MAS | 100 x Congo. Un siècle d'art congolais à Anvers

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Un siècle d'art congolais à Anvers


UNE EXPOSITION EN DEUX VOLETS 1. Aux murs, vous découvrez des facettes de l'histoire précoloniale ainsi que les premiers contacts entre l'Europe et l'Afrique. Comment les maîtres anversois ont-ils représenté des Africains à partir du XVIe siècle ? Et quelle est l'image des Congolais à partir de la fin du XIXe siècle ? Nous nous intéressons ensuite à la colonisation belge du Congo, couvrant la période allant de la fin du XIXe siècle jusqu'à une bonne partie du XXe. 2. Au cœur de l'espace d'exposition se trouvent 100 pièces phares, cent ans après la création de la collection congolaise de la ville d'Anvers. Au cours de votre voyage, vous découvrez la richesse et la diversité des objets d'art et utilitaires classiques appartenant aux peuples de l'actuelle République démocratique du Congo.


Un siècle d'art congolais à Anvers Il y a exactement cent ans, la collection congolaise de la ville d'Anvers a vu le jour en pleine période coloniale. 100 x Congo met à l'honneur cent pièces phares. Quelles histoires s'y cachent ? Comment sontelles arrivées ici ? Quelle était leur signification pour les peuples congolais ? Et qu'en est-il de la présence africaine à Anvers ? Vous y découvrez aussi comment se sont déroulés les premiers contacts entre l'Europe et l'Afrique. Comment les maîtres anversois ont représenté les Africains. Pourquoi les Congolais ont été exhibés lors des expositions universelles. Il y a également l’impact des missions sur la culture congolaise lors de la colonisation. Et comment les Congolais voyaient-ils le blanc (mundele) ? Pour cette exposition, le musée collabore avec des artistes et des chercheurs belges et congolais. Nous entrons en dialogue avec des résidents anversois d'origine belge et africaine. Le MAS vous invite à vous joindre à nous pour mener une réflexion sur l'image des Africains et sur le passé, le présent et l'avenir de la collection congolaise.


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La collection congolaise du MAS et ses zones d’ombre. Qu'ignorons-nous ?

Nous ignorons encore beaucoup de choses sur les créateurs congolais de ces objets d'art et utilitaires ainsi que sur leur signification. Les colons européens ne se sont guère souciés de l'identité et du statut des artistes et des artisans. Au début du XXe siècle, la ville d'Anvers est entrée en possession de la majorité de ce patrimoine congolais. La collection fut constituée grâce aux premiers collectionneurs d’art et donateurs. Ces intermédiaires belges ont laissé peu d'informations relatives aux objets. Ces objets ont-ils été pillés ou échangés ? Ont-ils été achetés ou offerts ? Qui en était le propriétaire au Congo ? La piste qui mène à leur provenance se retrouve souvent brouillée chez les marchands et donateurs belges. La datation reste également une tâche difficile. La moitié des objets date bel et bien d'avant 1920. Certaines pièces uniques en métal remontent même aux XVIIe et XVIIIe siècles. La collaboration avec les chercheurs au Congo, également dans le cadre de la restitution, est une étape indispensable pour tenter de combler ces lacunes et de répondre aux nombreuses questions non résolues.

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VOUS AVEZ VU CES OEUVRES À L'ENTRÉE.

1| Hommage aux anciens créateurs Chéri Samba (°1956, Kinto M'Vuila, Congo) 1994 Acrylique et paillettes sur toile Prêt de Bernard de Grunne, Bruxelles

Hommage aux anciens créateurs En visitant par demande officielle la salle d’exposition de Völkerkundemuseum der Universität Zürich se trouvant dans le sous-sol d’un jardin plein de bambous, j’étais frappé par le grand nombre d’objets antiques (masques, textiles, statues…) tous de très haut niveau, que renferme cette salle. Je sentais comme si quelques-uns de ces objets me faisaient des frictions au corps. J’étais alors persuadé que des objets avaient toujours leurs pouvoirs surnaturels et c’étaient des vrais puisqu’à cette époque le marché n’était pas en concurrence et il ne devait donc pas y avoir de fausse pièce. J’étais tout de même étonné d’apprendre que Mr. Coray qui avait monté cette impressionnante collection n’avait pas connu l’Afrique d’où provenaient les œuvres de sa collection pour rencontrer les créateurs à qui je rends hommage. Y a-t-il d’autres collectionneurs semblables à monsieur Coray ? Chéri Samba, 1994

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Faute ya commerçant* Sur la valeur des objets culturels congolais au MAS

Patrick Mudekereza, artiste-écrivain de Lubumbashi, s'est entretenu avec des historiens (de l'art), des anthropologues, des décideurs politiques et des militants au sujet de la collection congolaise. Ses poèmes disséminés dans l'exposition décrivent les différentes valeurs des objets : esthétique, commerciale, symbolique, scientifique et spirituelle. Il s'intéresse également à la création, au commerce, aux dons, aux prêts et aux expositions. La faute relative au pillage et à l'acquisition sans consentement est souvent dissimulée à travers la science, le commerce de l'art et la nouvelle sacralisation dans les musées. Cette intervention artistique restitue ainsi la complexité des objets d'art et utilitaires. Mudekereza le fait en évoquant notre attachement aux objets. De cette manière, nous pouvons peut-être faire passer la recherche de leur éventuel futur au premier plan, à la place du piège de la recherche de leurs origines. Patrick Mudekereza, 2020

*Le titre, Faute ya commerçant, s'inspire de la chanson du célèbre chanteur de la rumba congolaise, Lutumba Simaro. Dans cette chanson, un commerçant de vêtements est accusé de commettre une injustice à l’égard d’une épouse à qui il vend les mêmes vêtements qu'à la maîtresse de son mari. 7


Traces du passé colonial à Anvers. Fin du XIXe et début du XXe siècle

- p. 19 -

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Les Africains représentés.

PIÈCES PHARES

de la collection MAS

XVIIe siècle

- p. 45 -

- p. 16 -

Sous le masque noir /

La collection congolaise du MAS et ses zones d’ombre.

INTRO

- p. 3 -

- p. 5 La vision européenne du monde s'élargit. L'Europe et l'Afrique entrent en contact.

Intervention artistique de Patrick Mudekereza

- p. 7 -

Fin du XVe au XVIIe siècle

- p. 11 -

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1920. Premiers objets congolais dans un musée d'Anvers

- p. 31 -

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PIÈCES PHARES

de la collection MAS

- p. 45 -

blanc - p. 43 -

Afrique et Europe : nouvelles influences, nouvelles dynamiques dans le domaine de l'art

Le Congo en Belgique, la 'mère-patrie'

- p. 87 -

- p. 79 Dans de nombreuses mains

- p. 76 -

Futur-velours.com

- p. 93 -

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La vision européenne du monde s'élargit. L'Europe et l'Afrique entrent en contact. Fin du XVe au XVIIe siècle À la fin du Moyen Âge et de la Renaissance, les explorations portugaises ont considérablement élargi la vision européenne du monde. Cela a eu des répercussions sur l'Afrique. Les contacts ont laissé des traces : des objets rares qui témoignent d'échanges culturels et des documents historiques sur la traite des esclaves. Fin du XVe siècle. Les caravelles portugaises naviguent le long de la côte ouest de l'Afrique. L'objectif : tirer profit du commerce des épices, de l'ivoire, de l'or et des esclaves. Les souverains de royaumes florissants, comme le Kongo et le Bénin, sont entrés pour la première fois en contact direct avec les navigateurs européens, qui ont établi des comptoirs commerciaux. Un commerce de troc de biens européens et africains se développe, des présents diplomatiques sont échangés. Des objets africains atterrissent dans des cabinets d'art de riches citoyens européens et de maisons royales. Au XVIe siècle, la ville d'Anvers est devenue une plaque tournante pour le commerce d'envergure mondiale. Des commerçants et des artisans, des artistes et des diplomates de toute l'Europe séjournent dans la ville portuaire. Quant aux cartographes anversois, ils sont les premiers à élaborer des cartes du monde. Les premiers atlas montrent comment tous les océans sont reliés entre eux. L'Afrique, l'Amérique et l'Asie élargissent l'horizon européen. 11


Anvers : plaque tournante du commerce

Les années 1500 et 1600. Les commerçants portugais et espagnols à Anvers ont fait de la ville de l'Escaut un acteur important dans le commerce entre les régions d'Afrique de l'Ouest, d'Europe du Sud et d'Amérique du Sud. Quelque quatre-vingt entreprises portugaises, dont celles de la famille Ximenes, exploitent l'or, l'ivoire, le poivre et le sucre. Elles sont très présentes à Lisbonne et à Anvers. Elles expédient également des esclaves africains. Ces personnes travaillent de force dans les plantations de canne à sucre et de coton en Amérique et dans les Caraïbes. Des familles espagnoles, portugaises et italiennes basées à Anvers amènent également des Africains qui travaillent comme domestiques, qu'ils soient ou non réduits en esclavage. Leur présence est visible dans l'œuvre des peintres anversois et d'autres artistes. 2| Carte du monde Typus Orbis Terrarum de l'atlas Tonneel des aerdtbodems Abraham Ortelius, Anvers 1571 Papier Prêt de la Bibliothèque patrimoniale Hendrik Conscience, Anvers (K 24052)

3| Salière Afro-Portugaise Peuple Edo/Bini, Royaume du Bénin (l'actuel Nigéria) Environ 1520 Ivoire Don de M. Olbrechts-Maurissens, 1974 MAS (AE.1974.0025.0001)

Une pièce d'exposition rare Cet ustensile de table du Bénin est l'un des plus anciens exemples d'échanges 12

culturels entre l'Afrique et l'Europe. Les ivoiristes de la cour de l'Oba (souverain) sculptaient de luxueux objets en ivoire à la demande des Portugais. Ces derniers finissaient ensuite par être des pièces maîtresses dans les cabinets d’art des maisons royales européennes et de l'élite. Les personnages principaux sont des cavaliers portugais armés. Quant au motif du poisson, il symbolise Olukun, le devin béninois de l'océan et porteur de prospérité. Le motif réfère au troc avec les Portugais, qui importent de nouvelles marchandises.

4| Description détaillée des régions africaines Olfert Dapper (1636-1669), avec des cartes et des gravures de Jacob van Meurs Amsterdam 1668

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Papier et parchemin Prêt de la Bibliothèque patrimoniale Hendrik Conscience, Anvers (K 95269)

Récits de voyage sur le Bénin et le Kongo Ce livre du médecin hollandais, Olfert Dapper, datant du XVIIe siècle contient des descriptions des royaumes florissants du Kongo et du Bénin, et de leurs premiers contacts avec les Portugais. Dapper ne s'est lui-même jamais rendu en Afrique. Il s'est inspiré d'autres sources écrites et de récits de voyage oraux qui ne sont pas toujours fiables.

d'Anvers. L'entreprise de la famille Ximenes affrétait des bateaux à Lisbonne pour la chasse aux esclaves en Afrique. La famille était également responsable du transit inhumain de personnes réduites en esclaves vers l'Amérique du Sud. Les cargaisons pour les trajets de retour d'Amérique étaient constituées de sucre de canne, de tabac et de bois de peinture.

7| Registres comptables du voyage commercial du navire Griffioen en Afrique de l'Ouest

5| Pièce de monnaie (excelente) avec Ferdinand d'Aragon et Isabelle de Castille

1616-1617 Papier Prêt des Archives de l'histoire économique hollandaise, Amsterdam (2.5.71.12)

Europe Environ 1500 Or et métal Prêt du Service archéologique, Anvers (A272/11/MU1)

Investir dans l'or, l'ivoire et les esclaves

L'or de cette pièce de monnaie, qui fut retrouvée dans un naufrage à Anvers, provient du Ghana (Côte d'Or) en Afrique de l'Ouest

6| Registres comptables de la famille marchande portugaise Ximenes Rédigés chez le notaire N. Claeys 1615 Papier Prêt des Archives Félix/Archives de la ville, Anvers (N#540.00065)

Cargaison : êtres humains Près de quatre-vingt entreprises portugaises ont fait du commerce avec les territoires d'outre-mer portugais à partir

Les familles d'Anvers qui se sont installées en Zélande et à Amsterdam investissaient également dans le transport maritime sur les côtes d'Afrique de l'Ouest. Elles étaient en quête d'or, d'ivoire et d'esclaves. On en retrouvera des traces dans les documents commerciaux concernant le second voyage du Griffioen, un navire de la compagnie maritime anversoise Van den Bogaerde, vers l'Afrique de l'Ouest en 1616-1617.

8| Maquette d'une caravelle des XVIe et XVIIe siècles. Échelle 1:25 Jules Van Beylen, d'après une estampe de Pieter Bruegel 1957-1961 Bois et textile MAS (AS.1961.034)

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Les premiers portraits d'Africains

Peu de noirs originaires d'Afrique de l'Ouest et d'Afrique Centrale résidaient aux Pays-Bas (Lage Landen) du XVIe siècle. Il s'agissait de musiciens et de lanceurs de drapeaux qui travaillaient pour les monarques et l'élite. Il y avait aussi un groupe d'envoyés diplomatiques d'Afrique de l'Ouest. Les noirs libres à Anvers étaient de grandes exceptions. Nous savons très peu de choses sur eux. Le groupe le plus important était constitué d'Africains qui vivaient dans le milieu des commerçants et des diplomates portugais. Ils les amenaient avec eux en tant que travailleurs domestiques. Katharina était une servante de vingt ans d'un commerçant portugais. L'artiste allemand, Albrecht Dürer, a peint son portrait en 1521. Il l'avait rencontrée à Anvers, où il était hébergé par la famille de João Brandão. Ce dernier était un représentant commercial (factor) du roi du Portugal. Il s'agit, dans l'art plastique européen, de l'une des premières études connues sur un modèle vivant d'une personne africaine. Le portrait masculin anonyme semblerait être un peu plus ancien.

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9| Portrait d'étude de Katharina Albrecht Dürer (1471-1528) 1521 Reproduction photographique © Musée Uffizi, Florence

10 | Portrait d'étude d’un homme inconnu Albrecht Dürer (1471-1528) 1508 (?) Reproduction photographique © Albertina, Vienne

11 | L'adoration des mages Maître anonyme d'Anvers Première moitié du XVIe siècle Peinture à l'huile sur panneau Prêt du Musée de l'hôpital Notre-Dame de la Potterie, Bruges (O.P.49.1)

Rois lointains, habits extravagants L'adoration des mages est un thème populaire dans le maniérisme anversois, un style de peinture datant du début du XVIe siècle : les populations de régions lointaines y étaient représentées vêtues d'habits extravagants et coûteux, comme ici le jeune mage Noir. En affichant une fortune 'royale', avec par exemple de la soie précieuse, les riches marchands flamands, portugais et italiens d'Anvers montraient que le commerce de la ville était florissant. Sans oublier qu'ils étaient également reliés au monde entier.

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Les Africains représentés. XVIIe siècle

Au XVIIe siècle, des artistes baroques comme Rubens ont progressivement eu accès à des modèles africains. Cela a permis de rendre leurs personnages plus réalistes. Les peintres précédents avaient rarement rencontré des Africains. Ils dépendaient donc de représentations stéréotypées pour réaliser leurs personnages noirs 'fantasmés'. Peter Paul Rubens travaillait principalement dans la ville cosmopolite d'Anvers et en Italie. Ses représentations des Africains ont été reproduites dans toute l'Europe. Malgré cela, les portraits vraiment personnalisés restent rares. Les noirs ont souvent joué un rôle dans les scènes mythologiques. Ou en tant que mage Noir dans des scènes avec les trois rois mages. Les élèves de Rubens, Jacob Jordaens et Jan Boeckhorst, ont commencé à dépeindre des femmes noires. Les Africains n'ont pas toujours été considérés comme différents. Les artistes estimaient qu'eux aussi étaient ouverts au message du Christ et qu'ils pouvaient être convertis. Néanmoins, au XVIIe siècle voire même plus tard, il n'y avait pas nécessairement que des représentations positives. À ce jour, les Africains continuent d'être représentés sous forme de caricatures et sont repris dans des messages de propagande stéréotypés.

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12 | Quatre études de la tête d’un Africain De Constantin Meunier (1831-1905) à Rubens (1577-1640) Entre 1890 et 1905 environ Huile sur toile Prêt des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles (12552)

L’homme africain de Rubens Avec son croquis d'un homme africain dans quatre poses différentes daté entre 1613 et 1615, Rubens surpasse ses contemporains et les futurs artistes européens. Avec son sens du détail et les nuances de la peau foncée, il brosse le portrait d'un homme aux humeurs diverses. Son identité reste inconnue. La célèbre œuvre de Rubens a longtemps été appelée 'Études d'un Maure'. Elle ne fut jamais donnée en prêt. C’est l'excellente copie de Constantin Meunier, un grand admirateur de Rubens, que nous avons choisi de vous présenter.

13 | Étude d'un homme africain Peter Paul Rubens (1577-1640) 1609 Reproduction photographique © Collection Getty Museum, Los Angeles

14 | Moïse et sa femme éthiopienne

La femme éthiopienne de Moïse Moïse, une figure importante du judaïsme, avait, selon l'Ancien Testament, une liaison avec la femme éthiopienne Sippora. En raison de sa peau foncée, le couple a reçu des critiques de sa famille. Ici, Moïse la protège. Avec son œuvre, Jacob Jordaens semble inviter le public à voir la femme de Moïse comme ‘l'une des nôtres’, ce qui correspond au message de charité du Christ dans le Nouveau Testament. Le sujet de cette œuvre est unique.

