est pas chose simple que d’essayer de se souvenir ni de se rappeler vraiment comment tout à commencé. Au début pourtant, tout avait l’air si simple. J’étudiais à Parsons & Fit quant au bout de neuf mois, j’ai décidé d’arrêter. C’était pour moi je pense le bon moment. J’ai ensuite travaillé et appris par moi-même ce que je pensais qu’il me manquait. Cela va sans dire que j’ai appris encore plus durant les dix années qui ont suivi. Mais à l’instant précis où j’ai décidé de mettre un terme à mes études, je me suis lancée et j’ai créé ma propre marque. Evidemment, ce n’était pas chose facile, et il y a eu un moment où je n’étais plus certaine de «comment» faire les choses. Mais sinon, ma vraie entrée dans le monde de la mode aura été quand j’ai vendu ma toute première pièce, car tant que ça n’est pas arrivé, travailler dans ce monde n’est alors qu’une envie. Je me souviendrais toujours de ce moment car l’histoire est assez drôle en fait. Il y avait une fleuriste qui vivait pas loin de chez moi, qui avait entendu parler de moi et du fait que je faisais des «vêtements». Un jour, cette fleuriste m’a demandé si je voulais mettre une de mes robes dans la plus grande vitrine de son magasin, ce qui était très gentil de sa part. Il est vrai que cela sonne un peu «fou» et «naïf» quand on connait le monde de la mode. Mais la chance était de mon côté car immédiatement, quelqu’un est passé et a voulu l’acheter. Comme ce n’était pas «bon marché», cela a boosté ma confiance en moi et m’a réconforté dans l’idée de créer alors ma propre marque. Cette femme qui a acheté ma toute première robe exposée dans la vitrine de cette fleuriste devint ma toute première cliente privée et elle m’est restée fidèle pendant très longtemps. Après, au fur et à mesure du temps, j’ai commencé à avoir mes propres défilés et à vendre à de «vrais» magasins, et avant même que je ne m’en aperçoive, j’étais «devenu» une fashion designer à New York, et ce pendant dix ans dans les années 80. Mais j’ai toujours eu deux passions: la mode et le cinéma. Et bien que mon tout premier métier fût dans la mode, je faisais également à coté mes premier pas en tant que réalisatrice. Je pense que la raison qui a fait que je ne finisse pas dans l’industrie du cinéma était qu’à la sortie du lycée, je n’étais pas très intéressée par l’idée de travailler au sein d’une équipe. Je voulais avoir le contrôle sur tout ce que je faisais. Il va de soi qu’il est inévitable de faire un film sans collaborer, ce qui pour moi

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HUMANITY | INTERVIEW aurait été impossible car je n’aurais pas pu imposer ma vision des choses comme je l’aurais souhaité. Du coup, je me suis retrouvé à faire des reportages photos où je pouvais tout faire moi-même. Photographier, développer… l’intimité justement, était un thème récurrent dans mes photos, un sujet que j’essayais de capter en toutes circonstances. Il y a des photos de tendres moments passés avec mon mari, mais également des portraits de résidents de l’asile de psychiatrique dans lequel ma sœur travaillait. J’ai adoré «être» photographe, mais à un moment donné, j’ai réalisé que je voulais faire quelque chose d’autre. Et je suppose que ce n’est une grande surprise que ce «quelque chose» d’autre était alors de devenir créatrice de mode, car mon «autre» amour était la mode. La raison pour laquelle j’ai emménagé à Paris à la fin des années 80 est que New York était en pleine renaissance, mais pas comme je l’aurais souhaité. L’atmosphère de la ville devint très sombre, un peu comme dans Bladerunner. Je savais alors qu’il était temps pour moi de partir. Paris s’est avéré être une évidence quand j’ai finalement pu quitter New York en 1990. Paris était la capitale de la mode et je voulais à nouveau me sentir à l’aise en me promenant dans la rue. Je portais très souvent des chapeaux quand je me suis installée à Paris. J’ai travaillé comme costumière sur quelques films. Plus tard, et ce pendant un moment, je devins redactrice de mode pour le magasine Joyce de Hong Kong. Le journalisme en lui-même était une chose à laquelle je n’avais jamais vraiment pensé jusqu’à ce que quelqu’un me le demande. Et très rapidement, je me suis alors retrouvé à donner des avis stylistiques pour Elle.com en tant que «Dr. Diane», ainsi que pour «Vogueparis.fr» qui devint «Vogue. fr». C’est alors que j’ai décidé d’avoir mon propre blog, et comme les gens le disent si bien, «le reste est de l’histoire»...

#2 Vous avez un style unique que l’on pourrait décrire comme étant sombre et dur, est-ce afin de vous démarquer de toutes les fashionistas ? Comment pourriez-vous le décrire ? Plus encore, quelles sont vos principales influences dans la mode ? ... Je pense que ma réponse en énervera certain car les gens sont de nature curieuse, mais pour être honnête, je ne pense pas avoir mon «propre style». Je n’ai pas de grandes motivations je ne suis pas rationnelle, et je n’ai certainement aucune stratégie qui voudrait que je me rattache au milieu de la mode. Je porte juste ce dont j’ai envie, quand j’en ai envie, c’est aussi simple que ça. Il existe certainement des raisons qui font que mon style se développe d’une manière ou d’une autre, mais je n’ai aucune idée de ce qu’elles sont, car mon style s’est développé au fur et à mesure des années sans même que j’en ai pris conscience. Je fais juste ce que je conseille aux autres: portez ce que vous aimez. Mes tenues ne sont pas les mêmes, même si au premier regard elles ont l’air identique, cependant, elles sont très rapides à s’allier les unes aux autres, aussi étrange que cela puisse paraitre. C ‘est quelque chose qui se passe automatiquement, j’ai donc peur de ne pas avoir grand-chose à partager à ce sujet j’en suis désolée. Et de toute façon, chacun a sa propre idée de pourquoi je m’habille de cette façon, même s’ils pensent souvent que c’est avec mauvais goût ou trop voyant. Cela m’importe peu. Bien sûr, il est toujours très agréable de recevoir des compliments, mais je ne les prends jamais pour acquis. Je ne pense pas que beaucoup de gens aiment être critiqués sur la façon qu’ils ont de s’habiller, et je ne suis pas différente de ces gens-là. Puis je m’habille de cette façon depuis trop longtemps pour être agacée par les critiques des autres quand cela arrive.

#3 ASVOF (A Shaded Of View On Fashion) et ASVOFF ( A Shaded Of View On Fashion Film) ont été créés en 2005 et 2008, comment et pourquoi avez eu l’idée de créer les deux ensemble ? Quel est le vrai lien entre votre blog et le festival du film de mode? ... Le lien entre mon blog et mon festival est qu’ils ont pu voir le jour grâce à la révolution digital qu’est internet. A Shaded View On Fashion est ma signature, ma marque en un sens. Il fait référence à ma façon

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HUMANITY | INTERVIEW de voir les choses. Et comme depuis que je suis connue je porte toujours des lunettes, mon point de vue sur le monde est «shaded» (ombragé). Il était alors cohérent pour moi de nommer de cette façon mon blog et mon festival. Evidemment, les deux ont à voir avec mon oeil de rédactrice/ critique de mode, de films, d’art, de tout ce qui touche à l’industrie de la création. Mais à côté de ça, il est important que les gens comprennent qu’ASVOF et ASVOFF sont deux entités différentes. Le blog débuta en 2005. C’était pour moi une nouvelle façon de donner mon avis, de couvrir et de commenter mes choix «mode» et aussi mes choix concernant d’autres champs créatifs. J’ai tout de suite été emportée par la beauté et la facilité du reportage «»instantané» et de la simplicité qu’est un blog. C’était une suite logique pour moi. Je n’avais pas à me sentir concernée par l’avis d’autres rédacteurs ni à attendre qu’ils approuvent mes idées, mes choix. J’imagine que contrairement à beaucoup d’autres gens qui commentaient la mode à cet époque, j’étais peut-être moins prudente. Je parlais juste de ce dont j’avais envie. Et je ne le regrette pas. En 2006, quand j’ai commencé mon premier festival du film de mode, personne ne comprenait ce qu’était un film de mode. Cette connaissance s’est depuis épanouie dans la communauté créative et a même pris forme au sein d’un certain public. Le nombre de films sur la mode est en progression constante. Mais le plus important reste le niveau de créativité et les efforts quant à la qualité employés par les réalisateurs et les designers qui participent à ces films. Mais ce n’était pas chose facile et rien n’était acquis. Nourrir quelque chose depuis sa création et l’entretenir n’est jamais simple. Certaines personnes dans le monde de la mode avaient pris l’habitude de traiter le film de mode comme une nouveauté, peut-être est-ce que cela les laisser perplexes ? Mais ils ont commencé à prendre tout ça plus au sérieux quand est arrivé internet, la «révolution digitale» et ses facilités commerciales. Ils se sont aussi vite aperçus qu’il y avait un lien émergent possible entre l’industrie de la mode et celle du cinéma. De nos jours, un film traitant d’un sujet sur la mode a plus de sens et le lien est quasi nécessaire, surtout depuis que l’on peut voir les défilés live en streaming, acheter ces vidéos grâce au E-commerce, et depuis que l’on sait ce qu’il se passe «derrière» les défilés grâce aux documentaires. Et en même temps qu’augmente le visionnage en ligne sur les tablettes et les Smartphones, l’industrie du film de mode se remplie de possibilités offrant des challenges de plus en plus nombreux. Du coup, ce qui est intéressant, c’est la reconstruction comme une renaissance indépendante du film de mode qui crée de ce fait de nouvelles opportunités en même temps qu’elle évolue.

#4 Votre travail tourne principalement autour de la mode et du cinéma, n’est-ce pas difficile de casser les barrières entre ces deux mondes ? Quelle est, pour vous, la réelle relation entre la mode et le cinéma ? De ce fait, quelles sont alors pour vous vos principales influences dans le cinéma ? ... Je pense que ces deux mondes vivent naturellement côte à côte. La partie «mode» est ce qui aide à construire le caractère d’un film, à lui donner sa personnalité, et à le rendre aussi plus crédible auprès des «consommateurs». Le «film de mode» est quant à lui une progression naturelle de la réalité.

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HUMANITY | INTERVIEW Bien sûr, j’essaie de rassembler, faire se rapprocher ces deux mondes grâce à mon festival et à mon travail sur le film de mode, mais ces deux disciplines ont cependant des existences et des buts bien distincts. La chose la plus importante est qu’ils soient en phase de devenir complémentaires en s’inspirant l’un de l’autre de plus en plus, ce qui se voit dans l’un se reflète dans l’autre. Si votre question est «quel réalisateur a eu la plus grande influence, le plus gros impact sur moi quant à ma poursuite de ce mariage entre la mode et le cinéma», je dirais qu’il y a : Rainer Werner Fassbinder, John Cassavetes, Federico Fellini, Luchino Visconti, Michelangelo Antonioni, Pier Paolo Pasolini, William Klein, Atom Egoyan, Todd Haynes, Douglas Sirk, Alfred Hitchock, Kenneth Anger...

#5 Dans des interviews, vous dites «être inspireée par les créations de notre temps et proposer des options», mais dans quel ordre aimeriez-vous changer ces choses ? Ne pensez-vous pas que Paris est trop enraciné dans la conformité? Est-ce que Paris est toujours le bon endroit pour la mode ? ... Oui, Paris est plus conservateur que d’autres villes importantes pour la mode. Il y a plus de création qu’à Milan ou New York et c’est certainement plus raffiné et respecté qu’à Londres. Malgré les différents courants, Paris reste la meilleure plateforme pour la mode car c’est là que se rendent les gens les plus importants, les plus créatifs et les plus influents plusieurs fois par an. Paris est donc un rendez-vous incontournable et reste indiscutablement la capitale de la mode. N’importe quel journaliste sérieux ou n’importe quel acheteur ne peut pas manquer de venir voir les designers qui viennent du monde entier montrer leur travail. Ce n’est pas la supériorité des français dans la mode mais le niveau supérieur d’un savoir-faire à la française, ce sont des bases. S’il y a un changement que je souhaiterais voir, c’est peut-être plus d’originalité et moins de style «corporate».

#6 Vous avez choisi d’utiliser internet afin de promouvoir vos projets, pensez-vous qu’internet est maintenant la route à prendre pour innover ? (dans le cas d’un webzine, croyez-vous en leur éventuel succès ? ) Personnellement, je passe beaucoup de temps devant mon ordinateur, la plupart des gens que je connais prennent leurs informations depuis internet. Les magazines sont supers car ils reflètent plus des courants mais sont moins efficaces. L’impression et le digital coexistent et vont continuer à le faire. L’un ne va pas sans l’autre pour l’instant. Ils sont à usage différent. Je pense qu’en dehors du gain de temps et d’argent, le fait de pouvoir échanger des idées ou des commentaires en ligne est une autre raison de la montée des webzines.

#7 Grâce à vos différents travaux (Fashion designer dans les années 80, rédactrice de mode pour les magazines Vogue.fr ou Joyce, Hyères depuis 2002 etc..), vous êtes devenue une référence mais n’était-ce pas trop difficile au commencement ? Avez-vous utilisé vos contacts pour y arriver ? ... Les trois premières années étaient difficiles. Je n’exagérerai pas de dire que parfois c’était l’enfer. J’étais choquée de voir comme tout prend du temps à faire ici, et aussi les gens à Paris sont vraiment fermés aux étrangers. Même si j’ai toujours été invitée à des dîners, seulement un seul parisien m’a aidé à travailler ici, un ami qui travaillait à Première Vision à l’époque, du nom de Christophe Billet. Je travaillais pour lui en tant que photographe pour ses shows hommes, femmes et enfants. La première fois que je suis venue ici, je ne connaissais qu’une seule personne à Paris, et je ne peux pas dire qu’elle m’ait été d’un grand soutien.

