La gestion des espaces publics par le numérique La démonstration du GBI pour la ville d’Orléans
___ École d’Architecture de la ville et des territoires, Marne-la-vallée Mémoire DSA d’architecte-urbaniste
Nizar Bouaynaya Antea Group France Ingénierie & Conseil Environnement Représenté par Dominique Lancrenon Sous la direction de Guillaume Boubet
JUILLET 2016_
La dém émon onst stra rati tion on du GB GBII po pour ur la vi villlle e d’ d’Or Orlé léan anss
La gestion des espaces publics par le numérique
Sommaire 05 07
Avant propos Introduction
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PREMIÈRE PARTIE: Prolégomènes
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Qui est Antea ? Orléans: territoire d’expérimentation Qu’est ce-que le GBI ?
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DEUXIÈME PARTIE: Ville & représentation
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La ville cartographiée La ville numérisée La ville connectée La ville intelligente De la ville cartographiée à la ville intelligente
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TROISIÈME PARTIE: Exégèse
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Décodage de l’outil GBI: solution intelligente ? Leçons à retenir
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Conclusion Glossaire
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ANNEXES
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Entretien avec Cor Leenstra Exemples de formulaires traduits CROW / GBI Extraits des rapport-types d’analyse Bibliographie Remerciements
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Avant propos
Je suis architecte. La ville contemporaine m’a toujours préoccupé. J’ai choisi d’interrompre mon activité professionnelle et de renouer avec l’université. Mon but est d’apprendre à faire de l’urbanisme de projet durant une formation de spécialisation par une école d’architecture. Je considérais (et je considère toujours) que l’architecture de la ville est une affaire d’architecte(s). J’ai choisi alors le DSA de l’école d’architecture de la ville et des territoires de Marne-la-vallée. J’ai démarré ma formation en septembre 2013 et par ce travail je viens la couronner. Mon apprentissage, cependant, se poursuit.
« En cinq siècles, l’usage de l’imprimerie a profondément altéré la conscience humaine. Il en sera de même de celui de l’ordinateur au cours des deux siècles prochains. »
Après une année assez dense d’enseignement, tout autant passionnante que riche en rencontres et en échange, j’ai bataillé pour intégrer une agence. Car il faut rappeler, que ni mon profil ni la crise de notre profession n’aide à trouver un emploi ces derniers temps. Fin novembre 2015, je réussis à rejoindre un groupe international d’expertise en environnement, Antea Group France. Je rencontre la direction technique de son pôle d’aménagement du territoire et j’obtiens un accord sur les six mois à venir. On me missionne alors sur la construction d’un référentiel pour « la gestion et l’aménagement des espaces publics et leur qualité » ,et ce, dans le cadre de la mise en place d’un outil numérique de gestion pour les collectivités françaises, ayant été développé auparavant aux Pays-Bas par cette même entreprise. Intuitivement, ceci s’est présenté pour moi comme une double opportunité. La première est de poser des questions précises sur l’espace public ordinaire avec un regard différent, pour interroger plus tard ma démarche de conception. Cela supposait que j’allais me confronter à une pensée différente de l’espace, à de nouveaux acteurs et à de nouveaux outils, autrement dit, à une vision peu connue à l’école. La seconde serait plutôt de tisser des liens avec le monde de l’ingénierie traitant des questions environnementales variées sur des territoires multiples. En marge de ma mission sur l’espace public et sa gestion, je devais assister la direction dans d’autres études et projets d’ « innovation». Il était question de réfléchir à la réversibilité du sous sol de la Défense, la mutabilité des parkings de stationnement, l’organisation de séminaires, etc. Des thématiques certes intéressantes dont certaines font implicitement appel à une démarche du projet mais qui n’ont pas trouvé suite pendant les mois de mon stage. Aussi, j’ai été mobilisé sur la mise en forme d’une candidature de l’entreprise sur un programme européen, Interreg Learning Plateforms ; outre la courte assistance que j’ai pu apporter sur le travail de plans locaux d’urbanisme (PLU Villemomble).
Jeremy RIFKIN L’âge de l’accès: la nouvelle culture du capitalisme. Éditions La découverte,2000.
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Ce mémoire s’inscrit donc dans le cadre de cette brève expérience. Je l’appréhende comme une chance concrète de s’interroger sur une question très actuelle : la ville à l’épreuve du numérique. J’espère pouvoir en tirer des conclusions et me positionner sur cette question.
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Introduction
Il semble que nous traversons un période morose. Il parait que la croissance économique est à l’arrêt? Certains pensent même que la crise financière bien qu’elle ne sera pas pour demain, elle sera pire au lendemain.1 Il parait aussi que la population mondiale sera, dans quelques décennies, résolument urbaine.2 Mais qu’en est-il de la gestion de nos ressources? Comment pense-t-on la gestion de nos villes ? Face à des moyens économiques limités, l’impératif d’une gestion durable de nos territoires s’impose comme une ultime question à nous d’abord : architectes, urbanistes, géographes, ingénieurs, sociologues, etc. Sous un autre angle de vue, l‘époque que nous traversons amène, paradoxalement, un progrès notable en matière de nouvelles technologies. La masse d’information et de données sur l’homme et son milieu ne cessent de s’accroître. Les techniques de stockage, d’usage et de partage évoluent vite également. On parle même d’une révolution numérique, d’un âge du Big Data, qui visiblement, ouvre de nouveaux champs transdisciplinaires à la science et nous interroge sur notre savoir-faire. Devancé par la géographie, l’urbanisme - comme l’architecture d’ailleurs est une discipline qui se soumet progressivement aux outils numériques. Sa pratique actuelle a permis de produire des bases de données très renseignées et de plus en plus importantes. Leurs exploitations ont, d’ores et déjà, conquis le monde de la recherche et séduisent aussi bien les gouvernements que les entreprises. Les fins d’un tel désir sont diverses et parfois opposées : e-gouvernance, benchmarking, géomarketing… Une telle réalité semble échapper à certains ! Pourtant tout ceci touche une part importante de notre discipline aujourd’hui. Il faut se rappeler que l’urbanisme a souvent employé le dessin des cartes pour représenter et réinterpréter les territoires. L’évolution des techniques cartographiques ont, en effet, beaucoup inspiré les méthodes d’analyses géographiques et urbaines. L’ascension vers le numérique, l’apparition d’objets connectés dans l’espace urbain, le développement de la technologie combinant le réel et le virtuel sont une opportunité pour la ville de demain.
1 LenouvelObs, Dominique Nora, « La crise économique mondiale n’est pas pour demain,mais pour après-demain »,article paru le 15 février 2016. 2 Selon le rapport des nations unis, « Population prospects 2015 revision », www.un.orgworld.org, consulté le 22 février 2016.
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Les géants de l’informatique l’ont bien compris et ont investi dans ce secteur. Ils sont en train de reconfigurer notre manière d’agir et de penser la ville. Le concept de la ville intelligente ou smart city émerge comme l’un des produits star de ce business de villes encore plus performantes, plus sécurisées, plus « verts »,etc. Partant de ces multiples constats, dans quelle mesure l’intelligence numérique peut-elle participer à une gestion soutenable de nos biens territoriaux ? Sommes-nous en train de voir naître un urbanisme de données…du Big data ? Quel sera le rôle de l’urbaniste à l’âge du « tout numérique »? Dans ce contexte, notre regard s’oriente vers ce qui structure la ville contemporaine et met en scène notre cadre de vie : les espaces publics. Pourquoi les espaces publics ? Parce qu’ils posent des questions socioéconomiques, politiques et environnementales impliquant à la fois la puissance publique et le simple citoyen. Car aussi, l’enjeu derrière leur gestion semble s’imposer frontalement aux collectivités, surtout à l’heure où le domaine public est mis sous pression constante de une éventuelle confiscation par le secteur privé. L’aménagement, l’organisation et la gestion de nos rues, boulevards, places, jardins etc. sont placés au cœur des préoccupations partagées par tous. De nombreuses difficultés se présentent quant aux services urbains de nos villes. D’une part, ils se retrouvent confronter à un patrimoine imposant à gérer. Un patrimoine qui ne cesse de s’accroître avec le phénomène d’étalement urbain et la demande accrue en besoins d’urbanité (transport, assainissement, nature). D’autre part, ils se retrouvent submergés par une masse d’information de tout type en face d’outils de gestion inadaptés. A cet égard, on se demande , si on peut, sur un fond de discours d’austérité et de manque de moyens financiers, faire face aux difficultés multiples et complexes que rencontrent les gestionnaires des espaces publics. Comment peuvent-ils donc mettre l’intelligence numérique en faveur d’une meilleure gestion de ces espaces ? En France, le gouvernement mise énormément sur la transition numérique pour rendre plus efficace les services publics.1 Le conseil national d’information géographique, le CNIG, vient de signer un protocole pour
la création d’un référentiel cartographique unique : le plan de corps rue simplifié ou PCRS. Par ailleurs, aux Pays-Bas, le groupe Antea, un bureau d’études international expert en environnement a lancé, depuis dix ans, un système informatique « intelligent » de gestion des espaces publics, le GBI ou Geintergreed Beheer informatie lui offrant ainsi la place du leader dans le pays. Aujourd’hui, l’outil a évolué vers d’autres municipalités. En ce début de l’année 2016, l’agglomération d’Orléans Va de Loire, portée par l’ambition de rejoindre la communauté de la French Tech signe, un accord avec la filiale française d’Antea Group, pour mettre en place une version démonstrative de son fameux outil de gestion, le GBI. Cette phase pilote fait partie d’un processus de long terme, en vue de s’approprier l’outil et le mettre au service des compétences internes municipales. Au vue de la mission qui m’a été confiée, à travers l’étude de cas de ce logiciel, la gestion des espaces publics par le numérique m’interroge sur l’origine de cette évolution vers ce qu’on appelle «la ville intelligente » et les applications qui en découlent. Comment les outils cartographiques ont changé notre façon de représenter et gérer la ville ? Quel témoignage nous offre le GBI ? Et quelles leçons peut-on retenir de cette épreuve? Pour mener à bien ma réflexion, je structure ce mémoire en trois parties. La première essayera d’introduire le lecteur aux trois sujets essentiels de la mise en situation professionnelle, à savoir Antea group, structure d’accueil et organisme porteur du projet ; le GBI logiciel de gestion des espaces publics et le territoire d’application représenté par Orléans, ville et agglomération. Puis, un bref détour par l’évolution de la cartographie et son histoire, nous permet de mieux comprendre le rapport entre l’outil de représentation et la connaissance des territoires évoluant vers le désir de contrôle incarné par la ville intelligente. Cette hypothèse, nous permet enfin d’aborder le GBI et étudier ses méthodes de représentation et d’analyse de la ville et des espaces publics pour les confronter ensuite, à la philosophie et les convictions que nous avons profiler tout au long de notre parcours universitaire et professionnel.
1 La France est devenue en 2014, la première nation européenne en matière d’administration numérique. Elle entend accélérer sa transformation pour simplifier encore davantage les démarches des particuliers et des entreprises grâce à internet, et rendre les services publics plus efficaces et plus réactifs. Consulter « le numérique instrument de la transformation de l’état » paru sur le site : www.gouvernement.fr 8
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Première partie Prolégomènes
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Qui est Antea ?
Il me semblait important de commencer, d’abord, par présenter le groupe étant donné qu’il est peu commun de trouver des architectes au sein de ce type de structure. Sur ses 500 experts répartis sur l’ensemble du territoire, on s’aperçoit que seulement deux architectes et deux paysagistes sont salariés de la société. Pourtant, le groupe, spécialisé en ingénierie environnementale, dispose d’un pôle exclusivement dédié à l’aménagement du territoire au coté des directions de l’eau de l’environnement et de l’infrastructure. Il est possible de penser, qu’on est dans le giron de l’ingénierie et que ça suppose que les architectes-urbanistes sont bien loin de ce qui se produit dans le savoir faire qui a tant accompagné l’urbanisme et l’architecture. Cependant, les quelques mois que je viens de passer ici montre bien, contrairement à l’idée que j’avais jusque là, que la gestion et les transformations des villes et des territoires sont bien, aujourd’hui, aux mains de telles entreprises, souvent internationales, pluridisciplinaires et avec des chiffres d’affaires conséquents. Antea France est, d’abord, une filiale d’une plus large structure basée aux pays bas, au nom d’Oranjewoud devenue plu tard Antea Group. Ce groupe est présent dans plus de 25 pays dont la Belgique, les états unis, la Colombie...Par ailleurs, la succursale française se distingue parmi les entreprises d’expertise environnementale, par ses têtes compétentes, notamment dans le domaine de l’eau, ce qui lui a valu en 2010 le grand prix national de l’ingénierie pour son projet de restauration du barrage face au Mont Saint Michel. Chez Antea, pour les pôles les plus ancrés, comme le pôle de l’environnement ou encore celui de l’infrastructure, la structure est capable de proposer des études techniques variées, des audits, des diagnostics, des documents réglementaires...Cela peut aller jusqu’à proposer de la maîtrise d’œuvre de réalisation «clef en main» dans certains domaines tels que la dépollution par exemple ou le traitement des déchets. Les compétences sont multiples et les spécialités sont nombreuses. On y retrouve des ingénieurs en génie civil, en hydraulique, en géotechnique, des experts en désamiantage, des consultants en énergie, des techniciens de travaux, des développeurs en informatique, des géomaticiens...Certains étudient les eaux superficielles, inspectent les sous sols, dessinent des ponts, dépolluent les sites industriels en friche ; d’autres sont plutôt spécialisés dans la géothermie ou le data management, etc.
