H I S TO I R E F ICHE
DU PORT
PÉDAGOGIQUE
Simon, enfant du Pollet Quelques repères L
e quartier du Pollet, malgré cette amputation, a gardé son identité de quartier de pêcheurs, marins durs à la tâche et familles toutes entières tournées vers cette activité : vente du poisson chargé à son arrivée dans des hottes et acheminé vers la poissonnerie, mais aussi réparation des filets ou des voiles, pêche à pieds. Un univers laborieux qui a fasciné les riches adeptes de la villégiature dieppoise et inspiré des artistes : Louis Garneray, Eugène Boudin, Albert Lebourg, Walter Sickert, Jacques Émile Blanche et bien d’autres.
C’est la rivière Arques qui a formé le “havre dieppois”. À la fin du Moyen-Âge, se font face autour du port les deux faubourgs : “Le Pollet de Dieppe” qui correspond aujourd’hui au Bout du quai, et “Le Pollet oultre l’eau” qui est l’actuel quartier du Pollet. Un passeur assurait à cette époque le lien entre les deux rives du “Hable”. Le pont de pierre sera construit en 1511 et permettra un passage plus régulier. Au XVIe siècle, l’activité maritime est en pleine expansion et à la pêche, vient s’ajouter une activité commerciale florissante. Cependant, le port de Dieppe ne dispose pas d’un espace très important pour abriter les nombreuses nefs : un seul bassin, barré en amont vers la rivière, par le pont de pierre. Ce bassin n’est pas un bassin à flot. L’envasement et l’accumulation des galets empêchent tout mouvement des navires à marée basse. Les représentations du port qui nous sont parvenues datent du XVIIe siècle : le plan de Gomboust, tracé vers 1650, les vues cavalières de la ville, l’une signée Clément de Jonghe datant de 1669, l’autre d’Isaac Sylvestre de 1680. Ces témoignages iconographiques révèlent une ville entourée de fortifications y compris sur les quais où l’accès au bassin se fait par des portes. Depuis le XIVe siècle, “La Tour au Crabes”, dont les vestiges sont encore visibles, garde l’entrée du port. Cet édifice haut de onze mètres et doté d’un épais mur de briques et de silex est alors percé de meurtrières. Sur le front de mer, trois forts permettent de surveiller l’horizon : le Fort Blanc à l’Ouest, le Fort Tremblant à l’Est et le Fort Royal au centre. Ce qui n’empêchera pas la destruction de la ville en 1694 par la flotte anglohollandaise. Louis XIV dépêche Vauban et des ingénieurs afin de hâter la reconstruction de Dieppe. En 1763, le peintre Joseph Vernet commence “Le port de Dieppe”, quinzième et dernier tableau de la série des ports de France (il est aujourd’hui visible au Musée de la Marine à Paris ). Le soleil matinal sur les façades du quai Henri IV met en valeur la modernité architecturale de la ville, face au quartier du Pollet, plus ancien car n’ayant pas été touché par les bombardements de 1694. Au premier plan, l’artiste a décliné les activités autour du port : pêche et vente du poisson, mais aussi petits commerces, promenades et rencontres. En 1778, un bassin de retenue et des écluses sont creusés. Le port gardera cet aspect jusque dans les années 1880, où la deuxième révolution industrielle impose des transformations portuaires afin d’accueillir des navires de fort tonnage. Une partie du Pollet fut sacrifiée : rues coupées, maisons rasées et population expropriée ; l’actuel passage vers l’arrière-port fut ainsi percé. Certains polletais, sans ressource, durent alors se réfugier dans les grottes de la falaise Est : les gobes, tandis que l’atelier de Gustave Eiffel concevait le pont tournant, aujourd’hui pont Colbert, inauguré en 1889.
Charles Lapostolet, L’avant-port de Dieppe, vers 1890.
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