3 minute read
Alain Moreau, du grenier de ses parents au Monty
Le tour du bloc, premier spectacle de marionnettes créé à Bruxelles en 1986 par Alain Moreau, a fait le tour du monde. Désormais installé à Genappe avec Le Tof théâtre, le créateur de marionnettes et de spectacles est aussi prof d’un Master en art de la marionnette.
Texte : Caroline Dunski – Photo : Le Monty
Advertisement
Alain Moreau se décrit comme « Bruxellois de formation » parce que c’est au Conservatoire de Bruxelles qu’il s’est formé pour devenir comédien. Arrivé à Genappe avec le Tof théâtre en 1991, il s’est directement impliqué dans la vie locale.
Pas Que Pour Les Petits
Avant d’entamer des études théâtrales au Conservatoire de Bruxelles, Alain Moreau était déjà tombé dans la marmite de la marionnette, qu’il a croisée dans le grenier de ses parents à l’âge de 8 ans. « Avec mon frère et des copains, j’ai transformé ma chambre en atelier de création de marionnettes. J’ai aussi une vocation de clown et, quand je suis sorti du Conservatoire, en 1984, j’ai très vite rencontré le théâtre jeune public et le théâtre de rue, tout en continuant à bricoler, pour créer des décors comme assistant scénographe.» Désormais, le théâtre de marionnettes, qu’il s’adresse au jeune public ou à des adultes, est une catégorie artistique reconnue en tant que telle par la Fédération WallonieBruxelles. Alain Moreau, qui a beaucoup œuvré pour que la marionnette sorte du jeune public et entre au théâtre, est aujourd’hui prof d’un Master en art de la marionnette au Conservatoire Arts2 de Mons* et réalise aussi des spectacles pour adultes, comme Les Zakouskis Érotiks
UN TOUR DU BLOC… PUIS DU MONDE
Le tour du bloc est un spectacle de marionnettes à gaines qui raconte 24 heures de la vie d’un quartier de Bruxelles. L’idée du spectacle est née dans un rêve. Alain Moreau l’a tout de suite notée dans un carnet au réveil. « Le décor est un pâté de maisons constitué d’un bloc tournant pour que les spectateurs voient chacun des quatre côtés. Nous avons d’abord joué le spectacle dans une salle que nous avons louée, puis nous avons eu des propositions de tournée dans la campagne belge. Même si le propos du spectacle est très citadin, il a très bien fonctionné dans des contrées campagnardes, parce qu’il parle de voisinage… même sans paroles.
(NDLR : Alain Moreau confie qu’il est fan de tous les artistes qui s’expriment sans paroles, comme Charlie Chaplin ou Buster Keaton). On s’est rendu compte qu’à l’instar de Tintin, Bruxellois au départ, notre spectacle était assez universel et plaisant par sa ‘belgian touch’. Il a tourné dans 35 pays, jusqu’en Ukraine, alors encore dans l’URSS, au Canada et aux États-Unis. »
LE MONTY, TIERS-LIEU ARTISTIQUE, CULTUREL ET CITOYEN
En 1991, Le Tof théâtre migre donc à Genappe, puis la compagnie théâtrale loue l’ancien cinéma dont elle fait un lieu de répétitions, de travail et de bureaux. « Progressivement, on l’a ouvert pour des soirées-surprises mais, à un moment, comme il n’était plus aux normes, nous n’avons plus pu y organiser des activités publiques. » En 2014, un groupe de personnes réunies au chevet du Monty pousse Alain à acheter le bâtiment, puis constitue le groupe « les amis du Monty ». Suivent quatre longues années de travaux avec, dans les dernières semaines, l’organisation de chantiers participatifs auxquels des habitants prennent part. « Une soixantaine de personnes sont montées sur la scène lors de l’inauguration officielle, le 18 septembre 2018. Il y avait une énergie collective avec un groupe de plus en plus grand. Aujourd’hui, Le Monty peut s’appuyer sur une centaine de bénévoles. » À l’époque, alors que le terme ‘tiers-lieu’ n’est pas encore entré dans le langage courant, Ville de Genappe et Province du Brabant wallon sont séduites par le projet et financent les travaux. « La compagnie pilote le lieu et lui donne une identité artistique, ainsi que ses valeurs. Elle s’implique aussi dans la vie de la commune. Les gens peuvent se rencontrer en venant au Monty pour différentes raisons : boire un verre, participer à des tables de conversation, au Repair Café ou à divers ateliers, voir des spectacles et prendre part au Festival Maboule, assister à des conférences… Le lieu est ouvert aux associations et aux citoyens qui se prennent en main de façon autonome, même si nous les accompagnons pour la mise en œuvre de leur projet, au début. »
OSCAR MAYEUR, BOURGMESTRE DE GNIAP
Oscar Mayeur, bourgmestre de Gniap, est un personnage récurrent du Tof théâtre. À tel point que la marionnette s’invite à chaque occasion. Né lors de la première édition du Festival « Des pieds et des mains » en 1994, Oscar Mayeur a un sacré franc parler et aime faire des discours. « C’est le pouvoir de la marionnette, qui peut dire plus de choses que le comédien, même si personne n’est dupe. Le bourgmestre de Gniap est content de venir au Monty. Comme il est toujours en campagne, il peut y croiser un paquet de potentiels électeurs et il prend plaisir à monter sur scène pour avoir son petit succès. Il aime aussi récupérer les trucs déjà dits ailleurs. Comme moi, il est adepte de la récup de ses bons mots, qui forment un dossier dans son ordinateur. Mais Oscar préfère encore le bar à la salle de spectacles, parce qu’il y a des bonnes bières. »
Rendez-vous
Le 17 février, après une semaine en immersion au Tof théâtre, les étudiants d’Alain Moreau pourront montrer le résultat de leurs travaux au Puppet Crash Test, une soirée de cabaret marionnettique. www.lemonty.be