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Quant au pôle d’aménagement du territoire, auquel je suis affecté pour ma mise en situation professionnelle d’architecte-urbaniste DSA, il s’est bâti tout récemment, autour du noyau d’urbanistes issus de l’agence TSC (Territoires-sites-cités) acquise par Antea France en 2012 qui comprend aussi dans son effectif quelques géologues et expert en déchets. L’équipe se renforce au fil du temps et essaye de définir une ligne directrice pour l’étendue de ses prestations. Le pôle fonctionne selon les profils et les métiers portés par ses collaborateurs. Il y a ceux qui sont dans un urbanisme réglementaire ou un urbanisme de planification et pré opérationnel, tels que les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d’urbanisme communal et intercommunal; ceux qui élaborent des études d’impact environnemental ou des diagnostics sur l’accessibilité de bâtiments ; d’autres mènent des études ou des opérations de projet d’aménagement de ZAC et enfin, les spécialistes des déchets interviennent, quant à eux, dans leur propre domaine sur des sites en chantier et ailleurs. Au-delà, les partenariats avec d’autres bureaux spécialisés sont aussi récurrents. En quelques mots, le pôle se définit comme une modeste agence d’urbanisme au sein d’une structure là ou domine une certaine scientificité hérité de son background lié au BRGM, un organisme public assez distingué de l’ingénierie française. Antea cible, à priori, de devenir dans les prochaines années le premier leader français en expertise environnementale. La société a déjà incorporé en 2013 Géo-Hyd, une société reconnue à la fois pour sa compétence en environnement et en informatique. Elle s’est rapprochée en début de l’année d’une seconde société IRH, qui regroupe des ingénieurs conseils en eau, énergie et sites pollués, confirmant ainsi ses ambitions de mener sur la scène nationale dans son terrain d’expertise : l’environnement. Autant l’atout d’Antea est dans la pluridisciplinarité et la complémentarité des compétences de son arsenal d’ingénieurs hautement qualifiés, il est souvent peu évident de voir des études et des réalisations partagées entre les pôles et les métiers. C’est pour cette raison que l’entreprise a crée en 2014 un nouveau pôle transversal et hétérogène, dit de recherche et d’innovation. De ce fait, le projet de mise en place de l’outil informatique de gestion des espaces publics (GBI), sera promu par la direction de cette nouvelle branche.
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Orléans: territoire d’expérimentation
Il ne s’agit pas de parler d’Orléans au temps de Bertin et de son aérotrain,1 un temps où l’expérimentation portait sur les transports. Si on arrive à Orléans de Paris, une ligne horizontale de béton se détache du sol et trace un trait dans le paysage. Ce viaduc abandonné nous raconte d’une certaine façon l’histoire de ce territoire. Il nous rappelle évidemment cette époque. Cependant, l’innovation a changé de camp. Elle est plus centrée sur les nouvelles technologies, celles qu’on connaît aujourd’hui, et qui mettent le numérique au-dessus de toute préoccupation. Orléans comme d’ailleurs d’autres collectivités tentent de suivre ce courant. Aujourd’hui, ce sont les outils numériques que la ville teste au service de son aménagement de l’espace. Mais avant d’aborder ce sujet parlons d’abord du territoire tel qu’il se présente à nous. A moins d’une heure de Paris, Orléans et son agglomération sont au cœur d’un territoire ligérien exceptionnel. Un lieu où la culture et la nature s’ entrecroisent dans un milieu habité par plus de 275 000 habitants.2 Monuments historiques et sites naturels sauvages composent conjointement un cadre de vie attractif et de qualité. Cette attractivité émane de trois points. Premièrement, elle émane de la diversité des paysages habités. L’agglomération Orléanaise est située en effet, à la croisée de quatre unités paysagères assez contrastées : un paysage partiellement anthropisé ouvert mais vulnérable avec une nature sauvage omniprésente au niveau du val entre la Loire et le Loiret ; un paysage plutôt plat, celui de la Beauce, favorable à l’activité agricole céréalière mais aussi à l’urbanisation ; la forêt d’Orléans et ses clairières en lisière Nord de la ville ; enfin au sud, le paysage formé par les milieux humides boisés de la Sologne. Ensuite, Orléans est sur un carrefour de dynamiques économiques locales et régionales. C’est un territoire charnière entre deux axes importants: l’axe Est-ouest marqué par le réseau des villes du Val de Loire (Tours, Blois, Angers..) relié par l’autoroute A10 ; et l’axe Nord-Sud connectant le centre de la France au bassin de vie Parisien favorisant l’installation des activités logistiques.
1 Faisant référence à la voie expérimentale de l’aérotrain qui devrait relier Paris à Orléans dans les années 60 et qui a été conçue par l’ingénieur français Jean Bertin. Voir « A bord de l’aérotrain à Orléans » archive de l’INA. 2 L es derniers recensements de l’INSEE pour l’agglomération d’Orléans (2015). L’aire urbaine compte plutôt une population de 429 000 habitants. Une hausse accompagnée par l’étalement urbain.
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L’aérotrain expérimental de Bertin survolant la Beauce au Nord d’Orléans, Projet abandonné en 1978. (Source: Société Bertin, collection personnelle)
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Le troisième attrait majeur de la ville réside dans son « Oxford-sur-Loire », l’université d’Orléans. Ici, les fameux laboratoires de recherches scientifiques du CNRS et du BRGM y sont installés. Ce pôle scientifique se concentre dans la ville nouvelle de la Source, quartier sud d’Orléans, conçu dans les années 60 par Louis Arretche. La ville d’Orléans, et son agglomération, vont ainsi saisir les points forts de ce territoire pour mener une politique de labellisation. Elles montrent une réelle volonté d’afficher une bonne conduite sur plusieurs fronts pour valoriser cette attractivité. D’abord, en 2009, le label d’une ville « d’art et d’histoire » lui fut attribué pour son exemplarité dans la mise en valeur de son patrimoine. Ensuite, dans un contexte de mondialisation, la ville universitaire veut également être visible à l’échelle européenne et internationale. C’est pour cela qu’Orléans et toute la région Centre investissent dans des projets de recherche et de développement, surtout dans le secteur du numérique. La raison est simple. Ces projets sont subventionnés par l’Europe ; ils sont soutenus par des organismes d’aide et de financement comme la FEDER et la BPI .1 En poursuivant donc sa politique de labels, Orléans va se mobiliser à côté de la ville de Tours pour surfer sur la vague de la French Tech, un label que l’état accorde aux collectivités françaises ayant accompagnées cette nouvelle économie de start-ups locales. Disons aussi que la ville d’Orléans a souvent été « un élève modèle » pour l’état. En 1993, ses services municipaux ont été parmi les premiers à moderniser leurs outils de cartographie. Ils ont mis en place un système d’information géographique intégrant les données géoréférencées des exploitants des réseaux dans le domaine public appelé « SIGOR »2. Plus tard, Orléans sera une ville-test de la réforme portant sur la loi de prévention contre les endommagements des réseaux et canalisations en ville, dite loi DT-DICT3. L’engouement envers le numérique n’est donc pas récent pour la ville. Dans l’organigramme présent de ses services, on y trouve une direction
1 Voir à ce sujet l’article de Frédérique Alfonsi, « la ville intelligente, la question de rentabilité est-elle pertinente ? » paru dans le magazine ARCHISTORM N°77, mars avril 2016. Les 4 Unités paysagères : L’agglomération d’Orléans Val de Loire au coeur d’une diversité paysagère exceptionnelle
2 Dossier « Les bonnes conduites » le magazine de l’IGN N°65, 2012. Page 8-9. 3 Se référer à l’article de Lemoniteur « Réseaux : le décret DT-DICT sorti ! » du 7 octobre 2011.
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entièrement dédiée au développement du numérique et de la ville intelligente. Ce service est aujourd’hui dans les premiers rangs du groupe de travail sur la normalisation d’un plan corps de rue simplifié, sorte de référentiel topographique standardisé relevant l’ensemble des éléments de l’espace public.1 Enfin, la ville « des laboratoires » cherche à devenir le laboratoire des nouvelles tendances du numérique. Elle compte beaucoup dans sa politique d’aménagement et de gestion du territoire et dans sa relation avec les citoyens sur les promesses des nouvelles technologies et de la cartographie numérique. Cependant, les services municipaux de la ville doivent faire face à un changement majeur : le changement d’échelle de gouvernance sur un périmètre comptant dorénavant 22 communes. Car l’agglomération d’Orléans Val de Loire, statuée en 2001, doit gérer à la fois un territoire large et une structure urbaine et paysagère très contrastée. Les compétences aussi, ne sont plus les mêmes aux seins des services de la ville : transport, gestion des déchets etc. sont délégués à l’agglomération. D’autres ont été mutualisées avec ceux de la ville. Et ce passage à l’intercommunalité peut être à double tranchant. Ainsi, ni les moyens ni les stratégies de fonctionnement ne peuvent stagner. Les enjeux sont multiples et portent surtout sur la réorganisation effective des services afin d’affronter cette transformation. Orléans est sur la voie de la métropolisation. Les décideurs ont bien compris les enjeux derrière sa mutation territoriale et accélère à toute vitesse la réforme.
Dans cette perspective, la direction des espaces publics de la ville, tout juste fusionnée avec celle de l’agglomération, doit au préalable se préparer à ces nouveaux défis. Pour défricher le terrain, les services du développement du numérique et de la ville intelligente se joignent à la direction des espaces publics et saisissent l’opportunité que la société Antea leur propose pour expérimenter en avant-première, l’outil numérique de gestion des espaces publics, le GBI. L’étude fera partie d’un programme de recherche et d’innovation autofinancé intégralement par la mairie en un premier temps. Elle pourrait s’appuyer après sur des subventions européennes dans un projet plus large, à l’image de ce que fait Interreg Europe.2 La gestion du patrimoine notamment celui de l’espace public et le déploiement du système d’information géographique sur tout le territoire sont des préoccupations à priori pressantes pour Orléans. Dans cette perspective, la direction des espaces publics de la ville, tout juste fusionnée avec celle de l’agglomération, doit au préalable se préparer à ces nouveaux défis. Pour défricher le terrain, les services du développement du numérique et de la ville intelligente se joignent à la direction des espaces publics et saisissent l’opportunité que la société Antea leur propose pour expérimenter en avant-première, l’outil numérique de gestion des espaces publics, le GBI. L’étude fera partie d’un programme de recherche et d’innovation autofinancé intégralement par la mairie en un premier temps. Elle pourrait s’appuyer après sur des subventions européennes dans un projet plus large, à l’image de ce que fait Interreg Europe.3
A peine l’agglomération constituée, ils préparent déjà la prochaine étape de gouvernance et envisagent une intégration plus sérieuse de leurs services et une mutualisation des directions entre communes. L’agglomération pourrait devenir une communauté urbaine en 2017. La gestion du patrimoine notamment celui de l’espace public et le déploiement du système d’information géographique sur tout le territoire sont des préoccupations à priori pressantes pour Orléans.
1 L’état français via le centre national d’information géographique ou CNIG a signé en juin 2015 un protocole national ayant pour objet de la constitution d’un plan topographique commun que les collectivités et les exploitants des réseaux tiennent à jour selon une codification et un vocabulaire cartographique unifiés. Ce plan sera un référentiel établi, dans les années à venir, sur l’ensemble du territoire français. Le but premier étant d’éviter surtout les endommagements liés aux divers travaux dans l’espace public.
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2 Interreg Europe est un programme financé par la FEDER ayant pour but de promouvoir la coopération entre les régions européennes au service d’une politique de mutualisation des connaissances et de développement des solutions dans divers domaines y compris la planification urbaine et territoriale.
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Qu’est ce que le GBI ?
G.B.I. est l’acronyme néerlandais de Geïntegreerd Beheer Informatie, définissant un outil informatique de gestion des espaces publics, développé par le pôle de management des données du groupe Antea Nederland en partenariat avec Dataquint, un éditeur de logiciels SIG adaptés aux besoins des collectivités et des entreprises. Comme Geovisia, l’un des produits phare de ce partenaire, GBI est un outil informatique qui utilise la cartographie numérique et une base de données très renseignée sur l’espace public et plus particulièrement ses composantes : les routes, les arbres, le mobilier urbain, l’éclairage public… L’objectif est de faciliter la tâche à l’administration municipale et ses services techniques dans ses choix et ses décisions relatifs à la gestion quotidienne de ce patrimoine. Il impliquerait en second temps, le citoyen dans cette démarche. L’outil, répond aussi à un cadre réglementaire sur la qualité standard des espaces publics imposé par l’état aux collectivités. Aux Pays-Bas, le GBI rencontre un succès incontestable à l’échelle nationale. En effet, Antea Nederland offre ses services à environ 200 administrateurs dont 170 municipalités sur les 390 du pays.1
Ce qui caractérise l’outil Cette réussite s’explique par divers raisons. La première, réside dans la particularité de l’outil à intégrer dans ses éléments d’entrée, une grille de normes et de recommandations techniques élaborée par quelques centres d’expertise dans la gestion du territoire. Parmi eux, on peut citer la principale plateforme de connaissances CROW. 2 La deuxième raison semble être liée à la disposition rapprochée, auprès des services municipaux, d’un personnel de formation d’Antea dédié à la mise en place et le suivi de l’outil depuis sa livraison et à chaque mise à jour importante. Ce personnel peut visiblement animer des programmes de concertation réunissant techniciens et habitants d’une ville-usagère. Enfin, l’idée, surtout, mise en avant par Antea derrière le GBI est son aspect « intégral ». C’est-à-dire sa capacité de rassembler sous un seul et unique système d’information, une série de fonctionnalités permettant à chacun de ses utilisateurs un usage spécifique dans la gestion et l’entretien des espaces publics répondant ainsi à une volonté de construire une plateforme commune et partagée de l’outil entre différents acteurs.
