LIBRAIRIE
ORIENTALISTE
PAUL GEUTHNER
DU
GUIMET
ANNALES
MUSÉE
D'ETUDES BIBLIOTHEQUE TOMES du XXVI, XXVII. G.—JOUYEAU-DUBREUIL. Archéologie Sud do l'Inde. I. Architecture. — II. Iconographie 100 fr. (108 pi., 111 fïg., 190et 152 pp.), 1914 Le texte arménien de l'Evangile XXVIII. Fr. MACLER. d'après Mathieu et Marc, txxn et 645 p., 1919. Epuisé XXIX. J.-G. FRAZER.Adonis, étude des religions orientales comparées, traduit par Lady Frazer, vu et 312 pp.; 1921. 30 fr. XXX. J.-G. FRAZER.Les Origines de la Famille et du Clan, traduit par la comtesse DE PANGE,187 pp., 1922. 20 fr, XXXI. P. OLTRAMABE. Histoire des Idées théosophiques dans l'Inde : La Théosophie bouddhique, xv et 542 pp., 1923 60 ïr. .La Légende de l'Empereur Açoka XXXII. J. PRZYLUSKI (Açoka-Avadâna) dans les textes indiens et chinois, xvi et 460 pp., 1923 60 fr. XXXIII. M. GAUDEFROY-DEMOMBINES. Le Pèlerinage à la Mekke, étude d'histoire religieuse, 1 pi., vin et 332 p., 1923 60 fr. XXXIV. G. DuMÉzn. Le Festin d'Immortalité, étude de mythologie comparée indo-européenne, xix et 322 pp., 1924 50 fr. XXXV. J.-G. FRAZER.Atys et Osiris, étude de religions orientales comparées, traduction française par HENRI 50 fr. PEYRE,296 pp., 1926 Théorie de la connaissance XXXVI. TH. STCHERBATSKY. et de la logique chez les Bouddhistes tardifs, xvi et 247 pp., 1926 50 fr. XXXVII. J. BACOT.Une grammaire tibétaine du tibétain classique : Les Slokas grammaticaux de Thonmi Sambhota avec leurs commentaires, traduils du tibétain et annotés, 14 planches, 231 pp., gr. in-8°, 1928. . .200 fr. XXXVIII. L. RENOB.Les Maîtres de la Philologie védi25 fr. que, 74 pp., gr. in-8°, 1928 Histoire de l'Extrême-Orient, XXXIX. XL. P..GROUSSET. 2 vol. in-8° raisin, 1 frontispice en couleurs, 32 pi. en noir, 7 cartes à dépliants, xvni et 770 pp., gr. in-8°. Prix des 2 volumes 250 fr. XLI. G. DUMÉZIL.Le Problème des Centaures, élude de mythologie comparée indo-européenne, 3 planches, vin et 278 pp., gr. in-8°, 1929 75 fr.
ANNALES
DU
MUSÉE
GUIMET
BIBLIOTHÈQUE DE VULGARISATION, TOME 49
TROIS
CONFÉRENCES
SUR
L'ARMÉNIE
TROISCONFÉRENCE» sim L'ARMÉNIE
saiMtieany: ,
le A MONSIEUR ARCHAG
KARAGHEUSIAN F. M.
AVANT-PROPOS
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II convient, dès le début de ces modestes causeries que je vais avoir l'honneur de faire devant un public d'élite, de dissiper un malentendu qui pourrait aisément naître dans vos esprits. Je viens à vous, non pas en savant prétentieux, désireux de faire montre d'érudition. Je viens à de mon ignorance, vous, conscient soucieux de m'instruire davantage, et préoccupé avant tout, en prenant contact avec vous, de recueillir des documents et des renseignements nouveaux, destinés à faciliter l'érection de l'édifice historique auquel je travaille depuis de nombreuses années. C'est ce qu'a très bien compris M. le professeur Nicolas Iorga, l'animateur de la science francoroumaine, lorsqu'il me proposa, l'hiver dernier, de venir visiter votre beau pays et de vous donner une série de conférences. 1. Les trois conférences, dont le texte suit, ont été faites à la Fondation Carol I, Bucarest, sous les auspices de 1' « Institutul de studii Sud-Esi European », les 26, 30 ^uin et 3 juillet 1927.
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AVANT-PROPOS
JTZs'agissait moins, dans l'esprit de ce savant un confrère français, éminenl, de vous présenter susceptible de vous enseigner des choses que vous auriez pu ignorer, que de vous faire connaître un savant de Paris, désireux avant tout de s'initier à intellectuel et scientifique votre rayonnement et d'en tirer profit pour des travaux ultérieurs. Que M. Iorga veuille donc trouver ici l'expreset l'assurance sion de ma vive reconnaissance que rien ne sera négligé, de ma part, pour répondre dignement à la confiance qu'il a bien voulu placer en moi. vous Et, à votre tour, Messieurs les Arméniens, voudrez bien me laisser espérer que votre indulgence n'ira pas jusqu'à omettre de me signaler les erreurs et les imperfections sans aucun que renfermeront doute les paroles que je vais avoir l'insigne faveur de formuler devant vous.
TROIS
SUR
CONFERENCES
L'ARMÉNIE
i L'ÉPOPÉE
ARMÉNIENNE
Si, par épopée, on doit entendre au sens propre un poème de longue haleine destiné à traiter un ce on est en droit d'employer sujet héroïque, même vocable dans un sens figuré et de voir dans une épopée une suite d'actions conshéroïques tituant à sa manière la trame du processus historique d'un peuple ou d'une nation. N'a-t-on pas et le parlé, chez nous, de l'épopée napoléonienne? en France n'a-t-il pas père des études byzantines intitulé trois de ses principaux ouvrages l'Epopée byzantine? C'est dire que nous nous croyons autorisé à traiter devant de l'épopée vous, aujourd'hui, car on imaginerait arménienne, malaisément, dans le développement de l'humanité, historique un peuple qui ait produit plus d'actes héroïques 1* TROISCONFÉRENCES SURL'ARMÉNIE
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TKOIS CONFÉRENCES SUR L,'ARMÉNIE
et dont l'existence, continuelleque l'arménien, ment menacée par des voisins cruels, oppresseurs et tyranniques, ait fait preuve de plus de vitalité, à l'épreuve et de volonté de vivre de résistance dont les Annales Arménie, que cette lointaine remontent au temps fabuleux de Bel et du Drasi rapprogon, et dont les fils sont actuellement chés de nous. Il n'est guère, à l'heure présente, que les descendants d'Israël qui puissent se vanter d'une eux qui étaient origine si lointaine, peut-être de l'antique et Hammourabi contemporains dont les fils essaient de reconstituer ce qui fut en Egypte, le patrimoine jadis, après l'esclavage ancestral des héritiers directs d'Aaron, de Moïse et de Josué. Tenter une esquisse du développement du peuple arménien dans le temps et dans l'espace c'est, en d'autres termes, essayer de tracer à d'un des grands traits la vie si mouvementée d'un peuple plus vieux peuples de l'humanité, vieux d'au moins trois mille ans, d'un peuple qui ne trahit aucune trace de vétusté, et dont les se enfants, pour peu que les circonstances montrent ne demandent favorables, qu'à reprendre contact avec une vie normale, exempte
L'ÉPOPÉE ARMÉNIENNE
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des vols, des massacres et des spoliations de tout c'est peutgenre. Tenter une pareille entreprise, être faire preuve de beaucoup d'audace. Mais à coup sûr, rendre un hommage bien c'est, mérité à l'une des branches les plus intéressantes de la grande famille humaine, c'est, en un mot, dresser le bilan d'une des formes les plus captic'est écrire une vérivantes de notre civilisation; En comptant table page d'épopée. sur votre indulgence, j'aurai cette audace. Les origines du peuple arménien sont envelopqu'il n'est pas opporpées de tant d'obscurité de tun, dans l'état actuel de nos connaissances, chercher à en pénétrer le mystère. Le nom même de ce peuple demeure une énigme. Seuls les lui ont donné le vocable sous lequel il étrangers est connu depuis des siècles. La forme Arminiya de Béhisdéjà dans les inscriptions apparaît au cours des toun, alors que ce même peuple, âges et dans ses propres annales, se nomme haï, ou « descendant de Haïk », ou encore « fils de montrent à Thorgom ». Ces diverses appellations l'envi le vague et l'incertitude des origines arméniennes. N'a-t-on pas écrit, en se basant sur l'autorité
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
très de Moïse de historique problématique Khorên, que Haïk, le héros éponyme des Arméau sud-est, pour niens, était parti de Babylone, et faire la conquête se diriger vers le nord-ouest de l'Ourartou, qui serait devenu, par la suite, le et l'habitat des Arméniens? territoire Pour Hérodote, les Arméniens une étaient colonie de Phrygiens, tandis que, d'après Straseraient venus de Thessalie bon, les Arméniens en Arménie. Il est tout à fait oiseux d'exposer aux par le menu les diverses opinions relatives On mentionnera origines arméniennes. simplement que plusieurs savants tablant modernes, sur les données de la Bible, voient dans Haïk un fils de Thogarma, fils de Gomer, fils de Japhet. C'est véritablement remonter au déluge et l'on risque fort de se noyer encore. Une origine, d'apparence plus scientifique, voit dans le mot arménien haï un dérivé du sanscrit hati, qui signifie seigneur, maître, et qui désignerait une population ou indo-euroaryenne et qui aurait fait, à péenne, et non sémitique, une époque indéterminée, la conquête du pays des Arméniens. qui devint plus tard l'habitat On retiendra seulement cette donnée histofigure sur les rique, c'est que le nom d'Arminiya
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ARMÉNIENNE
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de Béhistoun, gravées au temps de inscriptions Darius, vie siècle avant notre ère, et qu'à cette du une des satrapies formait date, l'Arménie vaste empire perse. l'Arménie sa situation Par géographique, tant de devait subir toutes sortes d'influences, l'est que de l'ouest, du nord que du midi : Déjà, l'histoire mentionne au vne siècle avant J.-C, de Scythes qui, à travers la Transune invasion en Arménie. caucasie, auraient pénétré Sous les Achéménides, l'Arménie jouit d'une liberté relative, tandis que, à la mort d'Antiochus le Grand, elle passe sous la domination séleucide. Puis ce fut, pendant un temps, des alternatives de paix et d'asservissement, qui furent l'apanage du peuple arménien. Les monnaies de cette époque, avec inscriptions grecques, dénotent l'influence Avec Tigrane hellénistique. le Grand, la culture grecque envahit l'Arménie. Des acteurs grecs jouent au théâtre de Tigranoornent la ville, la kert, des sculptures grecques langue grecque est la langue de la Cour. L'influence romaine succède à la grecque, et devient l'Arménie la victime des rivalités roet parthe. maine L'influence finit par parthe et, vers le milieu du Ier siècle de prédominer
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
établissent notre ère, les Parthes une dynastie arsacide sur l'Arménie. Le premier de ces rois est de la même Tiridate Ier, frère du roi parthe famille. Ce nouveau roi, pour ne pas mécontenter Rome, se rend dans cette ville, et reçoit l'investiture de l'empereur Néron. Les siècles passent, et les Sassanides, vers l'an fin à la puissance arsacide des 226-228, mettent Parthes et des Arméniens, ainsi qu'à la culture grecque de la Cour arsacide. Durant ces siècles déjà lointains, alors que le arménien n'était peuple pas gouverné par des rois nationaux, moments furent partiquelques culièrement brillants. On évoquera notamment le règne de Tigrane II ou Tigrane le Grand, que les Romains mirent trente ans à dompter, et l'on d'un autre, arméverra dans ce roi le prototype nien celui-ci, de Léon le Magnifique qui, douze siècles plus tard, devait jouer un rôle de premier dans son propre pays, mais plan, non seulement aussi en Europe. Les rois de l'Arménie menèrent indépendante la lutte contre leurs fréquemment puissantsvoisins. D'ordre sans doute, ces luttes politique furent avant tout des querelles religieuses, et, du l'un des premiers, fit pur où le peuple arménien,
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du christianisme sa religion d'Etat, la lutte fut continuelle avec les Perses les zoroastriens, les Mongols et les Turcs Arabes musulmans, eux aussi musulmans. devenus Restée le seul Etat chrétien d'Asie, l'Arménie subit, de la part de ses ennemis religieux, des assauts de plus en et violents, plus fréquents jusqu'au jour où, à la fin du xive siècle, ne pouvant plus mener seule le sous le nombre et le fanacombat, elle succomba tisme de ses ennemis séculaires 1. — Maître de sa destinée, et autant Diaspora. le permettaient, que les circonstances politiques le peuple arménien ne songea pas à émigrer, au sens large du mot, tant qu'il put vivre tranquille sur la terre de ses pères. Certes, et de bonne et heure, les Arméniens beaucoup voyagèrent résidèrent à l'étranger; mais ils n'y étaient pas Ils contraints des temps. par la dure nécessité soit comme comvolontairement, s'expatriaient soit comme soit comme étudiants, merçants, peuple raffiné désireux d'aller jouir de la civilisation dans les centres de grande culture de l'antiAnRome, Alexandrie, quité, tels qu'Athènes, tioche et, plus tard, Constantinople. 1. Cf. F. MACLER,Trois Conférences sur l'Arménie faites à VUniversiléde Strasbourg (Paris, 1927), in-8°, p. 38 et suivantes-
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
comme eux, A l'instar des Syriens, voyageurs la Méditerranée dans les Arméniens parcouraient les ports princitous les sens et en fréquentaient paux. Ils allaient résider et se former à Rome, à de la grande de la Rome expansion l'époque Et plus tard, dans l'empire impériale. byzantin, tels que Narsès, le général célèbre des Arméniens de Justinien, et Isaac, l'exarque de Ravenne, attirèrent sur leur patrie d'origine une réputation qui a franchi les siècles. Et l'histoire ne mentionne-t-elle faisant pas que des Arméniens, constituaient un partie des armées de Byzance, exclusivement arménien et résidant à régiment Ravenne. On a même prétendu que les statues de guerriers en marbre rouge-brun, qui sont placées devant l'une des portes du palais des doges des guerriers arméniens. à Venise, représentaient Mais il n'y eut pas que des généraux arméIl niens célèbres dans les armées de Byzance. semble maintenant établi que les historiquement Léon V, BaMaurice, empereurs Philippicos, sile 1er étaient des Arméniens; tandis que Nicéet peut-être Tzimiscès Jean phore Phokas, Basile II étaient à un arménienne, d'origine L'émigradegré plus éloigné que les précédents. tion arménienne vers l'occident commença peut-
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cerêtre au ve siècle de notre ère; elle s'intensifia des Perses au vie, après les invasions tainement en Arménie vers la seconde moitié du vie siècle. commencé auraient à cette date Les Arméniens dans les Balkans. établissements leurs premiers auraient été installés à PhilippoLes Pauliciens V au milieu du vme siècle et, poli par Constantin de sous le règne de Basile II le Bulgarochtone, s'établirent sans nombreux émigrés arméniens de la Bulgarie. aucun doute sur le territoire A la suite des Croisades, les soldats de l'Armédes avec les Francs; no-Cilicie fraternisèrent entre les se firent, non seulement mariages et franques, familles arméniennes princières, mais parmi le peuple et, dès le xme siècle, on en constate la présence arméniennes d'églises Italie. un A ce point de vue, les Arméniens jouèrent avec très grand rôle civilisateur en apportant eux des modèles et l'on comarchitecturaux, mence à relever les traces de leur influence incondes testable dans le développement artistique Balkans et de l'Italie. C'est qu'en effet le peuple était particulièrement arménien doué pour les et leur architecture se faisait, dès le arts, vie siècle, remarquer aussi bien par la pureté de
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
ses ses lignes que par la fantaisie qui agrémentait constructions. N'a-t-on pas établi que la Nea, à un plan arménien, Constantinople, reproduisait et ne se rappelle-t-on pas que le dôme de Saintede terre, fut Sophie, ébranlé par un tremblement restauré l'architecte arménien de par Tiridate, la cathédrale d'Ani? Ces Arméniens du début du moyen âge, tout en cultivant avec prédilection l'architecture et bien qu'ils fussent de tempérament plutôt iconola preuve claste, ne négligeaient pas la peinture, en soit les vestiges de fresques que l'on a relevées de leurs vieilles églises terridans quelques-unes toriales, la preuve en soit surtout les fresques du ornées d'inscripBlanc en Egypte, monastère du Xe et du xie siècle, et qui tions arméniennes elles le doute n'est sont, — pour l'une d'entre — signées du peintre arménien pas possible, de la province de Keisoun. Théodore, originaire Mais les Arméniens qui, dès le iveoulevesiècle, leur patrie, ne le faisaient quittaient pas toujours de leur plein gré. En nous rappelant que le roi Khosrov (590l'Arménien 627) combla de biens et d'honneurs Smbat Bagratouni et le nomma du marzpan Vrkan (Hyrcanie, la province qui plus tard se
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ARMÉNIENNE
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du Sébéos nous apprend nomma Mazandéran), même coup qu'il y avait, à cette époque, des campés sur la lisière du grand captifs arméniens, et du Delhastan, désert, du côté du Thurkestan oublié leur langue, et qui avaient ignoraient et n'avaient l'écriture pas de prêtres 1. Sébéos (vne siècle) donne, Le même historien détails lignes plus loin, d'intéressants quelques en 617, et sur la des Arméniens sur l'insurrection fin de cette révolte. Le catholicos Jean VI (ixe siècle) confirme les à ces Arméde Sébéos relatifs renseignements « Smbat, écrit-il, se niens établis en Thurkestan. ou Hyrcanie, Vrkan dans ce pays, rendit y trouva une population composée de prisonniers dans le Thurarméniens qu'on avait transportés kestan, du côté d'un grand désert nommé Sageset leurs leur langue, oublié ils avaient tan; en petit nombre. livres étaient Quand ils virent très contents; ils furent et, par son Smbat, de nouveau les usages de leur ordre, ils reprirent avaient leur langue apprirent qu'ils patrie, dans l'écriture oubliée et s'instruisirent armé1. Cf. SÉBÉOS,Histoire d'Héraclius, tfad. F. MACLER (Paris, 1904),in-8°, p. 42-43. — Voir, pour le texte original, Sébéos, éd. Constantinople, 1851, p. 96-97.
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TROIS CONFÉRENCES SUR h'ARMÉNIE
Il leur donna nienne et dans la foi chrétienne. même un évêque nommé Abel, qui fut ordonné Moïse... » 1. par le grand patriarche du xie siècle, Etienne de Tarôn, au début de ces Arméla présence mentionne également niens dans le Thurkestan, qui, après l'arrivée de leur langue, redeSmbat Bagratouni, rapprirent vinrent chrétiens et, instruits par le prêtre Abel, au siège de saint Grégoire a. furent rattachés Kirakos de Gandzak Enfin, siècle) (xme donne les mêmes renseignements que ses prédéétablis dans le cesseurs, relatifs h ces Arméniens Thurkestan et dans le désert de Sagastan 3. Et il ajoute, quelques pages plus loin, que des artisans arméniens avaient d'aucuns été déportés, pensent que c'était en Tatarie, d'autres croyant que c'était dans des pays encore plus septentrionaux. Vous le voyez, ces Arméniens dans rencontrés le Thurkestan au vne siècle, ne s'y étaient pas rendus de leur propre gré. C'étaient des captifs 1. Cf. JEAN Catholicos, Histoire d'Arménie, éd. Jérusalem, p. 90-91, et la traduction française de SAINT-MARTIN (Paris, 1841), in-8°, p. 59. 2. Cf. ETIENNEAçogh'ig de Daron, Histoire universelle,trad. E. Dulaurier... (Paris, 1883), in-8°, p. 117. 3. Cf. BROSSET,Deux historiens arméniens... (Saint-Pétersbourg, 1870).p. 26.
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ARMÉNIENNE
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de force dans ces que l'on avait transportés régions désertiques. Il en va de même à l'époque de Timour Leng, en grand nombre des prisonniers qui emmène arméniens et dans d'autres villes à Samarkand du Tataristan, et l'on sait que le vardapet armése présenta, en 1264, à Houlagou nien Vardan Khan pour traiter de la liberté religieuse de ses Mais auparavant, le roi Héthoum, compatriotes. d'Arméno-Cilicie avait demandé à (1254-1257) Khan que tous les Arméniens soient Mangou autorisés à construire des églises dans les pays et soient exempts d'impôts. tatares, on trouve mentionné, sur Khvorson, D'après au l'atlas catalan de 1375, un couvent arménien 1. Et nom de Matthéos, situé au sud deSouyk-Gôl au xve siècle, signale enfin, Thomas Médzobétsi, faits par Timour arméniens, que les prisonniers dans le Khorassan, Leng, furent conduits plus à Samarkand. spécialement d'ordre Un dernier plutôt renseignement, aura son importance : Dans le bibliographique, Thurkestan lointain russe, au sud des villes de on découvrait, en 1885, et de Tokmak, Pichpek 1. Cf. Handès Amsorga, 1895, p. 35.
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deux cimetières nestoriens du xme auxive siècle, et le déchiffrement des inscriptions qui ornent les pierres tombales de ces cimetières révèle notamment la présence d'Arméniens, au xmexive siècle, au nord du lac Issiggoul, dans la province des Sept-Rivières. Le nom seul de l'évêque arménien Jean, en 1324, atteste que la population arménienne dans ces régions était suffisamment dense pour avoir droit à un évêque x et bien que rédigées en plusieurs inscriptions, a. syriaque, révèlent des noms arméniens Et il ne sera pas sans intérêt de signaler qu'une bonne partie de ces pierres tombales nestoriennes ont été offertes au Musée Guimet par un M. Hindamian. Arménien, Et une première conclusion s'imposedès maintenant : jusqu'à la seconde moitié du xve siècle, de nombreux chrétiens, Arméniens, Grecs, Neset trafiquaient, non toriens, Syriens, vivaient seulement à Samarkand et aux environs, mais confins de la lointaine frontière chijusqu'aux encore. L'existence noise, et plus loin peut-être 1. CI. F. NAU, Les pierres tombalesnesioriennesdu Musée Guimet,clansRevuede l'Orient chrétien, 18°volume (1913),p. 3, 19 et passim. 2. Voir Handès amsorya, 1895, p. 35.
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est la preuve indiscutable d'un évêque arménien de l'importance de leur nombre; ces chrétiens, notamment les Arméniens, étaient les meilleurs de la culture mi-orientale et mipropagateurs dont les principaux occidentale, foyers étaient à Ani et à Sis, capitales de l'Arménie bagratide et de l'Arméno-Cilicie, et à Gonstantinople, du vaste empire chrétien d'Orient. capitale
Parmi les gens de plume qui ont tenté d'écrire l'histoire de l'Arménie, il n'en est point qui se soient donné la peine d'offrir un tableau histoet satisfaisant, de la diaspora rique, complet arménienne. C'est que le sujet est vaste; il exigerait de nombreuses et comporterait recherches une érudition peu commune et une connaissance des sources que l'on ne rencontre généralement pas chez ceux qui, à tort ou à raison, s'intitulent historiens. Mais l'histoire de l'Arménie, au sens large du faite que le jour où, après avoir mot, ne sera dressé le bilan des événements survenus en — ei ce Arménie et dans les pays circonvoisins, la fm du xive siècle — on envisagera jusqu'à
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
le large avec la même investigation critique mouvement de l'expansion arménienne en naturelles. Le volume dehors de ses frontières arménienne sera qui sera consacré à la diaspora aussi vaste, aussi intéressant et aussi capital que celui qui envisagera l'histoire des Arméniens en Arménie. Un tel volume n'est pas encore sur le point de mais on pourrait, auparavant, planter paraître, quelques jalons, et c'est ce que je vous demande faire dans les quelques derai l'autorisation de instants où je vais encore avoir l'avantage vous entretenir de l'épopée arménienne. arméLe vaste mouvement de la diaspora nienne devra être envisagé sous un double en masse et par aspect, celui de l'émigration individuelle. groupes, et celui de l'émigration L'un et l'autre de ces mouvements comportent de vastes recherches et exigent un large exposé, que l'on utilisera dans un travail d'ensemble sur Je me bornerai aujourla diaspora arménienne. d'hui à quelques indications brèves, mais aussi claires que possible. Il y eut, au cours des âges, nombre d'Armédans un but purement niens qui s'expatrièrent, D'une habileté consommée, ils s'en commercial.
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ARMÉNIENNE
en Asie Centrale, en Perse, aux partout, en Indes, en Chine, comme aussi en Moscovie, en Pologne, en Italie. Et, plus tard, Roumanie, ils poussèrent et France, en Angleterre jusqu'en en Espagne. Mais ces commerçants étaient des à gens de passage, qui ne s'installaient pas demeure dans les pays visitaient. Ils qu'ils à connaître ces pays et ils prépaapprenaient raient de la sorte les voies à l'émigration en se produirait. masse, lorsqu'elle Avant l'émigration dite des Arméproprement niens, au cours des siècles, — et ce dès le haut arménienne moyen âge —, il y eut l'expansion dans les pays limitrophes de l'Arménie. Ce fait se produisit sous la double poussée de la domination du Bas-Empire et du rayonnement incontestable de la puissance tatare. C'est ainsi que l'on vit des Arméniens s'établir successivement et progressivement en Bithynie, en Cappadoce, en Syrie, en Crimée, sur les rives de la Caspienne comme sur celles de la mer Noire. Tant que le pays des Arméniens était plus ou moins tributaire d'une puissance les chrétienne, Arméniens ne songeaient point à l'émigration en masse. furent
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
I Le premier mouvement en masse d'émigration date de la prise d'Ani, la magnifique capitale de l'Arménie à la fin du xie siècle. Le bagratide, de jour où les Turcs Seldjoukides s'emparèrent cette ville et détruisirent le royaume d'Arménie, en commettant les massacres, les pillages et les atrocités a enregistrés, le jour où que l'histoire ils voulurent forcer les Arméniens à renier le Christ et à sauver leur peau en se faisant musulla grande masse des Armémans, ce jour-là, niens qui le put quitta la terre ancestrale sans et, s'exilant espoir de retour volontairement, alla porter son génie commercial et son talent sous des cieux plus cléments. intellectuel On se dirigea vers le nord-ouest, et, d'étape en des vestiges et étape, tout en laissant partout des agglomérats, on se répandit en Moscovie en Grimée, en Moldavie, en Valaméridionale, en Galicie, en Hongrie, à chie, en Bukovine, Venise. Dans leur exode, les Arméniens continuèrent à mener leur vie patriarcale et nationale. Conservant fidèlement leur langue, leur littérature
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et leur civilisation manifestement à supérieures où ils pénétraient, ils y celles des pays nouveaux vivaient en communautés servant de distinctes, modèle aux gens du pays qui les recevaient, surtout dans la façon de se vêtir. Je n'en veux pour exemple que la célèbre et élégante ceinture polodes nobles polonaise, ainsi que l'habillement nais, qui sont directement calqués sur ceux des Arméniens. Arméniens de Roumanie Les anciens proviennent en partie de ce premier mouvement Il s'accrut lorsconsidérablement d'émigration. la Moldavie et la Valachie que la Bessarabie, se trouvèrent placées sous la domination turque. Ces émigrés arméniens s'étaient rend'abord dus en Grimée, par voie de terre; ils gagnèrent ensuite la région d'Astrakhan et le sud de la Russie. tache d'huile, ils pousPuis, faisant sèrent vers le sud-ouest et vers l'ouest. Au xvne et la Galicie siècle, la Moldavie deviennent de grands centres de colonies arméniennes. Mais la chance ne semble pas leur sourire d'abord. Des restrictions à ce apportées qu'ils tenaient pour leurs droits, les dangers que couraient leurs biens et leurs fortunes, parfois même l'insécurité de l'existence les incitent à
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
et à poursuivre leur vie d'émigrants. reprendre se milliers d'Arméniens En 1658, quelques où ils sont dirigent vers le Nord, à Sémigradia, Plus tard, d'un accueil encourageant. l'objet une ville qui s'appela vers 1699, ils fondent et qui, de leur nom, ne d'abord Jamos-Ujvar tarda pas à devenir la célèbre Arménopolis. Quant aux Arméniens de Moldavie, ils font de centre Soutchava leur capitale et leur principal et de rayonnement. d'activité En ce qui concerne les Arméniens de Valachie, on peut poser en fait qu'ils y ont tous émigré de la Moldavie et des provinces turques d'Europe. Ils étaient et sont encore éparpillés dans les cantons ou districts de Bakaou, Botochaki, Braïla, etc.. La plupart des Kovourlouk, Gonstantza, Arméniens de Roumanie de coms'occupent merce. Si l'on se réfère à une vieille statistique, on constate que les Arméniens occupent, par d'abord la Molrang d'importance numérique, et enfin la Valachie. davie, puis la Dobroudja Les Arméniens, perdus au milieu de la masse ont oublié leur langue maternelle et roumaine, de certaines coutumes perdu l'usage qu'ils tenaient de leurs ancêtres. Dans les grands centres cependant, il y a encore des Arméniens
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L'ÉPOPÉE qui parlent la langue leurs pères.
ARMÉNIENNE
et cultivent
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la littérature
de
Dès les temps les plus anciens, il y eut des coloen Bulgarie. Elles s'établirent nies arméniennes de préférence à Varna, à Plovdiv, à Rousse, à Silistrie, à Sofia, ailleurs encore. Une statistique de 1893 établit que 6445 de ces Arméniens parlaient encore leur langue maternelle, tandis que 200 d'entre eux en avaient complètement perdu Dès 1896, c'est-à-dire l'usage. après les massacres hamidiens, le nombre des Arméniens de sensiblement. On fit, après Bulgarie augmenta cette date, un recensement de la population bulgare et on dressa le tableau des lettrés en Bulgaarménien. rie, après le nouvel afflux de l'élément Il se sera pas sans intérêt de vous citer quelques chiffres ; des lettrés en Bulgarie, Proportion après les massacres hamidiens : Protestants Arméniens Juifs
grégoriens.
. . .
Catholiques Orthodoxes Mahométans TP.OIS CONFÉRENCES SUBL'ABMÉNIE
66,3 52,5 48,4 31,7 27,5 6,1
% % % % % % 2*
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On voit que les Arméniens un rang occupent le deuxième, dans la hiérarchie culhonorable, turelle de la Bulgarie; ils s'occupent surtout de exercent divers métiers, et font la commerce, Il va sansdire que, place très large à l'instruction. depuis les atrocités turques de 1915, le chiffre de la population arménienne de Bulgarie a sensiblement augmenté. En Serbie, il y eut également, de tout temps mais en quantité des Arméniens, surmoindre, tout à Belgrade, à Valévo et dans quelques villes secondaire. Enfin, à la suite des d'importance massacres turcs, on relève aussi la présence de en Bosnie et en Herzégovine quelques Arméniens En résumé, l'on peut poser en fait que, du xie au xvne siècle, des colonies arméniennes se et s'établirent sur toute la péninsule répandirent mais elles formèrent des groupes parbalkanique, ticulièrement dans les provinces où compacts elles reçurent le meilleur accueil et où elles étaient des grandes routes plus rapprochées : la Moldavie, la Valachie, commerciales la et la Bulgarie. Galicie, la Bukovine
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II La deuxième en masse des Arméémigration niens remonte à l'époque de Chah Abas, au début du xvne siècle. On
sait que ce souverain, reconnaissant le des Arméniens et voulant génie commercial donner un nouvel essor au commerce et à l'industrie de son pays, transporta de force, et sans de douceur, les Arméniens y mettre beaucoup de la vallée de l'Araxe, notamment ceux de et les fit établir dans Tjoulfa et de Nakhitjéwan, un faubourg Nor d'Ispahan, qui fut nommé et dans les environs. Tjougha (nouveau Tjoulfa), Ces Arméniens, en Perse, jouissaient établis d'un grand nombre de privilèges, notamment de la liberté absolue du commerce. Véritable poule aux oeufs d'or pour les états du chah, ils ne tardèrent pas à ramener la fortune et le bien-être dans le pays naguère misérable. Tant que dura le règne intelligent du chah des Arméniens et de la Perse Abas, la situation fut prospère. Ses successeurs, revenant aux errements des musulmans ne tardèrent fanatiques, les Arméniens et la pas à molester chrétiens,
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ne tarda pas à faire son apparition. décadence Ces Arméniens de Perse, avant tout commerdeux directions. Une partie çants, prennent à travers l'Afgas'avance vers l'est, c'est-à-dire, nistan, vers les Indes, où ils ne tardent pas à occuper des situations très en vue, au point que, avant la domination anglaise, ce sont les Arméniens qui sont à la tête du commerce et de l'industrie de ce pays. Les rajahs et les maharajahs se faisaient un honneur d'être entourés d'Armémilitaires et niens, financiers, commerçants, médecins, non seulement parce que ceux-ci faisaient montre d'une grande et réelle capacité, mais aussi parce qu'ils étaient pour ainsi dire personae gratissimae du chahinchah. Et ici, j'aimerais ouvrir une parenthèse et l'histoire vous raconter presque fabuleuse d'un Bourbon de France qui se réfugia aux Indes, et parvint, épousa une dame arménienne par elle, à une fortune qui dépasse l'imagination. l'excellent article que publia J'empruntelerécità dans la Revue de Paris, jadis Gabriel Ferrand, n° du 1er septembre 1905, p. 189-202. « Akbar Khan, le grand Mogol, règne à Delhi. Monté sur le trône en 1556, à l'âge de treize ans, il fait prévoir déjà le souverain illustre qu'il sera
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plus tard, le plus grand et le plus illustre empereur qu'ait jamais connu l'Inde entière. En 1560, un étranger de noble origine, se disant parent du roi de Navarre, fait demander audience à l'empereur. Akbar le reçoit et écoute le récit de ses de Bouraventures. L'étranger, Jean-Philippe a dû quitter le pays des Francs à la bon-Navarre, suite d'un duel où il tua son adversaire, un gentilhomme de ses parents, et bien en puissant cour. Il a fui sur un navire, en compagnie de son chapelain et de deux amis. Après une longue et au cours de laquelle ses traversée, périlleuse deux amis sont morts, il est arrivé à Madras. Le est resté dans cette ville. Philippe de chapelain Bourbon a continué son voyage vers Calcutta et Delhi où il arriva enfin, sans cesse retardé dans sa marche à travers ce pays nouveau. En terminant, le prince navarrais dépose son épée aux dont il implore la protecpieds de l'empereur, tion. « Touché par le récit de Philippe de Bourbon, intéressé plus encore par sa noble origine et sa Akbar assure le voyacourageuse persévérance, sollicitude geur de son affectueuse et, comme de sa faveur, lui donne un marque immédiate emploi à sa cour, un titre officiel et un important
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dont les revenus subviendront djagir (propriété) à ses besoins. « Le prince français s'acquitta de ses fonctions à l'entière satisfaction du grand Mogol, qui, pour se l'attacher et le retenir à son service, davantage lui fît épouser la soeur de l'une de ses femmes une doctoresse arménienne, chrétiennes, appelée ses soins aux dames du Julienne, qui donnait harem. Le mariage fut célébré en grande pompe le titre de et l'empereur conféra à son beau-frère navâb (prince) et de gouverneur du harem impé»; rial; à sa belle-soeur, celui de « soeur impériale le harem de Aïn-i-Akbari, d'après la chronique était un immense palais où habil'empereur chacune taient cinq mille femmes, qui avaient et son train de maison. La son appartement du harem restera dans la charge de gouverneur famille de Bourbon durant deux siècles, jusqu'au sac de Delhi par le chah de Perse, Nadir Chah, en 1737. « Pendant résiquelque temps, les Bourbons non pas à Delhi, mais à Agra : dèrent cependant dans cette ville, le bâtiment occupé aujourd'hui de la mission catholique passe par l'imprimerie pour avoir été une église fondé par Mme Julienne. Elle y fut enterrée, ainsi que plusieurs membres
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de de sa famille. Les enfants de Jean-Philippe le nom de Bourbon, Bourbon-Navarre prirent sans particule, qui a été porté ensuite par tous leurs descendants... « François Parmi ces descendants, Ier, né en d'ori1680, épousa en 1710 une de ses parentes, de sa descen: c'est l'histoire gine arménienne dance que nous allons résumer : « François Ier fut, comme son père et ses aïeux, du harem impérial. Lors du sac de gouverneur de Nahir Chah, où cent Delhi par les troupes mille habitants furent, dit-on, égorgés vingt-cinq il échappa au massacre avec sa par le vainqueur, famille Il se réfuinespéré. par un hasard dans la forteresse du djagir, gia à Sirgour, du fief donné aux Bourbons par l'empereur Akbar... « Salvador L'un de ses petits-fils, III, se rendit à Bhopal et fit ses offres de service à la Begoum dont il avait entendu vanter (reine) Mamola, et la bonté. La Begoum fit le meill'intelligence leur accueil à Salvador III, qui entra en 1785 au service du prince consort, Navâb Haïat Mohammed Khân... » etc. J'arrêterai là cette citation, mais je tenais à vous signaler ce fait historique d'Arméniens et
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des d'Arméniennes occupant, quoique chrétiens, empeplaces de premier plan chez les principaux reurs des Indes. si vous le voulez bien, aux ArméRevenons, niens de Perse, ou mieux, aux Arméniens qui, commencé une nouémigrés de Perse, avaient velle existence aux Indes et ne devaient pas à rêver de plus grandes comtarder conquêtes vers merciales en se dirigeant toujours davantage les pays du soleil levant. Dès le xvne siècle, ils s'établissent progressivement et solidement dans les grands centres de l'Inde. vers 1616, le premier Lorsque, envoyé anglais arriva à Delhi, il y trouva des Arméniens, et lorsque, qui y étaient à la tête du commerce des Indes, les Arméniens grâce à la Compagnie durent céder le pas aux Anglais, les notables arméniens durent se soumettre à la loi du plus et les agents de fort. Le 22 juin 1688, le président des Indes passèrent un contrat la Compagnie avec Khodja Panos, chef et délégué des Arméen beaucoup niens de Djoulfa et leur accordèrent, des droits égaux aux leurs, avec la de points, et de libre navigation. faculté de libre résidence On stipulait, entre autres, des droits de douane très modérés pour toutes les marchandises que les
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pourraient
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des pays
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gers. Dès la fin du xvne siècle, ces riches commerdes Indes augmentent leur forçants arméniens vers les grands centres de tune en se dirigeant Les uns s'établissent en Birl'Extrême-Orient. une belle église au manie, où ils font construire xvme siècle, et les principaux fonctionnaires du roi ne tardent Ranpas à être des Arméniens. goon devient à son tour un grand centre arménien, avec une belle église et une riche colonie; d'autres Siam et en Cochinpoussent jusqu'au chine. A la fin du xvme siècle, on voit s'établir de riches colons arméniens à Java, à Batavia, à Ceux qui ne sont pas très fortunés Sourabaya. de petits tandis s'occupent métiers, que la grande majorité d'entre eux se consacre au commerce des pierres précieuses, et surtout du diamant. Ils y ont des églises, des écoles, des sociétés de bienfaisance. Dès avant le xvnie siècle, les arméniens étaient allés jusqu'aux commerçants et aux Manilles, en un temps où les Philippines ne permettaient Espagnols pas aux Européens de commercer avec ces îles et où ils faisaient si l'on se réfère au exception pour les Arméniens, TROIS CONFÉRENCES SURI/ARMÉNIE S
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de Lapérouse, qui signale la présence témoignage à Manille. arméniens de commerçants mais ne vise pas à être complet, Ce tableau l'on ne saurait prendre congé de cette diaspora sans rappeler de l'extrême-Orient, arménienne colonie de Malacca. et je me plais la florissante à vous rappeler cette complainte que l'un de ces riches Arméniens, qui était en même temps bon sa sur fit avance, pierre par graver, patriote, : sépulcrale Salut! ô toi qui lis l'épitaphe de la tombe où je dors. Dis-moi les nouvelles, dis-moi la liberté des hommes de mon pays pour qui j'ai tant pleuré; Dis-moi s'il s'est levé parmi eux un bon gardien qui les dirige et les protège. Car j'ai vainement attendu toute ma vie qu'un bon berger vienne veiller au troupeau dispersé. Moi, Jacob, petit-fils de Chamir, Arménien d'une noble famille dont je tiens le nom, Né en Perse, dans une ville étrangère, à Nouveau Djoulfa, où mes parents reposent à jamais. Le destin m'a conduit dans cette lointaine Malacca, qui gardera mes restes mortels *. 1. Cî. F. MACLER. Note sur quelques inscriptions funéraires arméniennes de Malacca, dans Journal Asiatique, n° de. maiJuin 1919, p. 561.
