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4.1 Traités historiques
from La santé des Autochtones dans les politiques et les systèmes de santé fédéraux, provinciaux et terri
by NCCIH-CCNSA
4. CONSTATATIONS : TRAITÉS, ACTIVITÉS D’AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE ET SANTÉ DES AUTOCHTONES
En plus de politiques fédérales, provinciales et territoriales, les traités historiques (numérotés), les traités modernes et les accords sur l’autonomie gouvernementale jouent un rôle important dans la gouvernance de la santé des Autochtones. Les traités historiques sont les traités numérotés, signées entre 1871 et 1921 (CIRNAC, 2020), alors que les traités modernes, aussi connus sous le nom d’accords sur les revendications territoriales globales, sont signés pour les domaines où des traités historiques n’ont jamais été négociés. Relations CouronneAutochtones et Affaires du Nord Canada (RCAANC) définit les traités modernes comme suit : …sont généralement tripartites et comprennent des organisations ou des nations autochtones, la Couronne et les gouvernements provinciaux et territoriaux comme signataires.
Elles apportent clarté et prévisibilité en ce qui concerne les droits sur les terres et les ressources, la propriété et la gestion. Les droits qui y sont définis sont protégés en vertu de la Constitution. (CIRNAC, 2019, p. 4)
En comparaison, les accords sur l’autonomie gouvernementale sont des formulaires écrits expliquant comment les gouvernements et les communautés autochtones exerceront leur droit à l’autonomie gouvernementale inhérent et protégé en vertu de la Constitution. Ces ententes peuvent être établies dans le cadre de traités modernes au conjointement avec ces traités, ou en tant qu’entente séparée. Les accords sur l’autonomie gouvernementale établissent habituellement les structures de gouvernance, qui peuvent ou non inclure des dispositions supplémentaires propres aux compétences liées à la santé ou à d’autres services (CIRNAC, 2019).
Au cours des dernières décennies, de nombreuses activités ont eu cours relativement à l’élaboration de traités et d’accords sur l’autonomie gouvernementale. Bien que le Traité no 6 demeure un traité fondamental en matière de santé en raison de la clause relative aux médicaments qu’il contient, les interprétations par le système de justice canadien ont depuis élargi sa portée afin qu’il s’applique à d’autres territoires visés par les traités et on commence maintenant à reconnaître davantage les ententes verbales sur les soins de santé formulées dans le cadre du processus de signature (Craft & Lebihan, 2021). De plus, plusieurs traités modernes et accords sur l’autonomie gouvernementale ont été signés et presque tous sont, dans une certaine mesure, pertinents en matière de santé ou de soins de santé. Les sections qui suivent donnent plus de détails sur ces mises à jour et soulignent les divers éléments importants pour la santé des Autochtones et la prestation de soins.
4.1 Traités historiques
Les traités historiques impliquent un échange de services, de ressources ou de documents relatifs aux terres traditionnelles des Autochtones dans le cadre de la recherche incessante des colonisateurs d’étendre leur domination vers l’ouest dans ce que nous connaissons sous le nom de Canada. L’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 protège et affirme les droits issus des traités pour de tels services, ressources et documents négociés dans le cadre des démarches associées aux traités. Il existe au Canada une variété de traités historiques tels que les Traités de paix et de neutralité signés entre 1701 et 1760, les Traités de paix et d’amitié signés entre 1725 et 1779, le Traité de cessions de terres du Haut-Canada et les Traités Williams, signés entre
1764 et 1862 et en 1923, les Traités Robinson et les Traités Douglas, signés entre 1850 et 1854 et les traités numérotés signés entre 1871 et 1921 (CIRNAC, 2020). Ce rapport se concentre sur les traités numérotés et leurs implications pour la santé des Autochtones, plus particulièrement en ce qui concerne le Traité no 6.