15 | Salomon accueille la reine de Saba Jan Boeckhorst (1604-1668) Environ 1650 Huile sur toile Prêt de la Fondation Terninck, Anvers

La Reine de Saba Dans l'Ancien Testament, la reine africaine de Saba se rend au palais du roi juif Salomon à Jérusalem. Il accueille la beauté à bras ouverts. Boeckhorst va à l'encontre des normes de son époque en matière de représentation des noirs. Il inverse le contraste noir et blanc habituel : la reine est noire et les domestiques blancs portent sa traîne.

Jacob Jordaens (1593-1678) Environ 1650 Huile sur toile Maison de Rubens, Anvers (RH.S.095), 1951 Prêt à long terme de la Collection de la Communauté flamande

– les africains représentés –

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Traces du passé colonial à Anvers. Fin du XIXe et début du XXe siècle

Dès la fin du XIXe siècle, la conquête européenne d'une vaste zone d'Afrique centrale a débuté. Lors de la conférence de Berlin de 1884-1885, les pays européens ont déclaré le souverain belge Léopold II comme le chef de l’ État indépendant du Congo. Il l'a exploité comme son propre territoire conquis. Pour la ville portuaire d'Anvers, il s'agissait 'd'une affaire en or'. Les politiciens, la bourgeoisie et les hommes d'affaires anversois ont soutenu le projet colonial de Léopold. Ils ont empoché des fortunes en pillant les richesses congolaises, telles que l'ivoire et le caoutchouc. Des traces publiques du passé colonial sont encore présentes à Anvers : des bâtiments, des noms de rues, des monuments, des entreprises ainsi que les grues sur les quais du port. Depuis le début du XXe siècle, les atrocités, la souffrance humaine et la désorganisation des communautés de l'État indépendant du Congo ont fait l'objet de critiques internationales et nationales. En réponse, le Parlement belge a décidé de reprendre la propriété privée de Léopold. Le Congo belge est devenu une colonie officielle de l'État belge entre 1908 et 1960. 19


D'attraction aux expositions universelles à la communauté : les Congolais à Anvers

En 1885 et 1894, la ville d'Anvers a servi de décor pour de grandes expositions universelles. À cette occasion, 12 et 144 Congolais ont été expédiés respectivement. Ils servaient d'attraction pour le public belge dans un genre de zoo humain. Pendant leur court séjour, de nombreux Congolais sont tombés malades. Il y a eu au moins huit morts. Les noms et les derniers lieux de repos de ces individus sont absents de la mémoire collective. À l'époque coloniale, il n'y avait pratiquement pas de Congolais à Anvers, et en Belgique en général. Ceci découlait de la liberté de circulation strictement contrôlée au Congo belge. Il y avait également une restriction sur les voyages de la colonie vers la Belgique. Seuls quelques Congolais qui travaillaient sur les bateaux congolais de la ligne Matadi-Anvers ou qui voyageaient comme domestiques (boy), séjournaient (temporairement) dans la ville d'Anvers. 16 | Cartel avec l’intitulé ‘Les Congolanders’

À la recherche d'un nom pour un peuple

Anvers 1885 Bois et peinture Ancien Musée du Folklore d'Anvers MAS (AF.00096)

17 | Le Chant des Congolans – Hymne de l’Alliance Belgique

Comment faut-il nommer les populations colonisées dans l'État indépendant du Congo ? Au début, il y avait un manque de clarté à ce sujet. En 1885, des appellations françaises et néerlandaises circulent. Faut-il les appeler les Congolanders ? Les Congotèques, comme le terme 'Aztèques' ? Les Congolans ? Les Congotiques ?

Journal ‘La vie Anversoise’ 27 juin – 4 juillet 1885 Papier Legs de Paul Osterrieth, 1940 MAS (MAS.0320.002)

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1885, les Congolais sur l'Escaut

En 1885, Anvers a organisé la première exposition universelle en Belgique. Ce fut un excellent outil de campagne pour populariser le projet de colonisation de Léopold II et attirer les investisseurs dans le port d'Anvers. Comme dans toutes les expositions universelles, l'industrie et le commerce étaient les deux principaux moteurs. L'exposition était empreinte d'optimisme occidental pour le progrès. Tous les pays participants mettaient également en avant leurs colonies. Par exemple, le pavillon belge exposait les richesses du sol congolais ainsi que des objets culturels. Et cela sans pour autant porter beaucoup d’intérêt aux artisans ou à leur signification. Pour mettre en valeur le 'travail de civilisation', un zoo humain congolais fut créé, semblable à un village fictif. On y référait de façon moqueuse sous le nom de 'Vivi sur l'Escaut'. Vivi était alors la capitale du Congo. Douze Congolais devaient jouer la vie quotidienne dans leur village. Quant aux visiteurs, ils s'émerveillaient devant l'attraction. On leur présentait un monde de contrastes stéréotypés : 'blanc = supérieur' et 'noir = primitif'. Lieu : la ville d'Anvers (Zuidwijk) Nombre de visiteurs : 3 500 000 pour l'ensemble de l'exposition, avec différents pays participants Profil des visiteurs : hommes d'affaires belges et internationaux, haute élite

18 | Exposition universelle à Anvers. De mai à octobre 1885

20 | Photo de groupe mise en scène, Anvers, 1885

Affiche (reproduction) © Letterenhuis, Anvers

© UAntwerpen

19 | Le lieu de l'exposition universelle à Anvers-Midi, 1885 Plan (reproduction) © Archives Félix/Archives de la ville, Anvers

De gauche à droite : Tshinkela (homme), Siouka M'Pongo (homme), Zala (femme), Kassenkou (homme), Tati Fernando (homme), Lubendo (garçon), Massala (homme), Mongo (garçon), Zoumba (femme), N'zambi (garçon), Mabouté (fille) et Loumambe (garçon).

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21 | Statue de pouvoir (nkisi nkondi) du chef Ne Kuko Peuples Kongo, Kikuku, région de Boma, République démocratique du Congo XIXe siècle Bois, bandes métalliques, corde, tissu et perles de verre Prêt du MRAC, Tervuren (EO.0.07943)

Statue de pouvoir volée Cette pièce phare de l'exposition universelle de 1885 appartenait à Ne Kuko, un chef Kongo. Après avoir été activée par un spécialiste des rituels (nganga), la statue a protégé sa communauté et son village Kikuku de la malédiction. Le Belge, Alexandre Delcommune, a pillé la statue en 1878 et s'est approprié sa force pour protéger son comptoir commercial. Ne Kuko désirait payer une rançon pour la récupérer, mais en vain. En 1912, la statue a atterri au Musée du Congo belge à Tervuren. En 1973, le président Joseph Mobutu a exigé son retour dans le cadre de son 'recours à l'authenticité'. Le chef de Kikuku a réitéré sa proposition en 2016. La sculpture joue un rôle important dans le débat sur la restitution du patrimoine congolais pillé.

22 | Portrait de Masala (?-1895) à Anvers 1885 Photographie sur carton Legs de Paul Osterrieth, 1940 MAS (MAS.0302.001)

‘Roi’ Masala

Masala, originaire des environs de la première capitale Vivi, joue un rôle de premier plan. Avant son départ, il occupait une fonction importante en tant qu'interprète et médiateur (ma-sala) entre les chefs congolais et les commerçants européens. Fernando Tati était lui aussi interprète. Masala fut présenté dans la presse comme étant un roi. Pendant son séjour en Belgique, il a effectué une visite diplomatique pour rencontrer Léopold II et a assisté à des représentations théâtrales.

23 | Caricature de Masala : Le roi s’amuse 1885 Papier Legs de Paul Osterrieth, 1940 MAS (MAS.0302.004)

24 | Facture de l’entreprise F.& V. Claes, 'préparations et commerce d'objets physiques'. 1887 Papier et encre Prêt du Musée national des cultures du monde, Leyde, Pays-Bas (607)

25 | Statue féminine debout Peuples Kongo (enregistré Teke) Avant 1885 Bois, fibre, perles et kaolin Acheté à l’entreprise Frans et Vincent Claes Prêt du Musée national des cultures du monde, Leyde, Pays-Bas (RV-607-4)

Douze Congolais ont été sélectionnés pour la traversée vers Mputu (Europe).

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Après l’exposition universelle Après les expositions universelles de 1885 et 1894, les Congolais expatriés sont retournés par bateau. Le roi Léopold II a fait don d'un grand nombre d'objets congolais au Musée national d'ethnographie de Leyde. D'autres ont été vendus et revendus par la suite. Les expositions universelles étaient des pôles d'attraction pour les conservateurs de musée. En 1887, par exemple, l’entreprise Claes a vendu des objets au musée de Leyde et plus tard à des musées allemands. Jusqu'au début du XXe siècle, elle aura joué un rôle majeur dans la distribution des objets congolais acheminés via le port d'Anvers.

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L'exposition universelle de 1894 : à nouveau un zoo humain

En 1894, Anvers a organisé une deuxième exposition universelle. Une fois de plus, il était possible de découvrir des produits coloniaux d'importation et des objets culturels congolais au pavillon belge. Le soi-disant 'travail de civilisation de la population congolaise primitive' était mis en évidence, tout comme la victoire belge sur les marchands d'esclaves arabo/swahili. Le message était clair : seule la colonisation peut apporter de la lumière au 'Congo sauvage'. Dans le zoo humain, 144 femmes, enfants et hommes congolais devaient reproduire leur vie quotidienne. Il y avait aussi des membres de la Force Publique, l'armée coloniale. On ramait sur des canoës, on jouait des instruments de musique et on faisait des démonstrations de ferronnerie. Le village était situé juste en face de bâtiments d'aspect moderne. L'exposition d'Anvers était une sorte de répétition générale pour l'exposition universelle de Tervuren en 1897 et l'ouverture du pavillon colonial en 1898, qui était le précurseur du musée de Tervuren. Lieu : le quartier Zuidwijk d'Anvers, en face du Musée Royal des Beaux-Arts Nombre de visiteurs : 3 500 000 pour l'ensemble de l'exposition, avec différents pays participants Profil des visiteurs : hommes d'affaires belges et internationaux, la haute élite

26 | L'exposition universelle à Anvers. De mai à novembre 1894

28-29 | Vue sur le village congolais avec étang, Anvers (au sud), 1894

Affiche (reproduction) © Archives Félix/Archives de la ville, Anvers

Reproduction photographique © Bibliothèque Patrimoniale Hendrik Conscience, Anvers

27 | Plan de l'Exposition universelle d'Anvers (au sud), 1894 Plan officiel (reproduction) © Archives Félix/Archives de la ville, Anvers

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30 | Portrait mis en scène d’un groupe de Congolais, Anvers (Sud), 1894. Photographie (reproduction) © Collection MRAC, Tervuren

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31 | Tambour à fente en forme d'animal Ubangi, République démocratique du Congo Avant 1894 Bois Prêt de MRAC, Tervuren (MO.0.0.36413)

Ce tambour à fente fut présenté lors de l'expo de 1897 à Tervuren. Il fut également exposé lors de l'exposition d'Anvers en 1894.

Tragique découverte

Lors de la préparation de cette exposition du MAS, des pièces d'archives inconnues ont été découvertes. Il en ressort que plus de 44 Congolais gravement malades ont été admis dans les hôpitaux d'Anvers pendant l'exposition universelle. Au moins huit personnes sont décédées. Leurs corps ont été enterrés au cimetière de Kiel. Après exhumation, leurs dépouilles ont été enterrées dans une fosse commune au Schoonselhof, aux côtés de celles des Belges qui sont également restées anonymes. Cet événement tragique est resté secret jusqu'à aujourd’hui et nécessite une enquête plus approfondie. In memoriam – 1894 Nom Bitio Sabo Isokoyé Manguesse Monguene Binda Mangwanda Pezo

Âge

Date de décès

20 ans 24 ans 31 ans 18 ans 18 ans 25 ans 17 ans 18 ans

12 - 05 -1894 13 -05 -1894 22 -05 -1894 28 -05 -1894 28 -05 -1894 16 -06 -1894 22 -06 -1894 09 -07 -1894

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32 | Registre des admissions de l'hôpital Stuivenberg d'Anvers

34 | Registre du cimetière disparu de Kiel [détails]

1894 Papier et encre Dossier Alexis Mols de la direction générale de l'Exposition universelle de 1894 Prêt des Archives Félix/Archives de la ville, Anvers (325#988)

Du 24 août 1892 au 2 février 1895 Papier Prêt des Archives Félix/Archives de la ville, Anvers ( 637#40)

Alexis Mols Les noms des 44 Congolais malades, dont les huit qui sont décédés, se retrouvent dans le dossier d'archives du citoyen anversois Alexis Mols (18531923). Il y est également fait mention des coûts de leur prise en charge médicale. L'homme politique libéral Mols était un industriel et un commerçant d'huile de palme, de caoutchouc et d'ivoire congolais. Il faisait partie du comité d'organisation de l'Exposition universelle (1894). Mols était un homme de confiance de Léopold II et co-gérant de la société anversoise Anglo-Belgian Indian Rubber and Exploration Company (ABIR). Celle-ci possédait une concession de caoutchouc dans l'État indépendant du Congo.

Des Congolais morts et malades Sur les 144 personnes embarquées depuis le Congo, deux sont mortes d'extrême malnutrition à leur arrivée à Anvers en mai 1894 : Bitio et Sabo. Plus tard, 43 femmes, enfants et hommes, et un bébé, ont été hospitalisés. Tous souffraient de problèmes respiratoires, de troubles oculaires sévères et de dysenterie. Ils étaient âgés entre 16 et 31 ans. Ensemble, ils ont passé 503 jours à l'hôpital de Stuivenberg avant leur retour au Congo en août 1894.

33 | Registre des admissions de l'hôpital Stuivenberg d'Anvers 1894 Reproduction Dossier Alexis Mols de la direction générale de l'Exposition universelle de 1894 Prêt des Archives Félix/Archives de la ville, Anvers (325#988)

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Fosse commune oubliée

Les huit Congolais décédés ont d'abord été inhumés dans le cimetière de Kiel. En 1936, le cimetière fut fermé et en 1945, deux bombes V ont détruit des parties du cimetière désaffecté. Les monuments funéraires avec un 'permis éternel', comme ceux de l'élite anversoise, ont été reconstruites au cimetière Schoonselhof à Wilrijk. Les dépouilles de citoyens anversois moins aisés et des huit Congolais se sont retrouvées là-bas dans une fosse commune : l'Ossuaire du parc U. Il n'y a aucune plaque commémorative pour les Congolais et les 360 000 autres anonymes qui y reposent.

35 | Le lieu de repos oublié de huit Congolais (1894) Les cimetières de Kiel et de Schoonselhof Réalisation MAS, 2020

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1930, 100 ans de la Belgique. Une autre exposition universelle

En 1930, à l'occasion du 100e anniversaire de la Belgique, la ville portuaire d'Anvers a, pour la troisième fois, mis en scène une exposition internationale, en collaboration avec la ville industrielle de Liège. Le succès du port mondial et la fierté nationale ont été les deux thèmes principaux. Les soldats congolais de la Force Publique, l'armée coloniale, se sont rendus en Belgique. Les organisateurs eux-mêmes n'ont pas organisé des représentations dans un zoo humain congolais. La reconstruction d'un village occidental-africain avec des étangs sur Kiel Vest était une initiative privée française. Lieu : le Kiel à Anvers Nombre de visiteurs : plus de 5 000 000 Profil des visiteurs : hommes d'affaires belges et internationaux , et autres citoyens belges

36 | Exposition universelle des colonies, de la navigation et de l'art flamand, Anvers (sur le Kiel) Brochure (reproduction agrandie) 1930 © Archives Félix/Archives de la ville, Anvers

37 | Carte de l'exposition universelle, Anvers (sur le Kiel) Reproduction 1930 MAS, (MAS.0301 1/3-3-3)

39 | Gazette d'Anvers - le Palais congolais Programme de l'exposition universelle Octobre 1930 Papier et encre Don de Willy et Sibylle Doninck-Roop, 2012 MAS, (MAS.0077.181)

40 | Gazette d'Anvers - Section coloniale Programme de l'exposition universelle Mai 1930 Papier et encre Don de Willy et Sibylle Doninck-Roop, 2012 MAS, (MAS.0077.018)

38 | Dioramas du Pavillon congolais de l'Exposition universelle Reproduction Gazette d'Anvers 1930 MAS, (MAS.0077.026)

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41 | Gazette d'Anvers - Propagande de l'école coloniale Programme de l'exposition universelle Août 1930 Papier et encre Don de Willy et Sibylle Doninck-Roop, 2012 MAS, (MAS.0077.102)

42 | Gazette d'Anvers - Vue des dioramas Programme de l'exposition universelle Mai 1930 Papier et encre Don de Willy et Sibylle Doninck-Roop, 2012 MAS, (MAS.0077.026)

43 | L'exposition universelle 1894 Montage du matériel visuel historique MAS, 2020

44 | Anvers Congo Compagnie Maritime Belge Affiche de Louis Royon (reproduction) Environ 1930 © Collection Letterenhuis, Anvers

Un regard stéréotypé Le Pavillon du Congo exhibait fièrement les réussites et les avancées réalisées au Congo belge grâce à la colonisation. La propagande en faveur de la mission catholique aura suscité un grand intérêt. L'accent fut mis sur la conversion, l'utilité des missions, des écoles et des internats et les soins médicaux. Les dioramas avec des sculptures en plâtre donnent une image stéréotypée de la population congolaise. On leur attribuait une vie au milieu d'une faune et d'une flore exotiques.

