LUC DE HEUSCH
Mémoire, mon beau navire LES VACANCES D'UN ETHNOLOGUE
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ACTES SUD
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(du nom de la branche cadette), que je ne jugeai pas assez euphonique. J'en revins donc tout simplement à Heusch, malgré le danger d'une prononciation incertaine, oscillant entre le euch gut tural allemand et la douceur perdue du euss flamand originel. C'est donc Heusch cette fois, assorti de mon prénom, que Marie inscrivit de la même écriture sur l'exemplaire de cet autre livre de Larbaud, Sous le signe de saint Jérôme, acquis à Paris, peu après notre retour d'Afrique. Je ne savais pas à cette époque qui était Jérôme et ma curiosité fut longtemps assoupie. J'en sais un peu plus aujour d'hui que j'ai choisi Larbaud comme compagnon de voyage. Père et doc teur de l'Eglise, Hieronymus (347-420) se retira durant trois ans dans le désert de Chalcis pour mieux soupeser le poids des mots silencieux : il s'apprê tait à traduire en latin la Bible. Valery Larbaud, qui s'était lui-même colleté avec Whitman, Butler et Joyce, rendait un culte au patron des traducteurs, v Mais, sous l'invocation de saint Jé rôme, Larbaud s'interroge sur la nature singulière de la langue, changeante et éternelle. У aurait-il derrière ce fleuve dont la mmeur, "faite de clabaudements de haine et d'amour des millions
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milliards d'ancêtres, n'est qu'un immense rire de dérision", un Père caché, garant invisible de l'Immobile ? Un Dieu pro clamant par la voix des prophètes que ses paroles ne passeront pas, alors que son nom même "change et passe et se conforme aux lois de la phonétique". Gageons qu'au désert de Chalcis, Jérôme découvrit ce centre absent autour duquel tourne toute écriture, ce qui lui valut l'amitié d'un lion venu le divertir de ses rugissements dans son ermitage. La langue n'abrite plus aucun secret. Dieu ayant été chassé pour tricherie de la table de jeu, les dés ne font plus que rouler d'arbitraires phonèmes sur l'éternel tapis vert des discours. į Larbaud intitula l'un de ses ouvrages : Ce vice impuni : la lecture... Marie me donna mon premier fils, Pierre. Mais elle préféra l'Orient à l'Afrique, me quitta et rendit visite au dalai-lama en exil. •ír-· • : -Ż;- '
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•AU DÉCOUVERTE DES TSIGANES ? • •
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avec Monique, qui était char'te mais d'humeur changeante, des
rapports passionnés et orageux. Elle était artiste peintre et nous avions les mêmes goûts, ce qui facilita les choses. Nous découvrîmes ensemble Lorenzetti à Sienne. Ensemble, entraînés par Henri Storck, nous nous lançâmes sur les routes d'Europe, de Paris à Istan bul, à la recherche des Tsiganes, der niers nomades d'Occident méprisant les (¡ajé, les tristes sédentaires que nous sommes devenus, prisonniers de la glèbe depuis des millénaires. En 1959, Henri Storck avait rencon tré à New York Jan Yoors, un homme qui racontait une histoire singulière. Fils d'un artiste verrier flamand, il vécut sa première enfance à Anvers. Son père admirait l'Espagne et vouait un véritable culte aux gitans. La distance est certes considérable entre ces nomades depuis longtemps sédentarisés et les Rom qui aujourd'hui encore voyagent inlassablement de Paris à Istanbul, par lant la même langue, le romani. Quoi qu'il en soit, le monde tsigane était devenu aux yeux du petit Jan une seconde patrie légendaire, qu'il brûlait de retrouver. Et un soir, alors qu'il rôdait autour d'une caravane station née aux portes d'Anvers, il ne put
refuser de donner ses souliers à des enfants qui les réclamaient impérieuse ment. Ils l'entraînèrent, fasciné, dans leur roulotte et le cachèrent, à sa demande, sous des édredons. Jan. qui avait alors douze ans, se retrouva le lendemain très loin du foyer paternel, quelque part en Allemagne. L'Alle magne nazie, qui s'apprêtait à gazer, les Tsiganes. Le chef de la caravane, Pulika, décida de garder avec lui ce jeune Gajo encombrant, bien qu'il ris quât d'alimenter la sinistre légende des Rom voleurs d'enfants. Le petit Jan était entré dans la saga des Tsiganes. Il vécut à la dure durant six mois sur les routes d'Europe, apprenant à se méfier des Gajé, au monde desquels il avait cessé d'appartenir. Au seuil de l'ado lescence, Jan Yoors fit le grand saut et Pulika, qui s'était attaché à cet enfant peu banal, l'adopta. Mais à Anvers, chaque jour le couvert était mis. Dans l'attente de son retour, dit-il. Je le soup çonne d'avoir embelli sur ce point une histoire qui tourne au mythe, comme s'il devait se persuader que désormais il avait deux pères, deux identités dis tinctes, à l'inverse de ces enfants qui se construisent une filiation imaginaire pour mieux rompre avec l'auteur de leurs jours.