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C'est sur cette note quelque peu mélancolique aujourd'hui, que nous prendrons, congé de ces Arméniens de près ou de loin, à la appartenant, diaspora provoquée par le chah Abas, au début du xvne siècle, et qui portèrent la gloire du nom arménien orientales extrémités du jusqu'aux monde civilisé. Un autre
de Nouveau groupe d'Arméniens Djoulfa, commerçants pour la plupart, se dirigea vers l'occident, c'est-à-dire vers la France, la Hollande et l'Italie, où ils se livraient au commerce de la soie et des pierres précieuses, des arômes et des épices. Nous les rencontrons, dans les documents de l'époque, sous la désignation de Persiens. Pour tout autre que pour moi, ce terme de Persien signifierait un Persan, c'est-à-dire un musulman, sujet du chah de Perse. Mais il suffit de voir leurs noms et leurs prénoms pour se persuader de suite que ce sont des Arméniens, mais des Arméniens d'une catégorie spéciale. Dans un précieux document conservé aux Archives départementalesdesBouches-du-Rhône et que j'ai publié en son temps on apprend que le roi de France, sur la demande de son cher ami le roi de Perse, décide et ordonne de favoriser les
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sujets du chah, tant de la Perse que de l'Arménie, de leur qui viendront apporter des marchandises pays en France, et en exporter x, de France dans sont désignés sous le leur pays, et ces marchands Nul doute que, nom de Persiens et d'Arméniens. de par Persiens, il faille entendre des Arméniens du des gens originaires Perse, et par Arméniens, pays qui se nomma jadis Arménie. Ces deux mouvements que nous principaux, venons d'esquisser, furent le point de départ de ou par toute une émigration plutôt individuelle de négociants arméniens, qui petits groupes, s'en allaient, de par le monde, à l'Est comme à l'Ouest, porter les différents témoins de civilisations multiples et qui, sans eux, n'auraient pas été l'objet d'échanges et aussi aussi nombreux variés. III Et voici que, tout en suivant le cours de l'histoire, nous arrivons à une époque très rapprochée de nous, à un mouvement de diaspora 1. Notices de manuscrits arméniens ou relatifs aux Arméniens vus dans quelques bibliothèquesde la Péninsule ibérique et du sud-estde la France... (Paris, 1923).in-8°, p. 143.
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on préférerait sur lequel arménienne pouvoir jeter le voile de l'oubli. Car il ne s'agit plus des et barbares des Seldjoukides, époques lointaines et des Gengis Khan. Il s'agit de des Tamerlan d'exil ce mouvement arménienne, d'émigration aux persécutions du régime forcé, consécutif comme vous le et qui se termina, hamidien, de 1895 et 1896. savez, par les massacres mouvement d'exode se produisit Ce troisième de Turquie. Ne pousurtout chez les Arméniens librement sous la vant plus vivre ni respirer écrasés domination d'Abd-ul-Hamid, tyrannique par les exacpar les impôts injustes, exaspérés les plus iniques, les tions et les prévarications Arméniens leur sol ancestral, par quittèrent et mais d'une façon continue, petits groupes, allèrent en se fixer en Egypte, en Bulgarie, dans l'Amérique du Nord où, Syrie, surtout avant la guerre de 1914-1918, ils étaient au cent vingt mille. nombre d'environ Ces exils, cette fuite hors de la patrie, cette diaspora forcée sont autant de causes d'affaiblissement pour la nation arménienne, qui rêvait de vivre en paix sur la terre de ses pères. Mais il en du résulta, par ailleurs, un grand développement commerce et c'est, sans aucun international,
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au génie arménien que l'on doit l'enverinternational gure de ce commerce qui est, de nos jours comme de tous temps, un des facteurs de toute civilisation. primordiaux doute,
IV Le
et dernier mouvement de la quatrième et qui fut le plus extermidiaspora arménienne, nateur se produisit dès le pour cette nation, de 1915, lorsque le gouvernement printemps turc d'alors, l'ami fidèle et séculaire de la France et de ses Alliés, entra délibérément dans la lice contre nous, et jugea opportun et d'exterminer d'anéantir l'élément arménien de l'Arménie soit par la déportaturque, soit par le massacre, tion dans les déserts de Syrie et de Mésopotamie. L'Arménie turque fut, de ce chef, presque comvidée d'Arméniens. la Et, lorsque plètement guerre officielle eut pris fin, ceux de ces Arméniens déportés qui le purent, n'eurent plus qu'un et se but : fuir une terre aussi inhospitalière sous des cieux où l'on témoignerait à réfugier leur endroit quelques sentiments de la plus élémentaire humanité.
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Le rêve d'une grande Arménie indépendante des événela brutalité s'étant évanoui devant en masse, où ils ments, les Arméniens émigrèrent Et purent et où l'on voulut bien les accueillir. environ c'est ainsi que l'on'compte aujourd'hui 60.000 Arméniens en France, un peu moins en Grèce, 150.000 en Syrie, 30.000 qui allèrent du Nord, leurs aînés dans l'Amérique rejoindre du Sud, une trentaine de mille dans l'Amérique en et quelques dizaines de milliers en Egypte, Chypre, en Serbie, ailleurs encore. Il convient de noter, avant de conclure, et en insistant d'une façon très particulière, que tous n'oDt ces Arméniens, dans l'univers, épars d'autres si provisoire et si prépréoccupations, caire que soit leur installation, que de créer des des journaux, de bâtir des écoles, de publier d'ouvrir des imprimeries églises et des hôpitaux, et d'exercer des métiers, soit comme petits soit comme artisans, mapatrons, architectes, çons, cordonniers, tailleurs, ébénistes, ciseleurs, sculpteurs. Tous ces Arméniens, au qu'ils aient appartenu ou qu'ils soient premier mouvement d'émigration du dernier, ont toujours poursuivi le même but, qui ne fut jusqu'à présent qu'une chimère : tra-
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à assurer par tous les moyens possibles et la sécurité de leur patrie. Ils y l'indépendance institutions ont contribué par les nombreuses créées et établies sur le sol même de l'Arménie, ils y ont concouvents, églises, écoles, hôpitaux; sur la terre étrangère, en cherchant à tribué, doter, par des sommes souvent très importantes, ces mêmes institutions un jour être qui devaient la gloire, l'honneur et la parure du nom arménien. vailler
Et
ceci
nous
l'heure amène, malgré qui à signaler brièvement l'oeuvre accoms'avance, plie, non plus par la masse des Arméniens répandus dans le monde, mais par quelques personconnu nalités, dont le nom n'est pas seulement dans le cercle restreint de l'Arménie mais qui a débordé ce cercle, et est devenu célèbre dans l'humanité civilisée tout entière. Nombreux seraient les personnages qu'il conviendrait de citer, et qui, généreusement, contribuèrent à faire connaître le nom arménien et à le répandre avantageusement partout où il pénétra. On se bornera, limité par le temps, à n'en évoquer
que quelques-uns.
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au xe-xie siècle, le à Gonstantinople, C'était, célèbre légiste Harménopoulo qui, comme son arméétait d'origine nom semble l'indiquer, nienne. les un des premiers- ministres En Hongrie, et se était d'origine arménienne plus réputés nommait Lucacz. Aux Indes, comme je l'ai déjà indiqué, de nombreux Arméniens des situations occupèrent de premier plan à la cour des empereurs et chez les plus grands maharajahs. C'est également aux Indes Raphaël qui, par sa que vécut Mourad fortune, créa le célèbre collège Mourad Raphaël à Venise et à Paris, Ne dit-on pas que le premier serbe, peintre comme le premier imprimeur serbe, étaient des Arméniens? Et l'on a noté les services importants rendus au commerce de la Serbie par des Arméniens influents et intelligents. En Roumanie, ce pays hospitalier par excellence, et qui servit de refuge aux révolutionnaires grecs comme aux Serbes et aux Bulgares, on devait se montrer particulièrement hospitalier et humaine l'endroit des réfugiés arméniens. Les Arméniens d'une liberté absolue. y jouirent Ils y construisirent des églises et des écoles TROISCONFÉRENCES SURL'ARMÉNIE 3*
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dans lesquelles on enseignait en magnifiques, se mirent aussi à arménien. Mais les Arméniens et fréquentèrent les collèges l'école du roumain de et les établissements d'instruction supérieure Et ils donnèrent ainsi à la leur pays d'adoption. des Roumanie, qui n'eut pas lieu de le regretter, des poètes, des artistes, des magisphilosophes, des médecins, des ingédes professeurs, trats, nieurs, des généraux. noms doivent ici être évoqués. Quelques était ArméBasile Conta, le grand philosophe, nien. Le célèbre poète, Anton Pann, qui sut tirer trésor que de la bouche du peuple ce précieux Théodore le folklore, était Arménien. constitue de la est un des fondateurs Aman, Arménien, Le musée de Bucarest roumaine. n'estpeinture il pas consacré à Théodore Aman, et ne porte-t-il P. Missir, de l'Unipas son nom? Le professeur était un célèbre de Bucarest, versité légiste et l'on ne saurait arménien; passer sous silence de mathématiques à Haret, professeur Spiru et qui fut, pendant Bucarest, ministre de l'Instruction années, plusieurs pumonuments et écoles, qui blique. De nombreux le nom de Haret, témoignent de la graportent du peuple à l'endroit de cet titude roumain
l'Univerité
de
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illustre Arménien. Le Dr Buicliu,le médecin bien connu de Bucarest, était un Arménien, ainsi que du 4e Corps de le général Zadik, le commandant l'armée roumaine. Arméniens étaient également le célèbre juge Kessim procureur de général Bucarest et M. Trancu-Jassy, ministre du Travail. Le peuple roumain n'a pas eu et n'aura pas à la large et franche hospitalité regretter qu'il a accordée et qu'il accordera encore aux Arméniens. Ceux-ci sauront comme ils reconnaître, l'ont déjà fait, tout ce qu'ils doivent à la Roucomme par le passé, manie, et ils continueront, à fournir le plus précieux des apports à cette civilisation roumaine, que nous apprenons et que l'on ne chaque jour à mieux connaître, saurait dans notre occident trop vanter qui ignore encore beaucoup de la gloire, des mérites et de la valeur intellectuelle et morale de la noble Roumanie l. En Turquie, c'est un Arménien de Russie, la fameuse Sanassarian, qui crée h Erzeroum école Sanassarian. On a heureusement noté le rôle prépondérant des Arméniens à Byzance et il 1. Cf.Nicolae SERBAN, The Armenians inRumania, dans The new Armenia (New-York),janvier-mars 1927, p. 8-9.
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de signaler à une époque postérieure, suffira, de deux Arméniens l'influence toute-puissante : Kassan de Constantinople dans les destinées et Turc de religion, de nation Aga, Arménien homme de du grand Seigneur, grand douanier Antoine et son frère la à crédit Porte, grand de nation 1, chrétien Boghos Tchélébi, Arménien du grand Seidouanier de religion et principal d'Anatolie. gneur dans toutes les Echelles On n'a pas oublié que la culture de la garance Venaissin le comtat dans fut introduite par Jean Althen 2, et que l'usage du café l'Arménien Pascal ou Harouen France est dû à l'Arménien thiun 3. Enfin, l'on sait le rôle capital joué en lors de la guerre Birmanie par Sarkis Manoukian, *. Anglo-Birmane Mais il semble bien que le pays où les Arméniens ont donné la mesure de leurs capacités céré1. Ci. F. MACLER,Nouvelle mosaïque orientale [Paris, 1923), in-8", p. 235. Notices de manuscrits arméniens ou relatifs 2. Cf. F. MACLER, aux Arméniens vus dans quelques bibliothèques de la péninsule ibérique... (Paris, 1923), in-8°, p. 188 sqq. 3. Cf. F. MACLER,Autour de l'Arménie (Paris, 1917), in-8°, p. 45. La nation arménienne... (Paris, 1924), in-8°, 4. Cf. F. MACLER, p. 25.
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et d'admibraies et de leur talent d'organisation soit l'Egypte. nistration Bedr ed Gemali, « En 1073, un Arménien, de Syrie, fut chargé de rétablir gouverneur l'ordre en Egypte. Il y réussit. Ce fut la seconde On lui de la dynastie fatimide. période brillante et les portes du Caire, dont doit les fortifications tout de caractère les restes sont si grandioses, et que l'on doit à des Arméniens byzantin, en d'Edesse; puisla premièremosquée—tombeau — élevée à la mémoire de Bedr ed Gemali, pierre élevée au et cette petite mosquée d'al Juyûshi, en 1085 (flg. 1) que Max sommet du Mokattam van Berchem nous a révélée et qui, pense-t-il, églises armérappelle par son plan certaines de son fondaniennes, ce qu'explique l'origine teur » 1. Et tout le long du moyen âge,l'histoirearelevé les services éminents rendus par des Arméniens à terre des Pharaons. Pendant près d'un l'antique et sursiècle, la plupart des premiers ministres, étaient tout le ministre des Affaires étrangères, des Arméniens. Le plus illustre d'entre eux fut sans conteste Nubar pacha. 1. Gaston MIGEON, Les arts musulmans... (Paris et Bruxelles, 1926),in-4°, p. 13.
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Né à Smyrne, en 1825, d'une famille originaire Nubar pacha arrive en Egypte en du Karabagh, 1842 et il ne tarde pas à s'y faire une situation du rôle qu'il a joué et hors de pair. L'importance l'influence décisive qu'il a eue sur le développecoument et les progrès de son pays d'adoption vrent la seconde moitié du xixe siècle. Tracer la de Nubar pacha, ce serait faire, non biographie des événements survenus seulement l'historique à la fin du dernier siècle; ce serait, en Egypte des relations du coup, faire l'histoire diplomade l'Allemagne, de l'Angletiques et politiques Il ne terre et de la France à la même époque. saurait en être question dans ces quelques pages des individuelle à l'émigration que je consacre Arméniens. Qu'il suffise de rappeler que Nubar pacha s'est de l'humanité créé un titre à la reconnaissance et ses luttes pour entière, par ses négociations des réformes la réalisation qui ont transformé et en ont fait un des pays les plus civil'Egypte et féconde sa brillante lisés du globe. Durant Nubar pacha a carrière de plus d'un demi-siècle, du gouveroccupé les postes les plus importants Dans la première nement période de égyptien. et constamment cette carrière mouvementée
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de Mohammed Ali à la fin du règne de agissante, attaché à la personne Saïd, il fut spécialement Mohammed Ali et des deux premiers Vice-rois, de secrétaire-interprète; en qualité Ibrahim, dans cette puis, Abbas Ier, tout en le maintenant de l'Intendance fonction, lui confia la direction Sanitaire et l'envoya plus tard à Vienne, comme Enfin, le Vice-roi Saïd le agent diplomatique. de Vienne, le nomma Président de la rappela Cour d'appel du Transit et des puis directeur chemins de fer, dont le premier tronçon, entre et le Caire, venait d'être construit. Alexandrie Dans la seconde période, sous Ismaïl, Tewfik et Abbas II, Nubar pacha fut successivement Ministre du Commerce, des Travaux publics, de la Justice, des Affaires Etrangères, premier du Conseil des ministres resMinistre, Président enfin régent le ponsables, d'Egypte, pendant voyage du Khédive Abbas II en Europe, en 1894. Si l'on ajoute les missions importantes qu'il eut à remplir en Europe, tels : le règlement du différend survenu avec la Compagnie du Canal de de Napoléon III donna gain Suez, où l'arbitrage — de cause à Nubar la réforme pacha, judidu fellah des travaux ciaire, l'affranchissement de corvées, l'abolition de lois aussi iniques que
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l'introduction de la justice pour tous barbares, en Egypte, la création de tribunaux mixtes, on n'aura encore qu'une faible idée de l'activité féconde et prodigieusement débordantedeNubar pacha. Pour l'oeuvre
se rendre de de la grandeur compte de la Réforme à laquelle judiciaire, doit sa renaissance et sa l'Egypte économique prospérité actuelles, il faut se rappeler que, pour les Egyptiens et pour le gouvernement lui-même, il n'existait pour ainsi dire plus de justice en dans les relations et entre indigènes Egypte Et cela, par suite d'interprétations étrangers. erronées des textes des capitulations et des abus introduits qui, au cours des siècles, s'étaient dans leur application, grâce à la faiblesse des gouvernements Egyptiens. La réforme avait pour objet de mettre fin à cet état de choses, qui paralysait le pays et arrêtait tout progrès. Emile 011ivier,qui avait pris part aux négociations de Nubar Pacha, d'abord comme député au Corps Législatif du Second Empire, x. puis comme Président du Conseil des Ministres, a 1. Emile OLLIVIER, L'Empire libéral, t. XII, p. 73 et suiv. {Paris, Garnier frères, 1905),in-12.
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consacré à cette réforme judiciaire, tout un chapitre de son Empire Libéral. Je ne puis mieux faire que d'en citer ce pasdes capitusage où, après avoir fait l'historique lations et avoir montré comment leur applicaEmile était devenue abusive, tion en Egypte Ollivier ajoute : « Les consuls, excipant de la nécessité de la présence du drogman au procès et d'un délégué dans l'exécution d'une sentence, paralysèrent l'action du juge territorial, se substituèrent à lui, et devinrent, en fait et contre le droit, les véritables juges, non seulement des litiges entre mais de ceux entre Européens et Européens, souvent ce pouvoir indigènes, et ils employèrent à faire triompher des demandes d'indemnités absolument exercé iniques, véritable chantage contre un gouvernement faible. Cet empiétement du pouvoir consulaire finit par être dommageable aux Européens car ils relevèrent eux-mêmes, ainsi de dix-sept juridictions souvent différentes, en opposition entre elles, de telle sorte que, peu à la plus désastreuse s'établit et peu, l'anarchie qu'on put dire qu'il n'y avait plus de justice en Egypte. « Nubar eut la pensée géniale de constituer un
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non pas exotique, comme ceux des potribunal, testats des républiques italiennes, mais égyptien, à déterminer, de composé, dans une proportion juges indigènes et de juges choisis dans les tribunaux étrangers. Les résidents, sans doute, deà des usages comvraient, par suite, renoncer modes et n'obtiendraient plus gain de cause d'un agent par la seule protection vigoureuse consulaire Les consuls eux-mêmes menaçant. leur pouvoir d'intervention arbiperdraient traire, mais ce serait tout profit pour leur pays, d'intérêts car, dégagés de la sollicitation particuliers souvent inavouables, ils se consacreraient mieux à la tutelle des intérêts généraux devenus leur unique préoccupation ». Telle fut la belle et grande conception que Nubar Pacha eut la gloire de réaliser. Mais cette Réforme, en établissant une justice égale pour tous, européens et indigènes, devait, en outre, dans la pensée de Nubar Pacha, mettre aussi un frein au pouvoir absolu des Vice-Rois, en les rendant, et comme les simples particuliers le gouvernement des Trilui-même, justiciables bunaux Mixtes. Ce but, comme l'expérience l'a montré dans la suite, fut atteint, et c'est ce qui a fait écrire à Emile Ollivier, dans le cha-
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pitre de l'Empire libéral que je viens de citer : « L'oeuvre principale celle de Nubar Pacha, une de l'Orient qui lui assure dans l'histoire fut celle de la Réforme renommée impérissable, ». Judiciaire Une telle activité n'allait pas sans beaucoup de difficultés et d'opposition.Nubar d'amertume, pacha réussit à les vaincre et, au lendemain de sa fut ouverte, d'un élan mort, une souscription sur terre spontané, pour lui ériger, à Alexandrie, dressée la première statue à la musulmane, la population mémoire d'un chrétien. Toute à cette souscription contribua et, des villages les leur obole, plus pauvres, les fellahs apportèrent à celui qu'ils pour témoigner leur reconnaissance « le père du avaient surnommé Abou-el-fellah fellah », témoignant ainsi de la gratitude qu'ils à celui qui les avait délivrés des abus portaient vicdont ils étaient, jusqu'alors, les misérables times. On reste frappé d'étonnement, en apprenant à connaître la vie de Nubar pacha, de voir ce que de tels hommes ont pu faire sur terre étrangère, étaient favorables, et ce lorsque les circonstances qu'ils auraient pu faire dans leur propre patrie si des circonstances adverses ne s'étaient opposées
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au développement de leurs talents et au plein de leur génie. épanouissement Bien que résidant officiellement en Egypte, la famille Nubar a créé, en dehors de ce champ une multitude d'oeuvres bonnes, dont d'activité, à elle seule, exigerait de noml'énumération, breuses pages. Ce n'est pas le lieu de les envisager ici. Qu'il suffise de rappeler qu'une de ces dernières institutions de bienfaisance est la création de bourses à l'usage des étudiants arméniens et dont le siège est à Bruxelles. En procédant de la sorte, la famille Nubar ne se borne pas à rendre service à quelques étudiants elle peu fortunés; contribue, dans une large mesure, à former des ardents et éclairés qui ne tarderont patriotes pas à faire profiter de leurs lumières l'Etat encore arménienne. jeune de la nouvelle République Je pourrais m'étendre sur le rôle davantage primordial joué par les Arméniens dans les divers pays où la destinée les a placés. Mais ce serait dépasser les limites d'une modeste causerie. Qu'il me suffise, en manière de conclusion, de rappeler que, presque tous aux frais de aucun pays,
d'années, depuis une cinquantaine les livres arméniens ont été édités dans généreux Mécène arméniens; même en Amérique, on ne trouve
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autant de « Mécène » que chez les Arméniens. Et ceci est un des signes caractéristiques de cette race : ils ont un amour si prononcé pour l'instruction fût-il de conque tout Arménien, cherche à faire bénéficier dition modeste, ses de l'instruction. enfants des bienfaits Lorsque les parents n'y peuvent à eux seuls suffire, il n'est pas rare de voir le cadet travailler et gagner aux frais d'études de l'aîné. Et pour subvenir le jeune étudiant n'a plus de proches quand parents pour pourvoir à ses dépenses scolaires, c'est un parent plus ou moins éloigné qui se fait un honneur de subvenir aux besoins du jeune homme. Partout où les Arméniens fondent une colonie ils créent immédiatede quelque importance, ment des sociétés intellectuelles pour donner des installer des salles de lecture et de conférences, Ils donnent, suivant l'importance de spectacle. leurs colonies, des représentations théâtrales, des soirées dansantes. des auditions musicales, A Paris, par exemple, où depuis quelques s'est sensible^ années, le nombre des Arméniens ment accru, il y a, toutes les semaines et quelquefois deux fois par semaine, une représentaen arménien, tion théâtrale ou un bal, ou un
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littéconcert, ou des conférences scientifiques, raires et politiques. Ils y publient actuellement huit journaux dans leur langue, dont un quotidien. Ils y ont une société de médecins, une société une société d'ingénieurs-techniciens, une société littéraire et artistique, artistique, une société des Dames Arméniennes, trois troudeux sociétés de sports, un dispes théâtrales, pensaire pour malades et infirmes, une société de une société pour les pauvres, une bienfaisance, société de secours aux étudiants, une association des étudiants arméniens, plusieurs salles de lecture, deux choeurs, une fanfare, une société de une société de la Croix rouge arméboy-scouts, nienne, etc., etc. C'est à Paris qu'est le Conseil central de l'instruction des Arméniens d'Europe; c'est à Paris, enfin, que se trouve actuellement le plus fort groupement d'intellectuels et d'artistes arméniens qui, formés à nos méthodes latines, font le plus grand honneur à leur patrie d'élection. Vous voyez, Messieurs, à travers les défectuosités multiples de mon exposé, quelle place primordiale l'Arménie tient, par son existence trois fois millénaire, dans l'histoire générale de l'humanité. Faire au vrai le tableau de cette
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histoire et de cette civilisation, ce serait accomplir une oeuvre de la plus haute portée scientiune véritable fique en même temps qu'écrire Je m'estimerais épopée nationale. récompensé de mes peines si, par les quelques pages qui si modestes précèdent, puissent-elles paraître, j'avais provoqué chez quelques savants qualifiés le désir et la volonté d'écrire un jour cette épopée.
immmrasiîiiïiiïJLïiwwisJwisJwwwwwiïirïiraraHraHnnEa
II AUTOUR
DE
L'ART
ARMÉNIEN
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au cours de J'ai eu maintes fois l'occasion, et dans plusieurs mon enseignement de mes écrits, de signaler ce fait qui me semble capital: malgré son existence plusieurs fois séculaire, le peuple arménien nous apparaît comme un peuchrétien; tout, dans son ple essentiellement développement historique, pivote autour de sa dont nous ne savons presque rien civilisation, avant le christianisme, et qui apparaît comme l'une des nations les plus civilisées du Proche Orient, dès qu'il a fait sienne la civilisation chrétienne. La chose se vérifie d'une manière éclatante, si l'on envisage l'art arménien dans ses multiples manifestations; peut-être ne sera-t-il pas inopportun d'insister sur ce fait, dans la modeste 1.Conférencefaite à la Fondation Carol I, le 30 juin 1927.
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causerie que je vais avoir la grande faveur de faire devant un public d'élite et formé à ces diset à ces questions de criciplines scientifiques tique d'art. Et j'aurai répondu de la sorte à la confiance qu'ont bien voulu placer en moi, et M. le Professeur Iorga, et Messieurs les Membres de l'Union des Arméniens de Roumanie. On l'a dit et on l'a répété : l'origine de l'art se confond, en remontant les siècles, avec l'oridu beau comme gine de la religion; le sentiment le sentiment religieux est inné dans le coeur de l'homme, si haut que nous permette de remonter dans le cours de l'histoire l'étude du phénomène et des diverses manifestations artisreligieux tiques. Mais c'est bien à tort, semble-t-il, qu'on ait cru pouvoir poser en fait que l'art est, par le propre d'une essence, chose aristocratique, rare et minuscule élite... Bien au contraire, l'art, dans ses multiples comme la manifestations, dans ses divers est d'ordre religion cultes, essentiellement au sens étymologique populaire, du mot. L'art ne relève de l'aristocratisme que du jour où, devenu objet de mercantilisme, il faut la fortune que comporte le mot implicitement aristocratie pour offrir en or la contre-valeur des objets d'art. TROIS CONFÉRENCES SURL'AHMÉNIE 4
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Les vieux temples païens, les antiques statues des dieux, les coupes jadis ciselées et recouvertes de formules talismaniques, les broderies la parure courante des prêtres qui constituaient des anciens cultes étaient, à leur manière, des oeuvres d'art. Mais, de tout cela, il ne survit, quant à présent, aucun vestige en ce qui concerne l'Arménie païenne. Tout a été ou semble avoir été détruit par le temps, par les invasions et par le zèle quelquefois outrancier des néophytes chrétiens. C'est dire que, dans l'état actuel de nos confont défaut, relatifs les documents naissances, aux arts mineurs et aux arts majeurs de l'Arménie ancienne et anté-chrétienne. A partir du dont on parait le les ornements christianisme, temple et l'autel, ainsi que les costumes et les ustensiles à penser que les du culte, donnent Arméniens appliquèrent aux usages chrétiens ce qu'ils avaient coutume d'employer pour le culte établi païen. Le départ n'est pas rigoureusement entre un objet d'art païen et un objet d'art chrétien, et rien ne ressemble plus à l'aspect extérieur d'un manuscrit dit païen que celui d'un manuscrit réputé chrétien. L'enquête à laquelle je me suis livré, et dont je
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les résultats me propose de vous faire connaître sous une forme aussi brève et aussi claire que possible, nous amène à envisager successivement les arts mineurs et les arts majeurs. Arts mineurs. — A en juger par les objets dès le haut moyen âge d'art que l'on rencontre en Arménie, on peut supposer et admettre que l'art de l'orfèvrerie et celui de la ciselure étaient déjà très en honneur chez les Arméniens de l'antiles plus anciens repréquité. Les documents sentent ces deux branches comme fort anciennes, si l'on s'en réfère aux vieilles reliures en argent ciselé \ recouvrant des Evangiles, des livres de et autres manuscrits tenus pour très prières à la même époque, des précieux. On rencontrait, sur ivoire, tels les manches de objets sculptés poignards et d'épées. On montre encore de vieux des sièges, des tables, recouverts de meubles, d'un fini très remarquable sculptures pour l'époque. En plein moyen âge et aux siècles qui suivirent, ces deux arts, mais surtout l'orfèvrerie, 1. Cf. F. MACLER, Miniatures arméniennes... (Paris, 1913), fig. 185 et 186, et Documentsd'art arméniens... {Paris, 1924), flg. 257-260.
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prirent une très grande extension chez les Arméun tel degré de perfecniens, et y atteignirent ciseleurs et les tionnement, que les meilleurs plus habiles orfèvres des sultans de Turquie et, dans une certaine mesure, des chahs de Perse, à Ceux de Van étaient étaient des Arméniens. juste titre réputés les plus habiles pour travailler niellé et produire ces délicats objets de l'argent filigrane, que l'on admire encore sans pouvoir et les dépasser. Dans toute la Turquie d'Europe d'Asie, 90 % des orfèvres étaient des Arméniens. Ce sont eux qui ont fabriqué les bijoux des suldes Duz ne tarda tans 1, et la famille arménienne pas à devenir les orfèvres attitrés du Palais. Les mis en vente à fameux bijoux d'Abd-ul-Hamid, de 1909, c'est-à-dire Paris après la révolution étaient de ce sultan, après le détrônement presque tous fabriqués par des Arméniens. (Amida, p. 352), cité D'après M. Strzygowski art and Archaeology, par M. Dalton (Byzantine la patrie est probablement p. 496), l'Arménie cloisonnée. place) de l'émaillerie (the possible Dalton pense que c'est la Syrie, la Mésopotamie et les contrées s'étendant entre cette dernière et 1. Voir le Bulletin de l'art ancien el moderne,janvier 1927, à propos de l'exposition d'orfèvrerie d'A. Sakiz.
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le Caucase, qui sont les pays d'origine de l'émaillerie cloisonnée. Cet art arménien a dévié de son objet premier, des Turcs, qui était religieux et, sous la domination il a été appliqué à toutes sortes d'objets, coupes, de parure soucoupes, tasses et surtout ornements pour les femmes et les hommes: boucles d'oreilles, boîtes colliers, bracelets, bagues, porte-cigarettes, à tabac, cannes ciselées, bouts de narghilé, etc. . Ces arts, jusqu'à présent envisagés, orfèvrerie, ciselure, émaillerie cloisonnée, furent aussi exportés par les Arméniens. Tous les Arméniens, dont je vous ai parlé dans ma première causerie, en volontairement ou à contre-coeur, s'expatriant avec eux et ces objets d'art et leurs emportèrent secrets de fabrication, soit pour en faire des soit enfin comme cadeaux, soit pour en trafiquer, modèles pour en fabriquer de nouveaux dans les pays où ils s'établissaient. se sont acquis, au Quelques villes d'Arménie cours des âges, une juste réputation par l'habileté de leurs telles entre artisans; étaient, autres : Van, Erzeroum, Césarée de Arabkir, Sivas. Cappadoce, La ciselure ne se faisant plus seulement sur le bois et le métal, mais aussi sur les l'ivoire, TROISCONFÉRENCES SURL'ARMÉNIB 4*
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d'habiles orfèvres arméniens, pierres précieuses, établis à Paris depuis une quarantaine d'années, artistes et se sont ont fait oeuvre de véritables très en vue. Depuis que les créé des situations de Van se sont installés relaorfèvres arméniens il s'est fait dans nombreux à Paris, tivement de notre capitale une véritable industrialisation avec plaisir et l'on relèvera la ciselure vanique, qu'un grand nombre de ces gens de Van, s'établissant peu à peu sur le sol de la jeune répuet développé y ont propagé blique arménienne, dans la l'art pratiquaient que leurs ancêtres du Vaspourakan. capitale séculaire du tapis est fort ancienne en ArméL'industrie nie. Déjà au vme siècle de notre ère, l'historien Ibn-Khaldoun rapporte que l'Arménie acquittait avec ses tapis les redevances qu'elle devait à la cour arabe de Bagdad. Et plus tard, au xme siècle, fournit de précieux renseignements Yakout sur la fabrication des tapis arméniens dans la ville de Van et sur son territoire, le Vaspourakan. Les artisans arméniens surent tirer du vermisseau connu sous le nom de Kirmiz, une purpurifère, teinture qui fit, à juste titre et pendant longsi méritée des tapis armétemps, la réputation niens. Al-Beladhori rapporte que la ville d'Arta-
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« la ville chat, reçut le nom de Karyat-al-Kirmiz de la couleur rouge » pour la qualité extraordinaire de ses teintures. Le tapis, tel que nous l'entendons aujourd'hui, c'est-à-dire à courte est relativement laine, moderne en Arménie : il ne remonte pas au delà du xvne siècle. Les carpettes ou tapis à poils ras étaient certainement plus anciennes. On peut faire remonter au xne siècle les beaux alors que les tapis tapis de l'Arméno-Cilicie, persans les plus estimés ne remontent pas plus haut que le xvie siècle. Il en existe peut-être encore trois ou quatre, actuellement connus dans le monde. Les régions de l'Arménie les qui produisaient étaient tapis les plus réputés Dersim, Chabin Karahissar, Carpette?),
Erzeroum, Kharpout Diarbékir et Mouch.
(Kharbert—
Broderies. — La Broderie fut de tous temps en le honneur chez les Arméniens, même avant christianisme. de cette nouAprès l'introduction velle religion dans le pays, la broderie prit une très grande extension, à cause des ornements sacerdotaux décrit (flg. 2 et 3). Elisée vardapet avec complaisance les costumes des grandes
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dames et des seigneurs de l'ancienne Arménie, notamment ceux de Vasak. Dans toutes les provinces de l'Arménie, l'art de la broderie était pratiqué. Il variait souvent, non seulement mais d'une province à l'autre, aussi d'un canton, voire d'un village, à l'autre. Les matériaux couramment employés pour la broderie, et qui lui assuraient une durée à toute et la épreuve, étaient le fil d'or, le fil d'argent soie aux couleurs variant à l'infini (fig. 4 et 5). Les femmes, aussi bien dans les villes qu'à la brodés. des habits Les campagne, portaient hommes eux-mêmes avaient une certaine coquetterie à se parer de vêtements richement brodés et bigarrés. En même temps que la broderie, la dentelle était très cultivée et couramment en pratiquée des derniers masArménie, jusqu'à l'époque sacres. Ce n'était pas rare de voir du linge et des costumes entièrement faits en dentelle, ainsi du reste que des rideaux et des couvertures. Depuis colonie arménienne à qu'il y a une importante travaillée par des Paris, la dentelle, habilement dames exilées, de la haute société, commence à se répandre sur le marché de notre capitale et à avoir un certain succès (fig. 6, 7, 8,).
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Faïences. — L'art de la faïence est relativement moderne en Arménie. Les documents manquent pour remonter à l'origine de cet art au delà du xvne siècle. Certaines faïences anciennes, qui sont fort cotées chez les antiquairesmodernes telles les Koutayha, les persanes et celles de arménienne Damas, sont sûrement de fabrication ou à tout le moins exécutées par des artistes et des artisans d'origine arménienne. Ces faïences, monochromes ou polychromes, fussent-elles des dessins et des motifs portent non seulement dans les tapis et les broderies que l'on rencontre des mais aussi et assez fréquemment, arméniens, d'Arméniens en caractères signatures persans ou en caractères ce qui indique que, de arméniens, ou l'artisan était arménien. Elles fait, l'artiste sont de beaucoup les plus estimées parmi les de l'Orient. faïences qui proviennent de la plupart Enfin, on notera que l'intérieur des palais des sultans de Constantinople, orné de fleurs stylisées, d'animaux de difféd'oiseaux, rentes sortes, était certainement dû à des ornementistes arméniens. On s'en persuadera aisément en comparant ces motifs ornementaux avec ceux, si frédans les vieilles moquents, que l'on rencontre
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saïques
et
dans
les
manuscrits
arméniens.
— Il n'y a pas lieu d'insister majeurs. davantage sur les arts mineurs, mais il convenait de les signaler en passant, pour faire ressortir, et une fois de plus, le goût prononcé qu'avaient qu'ont encore les Arméniens pour tout ce qui est manifestation artistique ou intellectuelle. On a coutume de compter au nombre des arts la peinture la sculpture, majeurs l'architecture, du et la musique. Ce sont autant de produits cerveau et de la main de l'homme où les Arméniens, eux aussi, ont produit une activité que l'on ne saurait passer sous silence. Quelques mots brefs seront suffisants pour évoquer dans vos esprits la part qui revient au peuple arménien dans ces différentes manifestations de l'art. Il en va des Arméniens comme des autres dans l'ensemble de la peuples qui constituent, création, la grande famille humaine. Et chez eux, comme ailleurs, est la première l'architecture venue les manifestations parmi artistiques, puisqu'elle répond au besoin inné chez l'homme, de bâtir et d'orner sa demeure. Puis, l'homme ancien étant par essence religieux, il ne tarda pas à construire les demeures de ses dieux et à les Arts
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le degré de civilisation où il orner, suivant sa propre demeure et celle de vivait, adaptant ses divinités aux conditions de temps, de lieux, de matériaux utilisés et surtout de climats. Une maison du nord, à toit pointu pour supporter au mieux le poids des neiges hivernales, ne ressemblera en rien à la demeure des méridionaux, où il ne neige pas et où la famille passe une partie de son existence sur les toits, pour jouir de la fraîcheur relative des nuits d'Orient, C'est dire que l'architecture est un art essentiellement créateur et les Arméniens, dans ce domaine comme dans tant d'autres, ont véritablement fait oeuvre créatrice. Il semble au contraire et la que la sculpture peinture soient avant tout soumises à la loi de l'imitation et, dans ces deux domaines égalen'ont pas fait exception à ment, les Arméniens la règle générale, tout en produisant des oeuvres fortement et d'une inspiration originales que l'on pourrait, sans crainte du paradoxe, qualifier de créatrice. Selon toute vraisemblance, chez les anciens comme chez les autres peuples qui Arméniens, naissaient à la civilisation, les sculptures, comme du reste les peintures, fussent-elles murales ou
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faisaient partie intésous forme de mosaïques, à orner. grante des édifices qu'elles contribuaient Ce n'est qu'avec le temps qu'elles se détachèrent des temples et des églises, pour se dresser, isolées, sur les places publiques, dans les jardins, aux carrefours des chemins et des routes. Et les peind'être de simples décorations cessant tures, à leur tour des tableaux ou murales, formèrent isolés. des monuments Tandis que l'architecte créait, pour édifier la demeure des hommes et des dieux, le sculpteur et le peintre se bornaient à donner des imitations, aussi fidèles que possible, des objets réels qu'ils de leurs semblables, à l'admiration proposaient ou des objets irréels mais composés d'éléments de leurs conréels qu'ils offraient à l'adoration temporains. du passé artistique de l'Arménie L'étude montre à l'envi que son peuple eut de tout temps un goût très prononcé pour l'art de bâtir. Ce qui reste de leur ancienne architecture prouve que savaient produire une excellente les Arméniens et qu'ils étaient heureusement doués maçonnerie pour les arts décoratifs. Il ne faut pas remonter bien haut dans l'histoire générale de l'architecture pour constater
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qu'on ne faisait aucun cas de l'art de bâtir chez les Arméniens. On devra même descendre jusde Brosqu'aux noms de Dubois de Montpéreux, set et de Choisy pour trouver une première étuda sérieuse d'un art que l'on ignorait jusqu'alors. Mais dès les voyages et les publications de ces la voie allait s'élargir dans laquelle pionniers, les Charles Diehl, les Marr, les Gabriel Millet s'engageaient pour étudier au vrai les débuts et le développement del'art architectural arménien. Toutefois, ceux des savants contemporains qui fournirent le plus grand effort dans ce nouveau furent sans conteste l'archichamp d'activité tecte arménien Thôramanian et le professeur autrichien Strzygowski. Sans vouloir entrer dans le détail et ne désirant vous proposer qu'une esquisse brossée à grands traits, je me bornerai aux quelques indications suivantes, empruntées pour la plus grande part aux divers travaux archéologiques de M. Thôramanian. arménienne D'après ce savant, l'architecture aurait depuis son origine, 1, passé par quatre 1. Cf. ma traduction CTETIENNE DE TARÔN,Histoire universelle... [Paris, 1917), in-8°, p. LXXXIet suiv. mois CONFÉRENCES SURL'AHMÉNIE 5
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sous les ruphases que l'on peut répartir briques suivantes : dans ordinaires, a) Style des constructions de climat, de milieu ont lequel les conditions joué un rôle important; d'une développé 6) Style d'ornementation, façon différente dans chaque province, suivant le et conformédegré de culture de la population ment aussi aux matières premières dont disposaient les architectes; c) Style religieux, spécial aux temples de religions diverses, et où les divisions et les dispositions intérieures et extérieures sont en conformité avec les rites et les indications du prêtre; d) Style politique et économique, appliqué aux monuments publics, aux habitations particuaffectées aux besoins lières, aux constructions économiques; les e) Enfin, le style militaire, qui comprenait les murailles, les fossés. fortifications, L'Arménie a, au cours des âges, connu et pratiqué ces différents styles. Parmi eux, l'effort des savants et des archéorelilogues a surtout porté sur l'architecture gieuse. C'est celle que l'on a, jusqu'à présent, le plus étudiée
et le mieux
fait connaître.