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1920. Premiers objets congolais dans un musée d'Anvers

À partir de 1900, les ‘Paquebots Congo’ se sont amarrés plus souvent à Anvers, transportant des marchandises de la colonie. Ainsi que des armes, des objets d'art et utilitaires appartenant aux peuples congolais. Ces biens étaient pris lors de campagnes militaires, de missions chrétiennes et d'expéditions scientifiques. Des situations qui étaient souvent accompagnées de violence ou d'abus de pouvoir. Pendant plus de trente ans, la plupart des objets se sont retrouvés au Musée du Congo belge à Tervuren, où le 'travail de civilisation' en Afrique centrale est mis à l'honneur. Les colons, une fois de retour au pays, exposaient des objets chez eux en guise de 'trophées'. D'autres objets circulaient aussi au sein du commerce florissant de l'art congolais avant de se retrouver chez des collectionneurs privés. En 1920, le Musée Vleeshuis (Musée Vieille Boucherie) d'Anvers entre en possession des premiers objets pour la 'section congolaise'. La ville a ensuite acheté quelque 1600 pièces au marchand d'art Henri Pareyn. Quant au ministre des Colonies, Louis Franck, il en a donné plus de soixante après un voyage d'inspection au Congo. Par conséquent, le musée de Tervuren a perdu son monopole en tant qu'institution patrimoniale d'objets congolais. Les collections de Pareyn et Franck ont servi de prémisses pour les collections africaines de la ville d'Anvers. 31


Le don du ministre des Colonies Louis Franck à la ville d'Anvers

Louis Franck, anversois et le ministre des Colonies, a effectué une tournée d'inspection au Congo de février à octobre 1920. De retour chez lui, il a fait don des objets qu'il avait emmenés avec lui au Vleeshuis d'Anvers, et non au musée de Tervuren. Ce choix était surprenant pour un ministre. La collection comprenait des pièces uniques. Franck (1868-1937), fils de parents libéraux et laïques, a fait ses études à l'Académie royale d'Anvers et a travaillé comme avocat de droit maritime à Anvers. Il était également ministre belge des Colonies de 1918 à 1924. Louis Franck a également fondé l'Université coloniale de Belgique, qui est à présent le campus Middelheim de l'Université d'Anvers. Le collège était un institut de formation qui allie une discipline presque militaire à une formation universitaire. Un groupe d'hommes strictement sélectionnés était formé au travail de fonctionnaire colonial dans les colonies belges du Congo belge et du Ruanda-Urundi. Entre 1924 et 1962, quelques milliers d'étudiants ont obtenu un diplôme en sciences coloniales et administratives. 45 | Portrait de Louis Franck (1868-1937) Environ 1920 Photographie (reproduction) © Letterenhuis, Anvers

46 | Livre Le Congo Belge, Tome I Auteur Louis Franck. Éditeur : La Renaissance du Livre (Bruxelles) 1929-1930 Cuir et papier Prêt de collection privée, Anvers

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47 | Livre Le Congo Belge, Tome II Auteur Louis Franck. Éditeur : La Renaissance du Livre (Bruxelles) 1929-1930 Papier MAS (bibliothèque EVA)

48 | Voyage au Congo belge de Louis Franck, ministre des Colonies Cartes postales du Congo-Belge. N° 109, 110, 114 et 111 1920 Papier Don de Marc Favril, 2009 MAS (AE.2009.0018.0111D; 0112D ; 0116D ; 0117D) – 100 x c o n g o –


Collectionneur et marchand d’art pionnier : Henri Pareyn

Henri Pareyn (°1869) était le fils de bateliers de Flandre occidentale. Il s'est installé dans la ville d'Anvers après son mariage avec Cesarina Deraedt en 1896. Ce collectionneur pionnier s'est avéré être une figure centrale du commerce de l'art congolais belge. Pareyn lui-même ne s'est jamais rendu en Afrique, mais il écumait les quais du port d'Anvers. Là où des 'bateaux congolais' accostaient tous les mois. Il en profitait pour acheter des objets aux colons revenus au pays. Jusqu'à sa mort en 1928, Pareyn a rempli sa maison de la Tolstraat d'objets provenant du Congo belge. Pareyn n'a jamais tenu une galerie au sens strict du terme. Il a alimenté un vaste réseau d'acheteurs, même en dehors de la Belgique. Il a vendu des œuvres au Musée de Tervuren et à de nombreux collectionneurs privés. Parmi ses clients, on compte également les plus grands artistes d'avant-garde et les marchands d'art parisiens. Après sa mort, le reste de sa collection fut vendue aux enchères. 49 | Portrait d'Henri Pareyn (1869-1928) Début du XXe siècle Photographie (reproduction) © Archives du MAS, avec l'autorisation de B. de Grunne

50 | Décision du collège d'Anvers. Autorisation d'achat de la collection congolaise Pareyn 17 mai 1920 Papier Archives historiques, anciennement Musée d’Ethnographie d'Anvers MAS

Une importante négociation En 1920, Henri Pareyn a mis en vente une partie de sa collection au Musée Vleeshuis d'Anvers. Jusqu'alors, le musée s'était consacré à l'art européen et à l'histoire de la ville d'Anvers. Après de longues négociations, Pareyn a réussi à obtenir gain de cause : la ville lui a versé 43 000 francs belges, une somme importante pour l'époque. Frans Claes et Louis Franck ont tous deux servi de médiateurs auprès du conseil municipal. Le paiement s'est étalé sur quatre années.

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51 | Livret d'enchères de la collection Pareyn, Art nègre du Congo

l'Angleterre et les États-Unis. Aujourd'hui encore, les objets Pareyn passent de mains en mains sur le marché de l'art.

Imprimerie Brouwers Fils & C°, Anvers, 1928 MAS (bibliothèque)

53 | Musée Vleeshuis, avec vue de l'art congolais acheté, environ 1930-1940

Vente aux enchères internationale

Photographie (reproduction) © MAS, Anvers

Après la mort de Pareyn en 1928, sa veuve a fait vendre aux enchères une partie du reste de sa vaste collection dans les salles du luxueux Grand Hôtel Weber d'Anvers. La vente aux enchères était dirigée par Frans Claes et a attiré une foule d'acheteurs belges et internationaux : des collectionneurs privés, des commerçants et des représentants de musées ethnographiques européens. Les acheteurs pouvaient faire une offre pendant cinq jours. Avec quelques 2000 lots, cette vente aux enchères reste l'une des plus importantes jamais organisées pour l'art congolais.

52 | Grand Hôtel Weber Anvers, vers 1920 Carte postale (reproduction) © Archives Félix/Archives de la ville, Anvers

D'Anvers jusqu’à l'Angleterre et les États-Unis Le profit de la vente aux enchères de Pareyn s'élevait à près de deux millions de francs belges ! La presse anversoise parlait alors 'd'une vente sensationnelle' et faisait mention d'un constat amer : à peine 19 objets avaient été achetés pour le Musée Vleeshuis. Quant au Musée de Tervuren, il est également parti bredouille. L'essentiel de la collection est tombé entre les mains de Sir Henry Wellcome (1853-1936), un Anglais d'origine américaine. Des milliers de pièces Pareyn ont été acheminées vers 34

54 | Grand Hôtel Weber, aménagé en salle des ventes, 1928 Photographie (reproduction) © MRAC, Tervuren

55 | Tambour Kivu, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois et fibres Acheté à Pareyn, 1920 MAS (AE.3919)

56 | Statue féminine Peuples Kongo, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois et métal Acheté à Pareyn, 1920 MAS (AE.0602)

57 | Cruche Voania (de) Muba, Woyo, République démocratique du Congo 1920 Terre cuite Acheté à Pareyn, 1920 MAS (AE.0589)

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La collection congolaise : du Musée Vleeshuis au MAS

Depuis 1920, le Musée Vleeshuis (Vieille Boucherie) a été le premier à exposer des objets congolais provenant des collections municipales d'Anvers. La section Congo a pour but de familiariser le public belge avec les peuples de la colonie. Le musée présente les objets de manière aléatoire, selon l'esprit du temps : armes, statues, masques et objets utilitaires se retrouvent parmi des crânes d'animaux, comme dans un cabinet de curiosités. Pendant la Seconde Guerre mondiale, des objets congolais se sont retrouvés au Hessenhuis. Ils sont ensuite restés dans l'ombre pendant quarante ans, jusqu'en 1988, lorsque le Musée d'Ethnographie au Suikerrui, prévu de longue date, a ouvert ses portes. Depuis 2007, les objets congolais font partie de la collection des Cultures du monde du MAS, ouvert en 2011. 58 | Partie 1 : La collection congolaise au Musée Vleeshuis Environ 1920-1940

Partie 2 : L'Université Coloniale d'Anvers Montage d'images historiques Réalisation du MAS, 2020

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Pionnier : Frans Olbrechts

Le scientifique belge Frans Olbrechts (1899-1958) a mené des recherches pionnières sur les différentes cultures, tant en Europe qu'ailleurs dans le monde. Il est considéré comme le père spirituel du Musée d'Ethnographie d'Anvers, fondé en 1952 sans bâtiment muséal permanent. Olbrecht fut l'un des premiers à aborder et à présenter les objets congolais non seulement comme des témoins ethnographiques, mais aussi comme de l'art. Très tôt, il reconnaît la main des maître congolaise. Olbrechts a été formé comme germaniste à l'Université Catholique de Louvain et comme ethnologue à l'Université Columbia de New York. Il a développé sa carrière à l'Université de Gand et a été directeur du Musée royal du Congo belge à Tervuren de 1947 jusqu'à sa mort en 1958. 59 | Affiche de l’exposition sur l'art congolais

61 | Ex libris de Frans Olbrechts

Jean Van Noten 1937 Papier Archives historiques, anciennement Musée d'Ethnographie d'Anvers MAS (AE.2001.0026.D)

60 | Portrait de Frans M. Olbrechts (1899-1958) Jean Van Noten 1937 Dessin au fusain Don de M. Olbrechts-Maurissens, 1977 MAS (AE.1977.0037.0274)

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Jean Van Noten S.d. Papier et encre Prêt d'une collection privée, Gand

62 | Livre Les arts plastiques du Congo belge, traduction française de l'édition néerlandaise de 1946 Frans Olbrechts, en collaboration avec Albert Maesen 1959 Bruxelles MAS (bibliothèque )

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63 | Coupure de magazine : la collection congolaise du Musée Vleeshuis 1937 Papier Prêt de Letterenhuis, Anvers (Archives Olbrechts)

Une exposition révolutionnaire En 1937-1938, Olbrechts a mis l'art congolais sur la carte internationale en organisant l'exposition révolutionnaire Art congolais au sein de la Salle des Fêtes d'Anvers. Parmi les plus de 1500 œuvres exposées, beaucoup appartiennent au don de Louis Franck et à l’achat d'Henri Pareyn. Une statue d'ancêtre Hemba figure sur l'affiche. La ville d'Anvers a acheté le chef-d'œuvre en 1930 pour une somme importante sur le marché de l'art.

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Missionnaires : enjeux et respect

Pour les missionnaires de l'époque coloniale, la conversion massive des Congolais au christianisme et une bonne éducation primaire sont les principaux objectifs. Les soins médicaux sont également une responsabilité essentielle des Pères, des Frères et des Sœurs. L'attitude des missionnaires envers la culture et la religion congolaises traditionnelles différait d'un individu à l'autre. Beaucoup sont entrés en conflit avec les banganga, les guérisseurs spirituels, ainsi qu'avec les chefs congolais. On connaît les histoires des bûchers du XIXe siècle sur lesquels les Pères ont détruit les objets rituels 'pernicieux' et 'païens' de la religion congolaise. Des objets d'art et utilitaires de plusieurs siècles ont été ainsi détruits. Toutefois, tous les missionnaires n'ont pas agit de manière aussi radicale. Certains ont, en effet, respecté l'expression des convictions congolaises et étudié les langues et les cultures congolaises. Au plus ils en apprenaient, au plus ils en appréciaient la valeur. Certains prenaient des objets congolais bien documentés en leur possession. Ces derniers se sont souvent retrouvés plus tard dans les musées belges et européens. 64 | Chef Bambi Graça, Kinsimba (village), Angola Photographie : Jan Vissers Don de Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0051.0002.D)

Jan Vissers : anthropologue missionnaire Le Père néerlandais Jan Vissers (?-1989) a travaillé, de 1946 aux années 1960, au sein de différents

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peuples congolais du nord de l'Angola et du Cabinda. Il s'est révélé être un ethnologue-anthropologue. Selon lui, leur 'art en voie de disparition' n'existerait plus dans cinquante ans. C'est pourquoi il s'est mis à acquérir et à documenter des objets fébriles. Vissers a pu gagner la confiance des chefs et obtenir des crucifix. Il les a collectionné pour le Musée de l'Afrique à Berg en Dal aux Pays-Bas, le Musée de Tervuren et le Musée d'Ethnographie d'Anvers.

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Crucifix et sceptres de pouvoir

Au cours de la christianisation aux XVe et XVIe siècles, les habitants des côtes du royaume du Kongo se sont familiarisés avec les symboles chrétiens. Ils les ont fabriqués eux-mêmes et leur ont donné leur propre signification. Les crucifix portugais, et plus tard flamands, ont servis de modèles pour ceux des chefs congolais. Les peuples Kongo ont interprété la forme et la signification symbolique des crucifix européens à leur manière. Les crucifix (nkangi kiditu) sont d'ailleurs devenus des objets chargés de pouvoirs (minkisi) pour les chefs. Ils disposaient à la fois d'un pouvoir de guérison et d'un pouvoir de destruction. Ils étaient des attributs distinctifs, portés comme des sceptres. C'est ainsi que les souverains affirmaient leur autorité et leur ascendance royale. D'après le Père Vissers, certains d'entre eux dataient du XVIIIe siècle. 65 | Croix avec le Corpus Christi Essi Kongo, village de Kivola, Angola Acquis auprès du chef de clan Matundu (clan Nekontshi Mpangi Nekongo) Bois et cuivre (impression d'un modèle portugais) Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0001)

67 | Croix avec le Christ et trois personnages Solongo, village de Mongo, Angola Acquis auprès du chef de clan Badi Sita (clan Tskala Mpanzu, Angola) Cuivre Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0005)

66 | Croix avec le Christ et deux personnages assis

68 | Pendentif en forme de croix avec personnage féminin

Essi Kongo, village de Kinguvu, Angola Acquis auprès du clan Nenoki Ndumba a Nzinga Cuivre et plomb Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0003)

Solongo, village de Kifinda, Angola Acquis auprès du chef de clan Kothsii a Mvemba (clan Kengue) Corde en fibre et laiton Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0011)

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69 | Pendentif en forme de croix avec le Christ avec coiffe de plumes Mimbamba, village de Kinsimba, Angola Acquis auprès du chef de clan Pedro Mendes (clan Miungu) Cuivre Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0012)

70 | Petite croix

73 | Corps du Christ Essi Kongo, village de Kinsimba, Angola Acquis auprès du chef de clan Bambi Graça (clan Simba kia Kostshi) Cuivre Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0006)

74 | Corps du Christ Essi Kongo, village de Lengue, Angola Acquis auprès du chef de clan Antonia Lutete Kela (clan Mpudi a Nzinga) Cuivre Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0004)

Essi Kongo, village de Fuansi, Angola Acquis auprès du chef de clan Lutete Mavungu (clan Mbenza Nekongo) Bois et métal Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE. 1959.0015.0009)

71 | Corps du Christ Solongo, village de Mukula, Angola Acquis auprès du chef de clan Ngonga (clan Ne Petelu a Ngombe) Cuivre Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0010)

72 | Corps du Christ Essi Kongo, village de Yenga, Angola Acquis auprès du chef de clan Pedro Bambi (clan Kilamvu) Cuivre Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0008)

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Art Nkanu d'un musée des missionnaires fermé

En 2016, la collection du MAS s'est enrichie d'un don inattendu. Comme beaucoup de musées missionnaires belges, les Frères de Notre-Dame de Lourdes ont été confrontés au vieillissement de la population et aux disparitions imminentes. La génération qui avait œuvré au Congo (belge) vieillit. Lorsque leur musée des missionnaires à Oostakker a fermé ses portes, la congrégation a tenté d'obtenir une nouvelle destination publique de sa collection missionnaire. Une grande partie sera intégrée au MAS, notamment des sculptures nkanda des Nkanu. Le nkanda est un rite de passage pour les jeunes garçons qui atteignent l'âge adulte. Les statues et panneaux colorés présentés au cours de cette initiation font référence à l'importance de la fécondité humaine et animale. Les statues et panneaux nkanda véhiculent métaphoriquement des messages qui font référence à un comportement immoral. Les choses qui sont traitées avec respect dans la vie quotidienne ordinaire peuvent être provisoirement moquées dans le cadre du ‘rituel’. 75-77 | Panneaux Nkanda (soldat de la Force Publique, un missionnaire et un homme) Nkanu, République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Bois, pigment, bambou et cuir Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, Oostakker, 2016 MAS (MAS.0170.049, 050 et 051)

78 | Petit panneau Nkanda (perroquet) Nkanu, République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Bois et pigments Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, Oostakker, 2016 MAS (MAS.0170.052)

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79-80 | Poupées (homme et femme) Nkanu, République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Bois et pigment Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, Oostakker, 2016 MAS (MAS.0170.035 et MAS.0170.0036)

81 | Statue poteau (kala, au pluriel makala) Nkanu, République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Bois et pigment Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, Oostakker, 2016 MAS (MAS.0170.053)

82 | Vue d'une exposition missionnaire à Oostakker, 1947 Photographie (reproduction) © KADOC, Louvain

83 | Vue d'une exposition missionnaire de la Congrégation Notre-Dame de Lourdes, Oostakker, 1947 Photographie (reproduction) © KADOC, Louvain

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Sous le masque noir/blanc

Le film Sous le masque blanc de Matthias De Groof a été réalisé pour cette exposition. Il s'agit d'un remontage du documentaire artistique Sous le masque noir du cinéaste belge Paul Haesaerts (1901-1974). Le film de Haesaerts porte sur les objets d'art et utilitaires congolais. Il y présente vingt pièces phares de cette exposition. Son film éducatif avait beau être formellement novateur, son contenu était stéréotypé. Dans le remontage de De Groof, nous ne parlons pas des statues, mais elles regardent et répondent. Elles le font au travers d'un texte du poète, penseur et homme politique Aimé Césaire. Son texte en Français datant de 1950 a été traduit en Lingala et est un miroir confrontant et toujours d'une grande actualité. Ce texte tout comme la musique existaient déjà lorsque Haesaerts a réalisé son film. Selon De Groof Sous le masque blanc est le film que Haesaerts aurait pu réaliser.