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La vie de Jan désormais alternera entre ses parents naturels, et Pulika, son père adoptif. Il avait assimilé à la perfection la langue et les usages des Rom. Pulika allait le chercher chaque fois qu'il revenait "chasser" dans la région anversoise. Au terme de cette longue errance, après la guerre, Jan Yoors se fixa à New York. Mais il ne perdit jamais le contact avec les Tsi ganes qui traversaient l'Atlantique. C'est là que Henri Storck le rencontra en 1959· L'année suivante, il réussit à convaincre un producteur de cinéma français, André Tadié, de financer une expédition de reconnaissance à travers l'Europe à la recherche de Pulika et sa famille tsigane, dont Jan était sans nou velles depuis longtemps. Il était per suadé, comme tous les Rom nomades, que seules les montagnes ne se ren contrent pas. J'abandonnai avec ravis sement l'Afrique pour ce monde tout proche qui s'entourait de plus de mys tère qu'une tribu bantou.
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Dès notre rencontre à l'aéroport de Bruxelles, le 25 juillet I96I, Jan fixe les règles du jeu. Il insiste : les Rom vous accueilleront avec une extrême gentillesse, mais ils vous mépriseront
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toujours secrètement. Si je vous pré sente comme mes amis, ils tenteront de nous séparer ; si je vous présente comme mes Gajé, c'est-à-dire de stu pides Blancs, ils s'amuseront du bon tour que je vous joue : à leurs yeux, vous m'appartenez et ils ne pourront vous pressurer sans mon autorisation. Il m'avertit : "Il n'y a qu'en romani, la langue des Rom, que l'on dit la vérité." Parmi eux, il sera Rom, parlant romani. Il nous traitera avec condescendance. Seul avec nous, il lèvera le masque et sera notre initiateur. Il est clair que notre rôle de balourds est infiniment plus facile que celui que Jan va tenter de jouer. Sans cesse, à tout moment, il va devoir sauter le mur, penser avec deux têtes, écouter deux cœurs battre en lui. Nous serons donc jusqu'au bout, hélas, de ridicules Gajé, des nonRom, c'est-à-dire des ennemis. Renver sement radical des perspectives hautaines de l'ethnographie coloniale : l'ethno graphe devient un objet méprisable dans les mains de l'ethnographie, sei gneur en guenilles. Jan joua à la per fection ce rôle impossible de médiateur entre deux sociétés sur le pied de guerre permanent. Irréconciliables.
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l! n e retrouva jamais son père Pulika. mais a ia mi-août, dans une banlieue lugubre de Zagreb, un Tsigane de haut vol. appartenant eomme Pulika à l'aristocratie Iowa ra. nous accueillit fastueusement dans sa masure. La veille, nous avions eu bien du mal à dénicher le quartier tsigane. Mitsho. chez qui nous avait menés un jeune guide, nous avait invités a dejeuner le lendemain. Vous arrivons vers midi. Jan, Monique, Henri et sa fille Siska, que la vue de tous les jeunes Tsiganes émerveille. MïTsho est un homme dans la force de 1 а.це : il a les cheveux noirs, les yeux \ erts. le nez très aquilin ; il nous parle d'abondance en allemand. Dans la c our d'une maison misérable. Mara, sa femme, belle et souriante, nous emmène m nis la tonnelle de vigne où une table de roi a été preparé" pour le cousin d'-Xmérique et ses Gajé : cinq couverts, lan déclare avec de grandes démons'rations d'amitié qu'il ne mangera pas si notre note n'accepte de partager son assiette. H l'attrape par le bras et le force à se serrer contre lui sur la même chaise. Mitsho est ému. Je ne peux pas décemment demeurer en reste et laisser Bnmko. un ami d e la famille, renifler I'îкк-ur de la bonne huile rouge à côté île nous. B r a n k o a c c e p t e d e p a r t a g e r