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l'architecture chréD'après Thôramanian, tienne des Arméniens, qui commence, au iveve siècle et se termine au xive, a eu quatre renaissances : 1° La première époque va du ive au vne siècle; elle subit l'influence de l'architecture romaine dans certaines de ses moulures; c'est ainsi que la cathédrale d'Etchmiadzin a conservé une corniche ornée de modillons; dans les autres parties de la cathédrale, il n'y a rien qui puisse révéler à directe de l'architecture coup sûr l'influence romaine; 2° C'est probablement à la fin du vie siècle que la deuxième renaissance de l'archicommença tecture arménienne. Car, dès le vne siècle, elle suit une direction tout autre. L'influence romaine a disparu; on a affaire ici à des transitions des styles syrien et sassanide. A la fin du vne siècle, l'architecture arménienne semble subir un temps d'arrêt. Du vine au ixe, on ne relève la mention d'aucune construction architecturale. Ce silence doit être attribué selon toute vraisemblance, aux calamités qui suivirent des Arabes l'arrivée en Arménie; 3° Les chefs-d'oeuvre
de la troisième
renais-
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sance architecturale en Arménie sont la cathédrale d'Ani et l'églisedeSaint-Grégoire. C'est une à l'infini; non seulement époque de complications chaque artiste cherche à dépasser son confrère, artismais il s'efforce de créer des nouveautés tiques, ne voulant pas se répéter lui-même. Cette troisième renaissance dura deux siècles. Alp Arslan vint, qui détruisit tout sur son passage, et ce fut, pendant cent vingt ans, la mort et la dévastation turque; 4° En 1198, lorsque l'Arménie passa sous la domination géorgienne, la quatrième renaissance du style arménien commence avec une activité merveilleuse et couvre le pays d'un art nouveau. A cette époque, on construit des églises, des châdes ponts, des chaussées, de nomteaux-forts, breux monuments publics. de l'anCe nouveau style est la continuation de sculptures extraordicien, mais surchargé naires, nouvelles. On dénomme ce style « arabe » ou « seldjoukide », sans que la raison en soit bien établie. Ge dernier style arménien est purement oriental; il n'y a rien de grec ni de romain; c'est un style composite, qui n'est ni arabe ni seldjoukide.
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Il rappelle plutôt le style persan, qui fut cularabe. tivé en Perse sous la domination renaissance Cette quatrième prit fin après la deuxième moitié du xine siècle, et ne fut suivie d'aucune autre. le style pur arménien En dehors de l'Arménie, Il ne saurait être question se rencontre partout. les questions de traiter, d'une façon exhaustive, subies ou exercées par l'art arméd'influences, considérations à quelques nien. On se bornera brèves d'ordre général et à quelques indications mais aussi claires que possible. entre l'art incontestables S'il y a des rapports et le syrien, il se peut aussi que l'Ararménien comme du reste la Perse et l'Iran septende l'ancien art trional, ait conservé des traditions et même de la Chaldée. de la Mésopotamie les peintures En ce qui concerne murales, il semble bien qu'au début, en Arménie, on se soit dans le pays sous l'indécidé à les introduire Les fresques, dont fluence syriaque et byzantine. un on a relevé quelques traces à Ani, dénotent ménie,
h moins qu'ils ne style et un usage byzantins, Et soient cappadociens. plus spécifiquement après la prise d'Ani par les Turcs, au xie siècle, se répandant dans tout le les artistes arméniens,
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fort bien prooriental chrétien, purent armépas purement pager un usage qui n'était nien. C'est ainsi que l'on trouve en Egypte, au xie siècle, des peintres qui étaient certainement arménienne. On a relevé au « monasd'origine tère blanc », près de Sohag, une peinture accomd'une arménienne pagnée inscription que le P. Dachian a datée avec précision de l'an 1073 de J.-C. Des peintres arméniens ont certainement travaillé dans le « Monastère Rouge », comme dans le « Monastère Blanc ». Et les fresques d'Esneh dénotent une inincontestablement fluence arménienne, au même titre au moins que celles du monastère de Saint-Siméon à Assouân. Je suis trop incompétent en matière d'art pour à esquisser, chercher même à grands traits, les influences que l'Arménie peut avoir exercées, non seulement chez ses voisins immédiats, mais dans des pays plus éloignés. ainsi que M. Strzygowski C'est considère l'église de Saint-Germigny-des-Prés, près d'Orsur un plan léans, comme ayant été construite monde
arménien
un Visigoth par l'évêque Théodulfe, Et cette église de Saint-Germignyd'Espagne. comme certaines et des-Prés, églises d'Oviedo, au rxe siècle^ bien que n'étant pas antérieure
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continuerait une tradition arméno-visigothe. les Visigoths, dans leur D'après M. Strzygowski, marche vers l'occident, se seraient faits accomarméorientaux, pagner par des constructeurs niens selon toute vraisemblance. Ces questions d'influence sont fort délicates à traiter. Je n'en veux citer ici qu'un exemple, relatif à la coupole ou dôme conique arménien. On a suffisamment relevé déjà que les toits des coniques des dômes sont un trait distinctif églises arméniennes; et, quoi qu'on en ait écrit, on n'est pas en droit de les confondre avec la coupole. Choisy, un des premiers 1, a signalé que « la coupole était connue des Assyriens : ses deux variétés principales, la coupole surhaussée et la coupole sphérique sont nettement figurées sur un bas-relief de Kouioundjik ». Mais ce dôme conique, si caractéristique de l'architecture ne saurait se conarménienne, fondre avec une coupole sphérique et, ici encore, le dôme conique Choisy a fort bien caractérisé des églises arméniennes : « La coupole arménienne présente l'aspect d'un cône reposant sur 1. Cf. A. CHOISY,L'art de bâtir chezles Byzantins... (Paris, 1883),in-4°, p. 153.
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d'un tambour des pendentifs par l'intermédiaire est le Le type usuel des pendentifs cylindrique. type byzantin, en triangle sphérique : cela dénote avec Constantinople, des attaches qui font de un art mixte, demiarménienne l'architecture Quant à la forme si persan et demi-byzantin. du dôme, elle se justifie, comme caractéristique en de la construction l'ogive, par les convenances si facile à bâtir en pierre. La coupole sphérique, en pierre qu'au prix d'une brique, ne s'appareille et elle exige clans sa partie taille compliquée supérieure une plate-forme faisant cintre. L'avantage du tracé conique est d'abord de simplifier la ensuite et surtout, de permettre l'appareil; du pose sans cintrage : pourvu que l'inclinaison cône soit suffisamment suffit raide, le frottement les pierres en surplomb, et le pour maintenir dôme se monte sans plus de difficulté qu'un mur droit. Cet ingénieux profil sera celui de tous les dômes bâtis du ixe au xie siècle en Arménie. De ce type, franchissant le Caucase, pasl'Arménie, sera aux Turcs Seldjoukides; \ par une de ces erreurs qui sont le signe des arts de seconde main, les Seldjoukides le traduiront en brique. Ils le 1. Cf. Auguste CHOISY,Histoire de l'architecture... [Paris, 1899),t. II, p. 21-23.
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d'Iconium où s'étenà Nicée, partout porteront dra leur domination ». La question de la coupole et de la voûte se le singulièrement lorsque, quittant complique domaine des influences subies par l'Arménie, on exercées par elle. envisage celui d'influences Je n'en veux citer aujourd'hui qu'un exemple : Dans une communication de accompagnée projections, que fit M. Bals au premier Congrès international des Etudes byzantines, ce savant expose que « les voûtes des églises moldaves présentent une particularité : les caractéristique quatre grands arcs du naos supportent, par l'inun court tambour termédiaire des pendentifs, dont le diamètre est encore réduit cylindrique, par quatre autres arcs obliques placés à 45° et qui reposent sur les clefs des premiers arcs. Cette ne se retrouve dans aucun pays construction des disvoisin de la Moldavie, mais on retrouve positions, sinon pas exactement pareilles, tout au moins voisines ou dérivant du même principe, dans diverses régions qui se sont trouvées sous C'est donc l'influence constructive de l'Iran. dans cette région que l'on doit rechercher l'oria Cette construction gine des arcs moldaves. été transmise d'Orient en Moldavie probablement TKOIS 5* CONFÉRENCES EUHL'ARMÉNIE
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des Arméniens immigrés en par l'intermédiaire Europe du xne au xvie siècle. l'idée de l'influence M. N. Iorga approuve orientale. Mais il demande que parmi les très nombreuses influences subies par la Moldavie, on n'oublie pas celle de la Crimée voisine, qui a des éléments grecs et a dû offrir des synthèses intéEtienne-le-Grand ressantes dansson architecture. avait épousé une princesse grecque de Mangoup. Les éléments de la manière de construire la voûte en Moldavie ne viendraient-ils pas de la synthèse en question? Et cela d'autant plus qu'on ne ce connaît arméniens, pas ici d'architectes plus ou moins suspect peuple étant considéré seraient à d'hérésie. Les ruines de Mangoup explorer. Enfin « M. Puig relève une école espagnole qui le même système, au xne siècle, offre exactement que la coupole moldave. Il y a là un parallélisme intéressant (non pas influence). On sait que les Espagnols ont été à l'école de Cordoue. M. Puig espère qu'on aura un jour la possibilité de reconstituer les principes des églises moldaves K plus 1. Compte-rendu du /or Congrès international des Etudes byzantines,Bucarest. 1924,publié parC. MAIUNESCU (Bucarest, 1925), p. 24-25.
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anciennes ». que celles que nous connaissons Je me rangerai volontiers à l'avis de ces savants Mais je me éminents, qui sont tous des maîtres. toutefois de faire remarquer qu'en permettrai on doit plutôt s'attendre matière architecturale, une influence arménienne à rencontrer que grecque dans les régions situées à l'ouest de la en Moldavie et en Galicie. Crimée, notamment Lors de la toute-puissance en génoise et tatare et les Juifs caCrimée, ce sont les Arméniens raïtes qui ont été le principe véhiculaire de la orientale en passe de conquérir civilisation l'occident. Texier a déjà signalé, il y a Quant à l'Espagne, longtemps, que les arcs en forme de fer à cheval de Tékor (Digor), que l'on croyait jusqu'alors en Arménie, dès arabes, avaient leur prototype le ve siècle. Ce sont donc les Arméniens qui ont fourni aux Arabes cet élément architectonique et l'on fortune, qui a eu une si prodigieuse du Xe siècle les arcs en retrouve dans l'Espagne forme de fer à cheval de Tékor, du ve siècle 1. Et Choisy me semble avoir parfaitement établi 1. Cf. Charles Texier, Description de l'Arménie, la Pêne et la Mésopotamie...lre partie... (Paris, 1842),grand in-fol., passim. s. v. Dighour.
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que le plein cintre et le fer à cheval étaient conen Arménie, dès le nus et d'un usage courant Ve siècle, lorsqu'il écrit : « Si l'ogive è deux centres est la forme natuen pierre, relle de l'arc surhaussé qui s'exécute nulle part elle ne convenait mieux qu'en Arméà la nie : elle y fut admise, et très probablement en Syrie. On la date même où elle se généralisait de la cathédrale vers l'époque voit apparaître l'arc arméd'Ani (an 1010 environ); jusque-là, nien était le plein cintre ou le fer à cheval etc.) » x. (Dighour, Usunlar, Kouthaïs, Mieux que de longs discours, quelques vues projetées sur l'écran, vous feront saisir sur le vif arménienne et par ce que fut l'architecture que quelles phases elle a passé, en considérant s'étend sur une son développement historique échelle allant du ve au xive siècle de notre ère. Le premier type semble être celui de la baside Tékor et par les monuments lique, représenté de Erérouq. Ce type rappelle celui de la basilique à syrienne, telle qu'on la trouve à Tourmanin, Kal'at Seman et ailleurs. Le second type, en suivant l'ordre du temps, 1. Auguste CHOISY,Histoire de Varchileclure(Paris.. 1899), t. II, p. 21-23.
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par la rolonde, reposant sur une ou polygonale. On cite, comme de ce type, les églises de Zwarreprésentants thnots près d'Etchmiadzin, de Saint-Grégoire à des AbouAni, et la chapelle de Saint-Grégoire è Ani. ghamrents, également Mais le type le plus fréquent en Arménie est celui du carré ou du rectangle presque carré, absides demi-circuflanqué ou non de quatre laires faisant saillie à l'extérieur. Dans ce type on range la cathédrale d'Etcharchitectural, de Ripsimê miadzin, la chapelle près d'Etchmiadzin, l'église des saints apôtres à Ani et la cathédrale d'Ani. Voici quelques vues d'Arménie, qui vous donneront une idée, sommaire mais suffisante, de ces trois genres architecturaux : serait constitué base circulaire
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1. C'est
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la basilique de Erérouk ou bien que de Gezel-Goulé, église magnifique, dimensions 23 mètres de long sur modestes, 14 de large 1. L'église est actuellement en ruines; on y voyait dix fenêtres et trois portes. Erérouq
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.1.Voir la vue donnée par moi dans Trois Conférencessur l'Arménie faites à l'Université de Strasbourg... (Paris, 1927), fio- ï
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d'abord
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représente le type de la basilique, introduit de le Syrie en Arménie, à une époque avoisinant Ve siècle. Le bâtiment primitif était recouvert de tuiles et d'une toiture en charpente. L'usage du bois disparut dans les cathédrales rapidement arméniennes, pour céder le pas à la pierre de taille. 2. Un deuxième représentant de la basilique arménienne est l'église de Tékor ou Digor, où les frontons indiquent l'influence de la vieille architecture romaine 1. Ce n'est qu'après plusieurs remaniements que l'église de Tékor a revêtu la forme qu'on lui connaît aujourd'hui. Quatre la coupole, et les arcs en piliers soutenaient forme de fer à cheval, que l'on croyait d'origine arméniens. sarrazine, sont essentiellement 3. Le second type est constitué par la rotonde. On admire surtout, comme représentant de ce type, la chapelle du Rédempteur à Ani, qui aurait été construite au xie siècle, pour y déposer un morceau de la vraie croix, rapporté de Constantinople par le prince Ablgharib 2. 4. Un deuxième représentant de la rotonde est 1. Cf.F. MACLER, Trois Conférences...(Paris, 1927),fig. 2. 2. Cf. F. MACLER, Trois Conférences...(Paris, 1927),ûg. 16.
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la chapelle deSaint-Grégoiredes Aboughamrents, également à Ani 1. Elle serait à peu près contemde Paris. poraine de la Sainte-Chapelle . 5. Le troisième type, le plus fréquent en Arménie, est celui du carré ou du rectangle presque carré, flanqué ou non de quatre absides demi-circulaires faisant saillie à l'extérieur. Les meilleurs témoins de ce type sont la cathédrale d'Elchmiadzin, la chapelle de Ripsimê près d'Etchmiadzin, la cathédrale d'Ani. La cathédrale d'Etchmiadzin est le plus de la nation arménienne. Le grand sanctuaire monument occupe le centre d'une aire très vaste, flanquée de chaque côté de bâtiments masqués par les arbres. D'après la tradition arménienne, la cathédrale aurait d'Etchmiadzin été construite par Grégoire l'Illuminateur, au début du IVe siècle. Le bâtiment aurait été recouvert d'un toit en bois. Cet état de choses aurait duré jusKoqu'en 618, époque à laquelle le catholicos mitas aurait remplacé la construction en bois par un édifice en pierre 2. 6. La cathédrale
d'Etchmiadzin
a subi diverses
1. Cf. F. MACLER, Trois Conférences...(Paris, 1927),flg. 15. 2. Cf. F. MACLEJÎ, Trois Conférences...(Paris, 1927), fig. 18.
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au cours des âges, et c'est seulemodifications ment en 1656 que les patriarches Philippos et Yakobos firent construire le clocher 1, qui a servi de modèle au clocher de l'église arménienne de Bucarest (fig. 9). 7. La chapelle de Ripsimê a, est un autre type carrée ou rectanparfait de l'église arménienne gulaire. Si l'on fait, par la pensée, abstraction du clocher, à gauche du bâtiment, qui a été construit en 1652 par le catholicos Philippos, on a, dans la chapelle de Ripsimê, le type le plus pur de la vieille architecture arménienne : la croix enfermée dans un rectangle carré, presque aucune abside ne faisant saillie sur les façades. Les quatre frontons sont.identiques; deux niches aveugles sont pratiquées sur chacune des quatre aurait été Cette chapelle parois de l'édifice. reconstruite en pierre, par les soins du catholicos Komitas en 618. A droite de Ripsimê, un bâtiment moderne sert d'habitation au moine chargé de la surveillance du sanctuaire. La chapelle de Gayianê 3, au sud d'Etchmia1. Cf. F. MACLBR, Trois Conférences...(Paris, 1927), fig. 19. 2. Cf. F. MACLBR, op. cit., fig. 26. 8. Cf. F. MACLBR, Trois Conférences...[Paris, 1927),fig. 27 et 28,
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armédzin, date également, d'après la tradition Elle a été nienne, de Grégoire Pllluminateur. en 630 par le catholicos reconstruite entièrement Ezr ou Esdras, et présente plutôt l'aspect d'une basilique. La coupole, qui a été restaurée, repose sur quatre colonnes. 9. La cathédrale d'Ani 1, commencée par les soins du roi bagratide Smbat, fut achevée en 1010 de J.-C. par Katramidê, femme du roi Gagik, fille du roi de Siwniq. L'historien arménien Etienne Asolik de Tarôn rapporte que ce magnifique édifice, aux voûtes élancées, constituait un sanctuaire surmonté d'une couadmirable, au ciel. Katramidê orna cette pole semblable aux fleurs de pourpre, tiséglise de tapisseries, sées d'or, et peintes de diverses couleurs, de vases en or et en argent, brillant du plus vif éclat, la sainte cathédrale magnificences qui rendaient d;Ani aussi resplendissante que la voûte céleste. Smbat avait doté l'église d'une magnifique lampe en cristal, qu'il avait fait venir des Indes. 10. Le village de Salmosavanq possède une située et qui domine la église 2. admirablement 1. Cf. F. MACLER, Trois Conférences...(Paris, 1927), fig. 30. 2. Cf. F. MACLER, Trois Conférences...[Paris, 1927),fig. 35 et 36,
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vallée rocheuse et sauvage du Oasagh La population est moitié tatare, moitié arménienne, et ces deux groupements vivent d'ordinaire en bonne intelligence. Les musulmans sont trop pauvres pour avoir une mosquée, et, lorsqu'ils veulent prier, ils vont à l'église. Cette de Salmosavanq date du église xine siècle; elle est encore bien conservée, — du moins quand je l'ai photographiée en 1909 — et fidèlement le type des églises arméreprésente niennes du moyen âge. A partir du xme siècle, en effet, on n'a plus de représentant fidèle de la arménienne. Cette architecture pure architecture subit des influences étrangères et dégénère rapidement. 11. On peut se faire une idée de l'état délabré des vieilles églises arméniennes — lorsque, tombées en ruines, elles ne sont pas restaurées — en regardant cette vue de Hohannavanq ou Yohanc'est-à-dire le couvent de Jean 1. On navanq, du monument, remarque, à l'extérieur quantité de croix et de motifs ornementaux très variés, date du sculptés sur les parois. La construction xme siècle, comme celle de Salmosavanq. F.
ACLEB,Trois Conférences...(Paris, 1927),flg. 37.
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12. Ochakan 1. L'église qui renferme le tomde saint Mesrop, est une resbeau traditionnel tauration sous le moderne, qui fut achevée catholicat de Georges IV, en 1879, d'après l'inscription qu'on lit au-dessus de la porte d'entrée. On a démoli une église du ve ou du vie siècle, qui avait sa valeur historique, et on l'a remplacée par une église moderne, sans goût, mais qui a l'avanun sanctuaire tage de renfermer particulièrement précieux aux yeux des populations environnantes. Ces quelques vues serontsuffisantes, jevoudrais l'espérer, pour vous donner une idée de l'ancienne architecture arménienne. Dans cette la sculpture et une peinture d'un architecture, certain genre ont joué un rôle de premier plan, et de signaler en quelques mots. qu'il est intéressant Au dire de certains voyageurs, de notamment on relevait Lynch I, p. 369-390), (Armenia, encore, dans ces dernières années, des traces de cathédrale peintures murales dans la magnifique d'Ani. Elles ont maintenant disparu. Mais l'usage de la fresque n'a pas dû être très répandu en Arménie. On y suppléait par une décoration I- Cf. F. MACLER,Trois Conférences,..(Paris, 1927), fig. 38.
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à arménienne, d'un coloris spécial. La sculpture ses motifs de la byzantine, rencontre emprunte aux lacis de passementerie et, comme l'a fort observé Choisy 1, c'étaient des galons justement les panneaux ou faisaient nattés qui encadraient bordure le long des frises. Choisy a excellemment est presque fait ressortir que « cette décoration ce qui lui donne un hors d'échelle, toujours mais en même temps une caractère étrange, puissance d'effet singulière ». Et le savant historien de l'architecture d'ajouter que s'empresse « le style des ornements se reconnaît arméniens du de la Russie dans toute l'architecture il est surtout accusé en Sud et du Bas-Danube; Serbie ». alors et sans peine que, dans On comprendra la sculpture l'emporte sur une telle architecture, « La marqueterie la de marbre, la peinture. de verre, si elles ne sont pas absolumosaïque ment proscrites, sont réduites à un rôle tout à fait secondaire » (Choisy, op. cit., p. 33). Dès lors, et comme l'oeil aime quand même le jeu des coude fresques et de leurs, on supplée à l'absence mosaïques par le jeu alterné d'assises en pierres 1. Histoire de l'architecture{Paris, 1899), II, p. 30.
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et grises, ou blanches. rouges, noires L'effet, d'une sobriété voulue,n'en est pas moins des plus agréables à l'oeil. Je m'excuse, Messieurs, de retenir si longtemps votre attention et d'abuser, de apparemment, votre patience Mais il me pemble que l'on ne saurait prendre congé des Arméniens et de leur art, sans consacrer quelques mots à leurs manuscrits et à leur enluminure. On exécuta peut-être (copie et enluminure) des manuscrits arméniens dès le vne ou le vuie siècle de notre ère. Mais on en a, actuelleIl faut descendre jusment, aucun exemplaire. qu'à la fin du ixe siècle (887) pour voir le premier témoin de la calligraphie dans arménienne, le Tétraévangile dit de Moscou. A partir de cette et de date, les vieux témoins de la calligraphie l'enluminure arméniennes se font moins rares, et l'on a, dans le Tétraévangile d'Etchmiadzin, exécuté en 989, le type parfait du manuscrit arménien bien enluminé, calligraphié avec soin, et d'un texte révisé scrupuleusement. En réalité, c'est à la civilisation bagratide que l'on doit ces premiers témoins de l'art arménien. Et, une fois le mouvement donné, ce nouvel art premier arménien allait suivre sa destinée, en se dévelop-
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en subissant des influences pant progressivement, en ayant ses caractéristiques extérieures, propres et nettement à son et en exerçant tranchées, tour des influences considérables sur les arts et les civilisations qui, dans le monde du monophysisme, relevait de lui, plus ou moins directement; n'est pas encore claide l'alphabet L'origine rement établie. Ce n'est pas le lieu d'examiner ici cette question si compliquée. Mais, dès qu'apparaissent les premiers caractères on a arméniens, affaire à une écriture grosse, rappelant, si l'on veut, l'onciale de notre moyen âge et, par certains traits, la vieille écriture éthiopienne. Avec le temps, et surtout à dater de l'époque xne siècle, les manuscrits arméno-cilicienne, arméniens deviennent l'objet d'une ornementation très riche et très abondante. Ce sont des frontispices multicolores placés en tête du manusaux crit, des bandeaux ou ornements marginaux, couleurs variées, qui décorent la marge droite du feuillet initial; ce sont, au début du texte, des titres en caractères et ornithozoomorphes morphes, dans le dessin desquels les poissons et les oiseaux tiennent la plus grande place. Cette question des oiseaux comme élément constitutif de certaines arméniennes majuscules
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a même été l'objet de discussions entre savants. des inon recherche Car, là comme ailleurs, fluences exercées et des influences subies. M. Emile Mâle (L'art allemand et l'art français du moyen âge, Paris, 1922, p. 30-32) n'hésite pas, et les initiales pour expliquer ornithomorphes des manuscrits à évozoomorphes mérovingiens arméniens où l'on quer l'influence des manuscrits « rencontrait des majuscules faites d'oiseaux qui offraient la plus singulière ressemblance avec les initiales mérovingiennes l'en». Puis, poussant arméniens quête, on releva que ces manuscrits étaient imités et l'on d'originaux égyptiens, « que l'art si étrange des manuscrits comprit n'était mérovingiens pas autre chose que l'art décoratif des chrétiens d'Orient », Il y a du vrai dans cette observation et il suffit de considérer le feuillet 2 du tétraévangile dit de la reine Melqê, conservé à San Lazzaro (Venise), pour se persuader aisément, en voyant une scène de pêche où figurent des crocodiles, qu'on a à faire à un manuscrit ou bien exécuté en Egypte, ou bien reproduisant un original d'inspiration égyptienne. Mais à côté de l'art égyptien il est chrétien, d'autres influences qui se sont exercées au cours
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et du processus de l'art arménien. fort délicates à traide questions convient de poser, si l'on veut un l'histoire vraie et objecjour espérer connaître tive de l'art arménien. Voici quelques projections qui vous donneront Ce sera, et je m'en une idée de cet art arménien. d'un art excuse, une bien petite représentation de la formation Ce sont autant ter, mais qu'il
et qui, malgré cela, varié, multiforme une unité interne et conserve qui le présente : de ses congénères différencie nettement abondant,
13. Un des feuillets de début du téîraévangile et copié en 989 d'Elchmiadzin, qui fut enluminé de l'ère chrétienne, et qui est un des beaux spécimens de la calligraphie et de l'enluminure des K vieux manuscrits du moyen-âge arméniens 14. Un autre feuillet exécuté sur parchemin, écriture onciale le début
de manuscrit, lui aussi et qui renferme en beile de l'évangile selon Luc 2. L'encadrement qui entoure ce texte rappelle par et des sa facture les vieux tapis arméniens, savants se sont demandé si c'étaient les tapis qui avaient servi de modèles aux enlumineurs, ou si, 1. Cf. F. MACLER,Trois conférences...JParis, 1927), flg. 33. 2. Cf. F. Mi.ci.iSHjop. cit., flg. 40.
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au contraire ce ne sont pas les vieilles enluminures qu'il convient de tenir pour les prototypes des tapis. 15. Avec le s'affine,
le temps, la miniature arménienne et plus dessin est plus recherché constitué à l'aide d'animaux, fouillé, l'ornement surtout voici d'oiseaux 1, devient prédominant; une vue où l'on verra réunis ces différents éléments de l'ornementation de beaux manuscrits arméniens. 16. Il n'est pas sans intérêt de rappeler que, dès le Xe siècle, les maîtres arméenlumineurs niens utilisent les marges de leurs parchemins, des des scènes, notamment pour représenter scènes bibliques, et vous verrez avec plaisir ce vieux feuillet de l'évangile où d'Etchmiadzin, l'on a l'une des plus anciennes représentations de la Nativité 2. Les trois mages ont une coiffure d'où pendent et comme des rubans, spéciale, l'on observera que cette coiffure est devenue chez les enlumineurs arméniens la coiffure des médecins, jusque très avant dans le moyen âge. 17. Voici une autre
représentation
de la Nati-
1. Cf. F. MACLER, Trois conférences...[ParÎ9)kl'927)/Çg.'41. 2. CI. F. MACLER,Trois Confêrenca,,,Joeàfis. 1927), ûg.AV. \ ' •''.~>v / '•"-' / , TRCISC»NF£HEH«ES 6 sua L'AHMÉNIB J
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vile, beaucoup plus richement ornée, et où l'artiste a réuni tous les éléments de cette scène : en dans les hauts haut, l'ange qui fait l'annonce des rois mages; en lieux; au milieu, l'adoration bas, un berger qui joue de la flûte devant ses moutons et, en bas également, à gauche, Joseph assis et plongé dans une profonde méditation tandis que le centre de la miniature est occupé par la jeune mère et son enfant 1. 18. Voilà, pour en terminer avec les manusarménienne. leurs crits, une reliure Lorsque et c'était souvent le moyens le leur permettaient, cas, les riches Arméniens faisaient renfermer leurs dans des reliures de grand précieux manuscrits prix, en argent ciselé et doré, et vous prendrez sans doute plaisir à voir une de ces reliures arméniennes en argent ciselé et repoussé, qui fut exécutée à Césarée de Gappadoce et qui date du xvne siècle 2. Malgré l'heure qui s'avance, je ne voudrais pas prendre congé des Arméniens et de leur art, sans vous dire quelques mots de leur musique et du 1. Cf. F. MACLER, Trois conférences...[Paris, 1927), flg. 42. 2. Cf. F. MACLER, Trois conférences...[Paris, 1927),B.c.43.
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soin très particulier qu'ils ont mis à cultiver ce canton très déterminé de l'art. Sans parler des chansons païennes de Koghtn, dont on ne sait pas grand'chose, il serasansdoute de vous rappeler opportun qu'un écrivain arménien du xme siècle, Kirakos de Gantzac, donne une précision de historique qu'il est intéressant relever : « Il arriva au catholicos Nersès de se trouver à Or Bagovan pour la fête de la Transfiguration. les hymnes s'étaient si fort multipliées dans les d'un canéglises de l'Arménie, que les chantres ton ignoraient celles de l'autre. Quand un choeur chanta l'hymne de la Transfiguration, le second choeur ne put donner la réplique, et ce fut en vain que l'on essaya sans plusieurs hymnes, trouver celle-là. Alors le pontife sur Nersès, l'invitation de la communauté, prit une décision bonne et avantageuse, ce fut que dans toutes les églises il y eût pour chaque jour une seule liturgie au mystère. On choisit des hommes appropriée toutes les contrées intelligents, qui parcoururent de l'Arménie et établirent l'unité dans le service. La chose subsiste encore » (Traduction Brossel, p. 32). A ce renseignement
fourni
par
Kirakos,
on
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aux celui-ci, très précieux, emprunté études de Pierre musicographiques Aubry, qui écrivait jadis : « Au reste, nous savons que le grand réformateur de la musique liturgique, Baba Hampartà ses élèves en marquant le soum, enseignait de la main sur le genou, temps par un battement et qu'à la fin du xvme siècle, à Constantinople et dans les principaux centres où habitaient à la fois des Grecs et des Arméniens, la grande ambition des musiciens de race arménienne était de se mettre à l'école de leurs collègues d'origine grecque, et pour un tiratsou ou enfant de choeur le dernier mot de la science était de arménien, bien posséder la i^aX-cod].Ainsi les <ia)aal, les chantres grecs, étaient, aux jours de fête, conviés à venir dans les églises arméniennes de Constanchanter les mêlédik...; ainsi un Grec, tinople maître de chant au Phanar, Onophrios de Thad'un riche philanthrope, thavla, à la demande la notation aux Bezdjian, enseignait grecque enfants de choeur arméniens; ainsi Grégoire les églises Lévitis, Grec, fréquentait quoique arméniennes aux pour le plaisir qu'il trouvait chants qu'il y entendait. Enfin la première célébrité de Baba Hampartsoum lui vint de ce que ajoutera savantes
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suivant les uns, ses maîtres, Zenné, Boghos suivant les autres, Yaghouthioun, Maskaladji célèbres par leur science du étaient eux-mêmes chant grec » *. Il convient encore de signaler, toujours d'après les travaux de Pierre Aubry, que la musique arl'influence ménienne, tout en subissant grecque, sur les exerça, elle aussi, une grande influence notamment sur la turque : musiques orientales, « Quand... le réformateur de la musique arméBaba était de nienne, Hampartsoum, requis composer des mélodies nouvelles pour les musiciens turcs du Palais, son inspiration s'ingéniait plutôt à plaire aux oreilles de ses auditeurs qu'à demeurer dans la tradition arménienne... Et « inversement, la musique turque pénétrait de plus en plus dans les églises arméniennes. Nous en avons un témoignage formel dans le sorte le testament qui est en quelque de Baba Hampartsoum et la justificaartistique tion de son oeuvre. Baba expose l'utilité de sa réforme et l'intérêt intacts qu'il y a à conserver les chants de son Eglise liturgiques par une Mémoire,
musicale très précise, séméiographie serve des altérations possibles... 1. Pierre AUBRY,Le rythme tonique..., p. 15. TROUCONFÉRINCBS SURL'ÀKMÉNIB
qui les pré-
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« Nous avons là un premier point qu'on peut considérer comme acquis : c'est la perpétuelle au xvine siècle, de la musique compénétration, des Eglises turque et de la musique liturgique celles-ci fournissant les chanteurs et chrétiennes, les musiciens, celle-là imposant son esthétique et sa théorie » (Aubry, op. cit., p. 41-42). A côté et à la suite de cette musique arménienne religieuse, je crois devoir vous signaler en consacrés à la quelques mots brefs les travaux musique rustique arménienne par le P. Komitas, l'ancien maître de chapelle de la cathédrale d'Etchmiadzin (fïg. 10). « Demandez au paysan arménien, écrivait-il dans le Mercure musical (15 mai 1907, p. 472), le nom de l'endroit où telle chanson a pris naissance; qu'il le sache ou non, il vous nomme un village. Demandez le nom de celui qui l'a comen vogue de ce vilposée, il désigne le chanteur est pour lui lage... La faculté de la composition un don naturel;tous les paysans savent, tantbien que mal, composer et chanter des chansons. Ils l'art de la composition au sein de la apprennent nature, qui est leur école infaillible. Les Arméniens des villes appellent rustiques, villageois, les chants populaires, et ils ont raison, car c'est
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le paysan qui crée la chanson, qui compose l'air; d'une chanson, chaque paydans la composition san à sa part ». d'entrer dans des détails Si je ne craignais trop longs et que vous pourriez tenir pour trop encore, toujours techniques, je vous rappellerais d'après le P. Komitas (S. I. M., p. 489), que « la arménienne des soli musique rustique comprend et des chants choraux. Le solo est chanté par un homme ou par deux. Dans le premier cas, un seul en entier ou parhomme chante une chanson tiellement. « Deux personnes chantent en solo les divers tour à tour, par couplets de la même chanson, sur le même air ou sur un air difféalternance, rent. « Cette manière est d'usage ordinairement dans les chansons amoureuses et satiriques, toutes celles qui par un chant alterné reproduisent les répliques de personnes se querellant, ou bien exprimant l'amour dont elles brûlent. « Le chant choral a trois formes : simple, complexe et mixte. « La forme simple se produit lorsqu'un groupe chante seul la chanson d'un bout à l'autre. « La forme complexe se produit lorsque deux
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deux groupes, ou une personne et un personnes, sur le même air, mais, en s'unisgroupe chantent sant par anneaux ou par noeuds... Parfois, à un choeur s'unit un choeur d'un autre village et, chacun gardant son indépendance, ils rivalisent entre eux en se donnant la réplique... Les formes complexes sont plutôt propres aux chansons de danse. « La forme mixle se produit quand le solo et le sans alternance chant choral se succèdent régulière. On chante de cette façon les chansons de charrue et les chansons le qui accompagnent battage du blé ». de vous proposer une énuméraJe m'excuse en effet, en vous tion aussi riche. Il conviendrait, parlant de musique et en vous donnant des desde rehausser ces rencriptions aussi techniques, de quelques-unes de par l'audition seignements arméniennes. Si j'étais à ces jolies chansons et je prendrais aisément, Paris, je le pourrais plaisir à vous faire connaître le charme infini, la l'art en un mot, de cette douceur, la mélancolie, fût-elle sacrée ou profane. musique arménienne, Pour l'instant, je n'ai pu que vous la décrire et vous avez bien et vous la signaler brièvement, il ne vous voulu me croire sur parole. Toutefois,
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M.Roupen, qui jouera déplaira pas d'entendre de musique et vous deux morceaux populaire, du plaisir que donnera de la sorte un avant-goût à assister à un grand et beau vous éprouveriez concert
arménien
(fig. 11).
de mon exposé, malgré Malgré l'imperfection des renseile caractère quelque peu sporadique gnements que je vous ai fournis, il a dû appatient sa place raître à vos esprits que l'Arménie à travers les parmi les nations qui ont pratiqué, siècles, le culte du beau. Elle tient sa place, et non des moindres, dans l'architecture comme dans la peinture, dans la sculpture aussi bien que dans la musique; et si l'on n'a pas plus de noms à enregistrer, c'est que, bien souvent, les circonsdéfavorables tances ont été nettement a la naissance et au plein épanouissement de l'art chez un peuple qui a presque constamment nagé dans le sang. Imaginez que le peuple arménien ait pu vivre entouré de voisins et librement, tranquillement civilisés et bienveillants, et vous vous représenterez aisément, le en sachant ce qu'il a produit,
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de perfectionnement aurait degré qu'il pu atteindre si les circonstances lui avaient été favorables. et s'il a comL'art, a-t-on dit, est immortel, mencé avec l'humanité il ne finira qu'avec elle. Aussi longtemps qu'il y aura des hommes sur la le culte terre, il s'en trouvera qui pratiqueront du beau en produisant des oeuvres d'art et qu'il se rencontrera des hommes ces pour acquérir objets artistiques. cette vérité d'ordre général, appliTransposez et vous vous perquez-la au peuple arménien, aisément suaderez que l'art, sous ses multiples est un des facteurs qui a le plus manifestations, contribué à assurer la pérennité du largement nom arménien dans les annales de l'humanité. Depuis quelques décades, on s'est accoutumé à ne connaître la nation arménienne et à ne s'intéresser à elle qu'en raison des injustices, des des violations de tout genre dont elle massacres, a été et dont elle est encore la pantelante victime. semble venu de s'occuper Le moment des Arméniens motifs que pour les pour d'autres et la tueries dont ils ont été abreuvés. L'étude
AUTOUR DE L'ART ARMÉNIEN
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de son art aux diverses manifesconnaissance tations ne contribueront pas peu à faire apparaître le peuple arménien sous un jour quelque peu nouveau, mais où il se révélera auréolé d'une gloire et d'une majesté plusieurs fois séculaires.