84 | Sous le masque blanc : le film qu’Haesaerts aurait pu réaliser Datum: 2020 Réalisation : Matthias De Groof Texte : (basé sur) le ‘Discours sur le colonialisme’ d'Aimé Césaire. Montage : Matthias De Groof et Neel Cockx Traduction en Lingala : Bienvenu Sene Mongaba Traduction en néerlandais : Matthias De Groof Voix : Maravilha Munto Production : Daniel De Valck (Cobra Films) Durée : 10 min.

85 | Script avec croquis pour Sous le masque noir Paul Haesaerts 1957-1958 Papier Prêt de MRBAB, Archives de l'art Contemporain en Belgique, Bruxelles (AHKB, 565)

86 | Documentaire artistique Sous le masque noir Documents d'archives Paul Haesaerts, Art et Cinéma 1957-1958 Papier Prêt de MRBAB, Archives de l'art Contemporain en Belgique, Bruxelles (AHKB, 563, 566, 565)

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Les pièces phares de la collection MAS

100 PIÈCES PHARES

Découvrez 100 pièces phares issues d'une vingtaine de peuples congolais ! Ensemble, elles offrent un aperçu de la très ancienne richesse culturelle et artistique du Congo. Quelle était leur signification ? Et quelles histoires ont-elles à nous raconter ? La collection africaine du MAS rassemble environ 15 000 œuvres. Plus de 5 000 pièces proviennent de la République démocratique du Congo (Congo-Kinshasa) et des pays voisins : la République du Congo (CongoBrazzaville) et l'Angola. Vous faites un voyage imaginaire à travers le Congo actuel. Bien sûr, il ne sera pas possible de se rendre partout : tous les peuples ne sont pas représentés dans la collection MAS. Nous démarrons notre voyage dans le sud-ouest, à l'embouchure du fleuve Congo et au sein du royaume historique du Kongo, avant de terminer dans la région équatoriale du nord. Les frontières coloniales ont artificiellement divisé des zones culturellement cohérentes et de nombreux peuples. Des objets d'art et utilitaires qui ont été séparés il y a un siècle se retrouvent ici ! 45


Les peuples Kongo À partir du XVIe siècle, les peuples Kongo ont été confrontés à la traite des esclaves, à l'ingérence croissante de l'Europe et à des luttes de pouvoir internes. À partir de la fin du XIXe siècle, il y a eu la colonisation. La France, le Portugal et la Belgique ont scindé le royaume du Kongo et séparé les populations.

PEUPLES KONGO

Divers peuples Kongo vivent actuellement à l'embouchure du fleuve Congo : au Gabon, en Angola avec l'enclave de Cabinda, en République démocratique du Congo et en République du Congo. Ils restent reliés entre eux, socialement et culturellement. Ceci ressort notamment de la conscience historique de leur ancien royaume. Même un phénomène comme la chefferie reste important.

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Statues de pouvoir de femmes (minkisi)

Statue de pouvoir (nkisi nkondi )

Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo/Angola Fin du XIXe siècle et avant 1920 Bois et métal Don de Louis Franck, 1920 MAS (AE.0608 et AE.0609) 3

Peuples Kongo, République du Congo/ République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, métal et petits sacs en tissu avec substances ‘magiques’ Acheté à Jacobs, 1942 MAS (AE.1942.0002.0002) 5

Statue de pouvoir (nkisi)

Statue de pouvoir féminine (nkisi)

Peuples Kongo : Vili (?), République du Congo Début du XXe siècle (?) Bois et métal Legs de Van Deuren-Van Remoortere, 2003 MAS (AE.2003.0010.0009)

Peuples Kongo, République du Congo/ République démocratique du Congo/Angola Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, verre et métal Don de Louis Franck, 1920 MAS (AE.0606)

Statues de pouvoir Les minkisi (‘remèdes’, ‘objets de pouvoir’) sont des objets chargés de forces ‘magiques’ provenant du monde invisible des esprits et des morts. Ils 46

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ont joué un rôle de premier plan en matière de politique et de religion, ont servi de médiateurs avec l’au-delà et ont offert aux individus une emprise sur les esprits capricieux et les forces de la nature. Une statue bienveillante protégeait la fertilité et avait un effet curatif. Quant aux statues malveillantes (nkisi nkondi), elles persécutaient les malfaiteurs. Le sculpteur confectionnait la statue et c’était le nganga, autrement dit le spécialiste spirituel, qui y ajoutait des substances actives. Ces statuettes sont également appelées ‘fétiches’, du terme portugais feitiço. Ce qui, en somme, se traduit par ‘panacée’ ou ‘idole’. 6

Sculpture d'initiation du chef ou du nganga Peuples Kongo. République démocratique du Congo/République du Congo/Angola Fin du XIXe - début du XXe siècle (?) Bois et métal Don de Geudens, 1923 MAS (AE.0618)

Un chef aux pouvoirs surnaturels Tout comme une statue nkisi, un chef Kongo était doté de pouvoirs surnaturels lors de son initiation. En tant que chef spirituel, il était lui-même un nkisi, autrement dit ‘une amulette vivante’. Son destin devenait celui de tout un chacun et de toutes choses. Quant à son autorité, elle reposait sur les ancêtres. Son pouvoir était si grand que les gens devaient s'en protéger. Avec l'aide de spécialistes des rituels (devins, sorciers...), il construisait un pont entre le monde des vivants et celui des morts. Il fut à la fois craint et honoré pour cela.

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Statue de pouvoir (nkisi nkozo) Peuples Kongo : Yombe, République démocratique du Congo/République du Congo Fin du XIXe siècle Bois, métal, miroir, poudre à canon, cauris, raphia, textile, résine, corne, patte de singe, kaolin, peau animale et pigment rouge Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0621)

Armes nocturnes Le chien, avec un grelot de chasse (dibu) autour du cou, porte sur son dos un petit coffret à remèdes ‘magiques’ qui n'a été que partiellement conservé. Les hampes de roseau entre ses jambes et sur son dos ont été remplis de poudre à canon. Ces 'armes nocturnes' étaient censées tuer les malfaiteurs. Allié des chasseurs dans la vie quotidienne, le chien aidait également le nganga dans sa quête des dangers du monde invisible. 8

Statue de pouvoir (nkisi), homme assis Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, textile européen, raphia, miroir, corne, os, résine, griffe, corne d'antilope et pigment Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0612)

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Statue de pouvoir (nkisi) avec bras levé Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, miroir, ivoire, métal, textile, griffe, cauris, fibre, coquillage, os, résine et pigment Don de Louis Franck, 1920 MAS (AE.0611)

Des miroirs porteurs de sens

PEUPLES KONGO

Une statue nkisi était activée par un nganga ou un spécialiste des rituels à l'aide de tissus magiques et renforcée avec des produits d'importation européens, tels que du textile teint et des clous. Les miroirs avaient une signification particulière pour les peuples Kongo. En effet, considérés comme de ‘l’eau figée’, ils séparaient le monde des vivants de celui des esprits, écartaient les dangers et offraient une protection. Les cavités oculaires d'une statue étaient souvent incrustés de bouts de miroir, tout comme les réceptacles de la cavité abdominale contenant les substances magiques. Le nganga traquait les dangers à travers le miroir ventral.

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CT scan

Réalisation en collaboration avec le service de radiologie de l'Hôpital Universitaire d'Anvers (UZA) et Geert Van der Snickt, UAntwerpen, groupe de recherche ARCHES & AXES, 2020

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Mère avec enfant (phemba) Peuples Kongo : Yombe, République du Congo Fin du XIXe siècle Bois, perles, miroir, métal et pyrogravure Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0555)

Beauté et courage Au XIXe siècle, les statues d'une mère et de son enfant jouaient un rôle important dans les rituels de fécondité. Cette statue fait référence à la femme en tant que ‘celle qui donne la vie’. Elle est représentée selon les anciens idéaux de beauté : dents limées, scarifications sur la poitrine et le dos... Les cicatrices, d'un centimètre d'épaisseur, embellissaient la femme et témoignaient de son courage lors des douloureuses entailles. Une belle femme était destinée à devenir une épouse exemplaire. Les embellissements corporels renseignaient également sur son peuple ou son rang social. 11

Canne cérémonielle du chef (mvuala) Peuples Kongo : Yombe, République du Congo XIXe siècle Bois et cuivre Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0719)

Canne cérémonielle d’un chef Les cannes cérémonielles des chefs (mvuala) des peuples Kongo remontent aux mythes fondateurs de leur royaume au XIVe siècle. Même après l'effondrement de ce dernier, 400 ans plus tard, les cannes sont restées un

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symbole de communication entre les vivants et les ancêtres. Elles ont longtemps été des accessoires importants de l'attirail des chefs. La statue assise fait référence à la femme fondatrice-ancêtre du clan ou à la fertilité de l'Homme et de la nature. Les motifs sont des pictogrammes et contiennent des messages sur les relations entre les vivants et les morts. 12

Couvre-chef (mpu) Peuples Kongo : Vili, République du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Fibres de raphia ou d'ananas Legs de J. Baetes, 1938 MAS (AE.4489)

Couvre-chefs à statut Dans la hiérarchie des peuples Kongo, les couvre-chefs étaient des signes distinctifs importants. Ils révélaient votre statut, votre autorité ainsi que votre identité. Ce genre de mitre, finement tissée (mpu), était plutôt réservée aux hommes et aux femmes de rang supérieur. Les couvre-chefs étaient confectionnés à partir de feuilles de palmier séchées ou de fibres d'ananas. La technique ingénieuse du crochet était un travail d'hommes et pouvait exiger des mois de travail. Les motifs géométriques remontent aux XVIe et XVIIe siècles. 13-14

Paniers avec couvercle Peuples Kongo, République du Congo/ République démocratique du Congo/Angola Inconnu Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.6572 et AE. 6573)

Paniers prestigieux Des vêtements, des objets de valeur et des reliques ancestrales étaient conservés dans ces paniers tressés prestigieux. Pour assurer leur durabilité, ils étaient fabriqués avec des écorces et des lamelles en bois alternativement tissées. Cet artisanat s'appuie sur une tradition séculaire qui a existé jusqu'au début du XXe siècle. L'intérieur est constitué de larges bandes végétales tressées non colorées. Les motifs géométriques complexes sur la face extérieure ont une signification symbolique. Par exemple, la forme du losange fait référence au cycle de vie. Quant aux angles, ils correspondent chacun à une phase de transition : la naissance, l'âge adulte, la mort et l'intégration au monde des ancêtres et des esprits. 15

Emblème de pouvoir Peuples Kongo, République du Congo/ République démocratique du Congo/Angola XIXe - XXe siècle (?) Ivoire et patine Acheté à Jan Vissers, 1959 MAS (AE.1959.0015.0019)

Poing serré, pouce levé Le poing serré avec le pouce levé était un symbole du pouvoir royal chez les Kongo. Cet emblème en ivoire est orné d'une imitation de cauris et de rosettes. Les rosettes étaient un motif symbolique de l'influente société Lemba qui existait déjà au XVIIe siècle. Cette société protégeait les couples mariés et réglait les différends commerciaux.

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Masque surmonté d’une coiffe de plumes

PEUPLES KONGO

Peuples Kongo : Vili, République du Congo/ République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle (?) Bois, plumes, boutons en plastique, textile, cuir et corne Legs d'Ady Van Deuren-Van Remoortere, 2003 MAS (AE.2003.0010.0017) 17

Masque Peuples Kongo : Yombe, République du Congo/République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.3714)

Masques en guise d’intermédiaires Les hommes de pouvoir avaient recours aux masques faciaux et faisaient également appel à des chefs et à des spécialistes de rituels (banganga). Ces guérisseurs talentueux et instruits communiquaient avec l'au-delà. L'un de ces exemplaires porte une somptueuse coiffe de plumes. D'après les peuples Kongo, les plumes d'oiseaux établissaient un trait d'union entre la vie terrestre et l'au-delà. Les masques faciaux agissaient à l'encontre des faiseurs de troubles. Ils commandaient le respect des lois ancestrales et de ceux qui étaient au pouvoir. Leur bouche ouverte ainsi que leurs dents exposées et limées leur donnaient un air menaçant.

Teke Lors de la Conférence de Berlin en 1884-1885, les pays européens ont réparti l'Afrique entre eux. Les territoires de nombreux peuples ont été divisés, sans que les habitants aient eu leur mot à dire.

TEKE

Le royaume Tio, avec les Teke et les Mfinu, fut également scindé : les Teke vivaient sous la domination coloniale de la France et de la Belgique. Aujourd'hui, la plupart des Teke vivent sur les rives du lac Pool Malebo et du fleuve Congo, en République du Congo (Brazzaville) et en République démocratique du Congo (Kinshasa). Certains groupes vivent également au Gabon. Des symboles de statut des dirigeants Teke sont visibles sur leurs armes d’apparat et leurs statues rituelles. Leurs chefs et autres personnages importants étaient reconnaissables à leur coupe de cheveux : un chignon sur l'arrière du crâne. Leur barbe était un signe de dignité et de sagesse. Les chefs arboraient également des scarifications en rainures parallèles (mabina) sur le front et les joues. Il s'agissait d'un idéal de beauté pour les Teke et les peuples apparentés et indiquait leur statut. 50

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Statue masculine (kira ou buti)

Deux figurines de divination

Teke, République du Congo/République démocratique du Congo Fin XIXe - début du XXe siècle Bois et patine croûte Legs de A. Van Deuren-Van Remoortere, 2003 MAS (AE.2003.0010.0011)

Teke, République du Congo/République démocratique du Congo Avant 1940 Laiton Don d'Engels, 1941 Collection Seconde Guerre mondiale, cuivre, 1946 MAS (AE.1941.0006.0001, AE.1946.0002.0017)

Statues chargées Les Teke se servaient de statues de pouvoir pour la divination, en guise de protection ou pour acquérir des richesses et du pouvoir. Lors des rituels, les statues étaient chargées par l'ajout de substances ‘magiques’. Ces objets étaient également habités par des esprits. Notamment des esprits d'ancêtres logés dans des statues nkira et des esprits inconnus dans des statues buti. Leur apparence n'indique pas clairement à quoi servaient les statuettes. Il pourrait s'agir d'une statue d'un ancêtre qui protégeait sa descendance. Les noms des statues Teke font référence à ce que les ancêtres ont fait durant leur vie : 'ancêtre-chef', 'ancêtre-chasseur', 'ancêtre-forgeron'... 19

Cruche à tête humaine Teke, République du Congo/République démocratique du Congo Début du XXe siècle Terre cuite Acquisition de la vente aux enchères de Breckpot, 1930 MAS (AE.0595)

Forgeron spirituel Un forgeron qui confectionnait des outils, des armes et des statues de divination en fer était également un spécialiste spirituel. Il était l'allié des guérisseurs et des dirigeants politiques. L'extraction de minéraux à partir du minerai de fer fut comparée à un accouchement. Cette dernière était soumise à des consignes rituelles strictes. 22

Hache de prestige (imbu) Teke, République du Congo/République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, cuivre (lame de hache), laiton, fer et clous Acquisition de la vente aux enchères de Breckpot, 1930 MAS (AE.0771)

La puissante parole du chef Lors de rassemblements importants, un chef Teke portait une hache de parade sur son épaule. Cet exemplaire, avec son manche décoré, est un chef-d'œuvre. La tête de la hache est une tête humaine et la lame en cuivre émerge de la bouche ouverte. Ceci symbolise la puissante parole du chef ainsi que son rôle de juge.