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HUMANITY | INTERVIEW Il n’est jamais facile de tout recommencer, peu importe ce que vous faites, vous avez des factures à payer, donc je travaillais comme costumière, assistante de production à CBC, écrivain, etc… Mais c’est le sacrifice qu’il faut faire quand on décide d’ouvrir un nouveau chapitre dans sa vie. Je suis sûre qu’au bout du compte tout ça m’a servi. C’est le genre de situation qui vous rend plus fort. Au début, quand je n’avais pas beaucoup d’argent, je me suis aussi retrouvée à travailler pendant 6 mois pour une association du nom de Ballade de L’Amour, qui vient en aide aux personnes atteintes par le virus du Sida. Là, j’y ai rencontré beaucoup de gens très intéressants, et d’un point de vue humain c’était très enrichissant car j’avais aussi vu beaucoup de mes amis mourir du Sida à New York.

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HUMANITY | INTERVIEW Quelques-unes de ces personnes que je connais qui sont intéressantes à connaître dans le contexte du business, sont des gens tel qu’Alexander de Betak, Etiennes Russo, Maida, Jerry Stafford.

#8 Afin de mieux connaître votre opinion personnelle sur la Mode, en quoi la mode peut-elle être un Art de nos jours, dans notre société de consommation ? ... La mode peut être un art si vous désirez qu’elle le soit, mais tout doit aussi rester dans le contexte du business. Le styliste qui va pousser les frontières de la création pour convaincre les gens qu’il y a un art derrière tout ça, et en même temps qui va comprendre qu’il y a aussi derrière un business important est pour moi celui qui réussira. Personnellement, je crois en des stylistes tels que Rick Owens ou Haider Ackermann par exemple, car ils ont leurs propres signatures, et cependant continuent à vouloir l’améliorer. Il y a aussi les autres comme Azzedine Alaia et Boudicca qui sont aussi extrêmement talentueux mais qui prennent des chemins plus conventionnels. Pour les nouveaux designers, j’aime la pureté du travail de Fred Butler et d’Aitor Throup.

#9 Pouvez-vous nous dire qui fait partie de votre «everyday team « (équipe de tous les jours) ? Quels sont vos buts pour les prochaines années ? De nouveaux projets ? ... Je ne pourrais pas faire ASVOFF sans l’aide de mes collaborateurs. David Herman est mon coproducteur, Jason Last est mon réalisateur qui m’aide aussi à monter mes films et fait de bons extraits pour ASVOFF. J’ai deux «associés», Aishling Connell et Valentin Jardiner Almodovar ici à Paris. A Londres, Till Janz, Henrik Schneider et Josh, sont mes webdesigners et Robb Young nous aide pour rédiger les documents pour le festival. Je suis en contact permanent avec l’Australie pour ASVOFF ou d’autres villes comme avec Luisa Saenz à Mexico City, ou Akiko Hamaoka à Tokyo, Liza Blakiston pour l’Australie etc. Robin Meason m’aide avec la partie PR du festival. J’ai aussi plus de vingt personnes qui m’aident autour de la planète comme Konstantinos Menelaou à Londres, Philippe Pourashemi à Bruxelles, Marcelo à Alsterdam, Enrique Gonzalez à Mexico city… Mon but pour les années à venir est d’élargir mon festival, de construire un cadre solide, de le rendre plus important. C’est ma principale priorité. Même si le blog est aussi très important, c’est quelque chose de plus organique. Le festival requiert plus d’attention, de préparation. Je veux que ce festival grandisse dans toutes les directions, qu’il n’ait pas de limites, que l’on puisse le visionner à Paris mais aussi à travers le monde entier grâce aux satellites. La continuité est la clef du succès, mais aussi le talent de chacune de mes équipes, de là ou j’ai des partenaires et d’autres lieux où j’aimerais en avoir là ou ASVOFF, là où il n’existe pas encore.

ASVOF.COM ASVOFF.COM Erik RAYNAL traduit de l’anglais par Sidonie KOCH

PHOTOS © OLIMPIA SOHEVE

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ALONE

IN INDIA

FLAVIE TRICHET LESPAGNOL « Une fois par an, je pars. Je pars loin et je pars seule. Si jour après jour à Paris mes images tournent autour des personnes, des modèles et de la vie, dès que je la quitte pour ces voyages en solitaire, il n’y a plus rien d’autre que le paysage. C’est deux opposés dans mon travail sont mon équilibre. En Nouvelle-Zélande, réaliser des images sans âme humaine était facile tant le pays est sous peuplé. Mais, quand on arrive en Inde où plus d’un milliard de personnes y respirent chaque jour, la tache est plus complexe. Pour MKR je livre un extrait de ma futur série Alone in India. »











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L’ MAGERIE NFERNALE

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sa figure sera prohibée dans l’art religieux après le Concile de Trente en 1545. La figure de l’Antéchrist a également inspiré de nombreux artistes. Il incarne la figure de l’Etre perdu, l’Homme du péché. Il est un imposteur, adversaire de l’Eglise et de Jésus Christ, s’annonçant comme le messie à la fin des temps. Il symbolise la négation de la foi chrétienne car Fils de la perdition, il est «l’adversaire qui s’élève au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu, ou qui est adoré, jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, se faisant lui-même passer pour Dieu... Et alors se manifestera cet impie que le Seigneur Jésus tuera par un souffle de sa bouche, et qu’il détruira par la lueur de son avènement. L’avènement (de cet impie) aura lieu selon la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs, et avec toutes les séductions de l’iniquité pour ceux qui périssent, parce qu’ils n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés. C’est pourquoi Dieu leur enverra une puissance d’égarement, pour qu’ils croient au Apocalypse flamande vers 1400 Le Dragon, la Bête à sept têtes sortant de la mer et le faux prophète

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a mort est dans l’imaginaire commun le tombeau de pensées et fantasmes multiples sur la représentation et les symboles que l’on se fait d’un après, d’un ailleurs. Le lieu infernal de l’enfer suppose toute une iconographie particulière et spécifique sur ce monde extérieur que serait le feu éternel. Cette dualité entre un paradis céleste et un enfer démoniaque revoit à de nombreuses oppositions que sont le jour et la nuit, le clair et l’obscur ou encore la figure d’anges ou de démons. De nombreuses images de l’étrange et de l’horreur apparaissent dans le répertoire iconographique des arts depuis la nuit des temps et particulièrement sous l’influence de la tradition judéo-chrétienne. L’iconographie occidentale d’êtres incarnés est notamment le fruit du travail de philosophes, théologiens, encyclopédistes, peintres qui ont permis au cours des Ages à ce que l’imaginaire monstrueux demeure dans l’inconscient collectif tel la

menace d’un monde apocalyptique. La littérature apocalyptique et notamment l’Apocalypse selon Saint Jean apparaît comme un texte prophétique sur la fin des temps et révèle la lutte du Bien contre le Mal. La peur de forces démoniaques s’est construite iconographiquement dès le Moyen-Age autour de la figure de la Bête de l’Apocalypse et du Dragon. Décrite comme ayant «dix cornes et sept têtes; elle portait sur les cornes dix diadèmes et, sur les têtes, des titres blasphématoires. Elle avait l’allure d’une panthère , les pattes d’un ours et la gueule d’un lion, le Dragon lui conféra sa puissance, son trône et une grande autorité», la bête fut représentée par de nombreux artistes tel que Giusto de’ Menabuoi dans la fresque de Padoue au XIVème siècle «La bête à sept têtes sortant de la mer» ou encore sur des enluminures de parchemins tel que «Le Dragon, la Bête à sept têtes sortant de la mer et le faux prophète» (Apocalypse flamande vers 1400). Cependant, la figure du monstre va progressivement être considérée comme une provocation à l’ordre et la raison, c’est pourquoi


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Panneau central du triptyque du Jugement dernier (1504-1508) de JÉRÔME

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Fresque de Padoue au XIVème siècle: La bête à sept têtes sortant de la mer de GIUSTO DE MENABUOI

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Le diable tend le livre des vices à Saint Augustin de MICHAEL PACHER

L’illustration de Satan et des Démons tient également une importante place au sein des arts. La figure de Satan va connaître de nombreuses représentations au cours des âges. Dans un premier temps, la forme du serpent est utilisée pour ensuite devenir au Moyen- Âge un monstre terrifiant à trois têtes. Il sera également présenté avec des ailes brisées, symbole de la chute du haut du ciel et orné de cornes. Dans la religion chrétienne, Satan est la source du mal car en tant qu’ange déchu il est l’adversaire de Dieu. Désirant régner sur le ciel, il fut précipité dans les ténèbres. Si sa figure évolue au fil du temps dans les représentations littéraires

et artistiques, l’image du mal se devait d’éveiller effroi et horreur. Les formes de créatures monstrueuses et maléfiques laisseront place, à partir de la Renaissance, à la figure de l’humain dotée d’une beauté troublante. Dans «Le diable tend le livre des vices à Saint Augustin» de Michael Pacher datant de 1455-1498, l’artiste présente le diable comme un monstre ailé où les parties les plus bestiales et les plus viles dominent au détriment de l’âme et de la raison. Cependant, la figure de Satan est le plus souvent accompagnée de celles de démons. Monstres maléfiques, les démons poussent l’homme au mal. Dans la religion chrétienne, ils sont responsables de la tentation de Jésus et de la trahison de Judas. Les attributs bestiaux dont ils sont affublés tendent à illustrer le caractère bestial et cruel de ces êtres démoniaques. Leurs illustrations dans les Beaux-Arts relatent le plus souvent la chute des Anges rebelles, l’Apocalypse, le jugement denier mais également l’enfer et la tentation. Ils apparaissent le plus souvent sous la forme d’une hybridation entre les morphologies humaines et animales. L’œuvre de Jérôme Bosch met en scène des représentations de figures

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monstrueuses construites à partir d’un répertoire bestiale. Dans le panneau central du triptyque du Jugement dernier (1504-1508), de nombreux démons sont représentés, au croisement de ces différentes morphologies mais aussi de machines fantastiques. Les monstruosités anatomiques participent de ce jeu de «monde à l’envers» où les animaux montent les hommes et les chassent. Ce fourmillement démoniaque illustre les supplices et châtiments affligés aux pêcheurs. L’iconographie infernale, apocalyptique et démoniaque a été nourrie par l’imaginaire de nombreux artistes au fil des siècles. La figure de l’Antéchrist, de Satan, des démons mais également des monstres de l’Apocalypse sont autant de symboles et d’allégories de l’effroi suscité par la mort. L’imagerie infernale exalte les visions cauchemardesques d’un audelà chaotique où la souffrance morale et physique est à son paroxysme. Ces douleurs sont l’expérience de l’âme pécheresse et criminelle, condamnée au tourment éternel et infernal.

Marie DE TOUCHET

Prédication de l’Antéchrist de LUCA SIGNORELLI

mensonge, afin que tous ceux qui n’auront pas cru à la vérité, mais qui auront consenti à l’iniquité, soient condamnés. ». (II°Ép. aux Thessaloniciens, II, 3,4,8,9,10,11). Dans la «Prédication de l’Antéchrist» de Luca Signorelli, l’Antéchrist retrouve les traits du Messie mais il est dépourvu de l’auréole avec la croix. Cet imposteur maléfique et malfaisant est l’adversaire du Christ car il est le suppôt de Satan et non le fils de Dieu.


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SUR LE

TARAMA Craignant de sombrer dans la folie, j’ai cherché d’autres preuves de la domination taramesque. Et c’est dans la peinture que la vérité fit surface, chez Francis Bacon, figure à part de l’art du XXème siècle. En effet, beaucoup de ses œuvres semblent empruntées leurs couleurs aux œufs de cabillaud, plus particulièrement dans le panneau central du triptyque de 1972, où ce qui coule de la silhouette difforme, son sang, n’est autre que du tarama. Plusieurs autres artistes

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dans différents domaines semblent avoir compris ce mystère mais sont morts avant d’avoir pu révéler le terrible secret chrétien, parmi eux on compte Jacques Demy, pour les couleurs étrangement évocatrices des robes portées par Catherine Deneuve dans «Les demoiselles de Rochefort», ou encore Pier Paolo Pasolini qui aurait été assassiné pour avoir implicitement révélé la diabolique machination à travers le film Salo… Ainsi sa vengeance se prépare, doucement, secrètement. Chaque fidèle en moins est un nouvel œuf assoiffé de sang dans sa crème, nous épiant à travers des petits pots de plastique gentiment rangés dans nos réfrigérateurs. N’allons point plus avant, il pourrait m’entendre.

Jeremy BENKEMOUN

Les Demoiselles de Rochefort 1969 © PARC FILM, MADELEINE FILMS

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asciné par la couleur presqu’enfantine de cette onctueuse crème d’œufs de cabillaud, j’ai compris en essayant de me renseigner sur le tarama que je touchais du bout du doigt un mystère qui pourrait bouleverser l’humanité entière. En effet que savonsnous vraiment de cet aliment qu’on réduit à un simple apéritif ? Et bien à part qu’il nous vient de Grèce, rien. Décidant de me plonger tout entier dans cette énigme, après avoir passé mes nuits dans des livres culinaire de grand-mère grecque, je découvrais une étrange coïncidence : Jésus Christ aurait été lui-même un gigantesque pot de tarama. Je m’explique, dans un but de communication et de médiatisation de la religion chrétienne, les disciples du tarama ont choisi un acteur afin de personnifier leur

messie. Mais tout s’éclaire quand on voit que le Christ rompt le pain et montre son sang comme du vin. Quel est le médiateur le plus légitime entre du pain et du vin ? Un homme ou du tarama ? Quel repas plus parfait, et donc presque divin, que du tarama étalé sur une bonne baguette le tout sublimé par une bonne bouteille de rouge ?