III A PROPOS
DU
THÉÂTRE
ARMÉNIEN
*
arméL'étude et la connaissance du théâtre nien en Occident étaient encore fort peu répandues à la fin du xixe siècle. Il fallut les masdes Arméniens d'Abd ul sacres par ordre en 1895 et 1896, non seulement Hamid, pour soulever d'indignation ceux qui n'avaient pas un caillou à la place du coeur, mais aussi pour la première sérieuse, provoquer publication consacrée au théâtre arménien. C'est, en effet, dans le numéro du mois de mai 1897 de la Bibliothèque universelle et Revue suisse, une étude p. 351-377, que M. Reader consacrait documentée au théâtre arménien à Tiflis, et cette par première étude, d'ordre général, commençait ces mots, que je me plais à vous rappeler : « Que savons-nous de la vie, des moeurs, des 1. Conférencefaite à la Fondation Carol I, le 3 juillet, 1927.
A PROPOS DU THÉÂTRE
ARMÉNIEN
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et des idées du peuple arménien aspirations que de la Suisse, sourde aux protestations l'Europe, laisse sans pitié massacrer par les fidèles sectazélés du teurs de Mahomet et les serviteurs a sultan rouge »? Malgré les nombreux voyages sur en différentes publiés récemment langues et les Arméniens, nous connaissons l'Arménie intellectuelle et encore très peu la physionomie morale de ce peuple, ces derqui a manifesté niers temps un désir si ardent de secouer le joug séculaire des Kourdes et de commencer une vie nationale à l'exemple d'autres indépendante, anciens vassaux de la Turquie, les Grecs, les Bulgares et les Serbes ». Et l'auteur, continuant son enquête, donne de sur l'établissement d'un précieux renseignements théâtre arménien à Tiflis. Depuis lors, c'est-àdire depuis s'est notablement 1897, ce théâtre enrichi Il ne constitue, de pièces nouvelles. d'autre part, qu'une partie de la manifestation littéraire et théâtrale des Arméniens, de ceux et dont les l'arménien oriental, qui parlent à Tiflis et à Erivan. centres littéraires étaient à ce mouvement littéraire Parallèlement de faire la place très large à oriental, il convient la littérature et au théâtre des Arméniens de TROISCONFERENCES SURL ARMENIE
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
dont les oeuvres sont écrites dans le Turquie, et dont dialecte dénommé arménien occidental, étaient à Constantinople les foyers littéraires et à Smyrne. Sans prétendre à être complet, mais pour vous néanmoins un tableau d'ensemble présenter successibrossé à grands traits, on envisagera vement le théâtre arménien oriental et le théâtre et je voudrais arménien occidental, espérer que le temps ne me fera pas défaut pour que vous de cette simple causerie, une notion conserviez, claire et précise de ce que fut ce suffisamment littéraire chez un des peuples grand mouvement les plus cultivés du Proche Orient.
I
Sans remonter à l'époque déjà lointaine où l'on des pièces grecques sur le théâtre de représentait sans rappeler Tigranokert, que des auteurs arméniens des oeuvres théâtrales à produisirent et à Rome, sans insister Athènes, à Alexandrie sur des manifestations davantage dramatiques qui, comme les tragédies du P. Pidou, à Léopol,
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des sujets nationaux à des spectaproposaient teurs privés de toute représentation théâtrale 1, on arrivera, sans autre préambule, à l'examen et du théâtre à l'analyse arménien qui, vers 1859, fut établi d'une façon permanente à Tiflis. les représentations théâtrales Jusqu'alors, avaient été russes, italiennes et géorgiennes. A cette date, un imprésario arménien, Patkanian, écrit une comédie de moeurs en langue arménienne. Le public se presse à ces premières représentations. La chiquenaude initiale était donnée, le théâtre national arménien était créé, et Patkanian, voyant le succès grandir, compose de nombreuses comédies qui reproduisent fidèlement les moeurs des habitants de Tiflis. Patkanian avait ouvert la voie, dans laquelle devait le véritable fondateur du s'engager théâtre arménien oriental. Gabriel connu en littérature Sandoukiants, sous le nom de Soundoukianis (fig. 12), né à Tiflis en 1825, offre ce spectacle d'un homme qui, issu de la haute aristocratie n'en est arménienne, 1. Cf. F. MACLER,Notices de manuscrits arméniens vus dans quelques bibliothèques de l'Europe centrale, extrait du Journal asiatique, sept.-oct. et nov.-déc. 1913, p. 81, n. lj — et IDEM, Rapport sur une mission scientifique en Galicie et enBukovine... (Paris, 1927), p. 27 et suiv.
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
le plus populaire pas moins le dramaturge qu'ait Aussi se plaît-il à produit la nation arménienne. chercher les sujets de ses pièces dans les milieux les plus humbles et les plus obscurs de la société fin et psychode Tiflis. Observateur arménienne logue profond, il a su donner à ses personnages un soufflé de vie et un réalisme d'action que n'ont atteints ni dépassés ses émules et ses successeurs. révolté contre humaine, Idéaliste,, l'injustice Soundoukiants se plaît à contre le mensonge, le pharisaïsme des faux vertueux et démasquer de des Tartuffe. Défenseur ardent des déshérités ce monde, secondé par un talent qui ne faisait il avec le temps et l'expérience, que grandir occupe la première place parmi les auteurs draarméniens. matiques Après quelques essais déjà couronnés de succès, Soundoukiants donna, en 1866, sa première : Khaihabala. comédie C'est une oeuvre de grande envergure, où l'on a un tableau saisissant de la vie réelle, j'allais dire réaliste. Les types en sont bien campés, et les personnages très vivants. Le personnage principal est un riche commerZambaçant, du nom de Garasim Yankalitch khov. C'est un homme élevé et formé à l'école de la vie; le monde est un vaste champ de concur-
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rence et dans cette concurrence celui-là est heureux qui est victorieux. Il n'a pas appris cela dans les livres, et il ne connaît, en fait de lecture et d'instruction, et le Psautier. Il que l'Evangile connaît à peine le chemin de l'église. Il a appris, : par ce par expérience, qu'il faudra tromper moyen seul, l'homme peut réussir. Tromper, c'est dans l'ordre normal des choses. Aussi Zambakhov en use et en abuse. Il a une fille laide, et il est dans l'ordre des choses de ce monde que les filles laides restent vieilles filles; leur laideur est une faute, sinon presque un péché. Zambakhov veut tromper le monde en faisant sa fille sous un aspect jeune et joli. apparaître Il emploiera à cet effet tous les moyens en son être agréée afin qu'elle pouvoir, puisse par Massissiants. bien mené et dans un monologue Zambakhov, en dialecte tiflisien, s'écrie : « Mon affaire va bien; de tous les côtés, les veines sont tendues, Monsieur mon qui forment une toile d'araignée... futur gendre viendra tout à l'heure en bourdonnant comme une mouche. Hop! (il frappe les deux mains ensemble). Il tombe dans mon filet. Ensuite, il fera beaucoup de bz! bz! mais, de mes griffes, personne
ne peut échapper...
Non.
Pour-
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
est un animal repousquoi dit-on que l'araignée Je vous le demande. Est-ce sant? Pourquoi? les hommes, comme qu'elle met en morceaux les hommes comme le un chien? Avale-t-elle loup et le lion? En quoi est-elle vile? Elle vit de N'est-il point la grâce dont Dieu l'a dotée!... avéré qu'elle n'a pas de dents comme les fauves afin de manger en rongeant?... Qu'elle n'a point d'ailes comme l'oiseau pour vivre en volant? si elle ne tissait fait, la pauvrette, Qu'aurait-elle des toiles dans les coins des chambres pour attraVous voudriez qu'elle se proper les mouches?... menât sur ses pattes et qu'elle se procurât ainsi Mais je ne la vois pas ainsi. Vous sa pitance? n'est-ce pas?... (il l'auriez laissée se promener, pense en silence)... En vérité, quand j'y réfléchis, je vois que ce monde a été créé pour s'entredéentre eux. Un oiseau vorer... Tous se mangent un animal en dévore un autre... mange l'autre, Si nous n'avions pas peur de l'autre monde, nous nous mangerions tous mutuellement. Et, croyezvous donc que nous ne nous mangions pas? Dans ce bas monde, celui qui l'emporte sur un autre est proclamé le plus vaillant; et vaincre et manger, c'est la même chose. Puis notre tour vient, et c'est la terre qui nous mange, et nous deve-
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poussière (Il remue la tête.) Eh! monde un fripon. Je suis donc maintenant pourri!... Mais, à qui fais-je du mal? Que nul ne me trompe, et je ne tromperai moi-même personne... Si je n'agissais pas ainsi en ce moment, voudriezvous de ma fille?... ». On a ici, sous les yeux, le tableau d'un homme vorace; mais c'est un vorace qui n'est armé ni de serres, ni de griffes, ni de crocs; il n'attaque pas sur la place publique; il attrape ses victimes dans les coins, en catimini, dans des toiles tissées avec adresse. Si ce vorace ne réussit pas dans tous ses projets, sa philosophie est vraie partout. Autour de ce personnage Soundouprincipal, kiants a placé quelques autres types bien étudiés et bien campés. Voici par exemple un commerçant, Issaï, qui est relativement plus calme et d'un meilleur coeur. Mais, lui non plus, ne considère pas comme un péché de tromper. Il est l'élève de Zambakhov et il pratique sa philosophie. Mais, à la fin, sont connues, il quand les ruses de Zambakhov s'irrite et s'insurge contre lui. Un troisième type, également bien dessiné, est de maune femme entremetteuse Khambéri, riage. C'est une commerçante,elle aussi; mais elle
nons
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
sont n'a ni boutique ni bureau. Ses marchandises les jeunes gens et les jeunes filles de la ville. Son métier touche au dévergondage. voilà L'argent, de son culte. Pour de l'argent, elle est l'objet ses parents. même Le jeune prête à vendre homme qui aurait voulu épouser la fille de Zambakhov est le fils de la soeur de Khambéri. Khambéri oublie toute amitié et cherche à faire faire ce mariage afin de toucher une plus forte bien qu'il s'agisse de son propre commission, neveu... Et voici maintenant l'objet du marché : MarLa nature l'a garit, fille laide et malheureuse. Mais son âme est privée de la beauté extérieure. ornée de belles qualités. En fait, dans ce monde, l'âme n'est rien; on exige que la peau soit belle. La malheureuse fille comprend fort bien sa situation. Elle voudrait aimer et être une bonne la prive épouse; mais elle sait que son extérieur de cette vie heureuse, si rêvée. La pauvre fille est de petite taille; on lui fait mettre des souliers hauts; on tente l'impossible pour la faire paraître jolie. Mais le coeur pur de Margarit ne peut supElle pleure continuelporter tous ces mensonges. lement, et l'on se sent porté à pleurer avec elle. de son Et, quand elle voit que les tromperies
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et que le jeune prétendant père sont découvertes, elle tombe évas'aperçoit qu'on l'a trompé, nouie. Soundoukiants a écrit une comédie; en apparence, on ne fait que rire tout le long de la pièce; en réalité, c'est un drame; car l'on ne saurait imaginer rien de plus dramatique que la situation de Margarit. cette pièce, Soundoukiants Pêpo. — Jusqu'à avait cherché à faire ressortir les types antipathiques, étalant leurs défauts, leur cupidité, leur fausseté. Avec Pêpo, l'auteur propose un type idéalement pur. Jusqu'à de Pêpo, Sounl'apparition dans le doukiants cherchait ses personnages et de monde de la bourgeoisie, du commerce Dans Pêpo, on entre en contact avec l'industrie. le peuple. C'est un type bien tracé et très sympaet, thique. Aussi son succès fut-il sans précédent, en 1901, on célébrait le 30e anniversaire du succès de Pêpo. Il avait été représenté des milliers de fois, aussi bien à Tillis que dans les autres villes du Caucase et de Russie, en arménien, en géorgien et en russe. Pêpo, comme on l'a dit, est une perle dans la et on peut le considérer littérature arménienne, 7 TROIScoNFÉnimcEssun L'ARMÉNIE
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
les plus remarquacomme une des productions bles de l'esprit humain. La scène se passe dans une famille de pêcheurs dur pour manger un mor(fig. 13); on y travaille ceau de pain. Cette famille se compose de Pêpo, de sa mère et de sa soeur. C'est une famille très unie et qui a pris pour devise la maxime : tous pour un et un pour tous. Dans un pareil milieu, la pauvreté n'est pas un malheur. Pêpo est gai, il adore son métier; il vit sans il sait qu'il a des bras puispenser au lendemain; sants et que les ondes troubles de la Koura contiennent des poissons délicieux, qui tomberont dans ses filets et qui lui procureront du pain à manger. Mais en face de la pauvreté et aux dépens de cette pauvreté vit un riche commerçant. Le père de Pêpo, en mourant, a laissé à ce commerçant, Arouthin une somme qui sera la dot Zimzimov, de la soeur de Pêpo. Un fiancé est tout trouvé pour cette soeur. Mais l'argent ne sort pas de la poche du commerçant, parce que celui-ci aurait donné un reçu au père de Pêpo, et que ce reçu est égaré. Cependant le fiancé exige la somme et il déclare qu'il ne se mariera pas sans la dot. Le bruit ne se
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cherche une autre pas déjà répand-il qu'il et un déshonneur fiancée? Ce sera un affront pour la soeur de Pêpo. La pauvre fille maudit la elle ne pourra plus désormais destinée; regarder un homme; elle n'est plus qu'une fille abandonnée dans un coin. Que faire? Il faudra trouver le moyen d'amollir le coeur de Zimzimov. Pêpo ne supportera pas Il ne peut plus que sa soeur soit déshonorée. manger même un morceau de pain, et il se rend chez Zimzimov sa pour le prier de reconnaître cet ignodette. Avant de partir chez Zimzimov, un monologue rant pêcheur qui est prononce l'une des plus belles pages de Pêpo. Voici comce noble coeur : ment s'exprime « Va, Pêpo, lèche la terre, embrasse les pieds des hommes, mange la boue de leurs pieds; qui es-tu? qu'es-tu? Dans le compte des hommes, ils le qu'es-tu? Quel nom as-tu, toi? Quand ils te jettent sous leurs pieds, ils te veulent, au niveau de la marchent dessus, ils te nivellent terre. Quelle perte! En quoi es-tu plus qu'une mouche? Mais, tu n'es pas un homme. Dieu t'a créé comme pâture aux autres hommes. Peine la nuit! Peine le jour! Passe tes nuits blanches! Lutte contre la pluie et le vent, hurle de froid en
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
hiver, sois brûlé et rissolé en été sous les rayons ainsi un morceau de du soleil! Va et procure-toi pain, et nourris avec ce morceau de pain ta mère et ta soeur... Quelle est cette humanité?... Le chien aussi se procure ainsi un morceau, lui qui garde la maison. Il est vrai que, toi aussi, tu es un chien. Depuis que tu déambules sur cette terre, tu te nourris aussi comme un chien. Quelle humanité est-ce là? Tu voulais être quelqu'un? Tu serais allé dévaliser les hommes, tu aurais commis des vols, tu aurais fait du tort à des malheureux comme moi; tu aurais fait répandre le sang et les pleurs dans 25.000 endroits, tu aurais fait de l'argent de ces pleurs, et, avec cet argent, des maison dorées; tu t'y serais promené tu aurais eu des voitures et des glorieusement; tu aurais eu vingt-cinq chevaux; personnes comme moi pour domestiques. Oh! alors, je t'aurais dit : Tu es un homme, Pêpo. Ce dont l'homme aurait besoin, ce que ton bon plaisir aurait voulu, tu aurais pu te le procurer sur-ledevant champ. Alors, tout le monde s'inclinerait te ferait des révérences, et on toi, t'honorerait, se casserait mutuellement la tête pour mériter un de tes regards ». a Soundoukiants Pêpo est chez Zimzimov.
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de types de beaucoup Mais aucun commerçants peu sympathiques. Il a d'eux n'est aussi repoussant que Zimzimov. 60 ans et il a une jolie femme de 30 ans, dont il satisfait toutes les fantaisies..., et il se croit rajeuni. Il veut vivre et jouir de la vie. Ceux qui lui fournissent ses moyens d'existence, ce sont les Pêpo. Sans s'abaisser, gardant toujours sa dignité, le de Zimzimov et lui demande pêcheur s'approche de payer sa dette. Le richard demande le reçu. Mais quand il apprend que le reçu est perdu, il se met à jurer qu'il ne doit rien. Par pure charité, il donne à Pêpo une petite somme, afin qu'il puisse marier sa soeur. Pêpo jette cette aumône à la tête de Zimzimov. Se croyant déshonoré, le richard traîne le et le fait empripêcheur devant les tribunaux sonner. A ce moment-là, on trouve le reçu de Zimzimov. Tout de suite, les rôles sont changés. Le glorieux seigneur daigne se rendre à pied dans la hutte de Pêpo. Il ne peut plus nier sa dette.Il sera la risée du monde. Aussi s'empresse-t-il l'affaire pour le mieux. Maintenant, d'arranger il veut, non seulement payer sa dette, mais il donne en plus une grosse somme et promet de donné
dans
son théâtre
122 faire
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE sortir
Pêpo de la prison. Mais en vain. Pêpo exige que l'affaire soit terminée devant les tribunaux où Zimzimov avait nié sa dette. Et rien ne peut ébranler cet homme pauvre, ni les prières de sa mère et de sa soeur, ni l'insisni la grosse tance de ses amis, ni la prison, somme promise par Zimzimov. Le coeur pur de l'homme est ému; il veut défendre son droit, et il décide d'aller en prison et d'y rester, afin de faire éclater au jour la cruauté, et les le mensonge nombreux autres défauts du richard. Par suite de l'action vile de Zimzimov, la soeur de Pêpo est condamnée à rester à la maison; le prétendant s'est récusé; Pêpo ne peut pas oublier cela. Et quand le richard le supplie de se réconcilier, Pêpo prend sa soeur par la main, la conduit devant Zimzimov et lui dit : « Nous réconcilier maintenant? Maintenant? Mais à celle-ci, que diras-tu? Comment te réconcilieras-tu avec celle-ci? Tu l'as mise au tombeau toute vivante; tu as assombri son jour et obscurci sa vie. Comment te réconcilieras-tu avec à Comment celle-ci? Comment?... rendras-tu celle-ci ce que tu lui as arraché? Comment? Toute ta richesse ne peut fermer la plaie que tu as ouverte dans son coeur. Va-t-en! Va-t-en! Nous
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n'avons rien pour nous réconcilier. Va-t-en! pendant que tu es encore en vie sur cette terre. Souviens-toi des pleurs de celle-ci afin de ne plus faire aux autres ce que tu as fait à celle-ci ». Enfin, unpauvre pêcheur ose punir ce vampire. Soundoukiants termine sa pièce en envoyant son héros en prison. Le rideau tombe, mais les spectateurs sont satisfaits, persuadés que Pêpo ne lâchera pas le vampire. Outre Pêpo et Zimzimov, qui sont les deux Soundoukiants a créé principaux personnages, dans Pêpo deux autres types remarquables, Giqo est le type de l'homme Giqo et Kakouli. c'est un philovieux, lent, qui parle longuement; sophe populaire imbu de la sagesse de Khikar. Il est noble et juste. C'est à lui que le père de Pêpo a confié le reçu de Zimzimov. Mais il l'a perdu et, pour rendre l'argent à Pêpo, il met sa maison en gage, puisque c'est lui qui a perdu le reçu. Quant à Kakouli, c'est le camarade de Pêpo; c'est un Kinlo comme lui. Les Kinto sont les enfants du peuple; ils s'occupent à vendre de petits objets; ils sont sans soucis, très gais, grossiers, impolis, aimant le en leur plaisir et les plaisanteries, spirituels genre (fig. 14).
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
a Pêpo est un de ces Kinto. Soundoukiants coeur on peut voulu montrer quel admirable Kakouli est en effet trouver dans ce monde-là. un camarade très dévoué et sans feinte. Ayant appris la lâche conduite de Zimzimov, il s'écrie : « Il faut le battre! il faut lui casser la... figure! » Pauvre et noble coeur, il ne trouve que ce moyenlà. Pêpo est plus mûr; il a un esprit plus chevaleresque. Il reste ferme dans ses convictions. Pêpo à lui seul eût suffi à assurer la gloire littéraire de Soundoukiants. Car cette pièce est dans la phénomène par elle-même un véritable et littéraire du peuple arménien. vie artistique Mais, à côté et à la suite des pièces de Sounil doukiants littéraire, qui firent sa renommée convient d'évoquer la dernière, intitulée Amour et liberté. Le maître travaillait à l'achèvement de cette pièce, lorsque je lui fis visite, à Tiflis, en juillet 1909. Il mourut quelque temps après (fig. 15). Ecrite dans le dialecte de Tiflis, cette pièce en cinq actes traite également un sujet tiré de la vie de Tiflis ! : de Tiflis qui Melkhon est un de ces négociants 1. Voir mon Rapport sur une mission scientifiqueen Arménit russe..., p. 101-102.
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certaine culture vont en extérieure, entrent en relation avec nos grandes Europe, maisons et sont en contact constant avec d'autres mondes. C'est un homme bon et un noble coeur; mais le bonheur ne réside pas à son foyer, car sa jeune femme, Natôn, ne l'aime pas. Et les deux époux souffrent et se consument dans une lutte de tous les jours. Natôn s'est mariée sans amour, attirée seuleLa malheument par la richesse de Melkhôn. reuse Natôn aime le jeune Dikran, le directeur de Melkhôn, mais elle garde son du comptoir amour caché dans son coeur : elle souffre et se consume en silence. Le mari, voyant sa femme souffrir, est disposé à tout, pour lui être agréable, même au divorce, s'il peut de la sorte rendre heureuse safemmebien de la pièce jusqu'à la aimée. Du commencement fin, Natôn reste une femme malheureuse. Ayant recouvré sa liberté, elle sacrifie son amour è la et s'écrie : « Je ne de ses semblables délivrance resterai pas tranquille tant que je n'aurai pas le ». bonheur de voir libres mes semblables La mère de Natôn, Gayianê, et son grand-père, de la désirent alléger les souffrances Chakharôn, mais ils n'y parviennent malheureuse femme; ont
une
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
pas. Le grand-père est un type bien brossé, choisi du vieux Tiflis. parmi les êtres sympathiques
ne fît pas d'élèves, au sens Soundoukiants propre du mot. Mais il eut des émules et des successeurs. Il avait ouvert la voie. Il suffisait de la suivre, en variant les thèmes et en cherchant des types nouveaux dans d'autres milieux. se produit en effet Une deuxième renaissance vers 1890. Et cette dans le théâtre arménien, fois, Tiflis passe au second plan et la scène arménienne est transportée à Bakou, la capitale du une société qui assure pétrole. Il s'y constitue du théâtre. l'existence matérielle On fait venir un certain nombre d'acteurs et d'actrices régulièrement appointés et on appelle de Constantidont le nople la célèbre actrice, Siranouïch, talent est universellement connu. Tiflis ne veut pas se laisser comCependant, plètement découronner, et, en 1902, la « Société » constitue un répertoire dramatique presque exclusivement de composé d'oeuvres traduites Pour remédier à ce manque langues étrangères. de pièces nationales, l'oeuvre pour continuer
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drales nouveaux par Soundoukiants, arméniens s'efforcent d'enrichir le maturges Un des premiers et le plus national. répertoire célèbre parmi ces nouveaux auteurs est sans conteste Ghirvanzadê. Romancier très connu de l'Ecole littéraire vers le milieu de sa carréaliste, Chirvanzadê, de ses rière, se mit à tirer des pièces dramatiques propres oeuvres. Son grand mérite consiste dans la description fidèle des moeurs arméniennes pronotamment de Chamakha, son pays vinciales, natal. Chirvanzadê fit d'abord trois représenter pièces, Eugénie, Avait-il raison? et La Princesse, qui ne reçurent pas un accueil uniformément favorable de la part du public et de la critique officielle. Le célèbre publiciste Grigor Ardzrouni se montra particulièrement sévère à l'égard de ces de Chirvanzadê. premiers essais dramatiques Avec L'esprit méchant (tchar ogi), le succès vient à grands pas. C'est le tableau particulièrement vivant de ces petits boutiquiers, superstitieux autant qu'égoïstes et terre à terre, et qui, leurs intérêts mesquins, n'hépour sauvegarder sitent souvent pas à commettre des crimes abominables. instaurée
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Dans L'honneur (Namous), l'auteur se propose de décrire la mentalité de ces gens provinciale vertueux qui, parfois d'une façon très inconsciente et allant jusqu'à commettent l'absurde, de véritables crimes dans le but louable sans doute de sauver l'honneur de la famille. Il s'agit en effet d'une jeune fille qui a été épousée par un Arménien du Daghestan et qui a eu auparavant une amourette avec un jeune homme pauvre. L'habitant du Daghestan est un commerçant riçjie et notable. Le jeune homme, pour se venger d'avoir été dédaigné par la famille de la jeune fille, fait courir le bruit qu'elle a été sa maîtresse avant le commerçant. Celui-ci croit d'épouser a été atteint. Il en que son Namous (honneur) demande raison à sa femme, dans une scène extrêmement violente; et, finalement, exaspéré, il lui plonge un poignard dans le coeur au moment même où le jeune homme, comme un fou, se précipite dans la maison du commerçant pour lui dire qu'il avait inventé ce mensonge par simple du comdépit. Mais c'est trop tard, et l'honneur est vengé. merçant « Ce qui est détruit » et La pièce Kordzanvadze Sur les ruines sont des pièces sociologiques, où l'auteur met en contraste les idées anciennes
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enracinées chez les Arméniens et les idées nouvelles, venues de Russie et de l'occident. Parmi les pièces de Chirvanzadê, celle qui eut le plus de succès est, sans contredit Pour l'honneur (Patwi hamar), qui eut le plus grand nombre de représentations, aussi bien chez les Arméniens de Russie que chez ceux de Turquie et dans de nombreuses à colonies, notamment Paris. Ici encore, c'est l'esprit de commerce et de lucre qui, au mépris de l'honneur, aboutit à la tragédie de famille; car la fille de l'escroc, révolles agissements tée contre de son malpropres père, finit par se suicider. En relisant cette pièce de Chirvanzadê, je ne de songer à certaine pièce de puis m'empêcher Sudermann que j'ai lue jadis en Allemagne. C'est du théâtre très habile; la trame est fort adroitement menée; mais il reste, dans l'esprit du lecteur, l'impression que cette pièce est peutêtre la moins arménienne de tout le répertoire de Chirvanzadê. L'auteur nous introduit dans le bureau d'un riche commerçant, Andréas Elizbarian qui nous en causant avec son beau-frère Salaapprend, rusé et voleur, qu'il attend un thiel, hypocrite,
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
fils de son Otharian, jeune homme, Artachès ancien associé, mort dans la misère. Il avoue car il d'inquiétudes, qu'il lui donne beaucoup la moitié de la fortune réclame d'Andréas, l'accusant d'avoir tout gardé, alors que l'associé avait droit à la moitié des bénéfices. de la Andréas, qui s'est posé en protecteur famille dépouillée par lui, ne se fâche pas et veut prendre le jeune homme par la douceur. deuxième fille d'Andréas, Survient Margarit,la droite, sérieuse et réfléchie. Elle aime Artachès et est aimée de lui. Interdite en voyantletrouble du jeune homme, elle veut en savoir la cause; elle apprend, la après de longues hésitations, vérité. Elle demeure en accablée, atterrée, le forfait d'un père qu'elle estimait apprenant et adorait. La fille aînée d'Andréas, Rosalia, méchante, orgueilleuse, vaniteuse, jalouse de sa soeur,révèle des jeunes gens. Andréas, à son père l'amour tout joyeux de cette révélation, appelle Margarit sa et, par des paroles doucereuses, auxquelles il lui arrache la profille n'est pas accoutumée, messe de demander à Artachès les preuves écrites établir sa propre perfidie. qui pourraient Elle les obtient sans peine d'Artachès qui les
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confie à son honneur et fait d'elle son juge. Documents en main, Margarit ne doute plus de la justesse des réclamations et d'Artachès, elle convainc aisément son frère Bagrat du forfait de leur père. Celui-ci vit dans la terreur et, Salathiel poussé par le diabolique qui fait taire ses scrupules, il vole, nuitamment, les papiers dans le tiroir de Margarit, et compromettants s'enfuit devant Margarit horrifiée. Andréas a des remords; mais Salathiel ranime son audace et, lorsque Artachès se présente fort de son droit, il est raillé, insulté et bafoué par celui qui, la veille encore, cherchait à l'amadouer. cherche Artachès Stupéfait, Margarit pour obtenir la clé du mystère. Elle accourt chez son Elle le supplie de lui père, éplorée, désespérée. restituer les papiers et de lui rendre son honneur. Elle se traîne à ses pieds; en vain. Andréas se faisant mine de les moque d'elle, et, exaspéré, lui remettre, il les jette au feu. reviennent, pour interroBagrat et Artachès ger la jeune fille. Pour ne pas accabler son père elle s'accuse de les avoir brûlés. Puis elle se retire dans sa chambre et, préférant la mort au déshonneur, elle se tue avec le revolver de son frère.
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Comme je vous l'ai dit, mon exposé ne vise pas à êtr ? complet. Il y faudrait des heures. Et, avant de terminer ce paragraphe consacré au théâtre arménien oriental, un certain nombre de noms doivent encore être cités, parce que très évocateurs de l'art et des tendances qu'ils représentent. Léon MANUÉLIAN a donné une comédie intitulée Docteur Iervani Bochayan, qui fut représentée en 1900 à Bakou. Ce docteur, fils d'une famille riche, aime une institutrice pauvre. Pour satisfaire aux exigences de son amour, il quitte fortune et famille et se met sous la loi de l'élue de son coeur. Ses frères et ses soeurs, tous bons vivants et un tantinet ne commatérialistes, prennent rien à un pareil idéalisme. TER GRIGORIAN occupe une place des plus dans le théâtre arménien oriental, honorables avec ses deux pièces intitulées L'épée de Damoclès et Sous le masque de la bienfaisance. Dans la première, qui est un drame au sens exact du mot, l'auteur étudie le problème des relations conjusous un certain angle : un gales envisagées homme, avant de se marier, a eu une maîtresse, et de cette union extra-légale est né un fils. Il abandonne sa maîtresse pour se marier avec une
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Le temps passe et cet homme femme honnête. croit son ancienne maîtresse morte. Mais elle, en silence, élève son fils. A un moment donné, et se dans la gêne, elle va trouver son extrouvant amant. Elle rencontre la femme de ce dernier qui a eu, elle aussi, un enfant, mais mort en bas âge. réciLes deux femmes causent et se mettent au courant de leur histoire. proquement L'épouse légitime met son mari à l'épreuve en lui disant qu'avant son mariage, elle a eu un enfant et qu'il faut maintenant le reconnaître. Le mari se met en colère et accable sa femme La femme finit par lui déclarer qu'il d'injures. s'agit de l'enfant qu'il a eu jadis avec sa maîtresse. L'homme reste penaud, et la femme, ayant de ce chef découvert le véritable caractère de son mari, perd tout sentiment d'amour à son entièrement à égard et décide de se consacrer l'éducation de l'enfant étrangequi ressemble ment à celui qu'elle a perdu. Le drame Sous le masque de la bienfaisance est encore et plus réaliste. Le plus impressionnant est un véritable détrouspersonnage principal Généralement ce seur, qui a nom Kéghéqiàn. est donné par les auteurs genre de personnages arméniens aux commerçants. Ter Grigorian TROIS CONFÉRENCES SURL'ARMÉNIE 8
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en quesles mondes, et le personnage transpose tion à celui des fonctionnaires. appartient il il a des propriétés, est en retraite, Kéghéqian possède tout un village à lui. Pour la première fois dans le théâtre arménien, on met enjeu des paysans. le héros de la C'est un paysan qui devient pièce. Melqon est un homme juste et sympathique, qui connaît les besoins des paysans ainsi que leurs doléances, et qui n'a pas peur du puisil ose lui dire tout ce qu'il a fait sant Kéghéqian; dans la ville, en cachant son passé sous diverses oeuvres de bienfaisance. Melqon devient dès lors un homme dangereux Celui-ci pour Kéghéqian. à le faire incarcérer comme songe un moment mais il se ravise, un soudoie calomniateur; et fait assassiner Kourde Melqon. Le type de est assez répandu chez les paysans Melqon arméniens. Mais, dans ce drame, il est encore un type des : c'est la fille de Kéghéqian, plus intéressants qui est instruite et qui, ce qui pis est, est au courant des actes répréhensibles de son père. Cette jeune fille, Héghinê (Hélène), n'est plus la jeune Arménienne, sans volonté ni caractère que l'on rencontre chez la plupart des auteurs arméniens;
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elle a de la volonté et elle prend sous sa protection les victimes de son père. Un autre bien brossé, est type, également l'avocat Akim Ivanitch, pour lequel il n'y a rien de sacré, qui est dépourvu de tout sentiment humain et qui devient aisément un instrument dans les mains de Kéghéqian pour l'accomplissement de ses oeuvres inavouables. Enfin, Saro, le fondé de pouvoir qui sait s'y prendre pour séduire son patron, a aussi une physionomie fort bien rendue. Alexandre ABÉGHIANTS s'est acquis une certaine célébrité par ses vaudevilles La fonlaine de de Mekidj et Le divorce de naphte, Le mariage Mekidj. : La Enfin, le drame de HAÏKOUNI, intitulé hache rencontre la pierre, et qui vit le jour en 1899, est une peinture fidèle de la vie des Arméniens d'Akhaltsekha. Et nous arrivons ainsi à deux écrivains de mot premier plan dont il faut dire plus qu'un en terminant cette causerie consacrée aux drade l'Arménie orientale. maturges Lévon CHANTH, bien que né à Constantinople, fait ses études dans l'Arménie du Caucase, au et toute sa carrière Djémaran d'Etchmiadzin,
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se déroule loin de sa ville natale, au Aussi le classeCaucase, sa patrie d'adoption. t-on généralement au nombre des écrivains de l'Arménie orientale, où son esprit s'est formé et où son autorité est devenue incontestable. Comme auteur Chanth dramatique, occupe une place tout à fait à part; par son talent méditatif et son génie philosophique, il a subi fortement l'emprise de l'Ecole symboliste. Sa première oeuvre dramatique, dont je vous tout à l'heure une analyse, a fait senproposerai sation même à l'étranger. Sous le titre de Les vieux dieux, Chanth, influencé peut-être par les de Thaïs d'Anatole France, images symboliques avec met aux prises le libre esprit du paganisme la morale et la conception religieuse du christianisme pour aboutir, en dernière analyse, à l'éterC'est un nelle tragédie de la destinée humaine. et qui ne profond, sincère peut-être, pessimisme voit que dans le rêve l'issue de notre existence fatale. quasiment D'autres à Chanth la juste pièces assurèrent renommée à laquelle ses drames avaient incondroit. Le drame testablement est Impératrice animé du même souffle que Les Vieux dieux; le à l'époque sujet est tiré de l'histoire byzantine,
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Jean. Venchaîné de l'empereur est une allusion à la légende arménienne d'Artavast. La Enfin, princesse de la forteresse tombée mérite également d'être citée. Mais revenons, si vous le voulez bien, à l'examen de Les Vieux dieux. C'est un drame où l'auteur fait la critique des croyances modernes par rapport à celles des temps anciens. Un novice en religion se trouve dans un couvent situé au milieu d'une île. Il est très pieux et cherche à remplir tous les devoirs imposés par les ponctuellement du monastère, dont l'abbé est un règlements ancien noble entré dans les ordres par dépit amoureux. Un prince fait construire dans l'île une église, sur la demande et avec l'assistance pécuniaire de sa soeur, qui a eu jadis une intrigue amoureuse avec l'abbé du couvent. Un jour que le prince venait dans l'île rendre visite à sa soeur, la barque qui le transportait est et, avant d'aborder prise dans une tourmente l'île, elle chavire et Séda, la fille du prince qu» son père, est précipitée dans le? accompagnait flots. assistaient à ce Les moines qui, du rivage, Mais le jeune drame, sont frappes d'épouvante. S* SURI.'ARMÉNIE TROISCONFÉRENCES
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novice n'hésite pa& :' il se jette à l'eau, et, après avoir lutté victorieusement contre les vagues, retrouve le corps- de Séda, le saisit dans ses bras et le dépose sur le sol. Dès ce moment, une révolution se produit dans l'esprit du jeune novice. Pour avoir touché et gardé quelque temps dans ses bras le corps palpitant de la jeune fille, il sent que dans la vie il y a autre chose que ce que lui Le novice est tout enseigne la règle monastique. simplement amoureux de la princesse. Il en perd l'e goût de la prière et de la nourriture et dépérit a- vue d'oeil, au point que les autres moines le ou pour réellement tiennent malade ou pour possédé du démon. Plus d'une fois, est-ce en rêve, est-ce une hallucination,, il voit Séda qui devient peur lui une nwuvel'le divinité. Son état psychologique empire tellement qu'il finit par se jeter dans les flots pour retrouver la Séda de ses rêves. Les autres types principaux de ce drame sont l'a>lbbé,qui a une attitude très digne et qui cherche à étouffer par les pratiques religieuses les sentiment& amoureux dont il est dévoré; il faut mentionner aussi la princesse qui, n'ayant pu épouser l'abbé — jadis un grand. seigneur — vit des bonnes oeuvres. également dans la pratique
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Digne de mention est également le moine aveugle qui a beaucoup vu avant de perdre la vue, et qui la situation seul comprend du novice et lui prodigue les conseils les plus adéquats à sa situation. Cette pièce eut un énorme succès, surtout au Caucase. Les scènes féeriques qui y sont nombreuses ne contribuèrent pas peu au succès de entre l'oeuvre. L'auteur autres y représente l'Arménie païenne, d'abord par un prêtre majestueux debout devant un temple; il expose comment, dans l'Arménie païenne, le courage et la force étaient où de célébrés dans des agapes belles jeunes filles récompensaient les vainqueurs. Il représente aussi, avec quelle magie le vieux culte du soleil qu'à l'instar théâtrale, des anciens Iraniens, les vieux Arméniens adoraient comme un dieu. Une telle pièce, par ses qualités scéniques les plus diverses, était assurée du plus légitime succès. Avétis AHARONIAN, ce chantre talentueux et des douleurs du peuple arménien,. somptueux est avant tout un novelliste et un conteur. Il s'est et la pièce, essayé, dans le genre dramatique intitulée La vallée des larmes (artsounqi hovite): fut souvent représentée, fît toujours salle Comble et ne contribua pas peu à répandre hors même d e
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l'Arménie le nom déjà célèbre par ailleurs de son auteur. Ce drame en quatre actes peut être présenté de la façon suivante : Aslan voyage avec sa fille Huri en Arménie turque. Affilié à une société Aslan vient dans ce pays pour révolutionnaire, à faire sauter un château-fort qui se trouve Il y rencontre d'autres affiliés à la proximité. même société. Pour le guider dans ce pays, il s'adresse à une vieille femme qui, après l'avoir renseigné, l'invite à venir chez elle. Aslan promet et se rend à l'invitation quelques jours après. Il est reçu dans cette maison arménienne avec une hospitalité charmante. Le voyageur y voit une jeune veuve, Nazê, et la fille de celle-ci, Choghik, âgée de douze ans, qui sont la belle-fille et la petite-fille de la vieille Péri. A la suite de longues conversations, les spectateurs apprennent qu'Aslan est le propre fils de Péri et que la maison où il se trouve est la maison même où il est né. On apprend également encore tout jeune, a quitté la maison qu'Aslan, paternelle et son village natal, pour aller au loin, où il a vécu plus de bien loin, à l'étranger, trente ans et où il s'est affilié à l'une des sociétés
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révolutionnaires la délivrance de qui poursuivent l'Arménie. Pendant ce long temps, il a cessé toute relation avec sa famille et avec son village; aussi a-t-il pu oublier l'aspect des lieux qui l'ont vu naître. La jeune veuve a été la femme du jeune frère massacré en son temps. en d'Aslan, Aslan, son pays,constate revoyant que c'est une région de misère, de malheur et de larmes, par suite de la tyrannie C'est une véritable qui y domine. « Vallée de larmes ». Quand la mère reconnaît son fils, et qu'elle devine les intentions de ce fils et de ses co-afïïliés, elle cherche à le détourner de son funeste projet. Mais en vain. N'a-t-il pas les juré au Comité révolutionnaire d'accomplir ordres qu'il a reçus. Avec ses co-amliés. il exécute le plan et il trouve la mort dans le châteaufort qu'il fait sauter. Cette pièce, malgré quelques invraisemblances, est très intéressante, surtout dans les dialogues où l'auteur, avec son verbe magique, sait retenir et captiver des foules, d'autant l'attention plus fortement du coeur. Ce qu'il parle le langage fait partie du réperdrame, souvent représenté, toire classique de l'Arménie orientale.