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Carte du déploiement du GBI sur le territoire néerlandais Antea Group, février 2016. 1
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2 CROW, est un organisme d’expertise technique se définissant comme une plateforme de connaissances à l’échelle nationale qui intervient dans les domaines de l’infrastructure, du trafic routier, du transport et des espaces publics ; une sorte de CEREMA néerlandais (ou CERTU). Le catalogue de standardisation de la qualité des espaces publics et de leur entretien, constitue un des référentiels produit par ce centre de ressource. Il sert à orienter et guider les gestionnaires des espaces publics. Révisé en 2013, Il souscris un cadre réglementaire applicable partout aux pays bas en s’adressant aux collectivités territoriales, aux prestataires de gestion, aux élus ainsi que aux usagers des lieux publics. C’est un outil qui est couramment actualisé par les experts du CROW. CROW propose, dans son référentiel, une normalisation de la qualité des espaces publics à travers une approche scientifique se basant sur des photos, des descriptions et des exigences de « performance » de chacune des composantes d’un espace public. Il comprend plus que 200 fiches illustrées de chaque entité élémentaire de l’espace urbain décontextualisée et évaluée selon une classification tenant compte de sa nature, sa fonction et sa matérialité. L’ensemble est catégorisé sous des domaines faisant plutôt référence aux divers métiers. On en dénombre six catégories : la voirie, les espaces verts, l’assainissement, le mobilier urbain, l’eau et les ouvrages d’art.
Source : www.gbibeheersysteem.nl
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GBI / services municipaux
Les quatre modules du GBI:
A ce titre, les services d’une ville, divisés entre les techniciens de la voirie, des espaces verts, des déchets ou de l’eau, etc. peuvent par exemple, alimenter leurs bases de données respectives ; visualiser et publier par thème, des informations géospatialisées et les mettre à jour régulièrement sur un référentiel cartographique commun.
Le programme informatique se compose de quatre modules : le GBI basis, GBI Databank, GBI Kennisbank et GBI Appsbank.
Ils peuvent également programmer des actions dans le temps et intervenir sur le terrain quand nécessaire, ou encore, éditer des rapports et programmer des plans d’actions spécifiques sur par exemple l’entretien du végétal durant les prochaines années et voir les dépenses qui s’y engagent. GBI / élus De son côté, l’élu peut décider de son engagement auprès de la population sur le maintien ou pas d’un certain niveau qualitatif d’une rue, d’une place, d’un quartier, etc. ; et donc définir, par conséquent, les objectifs et des ambitions à tenir par son équipe administrative et les confronter à un calendrier communiqué aux citoyens. GBI / citoyens Ces derniers, pour leur part, bénéficient de certains avantages liés à un tel outil numérique. Premièrement, Il y a une transparence sur les budgets alloués à la gestion et l’entretien de leur cadre de vie quotidien. Deuxièmement, il y a une implication active dans les décisions des programmes d’action mené sur le territoire. La ville peut éventuellement consulter ses habitants sur le niveau de qualité de leur quartier selon des critères bien définis. Troisièmement, chaque citoyen peut accessoirement et en temps réel, signaler et commenter un dysfonctionnement ou un problème constaté dans sa propre rue. Par ailleurs, sur le plan technique, le système développé par Antea et ses partenaires est sous la forme d’un logiciel professionnel destiné aux gestionnaires de l’espace public et une application mobile, Burgerschouw, téléchargeable gratuitement sur les Smartphones. Il y a deux façons pour exploiter le logiciel du GBI, soit sous une licence flottante via un serveur à distance (installé sur un Cloud) ou bien avec une installation fixe sur le système informatique interne de la ville.
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GBI basis Le GBI basis est la partie Hard du système. C’est la base de données générale. Elle capitalise des données géonumériques sur l’espace public transcrit des SIG, des photos en 360 degrés prises par la société Cyclomedia , et des données administratives et financières des services de gestion de la ville ou aussi de la banque de donnée d’Antea. Il est important de constater que les données géographiques font déjà l’objet d’un référentiel national mis à disposition par l’état et renseignent quasiment tous des réseaux et objets du domaine public. Régulièrement, l’ensemble de ces données sont mises à jour et vérifiées. C’est pour cela que ce module reste verrouillé. GBI Databank Ensuite, on trouve le GBI Databank gérant l’interface visuelle pour consulter et publier du contenu issu de ces données. GBI Appsbank Le GBI Appsbank, troisième module du GBI, regroupe toutes les applications intégrées au système. Ce module ouvert, permet de les ranger selon les divers profils d’utilisateurs et suivant leur besoins dans la gestion. Il s’organise autour de volets renvoyant aux tâches de chacun. GBI Kennisbank Il y a enfin, le module des connaissances techniques appelé GBI KennisBank qui vient en support aux applications du GBI. On peut trouver des prescriptions techniques propres aux services des villes, des normes et recommandations dictées par l’état à travers les plateformes de connaissances ou aussi des données qu’Antea a pu soigneusement collecter afin de comparer avec d’autres villes.
Pour conclure, Le GBI se veut évolutif et flexible pour de futurs usages : une sorte de logiciel mutant avec les aspirations des uns et des autres. Il a joué un rôle important en aidant les collectivités à réguler leurs marchés de gestion dans les régies indirectes, faisant appel à des entreprises privées. Maintenant, ce qui intéresse visiblement Antea est de poursuivre
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une politique privilégiant une meilleure association des citoyens à la gestion des espaces publics. Le but à terme est de décloisonner encore plus l’utilisation à un public plus large. On se demande, maintenant, dans quelle mesure le GBI pourrait se transposer avec l’héritage managerial des services municipaux en France, et plus particulièrement de l’expérience que nous exposerons dans ce travail à partir du cas Orléanais.
Élus
Ville
Secteurs
Gestionnaires, managers
Objets
Citoyens, Techniciens
Communication
Analyse et diagnostic (quantité,coûts et «qualité»)
Schema de synthèse des échelles de communication du GBI et de l’analyse des données sur l’espace public.
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Images immersives tridimemsionnelles de l’application Globespotter developpée par Cyclomedia et intégrée en module externe au GBI.
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Interactions entre les quatres modules du GBI.
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Les modules du GBI : de la crĂŠation ĂĄ la personnalisation des fonctions.
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Deuxième partie Ville & représentation De la ville cartographiée à la ville intelligente
Gravure: Philippe Danfrie, 1597. Techniques d’arpentage: utilisation du graphomètre, L’interaction entre le territoire et les méthodes de relevés
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La ville cartographiée
Depuis toujours, on a eu le besoin de représenter le monde pour le comprendre. L’appropriation intellectuelle de celui-ci s’est traduite par des représentations diverses. C’est ainsi que la pensée géographique antique a inventé la carte.
A ce titre, Filarete, dans son dessin de ville idéale, fera même allusion à la rose des vents. Par ailleurs, la ville cartographiée de la Renaissance s’est aussi traduite à la fois par un dessin géométrique et par les figures imaginaires des peintres de l’époque.
Cette transcription interprétative par le dessin du monde réel vers la petite échelle du canevas va devenir un manifeste de la représentation graphique codifiée de l’étendue terrestre, des mers et des océans, des établissements humains et des cités…il semble que la représentation de la ville est, dans une certaine mesure, attachée à l’évolution des procédés et techniques cartographiques tout au long de l’histoire. Il s’agit a priori bien plus qu’une simple traduction de ce que le territoire peut comporter.
A partir du XVIIIe siècle, l’instauration d’une nouvelle académie des sciences va donner une place privilégiée à la géographie. Longtemps alliés à la peinture, les documents cartographiques vont de plus en plus servir à l’aménagement du territoire. Ils vont être utilisés en tant qu’outils de dessin pour des projets à grande échelle. Les ingénieurs civils français des fortifications, vont s’appuyer sur les levés des arpenteurs pour dresser leurs propositions d’aménagement des cours d’eau: canalisation de rivière, réalisation d’écluses, chemins de halage, etc.1
La ville forme à travers l’histoire, un objet de civilisation assez complexe et un sujet de désir constamment raconté, exposé, décrit, par la plume et le dessin. Le regard porté par les géographes sur les villes, à travers leurs récits de voyage, leurs traités et leurs dessins de cartes, est sans doute d’une pertinence incontestée. Les cartes et les atlas d’autrefois, interprétaient remarquablement tout autant l’organisation spatiale de la ville que des éléments géographiques du site. On distingue souvent la figure d’une rivière, d’une forêt ou une montagne dessinée conjointement avec l’espace bâti, le tracé des rues ou encore certains édifices emblématiques. Il suffit juste de regarder les représentations anciennes des villes pour s’en apercevoir : Nippour et son fleuve l’Euphrate, Rome et ses sept collines... Durant des siècles, les techniques déployées telles que la géométrie et l’arpentage ont fait de la cartographie un outil stratégique à la fois de lecture, de gestion et d’action sur le territoire. Tout d’abord, ces techniques étaient longtemps perpétuées pour gérer le parcellaire agricole. Le cadastre fut, à cet égard, une représentation cartographiée de l’espace rural et ses multiples divisions. Cette traduction de l’espace physique servait à garantir tout autant les règles de propriété que la collecte d’impôt. Ensuite, la succession des expéditions et les grandes découvertes à la Renaissance feront, quelque part, faire évoluer la façon de représenter le monde. Il y a eu, en effet, un progrès notable dans les techniques de navigation maritime, qui ne sont devenues possibles qu’avec la conjugaison savante des méthodes de calcul entre ciel et terre encore plus précis. Cette rigueur scientifique célébrera un certain ordre de la géométrie et influra aussitôt la manière de penser la ville.
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Les plans des forêts royales et leurs tracés géométriques faisaient également appel à la cartographie et aux méthodes scientifiques des relevés de géographes. Ainsi, il est intéressant de noter qu’à cette période déjà, les cartes avaient indéniablement un pouvoir décisionnel dans la transformation du territoire. Ce pouvoir des cartes va nourrir, pendant les siècles à venir, une vision impérialiste. La cartographie sera développée, à toute vitesse, par les militaires. L’intérêt particulier pour la géographie et les instruments scientifiques qu’elle avance, va permettre essentiellement, à l’armée de renseigner à la fois le territoire que l’on contrôle et celui que l’on voudrait conquérir. En France, un service de géographie fut crée au sein de l’armée. En succédant à celles de Cassini et de l’État-Major, les cartes produites par les militaires se diversifient. Un peu plu tard, vers la moitié du XIXe siècle, le décollage de la photographie dans les airs va encore faire avancer la cartographie et former la source d’information principale au service de la topographie et aux renseignements sur les villes. Les premiers clichés aérostatiques, pris à partir de montgolfières, étaient des vues urbaines l’une de Clamart au sud de Paris et l’autre de la ville de Boston. Jusqu’à cette époque, la ville cartographiée va incarner le croisement de deux approches: l’une cherchant le confortement d’un certain aspect techno-scientifique, l’autre, plus créative, se nourrissant de curiosité et d’imagination en faisant appel à l’art comme moyen d’expression et au paysage comme pensée du territoire.
1 Monique Pelletier, La carte de Cassini : l’extraordinaire aventure de la carte de France, Paris, Presses de L’Ecole Nationale Des Ponts Et Chaussées, 1990.
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La ville numérisée
La véritable modernisation des outils et des techniques géographiques n’est que récente. Ce n’est qu’à partir du milieu du XXe siècle qu’on va assister à deux bouleversements majeurs dans la pratique de la cartographie. Le premier voit le jour avec l’invention de l’informatique. En effet, les ordinateurs, conçus comme de véritables machines de calcul, vont traiter par automatisation toute sorte d’information y compris les données géographiques. Ce processus va alors assujettir radicalement les procédés de la cartographie au nouveau dictat du binaire. Les conséquences sont profondes. L’affranchissement de la représentation du canevas, les règles de codage du dessin et le repérage de chaque objet dans l’espace sont devenus des questions d’algorithme. La carte n’est plus statique. Elle se transforme en un outil numérique interactif. Le second bouleversement est issu directement des conquêtes spatiales et des programmes d’observation de l’espace terrestre. Les satellites vont effectivement, succéder à la photographie aérienne et capturer des images encore plus fines et de haute précision. L’imagerie satellite, va servir à représenter un ensemble de phénomènes naturels ou urbains tels que les phénomènes climatiques, environnementaux, géologiques, mais aussi à analyser l’utilisation des sols, suivre l’urbanisation ou l’évolution des territoires, etc. A l’intersection de ces nouveaux acquis technologiques, une nouvelle étape sera franchie. La conjonction de la géographie et l’informatique va donner naissance à un métier ou une spécialité inédite : la géomatique. L’information géographique numérique sera dès lors traitée, stockée, diffusée par les géomaticiens suivant des procédures et des outils informatiques assez complexes dits SIG ou systèmes d’information géographique. Ces outils d’analyse spatiale vont contribuer à capitaliser et gérer tout type information lié à un élément physique ou un phénomène pouvant être géographiquement localisé ou référencé spatialement. La cartographie développée à partir des SIG prend son essence dans le géo-référencement de chaque point de l’espace. Elle va se thématiser au gré des acquisitions et des métiers. Les usages sont nombreux et variés. D’importantes bases de données renseignées vont être produites dans plusieurs domaines. A côté de la topographie, les plans cadastraux, les routes et les réseaux, on va créer des référentiels géographiques sur l’occupation des terres, la population, l’eau, etc. Ceci va permette à certains d’établir des études socio-économiques et de dessiner des cartes telles que celles qu’on peut trouver sur les dynamiques des populations,
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l’évolution des ménages, leurs déplacements, leur consommation, etc. D’autres données, axées plutôt sur l’environnement traiteront des questions d’hydrologie, de risques naturels, de biodiversité…Cette richesse des sources numériques et des informations que nous pouvons acquérir sur la ville et les territoires va très rapidement offrir de nouvelles possibilités à la cartographie. Finalement, de l’arpentage classique à la géomatique, le passage au numérique de la cartographie, marque un vrai tournant dans les moyens et les techniques déployés. On ne peut ainsi que consolider la connaissance sur la ville et les territoires. La capitalisation de l’information géographique et de toute sorte d’activité humaine est sans doute un moteur de savoir et de compréhension des phénomènes urbains. Une interprétation intelligente de ces informations peut s’avérer essentielle afin d’anticiper le futur de nos villes. Si les systèmes d’informations géographiques œuvrent dans ce sens en substituant les techniques traditionnelles de représentation de l’espace à des procédés binaires, ils ne peuvent pas malheureusement, à eux seuls, faire parler les cartes et les données. Un géomaticien n’est à priori pas un géographe.1 Cependant, la géonumérisation de l’espace devient, de nos jours, de plus en plus prégnante pour les villes. L’urbanisme tel qu’il est pratiqué aujourd’hui se ressource principalement de ces bases de données urbaines et géographiques pour appuyer ses hypothèses et nourrir les études. Cet urbanisme de données serait né donc avec la ville numérisée. Les systèmes d’information géographiques sont, à l’heure actuelle, une clef importante pour penser d’une manière transversale les territoires. Avec les nouvelles technologies de l’information et de la communication, d’autres flux de données de plus en plus immatériels viennent fonder de nouveaux scénari et de nouvelles prospectives à la ville.
