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Autochtones
from La santé des Autochtones dans les politiques et les systèmes de santé fédéraux, provinciaux et terri
by NCCIH-CCNSA
5. CONSTATATIONS : LES PROVINCES ET LES TERRITOIRES ET LA SANTÉ DES AUTOCHTONES
Un peu comme le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires approchent les soins de santé et les relations avec des Autochtones de plusieurs manières différentes dans leurs politiques de santé, la législation et les systèmes de prestations de soins. Certaines politiques et lois provinciales et territoriales arrivent mieux à combler les écarts pour les Premières Nations non inscrites et métisses que pour les autres; c’est le cas notamment de la Politique des soins de santé pour les Autochtones de l’Ontario (Ontario Ministry of Health, 1994) et de la Politique liée au Régime d’assurance maladie complémentaire pour les Métis dans les Territoires du Nord-Ouest (Northwest Territories Health and Social Services Authority [NTHSSA], 2021). Toutefois, des ambiguïtés dans les compétences demeurent quant à la façon dont les dispositions sur la prestation s’appliquent aux Autochtones (voir la section 5.1). En outre, plusieurs provinces et territoires ont procédé à des réformes de leur système de santé au cours de la dernière décennie et ont modifié les lois en vue de réorganiser la façon dont les soins sont offerts et la capacité, pour les communautés autochtones, de participer au processus de façon durable (voir la section 5.2).
Dans la section qui suit, nous expliquons les diverses approches provinciales et territoriales de la santé des Autochtones dans les lois et les politiques de santé en explorant les sujets suivants, qui correspondent aux objectifs de la recherche : établissement de la compétence en matière de soins de santé pour les Autochtones; possibilité de participation des Autochtones à l’élaboration des politiques de santé, des programmes et des services; reconnaissance et respect des pratiques de guérison autochtones et sécurité culturelle dans les soins; approches pour rétablir et renforcer les relations avec les peuples autochtones dans le système de santé. L’annexe C résume toutes les politiques et les lois répertoriées dans cette section. 5.1 Compétence provinciale et territoriale à l’égard de la santé des Autochtones
Chaque système de santé provincial ou territorial est régi par une série de lois sur la santé. Il s’agit souvent de lois sur les soins médicaux, les hôpitaux ou la santé publique qui précisent et réglementent la structure et le fonctionnement des systèmes de soins de santé et des responsabilités ministérielles en matière de prestation et de normes de soins, de santé et de sécurité publiques. La politique fédérale et sa position à l’égard de la prestation de soins aux Autochtones engendrent des clivages et des ambiguïtés dans les compétences pour l’administration des services de santé, ce qui favorise l’émergence d’un système alambiqué pour caractériser et réglementer les soins de santé pour les Autochtones (Lavoie et al., 2016b). Par inadvertance, les provinces et les territoires (dans les régions ou aucun accord sur
l’autonomie gouvernementale ou traité moderne ne s’applique) peuvent être laissés à eux-mêmes pour combler les écarts et assurer un accès équitable aux services cliniques et administratifs pour les peuples autochtones à même leur système de santé pour la population générale avec peu de directives ou de soutien de la part du gouvernement fédéral (Lavoie, 2018). Dans les autres cas, les différences d’accès persistent.
À ce jour, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (TNO) est le seul à combler les écarts dans les services de santé non assurés (SSNA) et les soins de santé pour les Métis. Brièvement, disons que la Politique d’assurance maladie pour les Métis (1995) dans les TNO offre une couverture d’assurance maladie complémentaire aux Métis vivant sur le territoire et qui, autrement, ne seraient pas admissibles à recevoir des soins dans le cadre des SSNA du gouvernement fédéral. La politique et ses critères d’admissibilité ont été mis à jour en 2021, en réponse aux obstacles à l’accès et dans le but de mieux correspondre aux articles de la DNUDPA (NTHSSA, 2021). Bien que cette politique parvient à combler certains écarts, elle ne vise pas à régler les enjeux de compétences liés aux soins de santé pour les Autochtones ni à expliquer comment les Métis peuvent être intégrés ou pris en charge par le système de santé pour la population générale dans le territoire. Il vaudrait donc la peine d’approfondir les recherches sur la façon dont les gouvernements au Canada abordent et remplissent leur rôle de supervision des soins de santé des Autochtones et la façon d’y participer, comme le prévoient leurs lois sur la santé.
L’Alberta et le Nunavut sont les seules administrations à inclure explicitement les peuples autochtones dans leurs lois sur la santé. En Alberta, la Public Health Act (loi sur la santé publique) (2000) et la Regional Health Authorities Act (loi sur les régies régionales de santé) (2000) incluent les Métis en reconnaissant leurs terres de peuplement, conformément à la Metis Settlements Act (loi sur les terres de peuplement des Métis) (2000) de l’Alberta. Les terres de peuplement des Métis sont considérées comme des municipalités lorsque des lois et leurs dispositions sur la santé publique et les soins de santé s’appliquent. De même, le Nunavut est le seul territoire à affirmer ses compétences en matière de soins de santé pour les Inuits dans sa Loi sur la santé publique (2016), vraisemblablement à la suite de l’Accord sur les revendications territoriales des Inuits.