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est celle où Une des scènes les plus touchantes de la grande maison paysanne l'on voit l'intérieur Nazê chante l'aurore en berçant son arménienne. cette berenfant; elle chante mélancoliquement ceuse, que je me plais à vous traduire, malgré toutes les imperfections ma traque présentera duction au regard de la phrase harmonieuse et : cadencée cl'Aharonian Dors, mon chéri; fais dodo; sommeille. Ne pleure pas; j'ai beaucoup pleuré, moi. Les grues aveugles, endeuillées et en pleurs, Vinrent passer par notre ciel noir. Ah! dans nos montagnes, elles devinrent aveugles; Ne pleure pas, toi; moi, j'ai beaucoup pleuré. Le vent gémit dans les noires forêts; Mon chéri, c'est le deuil du décédé abandonné. Les décédés abandonnés et sans sépulture sont nombreux; toi, ne pleure pas... Chargée de pleurs, la caravane passa, S'agenouilla dans le sombre désert et y resta. C'est la peine et le malheur de notre pays, ne pleure pas... J'ai enfilé des perles et je les ai attachées à ton berceau Contre le mauvais oeil de notre méchant ennemi. Dors et croîs. Fais vite! mon chéri. Ne pleure pas, toi...
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Sur tes lèvres pâles, mon lait se figea. Il est amer, je le sais. Tu n'en veux pas, mon chéri. Ah! C'est le venin de ma douleur qui y a été pressé. Ne pleure pas... En même temps que mon lait, suce ma sombre douleur. Qu'il devienne dans ton âme une vengeance noire. Germe,grandis. Je donnerai ma vie pour ta croissance. Et ne pleure pas. J'ai beaucoup pleuré, moi. II Par suite de circonstances d'ordre politique autant que religieux, le théâtre n'eut pas dans l'Arménie occidentale le développement et La l'épanouissement qu'il eut dans l'orientale. chose se comprend aisément lorsque l'on est au courant du processus et de la vie historique sociale et morale des Arméniens en Turquie. Ce n'est pas le lieu d'insister sur les causes déterminantes qui ont rendu si éphémère l'existence d'un théâtre arménien national dans l'empire des sultans. brèves suffiront à expliQuelques indications relatif et le peu d'enverquer le développement gure du théâtre chez les Arméniens, sujets ottomans.
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ne comoccidentale Le théâtre de l'Arménie un répertoire mence à posséder que dans la seconde moitié du xixe siècle 1. Dès la fin du de Venise avaient xviiie, les Mekhitharistes composé des pièces que leurs élèves jouaient dans des circonstances imporparticulièrement tantes de leur existence scolaire, telles que les distributions de prix; on tirait les sujets de ces pièces dans l'histoire sainte, dans les histoires de l'antiquité classique, dans l'histoire nationale de l'Arménie. Ces tragédies, au nombre d'une centaine environ, inédites, sont conservées dans les cartons des archives du Couvent Saint-Lazare, lagune de Venise. « Le P. Minas Pejichkian, de Trébizonde traduit en arménien moderne des (1815-1817), tragédies et des comédies, et les fait représenter dans la famille des Duziantz. Vers 1830, on à l'école Bezdjian des pièces tirées de représente l'histoire sainte; en 1836, à l'école Mesropian de fait jouer à ses Smyrne, le professeur Papazian élèves une pièce italienne qui fut mal accueillie en 1840, un essai théâtral par les spectateurs; 1. Ceci,d'après H. H. BARONIAN, Maîlre Ballhazar, comédie en trois actes. Introduction et traduction par J.-M. SILNITZKY... [Paris, 1913),in-16, p. x et suiv.
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plus sérieux était fait à Moscou, par G. Chirmaghanian, qui composa et fit jouer chez lui une comédie où il s'en prenait aux types de fonctionnaire arménien et de clérical corrompu; cette pièce eut un certain succès, mais ne fut pas publiée. « En 1845, le P. Minassian publie en arménien à Venise, une tragédie intitulée : classique, Khosroès le Grand, en cinq actes et en prose. Dans son introduction, l'auteur parle de l'utilité du théâtre et invite le lecteur à encourager les il reste toutefois oeuvres théâtrales; hostile au théâtre laïque. Cette sorte de manifeste marque une date dans l'histoire du théâtre arménien. Le même religieux donna encore une tragédie : Sembai /,dont la langue est correcte, mais oi le sens artistique fait défaut. « Quelque dix ans plus tard, Bêchigthachlian, élève de Minassian, fait faire un pas en avant très dans la question du théâtre arménien. marquant En 1856, il réunit dans une école d'Orta-Keuy des rôles; plusieurs jeunes gens et leur distribue il fait d'abord représenter Thémisloclès, traduit en arménien classique par Hurmuzian, et Khosroès le Grand de Minassian. Le public, nombreux, ne comprenait pas encore ces pièces. Bêchig9 SURL'ARMÉNIE TKOIS CONFÉRENCES
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thachlian se met alors à traduire et à composer en arménien moderne des pièces qui seront plus théâà un public dont l'éducation accessibles trale est toute à faire. Sa première pièce s'apVahan pelle Gornak, suivie bientôt des tragédies sont : Saiil, Vahé et Arsace II. Ses traductions Brutus et la mort de César. Il composa également : Les trois braves et Les Brigands, qui cette fois furent bien accueillies du public. « Suivant l'impulsion donnée par Bêchigthaà ses frais, en 1859, un chlian, Balian construit Au théâtre théâtre à Orta-Keuy... Naoum, on donnait des pièces en arménien et en turc. Hékimian écrit des pièces où il dépeint les travers de et la vie régulière des occila société arménienne il raille les Arméniens dentaux; qui oublient leur langue maternelle. Il écrivolontairement Le sultan Medjid vait en turc et en arménien. au palais impéinvita cette troupe arménienne Don Gregorio, Le rial, où furent représentés bienfaiteur impatient, La Récompense de la modestie, Don César de Bazan. En 1860, au théâtre d'Aristothème, Naoum, eut lieu la représentation de Monti, traduit par le P. E. Hurmuz : ce fut la dernière pièce jouée en arménien classique ou ancien au théâtre de Péra...
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« A partir de 1861, le mouvement se théâtral dans les propagea en dehors de Constantinople, : grands centres de l'empire peuplés d'Arméniens à Smyrne, etc. En 1865, dans le à Trébizonde, de Guédik Pacha de Stamboul, Abraquartier ham Pacha Iéramian fonda le « Théâtre Ottoman ». Le public turc commença à goûter le théâtre et les écrivains turcs réclamèrent un théâtre à l'européenne. La troupe du « Théâtre Ottoman » était composée exclusivement d'artistes arméniens, et le chef en était Hagop Vardovian l »... Il ne saurait s'agir de donner une liste détaillée des dramaturges de l'Arménie occidentale. Il suffira d'évoquer quelques noms : né à Constantinople en Garégin Rechdouni, de sourb Prkitch. 1840, fut instruit à l'orphelinat Au sortir de l'école, en 1858, Rechdouni est nommé instituteur en Roumanie, y passe quelet en apprend la ques années parfaitement il exerce à Constantinople, langue. De retour diverses fonctions et ne tarde pas à s'engager comme acteur dans la troupe de Vardovian. Il a dès le début un succès très grand. 1. Cf. H. H. BARONIAN, op. cil. (trad. J.-M. SILNITZKY) P- xi et suiv.
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ne se conde Molière, Rechdouni Admirateur tente pas d'être acteur; il veut aussi être auteur. : La malle passée en Il donne successivement héritage à une génération de six degrés el demi, à Les quatre cents francs, L'amoureux Niks-Niks, faux-col en carton. Les sujets de ces pièces, qui ne furent pas avaient trait à la publiées du vivant de l'auteur, de Constantinople, à vie intime des Arméniens leurs travers comme à leurs qualités. Baronian, élevé lui aussi à l'école de Lucien et de Molière, fut le plus grand ironiste de la littérature arménienne Ses pamcontemporaine. dont on a extrait phlets sont des chefs-d'oeuvre, des pièces de théâtre. Mais Baronian ne composa que fort peu de pièces; on cite Dol (Broyk), Le Flatteur. Son style est Maître Ballhasar, et populaire, d'une langue à la fois mordant de peindre dans ses moinsouple lui permettant de dres détails la vie si bigarrée des Arméniens C'est sans aucun doute le meil' Constantinople. leur parmi les écrivains réalistes de l'Arménie occidentale. Erwant Odian mérite une mention spéciale; Sa pièce classique : Tcharchele Arlin s'intitule une comédie dont le sujet est Agha; c'est
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de Constantinople. puisé à la vie des Arméniens Artin Agha est un commerçant enrichi, qui a et qui épousé une femme aux idées de grandeur ne tarde pas à se lasser de la vulgarité de son mari. Elle a une fille à laquelle elle fait donner La jeunette une éducation sait piabourgeoise. elle parle français en danser; noter, dessiner, plus de sa langue maternelle. Le père de la jeune fille a l'intention de la doncomme lui, qui ner en mariage à un commerçant est déjà d'un âge mûr. Par contre, la mère desou à tine sa fille à un avocat, ou à un médecin, un écrivain. Elle n'est pas très fixée sur le choix de son futur gendre. Mais elle n'en donne pas moins des soirées, où elle invite des poètes, des des avocats. des médecins, On danse, artistes, on dit des vers, on fait de la musique. Comme bien vous le pensez, ces soirées déplaisent souverainement à Artin; il a l'air tout à fait gauche et il fait continuellement au grand des impairs, désespoir de sa femme. Les discussions entre Mme Artin et son époux, sont aussi frérelatives aux bonnes manières, quentes que cocasses. Aussi finit-elle par donner des soirées à l'insu de son mari, c'est-à-dire aussitôt que, bourgeoisement, il est allé se coucher.
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Un docteur en médecine, un avocat poète cherchent à capter la confiance de pour arriver ainsi à obtenir la main de Et c'est à qui, de ces trois prétendants, à se faire valoir, aux yeux de la mère et à la fille, par des exploits aussi fantastiques
et un la mère la fille. réussira ceux de qu'ex-
travagants. La mère finit par donner la préférence au médecin. Mais la fille, à l'insu de son père et de sa mère, a promis son coeur et sa main à un petit mais honnête employé de son père. Il arrive que le médecin est arrêté pour avoir ordonné un médicament à un gros pacha qui a été, de ce fait, envoyé dans l'autre monde. Il arrive également que le commerçant, auquel Artin voulait donner sa fille, et qu'il croyait riche, frauduest déclaré en faillite, pour banqueroute leuse, et il prend la fuite. vient s'ajouter à ces Un troisième événement deux-là : le petit employé devient l'associé d'Ard'un grand seigneur tin, grâce à l'intervention à ce jeune homme. Et c'est lui qui s'intéressait qui finit par épouser la fille, lui qui, quelques instants auparavant, était détesté et méprisé et par le père et par la mère. Cette pièce est une des meilleures du réper-
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des L'étude toire de l'Arménie occidentale. moeurs est bien réussie et les types sont parfaitement dessinés. et jusqu'à Odian, les ArPendant longtemps, méniens occidentaux avaient vécu sur les pièces du dont ils corrigeaient la langue, orientales, point de vue dialectal, pour les mettre à la portée de leur public. Les événements ne permirent qui suivirent de l'art dramatique pas le libre développement dans l'Arménie occidentale qui n'a pas produit, au sens exact du mot, de grands et nombreux La chose se comprend d'elle-même dramaturges. si l'on songe à la situation des Armépolitique niens de l'Empire ottoman. Je devrais ici prendre avec vous congé des Arméniens et de leur théâtre. Mais je ne saurais le faire sans vous donner à la fois et une explication et une conclusion. Il ne pouvait s'agir, dans une simple causerie d'une heure, de faire passer devant vos esprits tous les noms de dramaturges et de pièces de théâtre qui constituent une des plus belles floraisons de la littérature J'ai dû me arménienne. limiter et borner mon choix aux plus marquants parmi ces écrivains et ces penseurs d'élite.
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Dans la langue arménienne il y elle-même, aurait encore beaucoup de noms à citer, beaucoup de pièces à analyser. En dehors de l'arménien, le nombre ne serait arméniens qui ont pas restreint, des dramaturges écrit en langues étrangères. Et dans ce domaine une mention spéciale me semextra-arménien, blerait devoir être faite de M. Léon G. Méloyian et de son oeuvre dramatique. Il a produit des et d'un dramatique que pièces d'un poignant l'on rencontre rarement. Je n'en veux citer pour en cinq drame que son Arménouch, exemple d'une actes, qui expose la situation angoissante victime des atrocités de la dernière Arménienne, au guerre. Il faut lire ce drame pour comprendre vrai ce que fut le martyre à nul autre pareil des Arméniens de Turquie. de ce drame, L'édition publié par les soins de la librairie Atar, à Genève, est précédée de cette préface que je crois devoir vous citer : « En l'honneur de son 75e anniversaire, célébré en octobre 1918, la Société des Amis de l'Instruction a ouvert un concours destiné à provod'une littérature quer chez nous l'avènement dramatique. « Soixante-dix
auteurs
ont soumisleurs
oeuvres
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au jury, composé de MM. Bernard Bouvier..., Albert Malche..., Jules Cougnard et Robert de Traz, et c'est le drame de M. Léon G. Méloyian qui a obtenu le premier prix. « C'est pourquoi nous sommes heureux d'offrir au public Arménouch, qui est appelé, nous n'en doutons pas, à un grand succès ». Cette pièce, en effet, comme d'autres du même auteur, révèle un véritable talent de dramaturge et fait plus que jamais regretter la perte de tant de morts qui auraient pu, à leur tour, illustrer leur patrie, leur langue, et enrichir leur patrimoine artistique. Et ceci me rappelle un jugement que portait Elisée jadis notre grand géographe, Reclus, de la Roumanie, il expliquait lorsque, parlant comment et pourquoi ce petit était peuple devenu une grande nation. Vous me permettrez de vous citer ce passage : « Néanmoins c'est un phénomène vraiment et qui témoigne ténad'une singulière étrange, cité chez le peuple roumain, qu'il ait pu maintenir ses traditions, sa langue, sa nationalité, au milieu des chocs violents qui n'ont pas manqué de se produire sur son territoire entre les ravageurs de toute race. Depuis la retraite des armées TROISCONFÉHHNCES SUKL'ARMÉNU!
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romaines, tant de bandes détachées du gros des huns et petchéenvahisseurs avares, goths, et slaves, bulgares nègues, tant d'oppresseurs turcs ont successivement opprimé les paisibles du pays, cultivateurs que leur disparition, comme race distincte, aurait pu sembler inévitable. Mais, en dépit des inondations et des remous de peuples qui ont, à diverses époques, la population des Daces latinisés, recouvert ceux-ci, grâce sans doute à la culture plus haute qu'ils tenaient de leurs ancêtres et qu'ils gardaient à l'état latent, ont toujours fini par émerger du déluge dans lequel on les croyait engloutis. Les voici maintenant qui, dégagés de tout élément au milieu des autres se présentent étranger, leur place, comme nation peuples et réclament Us justifient leur indépendante! amplement vieux proverbe : Romoun no père ! « Le Roumain ne périra pas! » D'ailleurs leur nombre s'accroît rapidement, peut-être de quarante à cinquante mille personnes par an. l » Cette prophétie d'Elisée Reclus n'a pas tardé à se réaliser et, tout récemment, à Paris, on apprenait que la Roumanie célébrait le cinquan1. Cf. Elisée RECLUS,Nouvelle géographie universelle... I, l'Europe méridionale... (Paris, 1875),in-4", p. 247-248.
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tenaire de son indépendance. Grâce à sa ténacité, au maintien de ses traditions, de sa langue et de sa nationalité, non seulement la Roumanie avait assuré son indépendance, mais elle avait ou mieux recouvré son ancien terriagrandi, toire. Les enfants de l'Arménie, eux aussi, ont des de race qui leur permettent tous les qualités de événements espoirs. Bien avant les tragiques ces dernières années, un écrivain anonyme n'écrivait-il pas : « Les Arméniens ne sont plus guère huit. que 3 millions; jadis ils en comptaient Certains ethnologues les rangent parmi les Iraniens de la Perse. Leur aspect rappelle celui des Juifs. Ils sont d'une de la taille au-dessus ont la peau brun foncé ou jaunâtre, moyenne, soit les cheveux noirs et droits, avec exceptions de chevelure brune, soit même blonde (chez les Le nez est large, fortement busqué, enfants). le front plus large que haut. Ils ont une tendance prononcée Leurs femmes sont à l'obésité. souvent belles, de visage régulier, d'allure majestueuse, avec de grands yeux noirs sous des cils longs et touffus. C'est un peuple sérieux, intelligent, industrieux, hospitalier, aux s'accommode rapidement
d'esprit moeurs
vif, qui et aux
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de ceux au milieu desquels il vit. » x habitudes Avec de telles qualités, jointes à leur ténacité, de leur natiode leurs traditions, au maintien nalité, et surtout de leur langue qui a produit une si belle oeuvre théâtrale, grâce aussi et surtout à la culture plus haule qu'ils tenaient de leurs assureront leur indéancêtres, les Arméniens et redeleur territoire pendance, agrandiront viendront un jour le grand peuple qu'ils furent une fois, à condition que les circonstances ne se montrent pas trop adverses et que l'humanité entière ne s'attache pas à assurer leur perte. 1. Cf. Les Raceshumaines. Les types. Les moeurs. Les coutumes... (Paris, Hachette et Cle.s. d.), gr. in-8°, p. 54 et 56.
BIBLIOGRAPHIE
DE
LA
PREMIÈRE
CONFÉRENCE (ORDRE
CHRONOLOGIQUE)
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
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EXTRAITS
DE
ROUMAINE
ET
DE
LA
PRESSE
ARMÉNIENNE
BUCAREST
FRÉDÉRIC
MACLER
1
Luni
a sosit la Bucureçti, un çir de pentru conferin^e în România, profesorul parisian Frédéric Macler. Rare ori un strâin a fàcut pentru un popor ceia ce a voit ci a izbutit a face pentru nenorocitul azi, odatâ aça de gloriosul prin culturâ, popor armenesc, d. Macler. Arta, atât de noua, a Armeniei Mari ci a Armeniei ca ci literatura maritime, §i viaÇa politica a acestor doua state a fost în curs de multà ani obiectul studiilor râbdâtoare ci rodnice aie acestui modest învâ^at caruia Armenii nu-i pot fi în destul de recunoscâtori. A strâbâtut lumea pentru a-i întregi trecutul. Celé « trei conferinÇe asupra Armeniei » pe care le-a publicat de curând unesc eu soliditatea fondului, forma deosebit de plâcutâ. 1. Extrait de Neamul Romanesc,n° du 28 juin 1927. TROIS CONFÉItENCES SURL'ARMÉNIE 10
170
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
Institutul sud-estice pentru studiul Europei a crezut câ aduce un serviciu deosebit publicului fâcându-1 sa cunoascâ, om nostru, printr'un eminent, o natie atâb de interesantâ. N. IORGA.
FRÉDÉRIC
MAGLER
Le professeur Frédéric Macler, est parisien, arrivé lundi à Bucarest, pour faire une série de conférences en Roumanie. Un étranger a rarement fait pour un peuple ce que M. Macler a voulu et a réussi à faire pour l'infortuné peuple arménien d'aujourd'hui, jadis si glorieux par sa culture. L'art, si nouveau, de la Grande Arménie et de l'Arménie ainsi que la littérature et maritime, la vie politique de ces deux états, ont été, pendant de nombreuses d'études années, l'objet et fécondes de ce savant modeste pour patientes ne peuvent avoir assez de qui les Arméniens reconnaissance.
EXTRAITS DE LA PRESSE
171
Il a parcouru le monde entier pour compléter l'histoire du passé de l'Arménie. Les Trois conférences sur l'Arménie faites à VUniversité de Strasbourg, qu'il vient de publier, unissent à la solidité du fonds, une forme singulièrement agréable. L'Institut pour l'Etude de l'Europe du Sudà notre Est croit faire une faveur particulière par l'intermépublic, en lui faisant connaître, diaire d'un homme éminent, une nation si inté" ressante 1. N. IORGA. 1. Ces extraits de la presse roumaine ont été aimablement traduits du roumain en français par M110Jossier.
PRO
ARMENIA
i
Institutul pentru studiul Europei sud-estice, una din creatiile solide aie d-lui prof. N. Iorga a prilejuit aducerea în t^arâ a unui savant istoric francez d. Frédéric Macler care va tine un ciclu de conferin|e asupra Armeniei si armenilor. D. Macler este savantul care a dat la luminâ celé mai remarcabile lucruri acestui asupra glorios si martir popor. Nu credem sa fie în istoria omenirei o tragédie mai înfîorâtoare ca istoria poporului armean eu un trecut si civiliza^ie glorios de culturâ dar peste care vicisitudinele aie neprielnice istorice s'au abâtut eu furia împrejurârilor iadului. Azi acest popor aproape desfiintat de câtre deslantaiirea barbariei Kurde si pe deoparte a bolsevipârjolul nimicitor de viat^â nationalâ cismului mai ruso-asiatic, pe de altâ parte, 1. Extrait de Politica, n° du 29 juin 1927.
EXTRAITS DE LA PRESSE
173
manifestare puternicâ fiinf.eazâ numai printr'o de culturâ ci artâ. fata globului, Risipit pe toatâ constiin^a nationalâ a acestui popor, la nimicirea câruia mai licâreste Europa civilizatâ a stat impasibilâ, doar în artâ si literaturâ. « mechemânâstirea Numai cine a vizitat nitilor » din insu!a de lângâ Vene^ia, eu grandioasa sa bibliotecâ, eu câlugâri, cercetâtori ai manuscriselor si ceaslovelor vechi benedictini, în care doarme eu ritualul gloria strâbunâ, arhaic al cultului, îsi poate da seama de calitâtile rasei din cari s'a zâmislit acest popor. Pe noi românii, acest popor ne intereseazâ nu numai din punct de vedere al solidaritâfài civilizate ci si în spécial popoarelor prin asezârile de armeni, încâ de pe timpul lui Stefan în Moldova si mai de mult în Transilvania, Bucovina si Basarabia. 0 parte din ei au fost caracterul dar mult^i si-au pâstrat asimilati, în mijlocul tolerantului nostru popor. national Ciclul de conformée aie d-lui prof. Macler, de simpatie ca o miscare poate fi considérât Pro Armenia si de aceia ele sunt binevenite si nu ne îndoim câ vor atrage masa intelectualitâtii noastre. TROIS 10* CONFÉRENCES SURL'ARMÉNIB
174 .
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
PRO
»
ARMENIA
L'Institut pour l'Etude de l'Europe du Sudcréations de M. le Est, une des plus importantes Professeur N. Iorga, vient d'inviter dans notre pays un savant français, l'historien M. Frédéric sur Macler, qui fera une série de conférences l'Arménie et les Arméniens. M. Macler est le savant qui a fait paraître ce les plus remarquables ouvrages concernant peuple glorieux et martyr. Nous ne croyons pas qu'il y ait dans l'histoire de l'humanité de tragédie plus effrayante que celle de ce peuple arménien, au passé glorieux par sa culture et sa civilisation, mais sur lequel avec une violence infernale, la fatas'abattit, lité des circonstances historiques. ce peuple à peu près anéanti Aujourd'hui, de la barbarie kurde d'un par le déchaînement côté, et le désastre du bolchevisme russo-asiade la vie nationale d'un autre tique, destructeur côté, n'existe plus que par une puissante manifestation de culture et "d'art. La conscience nationale de ce peuple, dispersé sur toute la surface du globe, à l'anéantissement
EXTRAITS DE LA PRESSE
175
civilisée a été impassible, brille duquel l'Europe encore dans l'art et dans la littérature. Seul celui qui a visité le monastère des Mekhitharistes établi dans une île près de Venise, avec ses moines, bénédicsa bibliothèque grandiose, les vieux manuscrits tins érudits qui interrogent où dort la gloire et les antiques livres d'heures du culte, des ancêtres, avec le rite archaïque seul celui-là peut se rendre compte des qualités de la race dont sort le peuple arménien. ce peuple ne nous Quant à nous Roumains, au point de vue de la intéresse pas seulement mais il nous des peuples solidarité civilisés; aussi spécialement intéresse à cause des établissements du temps d'Etienne en arméniens, Moldavie, et de ceux, plus anciens encore, en en Bucovine et en Bessarabie. Transylvanie, Un certain nombre d'entre eux se sont assiont gardé leur caractère milés, mais beaucoup national au milieu de notre peuple tolérant. de M. le professeur La série de conférences comme un mouveMacler peut être considérée ment de sympathie Pro Armenia ; aussi sontelles bienvenues et nous ne doutons pas qu'elles doivent attirer la masse de nos intellectuels.
PRIMA
A CONFERINTA PROF. F. MAGLERi
D. F.
D-LUI
a finut Macler, distinsul armenolog, la funda^ia Carol, în fa^a unei sali Duminicâ, arhipline, prima sa conferin^â, vorbind despre : « Armenia si armeni ». Dupa ce a mul^umit d-lui prof. N. Iorga, care a binevoit sa organizeze aceste conferin^e refed. Macler a spus, câ dacâ ritoare la Armenia. prin épopée se în^elege în gênerai o poemâ de mare întindere, destinata sa trateze un subiect acest cuvant eroic, la fel se poate întrebuin^a într'un sens figurât si a vedea într'o épopée o însiruire de ac^iuni eroice, constituind ^esâtura procesului istoric al unui popor. Acesta este în spécial cazul pentru na^iunea care a înfâptuit atâtea acte eroice si armeana, pentru care întreaga istorie nu este decât lupta 1. Extrait de Universul, n° du 29 juin 1927.
EXTRAITS DE LA PRESSE
177
unui popor avid de civiliza^ie, contra vecinilor invidiosi, cruzi si opresori. câ originile poporului Dupa ce a amintit, armean sunt învâluite de multâ obscuritate, d. Macler a fixât faptul, câ armera intrâ definitiv în istorie eu men^iunea câ se întâlnesc nume de-ale lor pe inscrip^iunile lui Darius, — in al Vl-lea secol înaintea lui Ghristos. Si, schid. Macler ^.ând un tablou prin mari trâsâturi, aratâ marile étape aie destinului armean, pânâ la sfârsitul ultimei dinastii armene, survenitâ la sfârsitul secolului XIV. Dar conferentiarul insista mai aies asupra armene si diasporei aceasta a constituit al conpunctul important ferinf.ei sale. Din toate timpurile, a spus d-sa, armenii fie voiajau mult, fie pentru cauze comerciale, ca studen^i, fie spre a se bucura de civilizatàa f,ârilor în care se duceau. Dar alâturi de aceastâ exista diaspora voluntarâ, impusâ diaspora de împrejurâri si d. Macler subliniazâ câ, delà începutul secolului al saptelea al erei noastre, se întâlnesc aproape peste tôt emigran^i armeni. marea miscare a diasConferentiarul analizeazâ porei armene sub un dublu aspect : cel al emigrârei în massa
si grupe,
si acel
al emigrârei
178
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
Si citeazâ ca exemple tipice de emiindividuale. gratiune în masse sau pe grupe : 1° miscarea de care urmâ luârei cetâ^ii Ani de emigratiune la sfârsitul secolului al câtre turcii seldjukizi, armenilor din valea 2° emigrarea nouâlea; arAraxului; 3° o atre ia miscare de diaspora meanâ este aceea care a avut loc în urma masaordonate de sultanul Abdulcrelor armenilor, Hamid ; 4° în sfârsit, a patra miscare de diaspora de masacrarea este aceea care a fost necesitatâ anului 1915 armenilor eu începere din primâvara si care se prelungeste pana în zilele noastre, câci numerosi sunt armenii cari alunga^i din pâmântul lor ancestral, n'au gâsit încâ col^ul ospitalier unde sa poatâ trâi linistit^i. Dupa aceea, d. Macler trece în revistâ câteva d-sa regretâ exemple de diaspora individualâ; de a nu putea cita un mai mare numâr. Dar, în a fiind prea scurt, se mârgineste timpul evoca câteva nume tipice, ca : Lucaci în Ungaria, Rafaël Mourad în Indii, Vasile Conta, Anton Pann, Teodor Aman, Missir, Spiru Haret în la Erzerum, Jean Althen România, Sanassarian în Fran|a, Nubar Pasa în Egipt, a cârui operâ a fost reforma judiciarâ a târii sale principala adoptive.
179
EXTRAITS DE LA PRESSE
insistând D-sa conchide priasupra locului mordial pe care Armenia îl ^ine prin existera în istoria generalâ a sa, de trei ori milenarâ, umanitâ^ii. A doua conferin^â va fi Miercuri, 29 Iunie, ora 11 dim., la funda^ia Carol I, când d-sa va vorbi ilustrând armeneascâ. despre arta si literatura conferint^a d-sale. prin projec^iuni
de « Diminea^a Voir l'Extrait du 1er juniei 1927. Cet article près, l'article
»,
en effet, à quelques reproduit « Dimineai^a ». du Journal
mots
DESPRE Conferinta
ARMENIA
SI
d-lui profesor
ARMENI F.
i
Macler.
D-l F. Macler, distinsul a ^inut armenolog Duminicâ 26 cor. în fa^,a unei sali arhipline, vorbind despre : Armenia ci prima sa conferinta, eu referire în spécial la Epopeea arArmeni, meanâ. câ originele Dupa ce a amintit poporului armean sunt învâluite de multâ obscuritate, d. Macler fixeazâ faptul câ armenii intrâ definitiv în istorie cumen^iunea^â seîntâlnescnume de aie lor pe inscrip^iunile lui Darius, — în al Vl-lea secol înaintea lui Christos,— si, schif,ând un tablou d. Macler aratâ prin mari trâsâturi marele étape aie destinului armean, pânâ la sfârsitul ultimei dinastii la sfârarmene, survenitâ situl secolului XIV. Dar conferenflarul insista mai aies asupra diasporei armene si aceasta a 1. Extrait de Viilorul, n° du 29 juin 1927.
EXTRAITS DE LA PRESSE
181
constituit al conferin^ei sale. punctul important Din toate timpurile armenii mult, voiajau fie pentru cauze comerciale, fie ca studentà, fie pentru a se bucura de civilizafia ^ârilor în care se duceau. Dar alâturi de aceastâ diaspora de împrevoluntarâ, exista, diaspora impusa jurari si d-1 Macler subliniazâ câ, delà începutul secolului al saptelea al erei noastre, se în^âlnesc armeni. aproape peste tôt emigranti Pârâsind diferitele în miscâri de migratiune masâ, d-1 Macler trece în revistâ câteva exemple de diaspora D-sa evocâ câteva individualâ. mime tipice ca : Lucaci în Ungaria, Rafaël Mourad în Indii, Vasile Conta, Anton Pann, Teodor Aman, Missir, Spiru Haret în România, Sanassarian la Erzerum, Jean Althen în Fran^a, Nubar Pasa în Egipt, a cârui operâ principalâ a fost reforma judiciarâ a t^ârei sale adoptive. D-1 este Macler aminteste, câ Armenia terminând, probabil ^ara unde exista celé mai numeroase mécène pentru a favoriza publicatiille armenesti a operelor armenesti ci dâ o lista impresionantâ care au vazut lumina si se dezvoltâ la Paris si în Fram)a. D-sa conchide insistând asupra locului primordial pe care Armenia îl t;ine prin existent^ 11 TROIS CONFÉRENCES SURL'ARMÉNIE
182
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
sa, de trei
ori milenarâ,
în istoria
generalâ
a
umanitSÇei. A doua conferin^â va avea loc mâine Miercuri 29 Iunie ora 11 dim. în aula Fonda^iei Carol. I, când d-sa va vorbi despre arta si literatura ilustrând prin proec^iuni conferin^a armeneascâ, d-sale.
Voir l'Exlraii de « DimineaÇa du 1er juillet 1927.
»
Get article reproduit aussi, quoique plus — (il omet de citer les brièvement exemples de diaspore en masse ou par groupes) — l'extrait du journal « Diminea^a ».
ARMENIA Prima
conferinia.
SI a d-lui
1
ARMENII profesor
F.
MACLER
a ^inut D. F. Macler, distinsul armenolog, Duminicâ în fa^a unei sali arhipline, prima sa conferinia, vorbind despre Armenia si armeni, eu referire în spécial la « Epopeea armeanâ ». Dupa ce a mulf,umit d-lui prof. N. Iorga, care a binevoit sa organizeze aceste conferin|e, d. Macler spune câ dacâ prin épopée se în^elege în sa gênerai o poema de mare întindere, destinatâ trateze un subiect eroic, la fel se poate între: o sens figurât într'un buin^a acest cuvant îasusire de actàuni eroice, constituind ^.esâtura procesului istoric al unui popor. Acesta este în spécial cazul pentru na^iunea atâtea fapte eroice, armeanâ, care a înfâptuit §i pentru care întreaga istorie nu este decât hipta unui popor avid de civiliza^ie, contra veciûilor indiviosi si opresori. 1. Extrait deDimineata, l«|juillet 1927.
184
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
ORIGINEA POPORULUI arDupa ce a amintit câ originile poporului mean sunt invâluite conîn multâ obscuritate, feren^iarul spune câ armenii intrâ defmitiv în numele lor pe insistorie, câci se întâlnesc lui Darius — în al Vl-Iea secol a. criptiunile C. D-sa aratâ apoi primele étape aie acestui popor pânâ la sfârsitul ultimei dinastii armene, insissurvenitâ la sfârsitul secolului XlV-lea, tând mai aies asupra diasporei armene." Din toate timpurile armenii voiajau mult, fie fie cauze comerciale, fie ca studen^i, pentru pentru a se bucura de civilizatia t/ârilor unde se duceau. Dar alâturi de aceastâ diaspora voluntarâ, exista si diaspora impusâ de împrejurâri. D. Macler subliniazâ secocâ delà începutul lului al Vll-lea se întâlnesc al erei noastre. aproape peste tôt, emigran^i armeni. CUM SE PREZINTA DIASPORA atrage atentia câ marea misConferen^iarul sub un care a diasporei armene, va fi analizatâ " dublu aspect : acela al emigrârii în massa §i grupe si acela al emigrârii individuale.
EXTRAITS DE LA PRESSE
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Se citeazâ ca exemple tipice de emigra^iune în massa sau pe grupe : 1° miscare de emigra4iune care urmâ luarea cetâ^ii Anei de câtre turcii seldjukizi, la sfârsitul secolului al IX-lea. armenilor 2° Emigrarea din valea Araxului, cari dupa ordinele sahului Abas, furâ transîn mod fortat la începutul secolului al porta^ la Ispahan a readuce prosXVII-lea, pentru peritatea în statele ruinate aie Persiei. Ei continuara lor spre Est §i emigra^iunea merserâ în câutarea unei asezâri mai norocoase în Indii si extremul Orient, în timp ce alti armeni originari din Djulfa-Nouâ, se îndreptarâ comerspre Fran^a si Olanda pentru practicarea l^ului mare; 3° 0 a treia miscare de diaspora este aceea care a avut loc în urma armeanâ, masacrârii armenilor ordonatâ de câtre sultanul Abdul Hamicl; 4° Insfârsit a IV-a miscare de de masaacrarea diaspora este aceea determinatâ armenilor eu începere din primâvara anului 1915 si care se prelungeste pânâ în zilele noastre, câci numerosi sunt armenii cari, alungati din lor ancestral, n'au gâsit înca col^ul pamântul ospitalier unde sa poatâ trâi linisti^i.
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
ARMENII LA NOI SI AIUREA Pârâsind
diferitele d. Macler
miscari de emigra|iuni în massa, trece în revistâ, câteva d-sa regretâ exemple de diaspora individualâ; de a nu putea cita un mai mare numâr.Dar timîn a evoca pul fiind prea scurt, se mârgineste câteva nume tipice ca : Lucaci în Ungaria, Rafaël Murad în Indii, Vasile Conta, Anton Pan, Theodor Aman, Missir, Spiru Haret în la Erzerum, Jean Althen România, Sanassarian în Frant^a, Nubar Pasa în Egipt, a cârui opéra a fost reforma judiciarâ a ^.ârii sale principalâ adoptive. D-sa conchide insistând asupra locului primordial pe care Armenia îl devine prin existent sa de trei ori milenarâ în istoria generalâ a umatablou al acestei nita^ii. A face un adevârat istorii si al acestei civiliza^ii, ar fi sa îndeplinesti o opéra de o adevaratâ stiintificâ, importante scriind în acelas timp o veritabilâ épopée naturala. D-sa déclara câ s'ar simti pe deplin despâgubit de munca sa, dacâ prin aceastâ conferinfâ, ar provoca la vre-unul din savan^ii califica^i,
EXTRAITS DE LA PRESSE dorinfa épopée.
§i voin|a
de a scrie
într'o
187 zi aceastâ
A doua conferin^â va avea loc Miercuri 29 IuCarol I, nie, orele 11 dim., în aula Funda^iei când d-sa va vorbi despre arta §i literatura eu proectiuni. armeneasca,
L'ARMÉNIE
ET
LES
ARMÉNIENS
Première conférence de M. le professeur F. MACLER.
M. F. Macler, le distingué arménologue, a fait sa dimanche, devant un public très nombreux, et les Armépremière conférence sur l'Arménie à l'épopée arméniens, se référant spécialement nienne. Après avoir remercié M. le professeur N. Iorga, ces conférences, qui a bien voulu organiser M. Macler explique que si l'on entend en général par épopée un poème de longue étendue, des-
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
tiné à traiter un sujet héroïque, on peut de même employer ce mot dans un sens figuré : un enchaîconstituant la nement d'actions héroïques, trame du processus historique d'un peuple. le cas pour la nation C'est tout spécialement auteur de tant d'héroïsmes et pour arménienne, tout entière n'est que la lutte laquelle l'histoire d'un peuple, avide- de civilisation, contre des voisins envieux et oppresseurs.