1 Philippe Quodeverte cartographe géographe et mâtre de conférences à L’Université d’Orléans souligne que «les spécialistes des SIG sont des experts techniques, mais ce que les SIG proposent n’a rien de géographique en soi, puisqu’il manque le travail de pensée problématique de l’espace...», Extrait du dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Edition Belin 2013.
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La ville catographiée :
La ville numérisée:
Carte de reconnaissance hydrographique des environs de Raguse par Français Charles-François Beautemps-Beaupré, ingénieur hydrographe et cartographe français, 1810.
Carte à partir des SIG des zones inondables / monuments, Paris 2015.
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La ville connectée
Suite au développement de la cartographie numérique, d’autres révolutions technologiques vont se succéder et apporter des mutations profondes dans la perception de la ville. Il y a d’abord les réseaux de télécommunications, et plus particulièrement l’avènement de l’Internet ; mais il y a surtout le déploiement de la technique de géolocalisation. Il devient possible de transmettre une information numérique à distance et souvent en temps réel. La position des objets et des individus même dans leurs déplacements devient aussi une information géographique numérisable. Les procédés de géolocalisation vont se multiplier : après le système de GPS (géo-positionnement par satellite), on a inventé toute une gamme de puces et de capteurs électroniques pour localiser les êtres, les véhicules, les marchandises… Les smartphones également vont nous transformer quasiment en êtres perpétuellement connectés. Les nouvelles technologies de l’Internet et de la géolocalisation vont se propager de façon exponentielle et vont générer un important flux d’information que la cartographie numérique va nous communiquer et rendre sensible. Plusieurs domaines vont s’en servir pour identifier et analyser les territoires. De la représentation des corridors écologiques aux zones de chalandise, la géolocalisation des objets et des êtres va se révéler utile à l’étude de certains facteurs environnementaux et urbains de la ville.
Un peu partout, la modernisation de l’espace urbain se rabat sur l’emploi des TICs. Le nombre d’objets et de réseaux connectés augmente en ville. Les applications sont nombreuses et les flux à traiter derrière chaque terminal ou transbordeur peuvent s’avérer lourds à gérer. Ces flux forment des réseaux certes invisibles mais spatialisés. Les antennes de télécommunications, les hotspots, réseau de fibre optique, Data centers, etc. constituent une réalité physique de ces réseaux. Une nouvelle économie va se structurer autour des données issues de l’Internet et des objets connectés. Durant la dernière décennie, la ville en fera sa cible. Ainsi, la ville connectée offre les conditions préalables pour une possible interaction entre l’homme et l’objet à distance et en temps réel. Elle dispose de réseaux traditionnels physiques visibles mais aussi de réseaux invisibles qui transmettent et reçoivent des informations de toute sorte. Autrement dit, elle produit et génère massivement de l’information qu’elle collecte de ses usagers de ses propres infrastructures pour anticiper ou prévoir une quelconque action. La ville connectée serait l’état primitif de la « ville intelligente ».
A ce titre, dans son livre sur les smart cities, le chercheur et historien en architecture Antoine Picon met l’accent sur cet aspect sensible et sensoriel de la ville développé par le laboratoire de recherches SENSAble city du MIT. Il relate à travers une série d’exemples d’expérimentations et de réalisations au sein de la ville contemporaine la façon par laquelle l’espace urbain se dote de « sensors » et devient connecté. Après les véhicules, les routes connectées et les aires de stationnement, place aux poubelles et aux arbres munis d’une puce d’identification. A l’image de la nouvelle génération d’abribus parisien, les espaces publics sont de plus en plus peuplés par des objets connectés et interactifs. Les infrastructures urbaines et les réseaux techniques traditionnels de la ville tels que les canalisations d’eau et d’assainissement, les réseaux d’électricité ou d’énergie se munissent, eux aussi, de capteurs, de puces d’enregistrement et de caméra pour devenir communicants.
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La ville intelligente
Si aujourd’hui, l’idée d’une ville intelligente est reprise à chaque application des nouvelles technologies dans nos villes, c’est tout simplement parce qu’il y a bien eu, une forte présence du numérique dans la fabrication urbaine au cours de la dernière décennie. Boulevard connecté, ville numérique, cluster cybernétique ou encore quartier intelligent, l’univers urbain se met au « smart ». Tel un objet électronique, la ville se transforme en une plateforme d’objets communicants que l’homme tente de contrôler.
D’abord, Il convient de dire que les initiatives menées à l’heure actuelle, ne représentent qu’une addition de systèmes technologiques indépendants en réponse à l’accumulation des réseaux techniques. Ces systèmes tentent de mieux contrôler le comportement des divers réseaux urbains (eau, assainissement, énergie, transport…) et de rendre, par conséquent, leur gestion plus efficace. L’application de la technologie n’a qu’à se greffer sur l’infrastructure existante et renvoyer l’information à un point centralisé.
De toute évidence, il s’agit bien sûr, de l’intelligence de « la machine » et des ordinateurs superpuissants qui permettent à la fois de capitaliser et de traiter l’information numérique et d’intégrer dans son fonctionnement les TICs.
De ce fait, il n’existe donc pas de modèle préétabli de ville intelligente. Hormis les quelques villes nouvelles qu’on a baptisé intelligentes, telles que Masdar city aux Emirats ou Songdo en Corée du sud, de nombreuses villes de toute taille en Europe comme ailleurs se sont laissées séduire par cette idée de contrôle.
Selon Anthony Townsend, chercheur américain spécialiste des questions technologiques concernant les villes et les institutions publiques, les dernières années ont vu une explosion sans précédent d’un marché fructueux des villes intelligentes. D’après lui, ce déferlement prend naissance avec la crise financière de 2008, au moment où certaines multinationales de l’informatique comme la Big Blue (IBM), Cisco ou encore Siemens annoncent d’une seule voix leur intérêt de rendre nos villes plus intelligentes, et ce, grâce à leurs nouveaux logiciels à la pointe de la technologie. D’autres compagnies suivent un peu partout dans le monde afin de rallier ce mouvement et prendre part de ce nouveau marché. Il est tout à fait clair que l’apparition d’un tel intérêt à la ville est à la croisée d’une économie mondiale très compétitive, notamment entre les entreprises de l’informatique ; et un notable progrès des nouvelles technologies dans tous les domaines. C’est une sorte de produit hybride prenant l’urbain pour support, les nouvelles technologies pour moyen et les sujets actuels pour défis : les questions de restriction budgétaire ou les questions de développement durable. Le concept de ville intelligente n’est donc, à l’origine, qu’une idée de marketing. Il réunit un panorama de slogans assez prometteurs pour un développement urbain techniquement innovant. Parmi les promesses engagées de la ville intelligente, on parle d’efficience, de rentabilité, de résilience, de développement durable, etc. En somme, c’est ce que l’urbanisme a jusque là tenté de déficeler. Il est donc utile de mieux comprendre l’implication des technologies dans le développement des villes et de rendre compte des mécanismes qui fondent cette intelligence.
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A Barcelone comme à Amsterdam, pour une optimisation managériale de leur territoire, on propose de nouveaux outils réunissant la gestion de l’éclairage public, de la propreté, du stationnement, du trafic routier… Parallèlement, on automatise les transports, on installe des caméras de surveillance dans les espaces publics, on équipe tout par des capteurs. Le flux de données qui en résulte, est collecté par les services de la ville en temps réel. Traité, croisé avec d’autres données sur le territoire ce flux alimente des logiciels de paramètres combinant les chiffres et les cartes pour monitorer tel ou tel variable d’un réseau urbain. De ce point de vue, la carte numérique de l’âge de la smart city est une carte purement de pouvoir. La gestion urbaine ressemble plus que jamais à un jeu vidéo et la ville à une superposition de réseaux urbains qu’un simple clic pourrait commander. Avec les nouveaux possibles de la ville intelligente, dans laquelle le numérique joue un rôle principal, les dispositifs de contrôle et de pilotage de la gestion urbaine change pour l’administration mais demeurent arrêtées dans une approche top down. Ce qui implique une révision globale des modes de gouvernance. L’un des aspects modérateurs à ne pas négliger de la ville intelligente se résume dans la nature collaborative dans les usages des TICs. Cet aspect, tendant à rééquilibrer les pouvoirs, incite à une approche, plus flexible, plus souple, dans laquelle l’individu serait un acteur influent. L’association des citoyens dans la mise en place de « solutions » intelligentes s’avère indispensable pour poser les conditions d’une vision participative et donc démocratique de la ville du futur. L’open data ou l’ouverture inconditionnelle des données numériques au public constitue déjà un premier pas pour une telle vision.
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L’Openstreetmap est l’exemple phare en la matière. Sauf que, l’accès libre aux données publiques suscite plus d’initiatives encourageantes pour une véritable prise en main des citoyens. Malheureusement aujourd’hui, ce que l’on constate, c’est plutôt le secteur privé qui en tire le plus partie. Il s’avère, par ailleurs, que le citoyen connecté se réjouit d’ores et déjà de ces nouveaux environnements urbains interactifs. Face à cela, le pouvoir public, état et collectivités, se lance davantage dans du renouvellement urbain « gadgétisé ». Les entreprises privées ne peuvent qu’y trouver leur compte. Au final, la ville intelligente, semble satisfaire tout le monde. Toutefois, on oublie souvent que le fonctionnement de la ville intelligente repose sur deux choses. Premièrement, elle se ressource par des données de plus en plus libéralisées transmettant toute sorte d’information sur les réseaux traditionnels de la ville mais surtout sur les activités de ses citoyens ; deuxièmement elle se déploie via une infrastructure qui est loin d’être virtuelle mais de nature matérielle, physique et spatialisée. Ceci va inéluctablement poser une série de problèmes. D’une part, il y a la question de l’échelle du déploiement de cette infrastructure et de ses réseaux de câbles, d’antennes relais, de Data centres, de capteurs, etc. En effet, dès lors qu’on pense à mettre en place un système informatique pour gérer un territoire, on se confronte aussitôt à des frontières administratives. La démarche, également demeurant de l’ordre de l’initiative à travers des projets pilotes et expérimentaux, ne permet pas d’appréhender les mêmes ambitions sur un grand territoire. Pour l’instant il n’existe que des expérimentations appliquées partiellement. Elles sont souvent limitées spatialement à un fragment de territoire ou à une opération urbaine de démonstration, comme le cas du boulevard connecté de Nice. Sinon, elles traitent une thématique au-dessus d’autres de l’urbain. C’est le cas du quartier Issygrid, à Issy-les-Moulineaux qui concentre ses systèmes smart autour de la question énergétique.
Mais, Il y a la question récurrente que pose les projets de ville intelligente c’est leur paradoxe annoncé à propos de leur engagement en matière de soutenabilité des territoires. En effet, selon Antoine Picon parmi les limites de l’intelligence de ces villes, il pourrait bien y avoir une contradiction entre l’usage intensif des TICs et le développement durable. Les installations matérielles de la ville pour la rendre connectée puis intelligente ont un lourd impact sur l’environnement. Le devenir des câbles et des capteurs déployés ainsi que la forte consommation en énergie des Data centres sont loin d’être écologiquement soutenable. Enfin, le concept de ville intelligente se veut le fruit de standards mondialisés sur la ville. Souvent portés par les grandes corporations, ces standards trouvent du mal à s’étendre et s’adapter aux paradigmes locaux. Anthony Townsend nous rappelle que le copier-coller de ces solutions s’est avéré bien plus complexe à mettre en place et le marché ne s’est pas développé comme on l’a espéré. A l’âge d’or des nouvelles technologies, la ville intelligente porte certes un nouveau récit et de grandes ambitions pour ce siècle. En mettant à l’épreuve un urbanisme paramétrique, elle se fonde dans une approche purement techniciste. C’est une ville qui s’aligne probablement avec l’urbanisme technocratique du XIXe siècle tout en poursuivant les mêmes désirs d’efficacité et d’hygiène. La ville intelligente, ne pose aucune question sur la croissance économique, bien au contraire, elle s’affiche comme la solution de continuer dans le même élan tout en réorientant ses objectifs sur les préoccupations actuelles. Cependant, elle construit une vision simpliste de la ville d’aujourd’hui, fondée uniquement sur la performance de ses réseaux urbains et de ses bâtiments. Toute réflexion sur la forme urbaine et architecturale passe en second plan.