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TEKE

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MBUUN

Comme d'autres symboles de pouvoir, la hache pouvait également représenter le chef absent lors des rassemblements villageois.

Mbuun

cette position provocatrice des jambes fléchies serait celle d'un adversaire qui offrirait de la terre à son rival, ici imaginaire. Ce dernier prenait alors la même position et faisait brusquement tomber la terre de la paume de ses mains. 23

Une coupe provocatrice

Coupe en forme de cariatide

Cette coupe Mbuun contenait probablement le kaolin (mpio). Elle était passée de main en main lors des rituels d'initiation d'un chef. Ce geste justifiait sa propriété foncière et symbolisait la présence des ancêtres. Un personnage aux genoux pliés, aux bras tournés vers l'avant et aux paumes des mains tournées vers le haut tient la coupe. Selon les traditions orales,

Mbuun, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle (?) Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0281)

Les coupes Mbuun qui sont élaborées en tant que silhouette féminine portant quelque chose (cariatide) sont extrêmement rares.

Pende Les masques Pende en bois (mbuya) avec un col et une coiffure en raphia étaient portés pour danser lors de diverses festivités, également à la fin du mukanda, les rituels d'initiation des jeunes garçons.

PENDE

Les masques mbuya représentent des dizaines de personnages. Chacun possède sa propre chorégraphie et son propre rythme. Les personnages classiques sont le chef, l'ensorceleur, le clown subversif et le guerrier ou le défenseur de la loi. Au fil du temps, certains modèles de masque ont disparu et de nouveaux personnages sont apparus. Ces derniers ont été créés sur base de nouveaux pas de danse, rythmes et chants, pour lesquels un nouveau masque a ensuite été créé. Il s'agissait du dernier maillon du processus de création. Les masques étaient des personnifications d'esprits ancestraux. Ils servaient d'intermédiaires entre les morts et les vivants. Ils étaient 52

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portés par des hommes mais les femmes et les enfants dansaient aussi. À l'heure actuelle, les performances avec masques sont également une forme de divertissement.

Masque (mbuya) Pende, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois, raphia et pigment Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0554)

Masque mortuaire Ce masque au visage masculin avec un prolongement sous le menton est appelé Giwoyo. L'appendice en forme de planche n'est pas une barbe. Elle représente une personne décédée sur un linceul et fait référence aux ancêtres. 25

Masque en bois (mbuya) avec coiffure à chignons Pende, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois et raphia Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0551)

bois avec une coiffe en raphia en pointe est due à une mauvaise restauration effectuée dans les années 1950. Les masques Pende en bois étaient généralement peints en rouge ou en ocre. Ce modèle avait, à l'origine, la même couleur que les autres. 27-31

Cinq masques miniatures (ikhokho, gikhokho au singulier) Pende, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Ivoire et plomb Acheté à Pareyn, 1920 MAS (AE.0832 ; AE.0833 ; AE.0841 ; AE.0860 (plomb) ; AE.0858)

PENDE

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Ces masques miniatures existent également en bois, en os ou en noyaux de fruits. La patine ambrée des exemplaires en ivoire est le résultat de l'usure, du lavage au sable fin et du contact avec la peau du porteur. Elle était enduite d'huile et de poudre de bois rouge.

Des chaînettes en signe de protestation

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Masque en bois (mbuya) Pende, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois et raphia Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0550)

Mauvaise couleur La décoloration noire de ce masque en

Ces versions miniatures des mukanda en bois et des masques de guérison étaient transformées en chaînettes (ikhokho) par un sculpteur d'ivoire. Ces dernières étaient portées par les propriétaires des masques en bois et les jeunes garçons initiés ainsi que prescrits par les guérisseurs. Elles ont également joué un rôle dans la passation du pouvoir d'un chef ou des

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PENDE

héritiers légaux du pouvoir. Celui qui se voyait offrir le ghikhoko d'un ancêtre, recevait également son principe de vie. Les ikhokho étaient populaires de 1930 jusqu'à l'indépendance du Congo en 1960. Elles soulignaient l'identité des Pende et symbolisaient la protestation contre l'occupant colonial.

Sifflet en forme de clé Ce sifflet Pende avec une petite tête est sculpté comme des petits masques en pendentif (ikhokho). Il est possible que la forme fût inspirée par celle des clés de coffres de bord et de malles importés en Afrique au XVIIe et XVIIIe siècles. 33

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Petit pendentif de masque

Sifflet Pende, République démocratique du Congo Avant 1920 Ivoire Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0847)

Pende, République démocratique du Congo Avant 1920 Ivoire ou os Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0851)

Mbala Chez les Mbala et les peuples voisins apparentés, les statues de la mère et de l'enfant, ainsi que celles des figures masculines, étaient utilisées dans le contexte de l’intronisation d'un chef. Réunies, on les appelait pindi. Elles étaient conservées dans une ‘salle du trésor’. Chez les Mbala, les femmes jouaient un rôle de conseil politique.

MBALA

Le thème de la mère et de l'enfant fait référence au rôle vital du chef, ainsi qu'à sa fonction de gardien de la fécondité de l’être humain, des animaux et des cultures.

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Statue d'une mère avec son enfant (wenyi) Mbala, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle (?) Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0520) 54

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Luluwa Les sculptures sur bois Luluwa sont généralement reconnaissables aux motifs complexes des scarifications sur le visage et le corps, qui embellissent les individus. Pour les Luluwa, la beauté physique reflète les qualités morales. Elle accroît également l'efficacité rituelle des sculptures.

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Peigne avec petite tête Luluwa, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0655) 36

Demi-figurine (femme) Luluwa, République démocratique du Congo XIXe siècle Bois et patine à l'huile Acheté à Pieter Jan Vandenhoute, 1960 MAS (AE.1960.0014)

Protection durant la grossesse Les femmes Luluwa utilisaient des sculptures pour se protéger et protéger leurs bébés pendant la grossesse. Ces sculptures étaient utilisées dans le cadre d'un culte de fécondité (bwanga bwa cibola).

Un ancêtre pouvait se réincarner dans l'enfant. Ces petites sculptures étaient donc attachées aux vêtements ou placées à côté du lit. On les frottait régulièrement avec de l'huile de palme. 37

Récipient Luluwa, République démocratique du Congo XIXe siècle (?) Bois, ivoire et patine à l'huile Acheté à Van De Walle, 1960 MAS (AE.1960.0046.0006)

Récipient en ivoire Ce récipient, à la finition raffinée, est constitué d'un fragment de défense d'éléphant à la patine brillante et brunâtre. Il s'agissait probablement d'un récipient pour la conservation du chanvre. Les motifs incisés font référence aux scarifications, l'idéal de beauté des Luluwa du XIXe siècle.

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LULUWA

À la fin du XIXe siècle, la consommation de tabac et de chanvre s'est répandue de façon intensive dans la région Luluwa. Fumer ou renifler ces substances se faisait dans divers contextes : divination, justice et guérison. Le tabac était importé en Afrique centrale par les Portugais d'Amérique du Sud. Quant au chanvre, il fut répandu dans certaines régions d'Afrique par les Arabes depuis l'Inde.


LULUWA

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Pipe à tabac ou chanvre

Mortier pour le tabac ou le chanvre

Luluwa, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois, fer et raphia Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0433.1-2/2)

Luluwa, République démocratique du Congo XIXe siècle (?) Bois et cuir Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.1177.1-2/2)

Kanyok

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Herminette de parade (kabenz kanèn) Kanyok, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois, pigment, fer et cuivre Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0726)

Herminette en guise d’objet de prestige

KANYOK

Cette herminette décorée est un modèle cérémoniel. Elle n'était donc pas utilisée comme outil pour le travail du bois, mais évoquait plutôt le pouvoir et le statut d'hommes riches et importants. Lors des cérémonies, ce genre d'herminette était portée par un dignitaire Kanyok sur sa hanche ou par-dessus son épaule gauche.

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Bol avec figurine assise Kadyaat Kalool (?), artiste Kanyok, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0504)

L'artiste avec un nom Ce bol, porté par une femme assise, serait une œuvre de Kadyaat Kalool (décédé en 1920). Il est l'un des rares artistes dont nous connaissons le nom dans le cadre de cette exposition. Kadyaat Kalool était un manindak, autrement dit un maître sculpteur de bois. Étant au service de la cour du chef Kanyok de la ville de Kanda Kand, dans le nord du pays, il a confectionné des objets rituels et des objets d'art dans un style qui lui est propre.

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Chokwe Durant des siècles, les Chokwe ont contrôlé une zone s'étendant du centre d'Angola aux régions méridionales du Congo et de la Zambie. Aux XVIIIe et XIXe siècles, leur territoire était situé sur une importante route de caravanes commerciales entre la côte atlantique et l'intérieur des terres africaines. Leurs dirigeants ont servi d'intermédiaires dans le troc entre les Européens et les peuples voisins. Les Chokwe n’ont jamais eu de pouvoir central ‘monarchique’. Leur territoire comptait au contraire différentes centres politiques, qui étaient dirigés par un mwananganga ou ‘maître du pays’. Ces aristocrates descendent des conquérants Lunda qui s'y étaient installés en Angola vers le XVe siècle.

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CHOKWE

Les objets d’art raffinés pour lesquels les Chokwe sont connus ont été confectionnés par des maîtres artisans pour cette même élite. C'est notamment le cas des tabourets du chef réalisés d'après le modèle portugais. Leur utilisation a perdurée jusqu'au milieu du XXe siècle, malgré le déclin du pouvoir des chefs pendant la colonisation.

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Peigne avec masque de danse Cihongo

Couteau avec fourreau

Chokwe, République démocratique du Congo/Angola XXe siècle Bois et métal Don de M. Olbrechts-Maurissens, 1975 MAS (AE.1975.0031.0028)

Chokwe, République démocratique du Congo/Angola XXe siècle Bois, métal et cuir Don des Amis du Musée d’Ethnographie, Anvers, 1994 MAS (AE.1994.0001.1-2/2)

Peigne avec masque de danse Le masque de danse sur le peigne est un symbole de richesse, de prospérité et de pouvoir masculin. Les clous européens ont été introduits vers le XVIIIe siècle. Ils conféraient un aspect raffiné et précieux à l'objet.

Il s'agissait d'un objet de prestige chez les Chokwe, qui, en un seul mot, signifiait quelque chose ‘fait avec beaucoup d'amour et de savoir-faire’ : utotombo.

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Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0775)

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Figurines de divination Chokwe, République démocratique du Congo/Angola Avant 1960 Ivoire Acheté à Van De Walle, 1960 MAS (AE.1960.0046.0001-2-3)

Ces trois figurines d’oracle (tuphele, kaphele au singulier) proviennent d'un panier de divination. 45-46

CHOKWE

Sifflets Chokwe, République démocratique du Congo/Angola Ivoire Fin du XIXe - début du XXe siècle Acheté à Pareyn (1920) et à Van De Walle (1960) MAS (AE.0784 et AE. 1960.0046.0004)

Langage sifflé Les sifflets étaient portés comme pendentifs amulettes lors des rites d'initiation des jeunes garçons et la chasse. Durant les parties de chasse collectives, le chef s’en servait pour communiquer à distance avec ses compagnons de chasse et ses chiens. Ces exemplaires ont deux trous de modulation différents afin de changer de tonalité. Ceci permettait de communiquer dans un ‘langage sifflé’ complexe. 47

Bâton de danse ou canne Chokwe, nord-est de l'Angola ou sud du Congo Avant 1920 58

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Chaise de chef avec dossier (citwamo ca mangu) Chokwe, République démocratique du Congo/Angola Fin du XIXe siècle Bois et cuir Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0494)

Malgré l'aspect européen des chaises comme celle-ci, leurs finitions sont basées sur le langage imagé des Chokwe. Les motifs soulignent le statut, l'opulence et l'autorité du propriétaire. 49

Tambour (mukup(i)ela) Chokwe, Angola/Congo Avant 1920 Bois, cuir et peau de serpent Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0341)

Tambour des chefs Le tambour en forme de sablier du peuple Chokwe était un instrument de cour. Jusqu'au milieu du XXe siècle, il faisait partie des biens des dirigeants. Il était conservé dans la maison de la femme la plus importante du chef et était généralement détruit à sa mort. Avant de le jouer, il fallait chauffer la résine sur la peau pour obtenir une meilleure résonance. L'ouverture était fermée par un bouchon. Une membrane dans le bouchon vibrait et bourdonnait lorsque le tambour était battu.

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Statue d'une femme avec un enfant sur les épaules Zombo, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Bois, fibres, traces de pigments Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0521)

Une mère protectrice

mère et lui tient la tête. Autour de son nombril, il y a une cavité contenant des résidus de substances ‘magiques’ qui évoquent un usage rituel. Cette statue aurait probablement été utilisée dans le cadre du culte de la fécondité des Khita. Elle servait également de protection pour les mères et les enfants. Des statues de figures maternelles commémoraient la fondatrice du clan et son pouvoir vital. La fécondité de la mère symbolise la continuité de la communauté. La mère est responsable du sort de sa progéniture.

ZOMBO

Zombo

Un enfant est assis à califourchon avec une jambe par-dessus l'épaule de sa

Yaka

Pendant cette période d'isolement, les personnes âgées transmettaient leur savoir aux jeunes garçons. Ils acquérissaient ainsi des compétences, se familiarisaient avec les mythes et étaient informés sur la sexualité. Le rite de passage s'accompagnait d'une circoncision. Le rite était comme une seconde naissance : les jeunes garçons mouraient d'une mort simulée et renaissaient en tant qu'hommes. La période d'apprentissage se clôturait par des cérémonies masquées, au cours desquelles les initiés réintégraient la communauté. Les masques incarnaient les ancêtres. Après la danse, les masques perdaient leur pouvoir et étaient soit détruits, soit vendus. L'histoire de la création et de la fécondité de l’être humain, de l'animal et de la terre est au cœur de la symbolique. Par exemple, le nez retroussé est un symbole phallique qui évoque la fertilisation de la terre par le soleil. – 100 p i è c e s p h a r e s –

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YAKA

Le rite d'initiation (n'khanda) pour les garçons Yaka était un moment charnière dans le passage de l'enfance à l'âge adulte. Des cérémonies étaient organisées à cette occasion.


YAKA

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Masque d'initiation (kolukha)

Masques d'initiation (ndemba)

Yaka, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Bois, raphia et pigment Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0514)

Yaka, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Bois, raphia et pigment Acheté à Henri Pareyn, 1920 Acquisation de la vente aux enchères de Breckpot, 1930 MAS (AE.0515 et AE.0516)

Kuba / Bushoong

KUBA / BUSHOONG

Le royaume du peuple Kuba, situé dans les forêts et la savane du Kasaï, avait à peu près la même taille que la Belgique à la fin du XIXe siècle et comptait 150 000 habitants. Il fut fondé au XVIIe siècle et s'est ensuite développé en une sorte de confédération des peuples, sous l'autorité centrale du roi ou nyim. Ce dernier régnait depuis son palais dans la capitale, Mushenge. Ailleurs, les chefs de province et leurs subordonnés conservaient l'autorité royale. Le souverain les gardait sous son joug en leur accordant de nombreux titres de pouvoir. Des titres auxquels tous les Kuba aspiraient. Ils affichaient leur rang et leur opulence au travers d'artefacts, d'armes précieuses, d'accessoires vestimentaires et de coiffes tressées, tous magnifiquement décorés. Les masques sont la représentation des mingesh (ngesh au singulier), des esprits de la nature qui servent d’intermédiaires entre l'être suprême Nyeem et les hommes. Ils sont source de fertilité, de guérison et de succès au cours de la chasse.

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Epée en manche décoré (ikul) Kuba/Bushoong, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Fer, laiton et bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0317) 60

Symboles de statut Il existait des règles pour désigner les rangs et les statuts des individus. Chaque rang se démarquait par ses propres accessoires. Parmi les symboles de statut social des hommes figuraient les coiffes de plumes, les perles de verre et les cauris. – 100 x c o n g o –


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Masque Pwoom itok Peuples Kuba : Ngeende ou Ngongo, République démocratique du Congo Bois, raphia, pigment et cuivre Fin du XIXe - début du XXe siècle Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0329) 56

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Masque Bwoom Peuples Kuba : Bambala, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, raphia, textiles européens, fer blanc, perles, cauris et laiton Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0332)

Le plus ancien masque royal Bwoom, le plus ancien masque royal remonte au XVIIIe siècle. Le porteur du masque regarde à travers les narines ouvertes. Quant à la coiffe, avec le renfoncement triangulaire des tempes, elle était à la mode à l'époque. Elle témoigne d'une tradition séculaire.

Masque Ngaady a mwaash Kuba/Bushoong, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, textile, raphia, cauris, métal et pigment Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0331)

Masque royal féminin Le Ngaady a mwaash est un masque royal des Bushoong, le groupe dirigeant des Kuba. Il représente Mweel, la sœur et l'épouse de Woot. Ensemble, ils formaient le couple royal mythique dont est issue la dynastie des Bushoong. Il était utilisé lors d'une représentation de mime avec d'autres masques royaux et lors de funérailles. Les larmes symbolisent le chagrin de Mweel face à l'interdiction de l'inceste et la séparation avec son frère.