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mon assiette. Il me sert avec empres sement, veille à ce que la zone de nourriture qui m'est impartie ne soit jamais vide. Mara ne cesse de courir, amenant des prunes, des oignons, du maïs, nous ordonnant en hurlant, en souriant, de manger, manger. Elle ne mange pas. Les femmes ne mangent pas avec les Rom, pas plus que Ses enfants. Le vin blanc coule à flots. A chaque rasade Jan verse quelques gouttes au sol à la santé des vivants et des morts. Jan parle avec volubilité en romani, seule langue de vérité. Autant que de vin blanc croate, il s'enivre de paroles romani que Mitsho écoute avec ravissement. Hôte plein d'égards, il répète de temps en temps à notre attention, en allemand : "Zigeuner Leben ist schön / "(La vie tsigane est belle.) Le mur du langage nous sépare. Mais aujourd'hui le pauvre allemand des Gajé véhicule au moins une part de vérité, l'amitié. Mitsho expose à grands cris la philosophie tsigane : "Gut essen, gut trinken (bien manger, bien boire)... ЛосЬ ein Stritt Γ Ces petits pas sur le chemin du bonheur sont ponctués de rasades à pleins beards. Rite mystérieux en l'honneur de quelque dieu inconnu de la richesse. Les verres des Gaje et des Kom sont
I.RC !)Γ ILIASCH c o n f o n d u s . n o u s célébrons ensemble
dans un seul et même calice une messo dionysiaque. Nous jouons clans la même opérette et Mitsho, pincesans-rire. dit (en allemand) : "je suis le baron tsigane et le monde est mon
rova urne." N o u s sommes tous ivres. Des jeunes gens se pressent autour de nous. Ils chantent en croate et en turc, langues de mensonge. Soudain Mitsho, affalé dans un fauteuil de camping sous son arbre, pousse un cri déchirant dans la langue de vérité. Ü improvise en romani une complainte. Il chante : "Jai pereiti toute ma famille clans les camps de concentration, ma femme, mes enfants ont été assassinés. J'ai souffert. Mais aujourd'hui, ô joie, je retrouve un frère perdu." Voilà à peu prés ce qu'il crie d'une voix ra IKI u e qui nous coupe le souffle. Des larmes coulent sur les joues de Jan. Brusquement Mitsho se rue >-ur lui et l'embrasse goulûment siu la bouche. H embrasse aussi Henri. La nuit est tombée et Mitsho nous invite a dormir chez lui. U nous recom ma nde de fermer soigneusement la voiture a cle : "Ailes muss ш Ordnung sein .'"if! faut que l'ordre regne.) Il dit ceia d'un air touchant, la main sur le cœur, car il mourrait de honte si ses
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hôtes, tout Gajé qu'ils sont, étaient volés chez lui. Il dit qu'il faut se méfier des voisins. S'il met tant d'insistance à nous protéger, c'est qu'il est dans l'ordre des choses que les enfants des Rom pillent les Gajé ; mais cette trêve de l'amitié, c'est un nouvel ordre, inusuel, étrange. Il répète à plusieurs reprises encore : "Leben ist schön, alles ist in Ordnung, alles anstündig ", comme s'il importait de rappeler rituellement Ie pacte qu'il nous a offert spontanément. Pour mieux sceller notre alliance, Monique se déguise en femme mariée tsigane : longue jupe et foulard sur la tête. Mara radieuse l'entraîne acheter du vin au bistrot voisin car les femmes des Rom ne s'aventurent jamais seules chez les Gajé. Monique, superbe dans son accoutrement de diseuse de bonne aventure, affronte bravement les regards moqueurs des Gajé croates. Puis les deux femmes, avec l'aide de Siska, préparent le repas clu soir qui sera servi eette fois a l'intérieur cle la mai son. sur une table coincée entre le mur et le lit. Le foulard cle Monique a glissé et Jan la rappelle sévèrement à l'ordre. Cette fois, Branko mange à même le plat, le chapeau sur la tête. Les papri kas, le mouton, les tomates, les oignons baignent dans une huile épaisse où
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Branko et Mitsho trempent de grosses miches de pain. Nos femmes nous regardent manger. Mitsho envoie une nouvelle fois Mara et Monique cher cher du vin. En attendant leur retour, il montre à Jan ses chevilles gonflées, ses doigts brisés : quatre ans à Dachau, torturé, pendu par les pouces. Puis il soulève sa chemise et montre la marque des coups de fouet sur son toree. Dans la chambre voisine, quelques jeunes gens font danser nos fausses Tsiganes au son des valses viennoises de Radio-Zagreb. La musique s'inter rompt pour laisser Mitsho chanter à nouveau dans la