ORIGINE DU PEUPLE ARMÉNIEN Après avoir rappelé que les origines du peuple arménien restent dans l'obscurité, le conférendans cier fixe l'entrée définitive des Arméniens — par le fait que l'on trouve leur l'histoire, de Darius, — au vie siènom sur les inscriptions Il montre ensuite les precle avant Jésus-Christ. mières étapes de ce peuple, jusqu'à la fin de la c'est à-dire à la fin dernière dynastie arménienne, surtout sur la diaspore du xive siècle, insistant arménienne. De tous temps, les Arméniens ont beaucoup soit soit pour affaires commerciales, voyagé, comme étudiants, soit pour jouir de la civilisa-
EXTRAITS DE LA PRESSE
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Mais à côté de cette tion des pays où ils allaient. aussi la diaspore existait volontaire, diaspore M. Macler insiste imposée par les circonstances. le commencement sur le fait que depuis du viie siècle de notre ère, on rencontre presque pararméniens. tout des émigrants
COMMENT SE PRÉSENTE LA DIASPORE Le conférencier du public signale à l'attention de la diasqu'il va analyser le grand mouvement sous un double aspect : celui pore arménienne de l'émigration en masse et par groupes, et celui de l'émigration individuelle. Il cite comme exemples typiques d'émigration en masse ou par groupes : 1° Le mouvement qui suivit la d'émigration prise de la cité d'Ani, par les Turcs seldjukides, à la fin du xie siècle; de la vallée 2° L'émigration des Arméniens de l'Araxe, qui, selon les ordres du shah Abas, au comfurent transportés de force à Ispahan, la mencement du xvne siècle, pour ramener dans les états ruinés de la Perse. prospérité Ils continuèrent leur émigration vers l'Est H* SURL'ARMÉNIE TROISCONFÉRENCES
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
et allèrent favorables
à la recherche d'établissements plus clans les Indes et en Extrême-Orient, Arméniens, originaires cependant que d'autres vers la de la Nouvelle Djoulfa, se dirigeaient France et la Hollande pour faire du commerce en gros; de diaspore armé3° Un troisième mouvement nienne est celui qui s'est produit à la suite du ordonné par le sultan massacre des Arméniens, Abdul-Hamid ; 4° Enfin, un quatrième mouvement de diasdes Armépar le massacre pore fut déterminé niens au commencement du printemps de l'année 1915 et se prolonge jusque de nos jours, car nombreux sont les Arméniens qui, éloignés du sol n'ont pas encore trouvé le coin hosancestral, pitalier où ils pourront vivre tranquilles.
LES ARMÉNIENS CHEZ NOUS ET AILLEURS de côté les différents mouvements en masse, M. Macler passe en revue d'émigration de diaspore quelques exemples individuelle; il regrette de ne pouvoir en citer un plus grand jiombre. Mais le temps dont il dispose étant trop Laissant
EXTRAITS DE LA PRESSE
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il se borne à évoquer noms tyquelques tels que Lucaci en Hongrie, piques, Raphaël Murad aux Indes, Vasile Conta, Anton Pann, Théodore en RouAman, Missir, Spiru Haret à Erzeroum, Jean Althen manie, Sanassarian en France, Nubar Pacha en Egypte, dont court,
l'oeuvre principale a été la réforme judiciaire de son pays adoptif. M. Macler conclut en insistant sur la place dans l'histoire l'Arménie que détient principale trois générale de l'humanité par son existence fois millénaire. Faire un tableau fidèle de cette histoire et de cette civilisation serait accomplir une oeuvre de véritable importance scientifique, en même temps qu'écrire une épopée naturelle vraie. Il déclare qu'il se sentirait entièrement dédomsi par cette conférence, il magé de son travail, chez un des savants le qualifiés, provoquait désir et la volonté d'écrire un jour cette épopée. aura lieu mercredi La deuxième conférence 29 juin, à 11 heures du matin, dans la salle de la fondation Carol I. M. Macler parlera de l'art et de la littérature arméniens. La conférence sera accompagnée de projections.
D-LUI IN ONOAREA F. MAGLER i PROF.
din România si colonia armenilor Uniunea au oferit eri seara, la gradina Chadin Bucuresti in onoarea distinsului un banchet teaubriand, d. F. MACLER. savant si strâlucitului armenolog D. Prof. N. Iorga fiind re^inut in altâ parte, a fost reprezentat prin d. avocat A. Chemale, Inslitutului Sud-Est administratorul European. rostite de d-nii Manissalian, In discursurile Presedintele coloniei arUniunei, presedintele V. Mesiugean si al^ii, s'au mène din Bucuresti, adus elogii mari personalitâtii stiin^ifice a sârin spécial asupra recuinsistându-se bâtoritului, acestui neobosit nostin^ei pe care o datoreste al trecutului, cercetator care armean, poporul a inscris prin viat^a lui de pânâ una din celé mai tragice epopei traite. S'au adus laude si mul^umiri d-lui Prof. 1. Extrait de Nçamul Romanesc,n° du 1erjuillet 1927.
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EXTRAITS DE LA PRESSE
N. Iorga care in mod constient a arâtat un deosebit interes istoriei si suferint^elor poporului armean si a avut deosebita aten^ie fa|a de colonia armeneascâ din România, invitând pe cel mai califlcat dintre savantii sa Occidentului, vinâ în România pentru a face cunoscute origiarta si literatura acestui popor nea, trecutul, harnic si nefericit. D. Prof. MACLER mul^umind tuturor pentru calda primire, a arâtat cum se lucreazâ in Fran^a chestiunea atât pe terenul armeneascâ, pentru cât si pe cel practic, stiintific, prin operile de având de a uçura binefacere, scopul viat^a incâ prin armeni, cari mai râtâcesc refugiasilor lume in câutarea unui câmin primitor. D-sa a din nou si eu câldurâ d-lui Prof. mult^umit N. Iorga care a dat prilejul sa viziteze una clin colonii armene din lume. celé mai înfloritoare CRONICAR.
DE
EN L'HONNEUR M. LE PROFESSEUR
F.
MACLER
h'Union des Arméniens de Roumanie et la colonie arménienne de Bucarest ont offert hier un banquet soir, dans le jardin Chateaubriand,
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
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et illustre du savant distingué M. F. Macler. arménologue, ailleurs M. le professeur Iorga étant retenu M. A. Chemale était représenté par l'avocat euroadministrateur de l'Institut du Sud-Est en
l'honneur
péen. Dans
les discours
prononcés par MM. Manisde l'Union, et de la colonie salian, président arménienne de Bucarest, V. Mestugean, etc., de grands éloges ont été prodigués à la personnalité scientifique de l'invité; on a insisté spécialement sur la reconnaissance que doit à cet chercheur du passé le peuple arméinfatigable nien qui a tracé par sa vie même une des plus tragiques épopées vécues. et remerciements ont été adressés Louanges à M. N. Iorga qui a toujours témoigné un intéet les souffrances rêt particulier pour l'histoire et a eu une attention du peuple arménien délide Roumanie cate pour la colonie arménienne en invitant le plus qualifié des savants de l'Occident à venir en Roumanie pour faire connaître de ce le passé, l'art et la littérature l'origine, et malheureux. peuple travailleur tout M. le professeur Macler, en remerciant le monde de l'accueil chaleureux qu'il a trouvé,
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comment l'on travaille a expliqué en France tant sur le terrain pour la question arménienne, que pratique, par des oeuvres de scientifique avec le but de faciliter la vie des bienfaisance, arméniens encore dans le qui errent réfugiés d'un foyer hospitalier. Il monde à la recherche a remercié de nouveau et très chaleureusement M. le Professeur N. Iorga qui lui a donné l'occasion de visiter l'une des plus florissantes colonies du monde. arméniennes
ASUPRA CONSIDERATIUNI ARMENESTI ARTEI a d-lui » conferintû l MACLER F. Professeur
A doua
D. Prof. Frédéric Macler a Çinut Joi 30 Iunie vorbind ora 9 seara, a cloua conferin^â, despre : asupra artei armenesti. Considera^iuni originele comune aie Dupa ce d-sa a amintit artei ci aie religiei, stabileste faptul câ civilizafia este mai înainte de toate o civiliza^ie armeanâ crestinâ si câ nu s'ar putea spune nimic referitor la o civilizatie armeanâ pâgânâ. Civiliza|.ia armeanâ aratâ în chip évident câ poporul armean a avut în toate timpurile o predilecfie foarte proei celé mai artâjîn manifestârile nun^atâ,pentru diverse. Si conferen^iarul trece succesiv în revistâ artele minore si artele majore. Artele minore ca giuvaergeria, ciselura, emai1. Extrait de Neamul Iîomanesc.n° du 3 juillet 1927.
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foarte de timpuaplicata, au fost cultivate La chiar, de câtre armeni. riu, poate inventate fel covoarele armene erau célèbre déjà în secolul In ceeace priveste al VII ci VIII al erei noastre. s'au bucurat broderiile ci dantelele armenesti,ele meritatâ si univerîn totdeauna de o reputa^ie armenesti erau cunossalâ. In sfârsit faian^ele si numeroase dincute pretutindeni, exemplare eu nume de maestri artre ele sunt semnate
Iatura
meni. succesiv artele majore, se analizeazâ Printre de câtre conferen^iar, si arhitectura, sculptura muzica. în mod Arhitectura a fost studiatâ religioasâ de câtre istoricii de artâ, si s'a ajuns particular la rezultate în ceeace destul de satisfâcâtoare, priveste influen^ele pe care le-a suferit, precum si acelea pe care le-a exercitat. Distinsul confeîn eviden^â stiluri principalele astfel ca stilul de armenesti, stilul de ornamenta^ie, ordinar, construc^iune stilul religios, si économie si în stilul politic sfârsit stilul militar. Toatâ aceastâ arhitectura armeneascâ se întinde pe o scarâ, mergând din secolul al IV în secolul al XIV al erei noastre. In d. profesor Macler presprijinul explica^iunilor
scoate ren|,iar aie arhitecturei
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
zinta un numâr de proec^iuni, care intereseaza foarte mult auditoriul. In ceeace priveste mai aies picturile pictura, în Armenia murale, ele nu au o mare desvoltare si au fost introduse mai aies sub influença sirianâ si bizantinâ, frescele care s'au descoperit într'unele mânâstiri din Egipt, scot la ivealâ nume de pictori armeni. armeanâ împrumutâ motivele sale Sculptura de ceaprazerie, si se remarcâ re|elelor galoane cari încadreazâ si fac borîmpletite panourile dura dealungul frizelor. Cât priveste despre coloarea si caligrafia ea dateazâ manuscriselor, poate din secolul al VII si VIII al erei noastre, dar nu se cunosc astâzi manuscrise armene copiate înainte de anul 887, aceasta este tetraevanghelia, zisâ, delà Moscova. Vorbind despre muzicâ, conferentiarul afirmâ câ ea a fost desigur cultivatâ delà început în dar nu exista probe. In evul mediu Armenia, imnurile se înmultesc mult si mai religioase târziu în secolul al XVIII, Baba Hambartzunian fâcu o reforma muzicalâ si introduse oarecari régule, care furâ în gênerai adoptate dupa moartea sa. In sfârsit d-sa a evocat opéra muzide primul ordin al lui P. Komitas si cograficâ
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detalii pre|ioase si intedâ, dupa acest savant, resante asupra muzicei populare a armenilor. d. F. Macler conchide : "Pare câ Si rezumâncl, asositmomentul ca lumea sa se ocupe de armeni si pentru alte motive, decât pentru omorurile de care au fost încerca^i. Studiul si cunostin^a arte sale în diversele manifesta^iuni nu va contribui pu^in ca sa arate poporul armean sub o luminâ oarecum noua, dar va da la ivealâ auréola unei glorii si a unei majestâ^i de câteva ori secularâ". Ultima conferint^â a d-lui prof. Macler are loc 3 Iulie ora 11 dimmea|a tôt în localul Duminicâ Fundatiei Carol I. D-sa va vorbi despre : Teatrul armean.
CONSIDÉRATIONS SUR L'ART ARMÉNIEN La deuxième conférence MACLER de M. le professeur!?. M. le professeur Frédéric Macler a fait le jeudi 30 juin, à 9 heures du soir, sa seconde conférence dont le sujet était le suivant : Considérations sur l'art arménien.
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
les origines communes Après avoir rappelé de l'art et de la religion, il pose ce principe que est avant tout une la civilisation arménienne et qu'on ne saurait chrétienne rien civilisation dire sur une civilisation arménienne païenne. La civilisation montre d'une façon arménienne a eu de tous évidente que le peuple arménien une préférence très marquée temps pour l'art les plus diverses. dans ses manifestations Et le en revue les conférencier passe successivement arts mineurs et les arts majeurs. comme la joaillerie, la ciseLes arts mineurs ont été cultivés de lure, l'émaillerie appliquée, même inventés très bonne heure et peut-être De même les tapis arméniens par les Arméniens. étaient déjà célèbres au vne et au vme siècles de notre ère. En ce qui concerne les broderies et les dentelles elles ont toujours arméniennes, méritée et universelle. joui d'une réputation étaient connues Enfin, les faïences arméniennes et nous en possédons de nombreux partout exemplaires signés par des maîtres arméniens. le conférencier Parmi les arts majeurs, examine successivement la sculpture l'architecture, et la musique. a été étudiée L'architecture parreligieuse
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de l'art et on ticulièrement par les historiens assez satisfaisantes est arrivé à des conclusions en ce qui concerne les influences qu'elle a subies, ainsi qu'en ce qui concerne celles qu'elle a exerles princaractérise conférencier cées. L'illustre de l'architecture arménienne, styles cipaux le des constructions, comme le style ordinaire le style d'architecture style d'ornementation, et enfin miliet économique religieuse, politique arménienne architecture cettetaire. Toute s'étend sur une échelle allant du ive au xive siède ses explications, cle de notre ère. A l'appui un certain Macler présente M. le Professeur nombre
de projections
qui intéressent
beaucoup
l'auditoire. les surtout la peinture, En ce qui concerne un eu n'ont elles grand pas murales, peintures et ont été introen Arménie développement et sous les influences duites surtout syrienne Les fresques qui ont été découvertes byzantine. en mettent monastères dans quelques d'Egypte lumière les noms de peintres arméniens. ses motifs arménienne La sculpture emprunte et l'on remarque, aux filets de passementerie les panentrelacés des galons qui encadrent le long des frises. En ca neaux et font bordure
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
des le coloris et la calligraphie qui concerne du VIIe ou du ils datent peut-être manuscrits, vme siècle de notre ère, mais on ne connaît pas de manuscrits arméniens copiés aujourd'hui à l'année antérieurement 887, et ce sont les de Moscou. quatre Evangiles affirme le conférencier Parlant de la musique, a sûrement été cultivée en Arménie qu'elle dès les débuts, existe mais il n'en point de preuves. se mulAu moyen âge les hymnes religieuses et plus tard, au xvme siècle, Baba tiplièrent, fit une réforme musicale et inHambartzumian troduisit certains principes qui en général furent adoptés après sa mort. Enfin, M. Macler évoque de premier ordre du l'oeuvre musicographique à ce savant, et donne, se référant P. Komitas et intéressants des détails précieux sur la mudes Arméniens. sique populaire M. F. Macler conclut : « Il Et, résumant, semble que le moment soit venu, pour le monde, des Arméniens autrement de s'occuper que et la connaissance L'étude pour les massacrer. ne de leur art dans ses diverses manifestations le peuple armécontribuera pas peu à présenter et fera apparaître nien sous un jour nouveau
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l'auréole d'une gloire et d'une majesté plusieurs fois séculaires. La dernière de M. le professeur conférence Macler aura lieu le dimanche 3 juillet à 11 heures du matin, également dans le local de la Fondadu théâtre tion Carol I. M. Macler traitera arménien.
CONSIDERATII ASUPRA 1 ARTEI ARMENESTI A doua
conferinla
a d-lui
prof. F. MACLER.
D. prof. Frédéric Macler a ^inut Joi 30 Iunie ora 9 seara, a doua conferinla, eu objectivul « Consideraf,iuni asupra artei armenesti ». Dupa ce a amintit originile comune aie artei câ civilizatia §i aie religiei, stabileste faptul armeanâ este mai înainte de toate o civiliza^ie referitor creçtinâ ci câ nu s'ar puteaspunenimic la o civilizafie armeanâ pâgânâ. Giviliza^ia armeanâ aratâ în chip évident câ poporul armean a avut în toate timpurile o predilecfie foarte pronun^atâ pentru artâ, în manif estârile e celé mai diverse. Si conferen^iarul trece succesivîn revistâ artele minore ci artele majore. Artele minore, ca giuvaergeria,ciselura, emaifoarte de timpulajul aplicat, au fost cultivate 1. Extrait de Dimineala, n° du 3 juillet 1927.
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La chiar de câtre armeni. riu, poate inventate fel covoarele erau célèbre în secolul al VII si In ceeace priveste broVIII al erei noastre. ele s'au bucurat în deriile si dantelele armenesti, totdeauna de o reputa^ie meritatâ si universalâ. erau cunoscute In sfârsit, faianÇ,ele armenesti " ele si numeroase dintre exemple pretutindeni sunt semnate eu nume de maestri armeni. succesiv artele majore, se analiseazâ Printre de câtre arhitectura, sculptura, conferen^iar, pictura si muzica. Arhitectura în mod religioasâ a fost studiatâ de artâ si s'a ajuns de câtre istoricii particular la rezultate destul de satisfâcâtoare, în ceeace priveste influen^ele pe care le-a suferit, precum si acelea pe care le-a exercitat. Distinsul confestiluri principalele ren^iar scoate în eviden^â aie arhitecturei astfel ca stilul de armenesti, stilul de ornamenta^ie, ordinar, construc^iune stilul religios, stilul politic si în si économie sfârsit stilul militar. Toatâ aceastâ arhitectura armeneascâ se întinde pe o scarâ, mergând din. secolul al IV pânâ în secolul al XIV al erei noastre. In sprijinul explica^iunilor d. prof. Macler prezintâ un numâr de proec^iuni, care intereseazâJoarte mult auditoriul» TROIS CONFÉRENCES SURL'ARMÉNIB
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In ceeace priveste pictura, mai aies picturile murale, ele nu au o mare desvoltare în Armenia si au fost introduse în deosebi sub influença siriana ci bizantinâ; frescele care s'au descoperit într'unele din Egipt, scot la ivealâ mânâstiri nume de pictori armeni. motivele sale armeanS împrumuta Sculptura re^elelor de ceaprazerie, fi se remarca galoane cari încadreazâ si fac borîmpletite, panourile dura dealungul frizelor. Cât priveste colorarea si ea dateazâ poate din caligrafîa manuscriselor, dar nu secolul al VII si VIII al erei noastre, se cunosc astâzi armene manuscrise copiate înainte de anul 887; aceasta este Teîraevanghelia, zisâ delà Moscova. Vorbind despre muzicâ, conferen^iarul afirma ca ea a fost desigur cultivatâ delà început în dar nu exista probe. In evul mediu Armenia, imnurile mult si mai se înmul^esc religioase târziu în secolul al XIII, Baba Hambartzunian fâcu o reforma muzicalâ si introduse oarecare care furâ în gênerai régule, dupa adoptate moartea sa. In sfârsit d-sa a evocat opéra muzicograficâ de primul ordin a lui P. Komiîas si dâ, dupa acest savant, detalii pre^ioase fi interesante asupra muzicei populare a armenilor.
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Si rezumând, d. F. Macler conchide : « Pare ca a sosit momentul ca lumea sa se ocupe de armeni alte motive, decât pentru fi pentru omorurile de care au fost încerca^i. Studiul si cunostin^a artei armenesti în diversele manu va contribui nifesta^iuni pu^in ca sa arate armean sub o luminâ oarecum noua poporul dar va da la ivealâ auréola unei majoritô^i de câteva ori secularâ ». a d-lui prof. Macler are loc Ultima conferin^â Duminica 3 Iulie ora 11 dim. lot în localul Fonda^iei Carol I, când va vorbi despre : Tealrul armean.
CONSIDÉRATIONS SUR L'ART ARMÉNIEN Deuxième conférence F. MACLER. de M. le professeur
Le contenu est exactement le même que celui de la page 196, extrait de Neamul Românesc n° du 3 juillet 1927.
ASUPRA CONSIDERATIUNI ARMENESTI ARTEI A doua conferinia
a d-lui prof. F.
MACLER \
D. prof. Frédéric Macler a ^.inut Joi 30 Iunie, vorbind despre : ora 9 seara, a doua conferinia, asupra artei armenesti. Considera^iuni Dupa ce a amintit originile comune aie artei faptul câ civiliza^ia arci aie religiei, stabileste meanâ este mai înainte de toate o civiliza^ie crestinâ si cS nu s'ar putea spune nimic referitor armeanâ la o civiliza^ie pagânâ. Civilizafia aratâ în chip évident armeana câ poporul armean a avut în toate timpurile o predilec^ie foarte pronun^atâ pentru artâ, în manifestante ei celé mai diverse. Si conferen^iarul trece succesiv în revista artele minore si artele majore. Artele ca : giuvaergeria, minore, ciselura, emailatul aplicat, au fost cultivate foarte de tim1. Extrait de Vniversul, n° du 3 juillet 1927.
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puriu de câtre armeni. La fel, covoarele armene erau célèbre încâ din secolele al VH-lea si al VlII-lea aie erei noastre. In ce priveste broderiile totarmenesti, ele, s'au bucurat ci dantelele deauna de o reputa^ie meritata In ci universalâ. erau cunoscute sfârsit faian^ele armenesti pretusunt semnate eu tindeni ci numeroase exemplare nume de maestri armeni. Printre artele majore,conferentiarulanalizeazâ si muarhitectura, successiv, sculptura, pictura zica. Arhitectura a fost studiatâ în mod religioasâ de câtre istoricii de artâ si s'a ajuns particular la rezultate destul de satisfâcatoare, în ce priveste influenÇele pe care le-a suferit, precum si acelea pe care le-a exercitat. Distinsul conferenstiluri aie ^iar scoate în évidents principalele arhitecturii astfel ca stilul de consarmenesti, stilul de ornemanta^ie, stilul ordinar, truc^iune religios, stilul politic si économie si în sfârsit cel militar. Toatâ aceasta arhitectura armeneascâ se întinde pe o scarâ, mergând din secolul al IV-lea al erei noastre. In pânâ în secolul al XlV-lea d. prof. Macler prezintâ sprijinul explica^iilor, un numâr de proec^iuni, foarte ce intereseazâ mult auditorul. 12* TROIS SDRL'ARMÉNIH CONFÉRENCES
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mumai aies picturile In ce priveste pictura, si au în Armenia rale, ele n'au mare desvoltare si sirianâ mai aies sub influença fost introduse într'unele bizantina; frescele, ce s'au descoperit din Egipt, scot la ivealâ nume de picmânâstiri tori armeni. sale motivele împrumutâ remarcâ si se de galoane ceaprazârie re|elelor si facbordura cari încadreazâ panourile împletite frizelor. dealungul manuscricolorarea si caligrafia Cât priveste poate din secolele al VH-lea si selor, ea dateazâ aie erei noastre, dar nu se cunosc astâzi VHI-lea armene copiiate înainte de anul 887. manuscrise zisa delà Moscova. Aceasta este tetraevanghelia afirmâ Vorbind despre muzicâ, conferen^iarul delà început în Arcâ ea a fost desigur cultivatâ imnumenia, dar nu exista probe. In evul-mediu, mult si mai târziu. în rile religioase se înmul^esc a al XVIII-lea Baba secolul HambarÇunian si a introdus fâcut o reforma muzicalâ oarecare dupa moarreguli, care fura în gênerai adoptate tea sa. In sfârsit d-sa a evocat opéra muzicograficâ de primul ordin a lui P. Komitas si dâ, dupa acest savant, detalii pre^ioase si interesante a armenilor. asupra muzicii populare Sculptura
armeanâ
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d. F. Macler conchide : "Pare câ Rezumând, a sosit momentul ca lumea sa se ocupe de armeni ci pentru alte motive decât pentru omorurile de care au f ost încerea^i. Studiul si cunostin^a artei sale în diversele nu va contribui manifesta^ii pu|,in ca sa arate poporul armean sub o luminâ oarecum noua, dar va da la ivealâ auréola unei de câteva ori secularâ. glorii si a unei majestâ|i D. prof. Macler f,ine ultima conferin|,â Duminica 3 Iulie, ora 11 dim., tôt în localul funda'|iei "Carol I". D-sa va vorbi despre : Teatrul armean.
CONSIDÉRATIONS L'ART SUR ARMÉNIEN Deuxième conférence de M. le professeur F. MACLER. Le contenu est le même page 196, extrait de « Neamul 3 juillet 1927.
que celui de la Românesc » N° du
DESPRE
TEATRUL
ARMEAN
Ultima conferinia a d-lui profesor MACLER X
D. prof F. Macler a tanut Sâmbâtâ, la Fundadin ciclul anun|at, ^ia Carol I, ultima conferinia vorbind despre teatrul armean. Fârâ a intra în prea multi detalii, d-sa aratâ prin câteva trâsâturi, câ armenii au doua dialecte literare principale : unul oriental eu centre la Tiflis ci Erivan, iar altul occidental,eu câminuriliterare la Constantinopol ci la Smirna. In fiecare din aceste dia lecte literare, armenii au produs o prea frumoasâ mai aies în vechea Arménie ruopéra teatralâ, de mai multâ libertate, seascâ, unde se bucurau ca în Armenia tureâ. Pe la mijlocul secolului XIX ia nastere ci se armean la Tiflis, gracie îngrijidesvoltâ teatrul Dar Patkanian. rilor ci eforturilor impresarului 1. Extrait de Dimineala, 3 juillet 1927.
EXTRAITS DK tA PRESSE
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al teatrului armean orienparintele necontestat tal este Gabriel Sundukiants, aie cârui lucrâri, mai aies Pepo, pot suferi comparatàa eu oricare Si d-1 prof. Macler a piesâ din oriee repertoriu. analizat în detaliu principalele piese aie lui Sundukiants. D-sa analizeazâ apoi opéra teatralâ a lui Sirvanzade, a lui Santh si a lui Aharonian, precum si a altora cari au produs un teatru national armenesc, de cel mai viu interes. Trecând la Armenia d. Macler occidentalâ, expune în câteva cuvinte originele teatrului produs în dialectul ace§tei ^ari. Mai intâi la Vene^ia au fost scrise un oarecare numâr de piese, dar care nu au fost publicate; acestea au fost scrise sub îngrijirea lui P. Mekhitaristes. In urmâ teatrul sfârsi prin a se fixa la Constantinopol, unde se joacâ mai întâi traduceri din diverse repertorii europene, care n'au un prea mare succès pe A început sa se scrie armean. lângâ publicul piese, a câror subiecte au fost extrase din istoria nationalâ armeanâ, §i succesul lor a mers crescând fat^â de publicul armean, gracie, mai aies, eforturilor lui Besiktaslian. Turcii însâçi au prins gustul teatrului ci s'a observât câ, în timp de câ^iva ani, armenii §i turcii au purtat cel mai viu interes manifesta^iu-
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cartiere loc îndiversele otoman. Piesele armeimperiului din istoria nu au fost na^ionalâ pânâ în ziua când Abdul Hamid deveinterzise, nind bânuitor a fa^â de aceste manifesta^iuni, interzis orice manifestante teatralâ din supusilor imperiul sâu si procéda delà 1895-1896 la politica din care trebuia de masacre, sa se perpetueze, partea turcilor, pânâ în ultimii ani. istoricâ Si d. Macler termina printr'o paralelâ între Armenia si România. Câtre 1877, spune d-sa, România nu era prea mare. Ea fusese obiec: dar ea tul multor si multor atacuri invaziuni sa în viitor; ea conintactâ conserva credin^a unci si mostenirea serva limba sa, na|ionalitatea culturi superioare, pe care o avea delà stramosl si acestei mostenitori, Si grafie acestei tenacitâ^i în 1927 cinquantenarul ea putu sa celebreze, sale si sa se bucure de întregirca independen^ei nilor teatrale aie Capitalei nesti scoase
cari au avut
sale. grani^elor a conservât intactâ ca deasemenea, Armenia, unei culturi mostenirea superioare, provenind limba delà strâmosii sa, literasâi; ea conserva mai aies tura si na^ionalitatea sa; ea conserva intr'un viitor mai bun. nestrâmutatâ credin^a la fel ca ci România, Nu exista ni ci o îndoialâ,câ
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ea va redeveni într'o zi marele popor care a fost odatâ, eu condi^ia ca celelalte popoare sa nu se la perderea îndârâtniceascâ sa, ci din contra, sa-i întindâ o mânâ ajutâtoare.
DU
AU SUJET THÉÂTRE ARMÉNIEN
La dernière conférence MACLER de M. le professeur
M. le Professeur Macler a fait samedi, à la Fondation Carol I, la dernière de ses conférences, nous parlant du théâtre Sans entrer arménien. dans de trop nombreux détails, M. Macler exposa brièvement que les Arméniens ont deux dialectes littéraires : l'un, oriental, dont les principaux centres sont Tiflis et Érivan, et l'autre occidental dont les foyers littéraires sont Constantinople et Smyrne. En chacun de ces dialectes littéraires, les Arméniens ont produit une oeuvre théâtrale fort Arménie russe où belle, surtout dans l'ancienne ils jouissaient d'une plus grande liberté que dans l'Arménie turque.
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C'est vers le milieu du xrxe siècle que le théâtre arménien naquit et se développa à Tiflis, grâce aux soins et aux efforts de l'imprésario Patkanian. Mais le père incontesté du théâtre arménien oriental est Gabriel Soundukiants, dont les la oeuvres, surtout Pêpo, peuvent supporter avec n'importe comparaison quelle pièce de Et M. le Professeur n'importe quel répertoire. Macler analyse en détail les principales pièces de et d'autres qui ont conGhanth, et d'Aharonian un théâtre tribué à former arménien national des plus intéressants. à l'Arménie Passant M. Macler occidentale, expose en quelques mots les origines du théâtre écrit dans le dialecte de ce pays. C'est d'abord à Venise que furent écrites plusieurs pièces, qui ne furent pas publiées; d'ailleurs elles oïtt été écrites par les soins des pères Mekhitharistes. Ensuite le théâtre finit par se fixer à Constantides traductions emnople où l'on joua d'abord européens, mais qui pruntées à divers répertoires n'eurent pas un très grand succès auprès du puà écrire des pièces blic arménien. On commença dont les sujets étaient tirés de l'histoire nationale et leur succès alla, croissant arménienne, auprès
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du public arménien, grâce surtout aux efforts de Bechiktachlian. Les Turcs eux-mêmes le goût du prirent théâtre et l'on observa que, pendant quelques et Turcs prirent l'intérêt le années, Arméniens théâtrales qui avaient plus vif aux manifestations lieu dans les différents quartiers de la capitale de Les pièces arméniennes, til'Empire ottoman. rées de l'histoire ne furent pas internationale, dites jusqu'au jour où Abdul-Hamid, se méfiant de ces manifestations, interdit toute manifestation théâtrale aux sujets de son empire et procéda à partir de 1895-1896, à la politique de massacres qui devait se perpétuer, de la part des Turcs, jusqu'à ces dernières années. Et M. Macler termine en établissant un parallèle historique et la Roumaentre l'Arménie nie. Vers 1877, dit-il, la Roumanie n'était pas très Elle avait été l'objet de nombreuses grande. et d'invasions mais elle nombreuses; attaques conservait intacte sa foi en l'avenir; elle conservait sa langue, sa nationalité et l'héritage d'une culture supérieure qu'elle tenait de ses ancêtres. Et grâce à cette ténacité et à cet héritage, elle de son put célébrer en 1927 le cinquantenaire TROIS CONFKnENCES suit I-'AItMÉNIE 13
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et se réjouir d'avoir réalisé l'intéindépendance gralité de ses frontières. a conservé De même l'Arménie l'héritage d'une culture supérieure, léguée par ses ancêtres ; elle a conservé sa langue, sa littérature et sa elle conserve surtout sa foi en un nationalité; avenir meilleur. On ne peut mettre en doute que, elle ne redevienne un jour ainsi que la Roumanie, le grand peuple qu'elle fut jadis, à la condition pas à sa que les autres peuples ne s'obstinent lui tendent une main perte, mais au contraire, secourable.
ARAFAT Anul
IV.Iulie
1927, n° 37.
SUMARUL Sosirea
d-lui
Celé trei prof. Macler in Capiiala. de la Fondatia Carol. Cuvântarea conferinte d-lui prof. G. Murnu. Banchelul de Chateaubriand. Vizila d-lui prof. Macler la Gherla. D-LUI SOSIREA IN MACLER FR.
PROF. BUGURE§TI
N. lorga, presedintele Invitât de d. profesor Institutului de studii Sud-Est European, distinsul savant d. profesor F. Macler, profesor si admi« Société des Etudes arnistrator al Institutului » din Paris, a sosit Luni 19 lunie în méniennes Capitalâ spre a ^ine o série de trei conferinte despre Armenia si Armeni. In lipsa d-lui profesor N. lorga, distinsul oaspete a fostsalutatded. AntonChemale,însârcinat
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în acest scop de d. profesor lorga, de d. si de delega^ii Uniunei profesor Constantinescu si V. d-nii S. Kehiaian Armenilor din România, anume
Mestugean.
PERSONALITATEA D-LUI PROFESOR MACLER D. Frédéric Macler, profesor la Scoala Na^ionalâ pe limbi orientale din Paris, fâcu, ca orienîn Siria, Palestina si în talist, multe câlâtorii El îsi dete seamâ câ poporul armean Armenia. sale maniera prea pu^.in cunoscut în multiplele artistice si stiin^ifice. literare, festa^ la Ecimiazin Astfel, îndatâ dupa o câlâtorie unei Mi ci publicarea (1909), d. Macler hotârâ Biblioteci Armene, al cârei prim volum apâru în successiv 1910. De atunci zece volume vâzurâ iar al 11-lea este în pregâtire. lumina tiparului, Pe lângâ literatura purâ, d. Macler a câutat sa dea o impulsiune noua filologiei armene, cum ci Istoriei, si propriile-i lucrâri cum si aie celor mai buni dintre elevii sâi, aratâ important filologiei ca auxiliarâ reconstituirea edificiului pentru istoric. In cursul numeroaselor sale câlâtorii si vizite-
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lor ce fâcu bibliotecelor si depositelor de arhive din Europa, d. Macler a relevât prezem^a mai multor documente de artâ armeneascâ, cari deschid un orizont eu totul nou pentru cei cari se intereseazâ de chestiunile de artâ în gênerai si în particular de arta orientais. Chestiunea influde diferitele civilien^elor suferite sau exercitate si occidentale, este încâ foarte conza^ii,orientale Multe elemente de informatiuni troversatâ. lipsesc pânâ acum.Publica^iilepe cari d. Macler le-a consacrât artei armene vor contribui poate la elucidarea cel pu^ina unei pâr^i a acestei chestiuni. In fine, imediat dupa râzboi, în iarna anului 1919-1920, d. Macler fonda, împreunâ eu amicul sau, d. profesor A. Meillet, Société des études care are de scop de a se ocupa de Arméniennes, toate studiile la lumea referitoare armeanâ; aceastâ societate publicâ, eu începere din anul apârând 1920, o Revistâ a Studiilor Armenesti, de doua ori pe lunâ, si unde se trateazâ despre toate chestiile literare, artistice, stiintifice, relative la na^iunea armeanâ. Aceastâ revistâ are al tuturor nevoie de ajutorul moral si material armenilor
si al tuturor armenofililor, spre a putea duce la bun sfârsit sarcina ce si-a clat. In afarâ de activitatea sa stiin^ificâ §i literarâ,
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d. Macler crede câ poporul armean are, mai muit ca ori când, nevoie de prieteni sinceri devota^i si ; de aceea, d-sa face parte din mai desinteresafj multe comitete cari au de scop de a ajutora neferici^ilor armeni exilati si râspândi^i în toatâ lumea. Daca, d-sa este încredin^at câ multe nedrepnu tâ^i s'au sâvârsit fa^â de poporul armean, râmâne mai pu^in convins câ trebue sa se munceascâ fârâ preget pentru ca sa facâ dreptate Armeniei, pentru ca ea sa poatâ, într'un viitor cât de apropiat, sa si reia locul si nu unul din celé mai mici, în concertul civiliza^iilor, pentru ca dreptatea si justifia sa treacâ înaintea chestiilor strâmte si meschine de interese locale sau de dreptatea cauzei private. Apostol convins Armeniei si Armenilor, de dreptul de a trâi eu si independentâ, d. Macler viaf,a lor, autonomâ consacra toatâ activitatea sa ca sa triumfe aceastâ idée si a o râspândi în lume, fie prin numeroasele sale scrieri, fie prin conferin^e, fie prin ori de câte ori i se prezintâ prilejul. învâ^âmânt, Chestiunea manifestâri armeanâ, în multiplele-i de este, în primul rând, o chestie de dreptate, de umanitate si de revendica^iuni soechitate, ciale. Trebue ca în toate chipurile posibile sa i se gâseascâ o solu^iune echitabilâ.
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Un articol
din Neamul
Frédéric
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Românesa
Macler.
Luni a sosit la Bucuresti, pentru un sir de conFrédéric îerin^e în România, profesorul parisian Macler. Rare ori un strâin a fâcut pentru un popor ceia ce a voit si a izbutit a face pentru nenorocitul azi, odatâ asa de gloriosul prin culturâ, popor d. Macler. armenesc, Mari si a ArArta, atât de noua, a Armeniei meniei maritime, si via^a politicâ ca si literatura a acestor doua state a fost în curs de multi ani obiectul studiilor râbdâtoare si rodnice aie acestui modest învâ^at câruia Armenii nu i pot fi în destul de recunoscâtori. A strâbâtut lumea pentru a-i intregi trecutul. Celé « trei conferint^e asupra Armeniei » pe care le a publicat de curând, unesc eu soliditatea fondului, forma deosebit de plâcutâ. Institutul pentru studiul Europei sud estice a crezut câ aduce un serviciu deosebit publicului fâcându-1 sa cunoascâ, om nostru, printr'un eminent, o na^ie atât de interesantâ. N. IORGA
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PRIMA CONFERINTÂ A D-LUI PROFESOR MACLER : EPOPEA ARMEANA Prima conferintâ s'a Çinut Duminicâ 26 Iunie, orele 11 diminea^a în aula Funda^iei Carol, în fat^a unei numeroase asisten|,e. a fost prezidatâ de d. profesor uniConferintâ versitar Murnu care a prezentat asistent^ei pe distinsul aducându i elogii pentru conferentiar, activitatea-i rodnica desfâsuratâ pentru studierea si propagarea si artei unui istoriei,literaturei demn de tôt interesul. Apoi d. popor strâvechiu, de profesor Murnu a vorbit eu multâ simpatie armean care a purtat cel dintâi facla poporul civiliza^iei apusene în orientul apropiat. Primit eu ovat^iuni nesfârsite d. prof. Macler si-a desvoltat, apoi conferintâ despre Epopea Armeana. EPOPEA ARMEANA nu ca un saVin, începe ilustrul conferentiar, vant preten^ios, ci eu grija de a ma instrui mai si cunostinf,e noi desmult, a strânge documente tinate sa inlesneascâ ridicarea edificiului istoric la care lucrez de un mare numâr de ani.