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Paire de figurines à longs bras et agitant les mains Kuba/Bushoong, République démocratique du Congo Fer et poudre de bois rouge Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0773 et AE.0774)

L'art du forgeage et la royauté Nous ne connaissons que trois œuvres d’art Kuba en fer forgé, dont cette paire, dans le monde. Selon les légendes Kuba, elles ont été forgées par le prince Myeel, fils d’un roi et habile forgeron du XVIIe siècle. Ailleurs en Afrique centrale, il y avait également un lien entre l'art du forgeage et la royauté. Ceci s'explique par le fait que l'art de la forge et de la fonte du minerai de fer dépend de l'eau, du feu, de la terre et de l’air, autrement dit les quatre éléments. Cela était considéré comme magique. De plus, un forgeron produisait des outils indispensables.

– 100 p i è c e s p h a r e s –

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KUBA / BUSHOONG

Tout homme pouvait également exhiber un poignard (ikul) ou un couteau de cérémonie. Les modèles richement décorés de la classe supérieure avaient des poignées en bois, incrustées de fil de cuivre, de laiton, de plomb, d'étain et de clous.


59-60

Gobelets pour le vin de palme Kuba/Bushoong, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois et laiton Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0264 et AE.0288)

Gobelets pour le vin de palme

KUBA / BUSHOONG

Les gobelets en bois étaient des objets de luxe très convoités au XIXe siècle et au début du XXe siècle. On y servait du vin de palme (maan) extrait de la sève du palmier à raphia. C'est toujours une boisson populaire à l'heure actuelle. Un proverbe Bushoong dit : 'La tendre jeunesse manque de sagesse, le vieux sage manque de douceur de caractère'. Il fait référence au premier vin doux extrait du palmier qui se fortifie avec le temps.

Les motifs complexes de vannerie se retrouvent également ailleurs : sur les murs des maisons, les tissus de raphia et les objets de prestige de l'élite. Ainsi que sur le corps des femmes en guise de scarifications. Le terme du peuple Kuba pour dire ‘art’ est bwiin, qui signifie 'motif'. Pour eux, le jeu des motifs et des lignes en osier est le plus important. Certains des nouveaux motifs introduits par les souverains ont reçu leur appellation. 63

Marmite soutenue par des jambes Kuba/Bushoong, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois et patine à l’huile Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0148)

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Boîtes avec couvercle Kuba/Bushoong, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois, poudre de bois rouge et métal Legs de Van Deuren-Van Remoortere, 2003 MAS (AE.2003.0010.0002 et AE.2003.0010.0004)

Jeu de motifs La boîte à fard sert à conserver les objets de beauté, les épingles et les rasoirs. Elles contenaient souvent des résidus de poudre de bois rouge (tukula/tool) utilisée pour teindre le corps, les cheveux et les tissus de raphia.

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Songye Les statues de pouvoir Songye (mankishi, nkishi au singulier) servaient à résoudre des problèmes personnels et communautaires, tels que la maladie, la mort, les mauvaises récoltes ou les parties de chasse. Ou bien en guise de protection contre les mauvais esprits.

Pour ce qui est des grandes statues de pouvoir, elles étaient le fruit d'une étroite collaboration entre l'artiste et un spécialiste des rituels. L'artiste façonnait la statue comme un récipient capable d'absorber des pouvoirs surnaturels. Le spécialiste des rituels l'activait ensuite avec des chants et des sorts. Il cachait les substances chargées de pouvoir dans la cavité abdominale et dans la corne sur la tête. Ces substances pouvaient être utilisées de deux manières différentes : pour nuir ou pour protéger. La corne d'antilope reliait le monde visible et invisible telle une antenne. Statue volée du chef Nkolomonyi Cette statue incarnait le pouvoir d'un puissant chef Songye et servait d'intermédiaire avec le monde invisible des esprits. De cette façon, elle protégeait également sa communauté des dangers, notamment dans la lutte contre les colonisateurs belges. On ne sait pas exactement comment la statue est entrée en possession de Paul Osterrieth (1872-1932) à Lusambo en décembre 1923. Osterrieth était un descendant d'une famille de commerçants allemand basée à Anvers qui possédait des plantations de caoutchouc et de café à Lomami. Une note dans les archives du MAS confirme que la statue 'appartenait au fétichiste et chef Nkolomonyi qui fut condamné à mort' [par le gouvernement colonial belge]. – 100 p i è c e s p h a r e s –

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SONGYE

Quant aux petites statuettes, elles offraient généralement une protection individuelle. N'importe qui pouvait les fabriquer ce qui explique leurs grandes différences de formes. Les grandes statues étaient commandées à des artistes de renom. Elles ont souvent servi le village pendant des générations.


Mais qui était Nkolomonyi ? Selon des recherches récentes menées avec des partenaires au Congo, la statue lui aurait appartenu à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Ce seigneur de guerre Songye, chef et expert en rituels (nganga), s'est rebellé avec acharnement contre l'occupation des colonisateurs belges. Après son arrestation, il fut soit tué sur-le-champ, soit emmené à la prison de Lusambo pour y purger sa peine de mort. La statue fut ensuite volée dans son village par des Belges.

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SONGYE

Statue de pouvoir (nkishi) de Nkolomonyi Songye, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle - début du XXe siècle Bois, raphia, fourrure animale, peau de reptile, corne, fibres, fer, cuivre, perles de verre et peau de serpent Legs de la famille Paul Osterrieth, 1940 MAS (AE.1940.0001.0047)

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CT scan

Réalisation en collaboration avec le département Radiologie de l’Hôpital Universitaire Anvers pour l’Imagerie et Geert Van der Snickt, UAntwerpen, groupe de recherche ARCHES & AXES, 2020

Le MAS se penche sur la question de la restitution, non seulement sur le plan juridique mais aussi sur le plan éthique, car il est conscient de l'inégalité des rapports de force dans l'acquisition des objets durant la période coloniale (1885-1960). Dans le cadre de l'exposition, le MAS est entré en dialogue avec des chercheurs du Congo et une recherche de provenance a été lancée pour une statue spécifique. Il est important de mener davantage de recherches conjointes dans le cadre de la politique de restitution des œuvres d'art pillées. Le MAS est un musée municipal. Ceci signifie que la collection congolaise est la propriété de la ville d'Anvers. La décision finale concernant la restitution ou le retour d'objets revient au Collège des Bourgmestres et Échevins. 65

Hache de parade (kilonda)

Le MAS et la restitution Le MAS est ouvert aux questions officielles du Congo pour la restitution des objets d'art et utilitaires. Le musée ne décidera pas lui-même quels objets peuvent faire l'objet d'une restitution. Cette approche serait paternaliste. La décision devrait appartenir au Congo.

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Songye, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois, peau de reptile, fer, cuivre et bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0204.1-2/2)

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infantile. À chaque fois qu'on y avait recours, elle était frottée avec de l'huile de palme. Des traces en sont d’ailleurs encore visibles.

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Hache de parade (kilonda) Songye, Sapo Sapo, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois, fer et cuivre Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0420)

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Statue de pouvoir (nkishi)

Ces haches Songye (bilonda) avec leur lame élaborée en fer forgé appartenaient aux rois, aux chefs et aux hauts fonctionnaires. Elles étaient portées sur l'épaule pour mettre en évidence les rangs et les titres. Ceci dit, elles étaient tenues en main lors des danses et des cérémonies. L'alliage du fer, du cuivre et du fer forgé complexe indique une longue tradition de métallurgie. De telles haches cérémonielles remontent aux armes et autres outils qui ont été transformés en emblèmes de pouvoir et d'autorité. 67

Statue féminine debout Songye, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois, patine à l'huile et cauris Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0744)

Pour la protection des femmes et des enfants Cette statue au cou annelé et au corps de forme géométrique est l’un des points forts de la culture Songye. Elle symbolise la fécondité. La statue fut utilisée pour protéger les femmes pendant leur grossesse, soigner les enfants et prévenir la mortalité

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Statue de pouvoir (nkishi) Songye, Congo Avant 1920 Bois, perles de verre et cuivre Don de Louis Franck, 1921 MAS (AE.0749) 70

Statue de pouvoir (nkishi) Songye, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois, patine à l'huile, corne, cuivre et cauris Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0559) 71

Masque avec col en raphia Peuples Kuba : Kete, Biombo, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois et raphia Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0339)

Ce masque coloré aux yeux exorbités était utilisé lors des rituels de circoncision des jeunes garçons et lors des cérémonies funéraires.

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SONGYE

Des haches de parade

Songye, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois, patine à l'huile, corne, cuivre, fer, cauris Don de Louis Franck, 1921 MAS (AE.0720)


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Visage des esprits

Masques (bifwebe)

Des masques aux traits géométriques marqués et aux fines rainures sont typiques chez les Luba comme chez les Songye. Le terme général kifwebe (au pluriel, bifwebe) désigne à la fois le masque et la société de masques Bwadi bwa Kifwebe. En tant que visage représentatif des esprits au service de l'élite dirigeante, ils étaient censés exercer un contrôle social. Ils ont également rempli de nombreuses autres fonctions, notamment funéraires et divertissantes.

SONGYE

Songye ou Luba, République démocratique du Congo Bois Fin du XIXe - début du XXe siècle Acheté à Henri Pareyn (1920) Acquisition de la vente aux enchères de Breckpot (1930) MAS (AE.0334 et AE.0335)

Hemba Les Hemba sont connus pour leurs statues de figures de proue. Ces sculptures (singiti) faisaient partie des objets rituels dont un homme héritait lorsqu'il devenait chef.

HEMBA

Cette statue commémore un chef historique du clan Niembo. Elle servait au culte des ancêtres et confirmait l'origine du clan, assurant ainsi sa cohésion. De plus, elle renforçait le pouvoir des figures de proue. Le personnage de l’ancêtre porte un barbe en collier et une coiffure tressée en forme de croix : il s'agit là de symboles de statut. Ses yeux fermés sont tournés vers un autre monde : celui à partir duquel il veille sur sa progéniture. Il tient ses mains au niveau de son ventre légèrement gonflé avec le nombril saillant. Ce geste fait référence au dicton « nombril de l’humanité » qui souligne le lien entre les ancêtres et les vivants.

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Statue d'un ancêtre (lusingiti, singiti au pluriel) Clan Niembo, Hemba, République démocratique du Congo XIXe siècle (?) 66

Bois et patine Acheté à Charles Leirens, 1931 Anciennes collections : Henri Pareyn, Béla Hein. MAS (AE.0864)

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Luba Le royaume central des Luba a vu le jour au XVIIe siècle. Les rois ont puisé leur pouvoir dans Mbidi Kiluwe, un souverain-chasseur mythique qui a introduit la royauté. Les souverains Luba démontraient leur autorité avec des objets artistiques, hérités de leur prédécesseur. Certains, comme les cannes et les armes cérémonielles de chef, étaient exhibées. D'autres, comme les chaises et les supports pour arc et flèches, étaient conservés dans un endroit secret. Tant contre le vol que pour protéger les gens de leur pouvoir.

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Canne cérémonielle de chef

Support pour arc et flèches

Luba, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle (?) Bois, patine et métal Acheté à Nouvelle-Afrique, Pères Blancs Anvers, 1961 MAS (AE.1961.0062.0002)

Luba, République démocratique du Congo XIXe siècle Bois, patine et métal Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0722)

Signe d’autorité et de pouvoir

Confidentialité La figure féminine est à l'effigie d'une fondatrice d'une lignée royale. Sa posture, celle des mains sur la poitrine, est un gage de respect et de confidentialité. Elle fait référence à la croyance des Luba selon laquelle les femmes détiennent les secrets de l'autorité en leur sein. La canne fut chargée de pouvoir sacré par un spécialiste des rituels.

Les supports pour arc et flèches finement décorés étaient des signes d’autorité et de pouvoir. Ils faisaient référence au fondateur de l'empire Luba : le chasseur mythique Mbidi Kiluwe. Une femme haute dignitaire conservait les repose-arcs dans le plus grand secret au sein de la résidence royale. Ils étaient régulièrement frottés avec de l'huile, en guise d'offrande. La coiffure soignée de cette femme ainsi que ses scarifications, empreintes d’un haut niveau de réalisme, renseignent sur son statut et ses origines nobles.

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LUBA

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77

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Paire de pendentifs amulettes

Tabouret à cariatide (kipona)

Luba, République démocratique du Congo Avant 1920 Ivoire, perles et cuir Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0793 et AE.0794)

Luba, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0500)

Cette rare paire d’amulettes commémorait des ancêtres jumeaux. Le motif à cercle pointillé sur le buste symbolise la vie et la continuité.

Siège du pouvoir

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Hache de parade

LUBA

Luba-Hemba, République démocratique du Congo XIXe - XXe siècles Bois, patine et fer Don de M. Olbrechts-Maurissens, 1974 MAS (AE.1974.0025.0009)

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Statue féminine agenouillée avec gourde (mboko) à la main Luba, République démocratique du Congo Première moitié du XXe siècle (?) Bois et cuivre Don de W. Jambers, 1958 MAS (AE.1958.0015.0001)

Femme agenouillée avec une calebasse Les pouvoirs surnaturels d'un souverain Luba étaient protégés, dans l'intérêt de ses sujets. Un souverain s'entourait donc de spécialistes des rituels. Les statues d'une femme agenouillée avec une calebasse ont joué un rôle important lors de la consécration des princes et des chefs ainsi que lors des rituels de divination. La calebasse était remplie d'argile blanche, d'huile et d'autres objets de pouvoir. 68

Un tabouret était le symbole par excellence de la puissance sur laquelle reposait l’hégémonie des Luba. Le tabouret servait ‘d’assise’ royale. La cariatide, qui est la figure ancestrale soutenant le siège, symbolisait la lignée de la royauté. Un tel trône était puissamment chargé. C'est pourquoi il était enveloppé dans un tissu, dissimulé et étroitement surveillé. Ce trône n’était dévoilé que lors de l’intronisation du nouveau roi.

Pendentifs amulettes en forme d'humain, dont un avec des jambes Luba, République démocratique du Congo Avant 1920 Ivoire et jambe Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0798 ; AE.0808 ; AE.0811)

Pendentifs de protection Les petits pendentifs fabriqués à partir de défenses d'éléphant et d'hippopotame ont été essentiellement utilisés au XIXe siècle. Ils représentaient les esprits ancestraux. Ces objets intimes étaient portés sur le corps ou aux poignets : pour la protection et en mémoire des défunts. En hommage aux ancêtres, ils étaient régulièrement caressés et huilés. Ceci, ainsi que le contact permanent avec le corps, ont contribué à la surface lisse et à la couleur jaune-brunâtre des pendentifs.

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Tabwa Les statues Tabwa utilisées pour la commémoration des ancêtres, et autres objets rituels, dirigent souvent leurs mains vers le nombril. Cette position souligne le lien entre le propriétaire et les générations précédentes. Les statues présentent des scarifications remarquables. Une ligne de séparation symbolique (mulalambo) sur les bustes masculins et féminins va de la tête au nombril en passant par l'abdomen. La ligne divise le corps en deux moitiés symétriques. Ceci symbolise la séparation entre l'univers et la complémentarité homme-femme : à droite se trouve le pouvoir masculin et à gauche, le pouvoir féminin.

Calebasse à la silhouette féminine Tabwa (?), République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle Bois, textile, cristal et cailloux Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0792)

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CT scan

TABWA

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Réalisation en collaboration avec le département Radiologie de l’Hôpital Universitaire Anvers pour l’Imagerie et Geert Van der Snickt, UAntwerpen, groupe de recherche ARCHES & AXES, 2020

Une calebasse pour les prédictions Les calebasses pour l'eau et l'usage quotidien sont appelées keso. Ce modèle avec un torse en bois était utilisé lors de rituels de divination et de guérison. Le buste féminin en bois est traversé par un conduit allant de la tête à l'abdomen. Lors de séances de divination, de petits objets tels que des cailloux et des noyaux de fruits étaient introduits dans la calebasse via cette rainure. De telles calebasses ont été retrouvées parmi les Tabwa et les peuples voisins comme les Hemba et les Luba.

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Fragment de statue masculine Tabwa, République démocratique du Congo Fin du XIXe siècle - début du XXe siècle Bois Acheté à Nouvelle Afrique, Pères Blancs Anvers, 1961 MAS (AE.1961.0062.0003)

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Peigne (mwindulo ou kisakulo) Tabwa, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois et la pyrogravure Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.5554)

Le peigne est agrémenté du motif en zigzag balamwezi, qui fait référence à la nouvelle lune. Quant aux douze dents, elles désignent les menstruations. 87

Pipe (mutete) avec cordelette

TABWA

Tabwa, République démocratique du Congo Avant 1930 Terre cuite, peau animale et vannerie Acquisation de la vent aux enchères de Breckpot, 1930 MAS (AE.3755.1-2/2)

Pipe sociale Le front de cette pipe en terre cuite présente une ligne verticale scarifiée, avec une coupure entre les yeux. Ce marquage qualifie le peuple Tabwa comme étant ‘le visage de la croix’, le berceau des rêves, des prédictions et de la perspicacité. Fumer du tabac (nsunko) ou du chanvre (fwanka) et d'autres substances a notamment joué un rôle social dans le cadre des négociations de mariages et des divorces.

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Lega Les Lega n'avaient pas de suprématie centrale. Le pouvoir fut réparti entre les représentants de divers clans et lignées. La politique sociale soutenait la collectivité sur base de la société Bwami. Cette organisation était accessible aux hommes et aux femmes et présentait des degrés divers. Avant de devenir un initié, il fallait d'abord faire preuve d'exemplarité morale.