Triptyque 1972 FRANCIS BACON

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L’HOMME,

Portrait de d’Antonietta Gonsalvus de LAVINIA FONTANA

CETTE BETE IMMONDE

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dans notre imaginaire mais aussi dans la réalité et ses processus de déformation. Le monstre demeure ce qui nous est irrémédiablement inconnu mais aussi terriblement familier en ce qu’il condense notre incompréhension du réel et ses représentations. Le monstre est singulier et organique. Il est l’apparence d’une nouvelle forme, d’une anatomie raisonnablement impossible. Ces monstres artificiels mais

sités mais également des spectacles et divertissements. Les corps extraordinaires ont de tout temps été observés et instrumentalisés. Les nains ont endossés la figure du bouffon ou encore du fou dans les cours royales jusqu’au XVIIIème siècle. Considérés comme des jouets et de véritables attractions vivantes, ils seront finalement délaissés par les cours princières pour se tourner dès le

XIXème siècle au monde du cirque et des foires. Les velus, considérés comme des êtres hybrides mihomme mi-humains, entièrement recouvert de poils, étaient également considérés comme des êtres extraordinaire, objet de toutes les curiosités et peurs. Pendant très longtemps, ils furent considérés comme des monstres naturels du fait de l’intervention du diable ou encore fruit de relation charnelle

Tod Browning entouré de ses freaks sur le tournage de Freaks, La monstrueuse parade

esthétique du monstre renvoi à des formes naturelles connues qui sont l’objet de manipulation et ce, pour créer de nouvelles figures. Le terme monstre vient du latin mostrare, qui signifie avertir, montrer, signaler. Les corps apparaissent démembrés, morcelés, dis-

loqués pour produire une nouvelle forme. Le monstre est la confusion des règnes humains, animal et végétal où l’ordre établi est renversé pour construire une nouvelle esthétique terrifiante et symbolique L’altération d’une forme animale ou humaine connue pour parvenir à la construction d’une entité extraordinaire s’adresse aux angoisses les plus enfouies. . La figure monstrueuse est omniprésente

aussi naturels peuplent les arts et la littérature entre discussions savantes, mises en scène truquées et présages fantasmés. Les anomalies, les prodiges et monstruosités renvoient à la notion de Phénomène. Dès l’âge classique, les singularités et aberrations humaines véritables se développent au sein de l’économie marchande, des cabinets de curio-

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Le particularisme des corps anormaux provoque dans un premier temps des interprétations religieuses. Ces apparences bestiales sont perçues comme le signe d’un avilissement moral mais aussi comme la dégradation de l’Homme en ce que sa monstruosité est le signe d’un châtiment divin. L’homme monstrueux suscite à la fois l’amusement et la crainte. Une approche scientifique va progressivement venir se substituer avec des traités médicaux et également une approche mercantile du monstrueux humain avec des mu-

sées comme l’American Museum de P.T. Barnum. Mais la recherche de sensationnalisme d’une humanité monstrueuse et abominable va prendre le pas dans un premier temps sur l’explication scientifique et trouve refuge dans les marchés, foires et cirques notamment au XIXème siècle. L’humain spécimen devient dès lors une attraction où l’homme est l’animal offrant le spectacle de la différence et de la dissemblance. Considéré comme choquants, ces spectacles ont été interdits en Europe au XXème siècle. Cependant, certaines malformations demeurent célèbres comme Joseph Merrick surnommé Elephant Man, Fédor Machnov qui mesurait 2,82m pour 178 Kg, les frères siamois Giovanni et Giacomo Tocci qui partagaient le même corps en dessous de la taille ou encore Isaas Spragues qui se met subitement à maigrir à l’âge de dix ans pour ne peser plus que 20kg

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tout en ayant une taille normale. Les anomalies humaines ont fait l’objet de nombreuses représentations artistiques au cours des siècles comme «Le nain Morgante» d’Agnolo Bronzino vers 1550 ou encore le «Portrait de d’Antonietta Gonsalvus» vers 1594-1595 (jeune fille souffrant d’hypertrichosis universelle, maladie recouvrant tous le corps de poils à l’exception des mains) de Lavinia Fontana. Mais c’est notamment par le biais de cartes postales publiées en masse, des affiches de spectacles et le développement de la photographie que la diffusion ainsi que la commercialisation des phénomènes humains va largement se développer tout au long du XIXème siècle. L’industrie cinématographique va également s’emparer de la figure du monstrueux comme nouvelle esthétique mais également comme manifeste de la cruauté liée à la complaisance versée dans

Elephant Man 1980 © BROOKSFILMS

entre l’humain et le règne animal. Si au cours du XVI et XVIIème siècles, les souverains s’attachèrent leurs services, ils devinrent au cours du XIX siècle, des monstres de foire et de zoos humains. Les femmes à barbe s’exhibèrent également au sein de ces foires et cirques où la virilité de ces femmes suscita à la fois fascination et dégoût.


Le nain Morgante d’AGNOLO BRONZINO

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le spectacle de la monstruosité. Le film américain «Freaks», La monstrueuse parade, de Tod Browning en 1932 met en scène des personnages dotés de malformations physiques où l’histoire se déroule dans le cirque Tetrallini en tournée à travers l’Europe. Hans, un lilliputien tombe amoureux de la belle trapéziste Cléopâtre. Celle-ci l’épouse dans le seul but de toucher son héritage. Mais enivrée, elle dévoile son mépris pour les freaks (monstres) et sera transformée en l’un d’eux. La plupart des freaks du film étaient de véritables professionnels du spectacle et du divertissement, certains travaillant même dans le

cirque de Barnum. A sa sortie, le film fut un échec total mais inspirera de nombreux réalisateurs et notamment David Lynch. Elephant man, sorti en 1980, est une adaptation romancée de la vie de Joseph Merrick et porte là aussi sur la définition de l’humain et son acception sociale. Car l’homme monstrueux, cette bête immonde est avant tout une construction sociale que l’on se fait de l’extraordinaire et de l’abominable. La représentation et la perception du corps humain est le vecteur de tous les fantasmes et épouvantes en ce que son anor-

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malité nourrissait la tradition des spectacles et carnavals de monstres. Si l’explication scientifique a permis de dépasser le déchiffrement mystique et la marchandisation des êtres anormaux, la figure et l’esthétique du monstrueux demeurent un répertoire de prédilection des arts et de la littérature en ce que le merveilleux, le sensationnel et l’étrange contribue au déploiement de l’imaginaire et de la création.

Marie DE TOUCHET


Les Levres Rouges 1971

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LE SANG . Comme le monde a ses fleuves, l’homme a ses veines, et voilà que Moïse transforme l’eau en sang. Comment ne pas les associer après tout, Victor Hugo dit « le sang se lave avec des larmes ». Dans une période classique, le théâtre jamais ne le montre et pourtant il est partout, à chaque tragédie dans l’amour et la mort, chez Phèdre où la passion « n’est plus une ardeur dans ses veines cachées, c’est Vénus toute entière à sa proie attachée ». Il coule avec l’onctuosité des sirops. Michel Cazenave écrit « la liberté a souvent les mains rouges de sang », en effet une révolution réussit rarement sans écouler la vie de l’oppresseur. Et quand le diable entrait en l’homme c’est par des

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saignées qu’on voulait l’extraire. Les veines sur les avants bras, les mains, beaucoup y voit la beauté. Et sous un cadavre blessé, le sang s’étale lentement comme pour l’honorer une dernière fois afin que le mort soit retrouvé sur un fond de carmin brillant pareil à nul autre. Dans des films gores, est-ce la peur ou la peau qui compte ? Certainement les deux, mais c’est l’étalage de chair, les effusions de sang qu’on regarde avec dégoût mais les yeux ne se décrochent pas pour autant de l’écran. Voilà, voilà.

Jeremy BENKEMOUN

Les Prédateurs 1983 © MISSION DISTRIBUTION

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’est drôle de voir combien le sang fascine. Tout ce qui a sa couleur est aussi amour, aussi danger, aussi violence… Il est ainsi associé à la beauté, il donne la beauté, rajeunit dans les légendes, on invente les vampires, ils sont beaux, ils sont mortifères, il faudrait voir Les Lèvres Rouges de Harry Kümel pour la beauté de Delphine Seyrig ou Deneuve dans Les Prédateurs (avec David Bowie et Susan sarandon). Il est dans tout ce qui excite, sa couleur sur les lèvres, les sexes rougissants. Il a longtemps était inclus dans les distinctions sociales, le sang comme noblesse de l’homme ou comme misère, il se disait que les rois avaient le sang bleu, on le trouve dans les proverbes comme

« un bon sang ne saurait mentir ».


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MY SHADED VIEW pierre antoine irasque Dans «La Jetée» de Chris Marker, son photo-roman commence par cette phrase : «Ceci est l’histoire d’un homme marqué par une image d’enfance». Cette vidéo, je l’ai faite avec les souvenirs d’un passé qu’il n’était pas directement le mieux mais dont la dissolution devait se faire en moi: //ELLE ARRIVENT/ETENDS-TU LEURS CHANTS/ELLE CRIENT AU LOIN/J’AI ENVIE DE PARTIR/TOUT CELA VA AU DELA/UNE VAGUE OU UNE METAMORPHOSE/ UN RITE ET LES VOILA/TU NE PEUX PAS LEURS ECHAPPER/ELLES SENTENT LA CHAIR EN DECOMPOSITION/TU REVES D’ELLES MALGRÉ LE JOUR/C’EST BIEN NORMAL/UN GESTE ET ELLES LE SENTENT/ENSEMBLE NOUS BOUGEONS/DAMNÉ PAR LA SOIF/VIOLENCE FOETAL DUE AU COMMENCEMENT/TU DEVRAS DORMIR SANS SOMMEIL/VOILA L’AFFAIRE FAITE/ELLES ETAIENT DEJA A SALEM/NOUS SOMMES TOUS NÉS BIEN AVANT/MAIS TOUT ÉTAIT DEJA ECRIS SUR LA PEAU/UN TROU DANS LE VENTRE/NOUS AVONS GOBÉ LE MONDE/LES PECHES POUR HERITAGE/ELLES ARRIVENT EN NOUS/CETTE FOIS/UNE DE PLUS EN CHACUN D’EUX/RIEN NE PEUT PLUS ETRE AUJOURD’HUI/TROP TARD POUR DANSER/UN MILIEU DE NUIT SANS NUAGES/LES CHANTS MONTENT DANS LES GRADINS/MEME LA HONTE FLETRIS DEVANT ELLES/LA POUSSIÈRE S’ENVOLENT ET JE DORS POUR OUBLIER/AUCUNE CHANCE D’OUVRIR LES YEUX/LE PREMIER CRIE EST DEJA PASSÉ/C’EST LE CHANT DU VENT/POURQUOI CRIS-TU TA FUITE/IL SIFFLE DEVANT NOUS/ELLES ARRIVENT SANS CRAINTES/LES NUITS SONT FROIDES MAINTENANT/ LE SON DEVIENT GRAVE/IL GELE DEVANT MOI/LA NATURE PART/JE RESTE AVEC VOUS/AI-JE LE CHOIX ? /LE MONDE COMMENCE A CASSÉ/JE NE DANSE PLUS/LA PEAU CREVÉE PAR L’AME/ ELLES SONT ENFIN LA/INVISIBLES BIEN SUR/JE PRIE/ILS PRIENT LA MAIN SUR LE COEUR/NOS VENTRES S’OUVRENT LENTEMENT/ELLES RIGOLENT/LA CHAIR EXPLOSE SOUS L’IMPACT/TOUT SE PASSE BIEN/LES FLAMMES CONSUMENT LE RESTE/VOICI UN CORPS PORTEUR D’ENFER/LA FIERTÉ DANS LEURS YEUX/LA LUNE EST PAISIBLE/JE CROIS QU’ELLE N’EST PAS CE QU’ELLE PRETEND/NOUS SOMMES TOUS RÉUNIS/VOMISSANT NOTRE SIMPLE CORPS/J’AI PEUR DU CHAOS QUI MONTE/J’AI FROIT DEHORS/ILS S’ENIVRENT DES BOUTS DE PRIERES/CROIS-TU QUE LES MOTS SONT ENCORE PRÉSENT DANS CE MONDE/PERSONNE NE M’AIME SAUF TOI/LE SOLIDE N’EST QU’UN MENSONGE/LES SAUVAGES SONT PARTIS D’UN RIEN/ET AU MILIEU UNE PETITE EXPLOSION/LE COEUR FAIBLE DE NE PAS AVOIR EU/LES ATTACHES DIFFICILES/BIEN TROP LIBRE DES MOUVEMENTS DE CHOIX/TU PEUX SAUTER MAINTENANT/PERSONNE NE M’ATTEND EN BAS/LES LACETS DÉFAITS/L’HEURE EST ARRIVÉ TOUT SEUL DANS MA VIE/TOUT EST INSTABLE DANS MON MONDE/LES RACINES SONT TRÉS LOIN/LA PITIÉ A MON VISAGE ET LA SOLITUDE MON PARFUM/JE N’AI JAMAIS SU FAIRE MES LACETS/JE VAIS DECIDER DE VIVRE AILLEURS/TOUT CELA EST FINI/N’EN PARLONS PLUS/DORÉNAVANT JE VAIS DANSER CHEZ TOI/LE COEUR DANS LE SOL/LES PIEDS NUS/JE N’AI PLUS BESOIN DE CHAUSSURES ICI//

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LE CORPS, UNE MISE A MORT

Aktion 2003 HERMANN NITSCH

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i le corps a longtemps été objet de représentation dans l’art, la révolution artistique des années soixante liée aux changements économiques, politiques et sociaux, tend à éprouver le corps dans sa chair et sa réalité. Le corps n’est désormais plus que la simple surface imagée d’une œuvre d’art mais le support de l’intervention artistique et intellectuelle. La dimension corporelle artistique prend désormais tout son sens par l’intervention et l’investissement nouveau de sa matérialité au sein du processus créatif. Le corps va être éprouvé et mortifié pour mieux se révéler à la réalité et l’existence même. La mise à mort de la chair annonce sa vérité et sa substance en ce que l’humanité est meurtrie par un siècle destructeur et barbare. Le siècle impitoyable ne peut ouvrir l’idéalisation d’un monde par l’art mais au contraire intégrer le fait immonde dans la création elle-même. L’angoisse morbide est désormais associée au langage artistique par l’engagement total et définitif de l’artiste. Plus que la représentation qui est exécutée, c’est l’humain lui-même qui au cours de l’histoire a été assassiné. Le traumatisme de deux guerres mondiales place l’idée de mort et de destruction au coeur des préoccupations esthétiques. Dès lors, la certitude de l’existence du corps entraîne l’art du XXème siècle dans l’expression de la vie et de la mort par le mouvement lui-même, la performance et la mise en scène de cette dualité. L’implication de l’artiste tout entier suppose l’engagement de l’esprit mais également du

corps dans la construction d’un art nouveau et véritable. Le corps est désormais un hurlement poussé contre le réel où il est totalement mis à nu et mutilé dans sa chair. La représentation artistique ne permet plus de dire, seule la présentation du corps ouvre le champ du dicible.