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Este ceea ce foarte bine a priceput d. prof. Nicolae Iorga,animatorul çtiin^ei franco-române, care mi-a propus, în iarna trecutâ, sa vizitez frumoasa d-voastrâ Çarâ si a va da o série de conferinte. D. prof, lorga sa binevoiascâ a primi expresiunea viei mêle recunostim)e si încredin^area câ nimic nu va fi neglijat din parte-mi, spre a râsîneredereieu care m'acinstit. punde eu demnitate conferentiarul inDupa aceastâ introducere, trâ în subiectul conferin^ei sale : In desvoltarea istoricâ a umanitâ^ii este greu de imaginât un popor care sa fi produs mai muîte acte eroice ca cel armean si a càrui existent^, continuu amenin^atâ de câtre vecini cruzi, opresori si tiranici, sa fi dat dovezi de mai multâ vitalitate si de rezisten^â în momente de restriste si de dorul de a trâi, ca aceastâ depârtatâ Arménie, aie cârei anale se ureâ la timpul fabulos al lui Bel si Dragonului si ai cârei fii sunt acunl atât de apropia|.i de noi. In prezent, nu exista de cât fui lui Israël cari se pot lâuda eu o originâ atât de depârtatâ. A încerca o schit^are a desvoltâri poporului armean în timp si spa^iu înseamnâ, în alte cuvinte, a trasa în lini mari via|a atât de agitatâ a TROIS CONFÉRENCES SURL'AHMÉNIE 13*
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dintre celé mai vechi popoare aie umanitâ|ii, a unui popor vechiu de cel pu^in trei mii de ani, unui popor care nu aratâ nici un semn de vetustate ci ai cârui copii nu doresc de cât sa reia contact eu o via^â normalâ, feritâ de furturi,' masacre si spolia^iuni de toate felurile. O asemenea încercare e poate prea îndrâznea|,â, dar, însemneazâ, în acelas timp a se aduce un omagiu bine méritât uneia din ramuriie celé mai interesante aie marei familii umane, a série, o adevâratâ épopée. arcâ originile poporului Dupa ce a âmintit, d. mean sunt învâluite de multâ obscuritate, Macler a fixât faptul, câ armenii intrâ defmitiv câ se întâlnesc nume de în istorie eu menfiunea aie lor pe inscripÇ,iunile lui Darius, — în al Vl-lea secol înaintea lui Cristos. Si schi^ând un tablou d. Macler aratâ marile étape prin mari trâsâturi aie destinului armean, pânâ la sfârsitul ultimei, dinastii armene, survenitâ la sfârsitul secolului XIV. Dar conferentiarul insista mai aies asupra diasporei armene si aceasta a constituit punctul al conferen^ei sale. important a spus d-sa, armenii voiaDin toate timpurile, jau mult, fie pentru cauze comerciale, fie ca studenf,i, fie spre a se bucura de civiliza^ia ^ârilor unuia
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în care se duceau. Dar alâturi de aceastâ diasexista diaspora impusâ de împora voluntarâ, si d. Macler subliniazâ prejurâri câ, de la înceal erei noastre, se putul secolului al seaptelea întâlnesc armeni. aproape peste tôt emigran^i analizeazâ marea miscare a diasGonferen^iarul porei armene sub un dublu aspect : cel al emigrârei în massa fi grupe,si acel al emigrârei individuale. Si citeazâ ca exemple tipice de emigra^.iune în masse sau pe grupe : 1) miscarea de emigra^iune care urmâ luârei cetâ^ei Ani de câtre turcii selgiucizi, la sfârsitul secolului al nouâlea; armenilor din valea Araxului; 2) emigrarea 3) o a treia miscare de diaspora armeanâ este aceea care a avut loc în urma masacrelor armenilor, ordonate desultanul Abdul Hamid; 4) în sfârsit a patra miscare de diaspora este aceea care a fost armenilor eu începere necesitatâ de masacrarea din primâvara anului 1915 si care se prelungeste pânâ în zilele noastre, câci numerosi sunt armenii cari alunga^i din pâmântul lor ancestral, n'au gâsit încâ col^ul ospitalier unde sa poata trâi linisti|,i. Dupa aceea, d. Macler trece în revistâ câteva d-sa regretâ exemple de diaspora individualâ; de a nu putea cita un mai mare numâr. Dar,
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în a evoca fiind prea scurt, se mârgineste Harnume tipice ca : la Constantinopol, marele legist în al X-lea secol. menopulo, în câteva In Ungaria, Lucaci, primul-ministru
timpul câteva
rânduri. In Indii,
Rafaël
Murad,
fondatorul
marelui
Colej. In Serbia au fost armeni primul pictor si primul editor. màrele In România, Vasile Conta, filosof, Anton Pann, Teodor Aman, pictorul, Spiru Haret, Dr. Buiucliu, etc. In Turcia, Sanasarian, fondatorul Gulegiului din Erzerum. Sanasarian de armeni e notoriu. In Bizan^., rolul îndeplinit Sub sultanii turci s'au distins Hassan Agha si ai fratele sâu Bogos Gelebi ca administratori vâmilor din imperiu. In Franta e armeanul Jean Altin care a introdus garant^a. Uu ait armean, Pascal, a introdus cafeaua în Franta. In Birmania, a jucat un roi mare Sarchis Manughian în timpul râsboiului Anglo Birman. Dar unde s'au distins armenii ca buni si geniali In a fostEgiptul. si administratori organizatori al Siriei, fu 1073 Bedred Gemali, guvernator
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insârcinat eu restabilirea ordinei în Egipt. Dar figura cea mai mare clin Egipt fu Nubar Pasa, creatorul devenit una din modem, Egiptului ^ârile celé mai civilizate din lume. Pentru binele fâcut acestei ^âri, Nubar Paca a primit denumirea de tatâl fellahilor. Vorbind Armenii din d-sa despre Paris, spune: Ori unde Armenii întemeiazâ o colonie de oare care importanp., înfîinÇeazâ imediat Societâ^i intelectuale. La Paris, de pildâ, unde de un timp numârul Armenilor a sporit sim^itor, se dau fiecare sâptâmânâ si une ori de doua ori pe sâptâmânâ reteatrale în armeneste, sau un bal sau prezenta^ii un concert sau conferin^e stinrÇifîce, literare si politice. Ei publicâ acum opt ziare în limba lor, dintre cari unul cotidian. Exista o societate a o sociemedicilor, una a inginerilor techniciani, o societate literarâ si artisticâ, tate artisticà, o societate a doamnelor armene, trei trupe teade sport, un dispensar pentrale, doua societâti tru bolnavi si infirmi, o societate de binefacere, o societate studentilor nepentru ajutorarea a studentilor mai voiasi, o asociale armeni, multe sali de citire, doua coruri, o fanfarâ, o
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Crucea Rosocietatea societate a cercetasilor, sie, etc. Afarâ de aceasta, la Paris rezidâ Consiliul cenArmenilor din Europa. Tôt tral ai instructdunei la Paris se gâseste acum cel mai numéros grup de intelectuali si artisti armeni,cari forma^,i eu cea mai mare cinste meto/i/ele noastre latine,fac patriei lor adoptive.
LA GOMUNITATEA ARMEANA din Capitalâ, onorurile Din partea Armenilor au fost fâcute de Uniunea Armenilor din Româeu nia care, din primul moment s'a însârcinat distinsului instalarea oaspete si a fâcut tôt posibilul pentru ca sederea D-sale în Capitalâ sa fie cât deplâcutâ. Chiar a doua zi dupa sosirea D-sale, d. prof. Macler a vizitat Biserica fiind saîutat în numele de d. Stefan Aslan si a avut o întreEpitropiei vedere eu P. S. S. Episcopul Husig pe care îl cuD-sa s'ai nteresat de venoçtea delà Ecimiadzin. chile inscripfji aie Bisericii si a cercetat obiectele ce le posedâ biserica. In celé antice bisericesti a lucrat eu trei zile urmâtoare d. prof.Macler
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d. V. Mestugean, documentându-se despre unele date referitoare la trecutul Coloniilor Armene din România. D. H. D. Siruni, colaboratorul nostru, a pus la dispozifia ilustrului savant copii dupa unele inscriptai ci manuscrise la Botosani si Gherla.
armeneçti
aflâtoare
Duminicâ, dupa prima conferint^â, d. Macler a fost invitât la dejun la d-na si d. A Manisalian, Uniunei Armenilor din România. presedintele D-sa a mai fost invitât la d. K. Manisalian, d. A. Baronian si d.na Aznavorian,presedinta comitetului scolar. I s'au dat mese intime aranjate de Uniunea Armenilor, la Monte-Carlo, Gib, parcul Garol, etc. In seara de Miercuri 25 lunie, Uniunea Armenilor a oferit d-lui prof. Macler, un banchet în de la soseaua Kisseleff. grâdina Chateaubriand La sampanie primul toast a fost ridicat de d. A. Manisalian, Uniunei Armenilor presedintele din România care a urat dinstinsului oaspete bun sosit din partea tuturor ArComunitât^ilor mene din România. « Venifi la noi, a zis d. Manisalian, din Fran^a nobilâ, farul luminos al lumii întregi, voi care a^.i iubit destinul poporului nostru, pentru gloria i trecutâ §i sfort^ârile sale de mâine, voi care, ani
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ati explorât sufletul acestui popor indelunga^i martir, spre a dovedi cum acest popor persécutât si-a putut da tributul modest civiliza|iei si cum a putut deveni un. élément de progrès ori de câte ori gâsea o piatrâ spre a-si odihni capul sj o clipà spre a respira în libertate ». d. Manisalian a exprimat recunosIncheiând, tin^â pentru studiile fâcute de eminentul profesor în Polonia, Olanda, Spania, referitoare la trecutul armenilor din zisele ^,âri, cum si pentru vasta si grandioasa de d. prof. operâ realizâtâ Macler printr'o muncâ nepregetâtâ de trei decenii. Al doilea toast a fost ridicat de d. G. MihâiBisericii Armene lescu, presedintele Epitropiei din Bucuresti, care a salutat pe distinsul oaspete în numele acestei comunitâtd. D-sa a închinat paharul pentru M. S. Regele Ferdinand, pentru mârirea României si pentru sârbâtorit. Toastul a fost primit eu aplause si strigâte de ura. D. A. Tomasian a toastat din partea Uniunei de culturâ Fizicâ si a tineretului. Poetul Colangian a relevât opéra neperitoare a d-lui prof. Macler ci a adus elogii marilor bârbat^i ai FranÇei cari a'au ocupat de cauza armeanâ
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ca Anatole France, Pierre Quillard, G. Clemenceau, etc. D. H. Dj. Siruni a vorbit în numele muncitorilor armeni ai condeiului recunosexprimând armene eminentului profetin^a intelectualitâ^i uriasa-i opéra cuprinzând atâtea sor, pentru, tezaure nepre|.uite aie vie$.ii poporului Armean. D. V. Mestugean a toastat pentru d. prof. Iorga îni^iativei câruia se datoreste séria de conferin|e a d-lui prof. Macler. D Iorga, aceastâ glorie nu este numai a Romaniei ci si a întregei umanitâ^i, un mare prieten al Armenilor si, ca mare istoric, s'a ocupat ci d-sa de aproape de trecutul poporului Armean în numeroasele i scrieri. A relevât Wilson a f os't acela ca tôt un istoric, presedintele Armeniei. A conclus câ care a tresat hotarele to^i bârbati eu adevârat mari ai lumii au simpatizat pe armeni si au fost favorabili cauzei lor. A lui Tache lonescu, prof. adus elogii memoriei Toma lonescu, V. G. Mort^un, si a exprimat mul^.umiri d-lor prof. Murnu si A. Chemale pentru de d-lor eu filoarmene sentimentele exprimate d-lui profesor Macler. prilejul conferin^elor Séria toasturilor a fost închisâ de d. prof. Mad-lui prof. N. Iorga pentru cler care a mul|umit de a vizita aceastâ frumoasâ |,arâ si învita^ia
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si-a exprimat mul^umiri "pentru aimpatica primire. Banchetul s'a terminât, în mijlocul unei deosebite cordialitâfi si anima^iuni, dupa miezul nop^ii. A DOUA CONFERINA A D-LUI PROFE SOR F. MACLER Considérât iuni asupra artei armenesti D. prof. Frédéric Macler a ^inut Joi 30 lunie, ora 9 seara, a doua conferin^â, vorbind despre : asupra artei armenesti. Considera^iuni Conferin^a aceasta a fost prezidatâ de d. prof. N. Iorga care a deschis sedin^a printr'o frumoasâ cuvântare în care a relevât meritele distinsului conferen|,iar. Dupa ce a amintit originile comune aie artei si aie religiei, â-1 profesor Macler stabileste faptul câ civiliza^ia armeanâ este mai înainte de toate o civiliza.^ie crestinâsi câ nu s'ar putea spune nimic referitor la o civiliza^ie armeanâ pâgânâ. Civilizatyia armeanâ aratâ în chip évident câ poporul armean a avut în toate timpurile o predilec^ie foarte pronun^atâ pentru artâ, în manifestârile
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ei celé mai diverse. Si conferentjarul trece succesivîn revistâ artele minore si artele majore. Artele minore ca : giuvaergeria, ciselura, emailatul aplicat, au fost cultivate foarte de timpuriu de câtre armeni. La fel, covoarele armene erau célèbre încâ din secolele al VH-lea si al VlII-lea aie erei noastre. In ce priveste broderiile si dantelele armenesti, ele s'au bucurat totdeauna de o si universala. In sfârsit faianreputa^ie meritatâ erau cunoscute si pretutindeni \ele armenesti numeroase sunt semnate eu nume de exemplare maestrii armeni. Printre artele majore,conferen^iarulanalizeazâ si musuccesiv, arhitectura, sculptura, pictura zica. a fost studiatâ Arhitectura în mod religioasâ de câtre istoricii de arta si s'a ajuns particular la rezultate destul de satisfâcâtoare, în ce priveste influen|ele si pe care le-a suferit, precum acelea pe care le-a exercitat. Distinsul conferenstiluri aie ^.iar scoate în eviden^â principalele arhitecturii astlel ca stilul de construcarmenesti stilul reli^iune ordinar, stilul de ornamenta^ie, gios, stilul politic si économie si în sfârsit cel militar. Toatâ aceastâ arhitectura armeneascâ se o scarâ, mergând din secolul al IV-lea întindepe
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In pânâ în secolul al XIV-lea al erei noastre. d. prof. Macler prezintâ sprijinul explicâ^iilor, ce intereseazâ foarte un numâr de proec^iuni, mult auditoriul. falnicile ruini aie Aceste proiec^iuni reprezintâ catedrala, bisericile, capitalei Ani a Bagratizilor, si sculpturi resturi de ornamenta^ii tribunalul, artistice cari dénota starea de înflorire a arhitecturei armene. mumai aies picturile In ce priveste pictura, în Armenia si au rale, ele n'au mare desvoltare mai aies sub influença sirianâ si fost introduse într'unele frescele, ce s'au descoperit bizantinâ; mânâstiri din Egipt, scot la ivealâ nume de pictori armeni. motivele sale armeanâ împrumutâ Sculptura de ceaprâzârie si se remarcâ galoane re^elelor cari încadreazâ panourile si f ac bordura împletite dealungul frizelor. Cât p ri veste colorarea si caligrafia manuscriselor, ea dateazâ poate din secolele al VH-lea si VlII-lea aie erei noastre, dar nu se cunosc astâzi armene copiiate înainte de anul 887. manuscrise zisâ de la Moscova. Aceasta este tetraevanghelia afirmâ Vorbind despre muzicâ, conferen^iarul de la început în câ ea a fost desigur cultivatâ
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dar nu exista probe. In evul-mediu, se înmul|esc mult ci mai religioase Baba Hambartârziu, în secolul al XVIII-lea ^unian a fâcut o reforma muzicala si a introdus oare care reguli, care furâ în gênerai adoptate dupa moartea sa. In sfârçit d-sa a evocat opéra de primul ordin a lui P. Komitas muzicografica si dâ, dupa acest savant, detalii pre^ioase fi interesante muzicii populare a armeasupra nilor. « Rezumând, d. F. Macler conchide : « Pare câ a sosit momentul ca lumea sa se ocupe de armeni si p entra alte motive decât p entra omorurile de care au fost încerca|i. Studiul si cunoçnu va tin|a artei sale în diversele manifestai contribui pu^in ca sa arate poporul armean sub o luminâ oare cum noua, dar va da la ivealâ auréola unei glorii si a unei majestâti de câteva ori secularâ ». Armenia, imnurile
D. prof, lorga întors în Capitalâ din campania electoralâ a invitât pe distinsul oaspete la un dejun la Capsa, Vineri 2 Iulie. Erau invita^i d-nii Dr. Angelescu, ministrul Murnu, publiée, profesor instruc^iuni Suciu, ArChemale, etc., cum si de la Comunitatea
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P. S. S. Episcopul Husig, A. Manisalian, Uniunei Armenilor din România si presedintele V. Mestugean. Comesenii au fâcut o simpaticâ primire d-lui prof. Macler. Nu s'a ridicat nici un toast. meanâ
ULTIMA CONFERINTA. A D-LUI PROF. MACLER Despre teatrul
armean
« D. prof. F. Macler a ^,inut la 3 Iulie, în fundin ciclul anundatia Carol I, ultima conferinta Fârâ a despre : Teatrul armean. ^at, vorbind intra în prea multe detalii, d-sa aratâ prin câteva câ armenii au doua dialecte literare trâsàturi, : unul oriental eu centre la Tiflis si principale eu câminuri literale Erivan, iar altul occidental, si Smirna. In fiecare din aceste la Gonstantinopol dialecte literare, armeni au produs o frumoasâ mai aies în vechea Arménie opéra teatralâ, unde se bucurau de mai multâ liberruseascâ, tate ca în Armenia tureâ. Pe la mijlocul secolului al XIX, ia nastere si se desvoltâ teatrul armean la Tiflis, gra|ie îngrisi sforÇârilor Patkanian. jirilor impresarului
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Dar pârintele al teatrului necontestat armean oriental este Gabriel aie cârui Sundunkiants, lucrâri, mai aies Pepo, poate suferi compara^ia eu ori care piesâ din orice repertoriu. Si d. Macler a analizat în detaliu principalele piese aie lui Sundunkiants. D-sa analiseazâ apoi opéra teatralâ a lui Sirvanzade, a lui Santh si a lui Aharonian, precum si a altora care au produs un teatru de cel mai viu armenesc, national interes. d. Macler la Armenia Trecând occidentalâ, cuvinte teatrului expune în câteva originile acestei t/âri. La Vene^ia au produs în dialectul fost scrise mai întâi un oarecare numâr de piese dar care n'au fost publicate : acestea au fost scrise sub îngrijirea Mekhitaristilor. In urmâ, teatrul sfârsi prin a se fixa la Constantinopol, unde se joacâ mai întâi traduceri - din diverse care n'au prea mare succès repertorii europene, pe lângâ publicul armean. A început sa se scrie au fost extrase din piese, aie câror subiecte istoria nationalâ si succesul lor a mers Armeanâ, crescând fat^â de publicul mai armean, gra|ie, aies, sfor/^arilor lui Besiktaslian. « Insusi turcii au prins gustul teatrului si s'a observât câ, în timp de câtiva ani, armenii si
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turcii au purtat cel mai viu interes manif esta^iunilor teatrale din diversele cartiere aie capitalei otoman. scose din Piesele armenesti, imperiului istoria n'au fost interzise, pânâ în na^ionalâ, ziua când Abdul-Hamid devine bânuitor fa^â a interzis orice manide aceste manifesta^iuni, din imperiul sâu si supusilor festa^ie teatralâ delà 1895;—1896 la politica mâcelului, procéda care trebuea din partea tursa se perpetueze, cilor, pânâ în ultimi ani. D. Macler conchide si termina pritr'o paralelâ istoricâ între Armenia si România. Câtre 1877, spune d-sa, România nu era prea mare; ea fusese : dar obiectui multor atacuri ci multor nâvaliri ea pâstra intactâ c'redin^a sa în viitor; ea conserva limba si mostenirea sa, na^ionalitatea unei culturi superioare, pe care o avea delà strâmosi. Si gracie acestei tenacitâ^i si acestei ea putea sa celebreze, în 1927, cinmosteniri, sale si sa se bucure de quantenarul independen^ei sale. Armenia, deasemenea, intregirea grani^elor a conservât intactâ mostenirea unei culturi delà strâmosii provenind superioare, sâi; ea îsi conserva limba, literatura si na^ionalitatea; ea conserva mai aies credin^a nestrâmutatâ într'un viitor mai bun. Nu ezistâ nici o îndoialâ, câ la
EXTRAITS DE LA PRESSE fel ca si România popor care a fost popoare sa nu se ci, din contra, sa
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ea va redeveni într'o zi marele odatâ, eu condi^ia ca celelalte îndârâtniceascâ la perderea sa, i întindâ o mânâ de ajutor ».
CUVÂNTABEA D-LUI PROFESOR MURNU : D. Profesor G. Murnu membru al Academiei Romane, care a prezidat si aceastâ ultimâ con: cuvântare ferin^â, a rostit urmâtoarea Doamnelor si Domnilor, « Cu aceastâ prelegere ilustrul profesor d. Macler închee ciclul de conferin|,i, în care, printr'o a sintetizat magistralâ, stiin^â si competin^â ca intr'o mare piesâ de ansamblu cunostin^ele celé mai indispensabile dându ne si substan|iale o imagine din celé mai vii si mai clare asupra |ârii ci poporului armean, asupra a tôt ce a fost si este acest popor ilustru prin trecutul istoric si activitatea 'i culturalâ, artisticâ si industrialâ, dar nefericit în zilele noastre, întru cât nu si-a vâzut încâ atins idealul national, ca o încoronare a imenselor lui strâduin^i si jertfe seculare. 14 TROIS CONFÉRENCES SUItL'ARMÉNIE
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« D. Macler, mare si devotat amie al acestui popor, pe care îl cunoaste mai bine de cât oricare altul în urma în-delungatelor si temeinicilor studii ce a fâcut asupra lui, i-a îmbra^isat cauza na-^ionalâ eu tôt entuziasmul si elanul unui Francez de elitâ, ci în numele umanita^ii ca eu luptâ din râsputeri, ci în numele drepta^ii condeiul ci din graiu viu, pentru a câstiga simpatiile lumii civilizate în favorul acestei nobili drumul pentru a'si înfâptui na^iuni netezindu-i visul vizat de strâbuni, pentru a'si lua locul de onoare ce i se cuvine prin for^a'i numericâ si si marile'i morale în prin meritele'i calitâ^i concertul popoarelor culte. « Noi Românii, si ca oameni si ca Romani, suntem eu sufletul alâturea de acest neam de martiri ci, impreunâ eu marele savant francez, dorim din toatâ inima întemeierea unei Armenii mari, care'i tôt asa de necesarâ ca si România mare pentru echilibrul forf,elor politice în orientuleuropean. « Institutul euronostru de studii Sud-Est meu coleg d. penesc de sub direc^ia ilustrului N. Iorga, institut sub aie cârui auspicii s'au d-nului aceste conferin^i, mutyumeste inaugurât luminele aduse publicului nosMacler pentru
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tru prin lec^iile sale atât de instructive si sugestive si-1 asigurâ de simpatiile celé mai sincère sa întreprindere si geiïeroasa pentru frumoas'a nationalâ si stiin^ificâ. » La sfârsitul
numerosul conferin^ei, public a si pe d. prof. G. Murnu, ova^ionat pe conîeren^iar care a vorbit eu atâta câldurâ si simpatie pentru nefericitul popor Armean. Numerosi asisten^i s'au urcat pe estradâ spre a strânge mâna d-lui prof. Macler. D-na Sahazizian a oferit ilustrului o frumoasâ conferenf,iar gerbâ de flori. D. prof. Macler a mai primit în dar o frumoasâ în stil armean, foarte brodârie, o aquarelâ pictatâ veche, delà d-na Aznavorian, de d-soara Diruhi din partea d-lui S. Slefânescu, a revistei Ararat si vederile colec^ia întreagâ câtor-va biserici istorice din partea d-lui Mestugean. de Duminecâ i s'a oferit Dupa conferin^a distinsului un dejun la Flora, de conferenfiar câtre un grup de tineri admiratori, dupa care a fost condus în pâdurea Pantelimon unde se da o serbare de câtre cercul artistic câmpeneascâ Erivan. A doua
zi, Luni,
d. prof.
Macler
a fâcut
mai
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
multe vizite. D-na A. Manissalian, nâscutâ Abufoarte rel, a dat d-lui- prof. Macler informa^iuni asupra pre^ioase Goilâvestilor, Ciomagestilor, Misirestilor ci altora ilustre si vechi familii din Moldova cum si fotografii cari vor fi reproduse în lucrarea ce o prépara prof esorul francez.
0 VIZITA LA GHERLA de d d. prof. Macler, înso^it Mar^i searâ a V. Mestugeanu, directorul revistei noastre, de armeni în' plecat la Gherla, orâsel întemeiat veacul al 17-lea, care prezintâ o mare importants istoriei imicei ce se ocupâ eu studiul pentru armene în Transilvania. gra|,iunilor la Gherlenii trimiseserâ dinainte, Avertiza^i Cluj o delega^ie compusâ din d-nii H. Ciocarian si Der Mardirosian, întru întâmpinarea oaspetelui. La sosirea în gara Gherla, ilustrul profesor a în frunte fost salutat de o numeroasâ delega|ie eu parohul Bisericii Armene, Rev. dr. Kapatan Marton. Prezentârile au fost fâcute de d. Mestugean, de cei veni|i întru dupa care oaspe^ii, înso^i
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întâmpinarea lor, intrarâ în oras fâcând pe jos drumul de câteva minute pânâ la casa parohialâ unde au si fost gâzdui|i. a orasului, au Ajunsi în vasta pia|â pâtratâ admirât de la distantâ falnica bisericâ armeanâ ce se ridicâ în aceastâ pia^â. Aceastâ una din celé mai mâre^e bisericâ, din Transilvania, are o f a^adâ înaltâ de 45 metri Bisericâ se vede de la o mare iar depârtare, celé patru orologiuri aie cupolei, sunt noaptea iluminate eu electricitate. Sa spunem de pe acum câ si interiorul acestei eu hramul Sf. Grigore Luminâtorul, Biserici, eu exteriorul în mâre^ie si-1 întrece corespunde chiar. Bol^ile au înâl^imea marilor catedrale în numâr apusene. Altarele, mari, împunâtoare, de trei sunt de marmurâ azurie. Amvonul eu scâricica-i elegantâ este o operâ de artâ. In jurul altarului central sunt galerii spa^ioase eu vitrouri de unde se revarsâ lumina în forente. Bol^ile sunt sus^inute mari de marmurâ de coloane verzuie. In capela din dreapta a bisericii se aflâ célébra icoanâ a lui Rubans : Coborârea de pe bisericii de Impâratul Francise I. Cruce,dâruitâ de câlâtorie, De si dupa o noapte întreagâ neobositul profesor, cum a sosit în fostul Arme14* TnOISCONFÉRENCES SUEL'AHMÉNIE
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stiin^inopolis, cum si-a început investiga^iile-i * recunoastere de vizitâ o scurtâ fâcând flce, 52 de manuscripte unde sunt pâstrate bisericii, Mântuivechi, Gapelei unde se aflâ Cobârârea si Muzâului de pe Cruce, de Rubens, torului Armean. casis'a oferit oaspetelui, pe teresa Seara, o mâsa' copioasa prezidatâ nului din localitate, Printre : dr. Kapatan. comeseni de pârintele Mechitarist Mikael, d-nii Dr. Gustav pârintele si preseAjan, mare industrias Papp, Ioachim direcdintele societâ^ii Armeni, comercian^ilor H. Bancei de crédit, torul Tumaian, Onnig si Torosian G. Der-Mardirosian, Ciocarian, atyi. d. prof. Macler, conA doua zi de diminea^â, a cârui amabilitate dus de pârintele Kapatan, este mai presus de orice elogii, a vizitat din nou veMuzâul armean, Biblioteca, manuscriptele, Armeande chea Biseriçâ Solomon,Azilul bâtrâni, un mare unde sunt conservate, de asemenea, Armean numâr de documente vechi, Orfelinatul documentându se pentru si Scoala Armeanâ, lucrarea ce o pregâteste. Profesorul francez a ramas încântat foarte de celé vâzute si de grije eu care sunt conservate
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tôt ce se refera la trecutul orasului Armenopolis, azi Gherla, întemeiat de réfugia^ armeni. Din institu^iunile râmase pânâ în prezent în se vede cât de înflorit fusese pe vrepicioare, muri orâselul acesta care, déclarât de oras liber era locuit si administrât împârâtesc, aproape exclusiv de Armeni. In muzâu sunt pâstrate eu sfingénie decretul Carol VI lea împâratului referitoare la cumpârarea vastelor terenuri, pe cari armenii si-au construit un oras propriu cum si aite décrète la privilegiile, relative spéciale ce li se acordase 1. De sigur scopul nostru nu este de a face, în cadrul strâmpt al acestui artimonumentelor istorice armecol, descrierea nesti din Gherla. Nu putem însâ sa nu mende grâdini t-ionâm casa parohialâ, înconjuratâ de flori, vastâ clâdire masivâ eu aspect în acelas si de mie palat, eu saloane timp de mânâstire auster mobilate, eu picturi pre^ioase, între cari a Episcopului Axente întemietorul Vârzaru, orasului Gherla si a preo^ilor cari s'au succédât la parohie în decursul celor aproape trei veacuri de când s'a întemeiat Si în casa Armenopolis. exista o biblioteca destul de bogatâ, parohialâ nu însâ ca aceéa din Muzâul Armean. 1. Vezi Isloria Armenilor, vol. II de V. Mestugean.
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a oferit oaspefilor câte Kapatan o colec^ie din lucrârile lui Szongott Christov, din Gherla, care, fost profesor la liceul armean revista Armenia timp de doua decenii a publicat în limba ungarâ, cum ci alte câteva cfir^i foarte Pârintele
importante. D. profesor de câlduroasa
Macler încântat
de celé vâzute si primire gâsitâ în acest oras vestit prin ospitalitatea sa, a pârâsit Gherla Joi searâ, un cleric dr. Kapatan, parohului mul^umind si deinimâ, elînsusi om de stiint,â, cum sârguitor si celor-lal|i prieteni care i-au arâtat atâta simpatie. a fost din celé mai cordiale în Despâr^irea unde se grâbiserâ sa vinâ numegara orasului rosi gherleni eu pârintele împreunâ Kapatan, d-nii Onnig Tumaian, Salgian, Der-Mardirosian si al^i sa petreacâ pe distinsul profesor.
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ARARAT Juillet
1927, n° 37. SOMMAIRE
L'arrivée de M. le professeur M acier tale. — Les trois conférences de Carol. — L'allocution de M. G. Murnu. — Le Banquet du — La visite de M. teaubriand. Macler à Gherla.
dans la capila Fondation le professeur Chajardin le professeur
L'ARRIVÉE DE M. LE PROFESSEUR FR. MACLER A BUCAREST Invité par M. le professeur N. lorga, préside l'Europe du dent de l'Institut pour l'étude M. le professeur F. Macler, le savant Sud-Est, de la et administrateur distingué, professeur « Société des Etudes arméniennes » de Paris, est arrivé dans la capitale lundi, 19 juin, pour faire sur l'Arménie une série de trois conférences et les Arméniens. N. Iorga, En l'absence de M. le professeur notre hôte distingué a été salué par M. Anton M. Iorga, par M. le proChemale, représentant
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fesseur Constantinescu et par les délégués de l'Union des Arméniens de Roumanie, MM. S. Kehiaian et V. Mestugean.
*
LA PERSONNALITÉ DE M. LE PROFESSEUR MACLER
M. Frédéric Macler, professeur à l'Ecole Nationale des Langues orientales de Paris, fit, comme de nombreux orientaliste, voyages en Syrie, en Palestine et en Arménie. Il se rendit compte que le peuple arménien était trop peu connu dans ses multiples artismanifestations littéraires, tiques et scientifiques. à un voyage immédiatement Aussi, après la Etchmiadzin M. Macler décida-t-il (1909), d'une Petite bibliothèque arménienne publication dont le premier volume parut en 1910. Depuis lors, dix volumes ont été publiés, et le onzième est en préparation. A côté de la littérature pure, M. Macler a à la cherché à donner une impulsion nouvelle et ainsi qu'à l'histoire; philologie arménienne, ses propres de même travaux, que ceux des meilleurs
de ses élèves,
montrent
l'importance
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de la philologie comme auxiliaire pour reconstruire l'édifice historique. Au cours des nombreux voyages et visites qu'il fit aux bibliothèques et aux dépôts d'archives de M. Macler a relevé la présence de plul'Europe, sieurs documents d'art arménien qui ouvrent un horizon tout nouveau pour ceux qui s'intéressent aux questions d'art en général, et de l'art oriental en particulier. La question des influences subies ou exercées par les différentes orientales et occidentales, est encore civilisations, De nombreux éléments sujette à controverses. d'information Les présent. jusqu'à manquent à l'art publications que M. Macler a consacrées arménien contribueront à éclairer au peut-être moins une partie de cette question. l'hiEnfin, aussitôt après la guerre, pendant ver de l'année 1919-1920, M. Macler fonda, avec son ami. M. le professeur A. Meillet, la « Société des Etudes Arméniennes », qui a pour but de au s'occuper de toutes les études se rapportant monde arménien; cette société publia, au commencement de l'année des 1920, une Revue Etudes Arméniennes, deux fois par an, paraissant et où l'on traite littéde toutes les questions à la et scientifiques, relatives raires, artistiques
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nation arménienne. Cette revue a besoin de l'aide morale et matérielle de tous les Arméniens et de tous les arménophiles mener pour pouvoir à bonne fin la mission qu'elle s'est imposée. En dehors de son activité scientifique et littéa raire, M. Macler croit que le peuple arménien d'amis débesoin, plus que jamais, sincères, voués et désintéressés; c'est pour cela qu'il fait de plusieurs comités partie qui ont pour but d'aider les malheureux Arméniens exilés et dispersés dans le monde entier. Si M. Macler est ont été persuadé que de nombreuses injustices commises vis-à-vis du peuple arménien, il n'est sans pas moins convaincu qu'il faut travailler retard pour faire justice à l'Arménie, pour qu'elle puisse, dans un avenir le plus proche possible, sa place — et non point une des plus reprendre petites — dans le concert des civilisations, pour que le droit et la justice passent avant les questions étroites et mesquines d'intérêts locaux ou convaincu de la justice de la privés. Apôtre de leur cause de l'Arménie et des Arméniens, droit à une vie propre, autonome et indépentoute son activité M. Macler dépense dante, cette idée et pour la répandre pour que triomphe dans le monde, soit au moyen de ses nombreuses
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soit au oeuvres, soit au moyen de conférences, moyen de l'enseignement, chaque fois que s'en présente l'occasion. La question dans ses multiples arménienne, manifestations est, avant tout, une question de et de revendications justice, d'équité, d'humanité sociales. Il faut, par tous les moyens possibles, lui trouver une solution équitable.
UN ARTICLE DU JOURNAL Neamul FRÉDÉRIC MACLER
Românesc
:
(Reproduit l'article signé N. Iorga, p. 169, traduit pp. 170 et 171.
LA PREMIÈRE CONFÉRENCE DE M. LE PROFESSEUR MACLER : L'épopée
arménienne.
La première conférence a eu lieu dimanche 26 juin, à 11 heures du matin, dans la salle de la Fondation un auditoire nomCarol, devant breux. La conférence a été présidée par M.' le proanois CONFÉRENCES suit L'ARMJSNIE 15
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
fesseur
d'Université Murnu qui a présenté le conférencier à l'auditoire, louant son distingué activité et la féconde, pour l'étude déployée de l'histoire, de la littérature et de propagation l'art d'un peuple ancien, digne de tout intérêt. Ensuite M. le professeur Murnu a parlé avec beaudu peuple arménien coup de sympathie qui, le a porté le flambeau de la civilisation premier, occidentale dans le proche-Orient. Accueilli par des ovations sans fin, M. le professeur Macler a développé ensuite le sujet de sa conférence sur l'Epopée arménienne.
L'épopée
arménienne.
Je viens, commence l'illustre conférencier, non comme un savant prétentieux, mais avec le des d'amasser souci de m'instruire davantage, nouvelles et des données documents qui me hisla reconstitution de l'édifice faciliteront à laquelle je travaille depuis un grand torique nombre d'années. C'est ce qu'a très bien compris M. le professeur Nicolas de la science Iorga, animateur franco-roumaine, qui m'a proposé, l'hiver der-
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nier, de visiter votre beau pays et de vous faire une série de conférences. Que M. le professeur Iorga veuille bien recevoir l'expression de ma vive reconnaissance et l'assurance que rien ne sera négligé de ma part à la confiance dont il pour répondre dignement m'a honoré. le conférencier cette Après introduction, entre dans le sujet de sa conférence : Dans le développement de l'humahistorique un peuple qui ait nité, il est difficile d'imaginer accompli plus d'actions héroïques que le peuple continuellement et dont l'existence, arménien, et menacée par des voisins cruels, oppresseurs ait donné des preuves de plus de tyranniques, aux moments d'inforvitalité et de résistance, tune et de passion pour la vie, que cette Arménie lointaine* dont les annales remontent aux temps fabuleux de Bel et du Dragon et dont les fils sont maintenant si près de nous. Actuellement, il n'existe que les fils d'Israël qui se puissent vanter d'une origine aussi lointaine. Tenter une esquisse du développement du dans le temps et dans l'espace peuple arménien en grandes signifie, en d'autres termes, tracer lignes la vie si agitée d'un des plus anciens
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
de l'humanité, d'un peuple vieux au peuples moins de trois mille ans, d'un peuple qui ne montre aucune marque et dont les de vétusté enfants ne désirent contact avec que reprendre une vie normale, contre les vols, les protégée Un les spoliations de tous genres. massacres, semblable essai est peut-être trop hardi, mais il marque, bien en même temps, un hommage mérité à une des branches les plus intéressantes de la grande famille humaine, et ce serait écrire une épopée vraie. Après avoir rappelé que les origines du peuple M. Macler arménien restent dans l'obscurité, dans l'hisfixe l'entrée définitive des Arméniens toire — par le fait que l'on trouve leur nom sur les inscriptions de Darius — au vie siècle avant M. Macler Jésus-Christ traits, et, à grands montre les grandes étapes de la destinée arméla fin de la dernière nienne, jusqu'à dynastie — c'est-à-dire à la fin du xive siècle. arménienne Mais le conférencier insiste surtout sur la diaset cela constituera le point pore arménienne de sa conférence. important De tous temps, dit-il, les Arméniens ont beausoit pour affaires commerciales, coup voyagé, soit comme étudiants, soit pour jouir de la civili
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sation des pays où ils allaient. Mais à côté de cette diaspore volontaire existait aussi la diaset M. Macler pore imposée par les circonstances insiste sur le fait que depuis le commencement du vne siècle de notre ère, on rencontre presque des émigrants arméniens. Le conférenpartout cier analyse le grand mouvement de la diaspore arménienne sous un double : celui de aspect en masse et par groupes, et celui de l'émigration Et il cite comme individuelle. l'émigration en masse ou exemples typiques d'émigration : 1° le mouvement par groupes d'émigration qui suivit la prise de la cité d'Ani par les Turcs à la fin du ixe siècle; 2° l'émigraseldjoukides, tion des Arméniens de la vallée de l'Araxe;3° un troisième mouvement de diaspore arménienne est celui qui s'est produit à la suite du massacre des Arméniens, ordonné Abdulpar le sultan 4° Enfin un quatrième mouvement de Hamid; diaspore est celui qui fut déterminé par le massacre des Arméniens au début du printemps de l'année 1915 et qui se prolonge de nos jusque sont les Arméniens jours, car nombreux qui, n'ont pas encore trouvé éloignés du sol ancestral, le coin hospitalier où ils pourront vivre tranquilles.
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Après cela, M. Macler passe en revue quelques de diaspore il regrette exemples individuelle; de ne pouvoir en citer un plus grand nombre. Mais le temps dont il dispose étant trop court, noms typiques il se borne à évoquer quelques le à Constantinople, comme Harmenopoulos, du xe siècle; grand législateur ministre En Hongrie, Lucaci qui fut premier à plusieurs reprises; du fondateur Aux Indes, Murad, Raphaël grand Collège; En Serbie, le premier peintre et le premier éditeur ont été des Arméniens; En Roumanie, Vasile Conta, grand philosophe, Anton Théodore Pann, Aman, peintre, Spiru Haret, Dr Buiucliu, etc.; En Turquie, fondateur du Collège Sanasarian, Sanasarian d'Erzeroum; A Byzance, le rôle joué par les Arméniens est connu. Sous les Sultans turcs, Hassan Agha et son frère Bogos Celebi se sont distingués comme administrateurs des douanes de l'Empire. En France, c'est l'Arménien la garance. Un autre introduit a introduit le café en France.