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LEGA

Les masques Lega en bois et en ivoire (lukwakongo) ne servaient pas toujours à dissimuler la tête, comme la plupart des masques congolais. Ils symbolisent les membres de la société Bwami et ont été utilisés de nombreuses manières différentes. En raison du voile du secret qui entourait les initiations, certains représentants de l'administration coloniale belge voyaient ces sociétés d'un mauvais œil : ils y voyaient une forme de résistance organisée.

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Figurine masculine (iginga)

Masque

Lega, République démocratique du Congo Première moitié du XXe siècle Ivoire Échange avec Jef Vanderstraete, 1955 MAS (AE.1955.0004.0003)

Lega, République démocratique du Congo Première moitié du XXe siècle Bois, fibres et perles Échange avec Jef Vanderstraete, 1955 MAS (AE.1955.0004.0004)

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Trompe Lega (?), République démocratique du Congo Avant 1920 Ivoire et peau de reptile Don de Louis Franck, 1920 MAS (AE.1004)

Petit masque (lukwakongo) avec poignée Lega, République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle (?) Bois et patine croûte Legs de Van Deuren-Van Remoortere, 2003 MAS (AE.2003.0001.0015)

Les trompes en ivoire annonçaient l'arrivée d'un chef, accompagnaient les danses ou transmettaient des messages.

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Petit masque (lukwakongo) Lega, République démocratique du Congo Première moitié du XXe siècle Ivoire Échange avec Jef Vanderstraete, 1955 MAS (AE.1955.0004.0002)

Bonnes et mauvaises actions

LEGA

Les masques Lega étaient tenus devant le visage, adaptés au sol ou attachés à un piquet ou sur le corps. Leur signification était basée sur certains modèles utilisés lors de représentations ou de pratiques. Les bonnes et les mauvaises actions étaient représentées l'une en face de l'autre sur les masques. Les qualités morales étaient ainsi représentées de façon vivante.

secrètes des plus hauts membres de la société Bwami. Ces pièces en ivoire représentaient des personnages aux caractéristiques à la fois positives ou négatives. Lors de l'initiation, les maîtres expliquaient leur signification. Seuls les initiés pouvaient les voir. Ils ne devaient donc jamais être exposés en public. Par conséquent, leur signification exacte reste, jusqu'à ce jour, méconnue de tous les non-initiés.

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Figurine féminine (iginga) Lega, République démocratique du Congo Première moitié du XXe siècle Ivoire Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.3639) 94

Crocodile (iginga) Lega, République démocratique du Congo Première moitié du XXe siècle Ivoire Échange avec Jef Vanderstraete, 1955 MAS (AE.1955.0004.0001)

Réservé uniquement aux initiés Chez les Lega, l'ivoire fait référence à la solidarité : il provient d'un animal de troupeau, l'éléphant. Ces précieux bibelots (iginga) étaient les possessions

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Mbole La communauté Mbole était dirigée par la société Lilwa qui remplissait aussi bien des fonctions rituelles, éducatives, sociales, politiques que judiciaires. Il y avait une hiérarchie claire et un devoir de silence sur le processus d'initiation. Un système moral-philosophique sophistiqué était à l'origine de ces rites. Les statues aux visages en forme de cœur et aux membres pendants représentent des condamnés à mort et des pendus. Ces derniers avaient enfreint l'ordre public ou les lois de la société Lilwa.

MBOLE

La signification de cet ofika ou 'statues d'un pendu' était expliquée aux jeunes garçons lors des rites d’initiation. Dans un but dissuasif, les statues étaient également trimballées sur un brancard de lianes. Elles devaient maintenir les membres de l'organisation sur la bonne voie.

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Statues d'un pendu (ofika) Mbole, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle (?) Bois et pigments Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS [AE.0672 (homme) et AE.0673 (femme)]

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Masque Mbole, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle (?) Bois, kaolin et pigment Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.3528)

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PERE

Pere

Zande

Cors rares

Les Zande du nord-est du Congo et des régions voisines de la République centrafricaine et du Sud-Soudan ne sont pas des Bantous comme la plupart des Congolais. Ils parlent une langue dite oubanguienne. L'art de la cour des Zande a produit de nombreux objets artistiquement élaborés : cloches, pipes, boîtes, cuillères, couteaux et instruments de musique. Ceux-ci sont souvent décorés d'une petite tête.

Il est possible que les cors du peuple Pere aient produit des sons différents lorsque le vent soufflait à travers eux. Ils servaient d'intermédiaires pour une plus grande harmonie entre l’être humain et la nature. Peut-être ont-ils également été utilisés lors de rituels d'initiation visant à déterminer la direction générale des Pere. Il y avait quatre clans dynastiques. Il n'y a qu'une dizaine de cors Pere en bois dans les musées et les collections privées. En termes d'utilisation et de signification, ils font partie des objets les plus énigmatiques de l'est du Congo. Formellement parlant, il s'agit d'une statue sculptée et stylisée dont la partie centrale est ajourée et complexe.

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Cloche à deux clapets Zande, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0772)

ZANDE

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Cor

Cloche à clapets

Pere, République démocratique du Congo Avant 1950 Bois Acheté à Willy Mestach, 1956 MAS (AE.1956.0024)

Cette cloche exceptionnelle a été conçue comme une figurine stylisée. Nous n'avons aucune information sur sa provenance. En se basant sur des modèles similaires du peuple Zande, on suppose que la cloche était utilisée pour la chasse. Ou peut-être était-elle jouée lors des rituels et des danses des devins. 100

Harpe (kundi) anthropomorphe Ngbaka ou Zande (?), région de l'Ubangi, République démocratique du Congo Avant 1920 Bois, cuir, perles et cheveux humains Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0598 et AE.0599) 74

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Harpes d’éloge ou d'amour À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, les instruments à cordes étaient très répandus chez les Zande. Les harpes à cinq cordes servaient d'instruments d'accompagnement pour les cantiques (chants de louanges) de chefs ou les chansons d'amour. On reconnaît les harpes Zande à les clés d’accord, qui se trouvent toujours sur le côté gauche de la colonne. Les harpes dont la caisse de résonance repose sur des pieds utilisaient également le Ngbaka adjacent. Cette paire fut conçue comme un couple homme et femme. Ils peuvent avoir été joués en duo selon le ‘principe double’, avec des notes aiguës pour la voix féminine et des notes graves pour la voix masculine.

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Dans de nombreuses mains

Dans le projet multimédia Dans de nombreuses mains, vingt-cinq personnes jettent un coup d'œil à la collection congolaise dans la ville d'Anvers. Ils s'expriment sur une des pièces qu'ils ont sélectionnées parmi les cent objets d'art et utilitaires de l'exposition. Les narrateurs sont des habitants de la capitale congolaise Kinshasa, d'Anvers et des personnes ayant un lien avec la ville de l'Escaut. Le MAS entre en dialogue avec eux sur les différentes significations de la collection congolaise dans les mains de la ville d'Anvers et sur l'importance de la polyphonie. Ils regardent les pièces phares sous plusieurs angles. Ces objets soulèvent de nombreuses questions. Que signifient-ils ? Quelles mains les ont touchés ? Ou ont-ils leur place ? Il s'agit d'un projet du collectif cinématographique belgo-congolais Faire-Part.

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87 | Dans de nombreuses mains Anvers-Kinshasa Son : Rob Jacobs, Nizar Saleh Image : Nizar Saleh, Constanze Wouters, Hannah Bailliu, Margo Mot Montage : Constanze Wouters, Rob Jacobs, Nizar Saleh Minutes : 40 Traductions : Deogracias Kihalu, Rob Jacobs

Témoins : Aiko Devriendt Carol Beya Tshidi David Katshiunga Emmanuel Ogbebor François Bavenga Pambu Henriette Kabeya Ntumba Herman Cornelissen Hyppolite Mayuba Jeannette Maota Mambimbi Jérôme Mikobi Judith Elseviers Karoline ‘Leki’ Kamosi Louna Gonzalez Carrera Marie Antoinette Kumudidi Walo Maxim Ryckaerts Omar Ba Patricia Van de Velde Rob Jacobs Sandrine Ekofo Sarah Agyemang Seckou Ouologuem Soraya Odia Tania Kaja Kapinga Verro Ekaka Ndombe

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Afrique et Europe : nouvelles influences, nouvelles dynamiques dans le domaine de l'art Les contacts entre les Africains et les Européens durent depuis des siècles. Ces influences mutuelles ont conduit à l'émergence d'autres formes d'art au Congo, en plus de l'art 'classique'. Les objets ont été créés à la fois pour le marché libre et pour les Congolais. Ils datent du milieu du XVIIIe jusqu'à la fin du XXe siècle. Ces échanges se sont accompagnés de nombreux sentiments : la peur et la haine, mais aussi la fascination. À partir de la fin du XIXe siècle, un certain nombre d'artistes et d'artisans congolais sont sévères à l’égard de la colonisation belge. Ils ont eu recours à un nouveau langage visuel, qui traduit la vision congolaise des 'opprimés' et des 'oppresseurs'. Ils dénoncent la répartition des rôles entre 'colon' et 'colonisé' avec une pointe d'humour mais aussi de sérieux. Des scènes apparemment anecdotiques évoquent indirectement les rapports de force inégaux. Un thème central est celui des 'Blancs', vêtus d'un chapeau, d'un gilet, d'un pantalon et de chaussures. Autrement dit, les mindele. Ce terme congolais désignait initialement les 'personnes aux vêtements étranges et excessifs', puis par après les blancs.

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88 | Défense d'éléphant sculptée Zone côtière de Loango, République du Congo XIXe siècle Ivoire Ancienne collection du Dr. Bedaux Prêt de Marc Felix (FX19 0010)

Le langage visuel congolais et européen À partir du début du XIXe siècle, les sculpteurs d'ivoire de Loango ont vu leur environnement changer. Congolais, commerçants étrangers, passants : tous se sont retrouvés représentés dans un langage visuel euro-congolais. La subordination des Africains est un thème récurrent. Ici, les personnages défilent en spirale, comme dans une caravane de marchands. Des soldats et des musiciens les accompagnent. Les Africains sont accablés, pieds nus, dénudés ou portant un pagne. Quant aux Européens, ils portent des chaussures, un pantalon et un gilet.

89 | Statue de pouvoir (nkisi) Peuples Kongo Avant 1922 Bois, miroir, clou et textile Don de Van der Cruyssen, 1922 MAS (AE.0615)

90 | Chaise du chef (elembo) Ngombe, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois et laiton Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.3930)

Clous de prestige En Europe, des clous en laiton étaient utilisés pour fixer des étoffes aux meubles. À partir du milieu du XIXe siècle, de tels clous se sont retrouvés au Congo, où ils sont rares. Ils étaient un moyen d'échange recherché et sont devenus un signe de richesse et de statut. Ils ont également servi à décorer les chaises du chef et d'autres objets de prestige. Cela leur donnait un aspect raffiné et précieux.

91 | Statue d'un homme

Miroir protecteur De nombreux objets congolais attestent des contacts séculaires avec les Européens. Cette statue renferme des textiles teints et des bouts de miroir provenant d'Europe. Ces matériaux importés renforcent son pouvoir. Les yeux et le coffret sur l'abdomen, contenant des 80

ingrédients 'magiques' secrets, sont recouverts de glace polie. Un miroir était considéré comme de 'l'eau figée'. Elle séparait le monde des vivants et celui des esprits, repoussait les dangers et offrait une protection. Le nganga, ou spécialiste rituel, traquait les dangers ou les éventuelles prophéties d'avenir dans le miroir.

Peuples Kongo, République du Congo/ République démocratique du Congo Début du XXe siècle Bois Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0610)

Cet homme avec un livre est assis sur une chaise en rotin européenne.

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92 | Homme européen à moustache, avec chapeau de soleil et canne Peuples Kongo, République du Congo/ République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Bois et peinture laquée Don de De Schlutterbach, 1956 MAS (AE.1956.0016)

Le chapeau de paille avec bande noire (canotier) était un produit phare du grand magasin anversois de la famille allemande Tietz sur le Meir. D'où le surnom de ce fameux chapeau : le tits (‘den tits’).

93 | Statue d'un homme armé Peuples Kongo, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois Prêt de Marc Félix (FX17 0024)

Soldat sous commandement belge Ce soldat congolais était au service de la Force Publique. Au départ, il s'agissait de l'armée coloniale de l'État indépendant du Congo, puis de l'armée et de la police du Congo belge. Les Africains restaient des soldats ordinaires et ne pouvaient pas accéder à des postes d'officiers. Ils offraient un soutien logistique sous commandement belge.

Cette statue d'un homme en djellaba représente-t-elle un soldat nord-africain ? Il tient dans sa main gauche, la bandoulière d'un cabas et dans sa main droite, un fusil.

95 | Masque d'un marin européen (portugais ?) Peuples Kongo, Vili, République du Congo Milieu du XIXe siècle Bois Prêt de Marc Félix (FX95 0084)

96 | Masque d'un Chinois à moustache Peuples Kongo, Yombe, République du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Bois Prêt de Marc Félix (FX02 9934)

La Chine au Congo Les caractéristiques asiatiques de ce masque unique et atypique du Congo sont très réalistes. Le masque atteste de la présence d'un millier de travailleurs forcés chinois. Ils sont arrivés au Congo en provenance de Macao à la fin du XIXe siècle. Ils ont été exploités pour la construction de la première ligne de chemin de fer, économiquement importante, entre la ville portuaire de Matadi et l'actuelle Kinshasa. Plus tard, ils ont également fondé des petits commerces.

94 | Statue d'un soldat Beembe, République du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Prêt de Marc Félix (FC88 0481)

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97 | Masque de Jésus-Christ de style Kifwebe Sud-est de Luba, République démocratique du Congo Début du XXe siècle (?) Bois et kaolin Prêt de Marc Félix (FX98 0398)

Masque du Christ Ce masque Luba de Jésus souffrant - avec sa couronne d'épines, du sang et des larmes - est unique. À partir de 1890, les Luba sont entrés en contact avec des représentations du Christ, lors de la mission coloniale de leur région. On suppose que le masque n'a jamais été porté par un danseur. Il a sans doute été utilisé comme emblème d'un mouvement religieux congolais dans lequel des éléments chrétiens se sont mélangés aux traditions locales. Peutêtre était-il accroché dans un lieu de rencontre des adeptes du mouvement.

98 | Masque avec pirogue et porteurs Suku, République démocratique du Congo XXe siècle Bois, raphia, pigment et textile Prêt de Marc Félix (FX18 0071)

Symbole des inégalités Ce masque montre une pirogue en bois et un tipoi (hamac ou chaise à porteurs), deux anciens moyens de transport. Les deux porteurs congolais portent le hamac, tandis qu'un missionnaire lit tranquillement la Bible. Il est possible que les Portugais aient introduit le 'hamac' en Afrique centrale. Des chefs congolais et d'autres personnes influentes étaient 82

également transportés de cette façon. Mais c'est surtout les colons européens qui aimaient être portés et photographiés par des Congolais. La chaise à porteurs est devenue un symbole de la hiérarchie coloniale et des relations de pouvoir inégales.

99 | Automobile Beembe, République du Congo Non daté Bois Prêt du MRAC, Tervuren (EO.1966.48.25)

Cyclomoteurs et automobiles Les chemins sablonneux qui traversent l'immense zone coloniale ont été adaptés à la circulation motorisée. Pendant longtemps, les cyclomoteurs et les voitures (importées) étaient réservés aux colons belges, aux missionnaires et aux entrepreneurs internationaux. Ce quadricycle avec son conducteur et passager est un brin moqueur.

100 | Peigne avec cycliste nu Chokwe, Angola/République démocratique du Congo XXe siècle Bois Don de Margriet Olbrechts-Maurissens, 1974 MAS (AE.1976.0037.0017)

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101 | Peigne avec cavalier Lwena, Angola XXe siècle Bois Don de Margriet Olbrechts-Maurissens, 1975 MAS (AE.1975.0034.0016)

102 | Peigne avec cavalier Chokwe, Angola/République démocratique du Congo XXe siècle Bois Don de Margriet Olbrechts-Maurissens, 1975 MAS (AE.1975.0031.0029)

103 | Peigne avec cavalier Chokwe, Angola/République démocratique du Congo XXe siècle Bois et cuivre Don de Margriet Olbrechts-Maurissens, 1975 MAS (AE.1975.0031.0026)

104 | Peigne avec cavalier Chokwe, Angola/République démocratique du Congo Début du XXe siècle Bois Don de A. Deprez, 1923 MAS (AE.0651)

Peigne avec marchand Cet ensemble de peignes est orné de cavaliers. Ils font référence aux routes des caravanes qui traversaient la région du Chokwe dans l'Angola actuel et

à leur commerce avec les Portugais au XIXe siècle. Les marchandises étaient transportées de la côte atlantique vers l'intérieur des terres. Les animaux de charge étaient le cheval et le bœuf, qui sont tous deux les mieux adaptés au climat tropical. Un motif important est le marchand (pombeiro ou funante en portugais). Il porte des vêtements européens, avec un manteau et un chapeau.