Ceci nous renvoie, au deuxième point problématique. La mise en place d’un système capable de renseigner puis de traiter les données urbaines en temps réel s’apparente à un outil « post-SIG ». Un tel système suscite manifestement un investissement financier très lourd que les collectivités locales ne peuvent pas porter seules. C’est pour cela que la ville intelligente ne s’applique qu’à petite échelle.
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La ville connectée :
La ville «intelligente»:
carte des villes dans le monde traçant les parcours des personnes faisant du jogging en ville ( source : www.flowingdata.com)
Images de la grande salle de contrôle de la ville de Rio de Janeiro.
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Troisèmement, selon le degré d’implication de la technologie dans leurs services, les villes actuelles peuvent être classées en quatre catégories suivant les intitulés des paragraphes précédents. Il y aurait des villes cartographiées, des villes numérisées à différents niveaux, des villes connectées et finalement les villes hyper-connectées et intelligentes.
De la ville cartographiée à la ville intelligente La construction d’une réflexion autour de la cartographie, son évolution dans l’histoire et l’évolution des techniques qui l’ont accompagné nous permettent de dégager trois conclusions.
A l’issue de ce récit et de cette classification, nous nous sommes initiés à un univers tout à fait inédit qui va consolider notre connaissance sur le sujet. Cela va nous permettre de tisser des liens entre une représentation de la ville assez familière à l’architecte-urbaniste, se basant sur une pensée transversale de l’espace; et une représentation moins connue, plutôt technique, qui est celle de la cartographie numérique combinée aux nouvelles technologies. Cela nous facilitera ultérieurement l’analyse du GBI de sa philosophie de gestion du territoire. Quelle serait donc sa représentation de l’espace géographique et urbain ? Peut-on le considérer comme un logiciel « smart » ? Et dans quelle mesure peut-il être adapté aux services d’Orléans et plus loin aux villes françaises ?
La première démontre que la cartographie sous toutes ses formes a toujours été un outil de pouvoir et d’influence sur la représentation spatiale que l’on fait de la ville et sur notamment les décisions de son futur développement. Cet instrument technique qui fut longtemps l’allié principal de la géographie semble ouvrir de nouvelles perspectives que bien d’autres disciplines ont su en faire un nouveau commerce. Le passage au numérique de la cartographie met sans doute à l’épreuve l’urbanisme dans sa pratique et nous interroge sur notre manière d’intégrer ses nouvelles méthodes. La seconde conclusion consiste au fait que la ville intelligente n’est pas une finalité pour chaque ville. Elle n’est qu’une forme évoluée d’une ville hyper-connectée bradant la technologie au-dessus de toute autre dimension.
XVIe
XVIIIe-XIXe La ville cartographiée
Type de cartes Supports Disciplines Techniques acquisition information Techniques représentation Degré d’interpretation Durée Usage
La ville numérisée
XXe 2e moitié La ville connectée
carte statique
carte dynamique
carte interactive
canevas
écran statique
capteurs et puces electroniques
XXIe La ville intelligente
carte interactive / participative ?
Ingénieurs, géographes,architectes
+ urbanistes , géomaticiens
bornage, arpentage
photogrammétrie, télédetection...
Photogrammétrie, télédetection...
Divers
Dessins plans perspectives, peinture,
DAO et SIG
Internet des objets / SIG
SIG, Services web 2.0
Temps réel
Temps réel
+++-
++--
60 ans (cartes Cassini)
moins de 10 ans
Gestion des terres, exploration des territoires, aménagement routier hydraulique, forestier...
Schéma récapitulatif 44
XXe 1ere moitié
+ Exploration et gestion de phénomènes naturels, météorologiques, urbains...
+ informaticiens
+---
+ Exploration et gestion d’objets et d’individus en mobilité ou en interaction avec leurs environnement
+ Gestion et contôle des infrastructures urbaines
Ville et cartographie 45
Troisième partie Exégèse Observations & critiques
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Décodage de l’outil
Comme nous l’avons exposé précédemment, la smart city et ses solutions intelligentes créent la tendance actuelle. Les développeurs du GBI ne cachent pas leur ambition de faire partie de cette mouvance. Bien que le logiciel ait beaucoup évolué depuis son lancement, le GBI aspire toujours à plus « d’intelligence ». Peut-on l’affilier à la lignée des outils de la smart city ? Rend-t-il la ville plus intelligente ? Tout d’abord, essayons de donner un premier bilan sur la représentation que l’outil informatique fait de la ville et des espaces publics. Comment le GBI les définit dans son système?
Le zonage : modèle territorial pour la gestion des espaces publics A travers ses multiples interfaces cartographiques, le GBI affiche systématiquement une carte numérique de la ville réduite à un découpage par zoning fonctionnel. La carte reprend les périmètres de secteurs selon qu’on est dans le centre-ville, dans une zone résidentielle, dans une zone rurale, dans un quartier d’activités, dans un parc ou bien sur un axe urbain important.
100 m2
Cette définition en six catégories d’espace sert de structure générale pour l’ensemble des applications intégrées dans le GBI. Autrement dit, pour chiffrer ou quantifier un élément inscrit dans l’espace public, le logiciel le classe selon sa situation urbaine dans la zone allouée. Un banc public dans le centre n’est pas évalué comme s’il était dans un quartier résidentiel. Il apparaît étonnamment que la gestion par le GBI des espaces publics soit différenciée par secteur monofonctionnel. Dans ce modèle visiblement très néerlandais, la ville, n’admet pas de mixité fonctionnelle. La gestion des budgets et de la « qualité » de l’entretien est subordonnée au zoning. Elle se fait par un emboîtement d’échantillonnage arbitraire du territoire sans souci de la géographie ou du contexte dans lequel s’inscrit l’espace public. Cette approche sectorisée nous fait penser à l’urbanisme de la charte d’Athènes, un urbanisme qui depuis longtemps fut abandonné en France. Par conséquent, en représentant la ville par un tel découpage, la gestion des espaces publics devient elle aussi sectorisée et doit suivre cette division. Or, l’espace public fonde la structure la ville. Il crée la continuité urbaine et articule les quartiers entre eux. Nous aurons du mal à transposer ce modèle sur nos villes françaises.
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100 m2 100 x 100 m
Analyse par échantillonnage des espaces publics. Chaque composante est évaluée distinctement. Le changement d’échelle de l’analyse passe par un calcul arithmétique et non pas par des logiques de territoire.
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Espaces publics décontextualisés : Décomposition / Recomposition Partant d’un référentiel cartographique des SIG, le GBI décontextualise chacune des composantes de l’espace pour se référer uniquement à sa position géographique que la cartographie numérique fournit. Le GBI définit non pas le lieu dans son contexte, mais plutôt les objets et les réseaux qui le contiennent. Cela veut dire qu’il n’évoque pas la rue, la place, ou le boulevard comme unité spatiale obéissant à des logiques de territoire mais il va chercher, dans les différentes zones fonctionnelles de la ville, la chaussée, le trottoir, les arbres, le mobilier, etc. Alors, évidemment, cette approche réduit l’espace public à un ensemble d’éléments disposés dans l’espace que le GBI va ensuite analyser et évaluer d’une façon dissociée selon les critères simplifiés du CROW. Ce qui compte pour le système, ce sont les métadonnées qui informent sur les composantes de l’espace. Le GBI les renseigne selon une syntaxe proche de la logique des métiers et croisée avec les catégories du CROW. Les objets sont rangés en cinq volets : la voirie, le végétal, l’eau, le mobilier et les ouvrages d’art. S’adressant aux services municipaux des villes, une telle classification semble être stratégique, elle est même adéquate avec l’organisation des services, une organisation répartie souvent par métier et par compétence, reflet de la division du travail institutionnel 1
L’ordre technique pour penser la qualité visuelle de l’espace La notion de qualité visuelle (de l’objet) exposée par le CROW et ancré dans le système du GBI suscite une mise au point. En effet, parler de qualité peut prêter à confusion surtout quand il s’agit d’espace public. Il n’y a aucune illusion, dans le processus du logiciel, l’évaluation de la qualité est au cœur de la méthode de gestion proposée. Il est donc nécessaire d’apporter quelques précisions sur la notion de qualité visuelle exposée par l’outil. Ici, ce n’est pas l’espace qui est évalué mais plutôt l’objet, rendu à une composante élémentaire. Deux thématiques figurent cette évaluation : l’état technique et l’état de propreté.
1 LANDAU Bernard, Espaces publics urbains: refonder une discipline, sous la direction de Cynthia GHORRA-GOBIN, Réinventer le sens de la ville : les espaces publics à l’heure globale, Editions de l’Harmattan, 2001.
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L’état technique d’un objet correspondrait parfois à l’intégrité de sa forme, à sa rectitude (pour le mobilier), à son homogénéité, sa planéité (pour le revêtement), etc. La végétation aussi est soumise à un certain nombre de critères informant sur l’état sanitaire, la forme du houppier pour les arbres, de l’élagage, de la tonte pour (la pelouse), etc. A travers une grille d’évaluation correspondant à cinq niveaux de qualité ( A+,A,B,C et D) exprimant respectivement le très haut niveau vers le très mauvais niveau passant par le niveau basique, le GBI se lance dans une rationalisation pure de ce qu’on pense de qualité ou pas dans l’espace public(fig. page 53). Des règles de mesure sont clairement énoncées par le CROW. (fig. page 53) Suivant ce processus, tout devient mesurable : hauteur de la pelouse, nombre de cabosses, pourcentage de surfaces sales, nombre de détritus par terre, etc. Comme si on appliquait une échelle d’évaluation scolaire à chacun des principes de la trilogie Vitruvienne pour apprécier une œuvre architecturale, en notant seulement ses détails constructifs et en omettant de parler de la Venustas et très peu de la Commoditas. Cela ne nous semble pas approprié, si l’on considère que l’espace public est intrinsèquement un espace architectural. A cette démarche d’ordre technique, s’oppose une autre manière, plus souple, que le GBI préconise dans son analyse de l’espace : l’impression générale. Avec un œil d’un simple usager, l’espace ou plutôt ses composantes, sont annotés selon qu’il soit en bon ou mauvais état toujours avec le même principe de grille. Pour évaluer un lieu ou un fragment de territoire, la méthode du GBI suit une logique arithmétique. Le bon ou mauvais état de l’entretien d’une place par exemple, donne ce que l’application identifie comme qualité visuelle du lieu. Il suffirait de faire la somme des états de chaque entité visible sur les lieux et d’en déduire une appréciation générale. Cette place est notée pour son état de propreté un « A », c’est un « bon état » !
Mesurer, évaluer pour rentabiliser ! Chaque note correspond à un coût annuel d’une action entreprise sur les composantes de l’espace public. La finalité est une maitrise de l’ensemble des coûts engagés dans les diverses actions d’intervention des services municipaux. Cela concerne tout autant l’entretien courant ou quotidien que les interventions occasionnelles suite à des cas de dégradations exceptionnelles. Les montants peuvent inclure les heures investis pour nettoyer
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les rues, réparer les sols, tailler les arbres, ramasser les feuilles mortes, etc. La gestion que le GBI prévoit n’est qu’une gestion financière élaborée. L’ultime spécificité de l’outil, est sa capacité à compiler les quantités et les coûts pour établir des rapports écrits et des diagrammes financiers sur des temps variables. Le plan pluriannuel est l’un des éléments analytiques qu’on peut simuler en quelques clics sur l’interface du GBI en jouant sur les variables. Malgré son extrême efficacité sur ce point-là, et même s’il s’agit d’une gestion comptable automatisée et mieux adaptée à des interventions de plus en plus complexe sur l’espace public, le GBI manque de pertinence sur certains sujets. Il est nécessaire de penser à adapter les critères du système aux critères évoluant avec le changement des pratiques. Le désherbage à ce titre, suscite aujourd’hui beaucoup d’interrogations. Doit-on systématiquement éliminer les herbes sauvages, pour ne pas dire les mauvaises herbes, de chaque mètre carré d’espace public ? C’est là que nous faisons face, par exemple, à la question du contexte et de la représentation qu’on veut faire de l’espace public.
Exemple de fiche de prescriptions du catalogue des standards d’entretien des espaces publics CROW, 2013.
La gestion, dans son sens large, implique bien d’autres critères ou paramètres que la rentabilité ne peut solutionner seule. Réduire les dépenses oui, mais il y a également une réflexion sur les ressources qui doit être engagée en parallèle. Les serres ou pépinières municipales définissent l’une des manières à penser la gestion du végétal en ville. Cette idée pourrait aussi s’élargir pour les matériaux et les objets. Intégrer les questions de disponibilité, de recyclage et de pérennité est souhaitable à une gestion soutenable des espaces publics.
Enfin, une stratégie de gestion de l’espace public beaucoup plus complète et transversale doit accompagner le GBI. Cette stratégie appelle à tenir compte du contexte local, des moyens disponibles de l’entretien. Fondée sur un esprit critique, elle pourrait étudier plus finement l’adéquation avec les pratiques et la conception même des objets dans leur milieu. Le propos que nous tenons à définir ici est d’inscrire la gestion dans une triade indissociable pour penser l’espace public : conception-usage-gestion.