En tout, 11 traités numérotés ont été signés, mais seul le Traité no 6 contient, dans son libellé, des dispositions particulières concernant les soins de santé. On y déclare ce qui suit : « qu’il y sera tenu un buffet à médicaments au domicile de tout agent des Indiens pour l’usage et l’avantage des Indiens, à la discrétion d’un tel agent; » (Treaty No. 6, 1876). La clause relative aux médicaments a fait l’objet de diverses interprétations par la Cour suprême quant à son application et à sa signification. En 1935, dans sa décision dans l’affaire Dreaver c. The King (Opekokew, 1996), le juge Angers adopte une vision plus large et estime que cette clause signifie « que l’on doit fournir aux Indiens tous les médicaments et toutes les fournitures médicales dont ils pourraient avoir besoin, sans frais » (Dreaver v. The King, 1935, tel que cité dans Opekokew, 1996). Cette interprétation a été la première à caractériser le rôle du fédéral comme bailleur de fonds pour les soins de santé, tel que négocié en vertu du Traité no 6, tout en respectant l’autodétermination des Autochtones pour définir les besoins en soins et les médicaments ou les fournitures médicales nécessaires et pour lesquels le gouvernement doit fournir une réponse. Comme cette décision constituait une victoire pour les communautés des Premières Nations, la décision n’a pas été rendue publique avant les années 1970 (Opekokew, 1996) et a donc eu peu de répercussions sur les procédures judiciaires ultérieures.
En 1966, la Cour suprême de la Saskatchewan a rendu une décision dans le cadre de l’appel de Johnston concernant la clause relative aux médicaments qui précisait que cette clause « n’accorde pas aux Indiens un droit absolu d’utiliser et de profiter du ‘buffet à médicaments’, mais que les droits accordés le sont à la discrétion de l’agent des Indiens », une décision contraire à celle rendue dans l’affaire Dreaver c. le Roi, et qui ne fait aucunement mention des principes de l’autodétermination (R. v. Johnston, 1966). Cette décision établit plutôt la position d’autorité du gouvernement fédéral pour déterminer la légitimité des besoins en soins de santé des Premières Nations et l’admissibilité à recevoir des services. L’appel de Johnston a suscité un débat polarisant en raison de l’étroitesse de son approche. Les communautés autochtones et les signataires des traités estiment que la clause relative aux médicaments reflète le droit à la santé et au mieux-être contenu dans le traité15 issu de toutes les promesses verbales et écrites énoncées à l’époque des négociations (Craft & Lebihan, 2021; Lavoie et al., 2016b). Pendant ce temps, le gouvernement fédéral dépeint dans une large mesure son rôle à l’égard de la santé des Autochtones comme un geste de bonne volonté et une question politique, sans correspondance avec les droits des Autochtones ou des traités tels qu’ils sont protégés par la Constitution (Boyer, 2014; Lavoie et al., 2016b).
D’autres interprétations juridiques ont permis de rétablir la perspective plus large du Traité no 6 et son application aux soins de santé. Il s’agit de Saanichton Marina Ltd. c. Claxton, en Colombie-Britannique (1989), de la Nation crie Wuskwi Sipihk c. le Canada (1999) et de Health Sciences Association of Alberta c. Siksika Health Services, en Alberta (2017). Cette dernière affaire, Health Sciences Association of Alberta c. Siksika Health Services, a permis de confirmer que les dispositions en vertu de la clause relative aux médicaments sont souples et favorables aux peuples et aux communautés autochtones et estime que la décision dans l’affaire R. c. Johnston (1966) constitue une « interprétation littérale et restrictive de la clause relative aux médicaments » (Health Sciences Association of Alberta v. Siksika Health Services, 2017).
Encore aujourd’hui, la clause relative aux médicaments continue d’influencer la prestation des soins sur le territoire visé par le Traité no 6, et ce, de nombreuses façons. En mars 2020, par exemple, les nations cries de Samson et d’Ermineskin, la tribu Louis Bull et la Première Nation Montana de Maskwacis ont déclaré
15 Pour plus de détails sur les droits issus des traités en matière de santé ou sur les autres traités numérotés et leur pertinence pour la santé des Autochtones, veuillez consulter Craft & Lebihan (2021).