105 | Sculpture en ivoire avec six personnages Région côtière d'Angola/Cabinda (?) Fin du XIXe siècle Ivoire peint Prêt du Musée National des cultures du monde, Rotterdam (WM-28629)

Une distribution en noir et blanc Trois personnages noirs portent chacun un mundele, une personne blanche en uniforme, sur leurs épaules, comme lorsqu'ils traversent une rivière. La peinture très inhabituelle du précieux ivoire blanc avec du noir renforce le réalisme de cette scène coloniale : les Africains sont au service des Européens. La sculpture en ivoire souligne ainsi le fossé entre les blancs et les noirs.

106 | Statue d'un Portugais en uniforme de marin Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo/Angola Milieu du XVIIe siècle (?) Ivoire Prêt de Marc Félix (FX00 0177)

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107 | Statue d'un missionnaire protestant avec la Bible Zone côtière de Loango Fin du XIXe - début du XXe siècle Ivoire Prêt de Marc Félix (FX93 0264)

108 | Statue d'un homme en costume européen Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo/Angola XXe siècle Ivoire Don de Geert Godenne, 2014 MAS (MAS.0107)

109 | Statue d'un homme en costume européen Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo/Angola Fin du XIXe siècle Ivoire Prêt de Marc Félix (FX14 0037)

110 | Récipient avec voiliers

Vela Raphaël, Kitombe, République démocratique du Congo Environ 1930 Calebasse Ancienne collection de Pierre Loos Prêt de Bren Heymans, Anvers

Récipients artistiques À partir des années 1930, les artistes ont décoré des récipients d'eau avec des scènes coloniales. Ils les ont signés et les ont ensuite vendus aux colons. Les motifs étaient réalisés selon une technique complexe : les incisions étaient remplies de kaolin (argile blanche) et ponctuées de détails noirs carbonisés. Les motifs des récipients rituels étaient complétés par des proverbes, des contes et des légendes populaires, ou alors par des scènes de vie quotidienne. Les artistes les plus connus sont Benoît Madya et Vela Raphaël. Leurs studios étaient situés près de la ville de Moanda.

113 | Pot avec couple assis Voania Muba, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Terre cuite Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0587)

République démocratique du Congo Avant 1920 Calebasse Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.6964)

111 | Récipient avec bicyclette et animaux Toniph Kito, République démocratique du Congo Avant 1959 Calebasse Acheté à R. Van de Sande, 1959 MAS (AE.1959.0002.0006) 84

112 | Récipient avec des soldats

114 | Pot avec homme, femme et enfant Voania Muba, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Terre cuite Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0588)

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115 | Pot avec homme debout Voania Muba, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Terre cuite Acquisation de la vente aux enchères de Breckpot, 1930 MAS (AE.0584)

116 | Pot avec femme assise Tsin Tana, République démocratique du Congo Début du XXe siècle Terre cuite Transfert de la Compagnie de navigation, 1953 MAS (AE.1953.0009.0021)

117 | Toby Jug Europe Du XVIIIe au XIXe siècle Faïence Prêt de Marc Félix (FX.16 0024)

Cette faïence anglaise, représentant un buveur assis avec un gobelet et une cruche, est connue sous le nom de ‘Toby Jug’ et était placée sur les tombes en guise de cadeau funéraire. Le motif figure souvent dans l'art funéraire en bois et en pierre du peuple congolais.

Artiste-pionnier : Voania À la fin du XIXe siècle, les artistes congolais ont répondu à la demande européenne de 'souvenirs' d'Afrique. Voania (né vers 1860 - 1928), chef Woyo du village Muba a été l'un des premiers potiers africains à signer son travail. La poterie était généralement une tâche dévolue aux femmes. Les musées possèdent des centaines de ses œuvres. Son style est reconnaissable aux pots ronds, couronnés par un groupe de personnages. Sur les traces de Voania, son élève Tsin Tana Muba a gravé son nom sur des sculptures en argile. Un colonial belge a contribué à l'exportation de ces objets vers l'Europe et les États-Unis.

119 | Dame à la petite valise Peuples Kongo, République démocratique du Congo/République du Congo/Angola XXe siècle Bois Prêt de Marc Félix (FX.03 0243)

120 | Mallette de voyage République démocratique du Congo Environ 1930-1940 Vannerie Brocante Waterloo Prêt de Bren Heymans, Anvers

118 | Tombe avec Toby Jug au centre Forêt de Mayombe, République démocratique du Congo, s.d. Photo 'camera -Anvers © CMB, Anvers

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Le Congo en Belgique, la 'mère-patrie'

Après la Première Guerre mondiale, les activités missionnaires des religieux et religieuses se sont considérablement développées. Jusqu'à une bonne partie du XXe siècle, ces activités reposaient sur trois piliers : l'évangélisation, les soins de santé et l'éducation. Durant ces années, de nombreux objets congolais ont atterri en Belgique. De nombreuses congrégations ont organisé des expositions missionnaires ou ouvert un musée dans leur ‘mère-patrie' belge. Il s'agissait d'enseignes pour leur travail missionnaire au Congo. Les expositions et les musées missionnaires ont généralement eu une fonction didactique : pour les nouveaux religieux, les étudiants belges et le grand public. L'objectif était également de collecter des fonds pour les écoles de missionnaires. Les masques, les statues, les minéraux et les animaux empaillés congolais étaient envoyés en Belgique depuis la zone d’activité. On connaît surtout les sculptures en ébène et en ivoire. Moins connue est la dentelle congolaise qui était faite à la main par les jeunes filles sous la supervision de religieuses. Les objets créés dans les postes de mission arrivaient en masse dans les foyers belges. Ils ont imprégné la culture congolaise et ont contribué à façonner l'image du Congo dans la 'mère-patrie' belge. Ils sont littéralement devenus des objets emblématiques.

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121 | Garçon africain avec boîte d’aumône

123 | Portrait du Frère Bruneel

Europe XXe siècle Plâtre, peinture et fer-blanc Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, 2016 MAS (MAS.0170.087)

1954 Peinture sur panneau Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, 2016 MAS (MAS.0170.121)

122 | Coffret-tirelire 'pour les missions'

124 | Vue sur les postes de mission, Kisantu (?)

Belgique XXe siècle Plâtre Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, 2016 MAS (MAS.0170.086)

Non daté Bois et papier Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, 2016 MAS (MAS.0170.123)

Hochements de tête reconnaissants

125 | Carte 'Notre mission au Congo belge'

Des coffrets-tirelires représentant un garçon congolais étaient placées dans les magasins, les églises et les maisons missionnaires en Belgique. L'objectif était de collecter des fonds pour le 'travail de civilisation' des missions au Congo. En y insérant une pièce de monnaie, la tête du garçon faisait un mouvement de tête. Ces reliques témoignent du passé missionnaire problématique et de la vision paternaliste des Congolais en tant que personnes enfantines et reconnaissantes. Elles mettent en évidence les rapports de force entre les Belges et les Congolais. Le message : sans le soutien de la Belgique, les Congolais n'y arriveront pas.

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Non daté Bois et papier Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, 2016 MAS (MAS.0170.124)

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Le savoir-faire flamand au Congo

Les frères de Notre-Dame de Lourdes ont fondé des postes de mission à Kisantu et Lemfu dans le sud, à Molegbe dans la région équatoriale et à Albertville (aujourd'hui Kalemie) à partir des années 1920. Dans les ateliers des écoles techniques, les garçons congolais devaient apprendre des techniques typiquement flamandes, comme le tissage de tapis. Pour la fabrication de figurines en ébène noir, on a introduit le tour. Acheminées ensemble avec les sculptures décoratives en ivoire, les figurines se sont frayées un chemin vers la Belgique. Elles ont ensuite été distribuées à travers le pays par les travailleurs des missions et d'autres parties prenantes. Les figurines perpétuaient les liens étroits avec la colonie. Elles ont également été exposées ou vendues lors des expositions des missions. Le langage visuel utilisé incluait des représentations stéréotypées de la population congolaise et du monde animal, notamment avec des éléphants, des crocodiles et des lions. 126 | Statue d'un ibis

128 | Deux vases

République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Ivoire Don de Gilis Bilmeyer, 2002 MAS (AE.2002.0004.0005.ED)

République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Ébène Don de la Congrégation de Notre-Dame de Lourdes, 2016 MAS (MAS.0170.056 ; 054 et 055)

127 | Trois statuettes de la Vierge Marie République démocratique du Congo Milieu du XXe siècle Ivoire Don de Gilis Bilmeyer, 2002 MAS (AE.2002.0004.0001; 0002 et 0003)

129 | Défenses décoratives avec animaux République démocratique du Congo 1950-1960 Ivoire Don anonyme MAS (AE.2009.0012.0019 et 0020)

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130 | Écoliers congolais travaillant l'ivoire et l'ébène, 1959 Photographie (reproduction) © KADOC, Louvain

131 | Partie 1 : Expositions de mission en Belgique Milieu du XXe siècle

Partie 2 : École de mission pour garçons au Congo Milieu du XXe siècle Montage de photos historiques Réalisation de MAS, 2020

Matériaux locaux, techniques européennes

Les jeunes filles congolaises produisaient des objets d'artisanat dans les écoles missionnaires des congrégations féminines catholiques. À la fin du XIXe siècle, des sœurs belges y ont introduit la vieille dentelle et la technique d'application de Tenerife. Peut-être ont-elles appris ce savoir-faire lors de leur escale à Tenerife, au cours de leur voyage en bateau entre Anvers et Matadi. Tenerife est alors un port de transbordement sur le transport maritime transatlantique. L'artisanat était réalisé avec des matériaux locaux (raphia, écorce d'arbre) mais selon des techniques anciennes et européennes. Ces objets étaient ensuite utilisés au Congo belge comme biens de marchandage et souvenirs. Ils étaient également vendus et rapportaient de l'argent supplémentaire aux postes de mission. 132 | École de mission pour les filles au Congo Fin du XIXe siècle à la moitié du XXe siècle Montage de photos historiques Réalisation de MAS, 2020 90

133 | Filles faisant de la dentelle République démocratique du Congo, s.d. Photographie (reproduction) ©KADOC, Louvain

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134 | Dentelle rectangulaire

139 | Nappe

République démocratique du Congo Technique de Tenerife en raphia Environ 1920 Anciennes collections : Troc Deurne, Steve Annaert Prêt de Bren Heymans

Région de Gbadolite, Molegbe, République démocratique du Congo Environ 1950-1960 Raphia et écorce d'arbre battue Prêt des Sœurs franciscaines d’Herentals

135 | Dentelle ronde République démocratique du Congo Environ 1930 Technique de Tenerife en raphia Brocante Waterloo Prêt de Bren Heymans

136 | Dentelle ronde République démocratique du Congo Environ 1920 Technique de Tenerife en raphia Brocante Waterloo Prêt de Bren Heymans

137 | Dentelle ovale République démocratique du Congo Environ 1920 Raphia Anciennes collections : Troc Deurne, Steve Annaert Prêt de Bren Heymans

138 | Nappe République démocratique du Congo Environ 1950-1960 Raphia et écorce d'arbre battue Prêt des Sœurs franciscaines d’Herentals

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Velours Kuba du Kasaï

Les peuples Kuba du Kasaï sont mondialement connus pour leurs toiles brodées en raphia tissé, doux et velouté. Leurs toiles sont confectionnées selon une technique séculaire. Dans l'ancienne division stricte du travail, les hommes étaient les tisserands. Quant aux femmes, elles étaient responsables des applications et de la broderie. Au fil du temps, le fameux ‘velours des Kuba’ subissait des changements au sein des postes de mission. En effet, à partir des années 1930, l'imagerie complexe est devenue à la fois plus serrée et plus stérile. Vous pouvez voir cette évolution ici. L'artiste Bren Heymans entre en dialogue avec plusieurs tisserands contemporains d'Ilebo au Kasaï. 140 | Tissu avec broderie

142 | Tapis décoratif

Kuba, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Raphia Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0402)

Atelier de tissage des chanoinesses de Saint-Augustin (Sœurs de la Chasse) Mushenge, Kasaï, République démocratique du Congo 1939 Raphia Prêt des Missionnaires du Coeur Immaculé de Marie (ICM), Heverlee (246)

141 | Tissu avec broderie Kuba, République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Raphia Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0388)

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143 | Tissu avec texte : ‘1892-1992. Centenaire des Sœurs de la Charité au Zaïre’ Kuba 1992 Raphia Prêt Maison du Patrimoine | Soeurs de la Charité J.M., Gand

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144 | Tissu avec broderie

148 | Union Minière

Fabriqué par Mbokashanga Golo, Kuba, République démocratique du Congo 1940-1960 Raphia Anciennes collections : Banque Belgolaise, Brocante Vossenplein Place du Jeu de Balle Prêt de Bren Heymans

Design de Bren Heymans, en dialogue avec Kwet-a-Ngata Mbengele Réalisation, Kwet-a-Ngata Mbengele, Ilebo, République démocratique du Congo 2019-2020 Raphia Prêt de Bren Heymans

149 |

145 | Western Union Design Bren Heymans, en dialogue avec Bope Charo Mbawoto Réalisation Bope Charo Mbawoto, Ilebo, République démocratique du Congo 2019-2020 Raphia Prêt de Bren Heymans

146 | Brenn/Bulape Design de Bren Heymans, en dialogue avec Bulape Ida Réalisation Bulape Ida, Ilebo, République démocratique du Congo 2019-2020 Raphia Prêt de Bren Heymans

Futur-velours.com Dialogue entre anciens et nouveaux tissus 2018-2020 Conception : Bren Heymans, Anvers, Belgique En coopération avec : Adrianne Mashambolo Charo Mbawoto Germaine Kadi Ida Bulape Marie Jeanne Mbokashanga Naomie Mabintshi Lucie Mbokashanga Coordination : Hélène Loa (Kinshasa) Photographe : Patient Mingambengele (Ilebo) Réalisation : Bren Heymans, MAS et Media Mixer

147 | Gardiens de symétrie Design de Bren Heymans Réalisation Germaine Kadi, Ilebo, République démocratique du Congo 2019-2020 Raphia Prêt de Bren Heymans

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150 | Statue funéraire d'un ntadi (gardien), d'un fumani (penseur de choses tristes) Peuples Kongo, Nord de l'Angola/ République démocratique du Congo Fin du XIXe - début du XXe siècle Stéatite Acheté à Henri Pareyn, 1920 MAS (AE.0619)

Un chef inquiet Cette statue représente un chef pensant (fumani) qui se soucie du bienêtre futur de sa famille et de son clan. À sa mort, elle devient, pour ainsi dire, son double : celui qui reste vigilant et qui honore la mémoire du chef. Les quatre griffes de léopard du couvre-chef symbolisent le cycle de la vie : la naissance, la vie, la mort et la réincarnation. Les monuments commémoratifs en pierre de la région montagneuse le long du fleuve Congo remontent probablement au XVIe siècle. Ils indiquaient les tombes de personnes influentes et exemplaires.

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COLOPHON Exposition - 03/10/2020 -28/03/2021 Concept et réalisation Els De Palmenaer (conservateur de la collection Afrique) et Nadia Nsayi Madjedjo (curateur images) avec l’équipe du MAS, sous la direction de Marieke van Bommel, ainsi que tous les autres collègues concernés de la ville d’Anvers Scénographie et mise en oeuvre Hendrik De Leeuw (scénographie) Twin Design (mise en oeuvre) Volta (conception graphique) Rédaction des textes Patrick De Rynck (Néerlandais) Traductions SamSam Translations (Sam Vangheluwe (Néerlandais-Anglais) Stéphanie Georges (Néerlandais-Français) Mise en page Ann Walkers, BAI pour le MAS, 2020 © Textes: MAS, BAI et les auteurs, 2020

Prêteurs Archives de l'Art contemporain en Belgique, Bruxelles Atelier archéologique et dépôt du patrimoine, Anvers Bernard de Grunne, Bruxelles Bren Heymans, Anvers Bibliothèque Patrimoniale Hendrik Conscience, Anvers Maison du Patrimoine | Soeurs de la Charité J.M., Gand Archives Félix/Archives de la ville, Anvers Fondation Terninck, Anvers Musée de l'hôpital Notre-Dame de la Potterie, Bruges Musée royal de l'Afrique centrale (Africa Museum), Tervuren Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles Het Letterenhuis/Maison des lettres, Anvers Maison de Rubens, Anvers Marc Leo Felix, Bruxelles Missionnaires du Coeur Immaculé de Marie (ICM), Heverlee Sœurs franciscaines, Herentals Fondation 'Het Nederlandsch Economisch Archief' (NEHA), Amsterdam Fondation Musée national des cultures du monde, Pays-Bas

Le MAS remercie Nabilla Ait Daoud, échevine de la culture d'Anvers, ainsi que son personnel, les bénévoles, les stagiaires et les guides de la ville d'Anvers. Nous remercions également Patrick Mudekereza, Matthias De Groof et Bren Heymans ainsi que le collectif cinématographique belgo-congolais 'Faire-Part'. Le MAS souhaite également remercier les partenaires suivants pour leur collaboration, leur expertise et leurs conseils dans la concrétisation de l'exposition : Archives africaines Bruxelles, KADOC Leuven, l'Université d'Anvers, l'Université de Gand, l'Université de Kinshasa, l'Université de Lubumbashi, l'Hôpital universitaire d'Anvers, Studio Globo et Bonka Circus. Nous nous sommes efforcés de contacter tous les détenteurs de droits. Si vous pensez toujours pouvoir faire valoir des droits de reproduction, veuillez contacter mas@antwerpen.be.



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