De nombreux artistes ont utilisé le corps comme outil et instrument de leurs productions artistiques. L’actionnisme viennois (Wiener Aktionismus 1960 - 1971) est considéré comme le mouvement le plus radical du XXème siècle ayant pour objectif une confrontation directe avec la réalité vécu comme tragique et monstrueuse. Les précurseurs de ce mouvement dont la production artistique est axée sur la pratique du corps sont Günter Brus, Otto Muehl, Hermann Nitsch et Rudolf Schwarzkogler. C’est dès lors la mise à mort des valeurs autrichiennes avec la remise en question

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des relations établis entre psychisme et corps. Otto Muehl affirmera «j’ai plus confiance en mon corps, qu’en n’importe quelle idéologie». L’esthétique n’est plus contemplative mais doit explorer les possibilités plastiques des corps dans le dépassement de ses propres limites. Günter Brus quant à lui considère que «l’homme est une sculpture, recouverte de peau «. L’action collective Kunst und Revolution (art et révolution) du 6 juin 1968 est la manifestation de ce nouvel art qui fera scandale tant par sa radicalité que sa violence. Lors de cette représentation, Günter Brus se déshabilla, se taillada le flanc gauche, bu son urine, se força à vomir, recouvra son corps de ses excréments et se masturba en chantant l’hymne national autrichien. Otto Muehl quant à lui, après avoir lu un texte destructeur et provocant sur Robert Kennedy, fouetta un étudiant masochiste enveloppé dans des feuilles de papier journal. Le corps mutilé, la violence et la notion de rituel sont au cœur du travail de Günter Brus, Muehl travaillant d’avantage sur l’exacerbation des pulsions sexuelles ou l’intégrité du corps est là aussi remise en question. Chez Hermann Nitsch, la thématique religieuse est récurrente avec une œuvre blasphématoire et transgressive dans la mise en scène d’un corps crucifié et sacrifié tandis que Rudolf Schwarzkogler simule par le biais de l’objectif photographique des scènes d’agressions et de mutilations. L’utilisation du corps comme outil de la création mais aussi sujet de l’expression artistique regroupe cependant une grande diversité de pratique sous la dénomination de Body


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untitled, 1962 HERMANN NITSCH

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art ou art corporelle. Si l’actionnisme viennois a ouvert la brèche d’un art tendant à l’exploration du corps et de ses limites, d’autres artistes sont allés tout aussi loin dans l’action créatrice violente et brutale. Dans «Messe pour un corps» en 1969, Michel Journiac, travesti en prêtre, déclame une messe en latin à la galerie Daniel Templon. A la fin de la messe, il propose une eucharistie faite de boudin cuisiné avec son propre sang. Considéré par l’artiste lui-même comme archétype de la création, le sang et l’acte cannibale remplace dès lors la nourriture spirituelle. Carole Schneemann quant à elle dira «Je suis à la fois l’artiste à l’origine de l’image, et l’image même». En 1975, dans «Interior Scroll», elle se tient nue sur une table peignant son corps avec de la boue puis extrayant lentement un papier parchemin de son vagin, en lisant au fur et à mesure ce qui y est écrit. L’artiste et performeur américain David Wojnarowicz s’est cousu les lèvres pour illustrer le slogan d’Act Up

dans sa lutte contre le sida: «Silence = Mort». En 2001, Kelly O’Reilly utilise la métaphore de son corps comme paysage pour représenter l’auto-mutilation et l’empreinte de ses actions. Dans Succour, du ruban adhésif est enroulé autour de son buste et de ses jambes formant un quadrillage. A l’intérieur de chaque carré, elle exécute une incision au scalpel. Une fois le ruban retiré, les incisions forme un motif géométrisé et rationnalisé sur son corps. Le travail de l’artiste Paul McCarthy et notamment ses performances sont en permanence maculés de sauce tomate, chocolat, mayonnaise dans l’imitation permanente de fluide organique. Dans la vidéo Carribean Pirates: Pirates Party (2001-2005), son travail apparaît comme une version «pop art» de l’actionnisme viennois. Dans un bateau, les personnages se masturbent, se barbouillent de sangketchup et d’excrément-chocolats, se mutilent etc... Dès lors, l’action artistique

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1965 RUDOLF SCHWARZKOGLER

Interior scroll

CULTURE | HUMANITY

sur le corps permet l’évacuation d’une souffrance et d’une brutalité monstrueuse contenue dans nos sociétés. Si le corps est mutilé, atrophié, violenté, abîmé, il n’en demeure pas moins sous le contrôle de l’artiste. Le corps nu, la chair meurtrie, la viande consciente est exposée aux yeux de tous dans sa réalité effroyable et effrayée. Le corps n’est désormais plus idéalisé mais révélé dans sa matérialité, où la confrontation physique du spectateur le pousse non seulement à la remise en cause d’un cadre artistique et de ses limites artistique mais aussi à celle de nos sociétés.

Marie DE TOUCHET


Aktion 2003 HERMANN NITSCH

Kunst und revolution SIEGFRIED KLEIN

Caribbean Pirates 2001-2005 ANN-MARIE ROUNKLE

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CINEMA Rosemary’s baby 1968 © PARAMOUNT

SÉLECTION

FILMS

Jerémy BENKEMOUN Marie DE TOUCHET

ROSEMARY’S BABY (1968) de Roman Polanski

Rosemary’s Baby est sorti en salle en 1968 et est considéré comme l’un des films les plus effrayants de Roman Polanski. Un jeune couple, les Woodhouse, décide d’emménager dans un vieil immeuble new-yorkais malgré la mise en garde d’un ami proche, Hutch, ayant un mauvais pressentiment. Guy Woodhouse, jeune acteur, et sa femme Rosemary rencontrent dès leur arrivée un vieux couple natif d’Europe centrale, Minie et Roman Castevet. Ces derniers vont très rapidement devenir envahissants et proposer leurs services de manière incessante. Exubérants, pressants et indiscrets, la rencontre avec ce couple va étrangement coïncider avec des perspectives professionnelles pour Guy et une grossesse de plus en plus difficile pour Rosemary. En effet, sous les conseils des Castevet, cette dernière commence un traitement original prescrit par un gynécologue, ami du vieux couple, à base de plantes que lui concocte Minie, ce qui lui occasionne de violentes douleurs. Hutch, peu de temps avant de mourir, lui révélera que Roman Castevet n’est autre que le fils d’un sorcier qui fût massacré par la foule dans ce même immeuble. Effrayée, Rosemary commence à enquêter sur ses mystérieux voisins et découvre que ces derniers sont les meneurs d’une confrérie satanique et les soupçonne d’en vouloir à son bébé en vue d’un sacrifice pour Satan. Cependant, elle ne parvient pas à convaincre ni son mari, ni le premier médecin qui s’occupait de sa grossesse. A la fin, elle découvre qu’elle s’était trompé à propos des intentions des Castevets et que la vérité est encore bien plus terrifiante: l’enfant qu’elle porte en elle n’est autre que l’enfant de Satan lui même. Dans ce film, la peur n’est autre qu’un murmure, insidieux qui tout au long du film s’engouffre dans la vie de Rosemary pour mieux l’étreindre et l’enserrer. L’épure du film tient d’une berceuse et d’une lumière douce qui décuple l’inquiétude et le malaise tout au long du film. Entre paranoïa féminine et angoisse suffocante causées par un véritable complot, le film contraste avec l’absence de toute imagerie gothique ou procédés habituels du film d’horreur. La tension psychologique tient de la banalité des situations et des personnages et le fantastique n’est autre que la suggestion progressive de l’horreur grandissante.

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CULTURE | CINEMA BRAINDEAD (1992) de Peter Jackson

© TRIMARK PICTURES

Lionel est un peu coincé, en même temps sa mère est plus intimidante et tyrannique que le seigneur des ténèbres dans «Taram et le chaudron magique». Mais Lionel rencontre Paquita, il l’aime, ce qui déplaît beaucoup à la marâtre du jeune homme qui se fait, pendant ce temps, mordre par un rat-singe zombie. Se déclenche alors une épidémie qui transforme tout le monde en morts-vivants. Alors dans Braindead, film de Peter Jackson (Créatures célestes, le Seigneur des Anneaux,…) sorti en 1992, ça gicle de partout sauf sur Paquita, pourtant même les zombies forniquent et mettent bas. Ce film parodique est certainement le plus drôle, le plus ironique et le plus sanglant des longs-métrages gores jamais parus, et Peter Jackson l’exploite merveilleusement bien, si bien d’ailleurs que même la bande annonce est drôle. Une pièce maîtresse dans le genre, et une nouvelle démonstration du talent de Peter Jackson qui prouve qu’il peut exceller dans tous les genres.

MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE (1974) de Tobe Hooper

© BRYANSTON DISTRIBUTING COMPANY

La construction du décor, la photographie, les plans qui permettent la peur font de ce long-métrage une oeuvre d’art à part entière. La famille de psychopathes montrée ici et tous les crimes relatés s’inspirent de manière très libre du tueur Ed Gein qui profanait des tombes et tuait des femmes pour se construire ensuite des objets diverses en peau humaine tel qu’un manteau, un abat-jour, des draps etc. Le film a eu plusieurs suites, jamais réalisées par Tobe Hooper, et bien moins bonnes que ce classique du cinéma. Très encensé à cause de la censure dont il a fait l’objet, le film ne sortira qu’en 1982 en France, 1996 en Finlande et 1999 au Royaume Uni.

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PEUR(S) DU NOIR CHARLES BURNS

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Peur(s) du noir 1995 © PRIMA LINEA PRODUCTIONS

« raphiste, dessinateur et illustrateur de la scène alternative américaine, Charles Burns est un des grands maitres de la BD de sa génération. Son graphisme hyper stylisé, mêle le macabre à l’humour noir, perpétuant la grande tradition des bandes dessinées EC Comics des années 50. L’univers qu’il crée nous téléporte dans un monde sombre, crue, où la frontière entre les humains et les Freaks a disparu. En 1995, Charles Burns entreprend ce qui sera son plus gros défie au travers d’une œuvre intitulée Black Hole, où il dépeint dans cette série de BD, le portrait psychologique d’une adolescence en pleine puberté, exhortant les tribulations d’une génération perdue. Comme le dis précisément son auteur «Il s’agit moins d’une transformation que de la manifestation d’un état psychique qui prend des proportions physiques». Cet artiste mène une carrière éclectique au travers de BD, de Cover de magazines ou de pochettes d’album. Mais c’est à partir des années 2000 qu’il décide de collaborer avec cinq artistes-dessinateurs autour du projet commun d’un film d’animation intitulé Peur du Noir(s), sorti en salles en 2008 et réunissant six histoires autour des thèmes de la peur et de l’angoisse. Dans cet article, j’ai décidé de façon arbitraire de choisir de me focaliser uniquement sur le travail de Charles Burns qui est assurément une porte d’entrée à l’appréciation globale de ce long métrage animé. Dès la première scène,

nous entrons immédiatement dans l’univers de l’artiste au travers d’un très gros plan en noir et blanc à la touche acérée, exemple parfait de sa pâte graphique: Un homme alité regarde par la fenêtre et commence à nous transporter dans le flashback du récit de sa vie (enfance, adolescence, vie de couple). Eric est un enfant comme tous les autres, à peu de chose près qu’il aime rapporter chez lui des insectes trouvés dans la forêt pour les disséquer. Un soir, un insecte s’échappe de son bocal et Eric entendra tout au long de son adolescence : « un truc qui gigote et gratouille, là tout au fond de mon lit ». Pour ses études, il décide de déménager, apportant avec lui, son lit d’enfance dans son nouvel appartement. Adolescent solitaire, son isolement lui pose des problèmes d’intégration notamment avec le sexe opposé. Or, après avoir passé une nuit avec Laura une fille de son cours de biologie, ils décident de sortir ensemble jusqu’au moment où elle commence à changer radicalement de comportement. Ce projet est une œuvre esthétique et psychologique ou Charles Burns n’est pas très éloigné du personnage de son court métrage. L’auteur, à la manière d’un test de Rorschach, nous invite à découvrir cet univers ciselé entre réel et irréel, rêve et cauchemar, ou Eric cherche sa place dans les ombres de son passé. Dans l’œuvre du dessinateur, l’univers de la forêt a toujours été un élément essentiel dans le récit de ses aventures; Théâtre des transformations humaines pour une génération reclus, la nature est une terre d’exil pour ces adolescents qui ne sont plus reconnus. Ses ballades

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dans la forêt à la recherche d’insectes, traduisent le tiraillement des phénomènes intérieurs et extérieurs de cette période de sa vie. En outre quant à lui, Eric est attiré et fasciné par ces insectes difformes et isolés, qui le réconfortent comme un miroir psychologique qu’il étudie pour mieux comprendre sa personne. Sous les traits de cette allégorie, ces Freaks symbolisent aussi l’évolution, la mutation d’un adolescent en homme. Ils exorcisent les émotions qui gravitent autour de la puberté, plus que l’esprit c’est le corps qui change, se transforme, s’émancipe, pouvant faire échos au texte La Métamorphose de Franz Kafka, où le personnage principal se libère du carcan familial en se transformant en cancrelat. En parallèle, Eric est torturé par un sentiment inverse qui découle dans son comportement par un besoin de sécurité, illustré par son attachement à son lit, symbole d’un « ça » ou l’innocence de son enfance le protéger des vérités humaines. Il recherche à travers cela, un certain état fœtal où il serait toujours lié à sa mère dans la moiteur de son lit amniotique. Son rapport aux femmes est un problème récurrent qui suit Eric de la même manière/façon qu’il transporte son lit d’enfance. Même si la situation est évoquée à demimot, Eric semble avoir une relation difficile avec sa mère, absente et sévère qui fait figure tout au long du récit d’un spectre dans l’ombre de ses problèmes avec les femmes. Lors de sa première expérience sexuelle, il découvre une entaille sur la main de Laura, dessein de cette de virginité envolée, illustrant cet acte autant psychologique que physique. De la même manière que ce déflorage,


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Laura perd aussi une certaine innocence en se transformant en dominatrice, allant jusqu’à endosser les attributs masculins et jouer le rôle de l’homme, comme si son état psychologique influençait son aspect physique. Eric est ligoté, perdu et dépossédé de son rôle de mâle actif, face à ses femmes castratrices qui le mutilent et le relègue au banc de simple reproducteur (N’hésitez pas à lire le SCUM MANIFESTO où Valérie Solannas les castre «littéralement»). Eric qui n’a pas réglé ses problèmes avec sa mère, est poursuivi

par cette absence maternelle au travers des femmes de sa vie, pour appréhender son rôle d’ « homme » parmi ces dames. Ce court métrage de Charles Burns semble être une catharsis animé (en 3D), rempli des trous noirs de sa vie passée où les spectateurs peuvent inconsciemment aborder les questions qui découlent de l’évolution de l’homme et de la remise en cause des establishments masculins dans la société, face à une recherche d’égalité des femmes. Un autre célèbre illustrateur américain, Robert Crumb, dont la rétrospective a été présentée durant l’été 2012 au Musée D’art Moderne

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de la ville de Paris, nous donne l’occasion de découvrir une œuvre également hantée par les femmes, et par cette même incompréhension qu’elles suscitent chez l’homme.