A+
A
TrèsHigh, hautvery niveau. Very Clean.
Haut High,Niveau. Clean.
Perfect, intact, nothing Parfait,intact,propre broken, excellent. Rien d’endommagé Looks like new Quasiment neuf !
Nice and comfort. Good. Bon état, Little to criticize
Grade 10 - 9
Grade 9 - 7,5
Peu critiquable. Espace propre.
B
C
D
Niveau Basique, Basic, Moderate Clean.
Niveau Bas, Low, Dirty. Très sal
Niveau trèsDirty bas. Very Low, Very
Functional, light damage,
Quite a lot to criticize, Fonctionnel, dirty, disturbing
Loss of function Pas du tout pratique, Loss of investment. Investissement perdu. Not Espace safe, liable claims très sale !
Grade 5,5 - 3,5
Grade 3,5 - 1
moyen, propre
Fonctionnel, pratique some to criticize, Légères dégradations little bit dirty Espace légèrement sale.
Grade 7,5 - 5,5
Légères dégradations Espace sale.
Grille d’analyse par niveau de «qualité» visuelle des composantes de l’espace public Établie par le CROW et fondement de la méthode d’analyse du GBI.
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Le GBI: une solution intelligente ?
Les aspects « smart » de l’outil Pour revenir à la question de l’intelligence du système, il y a de nombreux indices montrant que le GBI s’apparente véritablement à une « solution intelligente » même s’il ne l’est pas tout à fait. Le GBI est avant tout un outil numérique qui se base fondamentalement sur des données numériques. Ces données sont géographiques, urbaines et économiques. Les systèmes d’informations géographiques occupent une place importante dans son fonctionnement. Son objectif, étant d’aider les services urbains de la ville à mieux gérer les espaces publics, reprend parfaitement le discours de la ville intelligente. Il met en avant le numérique dans la gestion de la maintenance et de l’entretien d’un bien commun. En outre, l’outil informatique repose sur les nouvelles technologies dans la dernière version adoptant une approche plus collaborative. La légèreté et l’optimisation du logiciel a permis récemment de proposer aux collectivités un service à distance. En utilisant simplement une connexion internet et en dépit de la masse importante des bases de données à traiter, n’importe quelle ville peut s’offrir cet outil de gestion «moderne» pour ses services.
Le décloisonnement des organisations en silos de la ville est plus qu’indispensable. Les projets de smart city accompagnent une réorganisation des services municipaux et impliquent une dynamique qui appelle à une coordination active. Le GBI invite de même à associer les compétences de la ville à travailler ensemble. Il adhère avec précaution à cette idée de transversalité tout en gardant une part d’interfaces ciblées à certains métiers.
Quand l’Open Data rend service au GBI Les enjeux des données libres sont aussi économiques. C’est ce que confirment les données géospatiales utilisées par le GBI. Effectivement, le logiciel se ressource essentiellement d’une seule et unique base de données géonumériques que l’état publie ouvertement via son portail web de l’Open Data, PDOK1 . Ceci assure une utilisation libre par tous sans aucune restriction, et ce, en conformité avec les lois nationales et les directives européennes pointues sur le principe de gratuité de la donnée publique2.
On constate également que le GBI reprend les mêmes slogans que la smart city. Ses développeurs promeuvent tout autant l’efficacité dans la gestion « qualitative » de l’espace urbain que la rentabilité dans la maitrise des coûts de cette gestion. On retrouve d’ailleurs, ces promesses d’efficacité et de rentabilité chez certains concurrents. Celles-ci proposent de plus en plus des produits « smart » dans leur catalogue. SWECO, par exemple, est l’une des entreprises concurrentes du GBI. C’est une société qu’on voit s’impliquer dans le business de la ville intelligente. Une telle ambition est partagée aussi par de nombreuses entreprises internationales d’ingénierie notamment Antea group.
L’intelligence d’un service numérique transversal Pour Cor Leenstra, chef de projet du GBI au sein d’Antea group Nederland, l’intelligence du logiciel est dans sa particularité à rassembler plusieurs thématiques de l’espace public sur une seule interface. Cette transversalité bouscule les façons de faire des municipalités et de leurs services urbains émiettés. Elle tend à effacer les frontières entre les disciplines. Le GBI est, dans ce sens, vecteur d’une nouvelle approche plus horizontale et plus permissive entre les directions techniques. Cela nous rappelle ce que Sarah Emmerich déduit, dans son livre sur la smart-city en 10 questions à propos de l’impact de la ville intelligente, sur l’organisation municipale.
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1 PDOK ou Publieke Dienstverlening Op de Kaart, est un portail web de l’état mettant en ligne les services publics de la cartographie numérique. En France, cela serait l’équivalent du service Géoportail de l’IGN. 2 Ici, nous faisons allusion à la loi néerlandaise de 1 janvier 2008 suivie de celle du 1 janvier 2016 portant sur l’obligation pour les collectivités territoriales de livrer et de mettre à jour leurs bases de données géographiques. La directive INSPIRE approuvée par le Conseil des ministres de l’Union européenne en 2007 est aussi une référence intangible dans mise en norme de l’infrastructure de l’information géographique entre les pays membres. Aux Pays-Bas, le développement de l’information géographique est très pris au sérieux.
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Cette base de données, connue sous le nom de BGT ou Basisregistratie Grootschalig Topografie désigne une carte numérique de référence déployée à une envergure nationale. Elle rassemble toute sorte de donnée géoreferencée sur l’ensemble du territoire. Contrairement au référentiel à grande échelle ou RGE en France1, elle intègre des couches spécifiques très renseignées sur l’espace public notamment sur la composition de la voirie, la végétation, le mobilier urbain, les cours d’eau, etc. Celles-ci sont remarquablement organisées dans une composante importante du BGT dite IMGeo2 . Ces référentiels cartographiques sont le moteur du GBI. C’est ainsi qu’Antea Nederland se sert de l’Open Data pour offrir un service de gestion de l’espace public aux collectivités et au citoyen. Cor Leenstra considère que le GBI part de données publiques complexes pour mieux les partager avec les citoyens. Le logiciel ne fait que transcrire ces données pour les rendre plus parlant à tous. Il pense également que l’enjeu derrière cela est d’axer plus sur la participation citoyenne voyant la croissance des données libres comme une véritable opportunité pour le développement futur d’un outil encore plus ouvert.
Le GBI et les standards de la ville intelligente La section « gestion et data » néerlandaise de l’entreprise a construit sa stratégie marketing sur la flexibilité de son produit informatique. Elle mise particulièrement sur toutes les applications développées à la marge et intégrées par les modules externes supplémentaires (les add-ons). Antea Nederland garde certes, un avis dubitatif vis-à-vis d’une quelconque association du GBI aux standards de la smart city. Dernièrement, son
1 Le RGE ou référentiel à grande échelle est une base de données géographique, élaborée par l’IGN sous commande du gouvernement français. Ce référentiel établi entre 2000 et 2008, forme la base de la cartographie numérique nationale. Elle se répartie en quatre composantes : une ortho photographique, une topographique, une du cadastre et une des adresses Ces composantes sont souvent connus sous les titres de BD ORTHO BD TOPO, BD PARCELLAIRE et BD ADRESSES. 2 IMGeo est une composante de données géographiques annexée au BGT. Elle renseigne d’une manière exhaustive tout le catalogue d’objets y compris celui de l’espace public selon une nomenclature spécifique. l’état par le biais du ministère de l’infrastructure et du milieu en est garant.
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partenariat avec IMAGEM 3 autour d’une application de management et de gestion de la voirie en temps réel dite « smart city wegen monitor » lui a valu le prix d’excellence en matière de développement innovant des SIG. Cela marque avancée technologique réelle du GBI et confirme nos propos sur les ambitions d’Antea concernant la smart city. Cependant, pour le GBI, la démarche est entièrement économique. Bien que les collectivités et le citoyen y soient conviés, que l’armature de la ville serve de support, que la manœuvre des TICs soit mise au premier plan, que la collecte des données soit la matière première et que l’Open Data soit un atout incontournable, nous ne pouvons pas qualifier le logiciel comme « smart ». Il subsiste néanmoins des aspects spécifiques à la smart city non adoptés par le GBI. Pour que l’on puisse considérer le logiciel parmi les « solutions » intelligentes, il semble qu’une interaction plus dynamique avec les objets et les réseaux physiques de la ville soit indispensable. Il s’agit aussi de la transmission et du partage plus instantané de l’information collectée sur l’espace public. L’immédiateté de l’information et de l’action est également une valeur louée par la ville intelligente. D’autres critères techniques pertinents de la gestion ne sont visiblement pas concernés par le GBI. La fréquentation en est un des plus importants. L’usure matérielle et physique peut être, en effet, provoquée par la fréquence de passage des véhicules ou autres. L’intensité des déplacements est une variable que Cisco, leader mondial en solutions intelligentes, a décidé d’étudier sérieusement. La société collecte actuellement des données à temps réel sur la place de la Nation à Paris pour anticiper sur la gestion de la voirie. Enfin, le GBI promet une gestion efficace, moins coûteuse certes, mais qui ne se prononce jamais sur la soutenabilité de l’entretien. il n’y a pas d’approche environnementale ! Ni la moindre remise en question des critères de maintenance semblant parfois obsolètes ! Tous les moyens sont bons pour s’aligner sur un niveau de qualité que les chiffres requièrent.
3 IMAGEM est une société de développement de solutions géospatiales tels que les SIG, se référer à www.imagem.nl, site consulté le 24 mai 2016.
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Interface de l’application APP-KIEZEN pour choisir et décider du niveau de qualité des secteurs de la ville et évaluer les incidences financières de ses choix
Schéma de principe du référentiel géographique néerlandais BGT, restituant une base de données très renseignée sur l’espace public, mis en ligne gratuitement sur le portail national PDOK
Dynamic monitor Riolering & smart city wegen deux modules du GBI pour les réseaux d’assainissement et la voirie Illustrations des applications dites «intelligentes» du GBI, affichant les résultats d’analyse à partir des coûts selon différents scénarii en temps réel.
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Leçons à retenir de l’expérience du GBI
La mission sur le GBI nous amène, au bout de quelques mois, à statuer sur le mécanisme de la gestion par le biais de ce logiciel. Nous tentons ici de le confronter à ce que nous pensons et ce que nous avons appris au sein du DSA. Voici donc ce que l’on retient de cette expérience sur la gestion des espaces publics résumé en six points :
Cette qualité est révélée par la perception, elle est, avant tout, perçue comme une image ( K.Lynch ). Elle définit l’espace public dans son contexte, disons, dans son épaisseur et dans sa profondeur. Tout espace public s’inscrit dans un cadre physique spécifique. Il porte l’empreinte de son territoire. Il révèle des paysages et met en scène l’architecture de la ville.
1. La gestion sur trois temps Ce qui ressort des échanges avec les services d’Orléans nous conduit à penser la gestion sur trois temps : une gestion fréquente avec un suivi constant, une gestion occasionnelle et une gestion à long terme. La première concerne les interventions courantes pour l’entretien de la propreté, la taille des haies, l’élagage des arbres, l’arrosage, la reprise de peinture, etc. La deuxième, moins courante, suscite une intervention urgente faisant suite à des dégradations critiques ou des incidents imprévus sur les sols les objets ou encore sur les réseaux. Elle dépend d’aléas tels que les accidents de route, les perturbations météorologiques ou autres. La troisième s’applique dans la durée, elle est pensée dans le long terme. Celle-ci examine le cycle de vie des divers objets matériels et les espèces végétales soumis dans un environnement physique particulier. La gestion dans le temps nous parait importante pour poser les bases d’une gestion pérenne. Parler de rentabilité et de maîtrise de coûts de gestion requiert aussi la mise en relation des moyens et des actions à engager sur ces trois temporalités. 2. Pour une approche de l’ensemble et des parties : Propos sur la notion de « qualité » Au lieu de partir de coûts et de qualité des composantes de l’espace, je pense qu’il est judicieux, de réinterroger initialement la qualité intrinsèque du lieu et de son aménagement. Une gestion efficace prend souvent racine dans la pérennité de l’aménagement originel. Cette question me parait fondamentale. Car effectivement, la qualité de l’espace public ne dépend pas seulement de la qualité de ses composantes, comme nous l’avons vu avec le GBI, mais plutôt l’impression vécue via la pratique des lieux produite par l’ensemble.
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Il convient dès lors, de dire que la gestion de la qualité ne peut pas être assujettie aux seuls critères attribués aux éléments de façon isolé; c’est le «tout» qu’on identifie pour l’évaluation. Autrement dit, c’est l’aménagement dans sa totalité qu’il faudrait analyser. La démarche serait à la fois sur l’ensemble et sur les entités. Le croisement de deux approches serait plus pertinent. La première approche est paysagère, la seconde technique. 3. La simplicité de l’aménagement induit à une gestion mesurée Un aménagement conçu d’une façon simple et sobre est un aménagement qui s’accommode aux divers usages et qui s’adapte aux nouvelles pratiques. Il est facile à lire et à identifier. Son sol ne pose pas de difficulté de mise en œuvre. Les matériaux utilisés sont durables. Les objets qu’il contiendrait sont peu nombreux mais pratiques. Ils peuvent conjuguer plusieurs fonctions à la fois. Les sujets qui peuplent l’espace public, mettent en symbiose l’homme dans son milieu naturel ou urbain. L’ensemble de ces éléments mis en relation harmonieusement apprivoisent de façon aisée certains aléas. Ils sont conçus et choisis pour s’accommoder à de nombreuses situations. La gestion d’un tel espace ne semble pas contraignante, elle suit les scénarii étudiés par les concepteurs des lieux. 4. La gestion, les usages et la conception : Trois axiomes indissociables pour penser l’espace public. Comme nous l’avons démontré précédemment, la conception mais aussi les usages peuvent influer sur la gestion des espaces publics. Avec la nature en ville de plus en plus présente, une tendance vers plus de déplacements doux et une multi-modalité omniprésente, une échelle plus humaine gagne nos villes. Nous ne pouvons désormais plus considérer les espaces publics comme des lieux statiques. Les usages changent. Les acteurs intervenant dans la gestion se multiplient également. Nous pensons alors qu’il est souhaitable d’articuler la gestion en rapport avec la conception et l’usage de l’espace.