La Saskatchewan, le Manitoba, l’Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l’Île-duPrince-Édouard (ÎPÉ) laissent tous supposer que la prestation de soins de santé sur les réserves se situe hors de leur champ de compétences, vraisemblablement pour correspondre à la compétence fédéral dans ce domaine (voir l’annexe C). Toutes les provinces, sauf l’ÎPÉ, déclarent que leur ministre responsable de la santé publique ou des soins de santé peut conclure des ententes avec le Canada ou les conseils de bande de Premières Nations, comme le prévoit la Loi sur les Indiens, aux fins de mener à bien les tâches qui leur incombent en vertu de leurs lois respectives. Les choses sont légèrement différentes pour l’ÎPÉ, car dans sa Public Health Act (loi sur la santé publique) (1988), la province mentionne explicitement que la prestation de soins sur les réserves est une compétence séparée et qu’en cas d’urgence sanitaire, le ministre responsable peut divulguer de l’information au Canada ou aux bandes de Premières Nations afin qu’ils puissent planifier leur réponse, ce qui laisse supposer que les bandes de Premières Nations sont exclues de toutes les autres dispositions en vertu de la loi.
La Colombie-Britannique, l’Ontario et le Yukon laissent tous entendre qu’ils ont la compétence et la responsabilité des soins de santé pour les Autochtones. Or, en utilisant des termes génériques tels que communautés « autochtones » ou « aborigènes » dans tout ce qui concerne cet aspect des soins de santé, sans préciser si ces termes incluent tous les peuples des Premières Nations, inuits et métis ou s’ils incluent les Premières Nations vivant sur ou hors des réserves (ou les deux). En Colombie-Britannique, par
exemple, dans la Public Health Act (loi sur la santé publique) (2008), on précise le pouvoir du ministre dans la planification des soins de santé pour répondre aux besoins des « peuples autochtones ». En Ontario, la Loi de 2006 sur l’intégration du système de santé local stipule que les réseaux de santé doivent préparer chaque année un rapport qui inclura « des données se rapportant expressément aux questions de santé des Autochtones »; la Loi de 2019 pour des soins interconnectés veille par ailleurs à ce que le ministre collabore avec « les collectivités autochtones » avant la planification des services de santé. Au Yukon, la Loi sur la santé (2002) déclare que le ministre favorise les partenariats et la collaboration avec les « groupes autochtones » pour la planification et la mise en œuvre des services de santé.
De plus, trois provinces – le Manitoba, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick – ont inclus dans leurs lois sur la santé des dispositions qui suggèrent à la fois l’inclusion et l’exclusion des soins de santé aux Autochtones dans leurs compétences. Bien que chaque gouvernement affirme que son ministre de la Santé peut conclure des ententes avec des communautés autochtones pour l’administration de la loi, cette même loi contient aussi des exigences pour que les bandes des Premières Nations puissent participer à la planification des soins de santé (Regional Health Authorities Act [1996] au Manitoba); stipule que des conseils des services de santé aux Autochtones doivent être créés pour conseiller sur les questions en matière de santé et de prestation de services (Ministry of Health and Long-Term Care Act [1990] en Ontario); ou précise que les Autochtones doivent être représentés lors des nominations aux conseils d’administration des régies régionales de la santé (Regional Health Authorities Act [2011] au Nouveau-Brunswick). Sans autre détail ou sans terminologie établissant des distinctions claires, ces dispositions peuvent porter à confusion au.
5.1.4 Reconnaissance explicite des accords sur l’autonomie gouvernementale et des traités modernes dans les lois sur la santé
Plusieurs provinces et les trois territoires sont parties à des accords sur l’autonomie gouvernementale ou à des traités contenant des dispositions relatives aux soins de santé (voir la section 4 et l’annexe B). Dans le cadre de cet examen, nous avons constaté que les lois sur la santé du Québec, des Territoires du Nord-Ouest (TNO), de Terre-Neuve-et-Labrador (TNL) et du Yukon respectent les droits en vertu des traités tels que négociés dans le cadre des traités modernes et des accords sur l’autonomie gouvernementale signés dans les limites de leur province ou de leur territoire. Au Québec, la loi relative au système de santé de la province (Act Respecting Health Services and Social Services [1991]) respecte l’autonomie du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie James, lequel a été créé dans le cadre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et qui est réputé distinct de la loi et de l’autorité du ministre provincial. La loi déclare aussi la formation de la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik afin de respecter l’autonomie de l’administration régionale Kativik à l’égard de questions touchant la santé ou les services sociaux. Les dispositions de la loi s’appliquent encore à la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik, bien que son application soit «sous réserve des dispositions particulières» édictées dans la loi (Act Respecting Health Services and Social Services, 1991, s. 530.2).
Dans les Territoires du NordOuest, la Loi sur l’assurance hospitalisation et l’administration