COURT METRAGE

Pierre Antoine IRASQUE


L’exorciste 1973 © WARNER BROS. INC.

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Une Nuit Avec

WILLIAM FRIEDKIN L’EXORCISTE - 1973 WILLIAM FRIEDKIN

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a venue de William Friedkin à paris pour la quatrième édition de «La nuit de la peur» en a fait un événement à ne pas manquer. Cette projection plus ou moins privée de L’Exorciste, organisée dans le cinéma l’arlequin à Saint-Sulpice, s’est suivie de la diffusion de trois autres films d’horreur : Amer, The woman et Dead heads. De quoi ravir tous les amateurs du film de genre. William Friekdin a offert à ses spectateurs une présentation d’une heure. Une présentation brillante, drôle mais aussi inquiétante qu’il parsème d’anecdotes à la fois mystiques et scientifiques. Il rappelle par exemple que L’exorciste est inspiré d’un fait divers. Le film raconte l’un des trois cas de possession reconnus par l’église

Au XXème siècle. La Georgetown University de Washinton DC ne lui a montré les images de ce cas de possession seulement après avoir terminé son film. Le jeune homme à qui est arrivé cette histoire est toujours vivant mais n’a aucun souvenir de ce qui lui est arrivé lorsqu’il avait 14 ans. Il n’y a pas d’explication scientifique sur ce cas pour l’instant. William Friedkin avoue alors qu’il croit luimême en la possession démoniaque et qu’il a fait l’exorciste dans le but que le public y croit également. Il ne considère pas son film comme un film d’horreur mais comme un film sur le mystère de la foi. William Friedkin a parfaitement su mettre en condition le public. Après quelques autres histoires sur le saint suaire et sur l’église catholique, le spectateur, dans une angoisse à peine avouée, n’a qu’une seule envie : que la séance commence. Si L’exorciste est aujourd’hui un des films d’horreur les plus

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connus, les plus vus, les plus commentés, ce n’est pas seulement pour le scandale qu’il a entraîné à sa sortie, c’est aussi parce que c’est un film qui sait faire preuve d’innovation et de réelle créativité. La première partie du film est consacrée à la libération du mal et à son introduction dans le monde « humain ». Le diable s’immisce peu à peu en Regan, la jeune fille qui sera possédée, tout comme il s’immisce dans le film en lui-même. Les inserts très rapides, les images subliminales, la surimpression du visage du dieu maléfique Pazuzu sur la hotte de la cuisine ; le mal se glisse entre les plans, dans les raccords, dans les travellings, dans ce qui se rattache pratiquement à l’invisible du film. Ce qui maintient une tension constante, un suspens, et finalement, ce qui nous effraie réellement, c’est cette présence. Une présence invisible mais qui se propage partout, tout le temps et qui peu à peu prend de plus en plus de place, contamine toutes les scènes.


CULTURE | CINEMA La seconde partie relate la perte de l’humanité de Regan, sa possession et l’exorcisme en luimême. Bien entendu, les effets spéciaux et le maquillage est un peu vieillot et ce n’est pas ce qu’il y a de plus impressionnant. Il est surprenant de voir que ce qui fait sursauter dans le film, ce n’est ni le moment où Regan dévale les escaliers en faisant le pont, ni celui où elle tourne sa tête à 360°, mais ce sont des petites scènes inattendues : la sonnerie d’un téléphone par exemple. Car le travail du son dans L’exorciste est minutieux et original. Le hors champ prend une importance capitale et c’est ce qui permet notamment de maintenir cette tension présente jusqu’à la fin du film.

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KILLER JOE - 2012

WILLIAM FRIEDKIN

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l est étonnant de voir que pendant «La nuit de la peur», William Friedkin, à aucun moment,

n’a tenté de faire la promotion de son dernier film : Killer Joe. Sorti dans les salles françaises le 5 septembre, Killer Joe raconte l’histoire d’un jeune garçon qui décide d’engager un tueur à gages pour tuer sa mère, toucher son assurance-vie et rembourser ainsi ses dettes. On retrouve le même principe que dans l’Exorciste, celui d’installer le mal petit à petit au fur et à mesure du film. Ici, plus que le mal c’est de la violence dont il s’agit. La brutalité du tueur Joe Cooper progresse lentement. Mais plus le plan du jeune héros de l’histoire, Chris, ne se déroule pas comme prévu, plus l’agressivité et la sauvagerie apparaît dans le film. Tout le film est marqué par une profondeur de champ quasi inexistante. Les arrières-plans ne sont souvent que des tâches de couleurs floues qui enferment les personnages dans leur petite histoire sordide.

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On notera la confrontation entre Joe et Dottie, la jeune sœur de Chris interprétée par Juno Temple qui est confiée malgré elle au tueur. C’est cette relation qui donne le réel intérêt du film, cette opposition extrême – d’ailleurs soulignée par les jeux de lumières – entre une jeune ingénue et un monstre. Ces personnages que tout éloigne, vont néanmoins tomber dans une ambiguïté fascinante qui débouchera sur une explosion de violence à la fin du film.

Pablo ALBANDEA

AMER – 2009

HÉLÈNE CATTET ET BRUNO FORZANI Projeté à «La nuit de la peur» à l’instar de L’exorciste, Amer est un film atypique, à la limite de l’expérimental. Véritable hommage aux gialli italiens et au cinéma de Dario Argento, Amer décide de transgresser ce genre des années 60 avec un regard novateur. Ces deux jeunes réalisateurs reprennent les codes de ce cinéma d’autrefois pour créer une œuvre nouvelle et hors des sentiers battus du cinéma d’aujourd’hui. Le film décortique trois épisodes traumatisants de la vie d’une femme. On ressent un désir exhaustif de capter toutes émotions, les gestes en ralentissant considérablement le temps. On pourrait néanmoins reprocher à Amer son côté trop « esthétisant » qui parfois plonge le film dans une impression de long exercice cinématographique.


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© JOS VANDERVELDEN

MUSIQUE - CULTURE -


CULTURE | MUSIQUE

THE STOOGES WE WILL FALL

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e premier album des Stooges intitulé simplement The Stooges est sorti sous le label Elektra Records en 1969. Fraîchement expulsé du mythique Velvet Underground, John Cale décide de produire le disque de ce groupe encore peu connu. Dans la face A du vinyl se trouve 1969, chanson hargneuse au son indubitablement rock. Fait suite à cela le grand succès du groupe I Wanna Be Your Dog et en troisième et dernière place vient We Will Fall, titre malheureusement lésiné qui, je l’accorde, jure avec le reste de l’album mais qui a le mérite d’être original (car inattendu), ce pourquoi mon coup de coeur cette fois porte sur ce monstre du psychédélisme. DÈS LE DÉBUT DE LA CHANSON, L’ATMOSPHÈRE PESANTE EST EXHIBÉE. En premier lieu, le violon lancinant de John Cale, en guest sur cette chanson, se fait traînant. Scott Asheton, de sa percussion claire qui parfois pourrait faire croire à un simple claquement de mains, bat la mesure en écho.

D’un même pas entrent Dave Alexander et Ron Asheton. Branché à une pédale Wah Wah, ce dernier lance dans l’air de douces «phrases», que je suppute improvisées pour certaines. Quant à l’autre homme, c’est une basse bien ronde qu’il offre à nos oreilles. Puis viennent les chœurs graves, tonnant inlassablement un «Oh gi ran ja ran ja ja ran» - qui n’est pas sans rappeler le support de méditation indien Om Shri ram jai ram jai jai ram - pénétrant si aisément notre cerveau que le sens qui nous échappe n’a plus aucune espèce d’importance. Afin que l’homogénéisation soit complète, Iggy commence de sa voix assurée et maîtrisée avec les paroles «Tonight/I’ll hold myself tight/I won’t fight» ce qui porte assurément l’osmose musicale des cinq hommes à son apogée. La patte de John Cale est facilement reconnaissable sur cette chanson. Le multi-instrumentaliste, fraîchement expulsé de The Velvet Underground n’a pas fauté en produisant ce court album éponyme de seulement 34 minutes. 29,4 pour cent de l’album est donc consacré au titre We Will Fall qui pourtant ne devait initialement pas apparaître sur le tracklist de l‘album. Bien que durant ces dix minutes envoûtantes aucune progression n’est concrètement engagée, une

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intensité pure grandit d’elle-même au fur et à mesure, et à huit minutes et vingt-six secondes exactement, le violon de Cale, devenu distord et poétique, sort de l’arrière-plan et conduit la chanson à une fin pouvant être ressentie comme tragique. Nous tomberons donc. De façon mitigée, cette chanson peut se dévoiler à nous comme une marche funèbre, une longue méditation, ou une ode à je ne sais quelle substance chimique ou naturelle. Les interprétations forcément divergent. Après lecture des paroles, on retient qu’Iggy, se tenant tranquille dans un hôtel, invite quelqu’un chambre 121 pour l’aimer et ce jusqu’à 6 heures et à cette heure, il lui dira maintes fois «goodbye», sous le violon distord de celui qui a contribué à ce que cette chanson soit commercialisée.

Wendy NAETONG


INTERVIEW MKR -

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HUMANITY | INTERVIEW

SKUNK ANANSIE Skunk Anansie est un groupe phare de la scène fusion britannique des années 90 qui a su faire émerger le rock alternatif. La chanteuse, Deborah Dyer aka Skin, au crâne rasé, est l’une des chanteuses les plus connue et respectée du milieu, féministe et anti-raciste elle est aujourd’hui une icône.

Leurs deux premiers albums «Paranoid And Sunburnt» et «Stoosh» furent disques de platine au Royaume-Uni et le troisième «Post Orgasmic Chill», disque d’or, marqua l’apogée du groupe à la fin des années 90. Les titres tels que «Hedonism» ou «Selling Jesus» deviennent des classiques instantanés grâce à leur puissance irréelle. Le groupe décide de se séparer en 2001, chacun des membres se lança alors dans des projets personnels; Skin sortit deux albums qui ont déroutés la plupart des fans de Skunk Anansie. Six ans après le groupe revient sur scène et sort une compilation appelée «Smashes and Trashes» et part alors en tournée, celle-ci fût un véritable succès et annonce le grand come-back tant attendu. Skunk Anansie continue alors dans sa lancée et participe à la bande originale du film Sucker Punch et sort en 2010 son cinquième album «Wonderlustre». Le groupe est de retour cette année avec «Black Traffic» sorti sous son propre label indépendant, Veryrecords, et entamera une tournée européenne dès le mois de Novembre 2012 et sera en concert au Zénith de Paris le 24 Novembre.

#1 Vous revenez cette année avec «Black Traffic». Un album très puissant et engagé. D’après vous quelle chanson caractérise le mieux l’album ? --- Skin: Je pense que c’est «This is not a game», c’est une chanson très touchante. Je pense qu’elle caractérise bien ce sentiment de déception et désespoir. >>>

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HUMANITY | INTERVIEW #2 Votre premier album est sorti il y a maintenant 18 ans. Votre énergie et votre créativité sont toujours aussi présente mais vous avez eu un break il y a quelques années, qu’avez-vous appris de cette pause ? Vos relations ont-elles changées ? --- Skin: Oui en effet nos relations ont radicalement changé. --- Mark: Je pense qu’en étant séparés, nous avons réalisé l’importance de Skunk Anansie dans notre vie. Nous avons fait différentes choses lors de notre carrière, mais personnellement j’ai réalisé que nous apprenons beaucoup plus sur nous quand nous sommes ensemble. --- Skin: Pendant des semaines nous nous concentrons ensemble sur les compositions et sur les paroles. Cela apporte un son différent, une énergie différente aux chansons et maintenant nous nous occupons de tout, surtout concernant la tournée. Nous sommes enfin capables de le faire, ce qui nous permet d’apprendre beaucoup plus sur nous et nous d’être plus libre. --- Mark: En fait je pense que nous aurions pu le faire avant. --- Skin: Nous aurions pu oui mais nous n’aurions plus eu d’argent (rires). Avant nous aurions eu besoin de 20 personnes, tout se faisait par téléphone, alors que maintenant une personne peut tout faire grâce aux ordinateurs.