chambre où s'eni vrent les hommes. Et Jan se souvient à son tour de vieilles mélopées que chantait Pulika. L'opérette tourne au drame lyrique. Mitsho embrasse les mains, les joues de Jan qui, ivre mort, a définitivement basculé dans l'autre monde. Le frère de Mara, figurant de cinéma, entre en scène. Il joue les cow-boys dans lés superproductions italo-yougoslaves. Il dit "moteur" chaque fois que je mets mon appareil d'enre gistrement en marche. Mitsho, complè tement rond, fait danser Monique, et Henri en a marre de tous ces ivrognes. Comment dormir, interrompre la fête, chasser tout ce monde ? Magnanime,
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Mitsho nous a offert trois lits. Jan occu pera seul le lit conjugal au pied duquel Mitsho dormira par terre avec sa femme et la fìlle de Mara. Les deux autres lits sont réservés aux Gajé dans la chambre voisine. Un jeune homme nous tire d'embarras. Il entraîne les hommes au1 dehors pour permettre aux femmes de se déshabiller. Monique en culotte s'est glissée courageusement sous l'édredon où elle subit l'assaut effroyable des puces. Les Gajé mâles sont alors admis dans la chambre. Mitsho est quelque peu choqué d'apprendre que Henri entend dormir dans le même lit que sa fille sous prétexte que "alles muss in Ord nung sein Monique a gémi toute la nuit. Henri et Siska dans l'autre lit n'ont pas souffert des puces. Très tôt le matin, Mitsho vient nous saluer. Il s'écrie en allemand : "D'où viennent toutes ces mouches ?" Et Storck de répondre, superbe : "De Dieu." Mitsho rit. Une sourde révolte de Gajé hygié niques contre cet ordre aristocratique absurde qui abandonne les enfants à la crasse, aux puces, aux mouches de Dieu, nous envahit. Mitsho prend Henri à part et lui demande de l'argent pour acheter une bouteille d'alcool : "Noch ein Stritt mehr" (encore un pas en avant).
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Mauvais Rom. Henri refuse avec écœu rement. L'idée de renifler du slibovic à six heures du marin lui soulève le cœur, jan tente de diminuer la tension. C'est le nécessaire contre-don. après le fabu leux don de la veille, plaide-t-il en Rom accompli. Et il a sans doute rai son. Henri finit par s'exécuter. Mitsho nous entraîne au bistrot croate où Henri est obligé d'offrir d'innombrables tour nées d'une liqueur turque écœurante que Mitsho appelle "café-liqueur". Le vrai café, offert par Mara, ne viendra qu'une heure plus tard. Les Gajé. hélas, n'accéderont jamais a ia noblesse de l'ivresse tsigane. Un proverbe dit : "Les Rom boivent pour se souvenir, les Gajé boivent pour oublier." Grands adieux enfin. Nous sommes fatigués, mais en roulant vers Zagreb, nous prenons lentement conscience de í a chance extraordinaire qui nous a jetés dans les bras de Mitsho. Henri a cesse de regretter les dix mille dinars de vin blanc. Les six cales-liqueurs qu'il vient d'absorber le rendent tout joyeux. Mitsho a raison : que nous arrivera-t-il demain ? A quoi sert l'ar gent que l'on garde le cœur froid ? Quelque chose de la sagesse ou de la folie de Mitsho a passé en nous, Les l.owara ne reçoivent jamais les Gajé.
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dit Jan rêveur. Mitsho. ce fut la ferveur d'un miracle.
CIBA
Peu avant la Noéi 1967. Michel Leiris nous entraîna à La Havane, Monique et moi. Il m'avait fait inviter au Congrès culturel où une poignée d'intellectuels cubains tentaient d'enrayer la montée du parti communiste stalinien par une grande fête libertaire à laquelle était conviée une certaine Europe de gauche, Asger Jorn vint décore)" une banque socialiste des signes de Cobra.
Je n'entends pas l'espagnol, mais je suis fasciné par le discours de Fidel Castro, qu'absorbe avec dévotion une foule immense réunie cette nuit-là quelque part dans la banlieue de la capitale. Il vient de perdre son ami Che Guevara, assassiné en Bolivie, et partout, en ville comme à la cam pagne. de grands panneaux affichent son visage. Dans Se bus qui nous conduit au meeting, nous écoutons Lei ris raconter avec exaltation la saga du