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5. D’une gestion rentable à une gestion durable
6. Se réapproprier les outils numériques pour une meilleure gestion
Notre réflexion doit se construire autour d’une démarche combinant la gestion technico-économique _aussi efficace soit-elle_ avec un regard veillant sur d’autres aspects sociaux et environnementaux. Ceci nous invite à intégrer dans notre façon de penser des questions autres que celles des coûts. En étendant notre raisonnement au-delà de ces impératifs financiers, nous pouvons penser la gestion non pas pour qu’elle devienne économiquement rentable mais pour qu’elle veille à élever les espaces publics au rang d’écosystèmes. Pour cela, nous défendrons l’idée d’une gestion durable.
La réappropriation des espaces publics par le citoyen pourrait s’accompagner par une réappropriation des outils informatiques. Cela est possible si l’on évite de tomber dans le piège du « tout paramétrable », d’une gestion réduite aux données géographiques et urbaines sans l’implication du géographe, de l’urbaniste,du sociologue,etc.
Cette gestion se nourrit de la connaissance du territoire. Elle s’appuie aussi sur une approche critique des procédés et des méthodes usuelles de l’entretien et de la maintenance. Pour une gestion durable, et donc « rentable » pour l’homme dans son environnement, il nous semble nécessaire de fonder notre réflexion sur une série non limitive de questions concernant:
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t
Les ressources (naturelles, matérielles et humaines)
t
La pérennité des matériaux (sol, sous-sols, objets, ex : rappeler la mésaventure de l’amiante dans les canalisations enterrés)
t
L’adéquation entre les espèces végétales à entretenir et leurs milieux (nature des sols, etc.)
t
Les procédés d’entretien respectueux de l’environnement (ex : désherbage thermique vs chimique)
t
La commodité entre les usages et la forme des objets.
t
Les savoir-faires et des sciences à perpétuer ( jardinage, sylviculture, etc.)
t
Les techniques et des équipements d’entretien à inventer ou réinventer
t
L’ implication citoyenne à tous les niveaux ( dans la définition des usages, concertation sur les projets d’aménagement, participation volontaire et responsable à l’hygiène et l’embellissement de la ville,etc.)
L’explosion du nombre d’objets et de réseaux dans l’espace public rend les travaux d’entretien et de maintenance difficiles á gérer. La gestion durable des espaces publics préconise une prise en main mieux adaptée aux nouveaux outils numériques. de nouvelles formes organisationnelles entre public et privé, services municipaux et citoyens, gestionnaires, concessionnaires et concepteurs de l’espace. Pour faire face à cette complexité, il ne faut pas réfuter la modernité que le numérique offre comme opportunité, mais de soumettre la conception de ces outils numériques à un idéal différent de celui qu’on voit aujourd’hui. Cet idéal pourrait naître d’un projet commun valorisant le territoire et donnant de nouveaux statuts aussi bien aux citoyens qu’à la municipalité. L’Open data par exemple est, à mon avis, l’une des formes possibles qui pourrait consolider l’émergence d’un tel projet. L’exemple des outils numériques de gestion des arbres de la ville de Paris nous offre aussi un un autre dispositif intéressant.1 Dans ce sens, nous pouvons sans doute nous tourner vers les atouts de la ville numérisée et la ville connectée. En s’appuyant sur la cartographie moderne (ex: des SIG), l’internet des objets et les nouvelles technologies nous serons outillés pour comprendre, révéler et mieux gérer les richesses d’un territoire. Le défi face à une société d’individus connectés est de rendre plus accessible la connaissance gratuitement pour une implication réelle du citoyen. La gestion numérique de l’espace public doit passer par un véritable projet de territoire, un projet social, environnemental et économique. En soumettant l’outil cartographique à une véritable pensée de l’espace, et en étant plutôt le géographe que l’expert de la donnée géographique.
Le suivi et la communication sur la gestion du patrimoine arboré parisien, est passé au numérique. Les puces RFID installées sur les arbres renseignent sur la position géographique,l’état sanitaire et l’essence des arbres. Elles informent tout autant les techniciens que le citoyen. Voir site consulté : www.paris.fr/arbres.
1
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Conclusion
L’heure est à l’auto-évaluation.
Loin de tout jugement sur l’efficacité du GBI dans la gestion technico-économique, l’épreuve d’une mise en place d’un logiciel consacré à la gestion des espaces publics nous a posé certaines difficultés. Elle nous a permis également d’explorer d’autres champs de pensées et d’autres approches que nous avons essayé de transcrire tout au long de ce travail. Ce témoignage nous a permis d’aborder de nombreuses interrogations sur les enjeux du numérique et les nouvelles technologies appliquées à la gestion de la ville et des territoires et plus particulièrement celle des espaces publics. Bien évidemment, un tel sujet nous concerne particulièrement, nous architecte-urbanistes, voyant à la fois une flambée sans précédent de l’usage de ces outils informatiques spécialisés dans la gestion de données (tels que les BIM en architecture) ou encore l’instrumentalisation inquiétante des données urbaines et géographiques que les multinationales tentent de vendre sous le voile d’une ville « intelligente ». Alors, Il me semble important de conclure ce travail par un appel alarmant à ces dérives qui placent l’outil avant le savoir et qui favorisent la technique à la pensée. Cet appel est un appel à la résistance. Une résistance non pas à la technologie du numérique, bien au contraire, c’est plutôt une résistance à la cette sphère des nouveaux marchands d’un urbanisme paramétrique. C’est par ces mots que je lance donc une invitation pour que l’architecte-urbaniste ne soit pas dépossédé de ses compétences intellectuelles pour se soumettre au dictat de l’Outil. C’est pour cela qu’il doit renforcer ses capacités techniques de représentation, trouver de nouvelles possibilités de réflexion et sortir du cloisonnement académique dominant qui sectorise les disciplines. Le DSA d’architecte-urbaniste m’a ouvert ce chemin de la transdisciplinarité, pour nourrir une vocation aussi passionnante, celle de l’architecture de la ville. J’espère trouver aussi mon chemin pour poursuivre ce que j’ai entrepris à « Marne ».
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Dessin d’une rue «imaginée», Orléans La gestion de l’espace public doit tenir compte de l’espace tel qu’il est perçu, traversé pratiqué et défini par ses usagers. Elle doit être la résultante d’une approche plus contextualisée, en harmonie avec la forme de l’aménagement ou de l’espace et non pas l’état des éléments qui le contienne. Les outils technologiques doivent être au service d’une vision territorialisée de l’espace public.Cette vision émane d’une ambition partagée entre tous les acteurs. Le numérique en sera un catalyseur de communication sociale. Cela doit unanimement naître d’un projet local commun. Une nouvelle administration municipale cogérera avec le citoyen données numériques et espaces physiques.
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Glossaire
BGT Basisregistratie Grootschalige Topografie Référentiel cartographique déployé sur l’ensemble du territoire des Pays-bas renseignant les bâtiments, les routes, l’hydrographie,etc. Les ressources numériques sont livrées par les collectivités, les institutions publiques, le ferroviaire. Elles sont rassemblées sur une seule base de données normalisée vérifié et mise à jour régulièrement.
DT-DICT Déclaration de projet de travaux par le maître d’ouvrage, et déclaration d’intention de commencement de travaux par l’exécutant des travaux. C’est une procédure demandée suite à la réforme anti-endommagement des réseaux.
BRGM Bureau de Recherches Géologiques et Minières. C’est le service géologique public français de référence, spécialisé dans les sciences de la Terre afin de gérer les ressources et les risques du sol et du sous-sol.
FRENCH TECH Label français crée en 2013 suite à une initiative de l’état pour faire croître la compétitivité autour de l’innovation dans le numérique des startups françaises. Il ambitionne de rendre ce secteur plus visible sur la scène économique internationale. Le label est attribué à toute ville présentant une dynamique dans l’entreprenariat de ses startups.
BPI Banque publique d’investissement CNIG Centre national de l’information géographique CROW Organisme d’expertise sans but lucratif (OBNL) dans les domaines de l’infrastructure, du trafic routier, du transport, des espaces publics et des passations de marché. Il fonctionne comme un centre de ressources techniques et scientifiques appuyant l’état et les collectivités dans l’aménagement du territoire. CYCLOMEDIA Société d’ingénierie hollandaise et leader mondial dans les vues immersives 3D de haute précision.
FEDER Fonds européen de développement économique régional
GBI Geïntegreerd Beheer Informatie, définissant un outil informatique (Logiciel) de gestion des espaces publics développé par Antea group aux Pays-bas. IMGEO Composante de données géographiques annexée au BGT, renseigne le catalogue d’objets de l’espace public selon un standard graphique très stricte. INTERREG Interreg Europe,est un programme financé par la FEDER ayant pour but de promouvoir la coopération entre les régions européennes au service d’une politique de mutualisation des connaissances et de développement des solutions dans divers domaines y compris la planification urbaine et territoriale.
DSA Diplôme de spécialisation et d’approfondissement d’architecte-urbaniste.
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PDOK Publieke Dienstverlening Op de Kaart, est le service public en ligne de la cartographie numérique de réference des Pays-bas. Il équivaut à géoportail.gouv en France. PCRS Plan corps de rue simplifié, est un référentiel cartographique à grande échelle servant de socle topographique commun en cours de production par le CNIG à la demande de l’état. Ce plan numérique de base servira à géoréferencer les réseaux et leur environnement selon les mêmes standards de représentation.
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SIG Système d’information géographique, système composé de matériel, de logiciels, de procédures, qui permet d’acquérir, de gérer, de manipuler, de présenter et d’afficher les données géoréférencées, pour résoudre des problèmes complexes d’aménagement et de gestion.
Annexes
OPEN DATA Ensemble de données numériques à caractère public ou privé sous une licence ouverte mis à disposition de tous pour une réutilisation libre. Ces données sont collectées des services publics, des collectivités et des entreprises.
TICs Les technologies de l’information et de la communication WEB 2.0 Système d’application de l’internet plus évolué du web. Il designe une série de techniques pour offrir aux utilisateurs plus de fonctionnalités et plus d’interactivité entre eux. Il favorise l’émergence d’activités vistuelles collaboratives.
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Annexes Entretien avec Cor Leenstra, Project manager du GBI Antea group Nederland.
le 26 avril 2016.
C.L. I’ve worked for 25 years in Antea group so I have seen the beginning of GBI. Its about 1990 we started, first invested in DOS….it’s very old! Because we integrate all separate packages for green, Roads , sewage systems, lightening...and then we go to mainframes and now we are client server and web based so the technology is increasing… …and also the question of what we want to know of public space, we started of what it is, only presence of the objects, describing the input and now we are talking about describing the outcome…then we grow to management assets and now we want happy civilians. Laugh. D.L.
How about your competitors?
C.L. we are the market leader in those systems. We have few competitors: SWECO, GVA, ARCADIS…that’s about four competitors in the market and we have fifty (percent) of who’s using GBI. Not only in the Netherlands, SWECO for example is also in leading in Belgium. The market is a little bit rising. I don’t know if there are some active in Germany, France… N.B.
Do you consider GBI as a smart solution?
C.L. It could be smarter. I think it’s integral but it’s really simple. We have one database with all the objects to public space in it that’s much better than the first steps…so that’s smarts cause It’s integral…We also smart because we connect with “one map”: Every community is obliged by law to register the (data) objects from public space and they have deliver in a central point in the Netherlands, so we have the whole hold in a map with objects even the government as who controls the water …everybody who has or owns (data) objects is obliged to make such a map and it’s all coming together in one point…So we reuse those data resources from BGT-IMGEO and it’s getting smarter cause we use public data with GBI in maintenance and give information to civilians, to people. It’s Open Data. There’s a lot of more information in public space and by combining all the data sources we’re getting smarter.
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74 75
Annexes
Lieu de vie
-
-
Dimensions/
Autres Informations/
45000,Orléans
III.
nizar.bouaynaya@anteagroup.com
Reportage Photographique
Partenariat/
Contact/
Secteur /
Spot N° 083
Place de la Croix Morin
Classe Espaces Publics/
Adresse/
76 77
Légende
Plan
II.
Voirie
Situation du spot
I.
Végétal
84
Annexes
Mobilier
Vue aérienne
Repérage
Peu critiquable. Espace propre.
Grade 9 - 7,5
Grade 10 - 9
VĂŠgĂŠtal
Arbustes /Plantes
7.3
VĂŠgĂŠtal
A
VĂŠgĂŠtal
10.1
VĂŠgĂŠtal
Aspect de la tonte ?
Pelouses / Gazons
9.1
IrrĂŠgularitĂŠs du sol , bosses, etc. ?
Pelouses / Gazons
A+
Haies
8.1
'pJUDGDWLRQV DSSDUHQWHV SDU P "
Haies
A
B
B
YROXPHV GpSRXLOOpV YLGHV DSSDUHQWV SDU P "
Arbustes /Plantes
A+
PropretĂŠ
Mobilier
VĂŠgĂŠtal
Voirie
Grade 7,5 - 5,5
A
A
B
B
Grade 3,5 - 1
C
C
D
Evaluation globale
!