#3 Vous avez sorti «Black Traffic» sur votre propre label, pourquoi avez-vous fait ce choix ? --- Skin: C’est quelque chose que nous voulions faire depuis les années 90, mais c’était beaucoup trop cher pour nous. Mais nous avons toujours tout fait par nous-même. --- Mark: Oui nous n’avons jamais laissé d’autres personnes changer notre musique ou réécrire les chansons. --- Skin: Oui, nous bookons nous-mêmes le studio et faisons la pré-production ensemble, mais aussi les artwork, la communication, la tournée, le visuel sur scène, le stylisme, etc. Nous voulons réellement tout faire par nous-mêmes, « Wonderlustre» nous a beaucoup aidé par rapport à ça et c’est très important de s’entourer de personnes qui aiment la musique, la comprennent et veulent travailler avec vous. Nous voulons travailler avec des gens qui aiment faire ça, nous avons tous vécu des moments où l’on détestait aller au travail, et nous ne voulons pas mettre les gens dans cette position, nous devrions être tous du même bord.

#4 L’industrie de la musique c’est basiquement, l’argent et l’artistique non ? --- Skin: Nous voulons contrôler les finances et le côté artistique, parce que maintenant les groupes doivent être capables de gérer tout ça. Avant on pouvait être juste créatifs, signer dans un label et avoir beaucoup à faire, alors que maintenant avec la télé réalité, ils veulent des artistes qui ne font rien et se faire de l’argent sur leur dos, donc si tu veux être un groupe tu vas devoir être obligé de compter que sur toi et d’avoir toutes ces compétences parce que tu ne connais pas les différentes facettes du milieu, tu vas facilement être surmené.

#5 Vous avez fait une collaboration avec Shaka Ponk sur «Spit It Out». Comment cela s’est-il passé ? --- Skin: Yeaaahhh ! Nous connaissions Shaka Ponk depuis plusieurs années et nous les avons vu en concert et nous voulions faire une collaboration avec un groupe français, nous n’avions jamais fait cela

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HUMANITY | INTERVIEW

auparavant. Ils avaient une chanson et nous ont donc appelé; nous parlions beaucoup sur skype afin de voir si le feeling passait, parce que nous aurions été incapables de le faire dans le cas contraire. Puis nous avons partagé pleins d’idées, de fichiers, de commentaires; ça a duré plusieurs mois et ensuite nous sommes sorti avec eux et on s’adore.

# 6 Comment s’est passé la réalisation de «Black Traffic» et comment avez-vous évolué ? --- Mark: Nous avons mis plus de temps sur cet album ; l’écriture a duré plus longtemps que d’habitude, à peu près un an, en divers blocs, mais dès que nous sommes rentrés en studio nous avons beaucoup retravaillé les paroles et l’arrangement. En fait, ça a été vraiment déconstruit, puis recomposé. Nous avons rajouté beaucoup de sons électroniques et nous n’avions jamais fait ça avant.

#7 Est-ce dû au fait que maintenant vous gérez tout ? --- Skin: Non je pense qu’il était juste temps de faire les choses différemment. Faire chanson par chanson, et être présent tout le temps. C’était vraiment sympa parce que du coup tout le monde était dans le studio, on sortait, on dinait ensemble, et en fait on s’amusait tout le temps. Et artistiquement çela a été très bon pour moi, parce qu’on discutait beaucoup sur la politique et le marché noir dans le monde et donc j’avais beaucoup plus de choses sur lesquelles écrire. J’écrivais vraiment jusqu’à la dernière minute parce que je réécris tout le temps les chansons, je suis heureuse, et ensuite triste, et de nouveau heureuse etc.

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HUMANITY | INTERVIEW #8 Que pensez-vous de la musique aujourd’hui ? --- Skin: Je pense qu’il y a eu beaucoup de changements, il y a plus d’argent en jeu. Maintenant il y a deux catégories dans l’industrie de la musique, il y a la télé-réalité qui en montre une infime partie et.. le reste. Je ne suis pas là pour les clasher, parce que moi-même je les regarde, c’est vraiment du divertissement et je crois qu’internet nous a donné beaucoup plus de contrôle et de pouvoir sur ce qu’on fait; cela nous permet de toucher des tonnes de personnes instantanément. Normalement nous faisons très peu de pubs à la radio, dans les magazines ou à la télé, parce que c’est très cher. Je pense que l’industrie de la musique est en fait plus fluide maintenant, parce qu’il y a différents moyens de faire les choses. C’est bien dans le sens où dès que tu penses à quelque chose tu peux le faire seul, c’est beaucoup plus créatif.

#9 Que penses-tu des chanteurs maintenant comparé à d’autres tels que Prince ou Madonna ? --- Maintenant les magazines, par exemple, sont généralement plus branchés sur les jeunes. Mais plus tu grandis et plus tu as de l’expérience et c’est important d’apprendre aux plus jeunes, leur permettre de faire avancer les choses. Donc il ne faut pas uniquement se concentrer sur les eux, c’est génial de les encourager mais il faut aussi savoir se servir de l’expérience des plus âgés.

#10 Vous êtes à l’apogée de votre carrière après tant d’années; d’où vous vient cette créativité et cette énergie ? --- Mark: Je pense qu’on retrouve toute notre énergie sur scène, parce que nous faisons ce que nous aimons. Nous aimons la musique, nous aimons le groupe et nous nous aimons. --- Skin: Personnellement, je mets toute mon énergie dans ce que j’aime faire. Si je ne veux pas faire quelque chose, cela va être très compliqué de le faire par exemple.

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HUMANITY | INTERVIEW

#11 Votre tournée commence ce mois-ci et on vous retrouve le 24 Novembre au Zénith de Paris. Comment vous sentez-vous ? --- Mark & Skin: Very excited !! --- Skin: Ça va être notre plus grand show ! C’est vraiment à un autre niveau. --- Mark: On a mis plus de moyens dans tout, donc ça va être une énorme surprise pour le public! --- Skin: Oui, on a mis 6 mois à le préparer.

Lucie TOSSER PHOTOS © PIERRE ET FLORENT

Discographie BLACK TRAFFIC WONDERLUSTRE SMASHES AND TRASHES POST ORGASMIC CHILL STOOSH PARANOID AND SUNBURNT

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TRUST TRUST c’est LA découverte de cette année pour beaucoup d’entre nous. En 2009, Robert Alfons (Jeune homme de 23 ans originaire de Winnipeg) rencontre Maya Popteski (25 ans, percussioniste et batteuse d’Austra). Le groupe fût formé en 2010 et sortit son album appelé «TRST» le 28 Février 2012, dans lequel on retrouve «Bulbform» ou encore «Sulk».

GOTH SYNTH-POP /

/ SENSUAL ACID TRANCE BEATS / / SEXY STRIPPER RECORD / / HOMO-EROTIC / / EARGASM / / LOVE

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#1 TRUST c’est la rencontre de Maya Popteski et toi, comment vous êtes-vous rencontrés et avez-vous décidé de faire de la musique ensemble ? ... Nous nous sommes rencontrés à Toronto, je l’ai vu jouer de la batterie une fois et j’ai voulu qu’elle m’aide à faire de la musique.

#2 Comment as-tu commencé à faire de la musique et quelles sont tes influences ? ... Enfant j’étais inspiré par la collection de CD de ma soeur (tels qu’Ace Of Base, Real McCoy, Technotronic, Whigfield), alors j’ai commencé à créer ma propre musique. Au début je jouais du piano, mais en grandissant je me suis plus concentré sur tout ce qui était électronique. Je pense que c’est là que je me suis réellement intéressé à la musique.

#3 la plaquette de votre EP est fantastique, d’ailleurs nous avons entendu dire que c’est toi qui avais pris la photo. D’où vient-elle ? Tu t’intéresses à la photographie ? ... Merci ! Elle est adorable hein ? C’est en effet une photo que j’ai prise d’un dancer dans un club goth de Toronto il y a quelques années maintenant. Je trouve qu’elle est superbe!

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HUMANITY | INTERVIEW #4 Comment décrirais-tu votre musique ? ... C’est la musique pour mes longs trajets la nuit jusqu’à chez moi.

#5 Tu dis que ton EP est principalement centré sur ta peur du sexe... quelle chanson d’après toi correspond le plus à ce sentiment ? ... «Gloryhole» décrit le mieux cette idée. Mais honnêtement je pense surtout que «Gloryhole» est une sorte de corps céleste, sérieusement !

#6 Cette question concerne principalement les Parisiens qui ont été déçus de ne pas vous voir en concert fin septembre ; quand revenez-vous à Paris ? ... Je pense très prochainement, j’espère en début d’année, j’ai vraiment hâte de revenir à Paris !

#7 Quels sont tes futurs projets ? ... Principalement la tournée de l’année prochaine. Je m’éclate vraiment à écrire le prochain album, ça va être magique!

Lucie TOSSER PHOTOS © THE WINDISH AGENCY

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Discographie DRESSED FOR SPACE TRST SULK

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HUMANITY | INTERVIEW

Marie Madeleine Marie Madeleine est une Sainte. Marie Madeleine est une Pute.

Voilà comment se présente le groupe Messin (N.B. de Metz) composé de Herr 2003, Gregory Wagenheim, Jarco Weiss et Lily. Marie Madeleine est à suivre de très près. Le groupe a sorti son premier EP « Swimming Pool» en Septembre 2011 sur Ekleroshock, chanson que beaucoup d’entre nous ont eu en tête et revient aujourd’hui avec «No Love», le parfait combo entre sensualité et fougue. Porté par la voix puissante et suave de Jarco Weiss, le groupe navigue entre la disco-funk et la new wave. Nous vous conseillons très fortement d’écouter The Nihilist Song, aussi bien pour son clip que ce son rappelant les late 70’s, le remix de Rubinskee, ainsi que la sextape en ces temps froids.

#1 Comment s’est déroulé votre rencontre et comment avez-vous créé MarieMadeleine ? --- Nous nous connaissions tous les trois depuis plusieurs années et avions tous eu divers groupes. Un soir d’été arrosé, nous nous faisions écouter nos différents projets musicaux. Jarco n’avais jamais chanté, et s’essaya à un scat sur un morceau de Greg... nous enregistrions notre première démo dans la foulée. Après avoir fait écouté ce morceau à quelques amis et avoir reçu de bons retours nous avons bossé quelques morceaux tous les trois. Quelques mois plus tard nous signions sur le label Ekler’o’Shock.

#2 Nous vous avons connu grâce à The Nihilist Song et adorés le clip. Cette chanson rappelle beaucoup les sons de la période new-wave et post-punk. Comment passez-vous d’une telle chanson à une autre comme Winter Skies, légère et romantique ? --- Nous refusons de nous mettre des barrières stylistiques, nous aimons la musique mais pas les étiquettes. Si nous voulons partir dans une direction plus punk puis faire une balade romantique ... pourquoi pas! Après on peut voir aussi entre ces deux morceaux un ying et un yang de la musique, nous aimons beaucoup le concept de dualité, Marie Madeleine en est d’ailleurs l’incarnation.

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HUMANITY | INTERVIEW #3 Vous avez remporté le tremplin aux Eurockéennes de Belfort cette année, comment vous sentez-vous ? --- Au début, nous ne voulions pas faire de tremplin. Notre manager nous a un peu poussés à nous inscrire et il a bien fait. Le principe du tremplin est un peu perturbant. La musique ce n’est pas du sport, et se retrouver en concurrence avec des groupes qui sont pour la plupart des amis c’est un peu dur ! Le soir où nous avons gagné, nous étions à la fois super contents et à la fois super mal à l’aise vis à vis de ces autres groupes. Le soir du concert, un mélange de plaisir et de stress tout deux extrêmes ... une sensation malgré tout agréable et encore une fois cette dualité.

#4 Vous en êtes à votre troisième festival, que pouvez-vous nous dire de la scène et de vos live ? --- Nous sommes encore un groupe jeune en terme d’expérience live, on fait de la scène depuis un an à peine, alternant petites salles et festivals. On apprend à roder notre set au fur et à mesure, peaufiner notre jeu et améliorer notre présence scénique. On tourne à 4 sur scène, Jarco et Lily au chant, Greg à la basse, Max aux synthés et sans oublier Djidj à la technique qui nous aide énormément quant à la qualité de notre son.

#5 Vous avez accompagné Sir Alice, égérie du label Tiger Sushi, lors de sa tournée en Chine, un pays en demande de nouveaux sons, que vous a-t-elle apportée ? --- Cette tournée nous a apporté énormément quant à notre prestation scénique. Des conditions techniques différentes à chaque concert nous permettant de nous donner au maximum afin de satisfaire un public curieux et que nous avons réussi à conquérir au fur et à mesure de nos dates.

#6 Vous faites également des Djs Sets et beaucoup de remixes sont sur votre Soundcloud, quel est votre rapport à l’électro en général ? --- Nous en avons écouté et mixé pas mal il fut un temps (après avoir mixé du hip-hop et du funk pendant plusieurs années aussi). Nous restons assez ouverts, curieux et nous suivons les sorties actuelles mais nous écoutons plus de rock, de hip-hop et de wave actuellement.

#7 Quels sont vos projets à venir ? --- Des concerts, la relecture de notre récital en version accoustique, les 10 ans d’Ekler’o’Shock en octobre au Nouveau Casino et l’enregistrement de notre troisième EP afin de clôturer notre trilogie MM.

Lucie TOSSER

PHOTO © MARIE MADELEINE

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HUMANITY | INTERVIEW

Discographie URAL BAÏKAL AMOUR EP NO LOVE EP SWIMMING POOL

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MIXTAPE

CULTURE | MUSIQUE

CHEVALIEN nous propose ici une mixtape progressive d’une heure dans laquelle 2Pac se retrouve torturé sur de l’indus’ espagnole, A Perfect Circle étranglé par Noisia, Trap et Dubstep démembrés à la même enseigne. Les soundtracks claustrophobes de Blade et A Serbian Film sont successivement déconstruites par sa propre vision de la fin du monde, tantôt stridente et pandémique tantôt introspective et ambiante.