Jean Althen arménien,
qui a Pascal,
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En Birmanie, Sarchis Manughian a joué un la guerre Anglo-birmane. grand rôle pendant Mais ce fut en Egypte se que les Arméniens sont distingués comme bons et géniaux organisateurs et administrateurs. En 1073 Bedred de la Syrie, fut chargé du Ghemali, gouverneur rétablissement de l'ordre en Egypte. Mais la fut Nubar de l'Egypte figure la plus grande de l'Egypte devenue Pacha, créateur moderne, un des pays les plus civilisés du monde. C'est Pacha pour le bien qu'il fit à ce pays que Nubar fut nommé « le père des Fellahs ». Parlant des Arméniens de Paris, M. Macler dit : Où que ce soit que les Arméniens fondent une colonie de quelque ils créent imimportance, des sociétés intellectuelles. médiatement A Paris, par exemple, où depuis un certain a augmenté des Arméniens le nombre temps on donne une fois par semaine — sensiblement, et quelquefois deux fois par semaine — des en arménien, ou un théâtrales représentations ou des conférences scientibal, ou un concert, Les Arméniens et politiques. fiques, littéraires, dans leur maintenant huit journaux publient un journal langue lesquels quotidien. parmi
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une d'inune association de médecins, une association génieurs techniques, artistique, et artistique, une littéraire une association des dames arméniennes, trois troupes association un disdeux associations théâtrales, sportives, et les infirmes, une pour les malades pensaire une société pour l'aide société de bienfaisance, une association des aux étudiants nécessiteux, salles de lecture, étudiants arméniens, plusieurs une société d'éclaideux choeurs, une fanfare, reurs, la société de la Croix Rouge, etc.. En outre, c'est à Paris que réside le Conseil des Arméniens central de l'Instruction d'Europe. A Paris se trouve maintenant le également le plus d'intellectuels et important groupe d'artistes arméniens qui, formés avec nos méfont le plus grand à . thodes honneur latines, leur patrie adoptive. Il existe
A LA COMMUNAUTÉ ARMÉNIENNE les de la capitale, De la part des Arméniens des Arméont été rendus par l'Union honneurs moment niens de Roumanie qui, du premier de notre hôte diss'est occupée de l'installation
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tingué et a fait tout le possible pour que son séjour dans la capitale soit agréable. Le lendemain même de son arrivée, M. le Macler a visité l'Eglise; il fut salué professeur au nom de l'Administration des biens de l'Eglise avec par M. Etienne Aslan et eut une entrevue S. G. l'évêque d'EtchHusig qu'il connaissait miadzin. Il s'intéressa aux vieilles inscriptions et examina les antiquités de'l'Eglise qu'elle possède. Les trois M. le Professeur suivants, jours se docuMacler travailla avec M. V. Mestugean, mentant sur quelques le passé faits concernant des colonies arméniennes de Roumanie. M. H.-D. Siruni, notre collaborateur, a mis à la de l'illustre savant les copies de disposition et manuscrits arméniens quelques inscriptions trouvés à Botosani et à Gherla. la première Dimanche, conférence, après M. Macler a été invité à déjeuner chez Mme et M. A. Manisalian, de l'Union des Arprésident méniens de Roumanie. M. Macler a été de plus invité chez M. K. MaM. A. Baronian et Mme Aznavorian, nisalian, du Comité scolaire. présidente L'Union des Arméniens a organisé aussi des TROISCONFÉRENCES SURL'ARMÉNIB 15*
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
Gib, au parc Carepas intimes au Monte-Carlo, rol, etc.. Le soir du mercredi 25 juin, l'Union des ArméMacler un banniens a offert à M. le professeur dans le jardin avenue Chateaubriand, quet Kisseleff. Au Champagne, le premier toast a été porté de l'Union des président par M. A. Manisalian, la biende Roumanie Arméniens qui a souhaité venue à l'illustre invité de la part de toutes les communautés arméniennes de Roumanie. « Vous venez chez nous, dit M. Manisalian, de la noble France, flambeau lumineux du monde entier, vous qui avez aimé le destin de notre peuple, pour sa gloire passée et ses efforts de vous qui, pendant de longues années, demain, avez exploré l'âme de ce peuple martyr, pour a pu donce peuple persécuté prouver comment et comner son modeste tribut à la civilisation ment il a pu devenir un élément de progrès toutes les fois qu'il trouvait une pierre pour en et un instant poser sa tête pour respirer liberté ». sa En terminant, a exprimé M. Manisalian reconnaissance pour les études faites par l'émien nent professeur en Pologne, en Hollande,
EXTRAITS DE LA PRESSE
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études' se rapportant au passé des Espagne, Arméniens dans ces différents pays ainsi que oeuvre qu'a réalisée pour la vaste et grandiose M. le professeur Macler par un travail assidu de trente années. Le deuxième toast a été porté par M. G. Mihaide l'administration des biens de lescu, président de Bucarest arménienne l'Eglise qui a salué l'hôte illustre au nom de cette communauté. Il a levé son verre en l'honneur de S. M. le roi et de l'invité Ferdinand et pour l'agrandissement de la Roumanie. Le toast a été accueilli par des applaudissements et des ovations. M. A. Tomassian a porté un toast de la part de l'Union et de la jeupour la culture physique nesse arménienne. a célébré l'oeuvre impéLe poète Colangian rissable de M. le professeur Macler et a fait hommes de France l'éloge des grands qui se sont de la cause arménienne tels occupés G. ClemenAnatole Pierre Guillard, France, ceau, etc. M. H. Dj. Siruni a parlé au nom des écrivains la reconnaissance des arméniens, exprimant intellectuels pour son pour l'émment professeur,
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
tant d'inestimables embrassant oeuvre géante, trésors de la vie du peuple arménien. a porté un toast à M. le M. V. Mestugean de qui on doit la Iorga, à l'initiative professeur de M. le professeur Macler. série de conférences M. Iorga, cette gloire, non seulement de la Roumanie, mais de l'humanité entière, est un grand ami des Arméniens et, comme grand historien il a étudié de près, lui aussi dans ses nombreuses Il a relevé oeuvres, le passé du peuple arménien. Wilson, que c'est un historien aussi, le président Il a conde l'Arménie. qui a tracé les frontières clu que tous les hommes véritablement grands ont sympathisé avec les Arméniens et ont été favorables à leur cause. Il a rendu hommage à la mémoire de Tache Ionescu et du professeur Toma Ionescu, de V.-G. Mortun et a remercié MM. Murnu et A. Ghemale pour les sentiments à l'occasion arménophiles qu'ils ont exprimés de M. le professeur Macler. des conférences Cette série de toasts a été close par M. le proM. le professeur fesseur Macler qui a remercié en ce beau pays et a Iorga de son invitation exprimé ses remerciements pour la sympathique réception qui lui a été faite. Le banquet s'est terminé au milieu d'une cor-
EXTRAITS DE LA PRESSE dialité minuit.
et d'une
animation
sans
pareilles,
265 après-
LA DEUXIÈME GONFÉRFNCF DE M. LE PROFESSEUR MACLER. Considérations
sur
l'arl
arménien.
M. le professeur Frédéric a fait le Macler jeudi 30 juin, à 9 heures du soir, sa deuxième dont le titre est le suivant : Consiconférence, sur l'art arménien. dérations Cette conférence a été présidée par M. le professeur Iorga qui a ouvert la séance par une belle allocution dans laquelle il a relevé les mérites du conférencier. distingué Le texte du résumé de la conférence est le même que celui de l'Extrait du Neamul Românesc du 3 juillet 1927, page 196, et traduit aux pages 199 sqq. le paragraphe suivant est intercalé Seulement, entre les paragraphes 4 et 5 de l'extrait précité : Ces projections les glorieuses représentent ruines d'Ani, capitale des Bagratides, la cathéles restes d'ornedrale, les églises, le tribunal, mentation et de sculptures artistiques qui
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
montrent
l'état
florissant
de l'architecture
ar-
ménienne. M. le professeur Iorga, revenu de sa campagne a invité son hôte à déjeuner à Capsa, électorale, le vendredi 2 juillet. Etaient invités MM. Dr Angelescu, également ministre de l'Instruction M. le profespublique, seur Murnu, Luciu, Chemale, ainsi que etc., S.-G. l'évêque arméHusig, de la communauté nienne et A. Manisalian, de l'Union président des Arméniens de Roumanie et V. Mestugean. Les convives ont réservé l'accueil le plus à M. le professeur Macler. On n'a sympathique pas porté de toasts.
LA DERNIÈRE CONFÉRENCE DE M. LE PROFESSEUR MACLER. Au sujet du ïhéâlre arménien. Même texte que celui de l'extrait de Dimineala, p. 212, traduit pages 215 sqq.
ALLOCUTION DE
M.
LE
PROFESSEUR
MURNU
M. le professeur G. Murnu, membre de l'Académie Roumaine, cette qui a présidé également dernière a prononcé l'allocution conférence, suivante : Mesdames
et Messieurs,
Par cette leçon, l'illustre M. Macler, professeur, termine la série de conférences dans lesquelles, par une science et une magistrale compétence, il a synthétisé, comme en une grande pièce d'enles plus indispensables semble, les connaissances et substantielles, nous donnant une image des et des plus claires sur le pays et le plus vivantes sur tout ce qui a été et est ce peuple arménien, et son peuple illustre par son passé historique activité et industrielle, intellectuelle, artistique mais malheureux de nos jours, puisqu'il n'a pas encore vu son idéal national comme atteint,
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
couronnement de ses immenses efforts et de ses sacrifices séculaires. M. Macler, grand et dévoué ami de ce peuple, à la suite des qu'il connaît mieux que quiconque longues et solides études qu'il a faites sur lui, a embrassé sa cause nationale avec tout l'enthousiasme et l'élan d'un Français d'élite, et au nom de l'humanité et de la justice, il lutta de toutes ses forces, par la plume et la parole, du monde civilisé en pour gagner les sympathies faveur de cette nation sa noble, aplanissant route vers la réalisation du rêve de ses ancêtres et pour l'aider à prendre dans le concert des cultivés la place d'honneur peuples que lui sa force numérique méritent et ses grandes qualités morales. en tant qu'hommes et en Nous, Roumains, tant sommes aux que Roumains, par l'âme, côtés de ce peuple de martyrs et, avec le grand savant désirons de tout coeur le rétafrançais, blissement d'une tout aussi grande Arménie, nécessaire que la grande Roumanie pour l'équilibre des forces politiques dans l'Orient européen. Notre Institut pour du Sud-Est, dirigé par
l'étude de mon illustre
l'Europe collègue
EXTRAITS DE LA PRESSE
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M. N. Iorga, institut sous les auspices duquel on a inauguré ces conférences, remercie M. Macler des lumières qu'il a données à notre public et si suggestives, par ses leçons si instructives et l'assure de ses sympathies les plus sincères nationale pour sa belle et généreuse entreprise et scientifique. le nombreux A la fin de la conférence, public et à M. le proa fait une ovation au conférencier a parlé si chaleureusement fesseur G. Murnu,qui en faveur du malheuet avec tant de sympathie reux peuple arménien. De nombreux assistants sont montés sur l'estrade pour serrer la main de M. le professeur a offert à l'illustre conMacler. Mme Sahazizian férencier une belle gerbe de fleurs. M. le professeur Macler a reçu aussi, en cadeau, une jolie de style arménien, très ancienne, de broderie, Mme Aznavorian, une aquarelle peinte par Mue Diruhi, de la part de M. S. Stefânescu, la collection entière de la revue Araral et des vues de la part de de quelques églises historiques M. Mestugean. Après la conférence ner a été offert au
un déjeude dimanche, à conférencier, distingué
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
de jeunes admirateurs; Flora, par un groupe après quoi il fut conduit dans le bois de PanteErivan donna une limon où le cercle artistique fête champêtre. Le lendemain lundi, M. le professeur Macler a fait plusieurs visites. Mme A. Manée Aburel, a donné à M. le profesnissalian, très précieuses sur seur Macler des informations les Goilavescu, les Giomâgescu, les Misirescu, et illustres et anciennes familles de Mold'autres davie, ainsi que des photographies qui seront dans le travail reproduites que prépare le professeur français. Une visite
à Gherla.
Mardi soir, M. le professeur Macler, accomdirecteur de notre pagné de M. V. Mestugean, revue, est parti à Gherla, petite ville qui, fondée au xvne siècle par des Arméniens, présente une grande importance pour ceux qui s'occupent arméde l'étude de l'histoire des émigrations niennes en Transylvanie. à l'avance, les habitants Avertis de Gherla à Cluj, pour rencontrer le visiteur, envoyèrent une délégation, de M. M.-H. Ciocacomposée rian, et Der Mardirosian.
EXTRAITS DE LA PRESSE
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A son arrivée à la gare de Gherla, l'illustre professeur a été salué par une nombreuse délégation ayant à sa tête le curé de l'Eglise arménienne, le Rev. Dr Kapatan Marton. ont été faites par M. MesLes présentations des tugean, après quoi les visiteurs, accompagnés habitants à leur rencontre, venus entrèrent dans la ville, faisant à pied un trajet de quelques où ils ont reçu minutes jusqu'au presbytère l'hospitalité. Arrivés sur la vaste place carrée de la ville, ils ont admiré d'un peu loin la magnifique église arménienne qui s'élève sur cette place. Cette église, une des plus grandioses de Transylvanie, possède une façade haute de 45 mètres; et la nuit, l'église se voit à une grande distance, les quatre horloges du clocher sont éclairées à l'électricité. de cette Disons dès maintenant que l'intérieur église, dont le patron est saint Grégoire, corresà l'extérieur et même le en grandeur pond, des grandes dépasse. Les voûtes ont la hauteur Les autels, cathédrales occidentales. grands, au nombre de trois, sont de marbre imposants, bleuté. La chaire, avec son élégant petit escade l'autel cenlier,est une oeuvre d'art. Autour
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
de spatieuses tral, se trouvent galeries avec des bas où la lumière tombe en torrent. Les vitraux voûtes sont soutenues par de grandes colonnes Dans la chappelle de droite en marbre verdâtre. de Rude l'Eglise se trouve le célèbre tableau bens La descente de croix, donnée à l'église par l'empereur François Ier. Bien qu'ayant passé la nuit en voyage, l'inà peine arrivé dans l'antifatigable professeur, a commencé ses investigations que Arménopolis, faisant une courte visite de reconscientifiques, naissance à l'église où sont gardés 52 manuscrits à la chapelle où se trouve La descente anciens, de croix, de Rubens et au Musée arménien. Le soir, sur la terrasse du Casino, on a offert à M. Macler un repas copieux, présidé par le Parmi les convives se troupère dr. Kapatan. vaient : le père Mékhitariste Mikael, MM. Dr Gustav Papp, Ioachim et Ajan, grand industriel de la Société des commerçants arméprésident de la Banque de Crédit, Onnig neins, directeur H. Ciocarian, G. Der-Mardirosian, Tumaian, Torosian et d'autres. Le lendemain matin, M. le professeur Macler, conduit dont l'amabilité par le père Kapatan, est au-dessus de tout éloge, a visité de nouveau
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la Bibliothèque, les manuscrits, le Musée arménien, la vieille église Solomon, l'Asile arménien de vieillards, où sont conservés un grand nombre de vieux arménien documents, l'Orphelinat et l'Ecole arménienne, se documentant pour le travail qu'il prépare. Le professeur de tout français a été enchanté ce qu'il a vu et du soin avec lequel sont conserau passé vées toutes les choses qui se rapportent de la ville d'Arménopolis, aujourd'hui Gherla, fondée par des réfugiés arméniens. restées jusqu'à présent sur Par les institutions fut florissante dans les pied, on voit combien temps cette petite ville qui, déclarée ville libre et administrée à peu était habitée impériale, Dans près exclusivement par des Arméniens. avec vénération le Musée sont conservés le Charles IV, se rapportant décret de l'empereur à l'achat des vastes terrains où les Arméniens se décrets relaune ville, et d'autres sont construit x tifs aux privilèges spéciaux qui leur furent Notre but n'est certainement accordés. pas de faire, dans le cadre étroit de cet article, la desdes monuments arméniens cription historiques 1. Voyez!'Histoire des Arméniens, vol. II, par V. Mestugean.
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
de Gherla. Mais nous ne pouvons pas négliger le presbytère entouré de jardins de mentionner en fleurs, vaste édifice massif à l'aspect à la foisde monastère et de petit aux salons palais, aux précieuses meublés avec austérité, peintures parmi lesquelles les portraits de l'Evêque Axente Vârzarn, fondateur de la ville de Gherla, et des prêtres qui se sont succédé dans la paroisse au cours d'environ trois siècles depuis la fondation Et le presbytère d'Arménopolis. possède une bibliothèque assez riche, quoique pas à celle du Musée arménien. comparable a offert à chacun Le père Kapatan de ses hôtes une collection des oeuvres de Szongott du Lycée arménien Ghristov, feu le professeur de Gherla, et qui pendant vingt ans, publia la revue Armenia en langue hongroise et quelques autres livres importants. M. le professeur de tout ce Macler, enchanté charmant qu'il trouva qu'il a vu et de l'accueil a dans cette ville connue par son hospitalité, M. le curé Gherla jeudi soir remerciant quitté Dr Kapatan, diligent et de grand ecclésiastique coeur, homme de science lui aussi, ainsi que les tant de symautres amis qui lui ont démontré à La séparation fut des plus cordiales pathie.
EXTRAITS DE LA PRESSE
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la gare de la ville où s'étaient pressés nombreux les habitants de Gherla ainsi que le père Kapatan, MM. Onnig Tumaian, Salgian, Der-Mardirosian et d'autres le distingué pour reconduire professeur.
PRESSE
ARMÉNIENNE
Il est impossible ici les articles de reproduire aux conféen langue arménienne, consacrés, rences et au séjour dont il est question ci-dessus. à en donner la liste bibliograOn se bornera et que aussi complète phique, que possible, voici : — Nor Archalouïs n° du 26 juin (Bucarest), 1927. — Erkir, ankakh n° du lragir (Bucarest), 18 juin 1927. — Erkir n° du 25 juin 1927. (Bucarest), — Erkir n° du 2 juillet 1927. (Bucarest), — Erkir n° du 9 juillet 1927. (Bucarest),
BANQUET
ET
DISCOURS
TKOIS CONFÉRENCES SURL'ARMÉNIB
10
Monsieur
le Professeur,
Au nom de l'Union des Arméniens de Roumade vous souhaiter la biennie, j'ai l'honneur venue au milieu de notre communauté; au nom, de la plus ancienne des colonies armépeut-être, l'hosniennes, qui, depuis des siècles, trouvant à lui comme pitalité dans ce pays, s'est attachée à une seconde patrie, mais qui, néanmoins, est fière de son origine, et dans l'âme de laquelle vit encore quelque chose de l'ancienne patrie. Bienvenue de la part de cette vieille mais touson seulement jours fraîche colonie, dispersée mais encore ici, sur les rives de la Dambovitza, dans les principales villes de la Moldavie, qui furent son premier berceau, les rives du Danube et de la Dobrogea, la Beset jusqu'en Bucovine, sarabie et la Transylvanie, où nos ancêtres eurent leurs propres villes, et où ils travaillèrent assidûment les terres leur pour féconder qu'on avait confiées. Je vous souhaite la bienvenue de la part de
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
cette
vieille colonie, dont vous venez étudier la au monde ses efforts sécuvie, afin de raconter ' laires dans ces notre régions, et nous rappeler glorieuse origine à nous. En effet, vous venez parmi nous, pour faire à nous et au monde, les efforts de connaître, les persécuceux qui partis d'Ararat, fuyant au tion?, se sont abrités ici, pour contribuer progrès du pays, en versant des gouttes de génies de mettre ancestrales sur le sol où ils venaient le pied. Vous
venez de la noble France qui fut le phare du monde entier, vous, qui avez aimé la destinée de notre peuple, pour sa gloire passée et de vous qui, pendant ses efforts de demain, longues années, avez exploré l'âme de ce peuple une race percomment pour prouver martyr, sécutée put donner son modeste tribut à la civielle a pu devenir un éléet comment lisation, une ment de progrès chaque fois qu'elle trouvait pierre pour y reposer sa tête, ou un moment pour respirer librement. au nom de celte communauté, Reconnaissnce dont vous venez explorer le passé, pour relater ce peuple a pu garder encore une fois comment de sa race, au fond de son coeur la vitalité
BANQUET ET DISCOURS
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au service de sa patrie adoptive. et la mettre au nom de nos frères jadis si Reconnaissance en Pologne, en Hollande nombreux et en Escherpagne et dont vous avez été dernièrement cher les traces. en général pour l'oeuvre imReconnaissance mense que vous avez réalisée au cours de quelafin de tracer le rôle du ques dizaines d'années, dans la civilisation. peuple arménien Permettez-moi de lever mon verre à votre dont la vie est le Professeur, santé, monsieur tellement précieuse pour les Arméniens. A. MANISSALIAN. Président de l'Union des Arméniens de la Roumanie.
Monsieur
le Professeur,
la parole au Qu'il me soit permis de prendre nom de la jeunesse. La jeunesse autour arménienne de groupée l'Union de Culture physique est heureuse de pouvoir saluer votre arrivée dans la capitale de la Grande Roumanie où les Arméniens ont toujours TROISCONFÉRENCES SURL'ARMÉNIE 16*
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
trouvé la plus large hospitalité et le plus bienveillant accueil. Elle est d'autant plus heureuse qu'il lui est donné l'occasion rare de pouvoir aujourd'hui de vive voix sa reconnaissance à l'émiexprimer nent savant résultat de qui par ses travaux, rudes et laborieuses recherches dans les domaines de la philologie et de l'histoire, a fait connaître au monde civilisé ce que le peuple arménien a, durant les siècles, fait pour l'oeuvre de la civilisation. On a enfin compris que les Arméniens ne sont un peuple qui n'a eu qu'à souffrir pas seulement des persécutions, à subir des massacres et pour y le sol natal échapper n'a eu qu'à émigrer,quittant et cherchant abri dans d'autres de ses ancêtres pays plus hospitaliers. C'a été le sort cruel qui lui a été réservé,hélas! Je ne veux pas en chercher ici les raisons. On a enfin compris, dis-je, que la nation armétous les nienne malgré toutes^les vicissitudes, sur elle et que l'hismalheurs qui se sont abattus toire ait jamais enregistrés, malgré tout cela elle a apporté sa large contribution à l'oeuvre de la soit dans sa propre patrie soit dans civilisation, les divers pays où le sort a jeté ses fils. Ils ont à la prospérité et culturelle contribué largement
BANQUET ET DISCOURS
283
de ces pays. L'exemple des Armééconomique niens de Roumanie est le plus éclatant. Tout cela vous l'avez si bien exposé, Monsieur le Professeur, dans votre première conférence! Vos conférences à Bucarest sont destinées à faire mieux connaître à nos frères Roumains l'histoire et l'art du peuple arménien, le passé plein de gloire de cette nation si intéressante, comme l'écrivait l'autre jour l'illustre et distinM. le Profesgué savant et ami des Arméniens, seur Iorga. L'initiative de ces conférences lui appartient et je me fais un devoir de lui présenter l'hommage de notre reconnaissance. Monsieur le Professeur, au nom de la jeunesse animée de la plus profonde arménienne, gratitude envers vous et d'admiration envers la les ArméFrance, votre Patrie, où spécialement niens ont puisé la lumière, je lève mon verre à votre santé en criant : Vive le Professeur F. Macler! Vive la France Eternelle! AND. T. THOMASSIAN. 29 juin 1927 Bucarest.
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Très
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
honoré
Monsieur
le Professeur
F. Macler,
d'avant des jours bienheureux où j'ai été invité par notre la guerre générale le très regretté et littérateur, éminent publiciste traduire en français martyr Roupen Zartarian,à exnouvelles de ses meilleures quelques-unes traites de sa Clarté Nocturne. D'autres nouvelles aussi traduites et mon par Archag Tchobanian camarade le vocomplétaient Grigore Essayan lume. Bientôt après, je recevais de Paris ce volume, édition Ernest Leroux, et grande fut ma joie lorsque j'aperçus que le volume de mes traductions était orné de votre préface très élohistorien gieuse. Dès lors votre nom d'éminent et professeur orientaliste français fut très populaire parmi nous, plus encore que le nom du Pierre Quillard qui a donné poète arménophile quelque temps des leçons de littérature française à notre Ecole centrale de Constantinople. L'édition Ernest Leroux et la Librairie Paul Geuthner étaient entièrement dévouées à vos efforts surhumains au monde européen une à présentant de nos meilleurs une les traductions écrivains Je me souviens
BANQUET ET DISCOURS
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: Minas Tchéraz, Zartad'aujourd'hui Roupen rian, Avédis Aharonian, etc., et à vos propres études minutieuses sur les miniatures et manuscrits arméniens, sur l'Evangile d'Etarménien sur les documents chmiadzin, d'Art, sur l'Eglise et sur la Musique arméniens. La profonde érudition que vous avez sur notre sur nos anciens manushistoire, art, musique, crits religieux ou littéraires, vous avez fait servir cette érudition à notre cause d'indépendance et à cet effet plusieurs fois vous avez nationale, fait des conférences à Strasbourg, à Paris et ailleurs. la guerre vous avez Après générale doublé vos efforts sur la même orientation et sur les mêmes sujets concernant un peuple martyrisé et en général euroignoré par la civilisation C'est ainsi que vous avez publié les péenne. oeuvres importantes suivantes : Miniatures arméarménien niennes, L'Evangile d'Elchmiadzin, Documents d'Art arméniens, Autour de t'Arménie, La musique arménienne arménienne, L'Eglise Nouvelle mosaïque orientale, etc. A part ces oeuvres qui vous classent parmi les érudits les plus renommés de la France et dont doit être glorifiée certes la littérature frande M. Açaise, vous avez fondé, en compagnie
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TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
semestriel orientaliste La Revue Meillet, l'organe en soutenant des Etudes arméniennes, ainsi punotre cause nationale. bliquement La science et la conscience sont unies sous votre féconde au plume pour faire connaître monde entier la valeur objective et la puissante vitalité de la nation arménienne. Votre regard de profond érudit patient, en pénétrant impartial dans les plis et les replis de notre histoire des et modernes, anciens a mis en relief la temps haute valeur inconnue de l'âme arménienne, soit d'un chant populaire, soit par par la découverte un manuscrit sous la poussière oublié séculaire. avec mes compatriotes Aussi, ai-je l'honneur, et avec tous les honorables convives de cette l'érudit table, de saluer en vous non seulement bien connu mais aussi et surtout l'ardent humaa fait retentir nitaire qui, inlassablement, partout la voix de la justice,le droit et les mérites d'un torturé peuple longtemps par la diplomatie. Gloire et honneur à vous! Votre bien-arrivée infiniment! parmi nous nous réjouit Vive la France dont vous êtes l'un des fils les et les plus humanitaires à côté plus généreux
BANQUET ET DISCOURS
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de Jean Jaurès, d'Anatole France, de Clemenceau et de tant d'autres braves Français arménophiles; vive la Roumanie qui nous a hospitalisés bien généreusement et vive aussi notre chère petite Arménie aux plus qui a survécu longs
martyres! EDOUARD COLANGIAN
Jn vous a salué au nom de la colonie arméMoi je vous nienne et au nom de la communauté. saluerai au nom des travailleurs de la littérature arménienne, vous, qui vous êtes consacré surtout aux lettres et à l'art arméniens. Oui, le peuple arménien vous est reconnaissant parce que vous avez été l'un de ceux qui avaient notre race à travers fait connaître à l'étranger avait connu son âme et son esprit. L'Europe l'Arménien par les souffrances et les persécutions le peuqu'il avait endurées. L'Europe regardait mascomme une race chrétienne ple arménien et avait eu sacrée et spoliée par des infidèles ses heures pitié d'elle autant que lui permettaient le nom de loisirs et ses intérêts. On prononçait
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TROIS CONFÉRENCES SUR I,'ARMÉNIE
du peuple arménien pour orner les discours par les tortures endurées par lui, et pour masquer leur convoitise. Tandis que vous, vous avez apà une génération partenu qui a fait connaître l'Arménien non pas comme une race digne de pitié mais comme un peuple qui avait donné son tribut à la civilisation et qui, comme tel, avait sa place bien méritée sous le soleil. Vous avez apà la génération des Langlois, des Carpartenu a regardé rière et des Meillet, laquelle l'Arménien comme une force intellectuelle, qui avait. tracé un trait lumineux derrière soi, et qui avait été et qui allait devenir le pionner de l'Occident dans l'Orient, et la torche de l'Orient vers l'Europe. Et surtout c'est la littérature arménienne qui est fière de vous, parce que vous avez été l'un des rares étrangers qui ne se soit pas contenté la langue et l'histoire arméniennes, d'explorer avec la curiosité d'un gavant, mais surtout vous et avez cherché la beauté de l'âme arménienne vous l'avez exposée aux étrangers. Vous appartenez à la génération de Nicolas Marr qui a cherché et trouvé des vestiges d'art dans les ruines de de Strzygovski l'Arménie, qui a prouvé l'originalité
du style arménien
à la science
sceptique,
BANQUET ET DISCOURS
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et enfin de Valéry Brussov qui a mis en lumière les trésors immortels de la poésie arménienne. Je vous salue au nom de la beauté universelle, au nom de laquelle vous vous êtes approché de notre race, et laquelle constitue le lien éternel et entre les siècles et les peuples. intangible H.
Au
nom
D. SIROUNI
de la communauté arménienne de Bucarest, professeur je tiens à faire à l'illustre Macler les plus chaleureux voeux de bienvenue chez nous. A cette occasion je tiens à relever que si le a souffert peuple arménien jadis les' massacres les plus terribles, de la part de ses oppresseurs, des peuples aujourd'hui, grâce à la bienveillance chez lesquels ils se sont réfugiés, ils sont reçus et considérés comme des bons citoyens; d'ailleurs, le peuple arménien, laborieux et honnête, a su être toujours soumis et dévoué au pays dans lequel il vit. En levant cette coupe à la santé de l'illustre Tnois coNFÉnENCES 17 Sun L'ARMÉNIE
290
TROIS CONFÉRENCES SUR L'ARMÉNIE
professeur Créateur, Ferdinand
de prier le bon Macler, permettez-moi qu'il donne la santé à notre Roi aimé et à toute sa dynastie. Vive la France! Vive la Roumanie! GAVRIL MIHAILESCU
TABLE
DES
ILLUSTRATIONS
Pages FIG.
1. Mosquée au sommet du Mokattam, Le Caire — 2. Broderie arménienne ancienne.... — 3. Broderie arménienne ancienne. Le Christ et les quatre évangélistes. . — 4. Broderie arménienne ancienne. Croix. — 5. Broderies arméniennes anciennes. La Salutation —• 6. Dentelles arméniennes — 7. Dentelles arméniennes — 8. Dentelle arménienne — 9. L'église arménienne de Bucarest. . . — 10. Le R. P. Komitas — 11. Le . musicien, M. Rouben (Roupen) — 12. Gabriel dans son jarSandoukiants, din — 13. Les « Pépo » péchant dans la Koura . — 14. Les «Pépo » à l'enterrement de Gabriel Sandoukiants — 15. Gabriel Sandoukiants sur son lit de mort
49 67 67 68 68 68 68 68 88 102 105 111 118 123 124
TABLE
DES
MATIÈRES
Pages 7
AVANT-PROPOS I. — L'épopée arménienne II. — Autour de l'art arménien III. — A propos du théâtre arménien.
9 60 108
....
157
BIBLIOGRAPHIE PIÈCES
LIMINAIRES .
167
. '.' . . . . I-*.;' . i.. .. i X. i > / I TABLE DES ILLUSTRATIONS./ .' .;• ., % ;... ; . . TABLE DES MATIÈRES . VVfV-..,.,. .-^ . / . . .
277
Extraits Banquet
de la Presse roumafà'efet-arménienne et discours
291 292
—Conférences faites àBucarest. MACLER.
PI.I
FlG. 1.— au sommet du Le de RTalbot-Kelly, une 1907, Mosquée Mokattam, Caire, d'après aquarelle Nubar (Collection Pacha, Paris). Boghos
-s^ SS'TfiWSS誰,
FlG. 2. — Broderiearménienneancienne. (CollectionS. Sevadjian,Paris).
FIG'sJ-
W' fit Broderiearménienneanciermè.Tzès et le Christen croix. quatreévangélistes (CollectionS. Sevadjian,Paris.)
; ---nsmm-x^-
III PI.
ancienne. arménienne FlG. 4.— Broderie S.Sevadjian, Paris). (Collection
Salutati La arméniennes. Broderies 5.— FlG. S.Sevadjian, Paris) (Collection
.iBtraflan -,7.-.-
PIIV
— Dentelle arménienne. FlG. 8. FlG. 6.—Dentelles arméniennes. '.Collection Macler, Marg. Paris).
me Bucarest). deMAznavorian, (Collection
,r"^^?p?sr ^x ïsin'xmz ^3§2""7 "'E^'---'^S^^ÏÏÏS3?ÏSV'WÏ2
PI. V
FlC. 7.— Dentelles arméniennes. Sim. Paris.) (Collection Macler,
PI. VI
HG.9.
Je Bucarest^~d'après unephotographie duDr GustavePapp. L'Eglisearménienne
PLVII
—Le de FlG. 10. maître R.P.Komilas. chapelle àElchmiadzin.
—M. 11. FlG (Rouben.. Roupen
.--_W ^ ,^_;L..j
PI. VIII
FlG. 12. — GabrielSandoukianlsdanssonjardin.
FlG. 13. — « Pépo» péchantdans la Koara.
PI. IX
FlG. 14. — Les« Pépo' à l'enterrementde GabrielSandoukiantz.
FlG. 15. — GabrielSandou\iântzsur son lit demort.
IMPRIMERIE FLOCH— 13-12-192'J MA.YENNE,
LIBRAIRIE
ORIENTALISTE
PAUL GEUTHNER
DU
GUIMET
ANNALES
MUSÉE
DE VULGARISATION BIBLIOTHEQUE TOMES XXXVI : Conférences faites au Musée Guimet en 1911, fig., . 20 fr. 291pp., in-12, 1912 L. deMillouê,Anthropomorphisme et zoomorphisme. —H. Cordier, Lao Tseu.—R. Cagnat,Naufragesd'objets d'art dans l'antiquité.— Gobletd'Alpiella,Histoirede la sciencedes religions.•—S. Lévi,Los éludesorientales: leursleçons,leursrésultats.•—J. Baeol,L'art tibétain. —D. Menant,Sacerdocezoroastrienà Nausari. XXXVII : Conférences faites au Musée Guimet en 1912, nombr. fig., 293 pp., in-12, 1912. ....... Epuisé A. Moret,Mystèreségyptiens.— Dr. Capilan,Excursionaux villes mortesdu Yucatan.— Seymourde.Ricci,Les contespopulaireségyptienset la littérature hébraïque.— Ph. Berger,Lesruines. XXXVIII : Conférences faites au Musée Guimet en 1912, fig. et planches, 273 pp., in-12, 1912 Epuisé Eduens.— P. Alphandéry, Espérandieu,Le cultedessourceschezles— S' Françoisd'Assiseet l'épopéefrançaise. S. Reinach,Samson.—• R. Cagnat,GommentlesRomainsse rendirentmaîtresdetoute l'Afrique du Nord.— A. Moret,La Royautédansl'Egypte primitive: Totemet Pharaon.— A. Foucher,L'originegrecquede l'imagede Bouddha. XXXIX : Conférencesfaites au MuséeGuimet en 1912, nombr. Epuisé planchosj 277 pp., in-12, 1913 R. Dussaud,Lescrimesd'Athalie(histoireet légende).— R. Cagnat, Visiteà quelquesvilles africainesrécemmentfouillées.— R. Pichon, Le rôle religieuxdes femmesdans l'ancienneRome.— J. Toulain, Lescavernessacréesdansl'antiquitégrecque.— D. Menant,Pèlerinage aux templesjainas de Girnar. —•A. Moret, Sanctuairesde l'ancien empireégyptien. XL : Conférences faites au Musée Guimet en 1913, nombr. 20 fr. pi. et fig., carte, 388 pp., in-12, 1914. .' V. Gohubcv,Peinturesbouddhiquesaux Indes.— Cap. de Tressan, Influencesétrangèresdansla formationde l'art japonais.— J. Hackin, Illustrationstibétaines d'une légendedu Divyâvadàna.— S. Lêvi, Lesgrandshommesdansl'histoirede l'Inde. — F. Nau, L'expansion nestorienneen Asie. XLI : Conférences faites au Musée Guimet en 1914, nombr. 20 fr. planches, 203 pp., in-12, 1916. R. Cagnat, Temples et sanctuaires romains. •—R. Dussaud, La grandedéessechypriote.— A. Moret, Les statues d'Egypte «imagos vivantes». — V. Goloubev,Le Kaïlàsa d'Ellora. —R. Petrucci,Les peinturesbouddhiquesde Touen-Houang(missionStein).— IL Cordier, La qnesliondesrites chinois.— E. Pallier, Les originesdé la caricature dans l'antiquité.
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ORIENTALISTE
PAUL GEUTHNER
XLII : A. Liif.it BF. Cambodge : fêles civiles et religieuses, 30 fr. 13 planches, 661 pp., in-12, 1917 de Sisowalh.— 11: LesfêlesreligieusesréguI : Le couronnement — IV : Lesl'êtesprilières.— III : Lescérémonies religieuses p rivées. >•— VI ; Lescérémovées.— V : Lesl'êteset cérémonies propitiatoires, la prestationdu serment. nies qui accompagnent XLIII : M. ANF.PAKI. Quelques pages de l'histoire religieuse du Japon : conférences faites au Collège de-France, ix et 373 pp., in-12, 1921. 20 fr. — I : LePrince Sltoioku,pionnierde la civilisation INTRODUCTION. — II : Dengi/oet Kobo,organisateursde la hiérarchieboudjaponaise. IV: Nîchiren,le prophète.— dhique.— ÏII : Honeri]esaintpiétiste.-*— V : Introductiondu bouddhismeZen et ses effetssur la civilisation japonaise.— VI : Une phasedu mouvementreligieuxdans le Japon moderne. XLIV : A. MEILLET.Trois conférences sur les Gàthà de l'Avesla faites à l'Université d'Upsal pour la fondation 12 fr. 50 Olaus Pétri, 72 pp., in-12, 1925 — I : Date de Zoroastre.—II : La composition INTRODUCTION. oYs Gâtha.— III : Caractèredela doctrinedes Gâthâ, XLV : P. LEFÈVRE-PONTALTS. Notes sur quelques amulettes siamoises, 2 et 27 planches, 49 pp., in-12, 1926.. . 30 fr. XLVI : F. MACLER. Trois conférencessur l'Arménie fai'cs ;'i l'UniversLé de Strasbourg, 32 pi., 145 pp.. in-12, 1927. 30 fr. — CH.I :À proposdel'Eglisearménienne.—CH.11; AVANT-PROPOS. En margede l'Eglisearménienne.— CH.III : Arménieet Civilisation. — Tahicdes illustrations.— TABI.ES DESMATIÈRE*;. XLVII : Pu. STFRN.Le Bayon d'Angkor et l'évolu'ion de Part, khmer, étude et discussionde la chronologie des Monuments khniers, 22 pi., xn et 217 pp., in-12,1927. 40 fr. — Préambule: l'Idée; doutesconcernai!L AVANT-PROPOS. la datedu noussommesarrivésà douterde Bayon.— Voiedétournée par laquelle 'a datedu Bayon.^—Ondoitse demandersur quellebasereposela date attribuéeau Bayon.— Idéepermettantà la foisderésoudre,la conlradietionposéepar la sculptureet la difficultésoulevéepar les deuxinsconfirmerouinfirmerl'hypothèse criptions.— Examende ce quipeut: d'unedate tardivedu Bayon.— Unechronologienouvelledes monumentsd'Angkorapparaît. Des Monumentsautres,que ceux d'Angkor se situent dans cette chronologie.— Le développement, des wniifs d'architectureot de sculptured'aprèsla nouvelle'chronologie — Etude de l'évolutiondes motifsd'architecture,.' — Etudeproposée. de l'évolutiondesmotifsde sculpture.— Objectionsà noirethèse.— Conclusion,— Table des planches. *""S-î-i, XLVIII : Le MuséeGuimet (1918-1927),16 pi.. 146pp., in-12 3927 20 fr; .....;... 1MIRIMERIE FLOLH. MAYENNE,