$XFXQH
D
beaucoup
quelques irrĂŠgularitĂŠs
raisonnable
peu d’irrÊgularitÊ
Aucune
?
!
courte
très courte
QualitĂŠ de la tonte
?
QualitÊ de l’homogeneitÊ et de planeitÊ
?
D
D
Evaluation globale
ĂŠtat critique
mauvais ĂŠtat
ĂŠtat satisfaisant
ĂŠtat normal
bon ĂŠtat
QualitÊ de l’integritÊ
?
C
C
Loss of function Pas du tout pratique, Loss of investment. investissement perdu. Not Espace safe, liable claims très sale !
D
Niveau trèsDirty bas. Very Low, Very
QualitĂŠ de densitĂŠ
A+
A+
Grade 5,5 - 3,5
LÊgères dÊgradations Espace sale.
C
Niveau Bas, Low, Dirty. très sal
Quite a lot to criticize, Fonctionnel, dirty, disturbing
Formulaire d’Êvaluation: VÊgÊtal
Domaine de gestion transversal:
3.Evaluation de l’Êtat de propretÊ
Niveau Basique, Basic, Moderate Clean. moyen, propre
B
IV.
Niveaux de qualitĂŠ GĂŠnĂŠrale
Functional, light damage, Fonctionnel, pratique some to criticize, LÊgères dÊgradations little bit dirty Espace lÊgèrement sale.
Domaines de gestion selon spĂŠcialitĂŠ:
2.Evaluation de l’Êtat technique
Nice and comfort. Good. Bon ĂŠtat, Little to criticize
Perfect, intact, nothing Parfait,intact,propre broken, excellent. Rien d’endommagÊ Looks like new Quasiment neuf !
A
Haut High,Niveau. Clean.
TrèsHigh, hautvery niveau. Very Clean.
A+
1.La Grille d’Êvaluation
78 79
Voirie
Voirie
Voirie
A
Voirie
A
B
Mobilier
Mobilier
Mobilier
A+
A
Mobilier urbain routier
12.4
SaletĂŠs visibles ?
Mobilier urbain routier
12.3
*UDIÂżWL HW DIÂżFKHV "
Mobilier urbain routier
12.2
7RUVLRQV GpIRUPDWLRQV DSSDUHQWHV SDU REMHW "
Mobilier urbain routier
Mobilier
B
'pJUDGDWLRQV DSSDUHQWHV FDERVVHV HWF SDU REMHW "
12.1
?
C
?
> 2 pieces
< 2 pieces
< 2 pieces
SLHFHV
SLHFHV
D
C
!
dĂŠformation critique
forte dĂŠformation
dĂŠformation notable
legère dÊformation
GURLW
!
aucun
?
C
Annexes
D
Evaluation globale
!
aucune
QualitĂŠ de propretĂŠ-saletĂŠs
?
4XDOLWp GH SURSUHWp JUDIÂżWL DIÂżFKHV
?
4XDOLWp GH OD Âż[DWLRQ OD UHFWLWXGH
?
D
Evaluation globale
! SODWH SHU PĂŻ
SODWHV SHU PĂŻ
SODWHV SHU PĂŻ
SODWHV SHU PĂŻ
SODWHV SHU PĂŻ
QualitĂŠ liĂŠ Ă lâ&#x20AC;&#x2122;integritĂŠ
?
planeitĂŠ
Evaluation globale
Nombreuses et critiques
FrĂŠquentes
Quelques-unes
Rares ou très peu
Aucune
QualitĂŠ dâ&#x20AC;&#x2122;intĂŠgritĂŠ-Fissurations
Formulaire dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠvaluation: Mobilier
Voirie
Mobilier urbain routier
A+
Les bĂŠtons
2.2
Nombreuses et critiques
FrĂŠquentes
Quelques-unes
Rares ou très peu
Aucune
QualitĂŠ de lâ&#x20AC;&#x2122;homogeneitĂŠ des sols & de la
B
?
QualitĂŠ des bandes pĂŠriphĂŠriques
)LVVXUDWLRQV FULWLTXHV SURIRQGHXU ! PP GLIIHUHQFH QLYHDX[ ! PP "
Les bĂŠtons
2.1
,UUpJXODULWpV LPSRUWDQWHV ! PP
Les bĂŠtons
A+
Les EnrobĂŠs
1.3
'pJUDGDWLRQV GHV DERUGV SDU P
Les EnrobĂŠs
1.2
Nombreuses et critiques
FrĂŠquentes
Quelques-unes
Rares ou très peu
planeitĂŠ
QualitĂŠ dâ&#x20AC;&#x2122;intĂŠgritĂŠ-Fissurations
?
Aucune
QualitĂŠ de lâ&#x20AC;&#x2122;homogeneitĂŠ des sols & la apparentes ( nids de poule,
)LVVXUDWLRQV pÂżORFKDJH GpJUDGDWLRQV FULWLTXHV SDU P/ "
Les EnrobĂŠs
1.1
IrrĂŠgularitĂŠs et dĂŠformations HÂżODXFKDJHÂŤ SDU P "
Les EnrobĂŠs
Formulaire dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠvaluation: Voirie
6
4
Square Charles Péguy
Place Charles De Gaule
Place Albert 1er
Giratoire D20 ou RN20
Rue des Tanneurs - Rue de la Folie
Place de la République
Exemples
V.
Plan Situation
Repérage
III.
80
81 8
Rue du Poirier Rue de l’empereur
ID.038 Place Albert 1er
ID.056 Place Dunois
Giratoire D20 ou RN20
ID.036 Place de la République
ID.053 Place Gambetta
40-64 rue charpenterie
ID.085
Square Charles Péguy
ID.039
Rue des Tanneurs Rue de la Folie
ID.031
0%
20%
40%
60%
80%
100%
3.Etat du mobilier / famille
0%
20%
40%
60%
80%
100%
2.Etat de la Végétal / famille
0%
20%
40%
60%
80%
100%
1.Etat de la Voirie / famille
-
+
Mobilier urbain routier
Arbres
+
Mobilier parcs & jardins
-
+
Arbustes / Plantes
-
+
Les Bétons
-
+
Les Enrobés
+
-
-
+
Eclairage public
Haies
+
Les Modulaires
-
+
Aire de jeux
-
+
Pelouses/Gazons
-
+
Les Stabilisés
-
+
5
Annexes
Prairies
-
+
Place Charles De Gaule
ID.095
Place Sainte croix
ID.051
Rue Etienne Dolet
ID.034
Ratios des niveaux de qualités par catégorie et familles d’éléments présents:
Rapport II/ Lieux Emblématiques
ID.030
ID.029
IV.
Lieux
Bibligraphie
Ouvrages LUSSAULT Michel sous la direction de Jacques LEVY, Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Editions Belin, 2013. PELLETIER Monique, La carte de Cassini : L’extraordinaire aventure de la carte de France, Editions Presses De L’Ecole Nationale Des Ponts Et Chaussées ,1990. PICON Antoine, Smart cities : Théorie et critique d’un idéal auto-réalisateur, Editions B2, 2013. GIRARD Michel-Claude et GIRARD Collete-marie, Traitement des données de télédétection Environnement et ressources naturelles, Editions DUNOD, 2010. RATTI Carlo et OFFENHUBER Dietmar, Decoding the City: Urbanism in the Age of Big Data, Basel,Birkhäuser,2014. ALPHAND Jean Charles, Les promenades de Paris, Editions Rotshild, 1867. LANDAU Bernard, Espaces publics urbains: refonder une discipline, sous la direction de Cynthia GHORRA-GOBIN, Réinventer le sens de la ville : les espaces publics à l’heure globale, Editions de l’Harmattan, 2001. APUR, Espace public parisien au XXIe siècle. Etude des évolutions au travers des nouvelles pratiques, APUR, 2011. FNAU, Pour des espaces publics ordinaires de qualité, Paris, Gallimard, 2014. LE MONITEUR, Les espaces urbains: concevoir, réaliser,gérer,Editions du Moniteur, 1987. MIQCQ, Mission interministerielle pour la qualité des constructions publiques, Les espaces publics urbains, Editions Arche Sud, 2001. CNIG, Protocole national d’accord de déploiement de plan corps rue simplifié, signé 24 juin 2015. CROW, Kwaliteitscatalogus:Openbareruimte,Standarrdkwaliteitsniveausvoor onderhoud Editions Crow,2013.
82
83
Remerciements
Articles « La crise économique mondiale n’est pas pour demain mais pour après demain », www.nouvelobs.com, 15 février 2016. « La ville numérique : quels enjeux pour demain ? », www.metropolitiques.com, 28 novembre 2011. « The Rise and Fall and Eventual Rise Again of the Smart City », www.citylab.com, 13 janvier 2014. « DansMaRue, l’app pour signaler une anomalie à la Mairie de Paris » , www.frenchweb.fr, 21 juillet 2014. « Songdo, la ville 100% connectée de la Corée du Sud », www.lefigaro.fr, 21 avril 2014.
Je tiens à exprimer toute ma gratitude envers le corps enseignant, l’équipe administrative de l’EAVT et tous ceux qui m’ont supporté et apporter de l’aide dans l’élaboration de ce travail. Je remercie aussi tout ceux qui m’ont permis à Antea de vivre cette expérience et de développer mes idées.
http://www.lemonde.fr/les-villes-d-un-monde-qui-change/article/2015/11/18/la-smart-cityen-question-s_4812715_4810823.html http://www.ladepeche.fr/article/2014/07/07/1914314-sigfox-connecte-les-objets-de-la-planete.html Internet http://www.gbibeheersysteem.nl
http://senseable.mit.edu
http://www.urbanisme-puca.gouv.fr
http://wearedata.watchdogs.com
http://www.ign.fr/institut/dossiers/lhistoirede-lign
http://www.crow.nl
Je tiens surtout à remercier, mes enseignants de DSA d’architecteurbaniste pour leur générosité et leur engagement dans un enseignement valeureux. Je remercie aussi mes collègues pour tous les échanges riches que nous avons partagés durant ces années. Cette rencontre est un vrai tournant dans ma vie professionnelle.
A tous mes amis, ma famille et tous ceux qui partagent ma passion, merci.
https://www.fixmystreet.com http://www.usine-digitale.fr https://bgtweb.pleio.nl/ http://francispisani.net http://imgeo.geostandaarden.nl/ http://www.citylab.com
Videos conférence-débat. 5à7 du Club Ville Aménagement : Le numérique changera-t-il la ville??, Programme conçu et animé par Ariella Masboungi.
Autres BONNET Frédéric,cours milieux habités : chemins, rues,routes, avenues, 2013. COLLECTIF: BOUSCASSE Charles, BROSSARD Emeline, GIBAULT Charles, MAHIOU Sophie, Qualités des espaces publics Lille: vers une identité métropolitaine, Cahiers du DSA 2013-2014.
84
85
Juillet 2016
86
87
La gestion des espaces publics par le numérique: La démonstration du GBI pour la ville d’Orléans
Comment peut-on faire mieux avec moins ? Dans un contexte économique très tendu, telle est la question qui se pose dans la gestion de la ville et des territoires. Sous l’enseigne d’une ville intelligente, des outils numériques évolués voient le jour. Souvent développés à la marge du champ de compétences de l’architecte-urbaniste, ils nous interrogent sur le véritable rôle de l’outil informatique dans la manière de penser le territoire. Le GBI, un logiciel de gestion des espaces publics, est developpé aux Pays-Bas par Antea Group dans l’optique d’aider les collectivités à communiquer à différentes échelles, sur l’économie d’entretien des composantes de l’espace public. La société d’ingénierie environnementale, tente d’importer son outil informatique en France. Elle propose de mettre en place une phase pilote sur le territoire d’Orléans. Ce travail fait l’objet de cette mission. A travers une lecture historique de l’évolution de la cartographie, ce mémoire s’attache à comprendre dans un premier temps, comment un outil de représentation et d’analyse des données géographiques et urbaines transcende à un instrument de contrôle et de gestion de la ville. Ensuite, en s’appuyant sur cette hypothèse et à travers l’étude de cas du GBI, nous tentons de décoder les différents aspects du logiciel, ses méthodes et ses limites pour en tirer des leçons sur la gestion des espaces publics ainsi que la position que l’architecte-urbaniste doit prendre face aux nouveaux défis du numérique.
Managing the public space with digital technology: setting up a pilot phase of the GBI for the city of Orléans
How can we do more with less? At a time of serious economic crisis, that would be the main issue in urban and territorial management. Meanwhile loads of digital tools are rising branded by the smart city fever. Those digital tools are often developed with less consideration towards architects and urban designers. That comes into question about the real performance of IT tools in thinking of the territory. GBI is a software tool to manage public space assets. It has been developed in the Netherlands to help municipalities to communicate in different levels about maintaining all public assets. The international engineering and environmental consulting firm Antea Group, is willing to import the software in France. The firm is setting up a pilote phase for Orleans. The following work is focusing on this task. Staring over from a brief historical evolution of cartography, this thesis explores how a tool of representation and data analysis is turning into a powerful device to controlling and managing the city. Then, based on this hypothesis and the study case of the GBI our investigation tries to reveal some of the software features, its methods and its limits. And that brings us to an end to learn from this experience and come down with some “rules” on the management public space and about how an architect and urban designer can deal with the rising challenge of digital technology.
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___ École d’Architecture de la ville et des territoires, Marne-la-vallée Mémoire DSA d’architecte-urbaniste