PAGE DE CHEVALIEN

MIX-TAPE

ICI A ECOUTER MKR -

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© PIERRE & FLORENT

CULTURE | MUSIQUE


DANSE - CULTURE -

Eve Grinsztajn JULIEN BENHAMOU PHOTOS

FRANCOIS TAMARIN Robes & Corset

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CULTURE | DANSE

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CULTURE | DANSE

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CULTURE | DANSE

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CULTURE | DANSE

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CULTURE | DANSE

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SOUFFRANCES

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CULTURE | DANSE

Je suis la plaie et le couteau ! Je suis le soufflet et la joue ! Je suis les membres et la roue, Et la victime et le bourreau ! « L’HÉAUTONTIMOROUMÉNOS « des Fleurs du mal de CHARLES BAUDELAIRE

T

ous les jours le danseur doit exécuter des mouvements qui permettent de le maintenir en forme, ses pas, ses gestes sont répétés depuis des années. Ils sont toujours les mêmes, les dégagés, les arabesques sont la bible du danseur. Cette bible lui permet de connaître son corps à la perfection. Elle est sa méditation quotidienne, et comme toute pratique artistique cela ne se passe pas sans souffrances. La souffrance de toujours dépasser les limites du corps. Par la souplesse, et par l’esprit; qui aborde la compétition entre chaque individus, atteindre le but d’être le meilleur techniquement, et de donner le meilleur de soi même . Exigence étudiée depuis le plus jeune âge du danseur. Car atteindre le but d’être le meilleur est atteindre le sommet. Mais cette exigence estelle nécessaire ? Quel est le degré d’excellence que peut atteindre un être humain ? Il se trouve que dans le milieu de la danse la technique est tellement élevée que l’on oublie parfois l’âme de l’artiste. Il est formé pour exécuter, ne faire que ce qu’on lui demande de faire. Il devient un fonctionnaire de la danse. Durant son «éducation», le danseur, apprend patiemment depuis son plus jeune âge la technique de pouvoir sauter et voler dans les airs. Une fois la technique acquise elle est récompensé au sein d’une troupe. Et quelle récompense ? La place est tellement serrée, que cela peut prendre plusieurs années avant d’entrer dans une compagnie. Les auditions sont peu nombreuses

comparativement au nombre de danseurs, et quand il y en a c’est parfois les danseurs du monde entier qui viennent tenter leurs chances. Selon la notoriété de la compagnie, la place est encore plus convoitée. Il faudra au danseur prouvé de quoi il est capable, et la tâche n’est pas simple car après des années d’enfermement à apprendre, il doit prouver qu’il peut vivre librement avec cette technique, devenir le maître de cette technique, pour que l’âme de l’artiste puisse enfin rugir. (ou surgir ?) Les maîtres de ballets sont les guides dans l’apprentissage d’un répertoire d’une compagnie. Il est celui qui guidera le danseur dans sa démarche spirituelle à connaître le personnage qu’il doit présenter sur scène. Sans lui le danseur peut être perdu. Mais encore une fois, à quel prix le maître de ballet a le droit de demander à un être humain d’être le meilleur ? Lorsque le danseur est en répétition afin de préparer un spectacle, il est guidé par ce maître de ballet qui peut parfois se montrer acariâtre et dur. Il paraît que l’artiste danse mieux quand il est épuisé à force de répéter et d’exécuter. Afin d’aboutir la technique il se doit de répéter pendant des heures, pour atteindre la perfection. À quel prix doit-il subir l’humiliation parfois devant toute la troupe, l’épuisement étant interdit ! La récompense, le danseur l’aura à travers les applaudissements, seul le public jugera la perfection du danseur dans son rôle. Le danseur est un sportif de haut niveau, l’exercice doit être quotidien. Sa nutrition doit être saine. Il sait qu’à partir du jour

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où il a mis les chaussons de danse, qu’il a exécuté son premier dégagé, ce sera pour toute sa vie. Les pieds de la danseuse sont de vrais plaies, pour les danseuses classiques qui portent quasiment jour et nuit leurs pointes. Chaussons de danses élaborés pour accentuer la grâce de la danseuse et donner la sensation de légèreté. La pointe du chausson ne mesure que quelques centimètres, broie les orteils dans ce centimètre. Elle monte et porte tout le poids de son corps sur le carré de la pointe du chausson. Provoque des saignements si elle le garde trop longtemps, mais peux aussi blesser gravement la cheville si par la fatigue elle exécute mal les mouvements de sa bible. Mais elle sait qu’une fois sur scène ses jambes seront plus grandes, elle sait que le public aura l’impression de l’envol d’une sylphide. Elle sait que sur pointe, elle sera celle que l’on regarde. Elle rentre fatiguée, épuisée, baigne ses pieds dans de l’eau chaude ou froide afin de calmer le feu des pointes enduré par le spectacle. Ils savent que la danse est avant tout l’art de l’humilité. Se mêle la passion au sens large du terme. La souffrance fait partie du jeu.

Sohrab CHITAN Jérémie Bélingard dans «Le fils Prodige» de George Balanchine Danseur Étoile à l’Opéra national de Paris © JULIEN BENHAMOU


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HUMANITY | INTERVIEW

Eve Grinsztajn « L’apparent relâchement de la rigueur peut n’exprimer qu’une rigueur plus grande à laquelle il fallait répondre en premier lieu. » Georges Bataille

E

ve Grinsztajn n’a rien d’une danseuse ordinaire. Son parcours et son approche de la danse sont atypiques. Elle a la beauté et la grâce de la ballerine, son excellente technique et son sens artistique lui valent le titre de première danseuse à l’Opéra national de Paris. Nous avons eu la chance de la rencontrer, Eve Grinsztajn a pu nous éclairer sur sa vision de la danse au sein d’une des plus prestigieuses compagnies. Comme beaucoup de danseurs, Eve commence la danse un peu par hasard dès son plus jeune âge. C’est par amour de la musique que son art grandira en elle. L’instrument qui la guidera vers les chaussons de danse est le violoncelle ; et plus particulièrement le jour ou elle découvre « La mort du cygne ». « J’ai toujours dansé, j’ai commencé la musique, le violoncelle, et un jour j’ai fait un lien assez incroyable entre l’un et l’autre ». Ce jour, c’est celui de la découverte de la mort du cygne, et elle sent s’opérer en elle une secousse artistique. Elle associe le son de l’instrument à corde à la mort du cygne. Qu’elle dansera d’ailleurs à l’âge 8 ans. Eve suit des cours de danse classique dans une petite école parisienne aujourd’hui très prisée, et elle y apprend surtout la liberté artistique en dansant sur des chansons de Jacques Brel, ce que peu de cours propose, même aujourd’hui. Longuement, Eve hésite entre cette nouvelle passion et son amour pour le violoncelle. Mais elle prend finalement des cours avec Monique Peyramaure, du Conservatoire du 8ème arrondissement de Paris, et passe le concours de danse de Bordeaux qu’elle réussit. Dès lors tout s’enchaine. A l’issue du concours elle rencontre Claude Bessy, alors directrice de l’école de l’Opéra national de Paris qui lui propose de passer le concours d’entrée. Eve rentre à 13 ans à l’école de l’Opéra. « L’école de danse m’a appris la compétition et la rigueur. J’ai toujours aimé danser et jouer la comédie, au sens large du terme, quand je dis danser, mon corps parlait déjà petite, mais pas obligatoirement dans la danse classique ».

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HUMANITY | INTERVIEW Aujourd’hui Eve essaie d’être une danseuse musicienne, elle se transpose, jusqu’à devenir le véhicule de la musique. « J’arrive à me transcender sur un son. Je suis trop sensible à la musique, je suis une caisse de résonance ». En 2004, Eve est coryphée et passe une audition pour Pina Bausch, afin d’obtenir un rôle dans le ballet Orphée et Euridyce en création à l’Opéra de Paris. Elle doit beaucoup à Benjamin Millepied, « sa façon de créer correspondait tout à fait à ma façon instinctive de danser, j’ai renoué avec une essence que j’avais très jeune » ; elle est alors choisie comme soliste par Benjamin. Pour la préparation des rôles, « il faut une démarche personnelle, aller à la recherche de son personnage ». Ce travail est variable selon les rôles, « beaucoup d’images me viennent et me nourrissent ». Si c’est un personnage littéraire, Eve lit et apprend tout ce qu’elle peut sur son individualité, ses sentiments, son devenir, et parfois l’instinct et la musique font le reste. Mais « Souvent les personnages ne sont pas trop complexes, tout est écrit, il faut alors être dans le sensoriel, à l’écoute de son partenaire, de la musique et des autres personnages qui composent le ballet ». Dans la solitude de Myrtha, la reine des Willis dans le ballet Giselle, Eve cherche en elle la faille que Myrtha dissimule dans une attitude dominante et une haine meurtrière pour les hommes. «J’ai vraiment besoin de trouver le moyen d’expression du personnage qui rejaillira sur scène pour que tout soit inscrit inconsciemment et consciemment”.

Perfectionniste jusqu’au bout, Eve Grinsztajn apprend encore, « J’ai appris le lâcher prise, c’est une contrainte intéressante, d’avoir confiance en moi, d’aller plus vite à l’essentiel, je n’ai plus besoin de me torturer pour arriver à quelque chose de plus pur qui aura d’avantage d’impact sur le public ». Apprendre à être soi-même, plus spontanée et à faire confiance à ses acquis, la danseuse est en apprentissage perpétuel. Lors de l’interprétation de sujets graves comme la mort, l’impact de la musique et l’imprégnation du rôle, l’amalgame des repères privés et professionnels peuvent s’avérer dangereux techniquement. Lors des représentations de La Dame aux Camélias et de Manon Lescaut, Eve venait de perdre son père et pensait que le chagrin devait être une source d’inspiration pour aborder les personnages de Marguerite et de Manon dont la finalité est la mort. « Il y a des moments où j’ai eu peur de perdre cette hypersensibilité, d’être prise dans le ressenti de la mort et de devenir l’ombre de moi-même. J’essaie, maintenant de faire des compromis et d’apprendre de mes expériences, d’en tirer le maximum. En tout cas les personnages vivant des choses ultimes, je ne les prend plus de plein fouet ». La danse est pour Eve, une discipline dont on apprend à une échelle très pointue ; la vie et beaucoup d’autres choses, au-delà du geste, on apprend sur soi, l’abnégation, l’humilité, le sacrifice et le corps dans le travail exigeant qu’est la danse. Les pas sont les verbes des danseurs. « C’est une manière de parler, il faut choisir son vocabulaire. C’est extraordinaire. J’aime bien me laisser surprendre. Comme ça c’est toujours un bon moment. C’est en cela que la danse est un art majeur ».

Eve a malheureusement peu d’opportunités de danser des ballets contemporains mais en apprécie énormément les valeurs et les codes. C’est du théâtre, de la danse, des cris, du chant et des répétitions de mouvements. « Le contemporain m’apprend l’anatomie du corps. Mais émotionnellement, je suis plus réceptive au classique ». Et dans cette discipline, Eve se doit d’être particulièrement exigeante avec ellemême. L’apprentissage est permanent même pour une danseuse confirmée, les exercices à la barre font partie de cet apprentissage.

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HUMANITY | INTERVIEW Eve nous a beaucoup parlé de sa notion du partage. Lors d’un pas de deux, il faut être à l’écoute de son partenaire, deviner, s’adapter. Mais Il faut aussi penser au public et ne pas créer de vide, rassurer le spectateur par le sensoriel. Et avant tout il trouver l’alchimie entre deux personnalités pour trouver le point d’enchantement. «Il y a parfois des moments magiques, comme avec Mathieu Ganio (Danseur étoile à l’Opéra de Paris). C’est quelqu’un d’une grande humilité, un partenaire extraordinaire. J’ai l’impression de voler, il est dans l’empathie, et au niveau technique il arrive à émouvoir sa partenaire ». Une compagnie de danse est un microcosme, dont les valeurs sont avant tout le partage, et l’intelligence du corps et de l’esprit : apprendre à vivre ensemble, essayer de passer outre les différences et les différents, donner le meilleur de soi pour donner du plaisir au public.

Sohrab CHITAN Milena PICHON PHOTOS © JULIEN BENHAMOU

Son Répertoire GEORGE BALANCHINE Symphonie en ut, Les Quatre tempéraments; Joyaux/ Emeraudes; Apollon MAURICE BEJART Serait-ce la mort ? JOHN CRANKO Onéguine’Olga’ MIKHAIL FORKINTE Pétrouchka’la Ballerine’ SERGE LIFAR Suite en blanc JOSE MARTINEZ Les Enfants du paradis‘Garance’ (création – 2008) LEONIDE MASSINE Le Tricorne’la Femme du Meunier’

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JOHN NEUMEIER La Dame aux camélias ‘Manon’ RUDOLF NOUREEV Don Quichotte‘la Danseuse de rue’ et ‘l’une des deux Amies’, Cendrillon‘L’Eté’, CasseNoisette‘la Pastorale’, ‘un des deux Flocons’ et ‘la Danse arabe’, Raymonda‘Clémence’; Le Lac des cygnes’pas de trois’ et ‘la danse espagnole’; Roméo et Juliette’Rosaline’ JEROME ROBBINS In the Night; The Concert’La Ballerine’ ROLAND PETIT Proust ou les intermittences du cœur‘Odette’ (entrée au répertoire - 2007)

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CULTURE | DANSE

Cannibalisme, une saillie étrange, effrayante. Académiquement, dévorer les animaux de

sa propre espèce. Car l’homme n’est aussi qu’un animal après tout, qui remet en cause la domination de son prochain et s’imprègne des différences.

Ce

thème fascinant qu’est l’autodestruction est exploré, parcouru, sillonné par les chorégraphes. Les rapports humains sont anthropophages par nature, entravés par des liens de supériorité sans pitié. Osman Kassen Khelili n’est pas le dernier à s’être consacré au sujet, mais son travail chorégraphique est une incroyable source de réflexion sur l’anthropophagie de la chair et des idées. Son ballet est organisé en quatre niveaux de construction et de pensée : La Première Dentition, La Deuxième Dentition, L’Espace d’un doigt coupé et Le Festin final. Lente dégustation d’un corps humain, processus de progression vitale, chronologie d’une vie cannibale, les interprétations sont multiples grâce au travail superbement riche qu’a effectué le chorégraphe. Osman Kassen Khelili tire les sources de toute cette complexe étude de ses origines brésiliennes. Le Brésil est la terre de nombreux peuples aux racines anthropophages, avalant la chair de leurs semblables, mais le pays est aussi le lieu de naissance des théories d’anthropophagie moderne, la faim dévorante des cultures et des idées, appétit féroce de concepts nouveaux ingurgités sans aucune pitié. Et ce sont ces aspects théoriques et pratiques qu’Osman Kassen Khelili dissèque à travers une danse sombre et d’une puissante pureté.

La Première Dentition est le duo originel, la recherche d’un cannibalisme brut mettant en œuvre la chair et ses flux vitaux. Les corps se fuient et se mêlent dans une course rituelle sans tabou. La Deuxième Dentition est un duo plus épuré et cérébral. Les antagonismes identitaires y sont étudiés, menés par le multiculturalisme actuel. Quelle identité dévore l’autre ? Par quelle force ce phénomène est-il induit ? A travers une danse d’énergies brûlantes, le chorégraphe met en mouvement ce combat pourtant impalpable et conceptuel. L’Espace d’un doigt coupé met en scène le maître de cérémonie et mêle les deux aspects du cannibalisme en un tableau conjoint. Le socle de ce travail est brut et visuel : des planches d’écorchés, témoins graphiques d’une exploration gourmande de l’humain, du semblable. Le corps est ficelé à l’image du rôtissage rituel des anthropophages, sous la main guide du maître de cérémonie, véritable magister de la cérémonie cannibale. Le Festin final met en scène cette troisième entité qui enchâsse chairs et identités dans un même processus sur la base du « vivre ensemble », de la communauté et de ses règles. Le cannibalisme est salutaire pour Osman Kassen Khelili en ce qu’il purifie les essaims de l’humanité

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et les débarrasse de ses éléments perturbateurs, permettant la perduration de l’espèce. Mais faut-il comprendre par-là que la différenciation est nécessairement source de conflits ? Si l’intrus doit être éliminé, si l’identité unique doit être « dévorée » et entendons par là assimilée et annihilée par le groupe, quelle part de tolérance est accordée, quelle liberté d’être est convenue ? Plutôt que de percevoir le nonconformisme comme synonyme de menace, peut-être est-il plus juste de considérer que l’ouverture d’esprit serait un progrès non négligeable pour une société toujours davantage murée. Le cannibalisme identitaire, à l’image du repas des chairs et des muscles, n’est finalement qu’un processus de normalisation qui empêche toute chance de vitalité réaffirmée. Si l’anthropophagie est destruction, il est sûrement temps de considérer le terme d’évolution. Et plutôt qu’une féroce ingurgitation, ouvrir la porte à une absorption qui n’anéantit pas et exprime néanmoins toute la puissance de la tolérance.

Miléna PICHON Saturne dévorant un de ses fils 19191923 FRANCISCO GOYA © MUSÉE DU PRADO, MADRID



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E X P O S I T I O N S L’Art en guerre

12/10/12 - 17/02/13

Cheveux chéris 18/09/12 - 14/07/13

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’EXPOSITION CHEVEUX CHÉRIS RELATE LA SYMBOLIQUE ET LA SIGNIFICATION DES CHEVEUX À TRAVERS LES ÂGES AUTOUR DE NOMBREUSES ŒUVRES, TELLES LA PHOTOGRAPHIE, LA SCULPTURE, LA PEINTURE, LA VIDÉO MAIS AUSSI PAR LE PRISME D’OBJETS ETHNOGRAPHIQUES.

LA PREMIÈRE PARTIE DE L’EXPOSITION ABORDE LE CHEVEU ET LA SYMBOLIQUE DE LA COIFFURE SOUS L’ANGLE DE LA FRIVOLITÉ MAIS ÉGALEMENT LES MULTIPLES INTERPRÉTATIONS ASSOCIÉES AUX STRATÉGIES DE SÉDUCTION ET DE FASCINATION LIÉES À LA MISE EN SCÈNE DU CHEVEU. LA SECONDE PARTIE DE L’EXPOSITION ÉVOQUE LA PERTE DU CHEVEU, QUE CELLE-CI SOIT ACCEPTÉE OU CONTRAINTE, PAR LE BIAIS DE PHOTOGRAPHIES ET DE FILMS ÉVOQUANT LA QUESTION DE L’ABSENCE ET DE LA MÉMOIRE. ENFIN, LA DERNIÈRE PARTIE RÉVÈLE LES POUVOIRS DU CHEVEU OÙ IL EST PERÇU COMME UNE ENTITÉ MAGIQUE. CONSIDÉRÉS COMME DES ORNEMENTS PUISSANTS, DES TROPHÉES, LES CHEVEUX CONSERVENT L’EMPREINTE, LE CARACTÈRE ET LA PUISSANCE DE SON PROPRIÉTAIRE. LA SCÉNOGRAPHIE DE L’EXPOSITION INVITE DANS UN PREMIER TEMPS À UN PARCOURS LÉGER, COLORÉ OÙ LE CHEVEU ET LA COIFFURE SONT SYNONYMES DE COQUETTERIE ET D’INSOUCIANCE. CEPENDANT, L’ITINÉRAIRE SE TRANSFORME PROGRESSIVEMENT LORSQUE LE CHEVEU DEVIENT SYNONYME DE PERTE, DE DÉGRADATION, DE MORT. LE CHEVEU PERMET L’IDENTIFICATION ET L’APPROPRIATION DE LA PERSONNE. C’EST UNE RÉALITÉ QUI DÉFINIT SON INDIVIDUALITÉ TOUT EN SE RATTACHANT À UN GROUPE. L’EXPOSITION CHEVEUX CHÉRIS ILLUSTRE LE SYMBOLISME ET LA RÉALITÉ SOCIALE QUE CONFÈRE LA COIFFURE À L’INDIVIDU AU SEIN DE LA SOCIÉTÉ.

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ETTE RÉCENTE EXPOSITION AU MUSÉE D’ART MODERNE DE LA VILLE DE PARIS ABORDE, POUR LA PREMIÈRE FOIS, L’IMPORTANCE DE L’ART DANS UN CONTEXTE DE VIOLENCE, D’OPPRESSION ET DE PÉNURIE. PRÈS DE 400 OEUVRES DE PLUS DE 100 ARTISTES QUI ONT MODIFIÉ EN PROFONDEUR LES CONTENUS MAIS AUSSI LES FORMES DE L’ART EN FRANCE DE 1938 À 1947. PASSANT DE PICASSO À DUBUFFET, L’EXPOSITION SOULIGNE BIEN PLUS ENCORE CE QUE RESSENTAIENT LES ARTISTES ET LES POPULATIONS D’HIER.


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É V E N E M E N T S

MARIE CLAIRE

LA 7ÈME CÉRÉMONIE DES PRIX D’EXCELLENCE DE LA MODE MARIE CLAIRE A EU

© STANISLAS LIBAN

LIEU LE 3 OCTOBRE DERNIER AU SEIN DU NOUVEAU LIEU PARISIEN DÉDIÉ AUX ARTS ET À LA DANSE, L’ELEPHANT PANAME. COUTURIERS, PERSONNALITÉS, CRÉATEURS ET MANNEQUINS ÉTAIENT PRÉSENTS POUR CÉLÉBRER LES GRANDS LAURÉATS 2012. JEAN CHARLES DE CASTELBALJAC AU PRIX D’HONNEUR, MARIA LUISA POUMAILLOU AU PRIX DE LA FEMME D’INFLUENCE OU ENCORE JULIA FRAUCHE POUR LA RÉVÉLATION MANNEQUIN.

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TRANOÏ

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E CÉLÈBRE SALON DE LA MODE TRANOI SE DÉROULANT PENDANT CHAQUE FASHION WEEK ET REGROUPANT PLUS DE 450 CRÉATEURS DU MONDE ENTIER, CÉLÉBRAIT SES SUCCÈS DANS LE TRÈS CHIC ET LÉGENDAIRE MAXIM’S À LA CLÔTURE DE LA DERNIÈRE SEMAINE DE LA MODE PARISIENNE.

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SPOTLIGHT CLUB BY RICK OWENS

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SAMEDI 20 OCTOBRE DERNIER, RICK OWENS, MICHELE LAMY, MARC ZAFFUTO ET EMMANUEL D’ORAZIO PRÉSENTAIENT ALEXANDRA BACHZETSIS AU MAXIM’S. DES PERFORMANCES DES PLUS ÉNERGIQUES ET DÉCALÉES ÉTAIENT AU RENDEZ VOUS, DANS UNE ATMOSPHÈRE PROPRE AU MYTHIQUE RICK OWENS. MATTHEW STONE ET SAYAN PROPOSAIENT UN SON ENTRAÎNANT ET INCITANT LES DIVERSES PERSONNALITÉS ET MEMBRES À SE DÉHANCHER JUSQU’AU BOUT DE LA NUIT.

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PHOTOS © QUENTIN SAUNIER

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CLINK RESTAURANT

LE CLINK RESTAURANT SE SITUE AU COEUR DE LA PRISON H.M.P HIGH DOWN À SURREY

(ROYAUME UNI) ET DONNE LA CHANCE À PLUS DE 111 PRISONNIERS DE SERVIR, ACCUEILLIR ET EXERCER LES PROFESSIONS DE LA RESTAURATION. LES MENUS, LES TABLES ET LES CHAISES ONT ÉTÉ CONFECTIONNÉS PAR LES PRISONNIERS, AVEC SOIN ET HABILITÉ. VOUS POUVEZ DÉGUSTER DIVERSES SPÉCIALITÉS DE LA MAISON SELON LES SAISONS COMME LA SOUPE DU JOUR OU ENCORE LE DESSERT FAIT MAISON. RÉELLE RÉFÉRENCE DE LA RESTAURATION ANGLAISE, LE CLINK RESTAURANT S’EST VU RECEVOIR PLUSIEURS PRIX DE RÉCOMPENSES DEPUIS SON OUVERTURE EN 2009 COMME CELUI DE L’INNOVATION, DE L’EXCELLENCE CULINAIRE OU ENCORE CELUI DE LA GRANDE DIVERSITÉ SOCIALE DU PERSONNEL. BIEN PLUS QU’UN RESTAURANT, LE PROJET DÉTIENT DE RÉELLES VALEURS MORALES ET SOCIALES POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L’INDUSTRIE ET ESPÈRE ÉTENDRE BIEN PLUS SON PROJET DANS LE MODE.

------------------------------------------------------------------------------------------- CLINK RESTAURANT H.M.P High Down Surrey, England (+44) 20 7147 6724

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KOKON TO ZAI

A MARQUE KOKON TO ZAI PART D’UNE COLLABORATION ENTRE KOJI MARUYAMA, SASKO BEZOVSKI ET MARJAN PEJOSKI. LES COLLECTIONS, PLEINES D’ÉNERGIE ET TRÈS GRAPHIQUES, SONT DISPONIBLES DANS DEUX VILLES D’ESPRITS TOTALEMENT DIFFÉRENTS : PARIS ET LONDRES. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- KOKON TO ZAI 57 Greek Street, Soho 48 rue Tiquetonne W1D 3DX London, England 75002 Paris, France (+44) 20 74 34 13 16 (+33) 01 42 36 92 41

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GLINT

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AGASIN SITUÉ À BARCELONE REPRESENTANT BEAUCOUP DE MARQUES TELLES QUE W.I.A., ANAOANA, ET BIEN D’AUTRES. DECOUVREZ LA NOUVELLE COLLECTION DE VÊTEMENTS PRÉSENTÉE DANS LE MAGASIN. ------------------------------------------------------------------------------------------------------ GLINT SHOP Carrer dels Banys Nous, 22 08002 Barcelone, Espagne (+34) 933 043 571 PHOTOGRAPHER >>> ADAM-PETER HICKS STYLISM >>> ANA JEREZ CLOSING >>> W.I.A. COLLECTIONS MAKE-UP >>> JADE MENDES HAIR >>> FLORIAN DOVILLEZ MODELS >>> MARC JORDEN & ELLIS WAHTEL

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0044 PARIS www.0044paris.com

GEORGES MORAND www.georges-morand.fr

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GUY LAROCHE www.guylaroche.com

ASOS www.asos.fr

IS NOT DEAD www.isnotdead.fr

ATSURO TAYAMA www.atsurotayama.jp

JEAN CHARLES DE CASTELBALJAC www.jc-de-castelbajac.com

AVELON www.avelon.me

JEN KAO www.jenkao.com

BALENCIAGA www.balenciaga.com

JUUN.J www.juunj.com

BANANA REPUBLIC www.bananarepublic.co.uk

KOKON TO ZAI www.kokontozai.co.uk

BERNARD DELETTREZ www.bernarddelettrez.com

KRIS VAN ASSCHE www.krisvanassche.com

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CHEZ MAXIM’S www.maxims-de-paris.com

MICHEL MORELLI www.morellidesigners.com

DELPHINE CHARLOTTE PARMENTIER www.delphinecharlotteparmentier.com

MICHEL PERRY www.michelperry.com

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MUSEE D’ART MODERNE DE PARIS www.mam.paris.fr

TRIUMPH www.triumph.com/fr

NICOLAS LUZURIAGA www.luzuriaga.eu

VICTORIA BECKHAM www.victoriabeckham.com

MUSEE DU QUAI BRANLY DE PARIS www.quaibranly.fr

YAZBUKEY www.yazbukey.com

OLYMPIA LE TAN www.olympialetan.com

Y-PROJECT BY YOAN SERFATI www.yproject.fr

ON AURA TOUT VU www.onauratoutvu.com OPERA NATIONAL DE PARIS www.operadeparis.fr PELLESSIMO www.pellessimo.com PIERRE BALMAIN www.pierrebalmainstore.com PRETTY BOX www.prettybox.fr RAD BY RAD HOURANI www.radhourani.com RAMI AL ALI www.ramialali.com RICK OWENS www.rickowens.eu RUBY FEATHERS www.rubyfeathers.com RULES BY MARY www.rulesbymary.com SONGZIO www.songzio.com SUPERATED www.superated.com SWAROVSKI www.swarovski.com TOMMY HILFIGER www.fr.tommy.com TRANOI www.tranoi.com

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